Language of document : ECLI:EU:T:2005:379

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

27 octobre 2005(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Marque verbale antérieure communautaire et nationale OBELIX – Demande de marque verbale communautaire MOBILIX – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T-336/03,

Les Éditions Albert René, établie à Paris (France), représentée par Me J. Pagenberg, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur  (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme S. Laitinen, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Orange A/S, établie à Copenhague (Danemark), représentée par Me J. Balling, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 14 juillet 2003 (affaire R 0559/2002‑4), relative à une procédure d’opposition entre Les Éditions Albert René et Orange A/S,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M.  I. Natsinas, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 1er octobre 2003,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 30 juillet 2004,

à la suite de l’audience du 2 juin 2005,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 7 novembre 1997, Orange A/S (ci-après la « demandeuse ») a présenté, en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal MOBILIX.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, en ce qui concerne le présent recours, des classes 9, 16, 35, 37, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        « appareils, instruments et installations de télécommunications, y compris de téléphonie, téléphones et téléphones cellulaires, y compris antennes et réflecteurs paraboliques, accumulateurs et batteries, transformateurs et convecteurs, codeurs et décodeurs, cartes codées et cartes pour l’encodage, cartes téléphoniques, appareils et instruments de signalisation et d’enseignement, répertoires téléphoniques électroniques, pièces et accessoires (non compris dans d’autres classes) de tous les produits précités », relevant de la classe 9 ;

–        « cartes téléphoniques », relevant de la classe 16 ;

–        « services de répondeurs automatiques (pour des clients temporairement absents), conseil et assistance en matière de gestion et d’organisation commerciales, conseil et assistance en matière d’assistance aux tâches commerciales », relevant de la classe 35 ;

–        « installation et réparation de téléphones, construction, réparation, installation », relevant de la classe 37 ;

–        « télécommunications, y compris informations sur les télécommunications, communications par téléphone et télégraphe, communications par écran d’ordinateur et téléphone cellulaire, transmission par télécopieur, radiodiffusion et télédiffusion, y compris via la télévision câblée et l’internet, transmission de messages, location d’appareils de transmission de messages, location d’appareils de télécommunications, y compris appareils de téléphonie », relevant de la classe 38 ;

–        « recherche scientifique et industrielle, ingénierie, y compris projection d’infrastructures et d’installations de télécommunications, en particulier pour la téléphonie, et programmation d’ordinateurs, conception, entretien et mise à jour de logiciels, location d’ordinateurs et de programmes informatiques », relevant de la classe 42.

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 1/99, du 4 janvier 1999.

5        Elle a fait l’objet d’une opposition formée par Les Éditions Albert René (ci-après la « requérante »). Ont été invoqués les droits antérieurs suivants, relatifs au terme « obelix » :

a)       marque antérieure enregistrée, protégée par l’enregistrement de la marque communautaire n° 16 154 du 1er avril 1996 pour les produits et services suivants, dans la mesure où ils revêtent un intérêt pour la présente procédure :

–        « appareils et instruments électrotechniques, électroniques, photographiques, cinématographiques, optiques et d’enseignement (à l’exception des appareils de projection) compris dans la classe 9, jeux électroniques avec ou sans écran, ordinateurs, modules de programmes, programmes informatiques enregistrés sur supports de données, en particulier les jeux vidéos », relevant de la classe 9 ;

–        « papier, carton ; produits en ces matières, produits de l’imprimerie (compris dans la classe 16), journaux et revues, livres ; articles pour reliures (fils, toiles et étoffes pour reliures) ; photographies ; papeterie, adhésifs (pour la papeterie et les produits de l’imprimerie) ; matériel pour les artistes (matériaux pour le dessin, la peinture et le modelage) ; pinceaux ; machines à écrire et articles de bureau (à l’exception des meubles) et machines et appareils de bureau (compris dans la classe 16) ; matériel d’instruction et d’enseignement (autre que les appareils) ; matières plastiques pour l’emballage, non comprises dans d’autres classes ; cartes à jouer ; caractères d’imprimerie ; clichés », relevant de la classe 16 ;

–        « jeux, jouets ; articles de gymnastique et de sport (compris dans la classe 28) ; décoration pour arbres de Noël », relevant de la classe 28 ;

–        « marketing et publicité », relevant de la classe 35 ;

–        « projections de films, production de films, location de films ; publication de livres et de revues ; éducation et divertissement ; organisation de foires et d’exposition ; festivités populaires, exploitation d’un parc d’attractions, production de spectacles musicaux et conférences en direct ; exposition d’imitations architecturales et spectacles à caractère historico-culturel et folklorique », relevant de la classe 41 ;

–        « hébergement et restauration ; photographies ; traductions ; gestion et exploitation de droits d’auteur ; exploitation de propriété intellectuelle », relevant de la classe 42.

b)       marque antérieure notoirement connue dans tous les États membres pour les produits et services compris dans les classes 9, 16, 28, 35, 41 et 42.

6        À l’appui de son opposition, la requérante a fait valoir l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement n° 40/94.

7        Par décision du 30 mai 2002, la division d’opposition a rejeté l’opposition et a autorisé la poursuite de la procédure d’enregistrement de la demande de marque communautaire. Après avoir estimé que la notoriété de la marque antérieure n’avait pas été démontrée de façon concluante, la division d’opposition a conclu que les marques n’étaient pas, dans l’ensemble, similaires. Il existerait une certaine similitude auditive, mais celle‑ci serait compensée par l’aspect visuel des marques et, plus particulièrement, par les notions très différentes qu’elles véhiculent : téléphones portables dans le cas de MOBILIX, et obélisques dans le cas d’OBELIX. En outre, l’enregistrement antérieur serait plutôt identifié au célèbre dessin animé, ce qui le distinguerait encore davantage, d’un point de vue conceptuel, de la marque demandée.

8        À la suite du recours formé par la requérante le 1er juillet 2002, la quatrième chambre de recours a rendu sa décision le 14 juillet 2003 (ci‑après la « décision attaquée »). Elle a partiellement annulé la décision de la division d’opposition. La chambre de recours a tout d’abord précisé qu’il y avait lieu de considérer l’opposition comme étant exclusivement fondée sur le risque de confusion. Elle a ensuite indiqué qu’il était possible de percevoir une certaine similitude entre les marques. Pour ce qui est de la comparaison des produits et des services, la chambre a estimé que les « appareils et instruments de signalisation et d’enseignement » de la demande de marque communautaire et les « appareils et instruments optiques et d’enseignement » de l’enregistrement antérieur, compris dans la classe 9, étaient similaires. Elle est parvenue à la même conclusion pour les services de la classe 35 intitulés « conseil et assistance en matière de gestion et d’organisation commerciales, conseil et assistance en matière d’assistance aux tâches commerciales » pour la demande de marque communautaire, et « marketing et publicité » pour l’enregistrement antérieur. La chambre a conclu que, étant donné le degré de similitude entre les signes en cause, d’une part, et entre ces produits et services spécifiques, d’autre part, il existait un risque de confusion dans l’esprit du public concerné. Elle a donc refusé la demande de marque communautaire pour les « appareils et instruments de signalisation et d’enseignement » et pour les services intitulés « conseil et assistance en matière de gestion et d’organisation commerciales, conseil et assistance en matière d’assistance aux tâches commerciales », et elle l’a admise pour les produits et services restants.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      Lors de l’audience, la requérante a conclu, en outre, à ce qu’il plaise au Tribunal de renvoyer l’affaire devant la chambre de recours.

11      La défenderesse conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      À l’appui de son recours, la requérante avance trois moyens tirés, premièrement, de la méconnaissance de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, deuxièmement, de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement nº 40/94 et, troisièmement, de la méconnaissance de l’article 74 du règlement nº 40/94.

1.     Sur la recevabilité

 Sur la recevabilité de nouveaux éléments de preuve

 Arguments des parties

13      La défenderesse fait valoir que les cinq documents que la requérante joint en annexe à sa requête afin de prouver la notoriété du signe OBELIX n’ont pas été produits précédemment dans le cadre de la procédure devant l’OHMI et que, partant, ils ne devraient pas être pris en considération.

14      Interrogée par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a estimé recevables les pièces critiquées.

 Appréciation du Tribunal

15      En annexe à sa requête, la requérante a joint quelques documents afin de prouver la notoriété du signe OBELIX. Il est constant que ces documents n’ont pas été produits précédemment dans le cadre de la procédure devant l’OHMI.

16      Il y a lieu de rappeler qu’un recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94 et que, dans le contentieux de l’annulation, la légalité de l’acte attaqué doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été pris [arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBeBé), T‑164/03, non encore publié au Recueil, point 29]. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des éléments de preuve présentés pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de telles pièces serait contraire à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. Dès lors, les pièces produites pour la première fois devant le Tribunal sont irrecevables.

 Sur la recevabilité du moyen tiré de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

17      La requérante fait valoir que, puisque OBELIX est une marque connue, et même renommée, il ressort de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 que celle-ci est protégée, même en dehors du domaine de similitude des produits et des services, contre un usage du caractère distinctif ou de la renommée ou contre une atteinte au caractère distinctif ou à la renommée, étant entendu qu’il suffit que la marque de la requérante soit connue pour une partie des produits ou services enregistrés.

18      La défenderesse soutient que la requérante n’est pas en droit de prétendre que la chambre de recours a enfreint l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, ni de demander au Tribunal de statuer sur une requête visant à l’application de cette disposition, alors qu’une telle demande n’a pas été introduite en bonne et due forme durant la phase administrative de la procédure devant l’OHMI.

 Appréciation du Tribunal

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, « [s]ur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans la Communauté [...] et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice ».

20      Il est constant, en l’espèce, que l’application éventuelle de cette disposition n’a, à aucun moment, été demandée par la requérante devant la chambre de recours et que celle-ci ne l’a, par conséquent, pas examinée. En effet, la requérante a expressément indiqué, devant la chambre de recours, que les motifs sur lesquels elle fondait son recours étaient ceux relatifs aux articles 8, paragraphe 1, sous b), et 8, paragraphe 2, du règlement n° 40/94. Il convient, plus particulièrement, de constater que si la requérante a invoqué, dans son opposition à la demande de marque et devant la chambre de recours, la renommée de sa marque antérieure, c’était uniquement dans le contexte de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, à savoir aux fins d’étayer l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

21      En outre, il y a lieu de relever, en premier lieu, que, conformément à l’article 74 du règlement n° 40/94, « dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen [de l’OHMI] est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties ».

22      Il convient de rappeler, en second lieu, que, comme indiqué au point 16 ci-dessus, le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94 [arrêts du Tribunal du 5 mars 2003, Alcon/OHMI – Dr. Robert Winzer Pharma (BSS), T‑237/01, Rec. p. II‑411, point 61 ; du 6 mars 2003, DaimlerChrysler/OHMI (Calandre), T‑128/01, Rec. p. II‑701, point 18, et du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 67]. Le contrôle de légalité opéré par le Tribunal sur une décision de la chambre de recours doit donc se faire au regard des questions de droit qui ont été portées devant cette dernière [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 5 mars 2003, Unilever/OHMI (Tablette ovoïde), T‑194/01, Rec. p. II‑383, point 16, et du 22 octobre 2003, Éditions Albert René/OHMI – Trucco (Starix), T‑311/01, Rec. p. II‑4625, point 70].

23      Par ailleurs, l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure, également mentionné au point 16 ci-dessus, précise expressément que « [l]es mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours ».

24      Dès lors, la requérante ne saurait ni reprocher à la chambre de recours d’avoir violé l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 ni obtenir du Tribunal qu’il statue sur une demande d’application éventuelle de cette disposition.

25      Le présent moyen doit donc être rejeté comme étant irrecevable.

 Sur le nouveau chef de conclusions présenté lors de l’audience

 Arguments des parties

26      Lors de l’audience, la requérante a demandé, à titre subsidiaire, le renvoi de l’affaire devant la chambre de recours pour qu’elle ait la possibilité de prouver que sa marque jouit d’une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94.

27      La défenderesse conclut à l’irrecevabilité de ce chef de conclusions.

 Appréciation du Tribunal

28      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure, la partie requérante a l’obligation de définir l’objet du litige et de présenter ses conclusions dans l’acte introductif d’instance. Si l’article 48, paragraphe 2, du même règlement permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et à modifier ainsi l’objet du litige (arrêts de la Cour du 25 septembre 1979, Commission/France, 232/78, Rec. p. 2729, point 3, et du Tribunal du 12 juillet 2001, Banatrading/Conseil, T‑3/99, Rec. p. II‑2123, point 28).

29      Il s’ensuit que la requérante n’est pas recevable à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et, partant, à modifier l’objet du litige. Le chef de conclusions en question ne peut donc qu’être écarté comme irrecevable.

2.     Sur le fond

 Sur la violation de l’article 74 du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

30      La requérante fait valoir que la demandeuse de la marque n’avait pas contredit son affirmation avancée lors de la procédure d’opposition selon laquelle sa marque OBELIX est dotée d’un important caractère distinctif. Selon la requérante, à défaut de contestation, la chambre de recours aurait dû partir du principe que la marque de l’opposante OBELIX était renommée. Elle en conclut que la chambre de recours a méconnu l’article 74, paragraphe 1, du règlement n° 40/94.

31      La défenderesse fait valoir que la division d’opposition de l’OHMI a procédé à une appréciation détaillée des éléments de preuve produits et a conclu qu’ils n’étaient pas suffisants pour démontrer la notoriété du signe non enregistré ni le degré élevé du caractère distinctif du signe enregistré. Dès lors, le premier moyen de la requérante devrait être déclaré manifestement non fondé.

 Appréciation du Tribunal

32      Comme souligné au point 22 ci-dessus, aux termes de l’article 74, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen réalisé par l’OHMI est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

33      Cette disposition limite l’examen opéré par l’OHMI dans une double mesure. Elle vise, d’une part, la base factuelle des décisions de l’OHMI, à savoir les faits et preuves sur lesquels celles-ci peuvent être valablement fondées [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 juin 2002, Chef Revival USA/OHMI – Massagué Marín (Chef), T‑232/00, Rec. p. II‑2749, point 45], et, d’autre part, la base juridique de ces décisions, à savoir les dispositions que l’instance saisie est tenue d’appliquer. Ainsi, la chambre de recours, en statuant sur un recours contre une décision mettant fin à une procédure d’opposition, ne saurait fonder sa décision que sur les motifs relatifs de refus que la partie concernée a invoqués ainsi que sur les faits et preuves y afférents présentés par cette partie [arrêts du Tribunal du 23 septembre 2003, Henkel/OHMI – LHS (UK) (KLEENCARE), T‑308/01, Rec. p. II‑3253, point 32, et du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, non encore publié au Recueil, point 28].

34      À cet égard, s’il ressort de l’article 74, paragraphe 1, du règlement nº 40/94 que, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’OHMI ne peut procéder à l’examen d’office des faits, cela ne signifie pas pour autant qu’il est obligé de tenir pour établis les points invoqués par une partie qui n’ont pas été remis en cause par l’autre partie à la procédure. Cette disposition ne lie l’OHMI qu’au regard des faits, preuves et observations sur lesquels se fonde sa décision.

35      En l’espèce, la requérante a fait valoir devant l’OHMI une certaine appréciation juridique, mais ni la division d’opposition ni la chambre de recours n’ont considéré que la requérante l’avait étayée de façon concluante par des faits ou des preuves. Elles en ont conclu qu’ils n’étaient pas suffisants pour démontrer l’appréciation juridique en cause, à savoir la notoriété du signe non enregistré et le degré élevé de caractère distinctif du signe enregistré.

36      Par conséquent, le moyen de la requérante tiré de la violation de l’article 74 du règlement nº 40/94 doit être déclaré non fondé.

 Sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

37      Premièrement, en ce qui concerne la comparaison des produits et des services, la requérante soutient que les produits visés par la marque demandée et relevant de la classe 9, autres que les « appareils de signalisation et d’enseignement », sont également largement semblables, à tout le moins, à ceux de la classe 9 visés par la marque de l’opposante.

38      Elle fait valoir que tous les produits restants de la classe 9, visés par la marque demandée, comme les « appareils, instruments et installations de télécommunications, y compris de téléphonie, téléphones et téléphones cellulaires y compris antennes et réflecteurs paraboliques, accumulateurs et batteries, transformateurs et convecteurs, codeurs et décodeurs, cartes codées et cartes pour l’encodage, cartes téléphoniques, répertoires téléphoniques électroniques, pièces et accessoires (non compris dans d’autres classes) de tous les produits précités » comportent des éléments constitutifs essentiels des produits de la requérante. Ainsi, les téléphones cellulaires digitaux et téléphones de la demandeuse figureraient dans les modules de programmes de la requérante. Comme la liste des produits de la demandeuse comporterait également des pièces et accessoires de ses produits principaux, les modules de programmes et les pièces de la demandeuse seraient même identiques.

39      Selon la requérante, il en va ainsi pour les autres produits de la demandeuse comme les « appareils, instruments et installations de télécommunications, y compris de téléphonie, codeurs et décodeurs », parce qu’ils contiennent eux aussi des modules de programmes. À cela s’ajouterait le fait que ces produits de la classe 9, visés par la marque demandée, seraient essentiellement commandés par processeur et qu’ils pourraient aussi être exploités au moyen de logiciels. Or, les programmes informatiques feraient partie de la liste de ses produits. Elle en conclut que les produits de la classe 9 visés dans la demande de marque et les siens relevant de ladite classe présentent non pas une similitude éloignée, mais une similitude moyenne.

40      Ensuite, la requérante fait valoir que les cartes téléphoniques de la demandeuse, qui relèvent de la classe 16, constituent des cartes téléphoniques codées. Selon un arrêt de la Cour fédérale allemande des brevets du 7 juillet 1997, elles seraient semblables aux produits de la requérante dénommés « programmes informatiques enregistrés sur supports de données ».

41      La requérante rappelle en outre que la chambre de recours a considéré comme n’étant pas semblables à ses produits les autres services de la demandeuse, à savoir :

–        « services de répondeurs automatiques pour des clients temporairement absents », relevant de la classe 35 ;

–        « installation et réparation de téléphones, construction, réparation, installation », relevant de la classe 37 ;

–        « télécommunications, y compris informations sur les télécommunications, communications par téléphone et télégraphe, communications par écran d’ordinateur et téléphone cellulaire, transmission par télécopieur, radiodiffusion et télédiffusion, y compris via la télévision câblée et l’internet, transmission de messages, location d’appareils de transmission de messages, location d’appareils de télécommunications, y compris appareils de téléphonie », relevant de la classe 38 ;

–        « recherche scientifique et industrielle, ingénierie, y compris projection d’infrastructures et d’installations de télécommunications, en particulier pour la téléphonie, et programmation d’ordinateurs, conception, entretien et mise à jour de logiciels, location d’ordinateurs et de programmes informatiques », relevant de la classe 42.

42      Elle fait valoir que les principes développés par la jurisprudence, applicables à la similitude entre produits, s’appliquent par analogie au rapport entre produits et services, et inversement. Il serait déterminant de savoir si, en cas d’utilisation de signes similaires, les milieux intéressés risquent de se méprendre sur le lieu d’origine des produits et des services.

43      D’après ces principes, il faudrait admettre une similitude entre les services susmentionnés de la demandeuse et les produits de la requérante parce que les fabricants de produits comme les « ordinateurs, modules de programmes, programmes informatiques enregistrés sur supports de données » couvrent également les services correspondants de la demandeuse. En s’appuyant sur une décision de la Cour fédérale allemande des brevets, la requérante conclut qu’il existe une similitude entre les services de la demandeuse, relevant de la classe 38, et ses propres produits, relevant de la classe 9, puisqu’une partie significative du public pourrait croire que les fabricants et les distributeurs de matériel de traitement des données fournissent également les services de télécommunications correspondants, si la marque est la même.

44      La requérante soutient qu’il faut admettre, pour les mêmes motifs, une similitude entre les services de la demandeuse, relevant des classes 35, 37 et 42, d’une part, et ses propres produits, relevant de la classe 9, d’autre part. Ces services, tels les « services de répondeurs automatiques pour des clients temporairement absents et l’installation et réparation de téléphones, construction, réparation, installation », sont eux aussi, fait-elle valoir, assumés par les fabricants de matériel informatique (ordinateurs), d’une part, et exploités au moyen de logiciels, d’autre part.

45      Il en irait de façon analogue pour les services suivants de la demandeuse : « Recherche scientifique et industrielle, ingénierie, y compris projection d’infrastructures et d’installation de télécommunications, en particulier pour la téléphonie, et programmation d’ordinateurs, conception, entretien et mise à jour de logiciels, location d’ordinateurs et de programmes informatiques ». Selon la requérante, la recherche scientifique et industrielle, de même que l’ingénierie, y compris la projection d’installations de télécommunications, constituent un domaine d’activités qui, techniquement et aussi économiquement, se rapproche tellement du matériel et des logiciels informatiques que l’idée a pu s’imposer au commerce, ou du moins à certains de ses acteurs essentiels, que les fabricants ou distributeurs de matériel de traitement des données opèrent, par exemple, également dans le domaine de projection du service de télécommunications correspondant pour autant qu’il soit fait usage de la même marque.

46      La requérante déclare ne pas comprendre la thèse de la chambre de recours selon laquelle il n’existe aucune similitude entre les services de la demandeuse consistant en la « location d’ordinateurs et de programmes informatiques » et ses propres produits dénommés « ordinateurs et programmes informatiques enregistrés sur supports de données ». Un coup d’œil sur l’internet suffirait à reconnaître le fait que les distributeurs d’ordinateurs offrent également la possibilité de les louer. Il en irait de même pour les logiciels.

47      Deuxièmement, en ce qui concerne la comparaison des signes, la requérante fait valoir qu’il existe une forte similitude entre les deux signes OBELIX et MOBILIX. La marque OBELIX étant protégée pour l’ensemble du marché intérieur, il conviendrait, en particulier, de recourir à la façon dont les marques y sont comprises sur la base de leur impression auditive et conceptuelle, et de tenir compte des conditions du marché et des habitudes des consommateurs, propres au marché intérieur.

48      La requérante soutient qu’il convient avant tout de tenir compte du fait que les consommateurs considéreront les deux signes comme des marques trisyllabiques qui sont accentuées sur des syllabes identiques et dont la séquence de consonnes est identique et la séquence de voyelles presque identique, puisque les voyelles « e » et « i » ont un son très proche. L’unique différence résiderait dans l’initiale « m » de la marque de la demandeuse qui, en raison de sa faible sonorité, pourrait néanmoins facilement échapper à l’auditeur dans un environnement où le niveau sonore est assez élevé.

49      La requérante fait valoir que c’est l’impression d’ensemble qui importe et que c’est le souvenir visuel qui est le plus souvent déterminant. L’acheteur qui ne se souviendrait que vaguement de la marque OBELIX croirait reconnaître dans le signe similaire MOBILIX la marque qu’il connaît déjà, et confondrait les entreprises dont proviennent les produits.

50      Troisièmement, en ce qui concerne le risque de confusion, la requérante fait valoir que, si l’on tient compte de l’interdépendance entre la similitude des produits, la similitude des marques et le caractère distinctif de la marque de l’opposante, les dissemblances entre les marques dans le domaine des produits et services identiques et, dans une large mesure, des produits et services similaires ne sont pas suffisantes pour empêcher notamment des confusions sonores en raison de la notoriété de la marque de l’opposante.

51      La requérante fait valoir que la marque OBELIX fait partie d’une famille de marques qui comprend également des marques inspirées d’autres personnages de la série « Astérix » et qui est protégée à travers le monde dans 50 pays. Le préjudice porté au caractère distinctif résulterait de ce que l’on aurait, d’une part, cherché une référence au modèle renommé en accumulant les éléments sonores, visuels et conceptuels, et que l’on aurait, d’autre part, sciemment utilisé en l’espèce, sans la moindre raison linguistique plausible, un élément caractéristique qui existerait pour la série des marques issues de la famille « Astérix » : le suffixe « ix ». Il serait tout à fait concevable que le terme « mobilix » s’insère discrètement dans cette famille de marques et qu’il soit compris comme une dérivation du terme « obelix ».

52      La défenderesse soutient qu’il n’existe aucun risque de confusion dans l’esprit du public concerné. La différence visuelle évidente et la différence conceptuelle particulièrement importante qui existeraient entre les signes seraient susceptibles de compenser toute ressemblance auditive, même pour des produits et des services qui présentent une faible similitude.

 Appréciation du Tribunal

53      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, on entend par « marques antérieures », notamment, les marques communautaires dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire [article 8, paragraphe 2, sous a), i), du règlement n° 40/94].

54      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

55      Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 31 à 33, et la jurisprudence citée].

56      En l’espèce, ont été invoqués les droits antérieurs, relatifs au terme « obelix », correspondant à une marque communautaire et à une marque notoirement connue dans tous les États membres.

57      Par ailleurs, la grande majorité des produits et services en cause sont des produits et des services de consommation courante destinés à un usage quotidien. Ce ne sont que les services de la demande de marque communautaire compris dans la classe 42 (recherche scientifique et industrielle, etc.) qui sont destinés à un public plus spécialisé. Partant, le public ciblé par rapport auquel il faut apprécier le risque de confusion est le consommateur moyen de ces produits et services dans l’Union européenne, lequel est normalement informé, raisonnablement attentif et avisé.

58      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner la comparaison qui a été faite par la chambre de recours en ce qui concerne, d’une part, les produits concernés, et, d’autre part, les signes en conflit.

–       Quant à la comparaison des produits

59      Pour apprécier la similitude entre les produits ou services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre les produits ou services. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 23).

60      S’agissant des produits des classes 9 et 16 pour lesquels l’enregistrement est demandé, comme les « appareils, instruments et installation de télécommunications », « téléphones cellulaires », « codeurs et décodeurs », etc., la requérante soutient en substance qu’ils contiennent tous des composants essentiels des produits couverts par la marque.

61      Les arguments de la requérante ne peuvent qu’être rejetés. Certes, les ordinateurs sous différentes formes sont nécessaires au bon fonctionnement des « instruments et installations de télécommunications », et les « services de répondeurs automatiques (pour des clients temporairement absents) » peuvent occasionnellement être fournis par l’entité qui fabrique le matériel nécessaire, mais cela ne saurait suffire pour conclure que ces produits et services sont similaires, ni a fortiori « très similaires ». En effet, le simple fait qu’un produit donné soit utilisé comme pièce, équipement ou composant d’un autre n’est pas suffisant en soi pour prouver que les produits finaux, englobant ces composants, sont similaires, car, notamment, leur nature, leur destination et les clients concernés peuvent être tout à fait différents.

62      Par ailleurs, il ressort de la formulation de la liste des produits et des services de l’enregistrement antérieur pour la classe 9 que les domaines désignés par ce droit sont la photographie, le cinéma, l’optique, l’enseignement et les jeux vidéo. Cette liste des produits et des services est à rapprocher de celle qui est revendiquée dans la demande de marque communautaire, qui met en évidence que le domaine concerné est, de façon quasi exclusive, celui des télécommunications sous toutes ses formes. Les équipements de télécommunication entrent dans la catégorie des « appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images », qui fait partie de l’intitulé officiel de la classe 9 selon l’arrangement de Nice. Toutefois, cette partie de l’intitulé de la classe (« télécommunication ») n’a pas été revendiquée dans le droit antérieur, ce qui implique que les équipements de télécommunication n’étaient pas censés être couverts. La requérante a fait enregistrer sa marque pour un grand nombre de classes, mais elle n’a pas mentionné les « télécommunications » dans la spécification et elle a même exclu l’ensemble de la classe 38 de l’enregistrement. Or, la classe 38 concerne justement les services de « télécommunications ».

63      À cet égard, il y a lieu de partager l’observation de la chambre de recours selon laquelle l’enregistrement antérieur protège les « appareils et instruments électrotechniques, électroniques », mais que cette formulation large ne saurait être utilisée par la requérante comme un argument permettant de conclure à une très forte similitude ni, a fortiori, à une identité avec les produits visés dans la demande, alors qu’une protection spécifique aux appareils et instruments de télécommunication aurait pu être obtenue facilement.

64      Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant qu’il n’y avait pas lieu de considérer que les produits visés par la demande de marque communautaire, compris dans les classes 9 et 16, étaient inclus dans la liste des produits et des services, formulée de façon large, lors de l’enregistrement antérieur.

65      Ensuite, la requérante soutient, en ce qui concerne les services visés par la demande de marque communautaire et compris dans les classes 35, 37, 38 et 42, que, contrairement aux conclusions de la chambre de recours, ces produits sont également semblables aux siens, car les fabricants de produits tels que les « ordinateurs, modules de programmes, programmes informatiques enregistrés sur supports de données » fournissent également les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé. En s’appuyant sur une décision de la Cour fédérale allemande des brevets, la requérante conclut que ses produits de la classe 9 et les services de télécommunications de la classe 38 sont similaires, puisqu’une partie significative du public pourrait croire que les fabricants et les distributeurs de matériel de traitement des données fournissent également les services de télécommunications correspondants, si la marque utilisée est la même. Par ailleurs, la requérante fait valoir que cette observation vaut également pour les services compris dans les classes 35 et 37, car les services tels que les « répondeurs automatiques » (classe 35) et l’« installation et réparation de téléphones » (classe 37) sont parfois fournis par les fabricants du matériel informatique utilisé et fonctionnent parfois au moyen de logiciels. S’agissant des services intitulés « Recherche scientifique et industrielle, ingénierie, y compris projection d’infrastructures et d’installations de télécommunications » compris dans la classe 42, la requérante soutient qu’ils sont si étroitement liés au secteur du matériel informatique et des logiciels que le public pourrait croire qu’ils proviennent des mêmes fabricants ou distributeurs. Enfin, en ce qui concerne la « location d’ordinateurs et de programmes informatiques » (classe 42), comprise dans la demande de marque communautaire, la requérante rejette la conclusion de la chambre selon laquelle de tels services sont différents de ses « ordinateurs » et « programmes informatiques enregistrés sur supports de données ».

66      À titre liminaire, il convient d’observer que les principes applicables à la comparaison des produits s’appliquent également à la comparaison entre les services et entre les produits et les services. Certes, comme le fait observer la défenderesse, du fait de leur nature même, les produits sont généralement différents des services, mais il n’en demeure pas moins qu’ils peuvent être complémentaires, en ce sens par exemple que l’entretien du produit est complémentaire du produit lui-même, ou que les services peuvent avoir le même objet ou la même destination que le produit, et se trouver de ce fait en concurrence. Il s’ensuit que, dans certaines circonstances, une similitude peut être constatée même entre des produits et des services.

67      En l’espèce, en ce qui concerne, premièrement, les services visés dans la demande de marque au titre des classes 37 et 42, le point de vue de la chambre de recours selon lequel ils ne peuvent pas être considérés comme étant semblables aux services désignés par l’enregistrement antérieur ne saurait être critiqué. En effet, les services de la requérante compris dans la classe 42 (« Hébergement et restauration ; photographies ; traductions ; gestion et exploitation de droits d’auteur ; exploitation de propriété intellectuelle ») n’ont aucun rapport avec les services intitulés « Recherche scientifique et industrielle, ingénierie, y compris projection d’infrastructures et d’installations de télécommunications, en particulier pour la téléphonie, et programmation d’ordinateurs, conception, entretien et mise à jour de logiciels, location d’ordinateurs et de programmes informatiques », également compris dans la classe 42, pour lesquels la protection est demandée. Cette conclusion s’applique aussi aux services figurant dans la demande de marque communautaire compris dans la classe 37, à savoir « Installation et réparation de téléphones, construction, réparation, installation ».

68      Deuxièmement, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur quand elle a affirmé que les services énumérés dans la demande de marque communautaire au titre de la classe 38 (tels que décrits au point 3 ci-dessus) présentaient des différences suffisantes par rapport à ceux désignés par l’enregistrement antérieur et compris dans la classe 41 (tels que décrits au point 5 ci-dessus), eu égard à leur nature technique, aux compétences requises pour les proposer et aux besoins des consommateurs qu’ils sont destinés à satisfaire. Par conséquent, les services figurant dans la demande de marque compris dans la classe 38 présentent, tout au plus, une faible similitude avec les services protégés par le droit antérieur compris dans la classe 41.

69      Il y a lieu ensuite de rejeter l’argument de la requérante selon lequel tous les produits et services visés par la demande de marque communautaire peuvent être liés, d’une façon ou d’une autre, aux « ordinateurs » et aux « programmes informatiques » (classe 9) couverts par la marque antérieure. Comme le fait observer à juste titre la défenderesse, dans la société très technologique d’aujourd’hui, presque aucun équipement ou matériel électronique ou numérique ne fonctionne sans l’utilisation d’ordinateurs sous une forme ou une autre. Admettre la similitude dans tous les cas où le droit antérieur couvre les ordinateurs, et où les produits ou services désignés par le signe demandé sont susceptibles d’utiliser les ordinateurs, reviendrait assurément à outrepasser l’objet de la protection accordée par le législateur au titulaire d’une marque. Une telle position conduirait à une situation dans laquelle l’enregistrement des logiciels ou du matériel informatique serait pratiquement susceptible d’exclure l’enregistrement ultérieur de tout type de procédé ou de service électronique ou numérique exploitant ces logiciels ou ce matériel. Cette exclusion n’est, en tout état de cause, pas légitime en l’espèce, car la demande de marque communautaire est exclusivement destinée aux télécommunications sous leurs diverses formes, alors que l’enregistrement antérieur ne fait référence à aucune activité dans ce secteur. Par ailleurs, comme l’a correctement indiqué la chambre de recours, rien n’empêchait la requérante de faire également enregistrer sa marque pour la téléphonie.

70      Par conséquent, il doit être considéré que les produits et les services en cause ne sont pas similaires. Il existe toutefois une exception. En effet, il y a similitude entre la « location d’ordinateurs et de programmes informatiques » figurant dans la demande de marque communautaire (classe 42) et les « ordinateurs » et « programmes informatiques enregistrés sur supports de données » de la requérante (classe 9) en raison de leur complémentarité.

71      Il ressort de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante en ce qui concerne la comparaison des produits et services, à l’exception de celui concernant la similitude entre la « location d’ordinateurs et de programmes informatiques » figurant dans la demande de marque communautaire (classe 42) et les « ordinateurs » et « programmes informatiques enregistrés sur supports de données » de la requérante (classe 9).

–       Quant à la comparaison des signes

72      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence citée].

73      La requérante estime qu’il existe une forte similitude entre les deux signes OBELIX et MOBILIX. Visuellement, ils auraient quasiment la même longueur ainsi qu’une séquence similaire de lettres et, phonétiquement, ils produiraient des sons très similaires. Étant donné que la lettre initiale « m » du signe demandé produirait un son faible, il serait en outre probable qu’elle serait mal entendue dans un environnement bruyant.

74      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en cause étaient similaires. Elle y a indiqué que les deux signes étaient composés du même nombre de syllabes, de la même séquence de consonnes B-L-X, d’une séquence similaire de voyelles O-I (ou E)-I et de la même longueur. Ces caractéristiques communes créeraient une impression générale de similitude. Cette impression serait plus forte du point de vue phonétique, mais serait aussi appréciable du point de vue visuel, en particulier en raison du suffixe « ix ». Enfin, elle a conclu que, si les différences conceptuelles entre les deux marques n’étaient pas négligeables, elles n’étaient pas de nature à compenser les similitudes visuelles et phonétiques.

75      En ce qui concerne, premièrement, la comparaison visuelle, il convient de constater d’emblée que les marques en cause sont toutes deux des marques verbales. MOBILIX est composée de sept lettres et le signe antérieur OBELIX de six lettres. Bien qu’elles aient en commun les combinaisons de lettres « OB » et la terminaison « LIX », elles présentent un certain nombre de différences visuelles importantes, comme celles concernant les lettres suivant « OB » (« E » dans le premier cas, « I » dans le deuxième), le début des mots (la marque communautaire demandée commence par un « M » et la marque antérieure par un « O ») et leur longueur. À cet égard, il convient de rappeler que, normalement, l’attention du consommateur se dirige surtout sur le début du mot [arrêt du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, non encore publié au Recueil, point 83].

76      Par conséquent, il convient de conclure que les signes en cause ne sont pas visuellement similaires ou, qu’ils présentent, tout au plus, une très faible similitude visuelle.

77      Deuxièmement, en ce qui concerne la comparaison phonétique, il convient de constater que les deux marques se prononcent en trois syllabes, O-BE-LIX et MO-BIL-IX ou MO-BI-LIX. Certes, la première syllabe de la marque communautaire demandée, « MO », se prononce clairement, ce qui aide à différencier les signes en cause, mais il n’est pas à négliger que l’initiale « M », en raison de sa faible sonorité, peut, néanmoins, parfois échapper à l’auditeur. Par ailleurs, les deuxième et troisième syllabes se prononcent de façon très similaire, voire de façon identique pour la troisième.

78      Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de conclure que les signes en cause présentent une certaine similitude phonétique.

79      En ce qui concerne, troisièmement, la comparaison conceptuelle, il convient de relever que les mots « mobilix » et « obelix » n’ont de signification sémantique dans aucune des langues officielles de l’Union européenne. Toutefois, alors que le terme « mobilix » peut être facilement perçu comme faisant référence à quelque chose de mobile ou à la mobilité, le terme « obelix », quant à lui, même si le nom a été enregistré comme une marque verbale, c’est-à-dire sans référence visuelle au personnage de dessin animé, sera aisément identifié par le public moyen au personnage corpulent de la série de bande dessinée, largement connue dans l’ensemble de l’Union européenne, qui relate ses aventures aux côtés d’Astérix. Cette représentation concrète d’un personnage populaire rend fort improbable la confusion conceptuelle dans l’esprit du public avec des termes plus au moins proches (arrêt Starix, point 22 supra, point 58).

80      De pareilles différences conceptuelles peuvent neutraliser, dans certaines circonstances, les similitudes visuelles et phonétiques entre les signes concernés. Une telle neutralisation requiert qu’au moins l’un des signes en cause ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir immédiatement (arrêts BASS, point 72 supra, point 54, et PICARO, point 33 supra, point 56). En l’espèce, tel est le cas à propos du signe verbal OBELIX, ainsi qu’il vient d’être relevé au point précédent.

81      Il s’ensuit que les différences conceptuelles séparant les signes en cause sont de nature, en l’espèce, à neutraliser les similitudes phonétiques ainsi que les éventuelles similitudes visuelles relevées ci-dessus.

82      Dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, il y a lieu d’observer que les dissemblances entre les signes en cause sont suffisantes pour écarter l’existence d’un risque de confusion dans la perception du public ciblé, un tel risque présupposant que, cumulativement, le degré de similitude des marques en cause et le degré de similitude des produits ou services désignés par ces marques soient suffisamment élevés (arrêt Starix, point 22 supra, point 59).

83      Dans ces circonstances, l’appréciation de la chambre de recours sur le caractère distinctif de la marque antérieure ainsi que les allégations de la requérante quant à la renommée de cette marque n’ont aucune incidence sur l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, dans le cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêt Starix, point 22 supra, point 60).

84      En effet, un risque de confusion présuppose une identité ou une similitude entre les signes ainsi qu’entre les produits et services désignés, et la renommée d’une marque est un élément qui doit être pris en compte pour apprécier si la similitude entre les signes ou entre les produits et services est suffisante pour donner lieu à un risque de confusion (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Canon, point 59 supra, points 22 et 24). Or, étant donné que, en l’espèce, les signes en conflit ne peuvent pas être considérés comme identiques ou similaires, le fait que la marque antérieure est largement connue ou qu’elle jouit d’une renommée dans l’Union européenne ne peut pas affecter l’évaluation globale du risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt Starix, point 22 supra, point 61).

85      Enfin, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel, en vertu du suffixe « ix », il serait tout à fait concevable que le terme « mobilix » s’insère discrètement dans la famille de marques composée des personnages de la série « Astérix » et qu’il soit compris comme une dérivation du terme « obelix ». En effet, il suffit à cet égard de relever que la requérante ne saurait se prévaloir d’aucun droit exclusif sur l’emploi du suffixe « ix ».

86      Il résulte de ce qui précède qu’une des conditions indispensables pour appliquer l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 n’est pas satisfaite. Partant, il n’y a pas de risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure.

87      Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation de cette disposition doit être rejeté, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les arguments que la requérante a soulevés dans le cadre de ce moyen quant à la prétendue renommée de la marque antérieure. De même, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’audition de témoins, formée par la requérante en vue d’établir cette renommée. Enfin, il s’avère également que la conclusion selon laquelle il existe une similitude entre la « location d’ordinateurs et de programmes informatiques » figurant dans la demande de marque communautaire (classe 42) et les « ordinateurs » et « programmes informatiques enregistrés sur supports de données » de la requérante (classe 9) (voir point 71 ci-dessus) ne porte pas à conséquence.

88      Dès lors, il y a lieu de rejeter le recours intenté par la requérante.

 Sur les dépens

89      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante est condamnée aux dépens.

Jaeger

Tiili

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      M. Jaeger


* Langue de procédure : l’anglais.