Language of document : ECLI:EU:T:2012:432

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

18 septembre 2012 (*)

 « Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative BÜRGER – Marque communautaire verbale antérieure Bürgerbräu – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 » 

Dans l’affaire T‑460/11,

Scandic Distilleries SA, établie à Bihor (Roumanie), représentée par Me Á. László, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Bürgerbräu, August Röhm & Söhne KG, établie à Bad Reichenhall (Allemagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 25 mai 2011 (affaire R 1962/2010-2), relative à une procédure d’opposition entre Bürgerbräu, August Röhm & Söhne KG et Scandic Distilleries SA,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur) et M. A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 août 2011,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 9 février 2012,

vu la décision du 22 mars 2012 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 juin 2009, la requérante, Scandic Distilleries SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 32 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 32 : « Bières » ;

–        classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2009/035, du 14 septembre 2009.

5        Le 5 octobre 2009, Bürgerbräu, August Röhm & Söhne KG a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009 à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque communautaire verbale antérieure Bürgerbräu, déposée le 8 juillet 1999 et enregistrée le 9 octobre 2000 sous le numéro 1234061, désignant les produits et les services relevant des classes 21, 32 et 42 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 21 : « Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine (ni en métaux précieux ni en plaqué) ; verrerie, porcelaine et faïence (comprises dans la classe 21) » ;

–        classe 32 : « Bière ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons » ;

–        classe 42 : « Restauration (alimentation) ; hébergement temporaire ; conseils et planification pour la conception et la construction ; aménagement horticole et paysager ; expertises techniques et programmation pour ordinateurs ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        Par décision du 10 août 2010, la division d’opposition a accueilli l’opposition en ce qui concerne les produits visés par la demande de marque relevant de la classe 32, au motif qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public visé, et l’a rejetée en ce qui concerne les services visés par ladite demande relevant de la classe 35, au motif qu’ils étaient différents des produits et des services couverts par la marque antérieure.

9        Le 8 octobre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 25 mai 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Cette dernière a, d’abord, considéré, au point 13 de la décision attaquée, que le territoire pertinent était celui de l’Union européenne et que le consommateur visé était le consommateur moyen des produits concernés, à savoir les bières, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. La chambre de recours a, ensuite, au point 16 de la décision attaquée, entériné la décision de la division d’opposition, en ce que cette dernière avait considéré que les produits concernés par la demande de marque et par la marque antérieure compris dans la classe 32 étaient identiques. Enfin, eu égard aux similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit, la chambre de recours a considéré, au point 33 de la décision attaquée, que la division d’opposition avait conclu à juste titre à l’existence d’un risque de confusion.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        réformer la décision attaquée et pourvoir à l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Sur la recevabilité

 Sur le premier chef de conclusions de la requête

13      Il y a lieu de constater que, par sa demande en réformation de la décision attaquée aux fins de l’enregistrement de la marque demandée, et ainsi qu’il ressort clairement de ses écritures, la requérante a entendu demander, en substance, par son moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, l’annulation de la décision attaquée [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 septembre 2005, Cargo Partner/OHMI (CARGO PARTNER), T‑123/04, Rec. p. II‑3979, point 34, et du 10 décembre 2008, Vitro Corporativo/OHMI – VKR Holding (Vitro), T‑412/06, non publié au Recueil, point 16].

14      Dans la seconde partie de son premier chef de conclusions, la requérante demande, par ailleurs, au Tribunal de pourvoir à l’enregistrement de la marque demandée. Force est de constater que la requérante sollicite, en substance, qu’il soit fait injonction à l’OHMI d’enregistrer ladite marque pour les produits concernés [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 21, et du 9 mars 2005, Osotspa/OHMI – Distribution & Marketing (Hai), T‑33/03, Rec. p. II‑763, point 14].

15      À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009, l’OHMI est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge de l’Union. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser une injonction à l’OHMI. Il incombe, en effet, à ce dernier de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du Tribunal. Les conclusions de la requérante visant à pourvoir à l’enregistrement de la marque demandée sont donc irrecevables (voir, en ce sens, arrêts BUDMEN, point 14 supra, point 22, et Hai, point 14 supra, point 15).

 Sur la recevabilité de certains arguments

16      En ce qui concerne les arguments auxquels la requérante renvoie, au point 8 de sa requête, et qu’elle a présentés au cours de la procédure devant l’OHMI, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autre information à l’appui [voir arrêt du Tribunal du 21 avril 2004, Concept/OHMI (ECA), T‑127/02, Rec. p. II‑1113, point 17, et la jurisprudence citée].

17      Il convient de rappeler que, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu de la disposition susvisée, doivent figurer dans la requête [arrêts du Tribunal ECA point 16 supra, point 18 ; du 14 septembre 2004, Applied Molecular Evolution/OHMI (APPLIED MOLECULAR EVOLUTION), T‑183/03, Rec. p. II‑3113, point 11, et du 19 octobre 2006, Bitburger Brauerei /OHMI – Anheuser-Busch (BUD, American Bud et Anheuser Busch Bud), T‑350/04 à T‑352/04, Rec. p. II‑4255, point 33].

18      En l’espèce, la requérante s’est contentée d’indiquer dans sa requête (point 8) :

« La partie requérante confirme tous les arguments présentés au cours de la procédure devant la partie défenderesse et demande au Tribunal de les prendre en compte également dans la présente procédure. »

19      Ainsi, la requérante n’identifie ni les points spécifiques de sa requête qu’elle souhaite compléter par ce renvoi ni les annexes où seraient exposés ces éventuels arguments.

20      Dans ces circonstances, le Tribunal n’a pas à rechercher dans les annexes les arguments auxquels la requérante pourrait faire référence ni à les examiner, de tels arguments étant irrecevables.

 Sur le fond

21      Dans le cadre de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

22      La requérante fait valoir, en substance, que le degré de similitude entre les signes en conflit est tellement faible qu’il ne saurait exister de risque de confusion entre eux, ce y compris en ce qui concerne des produits identiques ou similaires.

23      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i), dudit règlement, il convient d’entendre par marques antérieures les marques communautaires dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

24      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement [arrêts du Tribunal du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié au Recueil, point 70, et du 31 janvier 2012, Cervecería Modelo/OHMI – Plataforma Continental (LA VICTORIA DE MEXICO), T‑205/10, non publié au Recueil, point 23 ; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 17].

25      En outre, le risque de confusion dans l’esprit du public doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (arrêt CAPIO, point 24 supra, point 71 ; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 22 ; Canon, point 24 supra, point 16, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 24 supra, point 18).

26      Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333, point 48 ; arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 25 ; voir également, par analogie, arrêt Canon, point 24 supra, point 17]. L’interdépendance des facteurs trouve son expression au considérant 8 du règlement n° 207/2009, selon lequel il y a lieu d’interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion, dont l’appréciation dépend de nombreux facteurs, notamment, de la connaissance de la marque sur le marché, de l’association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, du degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou les services désignés (voir arrêt CAPIO, point 24 supra, point 72, et la jurisprudence citée).

27      Par ailleurs, l’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. En effet, il ressort du libellé de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, aux termes duquel « il existe un risque de confusion dans l’esprit du public », que la perception des marques qu’a le consommateur moyen du type de produit ou de service concernés joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion. Or, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêt CAPIO, point 24 supra, point 73 ; voir également, par analogie, arrêt SABEL, point 25 supra, point 23).

28      Aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, le consommateur moyen des produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Par ailleurs, il convient de tenir compte du fait que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services concernés [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, point 28, et du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 38 ; voir également, par analogie, arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 24 supra, point 26].

29      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner l’appréciation par la chambre de recours du risque de confusion entre les signes en conflit.

30      En l’espèce, la marque antérieure est une marque communautaire. Dès lors, ainsi que l’a constaté la chambre de recours au point 13 de la décision attaquée sans que cela soit contesté par la requérante, le territoire pertinent est celui de l’Union.

31      Il est par ailleurs constant que le public visé est, ainsi que l’a à juste titre relevé la chambre de recours au point 13 de la décision attaquée, constitué du consommateur moyen des produits concernés, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir, en ce sens, arrêt LA VICTORIA DE MEXICO, point 24 supra, point 32).

32      En premier lieu, en ce qui concerne la similitude des produits concernés, force est de constater que, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, sans être contredite sur ce point par la requérante, les produits de la classe 32 concernés par la demande de marque et par la marque antérieure sont identiques.

33      En deuxième lieu, s’agissant de la similitude des signes en conflit, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a déjà été indiqué au point 27 ci-dessus, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants.

34      Par ailleurs, il a été jugé, d’une part, qu’il y a lieu d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est toutefois que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait être notamment le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir arrêts du Tribunal du 12 novembre 2008, Shaker/OHMI – Limiñana y Botella (Limoncello della Costiera Amalfitana shaker), T‑7/04, Rec. p. II‑3085, point 40, et la jurisprudence citée, et LA VICTORIA DE MEXICO, point 24 supra, point 37].

35      D’autre part, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque (arrêt LA VICTORIA DE MEXICO, point 24 supra, point 38).

36      Les signes qu’il convient de comparer sont les suivants :

Marque antérieure

Marque demandée

Bürgerbräu

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37      Premièrement, sur le plan visuel, il est exact, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, que les divers éléments figuratifs qui composent l’étiquette de la marque demandée, combinant différentes couleurs et incluant des emblèmes de types assortis, sont peu imaginatifs et seront plutôt perçus comme des éléments décoratifs.

38      L’élément dominant de la marque demandée est incontestablement l’élément verbal figurant en caractères majuscules qui se détache, du fait même de sa position et de la taille extrêmement large de ses caractères, de l’ensemble des autres éléments composant cette étiquette. En outre, force est de constater que les autres éléments verbaux de la marque demandée, à savoir « premium pils », « traditional brewed quality » et « original », figurant dans l’étiquette sont subsidiaires et peu distinctifs en ce qui concerne les produits concernés. Par ailleurs, eu égard à la taille des caractères utilisés, lesdits éléments verbaux ne seront pas immédiatement lisibles par le consommateur visé.

39      Ainsi, en raison du fait que l’élément dominant de la marque demandée coïncide avec le mot « bürger » constitué par les six premières lettres de la marque antérieure, il existe un certain degré de similitude visuelle entre les signes en conflit, même si celle-ci doit être considérée comme faible.

40      Par ailleurs, il convient de rappeler que le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81].

41      La requérante prétend, toutefois, en se fondant sur l’arrêt du Tribunal du 13 septembre 2010, Procter & Gamble/OHMI – Prestige Cosmetics (P&G PRESTIGE BEAUTE) (T‑366/07, non publié au Recueil), qu’il existe seulement un très faible degré de similitude visuelle entre les signes en conflit.

42      À cet égard, il suffit de constater que le Tribunal a considéré, aux points 63 à 68 de l’arrêt P&G PRESTIGE BEAUTE, point 41 supra, qu’il n’existait pas de similitude visuelle entre les signes en conflit au motif que l’élément commun auxdits signes, à savoir l’élément « prestige », qui revêtait un caractère élogieux et était dans une certaine mesure descriptif des caractéristiques et de la destination des produits concernés, n’était pas l’élément qui occupait une position plus importante dans la marque demandée, celui-ci étant l’élément « p&g ». Il s’ensuivait que, sur le plan visuel, les éléments les plus importants des signes en conflit ne coïncidaient pas.

43      En l’espèce, en revanche, l’élément dominant de la marque demandée coïncide avec les six premières lettres de la marque verbale antérieure.

44      Par ailleurs, l’argumentation de la requérante tirée de l’arrêt du Tribunal du 28 juin 2005, Canali Ireland/OHMI – Canal Jean (CANAL JEAN CO. NEW YORK) (T‑301/03, Rec. p. II‑2479), ne saurait non plus être accueillie.

45      En effet, dans ce dernier arrêt, le Tribunal a conclu à l’existence d’une différence visuelle entre le signe verbal CANALI et le signe figuratif CANAL JEAN CO. NEW YORK. Or, il suffit de relever que, dans ce dernier arrêt, les termes « canali » et « canal » n’ont pas été considérés comme identiques et que les autres éléments verbaux de la marque demandée, à savoir « jean », « co. » et « new york », ont été considérés comme attirant également l’attention du consommateur visé (voir les points 49 à 51 dudit arrêt).

46      En l’occurrence, outre que les six lettres constituant le mot « bürger » se retrouvent dans les deux signes en conflit, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 38 ci-dessus, les autres éléments verbaux de la marque demandée, outre qu’ils sont subsidiaires et peu distinctifs en ce qui concerne les produits concernés, ne sont pas immédiatement lisibles. Par ailleurs, les éléments figuratifs ne seront perçus que comme des éléments décoratifs.

47      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la décision attaquée doit être confirmée en ce qui concerne l’analyse de la similitude visuelle entre les signes en conflit.

48      Deuxièmement, sur le plan phonétique, il existe, ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 31 de la décision attaquée, un degré moyen de similitude entre les signes en conflit, eu égard au fait que les consommateurs pertinents auront tendance à ne pas prononcer les éléments verbaux de la marque demandée « premium pils », « traditional brewed quality » et « original » figurant dans l’étiquette pour les raisons mentionnées au point 38 ci-dessus. Par ailleurs, les consommateurs pertinents auront également tendance à ne pas prononcer ces derniers éléments par simple économie de langage, ces derniers étant longs à prononcer et aisément séparables de l’élément dominant de la marque demandée, à savoir le mot « bürger » [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 septembre 2009, Zero Industry/OHMI – zero Germany (zerorh+), T‑400/06, non publié au Recueil, point 58].

49      Il convient donc d’entériner l’appréciation de la chambre de recours concernant la constatation d’un degré moyen de similitude phonétique des signes en conflit, similitude qui n’est, au demeurant, pas expressément contestée par la requérante, dès lors qu’elle n’invoque aucun argument au soutien de sa conclusion, même si elle prétend que la similitude phonétique entre lesdits signes est très faible.

50      Troisièmement, s’agissant de la comparaison conceptuelle, force est de constater, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, que les signes en conflit sont conceptuellement similaires pour le public germanophone dans la mesure où l’élément dominant et le plus distinctif de la marque demandée, à savoir le mot « bürger », ainsi que la première partie de la marque antérieure, à savoir « bürger », qui est la plus distinctive pour ce public, font tous deux référence au même concept de « citoyen ».

51      La requérante prétend toutefois qu’il n’existe pas de similitude conceptuelle pour le public non germanophone de l’Union.

52      À cet égard, il convient de rappeler que, dans le cas où, comme en l’espèce, la marque antérieure invoquée à l’appui d’une opposition est une marque communautaire, l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’exige pas, pour que l’enregistrement de la marque demandée soit refusé, que le risque de confusion existe dans tous les États membres et dans toutes les zones linguistiques de l’Union. En effet, le caractère unitaire de la marque communautaire implique qu’une marque communautaire antérieure est opposable à toute demande d’enregistrement de marque communautaire qui porterait atteinte à la protection de la première marque, ne fût-ce que par rapport à la perception des consommateurs d’une partie du territoire de l’Union (arrêt de la Cour du 18 septembre 2008, Armacell/OHMI, C‑514/06 P, non publié au Recueil, points 56 et 57, et ordonnance de la Cour du 16 septembre 2010, Dominio de la Vega/OHMI, C‑459/09 P, non publiée au Recueil, points 29 et 30).

53      Dès lors, le territoire pertinent étant, ainsi qu’il ressort du point 30 ci-dessus, celui de l’Union, il suffit de rappeler que, dans la partie germanophone de l’Union, le mot « bräu », en ce qu’il fait référence au brassage de la bière, sera perçu, par le consommateur moyen, comme descriptif des produits concernés, en sorte que l’attention dudit consommateur portera particulièrement sur le mot « bürger ».

54      Il s’ensuit que, ainsi que l’a constaté à juste titre la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, il existe une similitude conceptuelle entre les signes en conflit à l’égard d’une partie du public de l’Union, du fait que lesdits signes partagent le mot « bürger » qui a une signification précise en langue allemande.

55      Il y a donc lieu de conclure de l’ensemble de ce qui précède que, du fait de cette similitude conceptuelle et en dépit d’un faible degré de similitude visuelle et d’un degré moyen de similitude phonétique, les signes en conflit sont globalement similaires.

56      En troisième lieu, concernant le risque de confusion, il convient de rappeler qu’il existe un risque de confusion lorsque, cumulativement, le degré de similitude des marques en cause et le degré de similitude des produits ou des services désignés par ces marques sont suffisamment élevés (arrêt MATRATZEN, point 26 supra, point 45).

57      En l’espèce, il a été jugé, au point 32 ci-dessus, que les produits concernés sont identiques et, au point 55 ci-dessus, que les signes en conflit sont globalement similaires.

58      Il s’ensuit que, considérés de façon cumulative, le degré de similitude des signes en conflit et le degré de similitude des produits désignés par ceux-ci sont suffisamment élevés. Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit.

59      Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argument de la requérante selon lequel la marque antérieure aurait un caractère distinctif faible, au motif que le mot « bürgerbräu » serait un nom courant pour des bières et que le caractère distinctif de la marque antérieure serait faible ou dilué en raison de la présence sur le marché d’autres marques de bière contenant le mot « bürgerbräu ».

60      À cet égard, d’une part, il convient de rappeler qu’il n’est, certes, pas entièrement exclu que, dans certains cas, la coexistence de marques antérieures sur le marché puisse éventuellement amoindrir le risque de confusion constaté par les instances de l’OHMI entre deux marques en conflit. Néanmoins, une telle éventualité ne saurait être prise en considération que si, à tout le moins, au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’OHMI, le demandeur de la marque communautaire a dûment démontré que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre les marques antérieures dont il se prévaut et la marque antérieure de l’intervenante qui fonde l’opposition et sous réserve que les marques antérieures en cause et les marques en conflit soient identiques [voir arrêt du Tribunal du 20 janvier 2010, Nokia/OHMI – Medion (LIFE BLOG), T‑460/07, Rec. p. II‑89, point 68, et la jurisprudence citée].

61      Force est toutefois de constater que, en l’espèce, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée, il n’est pas possible de déduire de simples photocopies d’étiquettes de bières différentes, appartenant prétendument à des tiers, le moindre usage de ces signes sur le marché de l’Union, en sorte que la preuve tenant à l’identité même des enregistrements coexistant sur le marché n’a pas été rapportée. Par ailleurs, la requérante n’a, en tout état de cause, nullement démontré que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt LIFE BLOG, point 60 supra, point 69, et la jurisprudence citée). Il s’ensuit que la requérante n’a pas démontré que le caractère distinctif de la marque antérieure était affaibli ou dilué.

62      D’autre part, il convient de rappeler que, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services concernés [arrêts du Tribunal du 22 septembre 2005, Alcon/OHMI – Biofarma (TRAVATAN), T‑130/03, Rec. p. II‑3859, point 78, et du 13 juillet 2011, Inter IKEA Systems/OHMI – Meteor Controls (GLÄNSA), T‑88/10, non publié au Recueil, point 52]. Or, tel est, en tout état de cause, le cas dans la présente espèce.

63      En quatrième lieu, s’agissant de l’argumentation générale de la requérante selon laquelle l’OHMI et les juridictions de l’Union auraient dû prendre en considération les décisions déjà prises antérieurement, il suffit de rappeler que le respect du principe d’égalité de traitement doit se concilier avec le respect, précisément, du principe de légalité. Selon ce dernier principe, nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise dans le cadre d’une autre procédure [arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, points 75 et 76, et arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II‑1927, point 65].

64      En l’espèce, il s’est avéré que la demande d’enregistrement se heurtait au motif de refus énoncé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Il s’ensuit que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer la conclusion à laquelle a abouti la chambre de recours dans la décision attaquée, des décisions antérieures de l’OHMI ou des juridictions de l’Union (voir, en ce sens, arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 63 supra, points 78 et 79).

65      Il y a donc lieu de rejeter le moyen unique de la requérante et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Scandic Distilleries SA est condamnée aux dépens.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 septembre 2012.

Signatures


* langue de procédure : l’anglais.