Language of document : ECLI:EU:T:2013:204

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

19 avril 2013 (*)

« FSE – Action de formation – Réduction du concours financier initialement octroyé – Règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 – Prescription – Sécurité juridique – Droits de la défense – Délai raisonnable – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑52/11,

Associação de Empresas de Construção e Obras Públicas e Serviços (Aecops), établie à Lisbonne (Portugal), représentée initialement par Mes J. da Cruz Vilaça et L. Pinto Monteiro, puis par Mes Pinto Monteiro, P. Farinha Alves et N. Morais Sarmento, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. P. Guerra e Andrade et Mme D. Recchia, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission du 27 octobre 2010 fixant le montant final des dépenses éligibles au concours du Fonds social européen (FSE) octroyé à la requérante pour des actions de formation par la décision C (89) 570, du 22 mars 1989, pour le financement d’une action de formation (dossier 89 0979 P3),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. M. Prek (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 juin 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, l’Associação de Empresas de Construção e Obras Públicas e Serviços (Aecops), est une association patronale regroupant des entreprises de construction, de travaux publics et de services.

2        Le 19 octobre 1988, la République portugaise a présenté en faveur de la requérante une demande de concours du Fonds social européen (FSE) d’un montant de 10 498 950 escudos portugais (PTE). Cette demande concernait une action de formation professionnelle en faveur de 80 dirigeants de petites et moyennes entreprises de l’industrie du bâtiment destinée à les former aux nouvelles techniques informatiques.

3        Par la décision C (89) 570, du 22 mars 1989, la Commission des Communautés européennes a approuvé un concours financier du FSE d’un montant de 3 103 580 PTE destiné à la formation de 27 personnes (dossier 89 0979 P3).

4        Conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 2950/83 du Conseil, du 17 octobre 1983, portant application à la décision 83/516/CEE concernant les missions du FSE (JO L 289, p. 1), une avance de 1 551 790 PTE a été versée à la requérante.

5        Le 16 octobre 1990, conformément à l’article 5, paragraphe 4, du règlement n° 2950/83, le Departamento para os Assuntos do Fundo Social Europeu (DAFSE, département pour les questions relatives au FSE), service de l’administration portugaise chargé de gérer les concours du FSE au Portugal, a présenté à la Commission une demande de versement du solde. Le DAFSE a réévalué les dépenses, qui, dorénavant, s’élevaient à un montant de 6 226 188 PTE, dont 2 586 963 PTE à la charge du FSE, 2 116 606 PTE à la charge de la République portugaise et le reste à la charge d’autres entités. L’avance de 1 551 790 PTE ayant déjà été versée, le solde restant dû s’élevait à la somme de 1 035 173 PTE.

6        Par un courrier réceptionné le 10 juillet 1991, le DAFSE a informé la Commission que, après réexamen du dossier, il avait été décidé de maintenir la structure des coûts et le cadre de financement indiqués dans la demande de versement du solde envoyée à la Commission.

7        Le 30 octobre 1991, la Commission a informé le DAFSE que la demande de versement du solde ne contenait ni la liste des entreprises bénéficiaires, ni les méthodes de calcul par sous-poste, ni le tableau des loyers et des locations. La Commission demandait au DAFSE de transmettre ces informations dans un délai de deux mois.

8        Le 14 avril 1992, la Commission a notifié au DAFSE un projet de décision concernant le dossier concerné. Le 7 mai 1992, celui-ci a répondu qu’il n’avait aucune observation à formuler quant à ce projet.

9        À la demande du DAFSE, qui soupçonnait des irrégularités dans le cadre de l’utilisation par la requérante du concours du FSE, l’Inspecção Geral de Finanças (Inspection générale des finances, ci-après l’« IGF ») a procédé à un audit des comptes de l’association afin d’évaluer la légalité et la régularité des actions de formation réalisées entre 1987 et 1989, en ce compris des dépenses réalisées dans le cadre du dossier concerné. Le rapport d’audit, daté du 10 novembre 1994, a constaté plusieurs irrégularités dans le cadre dudit dossier.

10      La requérante ayant refusé de montrer aux inspecteurs qui réalisaient l’audit plusieurs éléments de sa comptabilité et ces derniers ayant découvert des indices de fraudes, l’IGF a proposé de transmettre ledit rapport d’audit au ministère public à des fins de poursuites pénales.

11      Le 30 mars 1995, le DAFSE a informé la Commission, conformément à l’article 7 de la décision 83/673/CEE de la Commission, du 22 décembre 1983, concernant la gestion du FSE (JO L 377, p. 1), que, en raison d’une présomption d’irrégularités, l’action de formation en cause faisait l’objet d’une enquête.

12      Sur la base de la présomption d’irrégularités, le ministère public portugais a ouvert une enquête pour cas allégué de fraude dans le cadre de l’obtention d’une subvention.

13      Le 26 juin 1998, le ministère public a décidé de classer sans suite la procédure pénale.

14      Le 13 novembre 1998, le DAFSE a informé la Commission de la décision de classement.

15      Par courrier du 12 mars 2001, le DAFSE a demandé à la Commission d’adopter une décision formelle d’approbation de la demande de paiement du solde.

16      Le 27 septembre 2004, l’Instituto de Gestão do Fundo Social Europeu (Institut de gestion du FSE, ci-après l’« IGFSE »), qui a succédé au DAFSE, a transmis à la Commission les conclusions de l’analyse du rapport de contrôle effectué par l’IGF. L’IGFSE estimait que des dépenses non éligibles d’un montant de 4 118 809 PTE avaient été réalisées, de sorte que le coût total de l’action était de 956 339 PTE, que le concours du FSE était de 426 070 PTE et qu’une somme de 1 125 720 PTE devait être restituée à la Commission. L’IGFSE demandait à la Commission d’adopter une décision finale dans le dossier en cause.

17      Le 22 juin 2005, la Commission a adopté une décision relative au dossier concerné dans laquelle elle estimait que la somme de 1 591 128 PTE devait lui être remboursée.

18      Le 6 janvier 2009, l’IGFSE a demandé à la Commission d’adopter un nouveau projet de décision sur la demande de paiement du solde afin qu’il soit notifié à la requérante.

19      Le 17 avril 2009, l’IGFSE a notifié à la requérante la décision de la Commission du 22 juin 2005.

20      Le 2 juillet 2009, la requérante a introduit un recours en annulation de ladite décision de la Commission. Ce recours a été enregistré sous la référence T‑257/09.

21      Le 30 septembre 2009, la Commission a abrogé la décision du 22 juin 2005.

22      Le 17 mars 2010, la requérante s’est désistée de son recours devant le Tribunal. Par ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 12 avril 2010, Aecops/Commission (T‑257/09, non publiée au Recueil), l’affaire a été radiée du registre du Tribunal.

23      Le 22 juin 2010, la Commission a notifié à l’IGFSE un nouveau projet de décision de fixation du montant final des dépenses éligibles pour le dossier concerné. Le 15 juillet 2010, ce projet a été notifié à la requérante, qui s’est prononcée à son sujet le 4 août 2010.

24      Par courrier du 18 octobre 2010, l’IGFSE a informé la Commission de ses conclusions selon lesquelles les observations présentées par la requérante n’apportaient aucun élément nouveau et a demandé à la Commission d’adopter une décision finale.

25      Le 27 octobre 2010, la Commission a adopté une nouvelle décision de fixation du montant final des dépenses éligibles (ci-après la « décision attaquée »), qui a été notifiée à la requérante le 11 novembre 2010. La décision attaquée a ramené à 426 070 PTE le montant du concours du FSE octroyé par la décision C (89) 570.

 Procédure et conclusions des parties

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 janvier 2011, la requérante a introduit le présent recours.

27      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

28      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 21 juin 2012.

29      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

30      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

31      À titre liminaire, il convient de constater que, lors de l’audience, la requérante a confirmé, en réponse à une question posée par le Tribunal, qu’elle ne contestait pas les faits de l’affaire tels qu’exposés dans le rapport d’audience.

32      En outre, il y a lieu de rappeler quelques dispositions générales qui régissent le fonctionnement du FSE. Selon l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de la décision 83/516/CEE du Conseil, du 17 octobre 1983, concernant les missions du FSE (JO L 289, p. 38), le Conseil de l’Union européenne participe au financement d’actions de formation et d’orientation professionnelles. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de la même décision, le concours du FSE est octroyé à raison de 50 % des dépenses éligibles, sans qu’il puisse toutefois dépasser le montant de la contribution financière des pouvoirs publics de l’État membre intéressé.

33      Le règlement n° 2950/83, applicable au moment des faits, prévoit, en son article 5, paragraphe 1, que l’agrément par le FSE d’une demande de financement entraîne le versement d’une avance de 50 % du concours octroyé, à la date prévue pour le début de l’action de formation. En vertu du paragraphe 4 du même article, les demandes de paiement du solde contiennent un rapport détaillé sur le contenu, les résultats et les aspects financiers de l’action concernée. L’État membre certifie l’exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans les demandes de paiement.

34      Conformément aux dispositions de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, lorsque le concours du FSE n’est pas utilisé dans les conditions fixées par la décision d’agrément, la Commission peut suspendre, réduire ou supprimer ce concours, après avoir donné à l’État membre concerné l’occasion de présenter ses observations. Le paragraphe 2 du même article dispose que les sommes versées qui n’ont pas été utilisées dans les conditions fixées par la décision d’agrément donnent lieu à répétition, que l’État membre intéressé est subsidiairement responsable du remboursement des sommes indûment versées pour des actions auxquelles s’applique la garantie visée à l’article 2, paragraphe 2, de la décision 83/516 et que, dans la mesure où il verse à la Communauté européenne les sommes à rembourser par les responsables financiers de l’action, l’État membre est subrogé dans les droits de la Communauté.

35      Selon l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, tant la Commission que l’État membre concerné peuvent contrôler l’utilisation du concours.

36      L’article 7 de la décision 83/673 prescrit à l’État membre enquêtant sur l’utilisation d’un concours, en raison d’une présomption d’irrégularité, d’avertir la Commission sans délai.

37      La décision attaquée a été adoptée sur le fondement de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83.

38      À l’appui de son recours, la requérante soulève trois moyens tirés, premièrement, de la prescription des poursuites, deuxièmement, de la violation du principe de sécurité juridique et des droits de la défense ainsi que du non-respect d’un délai raisonnable et, troisièmement, de la violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré de la prescription des poursuites

39      Selon la requérante, la décision attaquée est illégale et n’est pas susceptible d’exécution en raison de la prescription des poursuites, conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312, p. 1). Elle fait valoir que, dans le cadre de l’action de formation en cause, aucune irrégularité n’a pu être commise après le 16 octobre 1990, date à laquelle le DAFSE a présenté à la Commission une demande de versement du solde. Or, la Commission a adopté la décision attaquée le 27 octobre 2010, soit 20 ans après la commission, par la requérante, des irrégularités alléguées.

40      L’article 3 du règlement n° 2988/95 dispose :

« 1. Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l’irrégularité visée à l’article 1er, paragraphe 1. Toutefois, les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur qui ne saurait aller en deçà de trois ans.

Pour les irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription court à compter du jour où l’irrégularité a pris fin. Pour les programmes pluriannuels, le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme.

La prescription des poursuites est interrompue par tout acte, porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l’autorité compétente et visant à l’instruction ou à la poursuite de l’irrégularité. Le délai de prescription court à nouveau à partir de chaque acte interruptif.

Toutefois, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que l’autorité compétente ait prononcé une sanction, sauf dans les cas où la procédure administrative a été suspendue conformément à l’article 6, paragraphe 1.

2. Le délai d’exécution de la décision prononçant la sanction administrative est de trois ans. Ce délai court à compter du jour où la décision devient définitive.

Les cas d’interruption et de suspension sont réglés par les dispositions pertinentes du droit national.

3. Les États membres conservent la possibilité d’appliquer un délai plus long que celui prévu respectivement au paragraphe 1 et au paragraphe 2. »

41      Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, dudit règlement, « [e]st constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue ».

42      Selon l’article 4, paragraphe 1, du même règlement, « [t]oute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l’avantage indûment obtenu […] par l’obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus […] ».

43      Dès lors, il convient de s’interroger si, en l’espèce, la requérante peut se prévaloir du délai de prescription prévu par l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 2988/95.

44      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, la règle de prescription prévue à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 2988/95 est applicable tant aux irrégularités conduisant à l’imposition d’une sanction administrative au sens de l’article 5 de ce règlement qu’à celles faisant l’objet d’une mesure administrative au sens de l’article 4 dudit règlement, mesure qui a pour objet le retrait de l’avantage indûment obtenu sans toutefois revêtir le caractère d’une sanction (arrêt de la Cour du 29 janvier 2009, Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb e.a., C‑278/07 à C‑280/07, Rec. p. I‑457, point 22 ; voir arrêt du Tribunal du 15 avril 2011, IPK International/Commission, T‑297/05, non encore publié au Recueil, point 147, et la jurisprudence citée).

45      La Cour a également jugé que, en adoptant le règlement n° 2988/95 et, en particulier, l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de celui-ci, le législateur de l’Union européenne a entendu instituer une règle générale de prescription applicable en la matière et par laquelle il entendait, d’une part, définir un délai minimal appliqué dans tous les États membres et, d’autre part, renoncer à la possibilité de recouvrer des sommes indûment perçues du budget de l’Union après l’écoulement d’une période de quatre années postérieure à la réalisation de l’irrégularité affectant les paiements litigieux. Il en résulte que, à partir de la date d’entrée en vigueur du règlement n° 2988/95, tout avantage indûment perçu du budget de l’Union peut, en principe et excepté dans des secteurs pour lesquels le législateur de l’Union a prévu un délai inférieur, être recouvré par les autorités compétentes des États membres dans un délai de quatre années (arrêt Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb e.a., point 44 supra, points 27 et 28).

46      S’agissant du sort des avantages indûment perçus du budget de l’Union en raison d’irrégularités qui ont été commises avant l’entrée en vigueur du règlement n° 2988/95, la Cour a précisé que, par l’adoption de l’article 3, paragraphe 1, de ce règlement et sans préjudice du paragraphe 3 de cet article, le législateur de l’Union a défini de la sorte une règle de prescription générale par laquelle il a volontairement réduit à quatre années la période pendant laquelle les autorités des États membres, agissant au nom et pour le compte du budget de l’Union, devraient ou auraient dû récupérer de tels avantages indûment perçus (arrêt Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb e.a., point 44 supra, point 29, et arrêt IPK International/Commission, point 44 supra, point 148).

47      La Cour en a déduit que, en application de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 2988/95, toute somme indûment perçue par un opérateur en raison d’une irrégularité antérieure à l’entrée en vigueur du règlement n° 2988/95 devait, en principe, être considérée comme prescrite en l’absence de tout acte interruptif adopté dans les quatre années suivant la commission d’une telle irrégularité, acte interruptif qui, aux termes de l’article 3, paragraphe 1, troisième alinéa, du même règlement, s’entendait comme un acte porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l’autorité compétente et visant à l’instruction ou à la poursuite de cette irrégularité (voir, en ce sens, arrêt Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb e.a., point 44 supra, point 32, et arrêt IPK International/Commission, point 44 supra, point 149).

48      En outre, le Tribunal a estimé que ces principes s’appliquaient mutatis mutandis lorsque la mesure en cause, en vertu de l’article 4, paragraphes 1 à 3, lu conjointement avec l’article 1er, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 2988/95, avait été adoptée par la Commission, ledit règlement étant une réglementation générale s’adressant à toute autorité, tant nationale que de l’Union, soumise aux obligations de bonne gestion financière et de contrôle de l’utilisation des moyens budgétaires des Communautés aux fins prévues, telles que visées aux considérants 3 et 13 du même règlement (arrêt IPK International/Commission, point 44 supra, point 150).

49      Il découle de la jurisprudence citée aux points précédents que l’autorité, nationale ou de l’Union, chargée de recouvrer les sommes indûment perçues dispose pour cela d’un délai de quatre années à partir de la réalisation de l’irrégularité.

50      Or, en l’espèce, l’autorité chargée du recouvrement des sommes indument perçues auprès de la requérante n’était pas la Commission mais l’autorité compétente de l’État membre.

51      En effet, au moment des faits litigieux, le DAFSE puis l’IGFSE représentaient la République portugaise pour tout ce qui concernait le FSE. Ils étaient les interlocuteurs uniques et obligatoires, d’une part, des services de la Commission responsables du FSE et, d’autre part, des organismes publics et privés portugais qui souhaitaient bénéficier d’un concours du FSE (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Branco/Commission, T‑162/04, non publié au Recueil, point 15).

52      Ainsi, en tant qu’unique interlocuteur du FSE, l’État membre engageait sa responsabilité dans la mesure où il certifiait l’exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans les demandes de paiement du solde et où il pouvait même être tenu de garantir la bonne fin des actions de formation (voir arrêt de la Cour du 7 mai 1991, Interhotel/Commission, C‑291/89, Rec. p. I‑2257, point 16, et la jurisprudence citée). Dans le cadre d’une telle procédure, les relations financières s’établissaient, d’une part, entre la Commission et l’État membre concerné et, d’autre part, entre cet État membre et l’opérateur économique bénéficiaire du concours financier (arrêt de la Cour du 15 mars 1984, EISS/Commission, 310/81, Rec. p. 1341, point 15).

53      C’est dans ce contexte que la décision attaquée, par laquelle la Commission a fixé le montant final des dépenses éligibles pour le dossier concerné, a été adressée à l’autorité nationale, l’IGFSE. Il ressort de la décision attaquée que, en raison des irrégularités constatées de la part de la requérante par les autorités nationales portugaises, le montant du concours financier à la charge du FSE, octroyé par la décision C (89) 570, a été réduit à 426 070 PTE. Il y a donc lieu de constater que, par la décision attaquée, la Commission n’a pas réclamé un quelconque remboursement à la requérante, mais a uniquement fixé le montant final du concours financier du FSE pour le dossier concerné. Le 11 novembre 2010, l’IGFSE a notifié la décision attaquée à la requérante en lui demandant de rembourser les montants indûment perçus.

54      Certes, en réduisant le concours financier qui lui avait préalablement été octroyé par l’intermédiaire des autorités nationales portugaises, la décision attaquée concerne la requérante directement et individuellement. C’est à ce titre que celle-ci peut contester cette décision devant le juge de l’Union. Toutefois, dans le cadre spécifique de la procédure telle que décrite au point 52 ci-dessus, dans laquelle la Commission ne pouvait pas directement réclamer à la requérante le remboursement des fonds et ainsi « poursuivre » les éventuelles irrégularités réalisées par la requérante, cette dernière ne saurait se prévaloir de la prescription des poursuites prévue par l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 2988/95 à l’encontre de la Commission.

55      À cet égard, il convient d’observer que, si, comme l’évoque la requérante, dans l’arrêt IPK International/Commission, point 44 supra, le Tribunal a conclu que les règles prévues par le règlement n° 2988/95 s’adressaient à toute autorité, tant nationale que de l’Union, ledit arrêt relevait toutefois d’une situation factuelle distincte de celle du cas d’espèce. En effet, cette affaire concernait un concours au financement d’un projet de tourisme écologique, dans le cadre duquel la Commission a, dans un premier temps, directement octroyé le montant convenu au prestataire en charge du projet, puis refusé de lui payer la seconde tranche du même concours et décidé de récupérer l’avance déjà payée. Il s’agissait donc d’une relation directe entre la Commission et le bénéficiaire du concours dans le cadre de laquelle c’était la Commission qui avait adopté la mesure de recouvrement. Par conséquent, la solution retenue dans ledit arrêt n’est pas directement transposable au cas d’espèce.

56      Dès lors, il y a lieu de conclure que la requérante ne saurait se prévaloir de la prescription des poursuites prévue par l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 2988/95 et que, par conséquent, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation du principe de sécurité juridique et des droits de la défense ainsi que du non-respect d’un délai raisonnable

57      À titre subsidiaire, la requérante soutient que le délai, selon elle, déraisonnable à l’issue duquel la Commission a adopté la décision attaquée a porté atteinte au principe de sécurité juridique. Ainsi, elle aurait été convaincue de la régularité des dépenses réalisées, ce qui l’aurait conduite à ne pas garder les factures et autres documents relatifs à la procédure concernée. La requérante invoque également l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 389). Le non-respect d’un délai raisonnable aurait aussi entraîné une violation de ses droits de la défense.

58      Le principe du délai raisonnable, repris, en tant que composante du principe de bonne administration, dans l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux, s’impose dans toute procédure administrative de l’Union (voir arrêt du Tribunal du 1er juillet 2008, Compagnie maritime belge/Commission, T‑276/04, Rec. p. II‑1277, point 39, et la jurisprudence citée).

59      Ainsi, le respect d’un délai raisonnable est requis dans tous les cas où, dans le silence des textes, les principes de sécurité juridique ou de protection de la confiance légitime font obstacle à ce que les institutions de l’Union et les personnes physiques ou morales agissent sans aucune limite de temps, risquant ainsi, notamment, de mettre en péril la stabilité de situations juridiques acquises. Pour les institutions de l’Union, le respect d’un délai raisonnable constitue un aspect du principe de bonne administration et procède de l’exigence fondamentale de sécurité juridique (voir arrêt du Tribunal du 5 octobre 2004, Sanders e.a./Commission, T‑45/01, Rec. p. II‑3315, points 59 et 60, et la jurisprudence citée).

60      Selon une jurisprudence constante, le caractère raisonnable de la durée d’une procédure administrative s’apprécie en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du contexte dans lequel elle s’inscrit, des différentes étapes procédurales qui ont été suivies, de la complexité de l’affaire ainsi que de son enjeu pour les différentes parties intéressées (arrêts du Tribunal du 22 octobre 1997, SCK et FNK/Commission, T‑213/95 et T‑18/96, Rec. p. II‑1739, point 57, et du 16 septembre 1999, Partex/Commission, T‑182/96, Rec. p. II‑2673, point 177 ; voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 19 mars 1997, Oliveira/Commission, T‑73/95, Rec. p. II‑381, point 41).

61      En ce qui concerne, plus particulièrement, les financements du FSE, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, les États membres ont non seulement le droit, mais aussi l’obligation, de réexaminer les demandes de paiement du solde, même après avoir procédé à la certification de leur exactitude factuelle et comptable, et de transmettre à la Commission des demandes de paiement révisées, en proposant une réduction du concours, lorsqu’ils estiment être confrontés à des irrégularités qui ne s’étaient pas révélées précédemment. Cette obligation découle de l’article 2, paragraphe 2, de la décision 83/516 et de l’article 7 de la décision 83/673, aux termes desquels les États membres garantissent la bonne fin des actions et ont l’obligation d’avertir la Commission sans délai lorsque la gestion d’une action pour laquelle un concours a été accordé fait l’objet d’une enquête en raison d’une présomption d’irrégularité. Ces obligations et pouvoirs des États membres ne sont limités par aucune restriction temporelle (voir arrêt du Tribunal du 6 juin 2007, Mediocurso/Commission, T‑251/05 et T‑425/05, non publié au Recueil, point 57, et la jurisprudence citée).

62      En l’espèce, il ressort du dossier que 20 ans se sont écoulés entre la réception, le 16 octobre 1990, de la demande initiale de paiement du solde et l’adoption de la décision attaquée. Or, pour une grande partie, ce laps de temps s’explique par une longue période d’incertitude, due au réexamen du dossier par l’IGF ainsi qu’à la procédure pénale nationale afférente (voir, en ce sens, arrêt Branco/Commission, point 51 supra, point 139).

63      À cet égard, il convient d’observer que, par le courrier relatif à la demande initiale de versement du solde, daté du 9 octobre 1990 et parvenu le 16 octobre 1990, le DAFSE a informé la Commission que « la certification des indications contenues dans cette demande [était] subordonnée à un audit financier dont les résultats [lui] seraient communiqués ». Or, à la suite d’un courrier du DAFSE, confirmant ladite demande et parvenu à la Commission le 10 juillet 1991, cette dernière a, le 30 octobre 1991, informé le DAFSE que la demande de versement du solde ne contenait pas toutes les informations et les justificatifs nécessaires. Puis, le 14 avril 1992, la Commission a notifié au DAFSE un projet de décision relatif au dossier concerné. Le 7 mai 1992, le DAFSE a répondu qu’il n’avait aucune observation à formuler quant audit projet.

64      Cependant, en raison des soupçons relatifs à l’existence de certaines irrégularités, les dépenses réalisées dans le cadre de l’action de formation concernée ont tout d’abord fait l’objet d’un audit. En outre, à la suite du rapport d’audit du 10 novembre 1994, le ministère public a envisagé la mise en œuvre de poursuites pénales à l’encontre de la requérante. La Commission a été informée du classement sans suite de la procédure pénale nationale par courrier du DAFSE du 13 novembre 1998. Ce courrier précisait aussi que la Commission serait informée, dans les plus brefs délais, des résultats de l’audit. Par la suite, le 12 mars 2001, le DAFSE a demandé à la Commission d’adopter une décision formelle d’approbation de la demande de paiement du solde.

65      Il y a lieu d’observer que, à partir de l’information sur le classement de la procédure pénale, il revenait à la Commission de reprendre l’examen du dossier sur le plan administratif (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 juin 2005, Branco/Commission, T‑347/03, Rec. p. II‑2555, points 117 et 118). Cependant, force est de constater que celle-ci était dans l’impossibilité d’adopter une décision finale dans le dossier en cause tant que les autorités nationales ne lui faisaient pas parvenir les conclusions de l’analyse du rapport d’audit élaboré par l’IGF. Or, ce n’est que par courrier du 27 septembre 2004 que l’IGFSE a communiqué ces conclusions à la Commission en lui demandant d’adopter une décision finale.

66      Sur la base de ces informations, la Commission a adopté une décision le 22 juin 2005, soit environ neuf mois plus tard. Ce délai ne devrait pas être considéré comme excessif eu égard aux difficultés concevables liées à la reprise et à la poursuite de la procédure après une interruption de plus de douze ans (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Branco/Commission, point 51 supra, point 140).

67      Or, le 6 janvier 2009, l’IGFSE a demandé à la Commission d’adopter un nouveau projet de décision destiné à être notifié à la requérante, tout en notifiant à cette dernière, le 17 avril 2009, la décision du 22 juin 2005. Le 2 juillet 2009, la requérante a introduit un recours en annulation à l’encontre de cette dernière décision, que la Commission a abrogée le 30 septembre 2009. Ensuite, le 22 juin 2010, la Commission a notifié à l’IGFSE un nouveau projet de décision, qui a été notifié le 15 juillet 2010 à la requérante. Cette dernière s’est prononcée à son sujet le 4 août 2010. Le 18 octobre 2010, l’IGFSE a demandé à la Commission d’adopter une décision finale.

68      Le 27 octobre 2010, la Commission a adopté la décision attaquée, qui a été notifiée à la requérante le 11 novembre 2010.

69      Il ressort du rappel des faits ci-dessus que c’est en raison des difficultés et des retards au niveau national que la phase de la procédure administrative, comprise entre le 22 juin 2005 et le 27 octobre 2010, a été aussi longue. Notamment, il convient d’observer que deux périodes significativement longues postérieures à l’information concernant le classement de la procédure pénale nationale, respectivement comprises, d’une part, entre le 13 novembre 1998 et le 27 septembre 2004 et, d’autre part, entre le 22 juin 2005 et le 6 janvier 2009, au sujet desquelles aucune explication précise n’a été fournie, ne sauraient être imputées à la Commission. Or, seules les lenteurs imputables à cette dernière pourraient amener à conclure à l’inobservation du délai raisonnable (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2005, Branco/Commission, point 65 supra, point 122).

70      En conséquence, il y a lieu de conclure que le délai pris par la Commission pour adopter la décision attaquée s’explique par le contexte spécifique de l’affaire ainsi que par les circonstances particulières ayant caractérisé les différentes étapes procédurales et que le délai en cause ne saurait être considéré comme excessif.

71      Il convient aussi de rejeter l’argument de la requérante selon lequel elle aurait été convaincue de la régularité des dépenses réalisées en raison de la durée de la procédure. En effet, la requérante était au courant des difficultés procédurales causées par les irrégularités dont elle était à l’origine, notamment de l’audit effectué par l’IGF et des investigations susceptibles de déboucher sur une procédure pénale à son encontre. En outre, le 17 avril 2009, l’IGFSE lui a notifié la décision de la Commission du 22 juin 2005.

72      Dès lors, il convient de conclure que la prétendue insécurité juridique que la requérante met en rapport avec le délai en cause ne saurait entraîner l’annulation de la décision attaquée.

73      Par ailleurs, pour le cas où il conviendrait d’interpréter les arguments de la requérante comme invoquant une prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 2950/83, la décision finale de la Commission reste subordonnée au respect par le bénéficiaire des conditions fixées pour l’octroi du concours financier. Dès lors, le principe de protection de la confiance légitime ne saurait s’opposer à la réduction d’un concours de l’Union lorsque lesdites conditions n’ont pas été respectées (voir arrêt Mediocurso/Commission, point 61 supra, point 61, et la jurisprudence citée).

74      Quant à la violation alléguée des droits de la défense, la requérante se borne à affirmer que le délai pris par la Commission pour l’adoption de la décision attaquée compromet ses possibilités de rapporter la preuve que les reproches qui lui sont adressés ne sont pas fondés. La requérante aurait perdu son droit de présenter ses observations en temps utile, c’est-à-dire à un moment où elle disposait encore de documents qui lui auraient permis de justifier les dépenses considérées comme non éligibles par la Commission.

75      Le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci constitue un principe fondamental du droit de l’Union et doit être assuré, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause. Ce principe exige que toute personne à l’encontre de laquelle peut être prise une décision affectant de manière sensible ses intérêts soit mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments retenus à sa charge pour fonder une telle décision (voir arrêt du Tribunal du 10 décembre 2009, Cofac/Commission, T‑158/07, non publié au Recueil, point 35, et la jurisprudence citée).

76      Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 73 ci-dessus, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 2950/83, la décision finale reste subordonnée au respect par le bénéficiaire des conditions fixées pour l’octroi du concours financier. En outre, selon l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement, tant les autorités nationales que la Commission ont le droit de contrôler le respect par le bénéficiaire de ces conditions. Il en découle que, pour s’assurer le versement du concours, les bénéficiaires sont tenus de conserver les pièces justificatives démontrant qu’ils ont rempli ces conditions au moins jusqu’à la décision finale de la Commission sur la demande de paiement du solde (arrêt Partex/Commission, point 60 supra, point 196).

77      Dans le cas d’espèce, une première décision sur la demande de paiement du solde a été adoptée le 22 juin 2005, notifiée le 17 avril 2009 à la requérante et abrogée le 30 septembre 2009. Cependant, dans un tel contexte et au vu, notamment, des raisons pour lesquelles cette décision a été abrogée, la requérante devait raisonnablement savoir que la Commission allait adopter une nouvelle décision dans le dossier concerné. Le projet de cette décision lui a effectivement été notifié le 15 juillet 2010 et la décision attaquée a été adoptée le 27 octobre 2010.

78      Par conséquent, il y a lieu de rejeter le grief tiré d’une violation des droits de la défense.

79       Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

80      La requérante soutient que la décision attaquée ne répond pas aux exigences de motivation imposées par l’article 296 TFUE en ce qu’elle n’expose pas les raisons qui ont conduit la Commission à réduire le montant du concours financier octroyé au titre du FSE.

81      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver une décision individuelle a pour but de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est, éventuellement, entachée d’un vice permettant d’en contester la validité et de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. La portée de cette obligation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Vlaams Fonds voor de Sociale Integratie van Personen met een Handicap/Commission, T‑102/00, Rec. p. II‑2433, point 100, et la jurisprudence citée).

82      Une décision portant réduction du montant d’un concours du FSE initialement accordé entraînant, notamment, des conséquences graves pour le bénéficiaire du concours, celle-ci doit faire clairement apparaître les motifs qui justifient la réduction du concours par rapport au montant initialement agréé. En outre, la motivation d’une telle décision doit permettre au bénéficiaire du concours de prendre connaissance également du mode de calcul de la réduction opérée (arrêt Vlaams Fonds voor de Sociale Integratie van Personen met een Handicap/Commission, point 81 supra, point 101).

83      Or, la question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte, ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt Mediocurso/Commission, point 61 supra, point 41, et la jurisprudence citée).

84      Dans l’hypothèse où la Commission confirme purement et simplement la proposition d’un État membre de réduire un concours initialement accordé, une décision de la Commission peut être considérée comme dûment motivée, au sens de l’article 296 TFUE, soit lorsqu’elle fait elle-même clairement apparaître les motifs qui justifient la réduction du concours, soit, à défaut, lorsqu’elle se réfère clairement à un acte des autorités nationales compétentes de l’État membre concerné dans lequel celles-ci exposent clairement les motifs d’une telle réduction (voir arrêt Mediocurso/Commission, point 61 supra, point 42, et la jurisprudence citée).

85      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient de vérifier si la décision attaquée est suffisamment motivée.

86      Dans la décision attaquée, la Commission a confirmé la proposition qui lui avait été faite par l’IGFSE de ramener à 426 070 PTE le montant du concours à la charge du FSE octroyé par la décision C (89) 570.

87      En outre, il convient d’observer que la décision attaquée, lorsqu’elle aborde les raisons qui ont justifié la réduction du concours financier du FSE, renvoie clairement à plusieurs documents émanant des autorités portugaises, notamment au courrier de l’IGFSE du 27 septembre 2004 et à la note n° 32/2004 du 4 juillet 2004. Il convient de préciser que ces documents ont bien été communiqués à la requérante.

88      La requérante fait valoir qu’il ressort du rapport d’audit ainsi que de la note n° 32/2004 que l’IGF a laissé toute une série de postes de dépenses à l’appréciation du DAFSE, mais que celui-ci ne s’est pas prononcé sur ces derniers.

89      Par courrier du 27 septembre 2004, l’IGFSE a informé la Commission que, dans le cadre du dossier concerné, le coût total de l’action devait être fixé à 956 339 PTE. En effet, l’IGFSE estimait que les dépenses non éligibles d’un montant de 4 118 809 PTE devaient être soustraites des dépenses préalablement évaluées à un montant de 6 226 188 PTE, puis minorées de 1 151 040 PTE par la Commission (voir points 5 et 16 ci-dessus). Ces conclusions sont rappelées dans la décision attaquée, qui fait référence audit courrier.

90      Ce calcul ainsi que les détails des montants des dépenses non éligibles sont présentés dans le tableau intitulé « Structure des coûts » qui est joint à la note n° 32/2004. Il en ressort que le DAFSE avait considéré qu’un montant total de 3 306 705 PTE correspondant à des dépenses non éligibles devait être ajouté au montant de 1 963 144 PTE déjà estimé comme non éligible par l’IGF. Le montant résultant de l’addition de ces deux montants s’élevait à 5 269 849 PTE. Enfin, l’IGFSE a procédé à la compensation de ce dernier montant avec le montant de 1 151 040 PTE déjà estimé comme non éligible par la Commission (voir point 89 ci-dessus). Ainsi, il ressort clairement du tableau en question que l’IGFSE est parvenu à calculer le coût total de l’action, soit 956 339 PTE, en déduisant les dépenses estimées comme non éligibles, soit 5 269 849 PTE, du montant total des dépenses, évalué à 6 226 188 PTE dans la demande de paiement du solde du 16 octobre 1990. Il convient de préciser que, dans le tableau en question, les montants en cause sont détaillés et chaque chiffre correspond à une rubrique précise, exposée et analysée dans la même note n° 32/2004.

91      En outre, concernant la fixation de la contribution du FSE, il convient d’observer qu’il ressort de la décision attaquée ainsi que du courrier du 27 septembre 2004 et du tableau mentionné plus haut que celle-ci a été obtenue en appliquant un taux de 55 % au montant résultant du coût total de l’action concernée (956 339 PTE), minoré du montant correspondant aux recettes provenant de la même action (86 032 PTE) et du montant à charge des entités privées (95 634 PTE), soit 774 673 PTE x 55 %, ce qui correspond à 426 070 PTE. Cela ressort aussi du tableau relatif au dossier en cause qui figure au paragraphe 4 du courrier de l’IGFSE de notification à la requérante de la décision attaquée.

92      Dès lors, il y a lieu de considérer que la décision attaquée était suffisamment claire quant au mode de calcul de la réduction opérée.

93      Quant à la décision des autorités nationales d’estimer certaines dépenses « non éligibles », la requérante soutient que la motivation de cette décision est manifestement insuffisante, car elle est basée uniquement sur des doutes et non sur des certitudes. Par ailleurs, s’agissant des dépenses « potentiellement non éligibles », il y aurait une absence totale de motivation. Il convient d’observer que la requérante ne précise pas à quelles dépenses spécifiques elle se réfère. Notamment, elle fait référence à un seul point de la requête, celui-ci mentionnant des dépenses laissées à l’appréciation du DAFSE par l’IGF.

94      En toute hypothèse, cette argumentation ne saurait être accueillie. Premièrement, les raisons pour lesquelles le DAFSE a estimé que les dépenses laissées à son appréciation n’étaient pas éligibles sont exposées au paragraphe 5 de la note n° 32/2004, où sont évoquées les difficultés liées à la justification de ces dépenses constatées par l’IGF. Le DAFSE a conclu au paragraphe 5.7 de la même note que, en raison de ces difficultés, ces dépenses devaient être considérées comme non éligibles. Deuxièmement, en ce qui concerne les dépenses considérées comme non éligibles par l’IGF, la motivation est exposée dans le rapport d’audit, qui détaille clairement les irrégularités commises par la requérante et auquel la décision attaquée fait référence.

95      Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel cette motivation serait basée sur les seuls doutes liés à la documentation qu’elle a présentée doit être rejeté. En effet, un tel argument vise en réalité à contester le bien-fondé de la décision attaquée et ne saurait pas être soulevé dans le cadre d’une prétendue violation de l’obligation de motivation. En outre, la requérante ne fournit pas davantage d’arguments ni d’éléments de preuve tendant à démontrer une éventuelle erreur d’appréciation de la part des autorités.

96      Dès lors, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

97      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

98      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      L’Associação de Empresas de Construção e Obras Públicas e Serviços (Aecops) est condamnée aux dépens.

Dittrich          Wiszniewska-Białecka                   Prek

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 avril 2013.

Signatures


* Langue de procédure : le portugais.