Language of document : ECLI:EU:T:2024:376

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

12 juin 2024 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises en raison de la situation en Syrie – Gel des fonds – Restrictions en matière d’admission sur le territoire des États membres – Inscription et maintien du nom du requérant sur les listes des personnes, des entités et des organismes concernés – Critère de la “femme ou de l’homme d’affaires influents exerçants ses activité en Syrie” – Présomption de lien avec le régime syrien – Erreur d’appréciation – Droits de la défense – Droit à une protection juridictionnelle effective – Obligation de motivation – Proportionnalité – Droit de propriété – Liberté professionnelle et droit de travailler – Liberté d’entreprise – Admissibilité des éléments de preuve » 

Dans l’affaire T‑649/22,

Issam Shammout, demeurant à Damas (Syrie), représenté par Me L. Cloquet, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme T. Haas, en qualité d’agent, assistée de Mes B. Maingain et S. Remy, avocats

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, C. Mac Eochaidh et J. Martín y Pérez de Nanclares (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Zwozdziak-Carbonne, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 10 janvier 2024,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le requérant, M. Issam Shammout, demande l’annulation de la décision d’exécution (PESC) 2022/1277 du Conseil, du 21 juillet 2022, mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2022, L 194, p. 15), du règlement d’exécution (UE) 2022/1275 du Conseil, du 21 juillet 2022, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2022, L 194, p. 8) (ci-après, pris ensemble, les « actes initiaux »), de la décision (PESC) 2023/1035 du Conseil, du 25 mai 2023, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2023, L 139, p. 49), et du règlement d’exécution (UE) 2023/1027 du Conseil, du 25 mai 2023, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2023, L 139, p. 1) (ci-après, pris ensemble, les « actes de maintien »), en tant que ces quatre actes inscrivent et maintiennent son nom sur les listes annexées auxdits actes (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués »).

 Antécédents et faits postérieurs à l’introduction du recours

2        Le requérant est un homme d’affaires de nationalité syrienne, impliqué dans la compagnie aérienne Cham Wings Airlines LLC (ci-après « Cham Wings ») et dans le groupe Shammout.

3        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil du l’Union européenne a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2011/273/PESC, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

4        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier cette annexe.

5        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE, le règlement (UE) no 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). La teneur de ce règlement est, pour l’essentiel, identique à celle de la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés à ces responsables, figurant à l’annexe II dudit règlement, est identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne, physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs, examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

6        Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union des personnes dont le nom figure à l’annexe I et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et des entités dont le nom figure aux annexes I et II.

7        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement no 442/2011 (JO 2012, L 16, p. 1).

8        La décision 2011/782 a été remplacée par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L 330, p. 21), elle-même remplacée par la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14).

9        Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté, d’une part, la décision (PESC) 2015/1836, modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75) et, d’autre part, le règlement (UE) 2015/1828, modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1).

10      Aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, « [l]e Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’[était] en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein », et « [il] estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par [lui] et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de les empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

11      La rédaction des articles 27 et 28 de la décision 2013/255 a été modifiée par la décision 2015/1836. Ces articles prévoient désormais des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres ainsi que le gel des fonds, notamment, des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie », sauf « informations suffisantes indiquant [que ces personnes] ne sont pas, ou ne sont plus, lié[e]s au régime ou qu’[elles] n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’[elles] ne sont pas associé[e]s à un risque réel de contournement ». Le règlement 2015/1828 a modifié, notamment, la rédaction de l’article 15 du règlement no 36/2012 afin d’y intégrer les nouveaux critères d’inscription définis par la décision 2015/1836.

12      Le 21 juillet 2022, le Conseil a adopté les actes initiaux par lesquels le nom du requérant a été inscrit pour la première fois à la ligne 326 de la liste figurant à l’annexe I, section A (Personnes) de la décision 2013/255 et de celle figurant à l’annexe II, section A (Personnes) du règlement no 36/2012 (ci-après, prises ensemble, les « listes en cause »). D’une part, les mentions des différentes orthographes du nom du requérant y sont insérées, ainsi que son nom arabe. Les informations d’identification indiquent la date de naissance et le lieu de naissance du requérant et qu’il est de sexe masculin. D’autre part, les motifs d’inscription de son nom sur les listes en cause sont rédigés comme suit (ci-après les « motifs litigieux ») :

« [Le requérant] est propriétaire et président du conseil d’administration de [Cham Wings] et président du groupe Shammout, actif dans les secteurs de l’automobile, de l’acier, de l’aviation, du transit de marchandise, de la construction et de l’immobilier.

À ce titre, [il] est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. »

13      Le 22 juillet 2022, le Conseil a procédé à la publication au Journal officiel de l’Union européenne de l’avis à l’attention des personnes qui font l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2013/255 et par le règlement no 36/2012 (JO 2022, C 281 I, p. 5).

14      Le 5 septembre 2022, le représentant du requérant a, notamment, demandé au Conseil de réexaminer l’inscription du nom de celui-ci sur les listes en cause et de lui donner accès aux documents ayant servi de base à ladite inscription. Par courriels des 19 et 27 septembre ainsi que 5 et 7 octobre 2022, il a réitéré la demande d’accès.

15      Par lettre du 27 octobre 2022, le Conseil a répondu au représentant du requérant en rejetant ses arguments. Ensuite, il l’a informé de la possibilité de déposer des observations avant le 20 février 2023. Enfin, il lui a communiqué le document de preuves étayant l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause et portant la référence WK 9404/2022 INIT, du 29 juin 2022 (ci-après le « document WK 9404/2022 »).

16      Par lettre du 31 mars 2023, le Conseil a informé le représentant du requérant de son intention de maintenir le nom du requérant sur le fondement des motifs litigieux, mais justifiés par de nouveaux éléments de preuve. Il lui a communiqué, premièrement, le document portant la référence WK 199/2023 INIT, du 9 janvier 2023 (ci-après le « document WK 199/2023 »), deuxièmement, le document portant la référence WK 3114/2023 INIT, du 3 mars 2023 (ci-après le « document WK 3114/2023 ») et, troisièmement, le document portant la référence WK 206/2023 EXT 13, du 24 mars 2023 (ci-après le « document de preuves horizontal »). Enfin, il l’a informé de la possibilité de présenter des observations jusqu’au 17 avril 2023.

17      Par lettre du 17 avril 2023, le représentant du requérant a présenté des observations sur le document WK 199/2023, le document WK 3114/2023 et le document de preuves horizontal.

18      Le 25 mai 2023, le Conseil a adopté les actes de maintien. En vertu de la décision 2023/1035, l’application de la décision 2013/255 a été prorogée jusqu’au 1er juin 2024. Le nom du requérant a été maintenu à la ligne 326 des listes en cause sur le fondement des motifs litigieux rappelés au point 12 ci-dessus.

19      Le 26 mai 2023, le Conseil a informé le représentant du requérant de la prorogation des actes initiaux. Ensuite, il a rejeté les arguments visant la demande de radiation du nom du requérant des listes en cause. Enfin, il l’a informé de la possibilité de présenter des observations avant le 16 février 2024.

 Conclusions des parties

20      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

21      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner le requérant aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où les actes attaqués seraient annulés, ordonner que les effets de la décision 2023/1035 soient maintenus en ce qui concerne le requérant jusqu’à ce que l’annulation partielle du règlement d’exécution 2023/1027 prenne effet.

 En droit

22      À l’appui de son recours, le requérant soulève cinq moyens tirés, en substance, le premier, d’une erreur d’appréciation, le deuxième, de la violation du principe général de proportionnalité, le troisième, de la violation du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique, le quatrième, de la violation de l’obligation de motivation et le cinquième, de la violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable.

23      Il convient d’examiner, tout d’abord les moyens se rapportant à la légalité externe des actes attaqués, à savoir les quatrième et cinquième moyens, avant ceux qui sont relatifs à leur légalité interne, en commençant par le premier moyen puis en examinant ensemble les deuxième et troisième moyens.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

24      Le requérant soutient que la motivation des actes attaqués ne satisfait pas aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE. Premièrement, ladite motivation serait déconnectée de tout contexte factuel et ne serait pas le résultat d’une appréciation correcte des faits. Deuxièmement, elle serait purement formelle et n’aurait pas fait l’objet d’une réflexion de la part du Conseil. Troisièmement, selon la jurisprudence, les motifs devraient être communiqués simultanément après l’adoption de la décision afin de permettre à la personne dont le nom est inscrit sur les listes en cause de se défendre et au juge d’exercer le contrôle de la légalité des actes attaqués.

25      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

26      Selon la jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue le corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 60 et jurisprudence citée).

27      Il convient de rappeler que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. La motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure de gel de fonds doit permettre que soient identifiées les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles celui-ci considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, points 61 et 63 et jurisprudence citée).

28      Cependant, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, points 64 à 66 et jurisprudence citée).

29      En premier lieu, il y a lieu de vérifier si le Conseil a exposé de manière compréhensible et suffisamment précise les raisons l’ayant conduit à considérer que l’inscription et le maintien du nom du requérant sur les listes en cause étaient justifiés au regard des critères juridiques applicables. Premièrement, il convient de rappeler le critère général d’inscription énoncé à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), et paragraphe 1 ter, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828. Celui-ci prévoit que la catégorie des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » fait l’objet de mesures restrictives, sauf s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’ils ne sont pas, ou ne sont plus, liés au régime syrien ou qu’ils n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’ils ne sont pas associés à un risque réel de contournement (critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie).

30      Ainsi qu’il a été mentionné au point 18 ci-dessus, les motifs litigieux sont restés inchangés entre l’adoption des actes initiaux et celle des actes de maintien. Il convient de déduire desdits motifs, ainsi que les parties le soutiennent, que le requérant a vu son nom être inscrit et maintenu sur les listes en cause en raison de son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. Autrement dit, l’inscription du nom du requérant est fondée sur le critère d’inscription rappelé au point 29 ci-dessus.

31      Deuxièmement, les raisons spécifiques et concrètes ayant conduit le Conseil à procéder à l’inscription et au maintien du nom du requérant sur les listes en cause sont indiquées dans les actes attaqués de manière suffisamment claire pour permettre au requérant de les comprendre. D’ailleurs, celui-ci n’indique pas en quoi les motifs litigieux ne porteraient pas sur des faits clairs. De surcroît, les moyens soulevés par le requérant dans ses écritures indiquent, d’une part, qu’il a été mis en mesure de connaître les justifications des mesures prises à son égard afin de pouvoir les contester utilement devant le juge de l’Union et, d’autre part, que le contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures était connu de lui.

32      En second lieu, il importe de rappeler que l’obligation de motiver un acte constitue une forme substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cet acte. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond dudit acte, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 96 et jurisprudence citée). En l’espèce, les arguments du requérant selon lesquels, en substance, la motivation des actes attaqués est purement formelle et le Conseil n’a pas correctement apprécié les faits, visent, en réalité, à contester le bien-fondé desdits actes. Dès lors que de tels arguments tendent à remettre en cause la légalité au fond de ces actes, ils doivent être rejetés comme inopérants en ce qu’ils ont été avancé à l’appuis du présent moyen et doivent être examinés dans le cadre du premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation.

33      Partant, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme étant non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du droit à une protection juridictionnelle effective

34      Le requérant soutient, en substance, que, en adoptant les actes attaqués, le Conseil a violé ses droits de la défense, son droit à un procès équitable et son droit à une protection juridictionnelle effective, tels que prévus à l’article 48, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et à l’article 6, paragraphe 3, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

35      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

36      Il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense comporte notamment le droit d’être entendu et le droit d’accéder au dossier dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité, qui sont consacrés à l’article 41, paragraphe 2, sous a) et b), de la Charte (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 99 et jurisprudence citée).

37      En outre, le droit à une protection juridictionnelle effective, affirmé à l’article 47 de la Charte, exige que l’intéressé puisse connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite à sa demande, sans préjudice du pouvoir du juge compétent d’exiger de l’autorité en cause qu’elle les communique, afin de lui permettre de défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent, ainsi que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de la décision en cause (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 100 et jurisprudence citée).

38      L’article 52, paragraphe 1, de la Charte admet toutefois des limitations à l’exercice des droits consacrés par celle-ci, pour autant que la limitation concernée respecte le contenu essentiel du droit fondamental en cause et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elle soit nécessaire et réponde effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 101 et jurisprudence citée).

39      Enfin, l’existence d’une violation des droits de la défense doit être appréciée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 102 et jurisprudence citée).

40      Or, il ne saurait être requis des autorités de l’Union qu’elles communiquent les motifs desdites mesures préalablement à l’inscription initiale du nom d’une personne ou d’une entité sur les listes imposant des mesures restrictives (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2015, Makhlouf/Conseil, T‑509/11, non publié, EU:T:2015:33, point 34 et jurisprudence citée).

41      En effet, une telle mesure, afin de ne pas compromettre son efficacité, doit, par sa nature même, pouvoir bénéficier d’un effet de surprise et s’appliquer immédiatement. Dans un tel cas, il suffit, en principe, que l’institution procède à la communication des motifs à la personne ou à l’entité concernée et ouvre le droit à l’audition de celle-ci concomitamment avec ou immédiatement après l’adoption de la décision (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 61).

42      En premier lieu, concernant le grief tiré du requérant tiré du non-respect de ses droits de la défense et du droit à un procès équitable, il convient de relever à titre liminaire que, à la suite d’une question posée lors de l’audience, le requérant a renoncé à l’argument selon lequel il n’a pas été entendu avant l’adoption des actes de maintien. Ensuite, s’agissant des actes initiaux, la communication des motifs de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause a fait l’objet d’un avis publié au Journal officiel le 22 juillet 2022, ainsi qu’il ressort du point 13 ci-dessus. En outre, par la lettre du 5 septembre 2022, le requérant a demandé, en substance, au Conseil de lui communiquer les documents visant à étayer ladite inscription, ce que celui-ci a fait par lettre du 27 octobre 2022, et s’est également opposé à cette inscription. Dès lors, il y a lieu de constater que le fait que le requérant n’a pas été entendu préalablement à l’inscription en question n’a pas porté atteinte à ses droits de la défense.

43      En second lieu, il convient d’examiner le grief du requérant relatif à l’accès au document WK 9404/2022 ayant servi de base à l’inscription de son nom sur les listes en cause. À cet égard, le requérant soutient que le Conseil aurait pu lui communiquer rapidement ce document, nonobstant les procédures de divulgation à respecter. Il en conclut que le Conseil a volontairement refusé de le lui communiquer avant l’expiration du délai prescrit à l’article 263, cinquième alinéa, TFUE, pour l’introduction d’un recours à l’encontre des actes initiaux et ce, afin de l’empêcher d’exercer ses droits de la défense dans des conditions équitables.

44      Ainsi, par ce grief, le requérant invoque, en substance, une violation de son droit à une protection juridictionnelle effective.

45      À titre liminaire, il convient de rejeter l’argument du requérant selon lequel, dans la mesure où le document WK 9404/2022 a été communiqué après l’introduction du présent recours, ledit document pourrait avoir été artificiellement constitué pour les besoins de l’instance. En effet, dans la mesure où ce document porte une date antérieure à celle de l’adoption des actes initiaux et où le requérant ne présente aucun élément au soutien de son allégation, il y a lieu de considérer que le document en question, qui lui a été transmis, a bien été constitué antérieurement à ladite adoption.

46      Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que, sur demande de l’intéressé, le Conseil est tenu de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels, et ce dans un délai raisonnable (voir arrêt du 24 novembre 2021, Aman Dimashq/Conseil, T‑259/19, EU:T:2021:821, point 73 et jurisprudence citée).

47      À cet égard, il convient de relever, d’une part, que le requérant a demandé au Conseil l’accès au document WK 9404/2022 ayant servi de base à l’inscription de son nom sur les listes en cause le 5 septembre 2022. Dès lors que les actes initiaux ont été adoptés le 21 juillet 2022 et publiés le lendemain au Journal Officiel, le requérant a attendu environ un mois et deux semaines après cette adoption pour faire sa demande.

48      Ainsi, il y a lieu de constater que le requérant a attendu qu’une partie du délai, tel que prescrit à l’article 263, cinquième alinéa, TFUE, pour l’introduction d’un recours à l’encontre des actes initiaux, se soit écoulée pour envoyer la demande d’accès au dossier. Certes, ce délai n’était pas complétement écoulé à la date de la première demande (voir, en ce sens, arrêts du 3 juillet 2014, Sorinet Commercial Trust Bankers/Conseil, T‑157/13, non publié, EU:T:2014:606, point 66, et du 24 novembre 2021, Aman Dimashq/Conseil, T‑259/19, EU:T:2021:821, point 92).

49      Interrogé lors de l’audience, le requérant n’a toutefois pas expliqué les raisons pour lesquelles il n’avait pas déposé sa demande d’accès au document WK 9404/2022 ayant servi de base à l’inscription de son nom sur les listes en cause avant le 5 septembre 2022. De plus, rien dans le dossier n’indique que le requérant n’aurait pas pu, s’il l’avait souhaité, présenter une telle demande avant. Ainsi, le requérant a lui-même contribué à réduire le laps de temps laissé au Conseil pour qu’il lui communique le document WK 9404/2022 avant l’expiration du délai prescrit à l’article 263, cinquième alinéa, TFUE, pour l’introduction d’un recours à l’encontre des actes initiaux. Par conséquent, il ne saurait être reproché à bon droit au Conseil de ne pas avoir traité cette demande, dans un délai très bref (voir, en ce sens, arrêts du 15 juin 2017, Kiselev/Conseil, T‑262/15, EU:T:2017:392, point 150, et du 18 septembre 2017, Uganda Commercial Impex/Conseil, T‑107/15 et T‑347/15, non publié, EU:T:2017:628, point 104).

50      D’autre part, il existe au sein du Conseil des délais internes nécessaires afin d’obtenir l’approbation des différentes instances pour transmettre des documents. Ces délais internes doivent permettre que les éléments de preuve fournis et visant à étayer des mesures restrictives concernant une personne ou une entité lui soient communiqués en temps utile pour qu’elle puisse faire valoir ses droits devant le juge de l’Union et dans un délai raisonnable (voir, en ce sens, arrêts du 5 février 2013, Bank Saderat Iran/Conseil, T‑494/10, EU:T:2013:59, point 77, et du 24 novembre 2021, Aman Dimashq/Conseil, T‑259/19, EU:T:2021:821, point 91).

51      En l’espèce, il est vrai que le Conseil a communiqué le document WK 9404/2022 un mois et deux semaines après la demande d’accès au dossier et que, de surcroît, le requérant a été amené à réitérer quatre fois sa demande.

52      Toutefois, l’absence de communication du document WK 9404/2022 avant l’introduction du présent recours n’a pas eu d’incidence sur le droit à une protection juridictionnelle effective du requérant. En effet, le requérant a eu accès audit document avant que le Conseil ne dépose le mémoire en défense, ce qui l’a mis en mesure, dans le cadre de la réplique, de se prononcer sur celui-ci, de présenter de nouvelles preuves et de nouveaux arguments par rapport à ceux présentés dans la requête. Il a également pu faire valoir des arguments à cet égard lors de l’audience. Enfin, ce document lui a été communiqué en temps utile et dans un délai raisonnable pour lui permettre de déposer des observations dans le cadre de la procédure de réexamen des actes initiaux.

53      Partant, il y a lieu de considérer que, en communiquant le document WK 9404/2022 au requérant le 27 octobre 2022, le Conseil n’a pas violé le droit du requérant à une protection juridictionnelle effective.

54      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument du requérant relatif au nombre de pièces peu élevé contenu dans le document WK 9404/2022, puisque cela n’a aucune incidence sur la question de savoir si le Conseil a transmis ou non ce document en temps utile et dans un délai raisonnable.

55      Dès lors, il y a lieu de rejeter le grief tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective.

56      Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le cinquième moyen.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation 

57      En premier lieu, le requérant soutient qu’il appartient au Conseil, sur qui repose la charge de la preuve, d’établir le bien-fondé des motifs litigieux. En deuxième lieu, il conteste, en substance, l’admissibilité des éléments de preuve figurant dans les annexes B.2 à B.8 du mémoire en défense. En troisième lieu, il conteste la pertinence des pièces contenues dans le document de preuves horizontal en ce qu’elles ne font pas référence à lui à titre personnel. De plus, il remet en cause la pertinence du site Internet de Shammout United. En quatrième lieu, il estime que le document WK 9404/2022 contient des sources douteuses. Par ailleurs, il se prévaut du manque de fiabilité et de la nature totalement erronée de nombreux éléments de preuve présentés dans les documents WK 199/2023 et WK 3114/2023 ainsi que dans le document de preuves horizontal. Il conteste la fiabilité de plusieurs sites Internet, tels que Twitter, Al-Mashhad Online, Middle East Eye et « alsouria.net ». En cinquième lieu, il affirme que le Conseil n’a pas démontré qu’il faisait partie du cercle restreint des hommes d’affaires influents ni comment son implication au sein de Cham Wings et dans le groupe Shammout permettaient de le qualifier « d’homme d’affaires influent » au sens du critère d’inscription rappelé au point 29 ci-dessus. En sixième lieu, il soutient qu’il n’apporte pas de soutien financier ou autre au régime syrien, qu’il n’en tire aucun avantage quel qu’il soit et qu’il n’est pas lié à ce régime.

58      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

 Considérations liminaires

59      Selon la jurisprudence, l’effectivité du contrôle juridictionnel exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119 et jurisprudence citée).

60      Il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 120 et jurisprudence citée).

61      C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée, et non à ces dernières d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121).

62      À cette fin, il n’est pas requis que ladite autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étaient les motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122).

63      Si l’autorité compétente de l’Union fournit des informations ou des éléments de preuve pertinents, le juge de l’Union doit vérifier l’exactitude matérielle des faits allégués au regard de ces informations ou éléments et apprécier la force probante de ces derniers en fonction des circonstances de l’espèce et à la lumière des éventuelles observations présentées notamment par la personne ou l’entité concernée à leur sujet (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 124).

64      Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du bien-fondé d’une inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non pas de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 51, et du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 50).

65      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’analyser le premier moyen.

66      Il convient de rappeler, s’agissant des motifs litigieux et ainsi qu’il ressort du point 30 ci-dessus, que l’inscription et le maintien du nom du requérant sur les listes en cause sont fondés dans les actes attaqués sur le critère d’inscription de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, tel que rappelé au point 29 ci-dessus.

 Sur la pertinence des éléments de preuve

67      Tout d’abord, pour justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, le Conseil a fourni le document WK 9404/2022, comportant des éléments d’information publiquement accessibles, à savoir des liens vers des sites Internet, des articles de presse et des captures d’écran provenant des sites Internet Intelligence online, Twitter, Al-Mashhad Online, Middle East Eye et Enab Baladi.

68      En outre, s’agissant des actes de maintien, le Conseil a également fourni trois autres documents, à savoir le document WK 199/2023, le document WK 3114/2023 et le document de preuves horizontal comportant des liens, des articles de presse, des rapports et des captures d’écran provenant :

–        des sites Internet de médias d’origine étrangère ou locale, tels que « alsouria.net », « alaraby.co.uk », The Syria Report et « almashareq.com » ;

–        des sites Internet de journaux européen, anglais ou américain, tels que Deutsche Welle, Orient Net, Atlantic Council, The Guardian et Middle East Eye ;

–        des sites Internet collaboratifs, tels que « Wikimapia.org » et Wikipédia ;

–        des sites Internet relatifs à des entreprises, telle que celui de Cham Wings et celui de Shammout United, ou d’organisation économique, telle que celui de Syrian Enterprise and Business Centre (SEBC) ;

–        des sites Internet de fondations, telles que Heritage Foundation, Brookings Institute, Centre Harmoon et Dayan Center for Middle Eastern and African Studies ;

–        du site Internet du Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies ;

–        des sites Internet, tels que LinkedIn, « people.bayt.com », « ifmat.org », « pro-justice.org » et « transparency.org ».

69      D’une part, concernant l’argument du requérant selon lequel, les éléments de preuve contenus dans le document de preuves horizontal ne font pas référence à lui à titre personnel, il convient de relever que s’ils ne font pas individuellement référence au requérant, voire à des entreprises auxquelles il serait lié, ils fournissent le contexte dans lequel la désignation de l’intéressé est intervenue, en particulier, eu égard à la catégorie des hommes et des femmes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, ainsi qu’en témoigne la première page dudit document, et à laquelle il appartient. Il ressort notamment de ce document que les liens historiques entre l’élite des hommes d’affaires et le régime de Bashar Al-Assad persistent. Ainsi, conformément à la jurisprudence rappelée au point 64 ci-dessus, et bien que ces éléments de preuve, pris séparément, ne puissent permettre de justifier à eux seuls le bien-fondé du maintien du nom du requérant sur les listes en cause, cette circonstance n’est pas de nature à leur retirer toute pertinence dans l’examen de la légalité de ces actes, dans la mesure où ils sont susceptibles de donner des informations contextuelles de nature à compléter et à renforcer les autres éléments de preuve mentionnant plus spécifiquement le requérant [voir, en ce sens, arrêts du 16 décembre 2020, Haikal/Conseil, T‑189/19, non publié, EU:T:2020:607, point 120, et du 18 mai 2022, Foz/Conseil, T‑296/20, EU:T:2022:298, point 101 (non publié)]. Partant, tous les éléments de preuve contenus dans le document en question sont pertinents pour apprécier la légalité desdits actes.

70      D’autre part, concernant l’argument du requérant selon lequel l’entité Shammout United Traded Company, mentionnée dans l’extrait issu du site Internet de cette entreprise, ne correspondrait pas au groupe Shammout cité dans les motifs litigieux, en ce que celle-ci serait possédée par une famille différente, et n’aurait rien en commun avec ledit groupe, le directeur général de cette entité étant un tiers, il ressort effectivement de l’analyse de cette pièce que ladite entité est possédée par une autre personne que le requérant et aujourd’hui dirigée par les fils de cette personne. Partant, cet élément de preuve ne saurait être pris en considération pour déterminer si le requérant peut être qualifié d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, au sens du critère d’inscription rappelé au point 29 ci-dessus.

 Sur la fiabilité des éléments de preuve produits par le Conseil

71      Le requérant soutient que les éléments de preuve contenus dans le document WK 9404/2022 proviennent de sources douteuses. Par ailleurs, il se prévaut du manque de fiabilité et de la nature totalement erronée de nombreux éléments de preuve présentés dans les documents WK 199/2023 et WK 3114/2023 ainsi que dans le document de preuves horizontal.

72      Le Conseil conteste les arguments du requérant. En réponse à la mesure d’organisation de la procédure adoptée par le Tribunal, il a reproduit des informations générales, publiquement accessibles, concernant les sites Internet Middle East Eye, Enab Beladi, Al-Mashhad Online et « alsouria.net ».

73      Il convient de relever que le Conseil s’est fondé, notamment, sur les informations provenant du site Internet Wikipédia pour décrire les sites Internet Middle East Eye et Enab Baladi. Or, selon la jurisprudence, des informations fondées sur la base d’informations provenant du site Internet Wikipédia doivent être écartées, dès lors que, étant fondées sur des articles issus d’une encyclopédie collective établie sur Internet, dont le contenu est modifiable à tout moment et dans certains cas par tout visiteur, même anonyme, de telles constatations reposent sur des informations incertaines [voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2014, Novartis/OHMI – Tenimenti Angelini (LINEX), T‑444/12, non publié, EU:T:2014:886, point 47 et jurisprudence citée]. En l’espèce, interrogé spécifiquement sur les conséquences que le Conseil tirait de cette jurisprudence, celui-ci a indiqué ne pas insister sur la possibilité d’invoquer le site Internet Wikipédia en tant que source pour décrire les sites Internet Middle East Eye et Enab Baladi. Cela étant, le requérant a mentionné ne pas remettre en cause le contenu objectif des descriptions de ces derniers sites Internet. Par conséquent, il y a lieu d’admettre qu’il est constant que lesdites descriptions sont correctes.

74      Conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir arrêts du 14 mars 2018, Kim e.a./Conseil et Commission, T‑533/15 et T‑264/16, EU:T:2018:138, point 224 et jurisprudence citée, et du 14 avril 2021, Al-Tarazi/Conseil, T‑260/19, non publié, EU:T:2021:187, point 72 et jurisprudence citée).

75      En outre, il y a lieu de rappeler que la situation en Syrie rend en pratique difficile, voire impossible, le recueil de témoignages de la part de personnes acceptant d’être identifiées. Les difficultés d’investigation qui s’ensuivent et le danger auquel s’exposent ceux qui livrent des renseignements font obstacle à ce que des sources précises faisant état de comportements personnels de soutien au régime soit apportées (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46 et conclusions de l’avocat général Bot dans les affaires Anbouba/Conseil, C‑605/13 P et C‑630/13 P, EU:C:2015:2, point 204).

76      En premier lieu, le requérant affirme de manière générale que l’ensemble ou la quasi-totalité des éléments de preuve contenus dans les documents WK 9404/2022, WK 199/2023 et WK 3114/2023 ainsi que le document de preuves horizontale manquent de fiabilité, mais il n’avance des arguments concrets que s’agissant de la capture d’écran du site Internet Twitter (rebaptisé « X » depuis le 24 juillet 2023), de l’article provenant du site Internet Enab Beladi et de l’article provenant du site Internet « alsouria.net », qui sont inclus dans les deux premiers documents susmentionnés.

77      Or, dès lors que les éléments de preuve soumis par le Conseil, communiqués au requérant, proviennent de sources publiquement accessibles, il lui était possible d’indiquer lesquelles, selon lui, étaient douteuses. En particulier, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 63 ci-dessus, s’il appartient au Conseil d’apporter les éléments de preuve à l’appui des motifs d’inscription, il revient au requérant d’indiquer ceux d’entre eux qui pourraient soulever des doutes quant à leur fiabilité (voir, en ce sens, arrêt du 14 avril 2021, Al-Tarazi/Conseil, T‑260/19, non publié, EU:T:2021:187, point 73).

78      Par conséquent, des allégations générales et déclaratives que le requérant n’étayerait par aucun élément concret ne sauraient remettre en cause le caractère sensé et fiable des éléments de preuve contenus dans les quatre documents de preuve.

79      En deuxième lieu, s’agissant de la capture d’écran du site Internet Twitter, inclus dans le document WK 9404/2022, d’une part, le requérant soutient que l’auteur du message court est une personne inconnue. Cette pièce est accompagnée d’une image avec une légende en arabe. Le requérant y est identifié comme étant un des deux propriétaires de presque 100 % des 225 millions de parts de Cham Wings. Le court message a été publié le 13 décembre 2019 à 16 h 19 par l’utilisateur, A. Ainsi, il ressort de ladite capture d’écran que l’auteur du court message est identifié. En outre, l’annexe D.1 de la duplique, une capture d’écran du site Internet LinkedIn de A sur lequel il résume ses expériences professionnelles, le présente comme un journaliste d’investigation et un ancien journaliste de Orient Today. Dès lors, l’argument du requérant manque en fait et ne saurait remettre en cause la fiabilité de ce document.

80      D’autre part, le requérant relève une incohérence entre le nombre de parts qu’il posséderait de Cham Wings mentionné dans le court message en cause et celui précisé dans l’image associée à celui-ci. Il convient de relever que, dans l’image, le chiffre en question est mentionné dans la légende, rédigée en arabe. Toutefois, en l’espèce, même à supposer que l’image associée au court message en cause ne mentionne pas le même nombre de parts du requérant dans Cham Wings que ledit message, cette circonstance n’est pas de nature à susciter des doutes quant à la vraisemblance et à la véracité des autres informations qui figurent dans ce message et sur lesquels le Conseil s’est principalement fondé pour inscrire et maintenir le nom du requérant sur les listes en cause.

81      En troisième lieu, selon le requérant, le contenu de l’article du site Internet Enab Beladi, inclus dans le document WK 9404/2022, est faux. Selon cet article, publié le 12 décembre 2021 et consulté le 24 avril 2022, et intitulé « Syrian private Airlines Company Cham Wings increases activity despite sanctions » (La compagnie aérienne privée syrienne Cham Wings augmente son activité malgré l’imposition de sanctions), Cham Wings, dirigée par le requérant, a, notamment, joué un rôle central ces derniers mois dans la crise migratoire à la frontière polonaise et biélorusse. Le requérant fait toutefois valoir que le Conseil a radié, par la décision d’exécution (PESC) 2022/1243 du Conseil, du 18 juillet 2022, mettant en œuvre la décision 2012/642/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie et de l’implication de la Biélorussie dans l’agression russe contre l’Ukraine (JO 2022, L 190, p. 139) et le règlement d’exécution (UE) 2022/1231 du Conseil, du 18 juillet 2022, mettant en œuvre le règlement (CE) no 765/2006 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie et de l’implication de la Biélorussie dans l’agression russe contre l’Ukraine (JO 2022, L 190, p. 5), le nom de Cham Wings des listes des mesures restrictives prises en raison de la situation en Biélorussie et de l’implication de la Biélorussie dans l’agression russe contre l’Ukraine. Néanmoins, la date de l’article et la date de consultation de cet article produit par le Conseil sont antérieures à la date d’adoption des actes susvisés, de sorte que la seule circonstance que le nom de Cham Wings ait effectivement été radié des listes susvisées n’est pas suffisante pour remettre en cause son caractère sensé et fiable.

82      En quatrième lieu, le requérant soutient que l’article provenant du site Internet « alsouria.net », inclus dans le document WK 199/2023, ne contient ni de faits datés ni de sources fiables et sérieuses. En outre, l’auteur de l’article publié sur ce site Internet mentionnerait qu’il s’est fondé sur des sources contradictoires. À cet égard, il convient de relever que ledit site Internet a publié un article le 25 juillet 2022 qui indique que le requérant est un homme d’affaires influent syrien, proche du régime syrien. En outre, selon cet article, en substance, Cham Wings et le requérant coopèrent avec le régime de Bashar Al-Assad. De plus, il souligne que l’évolution de la relation du requérant avec M. Rami Makhlouf fait l’objet de désaccords et de controverses, ainsi que cela est rapporté par des sources contradictoires dont les différentes positions sont développées dans l’article. Or, contrairement à ce qu’allègue le requérant, il ne ressort pas du contenu de cet article que l’auteur reconnaitrait qu’il s’est fondé sur des sources contradictoires. En effet, l’auteur ne fait que rapporter ces éléments et n’en tire aucune conséquence. Partant, le requérant fait une lecture tronquée de cet article, de sorte que par son argument il ne remet pas en cause son caractère sensé et fiable.

83      Au vu de ce qui précède, en l’absence d’élément dans le dossier susceptible de remettre en cause la fiabilité des sources utilisées par le Conseil, il convient de leur reconnaitre un caractère sensé et fiable, au sens de la jurisprudence rappelée au point 74 ci-dessus.

 Sur l’admissibilité des éléments de preuve figurant dans les annexes B.2 à B.8 du mémoire en défense

84      Le requérant conteste, en substance, l’admissibilité des éléments de preuve figurant dans les annexes B.2 à B.8 du mémoire en défense. Selon lui, ces pièces, recueillies par le Conseil après l’adoption des actes initiaux, ne pourraient pas, a posteriori, remédier à l’absence de base factuelle solide conformément à la jurisprudence constante issue des arrêts du 26 octobre 2012, Oil Turbo Compressor/Conseil (T‑63/12, EU:T:2012:579, point 29), et du 9 juin 2021, Borborudi/Conseil [T‑580/19, EU:T:2021:330, point 50 (non publié)].

85      Le Conseil soutient que les éléments de preuve figurant dans les annexes B.2 à B.8 visent à corroborer le document WK 9404/2019 et n’ont pas pour but de motiver a posteriori les actes initiaux, mais de montrer que, eu égard au contexte dans lequel l’adoption de ces actes a été opérée, la motivation de ceux-ci était suffisante. Il relève que le requérant ne conteste pas les éléments factuels justifiant son inscription sur les listes en cause.

86      Les annexes B.2 à B.8 du mémoire en défense sont constituées par, premièrement, une page dédiée à Cham Wings provenant du site Internet Wikipédia, et décrivant le requérant comme le fondateur de cette entreprise, deuxièmement, des pages des sites Internet de Cham Wings et de Shammout United, troisièmement, deux pages du site Internet LinkedIn, dédiées au groupe Shammout et à toutes les entreprises liées et à Damask Metals Co, quatrièmement, une page du site Internet « pro-justice.org », qui présente le requérant comme un des hommes d’affaires les plus importants en Syrie et, cinquièmement, une page du site Internet « ifmat.org » mentionnant le requérant.

87      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la légalité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (voir, en ce sens, arrêts du 3 septembre 2015, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Commission, C‑398/13 P, EU:C:2015:535, point 22 et jurisprudence citée, et du 4 septembre 2015, NIOC e.a./Conseil, T‑577/12, non publié, EU:T:2015:596, point 112 et jurisprudence citée). Par conséquent, pour justifier le bien-fondé des actes initiaux, le Conseil ne peut pas invoquer devant le Tribunal, d’une part, des éléments sur lesquels il ne s’est pas fondé lors de l’adoption desdits actes (voir, en ce sens, arrêts du 14 avril 2021, Al-Tarazi/Conseil, T‑260/19, non publié, EU:T:2021:187, point 69, et du 16 mars 2022, Sabra/Conseil, T‑249/20, EU:T:2022:140, points 49 et 56 et jurisprudence citée) ni, d’autre part, des éléments qui ont été portés à sa connaissance postérieurement à l’adoption de ces actes, et ce quand bien même ce dernier serait d’avis que lesdits éléments pouvaient valablement fonder l’adoption de ladite décision [voir arrêt du 9 juin 2021, Borborudi/Conseil, T‑580/19, EU:T:2021:330, point 50 (non publié) et jurisprudence citée].

88      En l’espèce, ainsi que le reconnaît le Conseil, ces éléments de preuve n’apparaissent pas dans le document WK 9404/2022. Par conséquent, le Conseil n’avait pas connaissance de ces éléments de preuve au moment de l’adoption des actes initiaux et ils ne sauraient, dès lors, être utilisés aux fins d’étayer les motifs litigieux. Au demeurant, le Conseil admet qu’ils n’ont pas été produits à cette fin. Partant, l’ensemble de ces éléments de preuve n’est pas admissible pour déterminer si, au moment de l’adoption des actes initiaux, le Conseil disposait d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour étayer ces actes.

89      En revanche, ainsi que le Conseil l’a confirmé lors de l’audience, les annexes B.2 à B.8 du mémoire en défense sont reprises, en substance, dans le document WK 3114/2023, de sorte qu’elles seront nécessairement prises en considération pour apprécier le bien-fondé des actes de maintien.

 Sur l’examen du critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie

90      À titre liminaire, il convient de relever que le requérant reconnaît être impliqué dans Cham Wings et dans le groupe Shammout. À cet égard, force est de constater que le requérant n’avance aucun argument ni aucun élément de preuve visant à contester que, ainsi qu’il ressort des motifs litigieux, il est le propriétaire de Cham Wings et le président de son conseil d’administration, ainsi que le président du groupe Shammout, actif dans les secteurs de l’automobile, de l’acier, de l’aviation, du transit de marchandise, de la construction et de l’immobilier.

91      Par conséquent, le requérant ne conteste pas être un homme d’affaires exerçant ses activités en Syrie.

92      En revanche, le requérant conteste que le Conseil ait démontré en quoi son implication dans Cham Wings et dans le groupe Shammout est de nature à impliquer qu’il puisse être qualifié d’« homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie », au sens du critère d’inscription rappelé au point 29 ci-dessus. Selon lui, il n’existe aucun lien entre lui et le régime syrien.

93      En particulier, le requérant soutient n’apporter aucun soutien financier ou autre au régime syrien et n’en tirer aucun avantage. En outre, il fait valoir que le Conseil n’a pas démontré qu’il faisait partie du cercle restreint des « hommes d’affaires influents ».

94      À cet égard, il convient de relever que la décision 2015/1836 a notamment introduit comme critère d’inscription objectif, autonome et suffisant celui de « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie », de sorte que le Conseil n’est plus tenu de démontrer l’existence d’un lien entre cette catégorie de personnes et le régime syrien, au sens où l’entendait la décision 2013/255 avant sa modification, ni non plus entre cette catégorie de personnes et le soutien apporté à ce régime ou le bénéfice tiré de ce dernier, étant donné qu’être une femme ou un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie suffit pour l’application des mesures restrictives en cause à une personne. Ainsi, il ne découle aucunement de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, qu’il incomberait au Conseil de rapporter la preuve que tant la condition relative à la situation de femme ou d’homme d’affaires influent que celle de liens suffisants avec le régime sont cumulativement remplies [voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil, C‑241/19 P, EU:C:2020:545, points 71 à 74 ; du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, points 55 et 56 (non publiés), et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 56].

95      En ce sens, il peut être déduit du critère relatif à la qualité de « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » une présomption réfragable de lien avec le régime syrien (voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 106, et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 60). Cette présomption trouve à s’appliquer dès lors que le Conseil a été en mesure de démontrer non seulement que la personne est une femme ou un homme d’affaires exerçant ses activités en Syrie, mais aussi qu’elle peut être qualifiée d’« influente ». En effet, ainsi qu’il ressort des termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, c’est l’influence que cette catégorie de personnes est susceptible d’exercer sur le régime syrien que le Conseil vise à exploiter en les poussant, par le biais des mesures restrictives qu’il adopte à leur égard, à faire pression sur le régime syrien pour qu’il modifie sa politique de répression. Ainsi, dès lors que le Conseil est parvenu à démontrer l’influence qu’une femme ou un homme d’affaires peut exercer sur ledit régime, le lien entre ladite personne et le régime syrien est présumé jusqu’à preuve du contraire.

96      En outre, il y a lieu de rappeler que le respect des règles relatives à la charge et à l’administration de la preuve en matière de mesures restrictives par le Tribunal implique que ce dernier respecte le principe énoncé par la jurisprudence constante mentionnée au point 61 ci-dessus et rappelé par la Cour dans l’arrêt du 11 septembre 2019, HX/Conseil (C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 48 à 50), selon lequel, en substance, la charge de la preuve incombe à l’institution en cas de contestation du bien-fondé des motifs d’inscription.

97      Par conséquent, il ne saurait être imposé à la partie requérante un niveau de preuve excessif aux fins de renverser la présomption de lien avec le régime syrien. Ainsi, celle-ci doit être considérée comme ayant réussi à renverser la présomption de lien avec le régime syrien si elle fait valoir des arguments ou des éléments susceptibles de remettre sérieusement en cause la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou leur appréciation, notamment au regard des conditions posées par l’article 27, paragraphe 3, et l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ou si elle produit devant le juge de l’Union un faisceau d’indices de l’inexistence ou de la disparition du lien avec le régime syrien, ou de l’absence d’influence sur ledit régime, ou de l’absence d’association avec un risque réel de contournement des mesures restrictives, conformément à l’article 27, paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 3, de cette décision (voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2020, Zubedi/Conseil, T‑186/19, EU:T:2020:317, point 71, et du 16 mars 2022, Sabra/Conseil, T‑249/20, EU:T:2022:140, point 133).

98      Ainsi, dès lors que, en l’espèce, le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant se fonde sur l’exercice, par celui-ci, des activités telles que décrites dans les motifs litigieux, que celui-ci ne remet pas en cause, il y a lieu de vérifier si le requérant réussit à renverser la présomption de lien avec le régime syrien.

99      À cet égard, premièrement, force est de constater que le requérant allègue avoir pris ses distances avec le régime syrien et avec tout méfait commis par celui-ci et ne pas entretenir de lien avec ledit régime, qui auraient pu donner lieu à des sanctions de la part de l’Union, sans, toutefois, apporter de preuve pour étayer son affirmation.

100    Deuxièmement, le requérant soutient que, comme le corrobore le site Internet Al-Mashhad Online, dont un extrait figure dans le document WK 9404/2022, ses fonds mobiliers et immobiliers ont été saisis par le ministère des Transports syrien au détriment de ses intérêts. Il ressort de ce site Internet que le motif de la saisie mobilière et immobilière est le non-paiement de dettes à la compagnie Syrian Airlines, d’un montant de 14,5 millions de dollars des États-Unis d’Amérique [(USD) environ 14,94 millions d’euros]. Par conséquent, et en l’absence de tout autre élément de preuve produit par le requérant pour corroborer cette preuve, la saisie mobilière et immobilière dont il a pu faire l’objet ne révèle pas de manière manifeste une action entreprise par le régime syrien en guise de représailles en raison d’actions que le requérant aurait opéré contre lui. Partant, cet argument à lui seul ne suffit pas à renverser la présomption de lien avec le régime syrien.

101    Troisièmement, le requérant fait valoir que, contrairement à ce que soutient le Conseil, Cham Wings n’a pas déplacé de mercenaires, d’armes et d’équipements pour le régime syrien. À cet égard, il soutient que le Conseil a commis une erreur en considérant, dans le mémoire en défense, que le terme « militant », mentionné tant dans le court message publié sur le site Internet Twitter que dans l’article issu du site Internet Middle East Eye, tous deux inclus dans le document WK 9404/2022, renvoyait à la notion de « mercenaire ». Par conséquent, le Conseil se serait, à tort, fondé sur ces deux éléments de preuve pour étayer le fait que Cham Wings a déplacé des mercenaires pour le régime syrien.

102    À cet égard, il est vrai que le court message publié sur le site Internet Twitter fait référence au transport de « militants » opéré par Cham Wings, et non de mercenaires. De même, le terme « mercenaires » est repris dans le descriptif de l’article issu du site Internet Middle East Eye, résumant la phrase suivante : « le département du Trésor américain sanctionnait Cham Wings en raison de sa coopération “avec les responsables du gouvernement syrien afin d’acheminer des militants en Syrie pour combattre pour le compte du régime syrien […]” ». Le sous-titre de cet article précise également que « Cham Wings est accusée de transporter des mercenaires et d’aider les Gardiens de la révolution iranienne [...] ». Ainsi, bien que recouvrant normalement des réalités différentes, les termes « mercenaire » et « militant » sont utilisés comme des synonymes dans cet article.

103    Par ailleurs, le requérant se contente de contester avoir déplacé des mercenaires, des armes et des équipements pour le régime syrien, sans apporter d’éléments visant à démontrer qu’il n’entretenait pas de lien avec le régime. En tout état de cause, même si le court message publié sur le site Internet Twitter fait référence au transport de « militants » et non de « mercenaires », il ressort du site Internet Middle East Eye que Cham Wings a déplacé des armes et des équipements pour le régime syrien, sans que le requérant n’ait contesté ces derniers éléments.

104    Par conséquent, le requérant n’a présenté aucun élément permettant de considérer qu’il n’existait pas, ou plus, de lien entre lui et le régime syrien, ou qu’il n’exerçait aucune influence sur ce régime ou encore qu’il était étranger à tout risque réel de contournement des mesures restrictives au sens de l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836.

105    Par ailleurs, le requérant soutient que Cham Wings n’a pas joué de rôle majeur dans la crise des migrants à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. Selon lui, si Cham Wings avait commis ces actions, que le Conseil lui attribue, celles-ci auraient été effectuées à l’insu du requérant et sans l’intention ou même la conscience de contribuer à une quelconque infraction d’une règle de droit de l’Union. Il ajoute que Cham Wings a cessé d’effectuer des vols vers la Biélorussie depuis le 13 novembre 2021.

106    Il convient de relever que, par son argument, le requérant vise les motifs d’inscription du nom de Cham Wings adoptés par le Conseil dans la décision d’exécution (PESC) 2021/2125 du Conseil, du 2 décembre 2021, mettant en œuvre la décision 2012/642/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie (JO 2021, L 430 I, p. 16) et le règlement d’exécution (UE) 2021/2124 du Conseil, du 2 décembre 2021, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement no 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO 2021, L 430 I, p. 1). Entre temps, par la décision d’exécution 2022/1243 et le règlement d’exécution 2022/1231, le Conseil a procédé au retrait du nom de Cham Wings des listes annexées à ces actes, puis, le recours introduit par Cham Wings a été radié par l’ordonnance du 9 novembre 2023, Cham Wings Airlines/Conseil (T‑255/22, non publiée, EU:T:2023:711). Interrogés lors de l’audience sur les conséquences de ces événements sur la présente espèce, le requérant a indiqué, en substance, que l’objectif de Cham Wings avait été atteint et que celle-ci n’aurait pas dû figurer sur ces listes, alors que le Conseil a maintenu sa position selon laquelle il n’y avait aucune incidence en l’espèce.

107    Or, d’une part, le contrôle exercé par le Tribunal dans la présente affaire ne peut porter que sur le bien-fondé de l’inscription et du maintien du nom du requérant sur les listes en cause et ne saurait donc remettre en cause la légalité des actes visés au point 106 ci-dessus (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2017, Barqawi/Conseil, T‑303/15, non publié, EU:T:2017:328, point 42).

108    D’autre part, il importe de relever que les motifs litigieux ne mentionnent pas que Cham Wings a joué un rôle quelconque à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. De plus, ainsi qu’il ressort du point 30 ci-dessus, le nom du requérant a été inscrit et maintenu sur les listes en cause en application du seul critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. À cet égard, le requérant n’a pas été inscrit sur lesdites listes en raison de ses liens avec Cham Wings, en vertu du critère prévu à l’article 27, paragraphe 2, dernière partie de la phrase, et paragraphe 3, et de l’article 28, paragraphe 2, dernière partie de la phrase, et paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et repris en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1 bis, dernière partie de la phrase, et paragraphe 1 ter, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, qui prévoit que les personnes et entités qui sont liées aux personnes, entités et organismes relevant de l’un des critères d’inscription visés aux paragraphes 2 des articles 27 et 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée, et au paragraphe 1 bis de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié, font l’objet de mesures restrictives. En tout état de cause, un tel critère n’est pas applicable en l’espèce, dès lors que le nom de Cham Wings était inscrit sur des listes d’un régime de mesures restrictives différent du régime en cause. Partant, l’argument du requérant est dénué de pertinence dans le cadre du présent recours et doit être rejeté comme étant inopérant.

109    Au vu de ce qui précède, il convient de considérer que le requérant n’est pas parvenu à remettre en cause les motifs litigieux fondés sur son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, de sorte que, au regard du critère d’inscription rappelé au point 29 ci-dessus, l’inscription et le maintien de son nom sur les listes en cause, résultant des actes attaqués, sont bien fondés. Dès lors, le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation, doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur les deuxième et troisième moyens, tirés de la violation du principe général de proportionnalité, de la violation du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique

110    Premièrement, s’agissant des actes initiaux, le requérant fait valoir, dans le cadre du deuxième moyen, que les mesures restrictives adoptées à son égard sont disproportionnées par rapport aux finalités que lesdits actes sont supposés atteindre. Selon lui, sa vie et sa carrière sont ruinées. Il estime que, en pratique, les mesures restrictives l’empêchent d’exercer toute activité professionnelle et d’effectuer, en substance, toute opération économique dans sa vie professionnelle et privée. Dans le cadre du troisième moyen, il estime, en substance, que ces actes violent son droit de propriété ainsi que sa liberté d’exercer une activité économique et renvoie aux arguments avancés dans le cadre du deuxième moyen. Deuxièmement, s’agissant des actes de maintien, il indique que les arguments développés dans le cadre du deuxième moyen concernant les actes initiaux s’appliquent mutatis mutandis. S’agissant du troisième moyen, le requérant fait valoir que la prorogation des mesures restrictives adoptées à son égard en vertu des actes de maintien et jusqu’au 1er juin 2024 aggrave les conséquences disproportionnées desdites mesures.

111    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

112    Il convient de rappeler que selon la jurisprudence, les droits fondamentaux invoqués par le requérant, à savoir le droit de propriété, consacré à l’article 17 de la Charte, et la liberté d’exercer une activité économique, consacrée aux articles 15 et 16 de la Charte, ne sont pas des prérogatives absolues et que leur exercice peut faire l’objet de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union. Ainsi, toute mesure restrictive économique ou financière comporte, par définition, des effets qui affectent les droits de propriété et le libre exercice des activités professionnelles de la personne ou de l’entité qu’elle vise, causant ainsi des préjudices à cette dernière. L’importance des objectifs poursuivis par les mesures restrictives en cause est toutefois de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour les personnes ou les entités concernées (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Central Bank of Iran/Conseil, T‑563/12, EU:T:2015:187, point 115).

113    De plus, si le respect des droits fondamentaux constitue une condition de la légalité des actes de l’Union, selon une jurisprudence constante, ces droits fondamentaux ne jouissent pas, en droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doivent être pris en considération par rapport à leur fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ces droits, à condition qu’elles répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même des droits ainsi garantis (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 97 et jurisprudence citée).

114    En outre, il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union et qui est repris à l’article 5, paragraphe 4, TUE, exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient de nature à permettre que soient atteints les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre lesdits objectifs [voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 122 ; du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 60 (non publié), et du 14 mars 2017, Bank Tejarat/Conseil, T‑346/15, non publié, EU:T:2017:164, point 149].

115    En ce qui concerne le droit de propriété et la liberté d’exercer une activité économique du requérant, il convient, certes, de relever que ces droits sont restreints du fait des mesures restrictives prises à son égard, dès lors qu’il ne peut notamment pas disposer de ses fonds éventuellement situés sur le territoire de l’Union, ni les transférer vers l’Union, sauf en vertu d’autorisations particulières.

116    Cependant, en l’occurrence, l’adoption de mesures restrictives à l’encontre du requérant revêt un caractère adéquat, dans la mesure où elle s’inscrit dans un objectif d’intérêt général aussi fondamental pour la communauté internationale que la protection des populations civiles. En effet, le gel de fonds, d’avoirs financiers et d’autres ressources économiques ainsi que l’interdiction d’entrer sur le territoire de l’Union concernant des personnes identifiées comme étant impliquées dans le soutien au régime syrien ne sauraient, en tant que tels, passer pour inadéquats (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 100 et jurisprudence citée).

117    Quant au caractère prétendument disproportionné de l’inscription et du maintien du nom du requérant sur les listes en cause, il convient de rappeler que l’article 28, paragraphe 6, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ainsi que l’article 16 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoient la possibilité, d’une part, d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements et, d’autre part, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 364, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 127).

118    Il en résulte que, étant donné l’importance primordiale de la protection des populations civiles en Syrie, les restrictions aux droits du requérant éventuellement causées par les actes attaqués sont justifiées par un objectif d’intérêt général et ne sont pas disproportionnées au regard des buts visés.

119    Enfin, concernant la prolongation de l’application dans le temps des mesures restrictives adoptées à l’égard du requérant en vertu des actes de maintien, qui aggraverait les conséquences disproportionnées desdites mesures pour ce dernier, il y a lieu de constater que, dans le cadre de l’adoption de telles mesures restrictives, le Conseil est appelé à procéder à un réexamen périodique, conformément à l’article 34, deuxième et troisième phrases, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et à l’article 32, paragraphe 4, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, qui comporte à chaque fois la possibilité pour la personne ou l’entité concernée d’opposer ses arguments et de soumettre des éléments factuels corroborant ses allégations. Par conséquent, la décision de maintenir le nom du requérant sur les listes en cause ne saurait être qualifiée de disproportionnée en elle-même (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil, C‑241/19 P, EU:C:2020:545, points 106 et 107). Or, dès lors que c’est à bon droit que, sur la base du réexamen de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, le Conseil a considéré que les motifs litigieux étaient étayés, celui-ci pouvait décider de proroger ces mesures restrictives jusqu’au 1er juin 2024.

120    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter les deuxième et troisième moyens pris ensemble et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

121    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

122    En l’espèce, le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Issam Shammout est condamné aux dépens.

Svenningsen

Mac Eochaidh

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juin 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.