Language of document : ECLI:EU:T:2012:645

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

5 décembre 2012(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative ‘F.F.R.’ – Marques nationales figuratives antérieures CHIANTI CLASSICO – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5 du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑143/11,

Consorzio vino Chianti Classico, établi à Radda in Chianti (Italie), représenté par Mes S. Corona, G. Ciccone et A. Loffredo, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par Mme V. Melgar et M. G. Mannucci, puis par Mmes Melgar et D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Fédération française de rugby (FFR), établie à Marcoussis (France),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 10 janvier 2011 (affaire R 43/2010-4), relative à une procédure d’opposition entre le Consorzio vino Chianti Classico et la Fédération française de rugby (FFR),

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe et M. M. van der Woude (rapporteur), juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 9 mars 2011,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 21 juin 2011,

vu l’ordonnance du 26 septembre 2011 refusant d’admettre la participation de la FFR à la procédure en tant qu’intervenant au titre de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal,

vu la décision du 3 novembre 2011 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

vu la réattribution de l’affaire à la quatrième chambre à la suite de l’empêchement du juge rapporteur,

vu les mesures d’organisation de la procédure du 14 mai 2012,

à la suite de l’audience du 20 juin 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 13 février 2007, la Fédération française de rugby (FFR) a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif représenté ci-après, ayant la description « jaune orangé référence PMS 1235 C, doré référence PMS 145 C, rouge référence PMS 1795 C » :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « boissons alcooliques (à l’exception des bières) ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 40/2007, du 6 août 2007.

5        Le 31 octobre 2007, le requérant, le Consorzio vino Chianti Classico, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée, pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        l’enregistrement collectif italien de la marque figurative reproduite ci-après, déposée le 18 juillet 1967, pour le « vin de la région du Chianti classique », relevant de la classe 33,

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–        l’enregistrement collectif italien n° 856049 de la marque figurative reproduite ci-après, déposée le 11 février 1999 et enregistrée le 29 novembre 2001 pour le « vin de Chianti », relevant de la classe 33,

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–        l’enregistrement collectif italien n° 856219 de la marque figurative reproduite ci-après, revendiquant les couleurs « noir, doré, blanc, rouge », déposée le 12 mars 1999 et enregistrée le 30 novembre 2001 pour les « vins », relevant de la classe 33,

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–        l’enregistrement collectif italien n° 1006311 de la marque figurative reproduite ci-après, revendiquant les couleurs « rouge, noir, doré dégradé, blanc, brun », déposée le 20 juin 2005 et enregistrée le 5 mai 2006 pour les « vins », relevant de la classe 33,

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–        l’enregistrement collectif italien n° 856048 de la marque figurative reproduite ci-après, revendiquant les couleurs « noir, doré, blanc, rouge », déposée le 11 février 1999 et enregistrée le 29 novembre 2001 pour le « vin de Chianti », relevant de la classe 33,

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–        l’enregistrement collectif au Royaume-Uni n° 1215633 de la marque figurative reproduite ci-après, déposée le 23 mars 1984, enregistrée le 18 septembre 1998 et renouvelée le 16 février 2005, pour les « vins de Chianti », relevant de la classe 33,

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–        la marque notoire en Allemagne et en France, représentée ci-après,

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient notamment ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

8        Par décision du 29 octobre 2009, la division d’opposition, en se fondant sur l’enregistrement de la marque antérieure au Royaume-Uni, a fait droit à l’opposition sur la base de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

9        Le 24 décembre 2009, la FFR a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 10 janvier 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’opposition et rejeté l’opposition.

11      En premier lieu, la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, au motif, en substance, que la marque demandée était « suffisamment distante » de toutes les marques antérieures pour qu’un tel risque soit exclu, y compris en présence de produits identiques et en prenant en considération le caractère distinctif accru des marques antérieures. Tout d’abord, la chambre de recours a défini le public pertinent comme étant composé du grand public, au Royaume-Uni et en Italie. Ensuite, s’agissant de la comparaison des signes, elle a considéré, sur le plan visuel, que « la seule similitude se limit[ait] au fait que les deux marques cont[enaient], en leur centre, la figure d’un coq présenté de face et tourné vers la gauche », avant d’estimer que « [c]ette coïncidence [...] ne d[evait] pas être surestimée » compte tenu des différences que présentent lesdits coqs, les formes respectives des marques en cause, et chacun de leurs éléments verbaux. Sur le plan phonétique, la chambre de recours a relevé que les différences entre les marques en cause étaient évidentes. Sur le plan conceptuel, elle a constaté que la comparaison était « neutre » étant donné, premièrement, que le coq présent dans les marques en conflit ne pouvait en lui-même créer une similitude conceptuelle pertinente, deuxièmement, que la marque antérieure ressemblait à un sceau tandis que la marque demandée s’apparentait à un emblème armorial et, troisièmement, que seule la séquence verbale de la marque antérieure présentait une signification pour le public italien. Enfin, la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion à l’égard de l’ensemble des marques antérieures, y compris à l’égard de la marque notoire en Allemagne et en France, et n’a donc pas considéré nécessaire d’examiner si le requérant avait démontré le caractère notoire de cette marque.

12      En second lieu, considérant que la similitude des signes faisait défaut, la chambre de recours a également rejeté l’opposition en tant qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

13      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les produits relevant de la classe 33 ;

–        à titre subsidiaire, modifier la décision attaquée et rejeter la demande de marque communautaire pour les « vins » relevant de la classe 33 ;

–        condamner la FFR à ses propres dépens et aux dépens du requérant, y compris ceux exposés au cours des procédures devant l’OHMI.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens de l’OHMI.

15      Lors de l’audience, le requérant a complété ses conclusions en demandant à ne pas être condamné aux dépens.

 En droit

16      À l’appui du présent recours, le requérant invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, de l’application erronée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, le second, de l’application erronée de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de l’application erronée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

17      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, il convient notamment d’entendre par « marques antérieures », d’une part, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire, et, d’autre part, aux termes de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du même règlement, les marques qui, à la date de dépôt de la demande de marque communautaire, sont « notoirement connues » dans un État membre au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, du 20 mars 1883, telle que révisée et modifiée.

18      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

19      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

20      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

21      En premier lieu, compte tenu de la nature des produits concernés, la chambre de recours a, à bon droit, considéré que le public pertinent était composé du grand public, ce que les parties ne contestent pas. Ces consommateurs doivent être considérés comme normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.

22      En second lieu, s’agissant du territoire par rapport auquel il convient d’apprécier le risque de confusion, la chambre de recours a relevé, au point 19 de la décision attaquée, que l’opposition était fondée sur six marques antérieures enregistrées, dont cinq protégées en Italie et une au Royaume-Uni. Au regard de cette constatation, elle a défini le public pertinent comme étant composé des consommateurs moyens des produits en cause, en Italie et au Royaume-Uni, ce que les parties ne contestent pas.

23      Toutefois, il importe de relever que, outre les marques antérieures enregistrées en Italie et au Royaume-Uni, l’opposition était également fondée sur une « marque notoire » en Allemagne et en France, visée au point 2, sous g), de la décision attaquée. Dans ce contexte, à supposer que cette marque remplissait les conditions de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009 et constituait donc une « marque antérieure » aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, la chambre de recours aurait dû tenir compte, dans la définition du public pertinent, des consommateurs moyens des produits en cause en Allemagne et en France.

24      Interrogé à cet égard lors de l’audience, l’OHMI a expliqué avoir, pour des raisons d’économie de la procédure, limité son examen du risque de confusion à l’enregistrement collectif italien n° 856049, puisque ce dernier était le plus proche de la marque demandée.

25      Cependant, il convient de rappeler que la chambre de recours ne pouvait pas, en l’espèce, exclure l’existence d’un risque de confusion et autoriser l’enregistrement de la marque demandée sans tenir compte de la perception des marques en conflit par les consommateurs de l’ensemble des territoires dans lesquels les marques antérieures sont présentes.

26      Il convient, dès lors, d’apprécier le bien-fondé de l’analyse que la chambre de recours a faite du risque de confusion, en fonction de la perception du public pertinent composé des consommateurs italiens, du Royaume-Uni, français et allemands.

 Sur la comparaison des signes

27      Selon une jurisprudence constante, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30]. L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

28      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que la marque demandée était « suffisamment distante » de toutes les marques antérieures. S’agissant de l’aspect visuel, elle a relevé un élément de similitude visuelle tenant à la présence commune d’un coq positionné au centre des marques, avant de considérer que « [c]ette coïncidence [...] ne d[evait] pas être surestimée », compte tenu des différences significatives entre les coqs, les éléments verbaux et les formes respectives des marques en cause. Elle a, ensuite, estimé que les signes étaient différents phonétiquement et que la comparaison conceptuelle était « neutre ».

29      Le requérant fait valoir que les signes en cause sont fortement similaires. Selon lui, la présence dans les deux marques en conflit d’un coq est un élément important de similitude dans la mesure où lesdits coqs sont hautement similaires. Qui plus est, le coq serait l’élément dominant des marques en cause, compte tenu de sa position centrale et de sa taille dans chacune des marques en conflit. En outre, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de certains éléments communs aux deux signes, qui lui auraient permis de conclure que les similitudes sont plus importantes que les différences.

30      L’OHMI considère que les marques en conflit présentent des différences frappantes sur les plans visuel et phonétique, ainsi qu’une très faible similitude sur le plan conceptuel, résultant de la représentation par les marques en conflit du même animal.

31      Il convient de constater que la décision attaquée entretient une certaine ambiguïté quant à la similitude des signes en cause. En effet, ladite décision indique, d’une part, que la marque demandée est « suffisamment distante » de toutes les marques antérieures, sans pour autant préciser ce qu’il faut entendre par l’adjectif « distant ». D’autre part, la décision attaquée fait état, à son point 20, d’une similitude des marques.

32      Interrogé à ce sujet dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, l’OHMI a exposé, lors de l’audience, que, nonobstant l’utilisation par la chambre de recours du terme « similitude » au point 20 de la décision attaquée, cette décision devait être comprise comme concluant à l’absence de similitude des signes.

33      Toutefois, en dépit des observations de l’OHMI, il y a lieu de constater que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une certaine similitude des signes. En effet, il convient de relever que la chambre de recours a fait état, au point 20 de la décision attaquée, d’une « similitude » entre les signes et qu’elle s’est livrée à l’examen du risque de confusion alors que cet examen aurait été dépourvu de sens en l’absence de similitude des signes.

34      Il convient de confirmer l’analyse de la chambre de recours concernant la comparaison des signes.

35      À titre liminaire, il y a lieu de relever que la chambre de recours a comparé, tout d’abord, la marque demandée et la marque antérieure n° 856049, en considérant que cette dernière, enregistrée en noir et blanc, bénéficiait de la protection la plus large, s’étendant également à des combinaisons de couleurs. Ensuite, elle a constaté, au point 23 de la décision attaquée, que l’appréciation de la similitude des signes s’appliquait également aux autres marques antérieures.

36      Il convient par conséquent de comparer la marque demandée et l’ensemble des marques antérieures.

37      Sur le plan visuel, il importe d’emblée de constater que, comme la chambre de recours l’a, à juste titre, relevé au point 20 de la décision attaquée, les marques en cause ont en commun la figure d’un coq, placé au centre des marques et représenté de plain-pied, légèrement tourné vers la gauche. De plus, lesdits coqs sont similaires dans la mesure où, comme le souligne le requérant, ils ont tous deux une crête saillante et une queue très large.

38      Il convient de considérer que la coïncidence du coq, qui est représenté selon une configuration semblable et arborant des caractéristiques physiques communes, constitue un facteur de similitude visuelle, étant donné le rôle non négligeable que joue cet élément dans la perception de chacune des marques en conflit, compte tenu de sa taille et de sa position centrale.

39      En outre, les éléments verbaux des marques en conflit sont visuellement différents, conformément à ce que la chambre de recours a relevé au point 20 de la décision attaquée, en raison des différences entre leurs longueurs, leurs structures, et les caractères dont ils sont composés. De même, la marque demandée a la forme d’un bouclier, alors que la marque antérieure n° 856049, comme les autres marques antérieures, comprend des cercles concentriques.

40      Toutefois, compte tenu de leur taille et de leur position au sein des marques, il y a lieu de considérer que ces différences ne sont pas de nature à occulter la similitude visuelle résultant de la présence commune des coqs. En effet, compte tenu de ce que le consommateur moyen doit, en règle générale, se fier à l’image imparfaite des marques qu’il a gardée en mémoire (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26), la perception visuelle des marques en conflit ne sera pas affectée de manière suffisamment déterminante par ces différences visuelles.

41      Il s’ensuit que, considérées globalement, les marques en cause présentent une certaine similitude visuelle, étant donné la présence non négligeable d’un coq au centre de chacune d’elles.

42      À cet égard, ainsi que la chambre de recours l’a, à juste titre, relevé, il convient d’ajouter que la similitude visuelle sera affaiblie à l’égard des marques antérieures ayant revendiqué des combinaisons de couleurs compte tenu de ce que ces combinaisons de couleurs sont différentes de celle de la marque demandée.

43      Sur le plan phonétique, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les signes en cause sont clairement différents, étant donné que les éléments verbaux des marques en conflit se prononcent de manière significativement différente dans toutes les langues parlées par le public pertinent.

44      À cet égard, il y a lieu d’écarter l’argument du requérant, reposant notamment sur une décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 6 février 2007, KIANTY EXPERIENCE/CONSORZIO DEL MARCHIO STORICO CHIANTI CLASSICO (affaire R 22/2006-2), selon lequel il existerait une similitude phonétique résultant de ce que le consommateur, s’il décrit les marques en cause en faisant référence à leur élément figuratif commun, utilisera des expressions similaires comprenant le terme « coq ». En effet, contrairement à ce que soutient le requérant, il convient de considérer que, pour faire référence aux marques en cause, le public citera plus vraisemblablement leur élément verbal, sans décrire leur élément figuratif [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 mars 2010, Nestlé/OHMI – Master Beverage Industries (Golden Eagle et Golden Eagle Deluxe), T‑5/08 à T‑7/08, Rec. p. II‑1177, point 67]. Cette conclusion s’impose d’autant plus que, comme le rappelle l’OHMI, dans le secteur du vin, les consommateurs de ces produits sont habitués à les désigner et à les reconnaître en fonction de l’élément verbal qui sert à les identifier, en particulier dans les bars ou les restaurants, dans lesquels les vins sont commandés oralement après avoir vu leur nom sur la carte [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 13 juillet 2005, Murúa Entrena/OHMI – Bodegas Murúa (Julián Murúa Entrena), T‑40/03, Rec. p. II‑2831, point 56, et du 12 mars 2008, Sebirán/OHMI – El Coto De Rioja (Coto D’Arcis), T‑332/04, non publié au Recueil, point 38]. Il en va de même s’agissant des boissons alcooliques en général, puisque ces dernières sont également consommées dans des bars, voire dans des restaurants.

45      En outre, il convient de relever que cette conclusion n’est pas remise en cause par la décision de l’OHMI KIANTY EXPERIENCE/CONSORZIO DEL MARCHIO STORICO CHIANTI CLASSICO susmentionnée, invoquée par le requérant. En effet, cette décision concernait certains produits relevant de la classe 3, tels que, notamment, les produits de nettoyage et de blanchisserie, le savon, ou le parfum, et ne concernait pas, contrairement au cas d’espèce, le secteur du vin ou des boissons alcoolisées. Partant, cette décision ne saurait, en tout état de cause, remettre en cause la constatation selon laquelle, en l’espèce, le public pertinent sera davantage enclin à désigner les marques en conflit en fonction de leur élément verbal et non en fonction de leur élément figuratif.

46      Sur le plan conceptuel, il y a lieu de relever, tout d’abord, que les éléments verbaux des marques en cause appartiennent chacun à une langue différente et qu’ils ne sont donc pas susceptibles de comparaison conceptuelle. En effet, les lettres « ffr » de la marque demandée constituent le sigle de la Fédération française de rugby et sont généralement comprises de cette manière par les consommateurs francophones, alors que les éléments verbaux des marques antérieures appartiennent tous à la langue italienne.

47      À supposer toutefois que certains consommateurs du public pertinent aient une connaissance suffisante tant du français que de l’italien, et soient en mesure de comprendre les éléments verbaux des signes en cause, ces derniers constateront que les signes en conflit sont différents sur le plan conceptuel.

48      De plus, comme l’a, à juste titre, souligné la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée, les formes respectives des marques en cause introduisent également des différences conceptuelles entre elles. En effet, la marque demandée s’apparente à un emblème armorial, rappelant le signe distinctif associé aux individus appartenant à la noblesse, voire à des corporations, et ayant pour fonction d’identifier des personnes ou des professions, alors que les marques antérieures ressemblent à un sceau, manifestant l’empreinte d’une autorité souveraine telle que celle de l’État et ayant pour fonction de certifier, voire de sceller un objet.

49      Enfin, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel les marques en cause évoquent l’idée de fierté, il y a lieu de considérer que, si cet argument doit être interprété en ce sens que cette idée est associée à la représentation du coq, elle n’est cependant pas suffisamment immédiate pour pouvoir considérer que les marques en cause concordent conceptuellement. En effet, d’une part, il ne saurait être déduit de la présence du coq que les marques suggèrent ou transmettent au public une idée de fierté en lien avec les produits concernés. D’autre part, cette notion ne s’impose pas avec assez d’évidence pour pouvoir entraîner une similitude conceptuelle dans l’esprit du public pertinent, compte tenu notamment des différences conceptuelles engendrées par les autres éléments des marques en conflit, rappelées ci-dessus.

50      Il s’ensuit que, considérées globalement, les marques en cause comportent un contenu conceptuel différent.

51      Au regard de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de conclure qu’il existe entre les signes en cause une faible similitude. En effet, l’existence d’une certaine similitude visuelle, tenant à la présence, au centre des marques, d’un coq représenté de manière similaire, ce que la chambre de recours a, à juste titre, mis en exergue au point 20 de la décision attaquée, est affaiblie par les différences sur le plan phonétique et conceptuel, également relevées à bon droit par la chambre de recours, au point que la similitude globale des signes doit être considérée comme faible.

52      Par suite, il convient d’examiner l’appréciation du risque de confusion opéré par la chambre de recours dans la décision attaquée.

 Sur le risque de confusion

53      L’existence d’un risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

54      En l’espèce, au point 29 de la décision attaquée, la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion, nonobstant l’identité des produits et l’éventuel caractère distinctif accru des marques antérieures.

55      Tout d’abord, il convient de confirmer l’appréciation de la chambre de recours, au demeurant non contestée par les parties, selon laquelle les produits en cause sont identiques.

56      Ensuite, il y a lieu de rappeler que les signes en cause sont faiblement similaires, notamment en raison de leurs différences sur les plans phonétique et conceptuel, lesquelles viennent affaiblir leur similitude visuelle.

57      En outre, il importe de rappeler que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 44 ci-dessus, les éléments verbaux des marques en cause jouent un rôle non négligeable dans la perception d’ensemble des marques en conflit, étant donné que public pertinent est habitué à reconnaître les produits en fonction de leur élément verbal. Partant, il convient d’attacher une importance particulière aux différences introduites par ces éléments non seulement sur le plan phonétique, mais également sur le plan visuel.

58      S’agissant du prétendu caractère distinctif des marques antérieures, la chambre de recours a relevé, aux points 25 et 26 de la décision attaquée, que le requérant a revendiqué et démontré la connaissance qu’a le public de la seule figure du « coq noir », associé aux vins du Chianti Classico, sans faire référence au caractère distinctif accru d’une marque antérieure en particulier. Le requérant ne conteste pas ce constat. En outre, ainsi que la chambre de recours l’a, à bon droit, constaté, la figure du coq noir n’est pas reproduite dans la marque demandée, laquelle contient un coq de couleur orange. Dès lors, le public pertinent n’associera pas auxdits vins des figures représentées en des couleurs radicalement différentes, telles que l’orange vif présent dans la marque demandée.

59      Ainsi, quand bien même les marques antérieures seraient pourvues d’un caractère distinctif accru, cette circonstance ne saurait contrebalancer le fait qu’il n’existe pas de risque de confusion entre les signes en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, compte tenu des différences sur les plans conceptuel et phonétique, de même que de celles sur le plan visuel, et de l’importance qu’il convient d’accorder, en l’espèce, aux différences entre les éléments verbaux des marques en conflit.

60      Au vu de ce qui précède, il convient de considérer qu’il est peu probable que le public pertinent puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises économiquement liées. Il s’ensuit que la chambre de recours a rejeté à bon droit l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 entre les marques en conflit.

61      Cette conclusion ne saurait être contredite par l’argument du requérant tiré de la nature particulière de la marque antérieure, dont la fonction, en tant qu’enregistrement collectif, est de garantir la qualité des produits concernés. En effet, il y a lieu de relever que le requérant se contente de décrire les particularités de la marque collective, sans exposer dans quelle mesure leur prise en compte aurait été de nature à modifier la conclusion de la chambre de recours et, partant, entraînerait l’annulation de la décision attaquée. À cet égard, il convient de constater qu’une marque collective ne saurait bénéficier d’une protection renforcée au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en particulier lorsqu’il a été constaté que la similitude des signes était insuffisante pour entraîner un risque de confusion.

62      Dans ces conditions, l’absence de risque de confusion entre les marques en conflit étant également valable à l’égard de l’ensemble du public pertinent et donc, également, à l’égard de la marque notoire en Allemagne et en France, il n’y a pas lieu de vérifier si ladite marque notoire remplissait les conditions de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009.

63      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009

64      Selon l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou a des similitudes avec la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui n’ont pas de similitudes avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’Union européenne et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

65      Il ressort également du libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 que son application est soumise aux conditions suivantes : premièrement, l’identité ou la similitude des marques en conflit ; deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée en opposition ; troisièmement, l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porte préjudice. Ces conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêt du Tribunal du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA‑FINDERS), T‑67/04, Rec. p. II‑1825, point 30].

66      En l’espèce, au point 30 de la décision attaquée, la chambre de recours, se fondant sur la comparaison des signes effectuée dans le cadre de l’examen du motif d’opposition tiré de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, a rejeté l’opposition en tant qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du même règlement, au motif que la condition relative à la similitude des signes faisait défaut.

67      Or, il ressort des points 27 à 52 ci-dessus que les signes sont faiblement similaires.

68      Partant, c’est à tort que la chambre de recours a rejeté le motif d’opposition fondé sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 en raison de l’absence de toute similitude des signes, sans examiner les autres conditions d’applicabilité de la disposition susmentionnée.

69      Il s’ensuit que la décision attaquée doit être annulée en ce que la chambre de recours a rejeté le motif d’opposition fondé sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

70      S’agissant des chefs de conclusion du requérant, visant à ce que le Tribunal rejette la demande d’enregistrement de marque communautaire, il y a lieu de rappeler que le pouvoir de réformation, reconnu au Tribunal en vertu de l’article 65, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de procéder à une appréciation sur laquelle ladite chambre n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit, par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils ont été établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt de la Cour du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, non encore publié au Recueil, point 72).

71      En l’espèce, puisque la chambre de recours a rejeté le motif d’opposition tiré de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 en raison de l’absence de similitude des signes, sans procéder à l’examen des autres conditions d’applicabilité de ladite disposition, il n’appartient pas au Tribunal, en l’espèce, de se livrer à cet examen.

72      Il convient, par conséquent, de rejeter les demandes de réformation du requérant.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En l’espèce, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens exposés au cours de la procédure devant le Tribunal.

74      Par ailleurs, dans la mesure où le requérant a également conclu à la condamnation aux dépens exposés au cours des procédures devant l’OHMI, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’opposition. Partant, la demande du requérant concernant les dépens afférents à la procédure devant la division d’opposition, qui ne constituent pas des dépens récupérables, est irrecevable. S’agissant de la demande formulée par le requérant relative aux dépens de la procédure devant la chambre de recours, il appartiendra à la chambre de recours de statuer, à la lumière du présent arrêt, sur les frais afférents à cette procédure [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 28 juin 2011, ATB Norte/OHMI – Bricocenter Italia (Affiliato BRICO CENTER), T‑483/09, non publié au Recueil, point 69].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 10 janvier 2011 (affaire R 43/2010-4) est annulée dans la mesure où la chambre de recours a rejeté l’opposition en tant qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Le Consorzio vino Chianti Classico et l’OHMI supporteront chacun leurs propres dépens exposés au cours de la procédure devant le Tribunal.

Pelikánová

Jürimäe

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 décembre 2012.

Signatures


** Langue de procédure : l’anglais