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Recours introduit le 3 janvier 2008 - Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA)/République portugaise

(Affaire T-4/08)

Langue de procédure: anglais

Parties

Partie requérante: Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA) (Lisbonne, Portugal) (représentant(s): E. Pache et J. Menze)

Partie défenderesse: République portugaise

Conclusions de la partie requérante

le gouvernement portugais est lié par les dispositions de l'accord de siège qui est un instrument de droit international à l'intérieur de la sphère du droit communautaire et ne peut pas être modifié et changé unilatéralement par la République portugaise, y compris par le biais de sa législation nationale;

aux termes de l'accord de siège, le gouvernement portugais est tenu de garantir que le personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime et les membres de leurs familles jouissent du droit d'importer de leur dernier pays de résidence ou du pays dont ils sont ressortissants, en franchise de droits et sans interdictions ou restrictions, lors de la première installation, dans un délai de cinq ans à compter leur recrutement par l'Agence et dans le cadre de deux expéditions au maximum, des véhicules achetés aux conditions du marché dans les pays en question, et que l'application passée et actuelle de ces dispositions de l'accord de siège par les autorités portugaises compétentes ne satisfait pas à cette obligation; notamment que, sur demande, le gouvernement portugais est tenu d'immatriculer dans une série spéciale, en franchise de droits, sans interdictions ou restrictions, les véhicules des membres du personnel de l'agence et de leurs familles achetés aux conditions du marché dans le pays de résidence précédent ou dans celui dont ils sont ressortissants;

aux termes de l'accord de siège, le gouvernement portugais est tenu de garantir que le personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime et les membres de leurs familles jouissent au Portugal des privilèges et immunités, exonérations et facilités accordés par la République portugaise aux membres de catégories comparables du corps diplomatique, et que l'application passée et actuelle de ces dispositions de l'accord de siège par les autorités portugaises compétentes ne satisfait pas à cette obligation; notamment, que le gouvernement portugais est tenu d'appliquer les règles et dispositions relatives à l'immatriculation et à la fiscalité des véhicules du personnel du corps diplomatique qui étaient en vigueur jusqu'en juillet 2007 au personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime entré en fonction avant cette date et aux membres de leurs familles ; que le gouvernement portugais est tenu d'appliquer les règles et dispositions relatives à l'immatriculation et à la fiscalité des véhicules du personnel du corps diplomatique qui étaient en vigueur jusqu'en juillet 2007 dans tous les autres cas ; que le gouvernement portugais est tenu de garantir que le personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime et les membres de leurs familles jouissent effectivement au Portugal des privilèges et immunités, exonérations et facilités accordés par la République portugaise aux membres de catégories comparables du corps diplomatique et que la pratique passée et actuelle des autorités portugaise de ne pas traiter les demandes d'immatriculation présentées par les membres du personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime et leurs familles est en contradiction avec cette obligation ;

les dispositions de l'accord de siège ne doivent pas être interprétées et appliquées de manière à ce que le personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime et les membres de leurs familles ne puissent pas jouir, au regard de l'introduction de véhicules d'occasion sur le territoire portugais, au moins des mêmes droits que n'importe quel autre ressortissant de l'UE transférant sa résidence au Portugal

le délai raisonnable pour traiter les demandes d'immatriculation de véhicules présentées par le personnel de l'Agence européenne pour la sécurité maritime et les membres de leurs familles doit être considéré comme ne pouvant excéder deux mois; et

conformément à l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, condamner la République portugaise aux dépens.

Moyens et principaux arguments

L'Agence européenne pour la sécurité maritime (ci-après "l'EMSA" ou "l'Agence") a été instituée par le règlement n° 1406/2002 1 et a son siège à Lisbonne. Le 28 juillet 2004, le "Protocole entre le gouvernement de la République portugaise et l'Agence européenne de la sécurité maritime" 2 (ci-après "l'accord de siège") a été signé. Cet accord de siège couvre les relations entre l'EMSA et la République portugaise, en tant qu'État d'accueil, et s'applique à l'agence et à son personnel.

Selon la partie requérante, le gouvernement portugais a offert, sans que l'EMSA ne l'ait préalablement demandé ou proposé, de conclure ledit accord de siège prévoyant une série de privilèges et immunités, exonérations et facilités, pour l'Agence et son personnel, reflétant très largement les dispositions du Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes (ci-après "le Protocole") mais prévoyant également des facilités supplémentaires. Elle soutient en outre que le texte de l'accord de siège proposé était similaire à celui de l'accord de siège conclu le 26 juin 1996 entre la République portugaise et l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (ci-après "l'OEDT"), notamment en ce qui concerne l'immatriculation des véhicules.

En septembre 2005, il a été créé un groupe de travail entre le gouvernement portugais, d'une part, et l'EMSA et l'OEDT, d'autre part, aux fins de rédiger les dispositions administratives détaillées nécessaires pour mettre en œuvre les deux accords de siège ou Protocoles.

La partie requérante soutient que, en ne traitant pas les demandes d'immatriculation de véhicules présentées par le personnel de l'EMSA, l'administration portugaise n'a pas respecté les obligations découlant de l'accord de siège clarifiant les obligations découlant du Protocole lequel s'applique à l'EMSA en vertu de l'article 7 du règlement (CE) n° 1406/2002. La partie requérante fait en outre valoir que les autorités portugaises n'ont pas appliqué la législation portugaise en vigueur en ce qui concerne le personnel de l'EMSA et les membres de leurs familles alors qu'elles l'ont fait en ce qui concerne l'OEDT et les missions diplomatiques. Selon la partie requérante, il s'en est suivi des obstacles sérieux au fonctionnement de l'EMSA du fait que les véhicules, achetés dans la confiance légitime que les règles en vigueur seraient appliquées, sont restés non immatriculés. De plus, les véhicules achetés au lieu de résidence précédent ou dans l'État dont les membres du personnel sont ressortissants ont conservé les plaques d'immatriculation de l'État membre de résidence précédent en dépit des règles de cet État concernant l'obligation de désimmatriculation. En résumé, la partie requérante soutient que la décision des autorités portugaises de ne pas traiter les demandes d'immatriculation de véhicules a créé une série de difficultés sérieuses, d'ordre légal et administratif, pour les membres du personnel lesquels n'avaient pas d'autre choix que de circuler dans un véhicule en infraction aux obligations en matière d'immatriculation, d'assurances et de contrôle technique.

En ce qui concerne la compétence du Tribunal, il est en outre soutenu que l'article 8, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1406/2002 prévoit que la Cour de justice est compétente pour statuer en vertu d'une clause compromissoire contenue dans un contrat conclu par l'Agence et que l'article 14 de l'accord de siège prévoit que les différends résultant de l'application dudit accord sont examinés par un groupe ad hoc de quatre membres. Les différends non résolus par ce biais sont soumis à la Cour de justice des Communautés européennes.

Selon la partie requérante, la procédure de règlement des différends a été jugée infructueuse et, par conséquent, la Cour est compétente pour connaître du présent différend portant sur l'interprétation de l'accord de siège, en vertu de l'article 238 CE qui prévoit que la Cour de justice est compétente pour statuer en vertu d'une clause compromissoire contenue dans un contrat passé par la Communauté ou pour son compte, en vertu de l'article 5, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1406/2002 qui prévoit que l'Agence est un organisme de la Communauté et en vertu de l'article 225 CE qui prévoit que le Tribunal de première instance est compétent pour connaître en première instance des recours visés à l'article 238 CE.

En outre, la partie requérante expose qu'elle demande au Tribunal de confirmer que l'accord de siège est un instrument de droit international à l'intérieur de la sphère du droit communautaire qui lie les autorités portugaises et ne peut pas être unilatéralement modifié. De plus, elle demande que soit rendu un arrêt concluant que l'absence de traitement des demandes d'immatriculation de véhicules à moteur présentées par les membres de son personnel est contraire aux dispositions du Protocole et que les autorités portugaises sont tenues de mettre en œuvre les dispositions pertinentes du Protocole dans un délai raisonnable. Enfin, elle soutient que l'accord de siège ne doit pas être interprété de manière à ce que le personnel de l'EMSA ne puisse pas jouir au moins des mêmes droits au regard de l'immatriculation des véhicules que n'importe quel autre ressortissant de l'UE transférant sa résidence au Portugal.

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1 - Règlement (CE) n° 1406/2002 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime (JO L 208, p. 1).

2 - Publié au Journal officiel portugais n° 224 du 22 septembre 2004, p. 6073, disponible sur le site Internet de l'EMSA http://www.emsa.europa.eu/Docs/legis/protocol%20pt%government%20and%20emsa.pdf