Language of document : ECLI:EU:T:2014:779

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

18 septembre 2014(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative représentant un garçon sur un vélo tenant un maillet – Marques communautaire et nationale figuratives antérieures représentant un joueur de polo – Motifs relatifs de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑265/13,

The Polo/Lauren Company, LP, établie à New York, New York (États-Unis), représentée par Mme S. Davies, solicitor, M. J. Hill, barrister, et M. R. Black, solicitor,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. P. Bullock et N. Bambara, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

FreshSide Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par M. N. Lockett, solicitor,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 1er mars 2013 (affaire R 15/2012-2), relative à une procédure d’opposition entre The Polo/Lauren Company, LP et FreshSide Ltd,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse (rapporteur) et A. M. Collins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mai 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 25 juillet 2013,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 août 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 décembre 2009, l’intervenante, FreshSide Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement n° (CE) 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 18, 25 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Voyage (sacs de -) ; parapluies » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 28 : « Articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 29/2010, du 15 février 2010.

5        Le 28 avril 2010, la requérante, The Polo/Lauren Company, LP, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur plusieurs droits antérieurs, qui ont été limités au cours de la procédure d’opposition aux marques antérieures suivantes (ci-après, prises ensemble, les « marques antérieures ») :

–        la marque communautaire figurative, déposée le 29 septembre 2004 et enregistrée le 3 novembre 2005 sous le numéro 4049201, pour un ensemble de produits compris dans les classes 9, 18, 20, 21, 24 et 25, telle que reproduite ci-dessous :

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–        La marque nationale figurative, déposée le 31 juillet 1979 et enregistrée en Autriche le 14 décembre 1979 sous le numéro 92629, pour un ensemble de produits compris dans les classes 18 et 28, telle que reproduite ci-dessous :

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

8        Le 28 octobre 2011, la division d’opposition a rejeté dans son intégralité l’opposition formée par la requérante.

9        Le 22 décembre 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 1er mars 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, que les signes en conflit étaient globalement différents et que, dès lors, aucun risque de confusion ne pouvait exister. Par ailleurs, compte tenu du fait que les signes en conflit n’étaient pas similaires, la chambre de recours a conclu qu’une des conditions cumulatives pour l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’était pas remplie.

 Conclusion des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, par son chef de conclusions visant à voir la décision attaquée confirmée, l’intervenante conclut en fait au rejet du recours.

15      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens tirés d’une violation, en premier lieu, de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, en deuxième lieu, de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

16      La requérante fait valoir que l’absence d’appréciation globale du risque de confusion ne serait envisageable que si les signes en conflit ne présentaient aucune caractéristique commune en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents. Dans ce cadre, un niveau de similitude faible entre deux signes devrait permettre d’apprécier globalement le risque de confusion. En l’espèce, la chambre de recours aurait dû tenir compte du caractère distinctif accru des marques antérieures dans le cadre de l’analyse de la similitude des signes en conflit. En tout état de cause, les similitudes existantes entre lesdits signes sur les plans visuel et conceptuel, que la requérante précise, n’auraient pas pu conduire la chambre de recours à conclure que les signes en conflit étaient globalement différents. En particulier, s’agissant de l’importance accordée par la chambre de recours à la représentation graphique d’une bicyclette dans la marque demandée, la requérante soutient qu’une telle différence ne pourrait conduire à considérer les signes en conflit comme étant globalement différents que si les autres éléments desdits signes étaient négligeables. Or, tel ne serait pas le cas. Dès lors, la chambre de recours aurait commis une erreur en ne procédant pas à une analyse globale du risque de confusion et en ne recherchant pas s’il existait un risque d’association entre les signes en conflit.

17      L’OHMI souligne que les différences entre les signes en conflit l’emportent sur leurs similitudes. En particulier, l’OHMI met en avant l’importance particulière que tient la différence de monture (bicyclette ou cheval) dans les deux signes. Dès lors, dans le cadre d’une impression globale produite par les signes en conflit, il existerait une différence visuelle. De même, la chambre de recours aurait conclu à bon droit que les signes en conflit ne concordaient pas sur le plan conceptuel, notamment compte tenu de contenus conceptuels dominants différents. Par ailleurs, l’OHMI soutient que, dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes en conflit, il n’y aurait pas lieu de tenir compte du caractère distinctif accru ou de la renommée des marques antérieures. En outre, ces éléments n’auraient pas pu atténuer les différences entre les signes en conflit au point d’attribuer un poids excessif à leurs caractéristiques communes. Enfin, l’absence de similitudes entre les signes en conflit ne permettait pas à la chambre de recours de conclure à l’existence d’un risque de confusion, et cela quand bien même les produits en cause seraient identiques. Pour ce qui est du risque d’association avancé par la requérante, il serait insuffisant pour conclure à l’existence d’un risque de confusion. De plus, en l’absence de similitude des signes en conflit, la chambre de recours pouvait ne pas tenir compte des éléments de preuve présentés par la requérante à cet égard.

18      L’intervenante soutient que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en retenant que les signes en conflit étaient globalement différents. En particulier, l’intervenante souligne que la seule similitude existant entre les deux signes en conflit serait la présence d’un maillet de polo tenu par le joueur, qui serait toutefois dirigé dans des directions opposées. Les autres similitudes éventuelles entre les signes en conflit, notamment celles invoquées par la requérante dans ses écritures, seraient négligeables ou insignifiants. En revanche, les autres éléments des signes en conflit, tels que la présence d’une bicyclette ou d’un cheval, seraient significatifs. L’intervenante souligne qu’elle a déjà enregistré une marque communautaire très similaire à la marque demandée. Par ailleurs, l’intervenante met en avant le fait que la représentation d’un joueur de polo à bicyclette renvoie à l’image d’un sport urbain émergent, se pratiquant sur des terrains de tennis ou dans les cours d’école. Ce sport serait donc différent du sport traditionnel de polo sur les plans visuel et conceptuel. Dans ces conditions, la chambre de recours aurait pu considérer à bon droit qu’il ne pouvait exister de risque de confusion, et cela sans devoir réaliser une appréciation globale dudit risque, ni analyser le caractère distinctif accru éventuel des marques antérieures. L’intervenante précise à cet égard que la renommée d’une marque antérieure ne pourrait pas servir à établir la similitude entre deux signes en conflit. De même, la chambre de recours aurait été fondée à écarter les éléments avancés par la requérante pour démontrer l’existence d’un risque d’association dans l’esprit du public pertinent, qui ne serait pas une alternative au risque de confusion.

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i) et ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures, respectivement, les marques communautaires et les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

20      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, en substance, que les signes en conflit étaient globalement différents, de sorte qu’une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’était pas remplie, quand bien même les produits en cause seraient identiques et quelle que soit la notoriété des marques antérieures.

21      Il convient donc d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient globalement différents.

22      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

23      Il résulte également de la jurisprudence que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuels, phonétiques et conceptuels [voir arrêt du Tribunal du 17 février 2011, Annco/OHMI – Freche et fils (ANN TAYLOR LOFT), T‑385/09, Rec. p. II‑455, point 26, et la jurisprudence citée].

24      Sur le plan visuel, la chambre de recours a accordé « un poids considérable » au fait que l’un des signes contenait la représentation graphique d’une bicyclette, alors que les autres contenaient celle d’un cheval. Pour la chambre de recours, cette différence « est clairement et immédiatement perceptible et le public pertinent, en dépit de son souvenir imparfait, la gardera en mémoire ». La chambre de recours en a déduit au point 30 de la décision attaquée que les signes en conflit étaient différents sur le plan visuel.

25      En premier lieu, bien que la décision attaquée soit rédigée de façon équivoque, la chambre de recours semble avoir considéré que la représentation graphique d’une bicyclette dans la marque demandée constituait, à tout le moins, un élément dominant de celle-ci. Or, aucun élément ne permet d’arriver à une telle conclusion. En effet, tout d’abord, il y a lieu de rappeler que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails. Ensuite, d’un point de vue visuel, il convient de relever que la représentation graphique d’une bicyclette tient une place similaire à la représentation graphique d’une personne tenant un maillet de polo, si bien qu’il ne saurait être accordé plus de poids à l’une ou l’autre desdites représentations. En outre, le fait que le maillet de polo se situe au-dessus du joueur de polo a pour effet de faire apparaître de façon évidente cet accessoire dans la représentation des signes en conflit. Cet élément, contrairement à ce que soutient l’intervenante dans ses écritures, ne saurait être considéré comme négligeable dans les signes en conflit.

26      En deuxième lieu, s’il est certes exact que la représentation graphique d’une bicyclette dans la marque demandée constitue une différence notable avec les marques antérieures, il n’en demeure pas moins que les similitudes existant entre les signes en conflit ne sauraient être qualifiées de négligeables ou d’insignifiantes comme le soutient l’intervenante. En particulier, ainsi que l’a d’ailleurs relevé la chambre de recours, les signes en conflit représentent une personne tenant un maillet de polo en l’air. Dans les deux cas, la personne est représentée sans couleur particulière. De plus, comme le fait remarquer à juste titre la requérante dans ses écritures, la personne dans les signes en conflit est représentée de face, légèrement de profil, selon des angles assez proches. Il en va de même de l’angle formé par le maillet de polo. Par ailleurs, dans les deux cas, la représentation graphique donne l’impression que les personnes sont en mouvement, ce que ne conteste d’ailleurs pas l’intervenante. Enfin, comme le remarque la requérante, les dimensions relatives des signes en conflit (c’est-à-dire le rapport entre la hauteur et la largeur du signe) sont assez similaires. Il est exact, comme l’a relevé la chambre de recours et le fait valoir l’intervenante, que le cheval galope vers la gauche alors que la bicyclette roule vers la droite. Toutefois, compte tenu des angles utilisés, y compris pour le maillet de polo, et des dimensions relatives des signes en conflit, la comparaison visuelle desdits signes donne l’impression d’une certaine symétrie.

27      Au vu de ces éléments, il ne saurait être considéré que les signes en conflit sont différents sur le plan visuel comme l’a pourtant retenu la chambre de recours au point 30 de la décision attaquée. Les signes en conflit présentent, à tout le moins un faible degré de similitude sur le plan visuel.

28      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a approuvé la motivation de la division d’opposition et a retenu à juste titre, en substance, qu’une comparaison n’était pas pertinente dans la mesure où les signes en conflit ne contenaient pas d’éléments verbaux [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 7 février 2012, Dosenbach-Ochsner/OHMI – Sisma (Représentation d'éléphants dans un rectangle), T‑424/10, non encore publié au Recueil, point 45, et du 25 mars 2010, Nestlé/OHMI – Master Beverage Industries (Golden Eagle et Golden Eagle Deluxe), T‑5/08 à T‑7/08, Rec. p. II‑1177, point 67]. Les parties ne remettent au demeurant pas en cause la conclusion de la chambre de recours à cet égard.

29      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a approuvé la motivation de la division d’opposition et a considéré que les caractéristiques communes des signes en conflit n’étaient pas suffisantes pour contrebalancer leurs caractéristiques différentes et, partant, pour affaiblir la dissemblance visuelle. La division d’opposition avait considéré, quant à elle, que les signes en conflit étaient « similaires » sur le plan conceptuel, dans la mesure où ils incluaient la représentation d’une personne tenant un maillet de polo, mais présentaient des différences dans la mesure où les marques antérieures renvoyaient au jeu de « polo traditionnel », alors que la marque demandée renvoyait au jeu de « polo à bicyclette ».

30      À cet égard, il y a tout d’abord lieu de souligner que les signes en conflit présentent nécessairement une similitude conceptuelle dans la mesure où ils contiennent, dans les deux cas, la représentation d’un joueur de polo. Cette similitude a été retenue par la division d’opposition et par la chambre de recours. Certes, les deux signes présentent également une différence dans la mesure où, dans un cas, le sport ou le jeu de polo est pratiqué sur un cheval alors que, dans l’autre cas, il est pratiqué sur une bicyclette. Toutefois, aucun élément n’a été versé aux débats qui permettrait de considérer que le polo à bicyclette serait un sport ou un jeu suffisamment connu du public pertinent, dont il convient de rappeler que la chambre de recours a considéré à bon droit qu’il était composé du consommateur moyen dans l’Union, voire en Autriche, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, pour que la représentation graphique en cause ait une signification claire et déterminée, de sorte que ledit public serait susceptible de la saisir immédiatement. À cet égard, il y a lieu de relever que, selon les propres termes de l’intervenante, la représentation graphique dans la marque demandée renverrait à un « sport émergent, urbain et dynamique se disputant sur les cours de tennis ou dans les cours d’école ». La représentation graphique de ce sport « émergent », n’est donc pas susceptible d’avoir une signification conceptuelle suffisamment claire et déterminée dans l’esprit du public pertinent. Dès lors, au vu de ces éléments, il y a lieu de considérer que lesdits signes présentent une certaine similitude sur le plan conceptuel qui peut être qualifiée, à tout le moins, de faible. Il convient d’ailleurs de relever, à cet égard, que ni la chambre de recours, ni la division d’opposition, n’ont considéré que les signes en conflit étaient différents sur le plan conceptuel. Au contraire, la chambre de recours a considéré, au point 33 de la décision attaquée, que les similitudes sur le plan conceptuel entre les signes en conflit n’étaient pas suffisantes pour contrebalancer leurs caractéristiques différentes et, partant, pour « affaiblir la dissemblance visuelle » (point 33 de la décision attaquée). Même si la rédaction de la décision attaquée est équivoque à cet égard, la chambre de recours a nécessairement considéré que les signes en conflit étaient similaires sur le plan conceptuel, à tout le moins jusqu’à un certain degré. La division d’opposition avait d’ailleurs conclu dans sa décision, à laquelle renvoie la chambre de recours, à l’existence d’une « certaine similitude conceptuelle » entre les signes en conflit.

31      Enfin, il y a lieu de rappeler que les différences conceptuelles peuvent être de nature à neutraliser dans une large mesure des similitudes visuelles ou phonétiques entre des marques en conflit si au moins une des marques en cause a, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir immédiatement [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, Rec. p. I‑10053, point 98, et arrêt du Tribunal du 11 novembre 2009, Bayer Healthcare/OHMI – Uriach-Aquilea OTC (CITRACAL), T‑277/08, non publié au Recueil, point 53]. Or, pour les raisons qui viennent d’être exposées au point précédent, tel n’est pas le cas en l’espèce dès lors que la représentation graphique en cause dans la marque demandée représente, selon les propres termes de la requérante, un sport « émergent ». Dès lors, outre le fait que les différences conceptuelles éventuelles des signes en conflit ne sont pas suffisamment claires pour contrebalancer les similitudes qui existent entre lesdits signes, elles ne sont pas de nature à neutraliser les similitudes visuelles constatées précédemment (voir points 25 à 27 ci-dessus).

32      Au vu de l’ensemble de ces éléments, compte tenu notamment des similitudes visuelles et conceptuelles qui existent entre les signes en conflit, la chambre de recours a commis une erreur en concluant que lesdits signes étaient globalement différents. Il y a lieu de considérer, au contraire, que les signes en conflit présentent un certain degré de similitude qui peut être qualifié, à tout le moins, de faible.

33      Or, il ressort de la décision attaquée que c’est en raison du caractère globalement différent des signes en conflit que la chambre de recours a estimé qu’il n’existait pas de risque de confusion. Cette conclusion de la chambre de recours se fonde donc sur une appréciation erronée de l’un des facteurs à prendre en considération.

34      Dans ces conditions, il convient d’accueillir le premier moyen du recours et d’annuler, sur cette base et conformément aux conclusions de la requérante, la décision attaquée.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009

35      La requérante indique que la chambre de recours a effectué, en ce qui concerne l’examen de la violation alléguée de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, la même analyse que celle menée dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 s’agissant de la similitude des signes en conflit. Pour les mêmes raisons que celles exposées dans le cadre du premier moyen, la chambre de recours aurait commis une erreur à cet égard. Par ailleurs, la requérante souligne les similitudes qui existent entre les signes en conflit et indique que, par la marque demandée, l’intervenante réalise une parodie des marques antérieures. La chambre de recours aurait dû tenir compte de ces éléments.

36      L’OHMI soutient que, lorsque la condition de similitude n’est pas remplie dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, point b), du règlement n° 207/2009, il convient également de considérer, en se fondant sur la même analyse, que cette condition n’est pas davantage satisfaite au regard du paragraphe 5 du même article. Dès lors, ce serait à bon droit que la chambre de recours aurait écarté l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, en se fondant sur l’absence de similitude globale des signes en conflit, telle qu’elle résulte de l’examen de ceux-ci au regard du paragraphe 1, point b), du même article.

37      L’intervenante indique que le libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 impose que les signes en conflit soient similaires. Dans la mesure où il aurait été établi que les signes en conflit en l’espèce seraient différents, le moyen soulevé par la requérante devrait être rejeté. La renommée éventuelle des marques antérieures ne modifierait pas cette conclusion. Par ailleurs, l’intervenante souligne que l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 ne trouverait pas à s’appliquer dans des cas où les produits concernés seraient identiques ou similaires. Tel serait le cas en l’espèce. Enfin, l’intervenant conteste que les autres conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 soient réunies en l’espèce. Elle conteste également que la marque demandée soit une parodie des marques antérieures.

38      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, « [s]ur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2 [du même article], la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans la Communauté et, dans le cas d’une marque nationale, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice ».

39      En l’espèce, il résulte de la décision attaquée que la chambre de recours a rejeté l’opposition formée au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, au seul motif que les signes en conflit n’étaient pas, à tout le moins, similaires. En particulier, la chambre de recours a retenu au point 44 de la décision attaquée que la « première » des trois conditions cumulatives pour l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’était pas satisfaite, cette première condition ayant été définie par la chambre de recours comme visant à vérifier « si la marque contestée est identique aux marques antérieures revendiquées par l’opposante ou présente une similitude avec celles-ci ». Dès lors que la conclusion de la chambre de recours reposait exclusivement sur l’absence de similitude entre les signes en conflit et qu’il convient d’annuler la décision attaquée sur ce point (premier moyen), il y a lieu de faire droit aux arguments de la requérante soulevés dans le cadre du second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009. La décision attaquée doit donc être également annulée pour ce motif.

 Sur les dépens

40      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens.

41      L’OHMI ayant succombé, dans la mesure où la décision attaquée est annulée, et la requérante ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par la requérante.

42      L’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 1er mars 2013 (affaire R 15/2012-2) est annulée.

2)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par The Polo/Lauren Company, LP.

3)      FreshSide Ltd supportera ses propres dépens.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 septembre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.