Language of document : ECLI:EU:T:2015:55

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

29 janvier 2015 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire figurative SPIN BINGO – Marque communautaire verbale antérieure ZITRO SPIN BINGO – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑665/13,

Zitro IP Sàrl, établie à Luxembourg (Luxembourg), représentée par Me A. Canela Giménez, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Gamepoint BV, établie à La Haye (Pays-Bas),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 14 octobre 2013 (affaire R 1388/2012-4), relative à une procédure d’opposition entre Zitro IP Sàrl et Gamepoint BV,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 décembre 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 25 avril 2014,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 23 novembre 2010, Gamepoint BV a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif en couleurs suivant  :

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3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection), de secours (sauvetage) et d’enseignement ; appareils et instruments de conduction, de distribution, de transformation, de stockage, de réglage et de gestion de l’électricité ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; support d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques ; distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à prépaiement ; caisses enregistreuses, calculettes, appareils et logiciels pour le traitement de l’information, en particulier logiciels de jeux, jeux électroniques, jeux d’adresse ; logiciels, en particulier logiciels pour jeux électroniques, jeux d’adresse, appareils de jeux, exclusivement destinés à être utilisés avec un écran de télévision ou vidéo, les produits précités également à utiliser en ligne ».

–        classe 41 : « Éducation ; formation ; divertissement ; opportunités de jouer à des jeux via l’utilisation ou non de l’internet ou de la technologie de l’internet ».

–        classe 42 : « Conception et développement de logiciels, en particulier liés aux jeux et aux jeux interactifs, via l’utilisation ou non de l’internet et/ou de la technologie de l’internet ; services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conceptions y relatifs ; services d’analyses et de recherches industrielles ; conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2011/037, du 23 février 2011.

5        Le 19 mai 2011, la requérante, Zitro IP Sàrl, a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque communautaire verbale antérieure n° 9058868, ZITRO SPIN BINGO, déposée le 27 avril 2010 et enregistrée le 22 décembre 2010, désignant les produits et services relevant des classes 9, 28 et 41 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; supports d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques ; distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à prépaiement ; équipement pour le traitement des données et ordinateurs ; appareils pour jeux conçus pour être utilisés seulement avec récepteur de télévision ; programmes informatiques ; distributeurs automatiques ; matériel informatique et logiciels, en particulier pour salons de bingo, casinos, machines automatiques de jeux ; équipements électroniques pour installation de salles récréatives et de paris ; logiciels de jeux ; programmes de jeux interactifs ; terminaux de paris ; publications électroniques téléchargeables ; cartes ou fiches comprises dans la classe 9 ; équipements de télécommunications ».

–        classe 28 : « Jeux, jouets ; jeux automatiques à prépaiements ; jeux automatiques autres que ceux conçus pour être utilisés seulement avec récepteur de télévision ; appareils à prépaiement (jeux) ; machines de jeux de salles récréatives, y compris salles de jeux de hasard et paris ; machines récréatives à pièces, à jetons ou à tout autre moyen de prépaiement ; jeux automatiques ; machines autonomes de jeux vidéo ; unité de jeux électroniques portable ; équipements de jeux de casinos, salles de bingo et autres salles de jeux de hasard ».

–        classe 41 : « Services d’éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; services de jeu en ligne ; organisation de compétitions ; organisation de loteries ; exploitation de salles de jeux ; services de jeux d’argent ; services d’information en matière de divertissement et de loisirs, en ce compris tableaux électroniques fournissant des informations, actualités, astuces et stratégies pour des jeux électroniques, informatiques et vidéo ; services de casino ; offres de lieux de divertissement ; services de location de machines récréatives et de paris ; services de parcs d’attractions ».

7        L’opposition était fondée sur tous les produits et services de la marque communautaire antérieure. Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        Le 31 mai 2012, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition pour les produits et services relevant des classes 9, 41 et 42 tels qu’énumérés dans la demande d’enregistrement, au point 3 ci-dessus, excepté pour les produits suivants, considérés différents des produits de la marque antérieure :

–        classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, de pesage, de mesurage, de contrôle (inspection), de réglage et de gestion de l’électricité ».

–        classe 42 : « Services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conceptions y relatifs ; services d’analyses et de recherches industrielles ».

9        Le 27 juillet 2012, Gamepoint a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 14 octobre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’opposition, et rejeté l’opposition dans son intégralité. Elle a considéré que, en vertu de l’article 59 du règlement n° 207/2009, le recours de Gamepoint n’était recevable que dans la mesure où la demande de marque communautaire avait été partiellement refusée. La chambre de recours a estimé que les produits et services visés par la marque demandée, pertinents pour le recours, étaient soit similaires, soit identiques, à ceux désignés par la marque antérieure, excepté les « appareils et instruments de secours (sauvetage) », qui étaient différents des produits désignés par la marque antérieure.

11      La chambre de recours a considéré, ensuite, qu’il y avait un faible degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle entre les signes en conflit, en dépit du fait qu’ils avaient en commun l’expression « spin bingo ». Elle a considéré cette expression comme descriptive d’une caractéristique essentielle des produits et services pertinents. Sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré que la similitude était faible, car, s’agissant du signe antérieur, le public porterait son attention sur l’élément plus distinctif « zitro », qui est dépourvu de toute signification dans les langues pertinentes et se trouve au début du signe. Concernant le signe contesté, elle a estimé que, compte tenu de la signification descriptive de l’expression « spin bingo », les consommateurs porteraient tout autant leur attention sur les divers éléments de couleur du dispositif que sont les cercles et la bobine sur laquelle est représenté un visage souriant. Sur le plan auditif, la chambre de recours a conclu que la similitude était faible également, compte tenu de la signification descriptive de l’expression « spin bingo », et du fait que le public porterait son attention sur l’élément plus distinctif « zitro ». Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé que le terme « zitro » était dominant et qu’il ne partageait aucune similitude conceptuelle avec le signe contesté.

12      Enfin, concernant l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours a, dans un premier temps, estimé que le caractère distinctif de la marque antérieure ZITRO SPIN BINGO était moyen. Elle a souligné, dans un deuxième temps, que la similitude entre les signes était limitée à l’expression « spin bingo », laquelle a une signification purement descriptive, qui ne peut constituer l’élément dominant de l’impression d’ensemble produite par le signe d’une marque complexe, et, partant, qui ne peut pas non plus former à elle seule la base d’un risque de confusion. La chambre de recours en a conclu que, bien qu’une partie des produits et services soient identiques et en supposant que le niveau d’attention du public ne soit que moyen, le faible degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle entre les signes excluait tout risque de confusion, y compris un risque d’association, lequel ne pouvait être basé sur des éléments non distinctifs. S’agissant des « appareils et instruments de secours (sauvetage) » de la marque demandée, la chambre de recours a considéré que l’une des conditions indispensables de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, à savoir la similitude des produits, n’était pas remplie.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur le moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

15      La requérante se limite à contester le constat, au point 28 de la décision attaquée, selon lequel l’expression « spin bingo » est descriptive d’une caractéristique essentielle des produits et services. Elle met ainsi en cause un des éléments sur lesquels la chambre de recours a fondé sa comparaison visuelle, auditive et conceptuelle des deux signes concernés et, partant, son analyse au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était constitué du grand public, mais aussi d’un public de professionnels et que le niveau d’attention à prendre en compte était normal, mais supérieur à la moyenne pour ce qui était du public de professionnels. Elle a également estimé que, la marque antérieure étant une marque communautaire, le public pertinent était constitué de consommateurs dans tous les États membres de l’Union européenne. La définition du public pertinent n’est pas contestée par la requérante.

19      Par ailleurs, lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 existe dans une partie de la Communauté [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

20      Il convient de relever qu’en l’espèce la requérante ne conteste pas non plus les conclusions relatives à la similitude des produits. La chambre de recours a estimé que les produits relevant de la classe 9 désignés par la marque demandée étaient soit identiques, soit semblables, aux produits désignés par la marque antérieure, à l’exception des « appareils et instruments de secours (sauvetage) » ; que les services relevant de la classe 41 étaient identiques, et que les services de la classe 42 étaient semblables à ceux désignés par la marque antérieure.

21      Il convient, dès lors, d’examiner si la chambre de recours pouvait considérer à bon droit que l’expression « spin bingo » était descriptive des produits et services concernés par les marques en conflit.

22      Or, concernant l’appréciation du caractère descriptif de l’expression « spin bingo », la chambre de recours a estimé, au point 28 de la décision attaquée, premièrement, que le terme « bingo » était un jeu communément connu, et que, associé au mot anglais « spin », qui fait partie du vocabulaire de base de la partie anglophone du public pertinent et signifie « faire tourner ou tournoyer rapidement », celle-ci supposera que l’on fait tourner les numéros du jeu de bingo. La chambre de recours a souligné que, dans le signe contesté, cette signification était renforcée par l’élément figuratif ayant une apparence de bobine. Elle a précisé que, même s’il ne saisissait pas le sens correct du mot anglais « spin », le public pertinent comprendra toutefois qu’il s’agit d’un terme anglais et le percevra, en association avec le mot « bingo », comme étant une variante spécifique du jeu de bingo.

23      Deuxièmement, la chambre de recours a considéré, toujours au point 28 de la décision attaquée, que, s’agissant des produits et services pertinents aux fins de la procédure de recours des classes 9, 41 et 42, les consommateurs supposeront qu’ils peuvent être utilisés ou fournis pour jouer au jeu de spin bingo (par exemple, appareils de jeux ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; support d’enregistrement ; logiciels ; opportunités de jouer à des jeux, divertissement), qu’ils concernent l’installation ou le développement de dispositifs pour jouer au jeu (par exemple, équipement électronique pour installations de salles récréatives et de paris ; conception d’ordinateurs et de logiciels) ou qu’ils fournissent des informations concernant le jeu (par exemple, appareil d’enseignement, éducation, formation).

24      La requérante soutient, en substance, que l’expression « spin bingo » ne saurait être qualifiée de descriptive des produits et services en cause, et que Gamepoint, en la choisissant, a uniquement été inspirée par la marque antérieure ZITRO SPIN BINGO. À l’appui de sa position, elle fait valoir quatre arguments.

25      Premièrement, l’expression « spin bingo » ne serait pas descriptive du jeu de bingo, au motif que, dans le jeu de bingo, les balles ne tournent ou ne tournoient pas, contrairement aux machines à sous à rouleaux.

26      Deuxièmement, la signification de l’expression« spin bingo » ne serait pas claire et évoquerait tout au plus un objet en rotation qui pourrait être, indifféremment, des rouleaux, une roue de la fortune, une roulette, un tambour de bingo ou encore faire référence aux balles dans le tambour de bingo. De même, l’expression « spin bingo » ne ferait référence à aucun jeu précis aux caractéristiques spécifiques.

27      Troisièmement, la requérante fait valoir que l’expression « spin bingo » n’a jamais été utilisée pour qualifier le bingo, de même qu’aucun jeu (machines à sous à rouleaux ou roulette) n’a jamais été qualifié à l’aide du terme « spin » .

28      Quatrièmement, la requérante fait valoir que, même à supposer que l’élément figuratif de la marque demandée ressemble à un rouleau (ou à une bobine), c’est en tout état de cause l’expression « reels bingo » qui serait descriptive, et non pas « spin bingo ». Elle précise à cet égard, que, dans une autre de ses propres marques, l’expression « spin bingo » est utilisée en ce qui concerne une roue de la fortune.

29      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, un signe sera descriptif s’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 4 mars 2010, Monoscoop/OHMI (SUDOKU SAMURAI BINGO), T‑564/08, EU:T:2010:74, point 15 et jurisprudence citée, et du 17 octobre 2012, MIP Metro/OHMI – J. C. Ribeiro (MISS B), T‑485/10, EU:T:2012:554, point 29 et jurisprudence citée].

30      Il importe également de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés (voir arrêt SUDOKU SAMURAI BINGO, point 29 supra, EU:T:2010:74, point 16 et jurisprudence citée).

31      S’agissant du premier argument de la requérante selon lequel l’expression « spin bingo » n’a pas de lien avec les caractéristiques du jeu de bingo, il y a lieu d’observer, tout d’abord, que la chambre de recours a constaté à juste titre, au point 28 de la décision attaquée, que le terme « bingo » faisait référence à un jeu de hasard communément connu, dans lequel les joueurs rayent des numéros sur des cartes au fur et à mesure qu’un annonceur tire au hasard des numéros, le vainqueur étant la première personne à avoir rayé tous ses numéros. Ainsi, le terme « bingo » est descriptif de la destination et des caractéristiques du jeu de hasard correspondant [voir, en ce sens, arrêts SUDOKU SAMURAI BINGO, point 29 supra, EU:T:2010:74, points 20 et 23, et du 13 avril 2011, Zitro IP/OHMI – Show Ball Informática (BINGO SHOWALL), T‑179/10, EU:T:2011:177, point 32 ]. Cela n’est d’ailleurs pas contesté par la requérante qui concentre son argumentation sur l’expression « spin bingo ».

32      Ensuite, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que le terme anglais « spin » se réfère à des mouvements de rotation, et que, dans le signe contesté, cette signification est renforcée par l’élément figuratif ayant l’apparence d’une bobine (ou rouleau) que l’on peut faire tourner. De tels mouvements accentuent l’impression associée à l’effet instable et fortuit du hasard, propre au jeu de bingo. Or, la requérante, elle-même, souligne cet aspect du hasard, lorsqu’elle fait valoir que l’expression « spin bingo » se réfère davantage à des machines à sous, dans lesquelles des images tournent et s’alignent sur des rouleaux.

33      Enfin, il y a lieu de confirmer le constat fait par la chambre de recours, au point 28 de la décision attaquée, selon lequel le public pertinent percevra l’expression « spin bingo » comme une variante spécifique du jeu de bingo. En effet, il est possible d’imaginer une variante du jeu de bingo avec des numéros qui tournent, notamment s’ils sont inscrits sur des balles dans un tambour que l’on ferait tourner, pour reprendre l’exemple cité par la requérante elle-même. La requérante admet en effet que le tambour qui contient les balles de bingo tourne également, tout comme les balles, qui suivent le mouvement du tambour.

34      Il convient, dès lors, de rejeter le premier argument de la requérante.

35      S’agissant de son deuxième argument, relatif au manque de clarté et de précision de l’expression « spin bingo », il convient de rappeler, tout d’abord, que, en règle générale, la simple combinaison d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé reste elle-même descriptive desdites caractéristiques. Toutefois, une telle combinaison peut ne pas être descriptive, au sens de cette disposition, à condition qu’elle crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la réunion desdits éléments. C’est le cas s’il existe un écart perceptible entre le mot et la simple somme des éléments qui le composent, ce qui suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments (voir arrêt du 25 février 2010, Lancôme/OHMI, C‑408/08 P, Rec, EU:C:2010:92, points 61 et 62 et jurisprudence citée).

36      Ensuite, il ressort du point 31 ci-dessus, que le terme « bingo » est descriptif du jeu de hasard correspondant, et, du point 32 ci-dessus, qu’il n’est pas contesté que le terme anglais « spin » fait allusion à un objet en rotation ou à l’action de faire tourner quelque chose. À cet égard, la requérante admet elle-même que la combinaison des termes « spin » et « bingo » suggère que quelque chose tourne dans ce jeu de bingo, ce qui ne fait que confirmer la constatation, au point 28 de la décision attaquée, selon laquelle le public pertinent supposera que l’on fait tourner les numéros du jeu de bingo, ou, à tout le moins, s’il n’a pas une connaissance suffisante de l’anglais, qu’il s’agit d’une variante du jeu de bingo.

37      Contrairement à ce qu’avance la requérante, l’absence de précision quant à ce qui tourne exactement ou quant à l’incidence de cette rotation sur le jeu est sans importance sur la perception du public pertinent, dans la mesure où, en tout état de cause, même un public de consommateurs ayant un degré d’attention moyen pourra déceler immédiatement et sans autre réflexion les caractéristiques spécifiques du jeu, c’est-à-dire que quelque chose tourne dans le jeu de bingo, comme le reconnaît la requérante elle-même.

38      Enfin, concernant le terme « spin », l’OHMI relève à juste titre que le public est souvent confronté à des termes et à des expressions ou à des acronymes qu’il considère comme descriptifs même s’il n’en saisit pas la signification exacte (HTML, Wi-Fi et RNIS). Pour autant, le public ne les percevra pas comme une indication d’origine commerciale des produits et services pertinents.

39      Il convient, dès lors, de rejeter le deuxième argument de la requérante.

40      S’agissant de son troisième argument, relatif au fait que l’expression « spin bingo » n’aurait jamais été utilisée pour qualifier le jeu de bingo, il suffit de constater à cet égard que la jurisprudence requiert seulement un rapport suffisamment direct et concret entre le signe, d’une part, et les caractéristiques des produits et des services, d’autre part, de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description d’une des caractéristiques des produits et des services en cause. Par ailleurs, il n’est pas nécessaire, pour être qualifié de descriptif, que le signe soit effectivement utilisé, dans le commerce, à des fins descriptives. Il suffit qu’il puisse être utilisé à de telles fins (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec, EU:C:2004:86, point 97). Dès lors, il n’est pas exigé d’établir l’existence d’une appellation courante ou usuelle dans le secteur concerné.

41      En tout état de cause, il ressort des points 31 à 39 ci-dessus, que la combinaison des termes « spin » et « bingo » n’est pas inhabituelle au point que la combinaison des deux termes produise une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications des deux éléments, au point de la rendre non descriptive des produits et services en cause. Il convient, dès lors, de rejeter le troisième argument de la requérante.

42      S’agissant de son quatrième argument, selon lequel d’autres expressions auraient été mieux à même de décrire les produits et services en cause, il y a lieu d’observer que la chambre de recours n’avait pas à se prononcer sur le caractère descriptif ou plus descriptif de ces autres expressions. En effet, dans la mesure où il ressort de l’analyse effectuée aux points 31 à 41 ci-dessus, que la chambre de recours a considéré à bon droit que l’expression « spin bingo » était descriptive des produits et services en cause dans le cas d’espèce, le fait que d’autres termes ou expressions auraient également pu être descriptifs ou davantage descriptifs de ces produits et services est dépourvu de pertinence aux fins du présent litige. Au surplus, il ressort de la jurisprudence qu’il est indifférent, afin d’apprécier le caractère descriptif d’un signe, qu’il existe ou non des synonymes permettant de désigner les mêmes caractéristiques des produits ou services en cause (voir, en ce sens, arrêt Koninklijke KPN Nederland, point 40 supra, EU:C:2004:86, point 101).

43      Il convient, dès lors, de rejeter le quatrième argument de la requérante.

44      Par conséquent, le moyen unique de la requérante n’est pas fondé, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

45      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours de Zitro IP Sàrl est rejeté.

2)      Zitro IP est condamnée aux dépens.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 janvier 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.