Language of document : ECLI:EU:T:2016:40

Affaire T‑570/13

Agriconsulting Europe SA

contre

Commission européenne

« Marchés publics de services – Procédure d’appel d’offres – Assistance technique opérationnelle en vue d’établir et de gérer un mécanisme de réseau pour la mise en œuvre du partenariat européen d’innovation ‘Productivité et développement durable de l’agriculture’ – Rejet de l’offre d’un soumissionnaire – Attribution du marché à un autre soumissionnaire – Offre anormalement basse – Responsabilité non contractuelle »

Sommaire – Arrêt du Tribunal (sixième chambre) du 28 janvier 2016

1.      Responsabilité non contractuelle – Conditions – Illégalité – Préjudice – Lien de causalité – Absence de l’une des conditions – Rejet du recours en indemnité dans son ensemble

(Art. 340, al. 2, TFUE)

2.      Marchés publics de l’Union européenne – Conclusion d’un marché sur appel d’offres – Pouvoir d’appréciation des institutions – Contrôle juridictionnel – Limites

3.      Responsabilité non contractuelle – Conditions – Préjudice réel et certain – Charge de la preuve

(Art. 340, al. 2, TFUE)

4.      Responsabilité non contractuelle – Conditions – Lien de causalité – Charge de la preuve

(Art. 340, al. 2, TFUE)

5.      Marchés publics de l’Union européenne – Conclusion d’un marché sur appel d’offres – Offre anormalement basse – Obligation d’examen par le pouvoir adjudicateur du caractère anormalement bas de l’offre – Portée – Éléments à prendre en considération

(Règlement du Conseil no 1605/2002, art. 97, § 2 ; règlement de la Commission no 2342/2002, art. 139 et 146, § 4)

6.      Marchés publics de l’Union européenne – Conclusion d’un marché sur appel d’offres – Offre anormalement basse – Obligation pour le pouvoir adjudicateur de mettre en œuvre une procédure de vérification contradictoire – Portée

(Règlement de la Commission no 2342/2002, art. 139, § 1, et 146, § 4)

7.      Marchés publics de l’Union européenne – Procédure d’appel d’offres – Obligation de respecter le principe d’égalité de traitement des soumissionnaires – Portée

(Règlement du Conseil no 1605/2002, art. 89, § 1)

8.      Responsabilité non contractuelle – Conditions – Préjudice réel et certain causé – Préjudice résultant d’un manque à gagner – Préjudice futur et hypothétique – Inadmissibilité

(Art. 340, al. 2, TFUE ; règlement du Conseil no 1605/2002, art. 101)

9.      Marchés publics de l’Union européenne – Procédure d’appel d’offres – Frais encourus par un soumissionnaire – Droit à indemnisation – Absence – Exception – Violation du droit de l’Union

(Art. 340, al. 2, TFUE ; règlement du Conseil no 1605/2002, art. 101)

1.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 31-33)

2.      Voir le texte de la décision.

(cf. point 34)

3.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 39, 121)

4.      Voir le texte de la décision.

(cf. point 40)

5.      Il résulte de l’article 97, paragraphe 2, du règlement no 1605/2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes, et des articles 139 et 146, paragraphe 4, du règlement no 2342/2002, établissant les modalités d’exécution du règlement no 1605/2002, que la notion d’ « offre anormalement basse » ne comporte de définition ni dans les dispositions du règlement nº 1605/2002, ni dans celles du règlement nº 2342/2002. À cet égard, le caractère anormalement bas d’une offre doit être apprécié par rapport à la composition de l’offre et par rapport à la prestation en cause. Ainsi, le pouvoir adjudicateur peut, dans le cadre de son examen du caractère anormalement bas d’une offre, en vue d’assurer une saine concurrence, prendre en considération non seulement les circonstances énoncées à l’article 139, paragraphe 2, du règlement no 2342/2002, mais également tous les éléments pertinents au regard de la prestation en cause.

(cf. points 54, 55)

6.      Il découle de l’article 139, paragraphe 1, et de l’article 146, paragraphe 4, du règlement no 2342/2002, établissant les modalités d’exécution du règlement no 1605/2002, que le pouvoir adjudicateur est soumis, lors de l’examen du caractère anormalement bas d’une offre, à l’obligation de demander au soumissionnaire de fournir les justifications nécessaires pour prouver que son offre est sérieuse. L’existence d’un débat contradictoire effectif, situé à un moment utile dans la procédure d’examen des offres, entre le pouvoir adjudicateur et le soumissionnaire, afin que ce dernier puisse prouver que son offre est sérieuse, constitue une exigence fondamentale en matière de passation de marchés publics, en vue d’éviter l’arbitraire de l’autorité adjudicatrice et de garantir une saine concurrence entre les entreprises.

(cf. point 71)

7.      Voir le texte de la décision.

(cf. point 80)

8.      Le recours à l’appui duquel est invoqué un préjudice résultant du manque à gagner doit être rejeté, car il ne s’agit pas d’un préjudice né et actuel, mais futur et hypothétique. En effet, la condition relative au dommage exige que le préjudice dont il est demandé réparation soit réel et certain, ce qu’il appartient à la partie requérante de prouver.

Ainsi, s’agissant du préjudice correspondant au manque à gagner d’un soumissionnaire évincé dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres organisée par la Commission et lié à la perte du marché en cause, celui-ci n’est pas réel et certain, mais hypothétique et ne peut donc pas faire l’objet d’une indemnisation. En effet, selon l’article 101 du règlement no 1605/2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes, le pouvoir adjudicateur peut, jusqu’à la signature du contrat, soit renoncer au marché, soit annuler la procédure de passation du marché, sans que les candidats ou les soumissionnaires puissent prétendre à une quelconque indemnisation. Dès lors, même à supposer que le comité d’évaluation des offres ait proposé d’attribuer le marché au soumissionnaire évincé, le pouvoir adjudicateur ne serait pas lié par la proposition dudit comité, mais disposerait d’un pouvoir d’appréciation important sur les éléments à prendre en considération en vue de la prise d’une décision d’attribuer un marché. Or, aucun principe ni aucune règle applicable aux procédures d’appels d’offres de la Commission n’impose à celle-ci de signer le contrat portant sur le marché avec la personne désignée comme l’attributaire à l’issue de la procédure d’appel d’offres. À cet égard, du fait de la rédaction de l’article 101 du règlement no 1605/2002, un soumissionnaire évincé perd non pas un contrat, mais une chance d’obtenir le contrat faisant l’objet de la procédure d’appel d’offres communautaire.

Par ailleurs, s’agissant d’un soumissionnaire évincé en raison du caractère anormalement bas de son offre, quand bien même le rejet de l’offre serait entaché d’illégalité, il n’en resterait pas moins que cette offre serait anormalement basse et que le soumissionnaire évincé ne pourrait en tout état de cause pas se prévaloir d’un préjudice lié à la perte de chance d’obtenir le marché en question.

(cf. points 91-96, 100, 110)

9.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 112-115)