Language of document : ECLI:EU:T:2013:638

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

11 décembre 2013(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative SUPER GLUE – Marque Benelux verbale antérieure SUPERGLUE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Caractère distinctif de la marque antérieure – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑591/11,

Przedsiębiorstwo Handlowe Medox Lepiarz Jarosław Lepiarz Alicja sp.j., établie à Jaworzno (Pologne), représentée par Mes M. Konieczyński et I. Kubiec, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Henkel Corp., établie à Gulph Mills, Pennsylvanie (États-Unis), représentée par Mes C. Rohnke et M. Jacob, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 12 septembre 2011 (affaire R 1147/2010-4), relative à une procédure d’opposition entre Henkel Corp. et Przedsiębiorstwo Handlowe Medox Lepiarz Jarosław Lepiarz Alicja sp.j.,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, F. Dehousse et J. Schwarcz (rapporteur), juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 15 novembre 2011,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 17 avril 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 10 avril 2012,

vu la décision du 31 janvier 2012 rejetant la demande de l’intervenante relative au choix de la langue de procédure,

vu la décision du 28 août 2012 autorisant l’intervenante à s’exprimer en allemand lors de l’audience,

à la suite de l’audience du 8 octobre 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 septembre 2008, la requérante, Przedsiębiorstwo Handlowe Medox Lepiarz Jarosław Lepiarz Alicja sp.j., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 1 et 16 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 1 : « Colles autres que pour le papier ou à usage domestique, préparations pour encoller, préparations pour décoller, silicones, résines artificielles à l’état brut » ;

–        classe 16 : « Colles pour le papier ou à usage domestique et leurs emballages compris dans cette classe. »

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 03/2009, du 26 janvier 2009.

5        Le 2 avril 2009, l’intervenante, Henkel Corp., a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009) pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque Benelux verbale SUPERGLUE, déposée et enregistrée le 1er décembre 1981, sous le numéro 377 517, renouvelée jusqu’au 1er décembre 2011 et désignant les produits des classes 1 et 16 correspondant à la description suivante : « Substances adhésives ».

7        L’opposition était fondée sur tous les produits couverts par la marque antérieure.

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009].

9        Par décision du 23 avril 2010, la division d’opposition a accueilli l’opposition pour certains produits de la classe 1 visés par la marque demandée, à savoir les « colles autres que pour le papier ou à usage domestique », les « préparations pour encoller » et les « silicones », ainsi que pour tous les produits de la classe 16 visés par la marque demandée, considérant que les produits précités de la classe 1 étaient semblables à ceux couverts par la marque antérieure et que les produits de la classe 16 étaient identiques à ceux couverts par la marque antérieure. Elle a conclu à l’existence d’un certain degré de similitude entre les produits en litige et elle a estimé que les autres produits de la classe 1 visés par la marque demandée étaient différents de ceux couverts par la marque antérieure. Au vu de leur faible similitude visuelle ainsi que de leur identité phonétique et conceptuelle, la division d’opposition a considéré que les signes en conflit étaient similaires jusqu’à un certain point. Elle a noté que, pour la partie francophone du public pertinent, la marque antérieure disposait d’un faible caractère distinctif, mais que, en prenant en considération les parties du territoire où le mot « glue » ne serait pas compris, le caractère distinctif de cette marque était normal. Elle a également considéré que, dans la marque demandée, l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir était dominant. Au regard de ces éléments ainsi que de l’identité phonétique et conceptuelle, cette dernière existant uniquement pour une partie du public pertinent, la division d’opposition a estimé que les similitudes entre les signes en conflit étaient suffisantes pour compenser les dissemblances, concluant qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit pour une partie du public pertinent.

10      Le 22 juin 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 12 septembre 2011, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a confirmé la décision de la division d’opposition, rejetant ainsi le recours introduit par la requérante (ci-après la « décision attaquée »).

12      Tout d’abord, la chambre de recours a estimé que la division d’opposition avait correctement fondé son appréciation sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, malgré le fait que l’intervenante avait indiqué l’article 8, paragraphe 1, sous a), dudit règlement comme fondement de son opposition, dès lors , d’une part, que ces deux dispositions ne devaient pas être lues comme deux motifs d’opposition différents et, d’autre part, que l’intervenante avait également fait valoir qu’il existait un « grand danger de confusion dans l’esprit du public ».

13      Ensuite, dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a considéré que les produits en litige étaient identiques, les « substances adhésives » couvertes par la marque antérieure constituant une dénomination large incluant les différents produits visés par la marque demandée et les emballages de ces produits étant identiques. S’agissant des signes en conflit, la chambre de recours a souligné que, dans la marque demandée, l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir constituait l’élément dominant, ce qui impliquait une similitude visuelle élevée avec la marque antérieure. De plus, cet élément dominant serait phonétiquement identique à la marque antérieure, les éléments figuratifs ne pouvant influencer la comparaison phonétique, puisqu’ils ne peuvent être prononcés, et les autres mots de la marque demandée, écrits en polonais, étant peu susceptibles d’être prononcés par le public pertinent du Benelux. Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré que, pour la partie du public pertinent comprenant la signification en anglais de l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir, les signes en conflit seraient identiques et que, pour l’autre partie du même public, la comparaison serait neutre. La chambre de recours a relevé le caractère distinctif réduit de la marque antérieure, le terme « superglue » apparaissant comme désignant les produits couverts par cette marque et comme décrivant une colle de qualité exceptionnelle. Elle a également relevé que l’intervenante n’avait pas réussi à prouver le caractère distinctif accru de la marque antérieure. Au regard de l’identité des produits en litige, de la similitude visuelle élevée et de l’identité phonétique des signes en conflit, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion malgré le caractère distinctif réduit de la marque antérieur).

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, y compris les frais de représentation.

15      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      La requérante soulève trois moyens à l’appui du recours. Le premier moyen est tiré du caractère insuffisamment distinctif de la marque antérieure. Le second moyen est tiré de l’absence de similitude visuelle et phonétique entre les marques en conflit. Le troisième moyen est tiré de la contradiction entre la décision attaquée et la décision rendue dans une affaire opposant les mêmes parties au sujet de la marque communautaires KLEJ BŁYSKAWICZNY CYJANOAKRYLOWY SUPER GLUE. Au regard de l’ensemble des arguments soulevés, il convient de constater que, en substance, la requérante conteste l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

17      Tout d’abord, il y a lieu de statuer sur une exception d’irrecevabilité soulevée par l’intervenante.

 Sur la recevabilité du recours

18      L’intervenante soutient que, en méconnaissance des dispositions de l’article 44, paragraphe 1, sous b), du règlement de procédure du Tribunal, la requête ne contient pas la désignation de la partie contre laquelle elle est formée. Partant, le recours serait irrecevable, le corrigendum rectifiant cette lacune ayant été, au surplus, déposé en dehors du délai de recours.

19      Interrogés par le Tribunal par mesure d’organisation de la procédure, tant la requérante que l’OHMI considèrent que le recours doit être déclaré recevable, puisque la désignation du défendeur ressort clairement du contenu de la requête.

20      Selon la jurisprudence, si la requête contient des éléments qui permettent d’identifier sans ambiguïté la partie à l’encontre de laquelle la requête est formée, telle la désignation de l’acte attaqué et de son auteur, il convient de considérer l’auteur de l’acte attaqué comme partie défenderesse, bien qu’il ne soit pas évoqué dans la partie introductive de la requête (ordonnance du Tribunal du 16 octobre 2006, Aisne et Nature/Commission, T‑173/06, non publiée au Recueil, point 17 ; voir également, en ce sens et par analogie, ordonnance de la Cour du 3 juillet 1986, Commission/BEI, 85/86, Rec. p. 2215, point 6).

21      En l’espèce, si les termes introductifs de la requête mentionnent l’intervenante comme partie défenderesse, ils précisent également que le recours a pour objet l’annulation de la décision de « la quatrième chambre de recours de l’[OHMI] du 12 septembre 2011 dans l’affaire R 1147/1010-4 » et la requête comporte, dans ses développements, des critiques à l’encontre de cette décision.

22      Par suite, le recours est recevable.

 Sur le bien-fondé du recours

23      Ainsi qu’il a été dit au point 16 ci-dessus, l’argumentation de la requérante tend, en substance, à contester l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit. En effet, la requérante soutient, premièrement, que la chambre de recours n’a pas suffisamment tenu compte du faible caractère distinctif de la marque antérieure, notamment eu égard à son caractère descriptif des produits qu’elle couvre, deuxièmement, que la chambre de recours a considéré à tort qu’il y avait une similitude visuelle et phonétique entre les marques en conflit, ne tenant pas compte des éléments figuratifs de la marque demandée, et, troisièmement, que la décision attaquée est contraire à la décision rendue dans l’affaire opposant les mêmes parties au sujet de la marque communautaire KLEJ BŁYSKAWICZNY CYJANOAKRYLOWY SUPER GLUE.

24      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, « en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure ».

25      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 17). Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 et 31, et la jurisprudence citée].

26      Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, entre la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333, point 48, et arrêt GIORGIO BEVERLY HILLS, point 25 supra, point 32).

27      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

28      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

29      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a accueilli l’opposition au motif qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur le public pertinent

30      Il ressort de la décision attaquée, lue en combinaison avec la décision de la division d’opposition mentionnée au point 9 ci-dessus, que le public pertinent est le public du Benelux, composé de consommateurs moyens, normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, dont une partie comprend la combinaison des mots anglais « super » et « glue » ou le mot français « glu ». Dans la requête, la requérante ne conteste pas la définition du public pertinent, telle qu’elle ressort de la décision attaquée.

31      Il y a lieu de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a repris les appréciations de la division d’opposition et a considéré que le public pertinent était le public du Benelux composé de consommateurs moyens.

 Sur l’identité des produits en litige

32      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les produits en litige mentionnés au point 9 ci-dessus étaient identiques, les « substances adhésives », couvertes par la marque antérieure englobant les différents produits revendiqués par la marque demandée dans les classes 1 et 16, et que les « emballages » revendiqués par la marque demandée étaient identiques aux produits couverts par la marque antérieure, puisqu’ils font partie des « colles » revendiquées par la marque demandée et qu’ils sont proposés seulement avec les « colles », ne pouvant ainsi être perçus comme des produits différents de celles-ci. La requérante ne conteste pas l’appréciation portée par la chambre de recours quant à l’identité des produits.

33      Il convient de constater que, au regard des produits visés par les marques en conflit, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que lesdits produits étaient identiques.

 Sur la similitude des signes

34      Tout d’abord, il convient de répondre à l’argument tiré du faible caractère distinctif de la marque antérieure avant d’apprécier la similitude des signes en conflit.

–       Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

35      La requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a retenu l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit après avoir reconnu que la marque antérieure possédait un faible caractère distinctif, eu égard au caractère générique et descriptif de l’élément « superglue ». Or, un tel élément serait dépourvu de caractère distinctif suffisant pour permettre d’identifier les produits en cause comme provenant d’une entreprise déterminée et de les distinguer des produits de même type provenant d’une autre entreprise.

36      Il convient de rappeler que, aux termes du considérant 6 du règlement n° 207/2009, le « droit communautaire des marques ne se substitue [...] pas aux droits des marques des États membres » (arrêt de la Cour du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, non encore publié au Recueil, point 37).

37      Ainsi, la validité d’une marque internationale ou nationale ne peut pas être mise en cause dans le cadre d’une procédure d’enregistrement d’une marque communautaire, mais uniquement dans le cadre d’une procédure de nullité entamée dans l’État membre concerné, le législateur de l’Union européenne ayant instauré un système basé sur la coexistence de la marque communautaire avec les marques nationales (voir arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 38, et la jurisprudence citée).

38      Il découle de la coexistence des marques communautaires et des marques nationales, ainsi que du fait que l’enregistrement de ces dernières ne relève pas de la compétence de l’OHMI, ni leur contrôle juridictionnel de la compétence du Tribunal, que, lors d’une procédure d’opposition à une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, la validité des marques nationales ne peut être mise en cause (arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 40).

39      Dès lors, dans le cadre d’une telle procédure d’opposition, il n’est pas possible non plus de constater, à l’égard d’un signe identique à une marque protégée dans un État membre, un motif absolu de refus, tel que l’absence de caractère distinctif, prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 ainsi qu’à l’article 3, paragraphe 1, sous b), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1) et de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO L 299, p. 25). À cet égard, il convient de constater que la caractérisation d’un signe comme descriptif ou générique équivaut à nier le caractère distinctif de celui-ci (arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 41).

40      Certes, lorsqu’une opposition, fondée sur l’existence d’une marque nationale antérieure, est formée à l’encontre de l’enregistrement d’une marque communautaire, l’OHMI et, par conséquent, le Tribunal, sont tenus de vérifier de quelle manière le public pertinent perçoit le signe identique à cette marque nationale dans la marque dont l’enregistrement est demandé et d’apprécier, le cas échéant, le degré du caractère distinctif de ce signe (arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 42).

41      Cependant, de telles vérifications ne peuvent aboutir à la constatation de l’absence de caractère distinctif d’un signe identique à une marque nationale enregistrée et protégée, dès lors qu’une telle constatation ne serait compatible ni avec la coexistence des marques communautaires et des marques nationales, ni avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, interprété conjointement avec le paragraphe 2, sous a), ii), de ce même article (arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 44).

42      En effet, cette constatation porterait atteinte aux marques nationales identiques à un signe considéré comme étant dépourvu de caractère distinctif, car l’enregistrement d’une telle marque communautaire constituerait une situation susceptible d’éliminer la protection nationale de ces marques. Ainsi, ladite constatation ne respecterait pas le système institué par le règlement n° 207/2009 qui est basé sur la coexistence des marques communautaires et des marques nationales comme l’énonce le considérant 6 de ce règlement, étant donné que la validité d’une marque internationale ou nationale peut être mise en cause en raison de l’absence de caractère distinctif uniquement dans le cadre d’une procédure de nullité entamée dans l’État membre concerné en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous b), des directives 89/104 et 2008/95 (arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 45).

43      Il convient de rappeler que l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009 prévoit explicitement, dans le cadre d’une procédure d’opposition, la prise en considération comme marques antérieures des marques enregistrées dans un État membre ou, pour ce qui concerne la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas, auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle (voir, en ce sens, arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 46).

44      Il s’ensuit que, pour ne pas enfreindre l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il doit être reconnu un certain degré de caractère distinctif d’une marque nationale invoquée à l’appui d’une opposition à l’enregistrement d’une marque communautaire (arrêt Formula One Licensing/OHMI, point 36 supra, point 47).

45      En premier lieu, il convient de rappeler que, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque antérieure possédait un caractère distinctif réduit et non qu’elle était dépourvue de tout caractère distinctif. Dans ce même point, la chambre de recours a également considéré que le terme « superglue » de la marque antérieure, considéré dans son ensemble, était tout au plus la description d’une colle de qualité exceptionnelle et que, partant, il était descriptif des préparations pour encoller, couvertes par ladite marque.

46      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l’élément « superglue » est à lui seul dépourvu de caractère distinctif suffisant pour permettre d’identifier les produits en cause comme provenant d’une entreprise déterminée et de les distinguer des produits de même type provenant d’une autre entreprise. Au vu de tels éléments, la requérante est d’avis que la chambre de recours ne pouvait pas retenir l’existence d’un risque de confusion. Or, l’argument tiré de l’absence de caractère distinctif suffisant pour permettre d’identifier la provenance des produits ne permet pas, à lui seul, de remettre en cause la conclusion à laquelle la chambre de recours est parvenue quant au faible caractère distinctif de la marque antérieure, qui est conforme avec la jurisprudence rappelée aux points 36 à 44 ci-dessus. En effet, force est de constater que la chambre de recours a nécessairement considéré que le caractère distinctif de la marque antérieure, quoique faible, était suffisant pour assurer que celle-ci remplît les fonctions propres d’une marque, à savoir permettre d’identifier la provenance des produits.

47      En troisième lieu, la requérante estime que la chambre de recours a pris une position incohérente et contradictoire au regard des conséquences données à la constatation du caractère descriptif et générique de l’élément « superglue ». Dans le respect des conditions fixées par la jurisprudence rappelée aux points 36 à 44 ci-dessus, il convient de constater que la mention, par la chambre de recours, du caractère descriptif du terme composant la marque antérieure ne lui interdisait aucunement de reconnaître à celle-ci un caractère distinctif réduit, suffisant pour permettre d’assurer les fonctions essentielles d’une marque. Par ailleurs, la requérante ne soutient pas que la chambre de recours aurait dû identifier les éléments de la marque antérieure qui lui conféraient un caractère distinctif, à supposer qu’une telle identification fût nécessaire pour parvenir à la conclusion que cette marque détenait un caractère distinctif réduit.

48      Par suite, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu au faible caractère distinctif de la marque antérieure et a pris en considération un tel caractère dans l’évaluation du risque de confusion entre les marques en conflit.

–       Sur la similitude visuelle

49      La requérante considère que la position de la chambre de recours est infondée quant à la similitude visuelle des marques en conflit, au motif qu’il n’aurait pas été tenu compte des éléments figuratifs de la marque demandée. Elle fait également valoir que la chambre de recours aurait constaté de manière infondée que l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir constituait l’élément dominant de la marque demandée.

50      Aux points 19 et 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que, dans l’impression visuelle donnée par la marque demandée, l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir dominait, puisque les autres éléments de cette marque étaient des éléments figuratifs représentant un conditionnement en blister d’un petit tube de couleur jaune avec un capuchon noir comportant également l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir, le conditionnement étant de couleurs jaune et noire, et comportant plusieurs mots. Selon la chambre de recours, l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir était, par sa taille et sa couleur, prédominant.

51      Ainsi qu’il ressort du point 2 ci-dessus, la marque demandée représente un tube de colle dans un blister de couleurs jaune, noire, blanche et grise, sur lequel sont inscrits plusieurs mots ou ce qui apparaît comme des expressions ou des phrases. Tout comme l’a constaté la chambre de recours, l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir apparaît à deux reprises dans le signe, en lettres majuscules noires et en gros caractères, une de ces deux occurrences comportant des lettres de taille bien plus importante que celles de tous les autres mots présents dans le signe. Enfin, la chambre de recours a noté que le public du Benelux était plus susceptible de se référer à l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir, étant donné que tous les autres mots présents dans le signe étaient écrits en polonais. Au vu de ces différentes constatations, la chambre de recours a conclu que l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir était l’élément dominant de la marque demandée et que, puisqu’il coïncidait avec la marque antérieure, la similitude visuelle globale était élevée.

52      Force est de constater que, contrairement à l’argumentation de la requérante, la chambre de recours a pris en considération les éléments figuratifs de la marque demandée et qu’elle les a implicitement mais nécessairement regardés comme n’étant pas de nature à capter l’attention du public pertinent eu égard à la présence de l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir, qu’elle a, à juste titre, considéré comme dominant l’impression laissée par la marque demandée, compte tenu de la taille de ses caractères, de sa couleur et de la circonstance qu’il s’agissait d’un des seuls éléments verbaux dont le public pertinent était en mesure de percevoir immédiatement la signification.

53      Dès lors que l’élément dominant de la marque demandée et le mot composant la marque antérieure sont similaires, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à une similitude visuelle élevée entre les marques en conflit.

–       Sur la similitude phonétique

54      Concernant l’appréciation de la similitude phonétique, la requérante fait valoir la même argumentation qu’en ce qui concerne la similitude visuelle (voir point 49 ci-dessus).

55      La chambre de recours a constaté, au point 21 de la décision attaquée, que l’élément dominant de la marque demandée, à savoir composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir, était, sur le plan phonétique, identique à la marque antérieure et que les autres éléments verbaux de la marque demandée étaient des mots de langue polonaise, peu susceptibles d’être prononcés par le public pertinent du Benelux, notamment parce qu’ils sont rédigés en petits caractères.

56      Les raisons pour lesquelles la chambre de recours a considéré que l’élément composé du terme « super » et du terme « glue » séparés par un rond noir était dominant sur le plan visuel valent d’autant plus en ce qui concerne la comparaison phonétique des signes en conflit, car les autres éléments verbaux de la marque demandée sont, en effet, des mots de langue polonaise, dont il est peu probable que, sauf pour deux ou trois d’entre eux, le public pertinent en saisisse la signification et soit susceptible de les prononcer.

57      Au vu de la correspondance phonétique entre l’élément dominant de la marque demandée et la marque antérieure, il convient de confirmer la conclusion de la chambre de recours quant à la similitude phonétique des signes en conflit et d’écarter les arguments de la requérante.

–       Sur la similitude conceptuelle

58      La requérante ne soulève aucun argument à l’encontre des conclusions de la chambre de recours opérées dans le cadre de la comparaison conceptuelle des signes en conflit.

59      Au point 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, pour la partie du public pertinent comprenant l’élément « superglue » de la marque antérieure comme la combinaison des mots de langue anglaise « super » et « glue », faisant ainsi référence à une colle de qualité supérieure, les signes en conflit étaient identiques sur le plan conceptuel et que, pour la partie de ce public non familiarisée avec la signification du mot « glue », la comparaison était neutre.

60      Il convient pour le Tribunal de confirmer la conclusion à laquelle la chambre de recours est parvenue quant à la comparaison conceptuelle des signes en conflit.

 Sur le risque de confusion

61      Tout en prenant en considération le caractère distinctif réduit de la marque antérieure, la chambre de recours a considéré, au point 24 de la décision attaquée, que le public pertinent était en mesure de comprendre l’élément « glue » comme faisant référence au mot anglais « glue » ou au mot français « glu », l’élément « super » étant universellement connu comme l’indication d’une qualité exceptionnelle, et que le terme « superglue », considéré dans son ensemble, était la description d’une colle de qualité exceptionnelle.

62      Compte tenu de l’identité des produits couverts par les marques en conflit, de la similitude visuelle élevée et de l’identité phonétique des signes en conflit, la chambre de recours a conclu, au point 27 de la décision attaquée, qu’il existait un risque de confusion en dépit du faible caractère distinctif de la marque antérieure.

63      Dès lors, d’une part, il convient d’écarter l’argument de la requérante, selon lequel la chambre de recours aurait invoqué à tort les arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL (C‑251/95, Rec. p. I‑6191) et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 25 supra, puisque la circonstance, ressortant de ces arrêts tels que cités par la chambre de recours, que le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure est important n’interdit aucunement de constater l’existence d’un risque de confusion lorsque la marque antérieure possède un faible caractère distinctif (voir points 36 à 48 ci-dessus).

64      D’autre part, l’argument tiré par la requérante de l’existence d’une décision de l’OHMI concernant la marque communautaire KLEJ BŁYSKAWICZNY CYJANOAKRYLOWY SUPER GLUE, dans une affaire opposant les mêmes parties, doit être, en tout état de cause, écarté.

65      Si l’OHMI doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, il doit concilier les principes d’égalité de traitement et de bonne administration avec le respect de la légalité (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec. p. I‑1541, points 74 et 75). Or, il convient de constater que, dans la procédure d’opposition à l’enregistrement de la demande de marque communautaire KLEJ BŁYSKAWICZNY CYJANOAKRYLOWY SUPER GLUE, la division d’opposition a accueilli la demande de marque pour les produits suivants de la classe 1, « Décreusage (produits de -), Silicones, Résines acryliques à l’état brut », qui ne correspondent pas aux produits en litige dans la présente espèce. Ainsi, la requérante n’est pas fondée à invoquer implicitement une méconnaissance du principe d’égalité de traitement, faute que les situations invoquées soient comparables.

66      Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion et a accueilli l’opposition.

67      Par conséquent, il convient de rejeter le recours.

 Sur les dépens

68      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Przedsiębiorstwo Handlowe Medox Lepiarz Jarosław Lepiarz Alicja sp.j. est condamnée aux dépens.

Forwwod

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2013 .

Signatures


* Langue de procédure : le polonais.