Language of document : ECLI:EU:T:2015:232

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

28 avril 2015 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale MEGARAIL – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑137/13,

Saferoad RRS GmbH, établie à Weroth (Allemagne), représentée par Me C. Czychowski, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles)(OHMI), représenté par M. A. Pohlmann, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 9 janvier 2013 (affaire R 2536/2011‑4), relative à la demande d’enregistrement du signe verbal MEGARAIL comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová (rapporteur) et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 7 mars 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 10 juin 2013,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 19 août 2013,

vu le mémoire en duplique déposé au greffe du Tribunal le 18 octobre 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

à la suite de l’audience du 25 novembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 juillet 2011, Outimex AG, devenue Saferoad RRS GmbH (ci-après la « requérante »), a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal MEGARAIL.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 6, 19 et 37 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        Par décision du 23 novembre 2011, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement pour l’ensemble des produits et services visés, motif pris de ce que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif et descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.

5        Le 7 décembre 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 9 janvier 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a, d’une part, accueilli le recours et annulé la décision de l’examinateur en ce qui concerne les produits et services suivants :

–        classe 6 : « Panneaux de rue métalliques » ;

–        classe 19 : « Feuilles et plaques en matières artificielles pour le marquage des routes; matériaux pour la construction et le revêtement des chaussées » ;

–        classe 37 : « Surveillance de la construction, supervision de travaux de construction, traitement contre la rouille ».

7        D’autre part, la chambre de recours a rejeté le recours en ce qui concerne les produits et services suivants :

–        classe 6 : « Glissières de sécurité, piquets et raccords métalliques de rails de sécurité; planches, piquets et parois de protection en acier, protection antichoc métallique, amortisseurs de chocs et dispositifs de protection contre les chocs métalliques, dispositifs métalliques passifs de retenue de véhicules, dispositifs métalliques de protection de bas de châssis en tant que protection lors d’un accident de motocyclette »;

–        classe 19 : « Glissières de sécurité et piquets de délimitation de routes non métalliques; objets pour la sécurité du trafic, ni métalliques, ni mécaniques, tous les produits précités compris dans la classe 19, à savoir protections des arbres, des objets et antichoc non métalliques et non mécaniques, amortisseurs de chocs et dispositifs de protection contre les chocs, non métalliques et non mécaniques; grilles non métalliques » ;

–        classe 37 : « Location de glissières de sécurité, de piquets pour glissières de sécurité, de raccords pour glissières de sécurité ».

8        Pour motiver la décision attaquée, la chambre de recours a relevé, en premier lieu, que les produits et services visés par la marque demandée s’adressaient à des organismes publics adjudicateurs responsables des travaux routiers.

9        En deuxième lieu, elle a constaté que le public pertinent situé dans la partie anglophone de l’Union européenne distinguerait, au sein de la marque demandée, d’une part, l’élément « mega » et, d’autre part, l’élément « rail », qui sont des expressions de la langue anglaise combinées conformément à ses règles grammaticales.

10      En troisième lieu, la chambre de recours a observé que l’élément « mega » constituait soit une unité de grandeur, soit un terme informel signifiant « grand par l’importance ou par la quantité », tandis que l’élément « rail » se référait, notamment, à un rail, une barrière, une rampe ou une clôture.

11      En quatrième lieu, selon la chambre de recours, lorsque la marque demandée est utilisée par rapport aux produits énumérés au point 7 ci-dessus, qui sont soit des glissières de sécurité soit des éléments de protection contre les chocs au sens large, destinés à assurer la sécurité du trafic, elle sera perçue comme une référence soit à leur grande taille soit à leur grande qualité. De même, en ce qui concerne les services énumérés au point 7 ci-dessus, la marque demandée serait comprise comme se référant à la taille ou à la qualité des glissières de sécurité et d’autres éléments de protection contre les chocs qui peuvent être loués. Ainsi, selon la chambre de recours, par rapport à ces produits et services, la marque demandée est descriptive et, par voie de conséquence, dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.

12      En cinquième lieu, de l’avis de la chambre de recours, les produits et services énumérés au point 6 ci-dessus n’étant pas liés directement à des protections contre les chocs, la marque demandée n’est ni descriptive ni dépourvue de caractère distinctif à leur égard.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, pour autant que l’enregistrement de la marque demandée a été rejeté ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      En outre, la requérante a conclu, dans la requête, à l’annulation de la décision de l’examinateur du 23 novembre 2011. Toutefois, elle s’est désistée de ce chef de conclusions dans la réplique.

15      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      Au soutien de ses conclusions, la requérante invoque deux moyens tirés, le premier, d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et, le second, d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) du même règlement.

17      Par son premier moyen, la requérante conteste que la marque demandée soit descriptive, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, par rapport aux produits et services énumérés au point 7 ci-dessus.

18      L’OHMI réfute le bien-fondé des arguments de la requérante.

19      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. Ces signes descriptifs sont réputés incapables de remplir la fonction essentielle des marques d’indication de l’origine (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec, EU:C:2003:579, points 29 et 30).

20      L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que ces signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec, EU:C:2006:20, point 62, et jurisprudence citée).

21      Dans cette perspective, les signes et les indications visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du consommateur, à désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, un produit ou un service tel que celui pour lequel l’enregistrement est demandé [arrêt du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec, EU:C:2001:461, point 39, et arrêt du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec, EU:T:2005:247, point 24].

22      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un lien suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces produits ou de ces services ou de l’une de leurs caractéristiques (arrêt PAPERLAB, point 21 supra, EU:T:2005:247, point 25).

23      Ainsi, le caractère descriptif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement du signe est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent qui est constitué par les consommateurs de ces produits ou de ces services [arrêt du 14 juin 2007, Europig/OHMI (EUROPIG) (T‑207/06, Rec, EU:T:2007:179), point 30].

24      À titre liminaire, il convient de relever que les constats factuels opérés par la chambre de recours dans la décision attaquée et rappelés aux points 8 et 9 ci‑dessus ne sont pas litigieux. Ainsi, la requérante ne conteste ni la définition du public pertinent retenue par la chambre de recours ni le constat selon lequel ledit public distinguera, au sein de la marque demandée, les éléments « mega » et « rail », qui sont des expressions anglaises.

25      Dans la mesure où ces constats ne sont, par ailleurs, pas entachés d’erreur, les seules questions qui doivent être tranchées sont la perception par le public pertinent des deux éléments de la marque demandée et de cette dernière dans son ensemble, ainsi que le caractère descriptif ou non du signe demandé, tel que perçu par le public pertinent, par rapport aux produits et services énumérés au point 7 ci‑dessus.

26      À cet égard, la requérante soutient, en premier lieu, que, même à admettre l’interprétation restrictive de l’élément « rail » comme signifiant « glissière de sécurité », cette dernière notion n’englobe pas les « parois de protection en acier » visées en classe 6 ni les « piquets de délimitation de routes non métalliques » et « grilles non métalliques » visés en classe 19, dès lors que ces produits ne comprennent pas, en règle générale, de barres horizontales.

27      De même, les finalités des « parois de protection en acier », des « piquets de délimitation de routes non métalliques » et des « grilles non métalliques » seraient différentes, du moins en partie, de celles des glissières de sécurité. Ainsi, si ces produits peuvent être utilisés dans le cadre d’un système de retenue, il s’agirait de l’un de leurs multiples domaines d’application possibles, mais pas de leur fonctionnalité technique.

28      Dans ce contexte, la requérante conteste la recevabilité des extraits des sites Internet figurant dans le mémoire en réponse de l’OHMI et censés démontrer l’usage des « parois de protection en acier », des « piquets de délimitation de routes non métalliques » et des « grilles non métalliques » dans le cadre de systèmes de retenue. Selon la requérante, ces éléments ne sauraient être pris en considération dans la mesure où ils ont été présentés tardivement.

29      Pour ces raisons, la requérante estime que c’est à tort que la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, que le terme « rail » était descriptif des « parois de protection en acier », des « piquets de délimitation de routes non métalliques » et des « grilles non métalliques ».

30      À cet égard, il y a lieu d’admettre que les « parois de protection en acier » visées en classe 6, ainsi que les « piquets de délimitation de routes non métalliques » et « grilles non métalliques » visés en classe 19 ne constituent pas, en eux-mêmes, des « glissières de sécurité ».

31      Cela étant, la requérante reconnaît elle-même, au point 27 ci‑dessus, que les « parois de protection en acier », les « piquets de délimitation de routes non métalliques » et les « grilles non métalliques » peuvent être utilisés dans le cadre d’un système de retenue, ce qui implique que leurs finalités incluent la sécurité du trafic. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 21 de la décision attaquée, ces produits sont utilisés en tant que composantes de systèmes de protection contre les chocs.

32      Il s’ensuit, d’une part, que la fin de non-recevoir de la requérante visant les extraits des sites Internet figurant dans le mémoire en réponse de l’OHMI est sans objet. En effet, même à supposer que lesdits extraits ne puissent pas être pris en considération par le Tribunal, cette circonstance est sans conséquence, dès lors que la requérante ne conteste pas le bien‑fondé de l’allégation qu’ils sont censés démontrer.

33      D’autre part, dans la mesure où les « parois de protection en acier », les « piquets de délimitation de routes non métalliques » et les « grilles non métalliques » sont utilisés, conjointement avec des glissières de sécurité, en tant que composantes de systèmes de protection contre les chocs, le public pertinent interprètera le terme « rail », utilisé à leur égard, comme se référant à un système de protection contre les chocs dans lequel ils sont incorporés.

34      À cet égard, la requérante observe, à juste titre, que la sécurité du trafic ne constitue pas l’unique finalité des produits en question, à tout le moins en ce qui concerne les « parois de protection en acier » et les « grilles non métalliques ». Toutefois, à la différence des circonstances examinées dans les arrêts du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (CARCARD) (T‑356/00, Rec, EU:T:2002:80) et du 14 avril 2005, Celltech/OHMI (CELLTECH) (T‑260/03, Rec, EU:T:2005:130), invoqués par la requérante, le lien unissant les « parois de protection en acier », les « piquets de délimitation de routes non métalliques » et les « grilles non métalliques » au domaine de la sécurité du trafic est suffisamment étroit pour influer sur la perception de l’élément « rail » par le public pertinent.

35      Partant, il y a lieu de conclure que, contrairement à ce que prétend la requérante, l’élément « rail » est descriptif des « parois de protection en acier », des « piquets de délimitation de routes non métalliques » et des « grilles non métalliques », au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 21 de la décision attaquée.

36      En deuxième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié la perception de l’élément « mega » par le public pertinent, en relation avec les produits énumérés au point 7 ci‑dessus.

37      À cet égard, la requérante soutient que, si le terme « mega » peut signifier « grand » et « grand par la quantité », ces interprétations n’ont pas été prises en considération par la chambre de recours. En tout état de cause, elles ne seraient pas normalement retenues par le public pertinent étant donné, d’une part, que la taille ne constitue pas un élément essentiel des produits en cause et, d’autre part, que l’élément « rail » figure dans la marque demandée au singulier, ce qui exclut l’identification d’une grande quantité.

38      À cet égard, il y a lieu de relever, d’une part, qu’il ressort clairement du point 21 de la décision attaquée, tel que résumé au point 11 ci‑dessus, que la chambre de recours s’est appuyée, entre autres, sur la signification « grand » de l’élément « mega ». En revanche, elle n’a pas retenu la signification « grand par la quantité ».

39      D’autre part, il y a néanmoins lieu d’admettre que, ainsi que le soutient la requérante, il est peu probable que la marque demandée soit interprétée comme se référant à la taille des produits en question. En effet, compte tenu de la nature technique des produits concernés et de ce que le public pertinent est composé de professionnels, ce dernier s’attendra normalement à ce qu’une indication d’une caractéristique technique concrète, telle que la taille, inclue, outre l’élément « mega », un élément permettant d’identifier avec précision ladite caractéristique, par exemple une unité de mesure ou son symbole.

40      En ce qui concerne le constat de la chambre de recours selon lequel le terme « mega » serait interprété comme signifiant « particulièrement bon », la requérante soutient que cette interprétation fait partie du langage informel ou familier, et non pas du langage formel et technique. Or, en l’espèce, le public pertinent aurait des attentes et des habitudes particulières en ce qui concerne le degré de formalisme et la nature objective et sérieuse des informations communiquées, et ne serait notamment pas habitué à l’usage d’un langage familier ou d’un jargon publicitaire, ainsi que le confirme la jurisprudence allemande transposable au cas d’espèce. Par conséquent, selon la requérante, dans le contexte de la sécurité du trafic, une indication se référant à une « mega glissière de sécurité » apparaîtra à la fois comme inappropriée pour décrire les qualités techniques des produits en question et comme relevant d’une exagération publicitaire. 

41      La requérante ajoute que, apprécié dans son ensemble, le terme « megarail » est vague, dès lors qu’il n’informe pas le public pertinent sur une qualité essentielle des produits concernés, contrairement à ce qu’exige la jurisprudence. En effet, la qualité du produit censée être visée par le qualificatif « mega » ne serait pas identifiée, ce dernier élément possédant uniquement une connotation élogieuse générale.

42      Dans ce contexte, notamment, l’interprétation de l’élément « mega » comme signifiant « particulièrement capable de retenir », « particulièrement sûr » ou « particulièrement performant », proposée par l’OHMI, ne serait pas immédiate, mais exigerait un certain effort, étant donné que les qualificatifs tels que « sûr » et « performant » ne ressortent pas du terme « mega ». De même, selon la requérante, dans la marque demandée, l’élément « mega » peut être doté de plusieurs significations, dès lors que la fonctionnalité d’un système de retenue est déterminée par plusieurs caractéristiques techniques, de sorte qu’un lien suffisamment direct ferait défaut en l’espèce.

43      À cet égard, il y a, certes, lieu d’admettre que l’usage du terme « mega » pour signifier « particulièrement bon » provient du langage informel. Toutefois, ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, cet usage est devenu courant, notamment dans la vie des affaires, ce qui implique qu’il est susceptible d’être connu et compris par le public pertinent.

44      La nature technique des produits et les attentes du public pertinent qui en découlent, invoquées par la requérante, ne mettent pas en cause ce constat. En effet, ainsi qu’il ressort du point 39 ci‑dessus, de telles attentes sont pertinentes lorsqu’il s’agit d’identifier une caractéristique technique concrète, telle que, par exemple, la taille d’un produit. En revanche, elles ne s’opposent pas à la compréhension de l’élément « mega », par le public pertinent, comme se référant à la qualité des produits concernés en général, qui n’est pas, en soi, une caractéristique technique à part.

45      Pour autant que la requérante se réfère, dans ce contexte, à deux décisions allemandes, il y a lieu de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres ne constituent que des éléments qui, sans être déterminants, peuvent seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque communautaire [arrêts du 16 février 2000, Procter & Gamble/OHMI (Forme d’un savon), T‑122/99, Rec, EU:T:2000:39, point 61, et du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec, EU:T:2001:221, point 58].

46      Au demeurant, tant les signes que les produits et services en cause dans les décisions nationales évoquées par la requérante diffèrent sensiblement de ceux en cause en l’espèce, de sorte que les solutions y retenues ne sauraient être transposées, en tant que telles, à la marque demandée.

47      Quant au caractère prétendument vague de l’élément « mega », d’une part, il est vrai que, ainsi qu’il ressort des points 39, 43 et 44 ci‑dessus, cet élément n’identifie pas une caractéristique technique concrète des produits concernés, mais leur qualité en général, qui résulte des différentes caractéristiques techniques évoquées par la requérante.

48      Toutefois, ainsi qu’il ressort du libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, les marques descriptives sont non seulement celles qui identifient une caractéristique technique donnée du produit concerné, mais également celles qui peuvent servir pour désigner sa qualité. Comme il a été constaté aux points 43 à 46 ci‑dessus, tel est le cas s’agissant de l’élément « mega » en ce qui concerne les produits énumérés au point 7 ci‑dessus.

49      D’autre part, c’est à tort que la requérante prétend que le lien entre l’interprétation du terme « mega » comme signifiant « particulièrement bon » et les produits concernés n’est pas suffisamment direct. En effet, le public pertinent est en mesure de comprendre, sans autre réflexion, qu’un produit « particulièrement bon » est particulièrement apte à remplir sa finalité, c’est-à-dire, en l’espèce, assurer une protection contre les chocs et, partant, la sécurité du trafic.

50      Par conséquent, contrairement à ce que prétend la requérante, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément « mega » allait être perçu comme décrivant la qualité des produits énumérés au point 7 ci‑dessus.

51      En troisième lieu, la requérante ne conteste pas le constat de la chambre de recours selon lequel les éléments « mega » et « rail » sont combinés dans la marque demandée conformément aux règles de la grammaire anglaise. Ce constat n’étant pas entaché d’erreur, il y a lieu de considérer que le public pertinent interprètera la marque demandée dans sa globalité comme se référant à une glissière de sécurité ou à un système de protection contre les chocs particulièrement bon. Or, interprétée ainsi, la marque demandée est descriptive des produits énumérés au point 7 ci‑dessus, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

52      En quatrième lieu, selon la requérante, pour les motifs exposés ci-dessus, la marque demandée n’est pas descriptive des services de location visés en classe 37.

53      Or, dans la mesure où il ressort des points 24 à 51 ci‑dessus que la marque demandée est descriptive des produits énumérés au point 7 ci‑dessus, elle est tout aussi descriptive des services de location visés en classe 37 et portant sur ces mêmes produits. En effet, ainsi que l’a constaté la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée, le public pertinent comprendra la marque demandée comme se référant à la qualité des glissières de sécurité et d’autres éléments de protection contre les chocs qui peuvent être loués.

54      En cinquième et dernier lieu, d’abord, la requérante estime que le caractère enregistrable de la marque demandée est établi par des enregistrements antérieurs, en tant que marques communautaires, des marques MEGA‑RAIL et MEGARAILER.

55      Ensuite, lors de l’audience, la requérante a contesté la recevabilité des éléments figurant dans le mémoire en réponse de l’OHMI censés démontrer que des signes similaires à la marque demandée, tels que MAXIRAIL, EASYRAIL et SUPERRAIL, sont couramment utilisés dans le domaine de la sécurité du trafic en tant qu’indications publicitaires descriptives. Elle estime, en effet, que ces éléments ne sauraient être pris en considération dans la mesure où ils ont été présentés tardivement.

56      Enfin, selon la requérante, en tout état de cause, les signes tels que MAXIRAIL, EASYRAIL et SUPERRAIL, invoqués par l’OHMI, sont utilisés dans le domaine de la sécurité du trafic en tant que marques, pour identifier des lignes de produits selon leurs caractéristiques techniques telles que leur flexibilité, leur capacité de retenue ou leur résistance aux collisions. De même, certains des signes en question auraient été enregistrés en tant que marques communautaires. Ainsi, selon la requérante, le public pertinent est habitué à l’usage du terme « rail », combiné avec des préfixes, en tant que marque.

57      À cet égard, il y a lieu de relever que, selon la jurisprudence, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec, EU:C:2011:139, points 73 et 74).

58      Cela étant, les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent se concilier avec le respect de la légalité. Par conséquent, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 57 supra, EU:C:2011:139, points 75 et 76).

59      Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, point 57 supra, EU:C:2011:139, point 77).

60      En l’espèce, il ressort de l’examen mené ci‑dessus que la marque demandée se heurte, eu égard aux produits et services énumérés au point 7 ci‑dessus, au motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

61      Dans ces circonstances, la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’OHMI.

62      Au demeurant, il y a lieu de relever, d’abord, que la marque verbale MEGARAILER, d’une part, se différencie de la marque demandée par l’ajout des lettres « er », qui tend à influer sur la perception du signe par le public pertinent. D’autre part, ladite marque a été enregistrée pour des produits autres que ceux en cause en l’espèce.

63      Ensuite, il convient de constater, à l’instar du point 32 ci‑dessus, que, dans la mesure où la requérante ne conteste pas que des signes similaires à la marque demandée, tels que MAXIRAIL, EASYRAIL et SUPERRAIL, sont utilisés dans le domaine de la sécurité du trafic, mais seulement la nature de cette utilisation et son impact sur la perception du public pertinent, la fin de non‑recevoir visant les éléments figurant dans le mémoire en réponse de l’OHMI, censés démontrer ladite utilisation, est sans objet. Tel est d’autant plus le cas que l’utilisation des signes susmentionnés faisait, en tout état de cause, partie du cadre factuel du litige devant l’OHMI, dès lors qu’elle ressortait des documents présentés par la requérante en annexe 2 à ses observations du 5 octobre 2011 adressées à l’examinateur.

64      Enfin, il y a lieu de relever, d’une part, que, pour autant que les signes tels que MAXIRAIL, EASYRAIL et SUPERRAIL soient enregistrés en tant que marques, il s’agit de marques figuratives. Or, la présence d’un élément figuratif ayant, en règle générale, un impact sur le caractère distinctif du signe, elles ne sont pas comparables avec la marque demandée, qui est une marque verbale.

65      D’autre part, selon les indications fournies par la requérante elle-même, les différents signes en question sont utilisés pour identifier des lignes de produits en fonction de leurs caractéristiques techniques. Or, cette circonstance suggère que ces derniers éléments servent à décrire les caractéristiques des produits concernés, et non pas à identifier leur origine commerciale.

66      Au vu de tout ce qui précède, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque demandée était descriptive des produits et services énumérés au point 7 ci‑dessus au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

67      Partant, le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

68      En outre, il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés dans cette disposition s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré en tant que marque communautaire [voir, en ce sens, arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec, EU:C:2002:506, point 29, et du 14 septembre 2004, Applied Molecular Evolution/OHMI (APPLIED MOLECULAR EVOLUTION), T‑183/03, Rec, EU:T:2004:263, point 29]. Dans ces circonstances, compte tenu du constat opéré au point 66 ci‑dessus, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Saferoad RRS GmbH est condamnée aux dépens.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 avril 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.