Language of document : ECLI:EU:F:2008:47

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

24 avril 2008 (*)

« Fonction publique – Agents contractuels – Recrutement – Classement en groupe de fonctions – Demande de révision du classement et de la rémunération fixés lors du recrutement – Ancien agent auxiliaire engagé comme agent contractuel – Article 3 bis et article 80, paragraphes 2 et 3, du RAA – Tâches relevant de différents groupes de fonctions – Égalité de traitement – Recours non fondé »

Dans l’affaire F‑61/05,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Raffaele Dalmasso, agent contractuel de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Schaerbeek (Belgique), représenté par Me L. Vogel, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et G. Berscheid, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mmes M. Arpio Santacruz et I. Sulce, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen, juges,

greffier : Mme S. Cidéron, assistante,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 31 janvier 2008,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes le 8 juillet 2005, M. Dalmasso demande, d’une part, l’annulation de la décision du 21 mars 2005 par laquelle l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC ») a rejeté sa demande du 7 décembre 2004, requalifiée en réclamation, formée contre la décision fixant son classement et sa rémunération lors de son engagement en qualité d’agent contractuel et, pour autant qu’il soit nécessaire, de la décision originaire fixant ces mêmes classement et rémunération selon le contrat signé le 16 septembre 2004, ainsi que, d’autre part, l’octroi de dommages et intérêts qu’il évalue à 25 000 euros.

 Cadre juridique

2        Conformément à l’article 53, premier alinéa, du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le « RAA »), les agents auxiliaires sont répartis en quatre catégories, subdivisées en groupes correspondant aux fonctions qu’ils sont appelés à exercer. Selon le troisième alinéa dudit article, les fonctions types correspondant au groupe VIII de la catégorie D sont celles d’ouvrier qualifié, d’huissier ou de chauffeur, tandis que celles correspondant au groupe VII de la catégorie C sont celles de secrétaire, de dactylographe ou de standardiste, ou encore d’agent chargé de l’exécution de travaux de bureau simples.

3        Les agents contractuels constituent une nouvelle catégorie d’agents introduite dans le RAA, plus précisément à son article 1er, deuxième alinéa, troisième tiret, par le règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le RAA (JO L 124, p. 1), entré en vigueur le 1er mai 2004.

4        Selon le considérant 36 du règlement n° 723/2004, « [l]es agents contractuels, dont la responsabilité est plus limitée, seront généralement affectés à des tâches accomplies sous le contrôle de fonctionnaires ou d’agents temporaires[ ; i]ls seront employés en particulier en vue de remplacer à terme les agents auxiliaires et les fonctionnaires de catégorie D dans les institutions, les bureaux de représentation et les délégations de la Commission [des Communautés européennes], les agences ainsi que les agences d’exécution et autres entités instituées par un acte juridique spécifique ».

5        L’article 3 bis, paragraphe 1, du RAA dispose :

« Est considéré comme ‘agent contractuel’, aux fins du présent régime, l’agent non affecté à un emploi prévu dans le tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à l’institution concernée et engagé en vue d’exercer des fonctions, soit à temps partiel, soit à temps complet :

a)      dans une institution en vue d’exécuter des tâches manuelles ou d’appui administratif,

b)      dans les agences visées à l’article 1er  bis, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires des Communautés européennes],

c)      dans d’autres organismes situés dans l’Union européenne et institués, après consultation du comité du statut, par un acte juridique spécifique émanant d’une ou plusieurs institutions et autorisant le recours à ce type de personnel,

[…] »

6        La catégorie des agents contractuels fait l’objet du titre IV (« Agents contractuels ») du RAA, qui fixe, entre autres, leurs conditions d’engagement, y compris les règles de classement.

7        En vertu de l’article 80, paragraphe 1, du RAA, « [l]es agents contractuels sont répartis en quatre groupes de fonctions correspondant aux tâches qu’ils sont appelés à exercer[ ; c]haque groupe de fonctions est subdivisé en grades et en échelons ».

8        Le tableau figurant à l’article 80, paragraphe 2, du RAA définit les tâches relevant des différents groupes de fonctions. Ainsi, le groupe de fonctions I, qui comprend les grades 1 à 3, recouvre les tâches suivantes : « Tâches manuelles et d’appui administratif effectuées sous le contrôle de fonctionnaires ou d’agents temporaires ». Le groupe de fonctions II, comprenant les grades 4 à 7, correspond aux tâches définies comme suit : « Tâches de bureau et de secrétariat, direction de bureau et autres tâches équivalentes, exécutées sous la supervision de fonctionnaires ou d’agents temporaires ».

9        L’article 80, paragraphe 3, du RAA précise :

« Sur la base de ce tableau, chaque institution ou organisme visé à l’article 3 bis arrête, après avis du comité du statut, la description des fonctions et attributions que recouvre chaque type de tâche. »

10      Aux termes de l’article 82, paragraphe 2, du RAA :

« Le recrutement en tant qu’agent contractuel requiert au minimum :

a)      dans le groupe de fonctions I, l’achèvement de la scolarité obligatoire ;

b)      dans les groupes de fonctions II et III :

i)      un niveau d’enseignement supérieur sanctionné par un diplôme, ou

ii)      un niveau d’enseignement secondaire sanctionné par un diplôme donnant accès à l’enseignement supérieur et une expérience professionnelle appropriée de trois années au moins, ou

iii)      lorsque l’intérêt du service le justifie, une formation professionnelle ou une expérience professionnelle de niveau équivalent ;

[…] »

11      Aux termes de l’article 86, paragraphe 1, du RAA :

« L’agent contractuel visé à l’article 3 bis ne peut être recruté :

[…]

iii)      qu’aux grades 4 ou 5 pour le groupe de fonctions II ;

iv)      qu’au grade 1 pour le groupe de fonctions I.

Son classement dans chaque groupe de fonctions s’effectue en tenant compte de ses qualifications et de son expérience professionnelle. Afin de répondre aux besoins spécifiques des institutions, les conditions du marché du travail communautaire peuvent également être prises en considération. L’agent contractuel recruté est classé au premier échelon de son grade. »

12      La Commission a adopté le 7 avril 2004 les dispositions générales d’exécution relatives aux procédures régissant l’engagement et l’emploi des agents contractuels à la Commission publiées aux Informations administratives n° 49‑2004, du 1er juin 2004 (ci-après les « DGE »).

13      L’article 2, paragraphe 1, sous a) et b), des DGE définit les qualifications minimales pour accéder aux groupes de fonctions I, II et III comme suit :

« a)      dans le groupe de fonctions I : achèvement de la scolarité obligatoire ;

b)      dans les groupes de fonctions II et III :

–      un diplôme d’études supérieures ou

–      un diplôme de l’enseignement secondaire donnant accès à l’enseignement supérieur et une expérience professionnelle appropriée de trois années. En ce qui concerne les fonctions du groupe de fonctions II, le diplôme de l’enseignement secondaire donnant accès à l’enseignement supérieur peut être remplacé par un certificat de formation professionnelle adéquate d’une durée minimale de 3 ans s’il n’existait pas de formations professionnelles analogues donnant accès à l’enseignement supérieur à l’époque où il a été délivré. »

14      L’article 7, paragraphe 1, sous a) et b), des DGE prévoit le classement, dans le groupe de fonctions I, au grade 1 et, dans le groupe de fonctions II, au grade 4 « si l’intéressé justifie d’une expérience professionnelle d’une durée inférieure ou égale à dix ans », ou au grade 5 « si l’intéressé justifie d’une expérience professionnelle d’une durée supérieure à dix ans ».

 Faits à l’origine du litige

15      Le requérant a été engagé en qualité d’agent contractuel relevant du groupe de fonctions I auprès de la Commission, pour assurer des tâches de suivi technique, administratif ou financier des contrats de sous-traitants au sein de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO), en vertu d’un contrat signé le 16 septembre 2004. Il a alors été classé au grade 1, échelon 1.

16      Auparavant, le requérant avait exercé en qualité d’agent auxiliaire relevant de la catégorie D, groupe VIII, classe 1, des fonctions d’huissier en vertu d’un contrat initialement conclu pour une période de trois mois, ayant couru du 1er janvier au 31 mars 2003 et ayant été prorogé jusqu’au 30 septembre suivant. Le 18 septembre 2003, il avait de nouveau été engagé en qualité d’agent auxiliaire, cette fois de la catégorie C, groupe VII, classe 2, avec effet au 1er octobre suivant, pour une durée de trois mois, pour exercer les fonctions d’agent chargé de l’exécution de travaux de bureau simples. Ce dernier contrat avait été prorogé, à plusieurs reprises, jusqu’au 15 septembre 2004.

17      Alors que, en sa qualité d’agent auxiliaire, le requérant percevait, en dernier lieu, une rémunération de 2 534,13 euros par mois, il perçoit, en qualité d’agent contractuel, une rémunération mensuelle de 1 618,83 euros.

18      Le 7 décembre 2004, le requérant a introduit une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), sollicitant la révision de son classement ainsi qu’une majoration de sa rémunération.

19      L’AHCC a requalifié cette demande en réclamation, fondée sur l’article 90, paragraphe 2, du statut, ce que le requérant a accepté.

20      Par décision de l’AHCC, du 21 mars 2005, notifiée le 22 mars 2005 et réceptionnée le 29 mars suivant, la réclamation a été rejetée.

 Procédure et conclusions des parties

21      Le présent recours a initialement été enregistré au greffe du Tribunal de première instance sous le numéro T‑269/05.

22      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du 21 mars 2005, rejetant sa réclamation formée contre la décision fixant son classement et sa rémunération lors de son engagement en qualité d’agent contractuel ;

–        pour autant qu’il soit nécessaire, annuler également la décision originaire par laquelle ont été fixés son classement et sa rémunération en tant qu’agent contractuel, selon le contrat « signé[…] le 16 septembre 2004 » ;

–        condamner la Commission à lui verser une indemnité de 25 000 euros, sous réserve expresse d’augmentation, de diminution ou de précisions ultérieures ;

–        condamner la Commission aux dépens.

23      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande en annulation comme partiellement irrecevable et partiellement non fondée, sinon comme non fondée dans sa totalité ;

–        rejeter la demande en indemnité comme irrecevable, sinon comme non fondée ;

–        condamner le requérant aux dépens.

24      Par ordonnance du 15 novembre 2005 du président de la deuxième chambre du Tribunal de première instance, le Conseil de l’Union européenne a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

25      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le moyen relatif à l’illégalité du règlement n° 723/2004 comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

26      Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé la présente affaire devant ce Tribunal. Le recours a été enregistré au greffe de ce dernier sous le numéro F‑61/05.

27      Par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 23 mars 2006, la procédure dans la présente affaire a été suspendue jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal mettant fin à l’instance dans l’affaire F‑59/05, De Smedt/Commission. La décision dans cette même affaire a été rendue par arrêt du 19 octobre 2006 (non encore publié au Recueil). À la suite du pourvoi, introduit par la partie requérante le 29 décembre 2006 contre ledit arrêt et portant le numéro T‑415/06 P, De Smedt/Commission, la procédure dans la présente affaire a été à nouveau suspendue, par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 15 mars 2007, jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal de première instance mettant fin à l’instance dans l’affaire De Smedt/Commission, T‑415/06 P.

28      Le 9 juillet 2007, le Tribunal de première instance a rejeté par voie d’ordonnance le pourvoi dans l’affaire De Smedt/Commission, T‑415/06 P (non encore publiée au Recueil).

29      Par lettres du greffe du 13 juillet 2007, le Tribunal a invité les parties à déposer des observations sur les conséquences éventuelles de l’ordonnance De Smedt/Commission, précitée, sur la présente affaire. Dans ses observations, la Commission conclut au rejet du présent recours comme non fondé, voire manifestement non fondé. Le Conseil conclut au rejet de l’exception d’illégalité soulevée dans la présente instance comme manifestement irrecevable et, en tout état de cause, comme non fondée. Le requérant n’a pas déposé d’observations.

 En droit

 Sur l’objet du recours

30      Il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, une demande tendant à l’annulation d’une décision de rejet d’une réclamation a pour effet de saisir le juge communautaire de l’acte faisant grief contre lequel ladite réclamation a été présentée (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, point 8 ; arrêts du Tribunal de première instance du 23 mars 2004, Theodorakis/Conseil, T‑310/02, RecFP p. I‑A‑95 et II‑427, point 19, et du 9 juin 2005, Castets/Commission, T‑80/04, RecFP p. I‑A‑161 et II‑729, point 15). En l’espèce, le recours doit donc être considéré comme dirigé contre le seul acte faisant grief, à savoir la décision fixant le classement et la rémunération en tant qu’agent contractuel du requérant, selon le contrat signé le 16 septembre 2004 (ci-après la « décision attaquée »).

 Sur le recours en annulation

31      À l’appui de son recours, le requérant invoque deux moyens tirés respectivement :

–        de la violation de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), et de l’article 80, paragraphes 2 et 3, du RAA, ainsi que de l’erreur manifeste d’appréciation, en ce que, lors de son engagement en qualité d’agent contractuel, il a été classé dans le groupe de fonctions I, au grade 1, échelon 1, alors que ce classement et la rémunération en résultant ne correspondraient ni au descriptif théorique des fonctions qui lui ont été confiées ni aux tâches effectives qu’il assume quotidiennement, et

–        de la violation du principe de non-discrimination, en ce que, par l’effet du classement qui lui a été conféré en sa qualité d’agent contractuel, il est contraint d’assumer les mêmes fonctions que celles qui lui étaient confiées auparavant, ce pour une rémunération nettement inférieure et dans un contexte de précarité juridique et sociale absolue, alors que des fonctions identiques seraient exercées, au sein de la Commission, par des fonctionnaires qui, bénéficiant des dispositions du statut, jouissent d’une sécurité d’emploi considérable et d’une rémunération très largement supérieure à la sienne.

 Sur le premier moyen

–       Arguments des parties

32      Le requérant soutient que son classement et sa rémunération, en qualité d’agent contractuel, ne correspondent ni au descriptif de l’emploi qu’il occupe ni à la réalité des tâches qu’il assume.

33      Il affirme exercer des fonctions administratives exigeant de sa part un esprit d’initiative, un sens des responsabilités, une capacité de jugement et de l’autonomie, de telle sorte que cette activité ne saurait correspondre aux « tâches manuelles ou d’appui administratif », au sens de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), du RAA ni aux tâches, relevant du groupe de fonctions I, « effectuées sous le contrôle de fonctionnaires ou d’agents temporaires », au sens de l’article 80, paragraphe 2, du RAA.

34      Des fonctions équivalentes à celles confiées au requérant seraient exercées, au sein de la Commission, par des fonctionnaires de catégorie C. De plus, la Commission n’aurait pas établi que l’attribution à un agent contractuel de tâches qui, auparavant, auraient été exercées par un fonctionnaire de cette dernière catégorie répondait à l’exigence générale de bonne gestion administrative.

35      La décision attaquée serait donc entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

36      Le requérant ajoute que la Commission n’a pas arrêté, après avis du comité du statut, ainsi que le prévoit l’article 80, paragraphe 3, du RAA, la description des fonctions et attributions que recouvre chaque type de tâche caractérisant chacun des groupes de fonctions auquel peuvent appartenir les agents contractuels. La sélection des fonctions aurait été confiée, de manière occulte et sans consultation dudit comité, à une « Task Force » (groupe de travail). Or, le non-respect dudit article 80, paragraphe 3, aurait vicié la décision d’affecter le requérant à une fonction qui n’avait pas été définie comme pouvant être remplie par un agent contractuel.

37      La Commission observe que l’article 2 du contrat d’engagement du requérant attribue à ce dernier des « tâches manuelles ou d’appui administratif », lesquelles correspondraient précisément aux tâches relevant du groupe de fonctions I, décrites dans le tableau figurant à l’article 80, paragraphe 2, du RAA.

38      Or, les tâches exercées par le requérant correspondraient pleinement à celles figurant dans ce tableau. En effet, selon la description de son poste, à compter du 16 septembre 2004, le requérant aurait assumé des « tâches de suivi technique, administratif et/ou financier des contrats de sous-traitance » et aurait dû ainsi « assister à la mise en œuvre, à la gestion et/ou [au] suivi des contrats », « rédiger, passer et/ou éditer des bons de commande », « contrôler et vérifier les prestations » et « biens livrés », suivre, vérifier et contrôler les documents, « gérer les données » et « établir des statistiques ». De telles fonctions, consistant en des travaux de bureau simples, n’excluraient pas la nécessité pour l’intéressé d’avoir de la clairvoyance, de la capacité de jugement et de décision ou le sens des responsabilités. Un certain degré d’autonomie serait même requis, ce qui expliquerait que lesdites fonctions sont exercées « sous le contrôle de fonctionnaires ou d’agents temporaires », c’est-à-dire sans que l’intéressé doive attendre des instructions détaillées pour l’exercice de son activité professionnelle.

39      La Commission ajoute que les tâches accomplies par le requérant sont bien des fonctions de soutien logistique et donc d’appui administratif, et ne relèvent pas d’« une des fonctions attribuées par les traités aux institutions ».

40      En tout état de cause, l’argument invoqué par le requérant, tiré de ce que les fonctions en cause auraient été auparavant exercées par des fonctionnaires de catégorie C, ne serait pas pertinent. En effet, à supposer même que lesdites fonctions, que le requérant affirme d’ailleurs avoir déjà exercées dans le passé en qualité d’agent auxiliaire, n’auraient pas pu valablement lui être confiées en sa qualité d’agent contractuel, mais auraient dû être réservées à un fonctionnaire de catégorie C, la seule conclusion à tirer de cet état de fait serait que l’intéressé ne serait pas en droit de les exercer.

41      La Commission rappelle, par ailleurs, l’arrêt du 6 octobre 1983, Celant e.a./Commission (118/82 à 123/82, Rec. p. 2995, point 22), dans lequel la Cour aurait admis l’existence de différences de traitement, du point de vue des garanties statutaires et des avantages de sécurité sociale, entre diverses catégories de personnes employées par les Communautés européennes, dès lors que la définition de chacune de ces catégories correspondrait à des besoins légitimes de l’administration communautaire et à la nature des tâches, permanentes ou temporaires, qu’elle a pour mission d’accomplir.

42      La circonstance que la Commission n’aurait pas encore arrêté, après avis du comité du statut, la description des fonctions et attributions visée à l’article 80, paragraphe 3, du RAA ne saurait avoir pour effet de vicier la procédure de recrutement d’un agent contractuel, la disposition en question créant uniquement une compétence pour les institutions sans subordonner l’entrée en vigueur du RAA en général à l’adoption de dispositions relatives aux agents contractuels en particulier.

43      La Commission souligne à cet égard que le contrat d’engagement litigieux a été conclu peu de temps après l’entrée en vigueur du règlement n° 723/2004, à une époque où les institutions ne pouvaient pas avoir pris ou modifié toutes les mesures d’exécution du statut et du RAA.

44      En effet, la nécessité de mettre en place un système cohérent pour les différents offices de la Commission aurait conduit à la création d’une « Task Force » (groupe de travail) chargée d’identifier toutes les fonctions qui seraient confiées, dans le futur et par niveau de responsabilité, aux agents contractuels de ces offices, d’analyser l’ensemble des descriptions de postes et de décider à quel groupe de fonctions seraient affectés les futurs agents contractuels.

45      En toute hypothèse, le requérant n’aurait ni allégué ni à plus forte raison établi que la situation qui lui ferait grief aujourd’hui n’aurait pas existé si la description visée à l’article 80, paragraphe 3, du RAA avait été arrêtée par la Commission.

46      Enfin, la Commission observe que les institutions disposent, en matière de classement des agents, d’un large pouvoir d’appréciation. Or, le requérant n’aurait pas démontré, à cet égard, l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation imputable à la Commission.

47      Dans son mémoire en duplique, la Commission se prévaut de l’arrêt De Smedt/Commission, précité.

–       Appréciation du Tribunal

48      À l’appui de son premier moyen, le requérant fait valoir, en substance, deux arguments. D’une part, il estime que les fonctions exercées en vertu du contrat d’agent contractuel qui le lie à la Commission ne sauraient être qualifiées, eu égard à la part d’initiative et d’autonomie qui lui est laissée, de « tâches manuelles ou d’appui administratif » au sens de l’article 3 bis, paragraphe 1, sous a), du RAA, ni de tâches correspondant au groupe de fonctions I, « effectuées sous le contrôle de fonctionnaires ou d’agents temporaires », au sens de l’article 80, paragraphe 2, du RAA. D’autre part, il fait grief à la Commission de ne pas avoir arrêté, après avis du comité du statut, ainsi que le prévoit l’article 80, paragraphe 3, du RAA, la description des fonctions et attributions que recouvre chaque type de tâche caractérisant chacun des groupes de fonctions auquel peuvent appartenir les agents contractuels.

49      En premier lieu, il convient de constater que le requérant a exercé au sein du PMO, depuis le 1er janvier 2003 et jusqu’à son engagement en qualité d’agent contractuel, des fonctions d’agent auxiliaire en relevant, dans un premier temps, de la catégorie D, groupe VIII, puis, à compter du 1er octobre 2003, de la catégorie C, groupe VII. Le requérant soutient que les fonctions exercées en dernier lieu en cette qualité étaient exactement les mêmes que celles qu’il exerce depuis en tant qu’agent contractuel.

50      À cet égard, il convient de constater que la description du poste d’agent contractuel occupé par le requérant ne correspond pas pleinement à celle du poste qu’il occupait auparavant en qualité d’agent auxiliaire.

51      En effet, alors qu’il était chargé, jusqu’au 15 septembre 2004, en cette dernière qualité, de la « supervision de la logistique du PMO aux différents lieux d’affectation », ce qui, selon la description du poste, recouvrait

–        la responsabilité « du parc immobilier », de la « gestion des biens inventoriés », de la gestion des fournitures, de la gestion de l’« enveloppe budgétaire pour les fournitures de bureau et pour les travaux et équipements mobiliers » ;

–        les commandes de mobilier ;

–        la responsabilité technique des bâtiments ;

–        l’« initiation » des modifications des installations de télécommunications ;

–        l’élaboration des propositions d’implantation ;

–        la coordination des petits déménagements ;

–        la planification des salles de réunion ;

–        l’« initiation » de commandes de « catering » (service traiteur) ;

–        l’animation des activités de « teambuilding » (cohésion de l’équipe),

à compter du 16 septembre 2004, il s’est vu attribuer, en qualité d’agent contractuel, des tâches de suivi technique, administratif ou financier des contrats de sous-traitance, ce qui, selon la description du poste, à cette date, recouvre les fonctions suivantes :

« –      assister à la mise en œuvre, à la gestion et/ou au suivi des contrats […] ;

–        rédiger, passer et/ou éditer les bons de commande[ ; r]ecevoir les travaux et/ou les bien commandés ;

–        contrôler et vérifier les prestations ainsi que la qualité technique des travaux réalisés et/ou biens livrés par les contractants[ ; s]uivre, contrôler et vérifier les différents documents émis par les contractants avant, pendant ou après réalisation des travaux et/ou livraison des biens ; contrôler et certifier la conformité des factures ;

–        gérer les données afférentes aux prestations effectuées et établir des statistiques. »

52      Ainsi qu’il ressort du dossier et selon les explications fournies au cours de l’audience, ces dernières fonctions comprennent concrètement le déplacement, à la demande des unités, de cloisons et de portes, l’organisation de déménagements, la commande de nouveau mobilier ou de réparation, la gestion logistique des archives, l’établissement de contacts avec les chefs d’immeubles pour les questions relatives au gardiennage, aux parkings, à la maintenance et au nettoyage, l’approvisionnement régulier et suffisant des services en fournitures de bureau, le suivi de la consommation des crédits, l’organisation de réunions et la réservation de salles, le suivi des demandes de fournitures de boissons et de collations.

53      De telles fonctions recouvrent des tâches manuelles et des travaux de bureau à propos desquels le requérant n’a nullement établi qu’ils dépasseraient, en intensité, un niveau d’activité d’appui administratif. Il importe de souligner, à cet égard, que l’article 80 du RAA, en définissant les différentes tâches afférentes aux quatre groupes de fonctions, a réservé aux institutions une large marge d’appréciation en les chargeant précisément d’arrêter la description des fonctions et attributions que recouvre chaque type de tâches.

54      De plus, la part d’initiative et d’autonomie qui serait laissée au requérant pour le bon accomplissement des tâches susmentionnées n’est pas de nature à remettre en cause leur qualification de « tâches manuelles ou d’appui administratif », au sens de l’article 80, paragraphe 2, du RAA, s’agissant du groupe de fonctions I, et n’empêche précisément pas qu’un contrôle soit exercé par des fonctionnaires ou des agents temporaires.

55      Dans ces conditions, l’argument du requérant, selon lequel les tâches qu’il accomplit seraient incompatibles avec la définition même des fonctions qui peuvent être attribuées à un agent contractuel, au sens de l’article 3 bis du RAA, à supposer même qu’il ait intérêt à soulever un tel argument de nature à mettre à néant, dans l’hypothèse où il serait accueilli, l’existence même du contrat d’agent contractuel qui le lie à la Commission, doit être rejeté comme non fondé.

56      En tout état de cause, et indépendamment des conditions de formation et d’expérience professionnelle requises à cet égard, le requérant n’a pas établi que les activités qu’il exerce relèvent des tâches correspondant à un groupe de fonctions supérieur au groupe de fonctions I et que la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en ne le classant pas dans un tel groupe de fonctions.

57      Par ailleurs, à supposer même, ainsi que le prétend le requérant, que ce dernier ait exercé les mêmes fonctions que celles qu’il exerçait auparavant en qualité d’agent auxiliaire relevant du groupe de fonctions VII, catégorie C, il ressort de l’article 53, troisième alinéa, du RAA, que, audit groupe, correspondent les fonctions types de « [s]ecrétaire, dactylographe ou standardiste » ou d’« [a]gent chargé de l’exécution de travaux de bureau simples ». Or, de telles fonctions correspondent à celles décrites à l’article 80, paragraphe 2, du RAA relativement au groupe de fonctions I, soit précisément le groupe dans lequel le requérant a été classé.

58      Il convient encore d’ajouter que l’argumentation du requérant repose essentiellement sur l’écart de rémunération, tel qu’il ressort du barème des traitements, entre ce qu’il percevait au titre de son précédent contrat d’agent auxiliaire et ce qu’il perçoit à ce jour au titre de son contrat d’agent contractuel. Or, aucune exception d’illégalité n’a été soulevée à l’encontre de l’article 93 du RAA, fixant le barème des traitements de base des agents contractuels.

59      En second lieu, quant à la circonstance que la Commission n’avait pas encore arrêté, au moment de la signature du contrat d’engagement du requérant en tant qu’agent contractuel, la description des fonctions et attributions visée à l’article 80, paragraphe 3, du RAA, il convient de constater qu’aucune disposition du RAA ou du règlement n° 723/2004 ne fait dépendre l’applicabilité du titre IV du RAA relatif aux agents contractuels et, notamment, de ses dispositions relatives à leur engagement, de l’adoption d’une telle description (voir ordonnance De Smedt/Commission, précitée, point 40 ; arrêt De Smedt/Commission, précité, point 52). Au contraire, l’article 52 du RAA – lequel prévoit que la durée effective de l’engagement des agents auxiliaires, destinés à être remplacés à terme par les agents contractuels, ainsi qu’il ressort du considérant 36 du règlement n° 723/2004, ne saurait se prolonger au-delà du 31 décembre 2007 et qu’aucun nouvel agent auxiliaire ne peut être engagé après le 31 décembre 2006 – est de nature à confirmer l’applicabilité immédiate dudit titre IV dans la mesure où il n’est pas fait mention dans cet article de la mise en œuvre préalable de l’article 80, paragraphe 3, du RAA (arrêt De Smedt/Commission, précité, point 52).

60      De plus, à supposer qu’il faille comprendre le grief relatif à la mise en œuvre de l’article 80, paragraphe 3, du RAA en ce sens que la régularité de la procédure d’engagement du requérant serait subordonnée à l’adoption préalable de la description des fonctions et attributions visée à l’article 80, paragraphe 3, du RAA, un tel grief serait irrecevable à défaut d’intérêt du requérant, puisque, s’il était accueilli, il pourrait conduire à l’annulation de la décision de l’AHCC de conclure le contrat d’agent contractuel avec l’intéressé, au motif que ledit contrat aurait été pris en méconnaissance de ce paragraphe de l’article 80 du RAA (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 octobre 1975, Deboeck/Commission, 90/74, Rec. p. 1123, point 12 ; arrêt De Smedt/Commission, précité, point 53).

61      Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé.

 Sur le second moyen

–       Arguments des parties

62      Le requérant estime qu’il a accompli un travail identique à celui de fonctionnaires jouissant de toutes les garanties statutaires ainsi que d’une rémunération très largement supérieure à la sienne. Une telle différence de traitement entre des agents ou fonctionnaires exerçant des fonctions semblables, sous des statuts différents, ne serait pas justifiée.

63      Il observe que l’appréciation d’une discrimination doit s’opérer en fonction de la situation concrète dans laquelle se trouvent les diverses personnes concernées et non sur la seule base de catégories administratives abstraites.

64      Par ailleurs, l’administration ne saurait justifier le traitement défavorable réservé au requérant en invoquant le règlement n° 723/2004, lequel, par lui-même, ne prévoirait pas de traitement différencié. En réalité, c’est la mauvaise application du RAA et, en particulier, de son article 80, paragraphe 3, pour déterminer les fonctions susceptibles d’être attribuées aux agents contractuels, qui aurait engendré la discrimination dont serait victime le requérant.

65      À supposer même que cette discrimination soit imposée par le règlement n° 723/2004, ainsi que le soutiendrait la Commission, selon le requérant, il y aurait alors lieu de constater l’illégalité dudit règlement et d’en refuser l’application, conformément à l’article 241 CE.

66      Contrairement à ce qu’affirme la Commission, de telles considérations ressortiraient de façon cohérente et compréhensible de la requête. Quant à la prétendue absence de concordance entre la réclamation et le recours, le requérant observe que l’exception d’illégalité a été invoquée, en l’espèce, pour réfuter un argument avancé par la Commission en réponse à sa réclamation, selon lequel cette dernière aurait agi légalement, en application du règlement n° 723/2004.

67      Enfin, le requérant reproche à la Commission d’avoir induit les agents contractuels en erreur en ayant diffusé sur son site intranet, à l’époque de l’entrée en vigueur du règlement n° 723/2004, l’information selon laquelle les intéressés pouvaient s’attendre à une réduction de 11 % de leur traitement par rapport à ce qu’ils percevaient antérieurement en qualité d’agents auxiliaires pour l’exercice des mêmes fonctions. Or, en réalité, les traitements des agents contractuels auraient subi une réduction moyenne de l’ordre de 25 % par rapport à ceux perçus en tant qu’agents auxiliaires pour l’exercice de fonctions identiques, le requérant voyant, pour sa part, sa rémunération diminuée de 37 %.

68      Selon la Commission, l’exception d’illégalité du règlement n° 723/2004 est irrecevable en raison du défaut de concordance sur ce point entre la réclamation et la requête (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 3 octobre 2000, Cubero Vermurie/Commission, T‑187/98, RecFP p. I‑A‑195 et II‑885, points 35 à 37). Cette exception n’aurait pas non plus été développée, fût-ce sommairement, dans la requête, ce qui soulèverait également des doutes quant à sa recevabilité au regard de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable mutatis mutandis au Tribunal en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752, jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce Tribunal.

69      Sur le fond, la Commission rappelle que, selon une jurisprudence constante, il n’y a violation du principe d’égalité de traitement que lorsque deux catégories de personnes, dont les situations juridiques et factuelles ne présentent pas de différence essentielle, se voient appliquer un traitement différent (arrêt du Tribunal de première instance du 21 juillet 1998, Mellett/Cour de justice, T‑66/96 et T‑221/97, RecFP p. I‑A‑449 et II‑1305, point 129). Or, en l’espèce, la Commission n’aurait fait qu’appliquer le RAA, tel que modifié par le règlement n° 723/2004, de sorte que la situation du requérant serait objectivement différente de celle qui prévalait lorsqu’il avait la qualité d’agent auxiliaire et serait donc susceptible de recevoir un traitement différent. La Commission souligne également, à cet égard, le large pouvoir d’appréciation dont dispose le législateur communautaire en matière de modification du statut et du RAA. Une révision des textes statutaires, favorable ou non aux fonctionnaires et agents, a nécessairement pour objet de changer leur situation juridique dans un sens ou un autre par rapport à celle qui était applicable antérieurement (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 30 septembre 1998, Ryan/Cour des comptes, T‑121/97, Rec. p. II‑3885, point 98).

70      La Commission ajoute que l’on ne saurait comparer la situation du requérant avec celle d’agents relevant d’autres catégories, comme des agents auxiliaires ou les fonctionnaires de l’ancienne catégorie C, pour mettre en échec l’application à son égard des nouvelles règles que le législateur communautaire a considérées comme conformes à l’intérêt du service.

71      De plus, il n’existerait pas d’obligation générale de prévoir des dispositions transitoires, lesquelles seraient d’ailleurs, par nature, exceptionnelles. La Commission relève que, en l’espèce, le législateur communautaire a adopté des dispositions transitoires, qui ne concernent cependant pas la mise en œuvre du titre IV du RAA.

72      Enfin, s’agissant des informations diffusées sur le site intranet de la Commission, cette dernière souligne qu’il y était précisé que l’écart de rémunération entre agents contractuels et personnel auxiliaire dépendait du point de savoir si l’agent intéressé percevait ou non l’indemnité de dépaysement, l’allocation de foyer ou l’allocation pour enfant à charge, de telle sorte que le taux de réduction de 11 % annoncé ne pouvait que représenter une moyenne. Il conviendrait aussi de tenir compte de la compensation de cette réduction par les nouveaux avantages reconnus aux agents contractuels, notamment quant à la durée de leurs contrats. En tout état de cause, le requérant aurait été informé par le PMO, préalablement à la signature de son contrat d’agent contractuel, de la durée de celui-ci, de son classement et du salaire brut de base qu’il allait percevoir. Ce serait donc en pleine connaissance de cause qu’il aurait accepté de signer ce contrat avec la Commission.

73      Le Conseil s’associe à la Commission quant à l’irrecevabilité de l’exception d’illégalité du règlement n° 723/2004. Le requérant ne préciserait d’ailleurs pas quelles dispositions du règlement seraient entachées d’illégalité.

74      Sur le fond, le Conseil partage également l’argumentation de la Commission. Il estime, en particulier, que le requérant compare des situations largement différentes, à savoir, d’une part, sa situation antérieure en tant qu’agent auxiliaire et sa situation actuelle en tant qu’agent contractuel, ainsi que, d’autre part, les conditions de carrière des fonctionnaires et celles des agents contractuels. Dans les deux cas, les situations comparées se distingueraient largement tant du point de vue des règles applicables que des conditions factuelles dans lesquelles se trouvent les personnes concernées.

75      Le Conseil souligne également que le régime des agents contractuels, lequel est nouveau, diffère de celui des agents auxiliaires, notamment quant à la couverture des risques sociaux ou à la durée des contrats, laquelle peut dorénavant être indéterminée. Aucune disposition du RAA n’obligerait d’ailleurs l’administration à proposer aux anciens agents auxiliaires des contrats d’agents contractuels, étant donné qu’il n’existerait pas de continuité entre les deux catégories. Dans ces conditions, la situation contractuelle du requérant ne pourrait être comparée à sa situation précédente. Cette même situation ne saurait davantage être comparée à celle des fonctionnaires, qui sont soumis à un régime complètement différent, notamment pour ce qui est des conditions de recrutement.

–       Appréciation du Tribunal

76      Il est de jurisprudence constante que le principe d’égalité de traitement est un principe fondamental du droit communautaire. Il y a violation de ce principe lorsque deux catégories de personnes, dont les situations factuelle et juridique ne présentent pas de différences essentielles, se voient appliquer un traitement différent ou lorsque des situations différentes sont traitées de manière identique (arrêt de la Cour du 11 janvier 2001, Gevaert/Commission, C‑389/98 P, Rec. p. I‑65, point 54 ; arrêts du Tribunal de première instance du 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T‑100/92, RecFP p. I‑A‑83 et II‑275, point 50 ; du 16 avril 1997, Kuchlenz-Winter/Commission, T‑66/95, Rec. p. II‑637, point 55 ; Mellett/Cour de justice, précité, point 129 ; du 25 octobre 2005, Herrero Romeu/Commission, T‑298/02, Rec. p. II‑4599, point 76, et ordonnance du Tribunal de première instance De Smedt/Commission, précitée, point 52 ; arrêt De Smedt/Commission, précité, point 69).

77      En l’espèce, il convient de constater que le requérant invoque la différence de traitement, notamment en ce qui concerne la rémunération perçue, d’une part, par rapport à la situation qui était la sienne lorsqu’il exerçait, en qualité d’agent auxiliaire, prétendument les mêmes fonctions que celles exercées aujourd’hui en qualité d’agent contractuel et, d’autre part, par rapport à la situation actuelle des fonctionnaires ou d’autres agents accomplissant des tâches analogues aux siennes.

78      S’agissant, en premier lieu, des différences de régime pécuniaire entre la catégorie des agents auxiliaires et celle des agents contractuels, il convient de rappeler que le législateur communautaire est libre d’apporter à tout moment aux règles du statut les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service et d’adopter, pour l’avenir, des dispositions statutaires plus défavorables, pour les fonctionnaires ou agents concernés, à condition toutefois que soient sauvegardés les droits régulièrement acquis par les fonctionnaires ou agents et que les personnes spécifiquement concernées par la réglementation nouvelle soient traitées de manière identique (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 mars 1975, Gillet/Commission, 28/74, Rec. p. 463, points 5 et 6 ; arrêts Ryan/Cour des comptes, précité, points 98 et 104, ainsi que du Tribunal de première instance du 29 novembre 2006, Campoli/Commission, T‑135/05, non encore publié au Recueil, point 85 ; arrêt De Smedt/Commission, précité, point 71). Il ne saurait, en particulier, lui être reproché d’avoir eu recours à la création d’une nouvelle catégorie d’agents destinée à remplacer à terme celles des agents auxiliaires et des fonctionnaires de catégorie D, dans la mesure où des droits acquis par les fonctionnaires ou agents recrutés sous l’ancien statut n’ont pas été irrégulièrement remis en question et dans la mesure où tous les agents relevant de la nouvelle catégorie ont été traités d’une manière identique.

79      Or, en l’espèce, le requérant, dont le contrat d’agent auxiliaire prenait fin, en tout état de cause, le 15 septembre 2004 et dont le contrat d’agent contractuel a pris effet le 16 septembre suivant, ne formule aucun grief précis tiré d’une prétendue méconnaissance des droits qu’il aurait régulièrement acquis sous l’ancienne législation. Tout au plus fait-il valoir que les informations diffusées sur le site intranet de la Commission, à l’époque de l’entrée en vigueur du règlement n° 723/2004, ont induit en erreur les agents auxiliaires sur la portée des conséquences pécuniaires découlant de la transformation de leurs contrats en contrats d’agents contractuels.

80      Il y a lieu de considérer, à cet égard, que de telles informations ne pouvaient faire naître, chez l’intéressé, une confiance légitime quant à un droit à ce que sa rémunération, en qualité d’agent contractuel, ne soit pas réduite de plus de 11 % par rapport à celle qu’il percevait auparavant en qualité d’agent auxiliaire.

81      Outre le fait que l’administration était tenue de se conformer aux règles applicables lors de la fixation des droits pécuniaires du requérant, le taux de réduction de 11 % mentionné dans les informations diffusées sur le site intranet, indépendamment des améliorations sensibles pour les agents contractuels en ce qui concerne la durée du contrat et la couverture des risques sociaux par rapport au régime applicable aux agents auxiliaires, ne pouvait constituer, ainsi que l’a souligné à juste titre la Commission, qu’une moyenne, la réduction exacte devant, pour chaque cas individuel, être calculée après qu’eut été déterminé si l’agent auxiliaire percevait diverses allocations, telles l’indemnité de dépaysement, l’allocation de foyer ou l’allocation pour enfant à charge.

82      S’agissant, en second lieu, des différences de statut existant entre les agents contractuels relevant du groupe de fonctions I et les fonctionnaires ou les agents temporaires relevant, en particulier, de l’ancienne catégorie C, il convient de rappeler que l’on ne saurait mettre en cause les différences de statut existant entre les diverses catégories de personnes employées par les Communautés, soit en tant que fonctionnaires proprement dits, soit au titre des différentes catégories d’agents relevant du RAA. En effet, la définition de chacune de ces catégories correspond à des besoins légitimes de l’administration communautaire et à la nature des tâches, permanentes ou temporaires, qu’elle a pour mission d’accomplir (arrêt Celant e.a./Commission, précité, point 22 ; ordonnance De Smedt/Commission, précitée, point 55 ; arrêt De Smedt/Commission, précité, point 76). On ne saurait, dès lors, considérer comme une discrimination le fait que, du point de vue des garanties statutaires et des avantages de sécurité sociale, certaines catégories de personnes employées par les Communautés peuvent jouir de garanties ou d’avantages qui ne sont pas accordés à d’autres catégories. En particulier, il est à relever que la situation des agents régis par le RAA est caractérisée généralement par le caractère contractuel du lien d’emploi (arrêt Celant e.a./Commission, précité, point 22), alors que le lien juridique entre un fonctionnaire et l’administration est de nature statutaire. Dans son ordonnance De Smedt/Commission (précitée, point 54), le Tribunal de première instance a invoqué, à cet égard, l’existence de différences juridiques objectives entre les diverses catégories de personnes employées par les Communautés, de sorte que le principe d’égalité de traitement ne trouve pas à s’appliquer.

83      Enfin, l’exception d’illégalité soulevée, à titre subsidiaire, par le requérant à l’encontre du règlement n° 723/2004 doit être rejetée comme manifestement irrecevable en application de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable à l’époque de l’introduction de la requête et durant toute la procédure écrite. En effet, aucune argumentation, même sommaire, n’a été développée au soutien d’une telle exception et, en particulier, aucune disposition incriminée du règlement n° 723/2004 n’a été identifiée dans les écritures du requérant, qui s’est borné à affirmer que, à supposer que la discrimination dont il serait victime par rapport aux fonctionnaires exerçant les mêmes fonctions découle de ce règlement, son application devrait être écartée conformément à l’article 241 CE.

84      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le second moyen comme non fondé.

 Sur la demande indemnitaire

 Arguments des parties

85      Le requérant observe qu’il existe un lien étroit entre sa demande en annulation et sa demande en indemnisation, celle-ci tendant à la réparation du préjudice matériel et moral résultant du classement qui lui aurait été illégalement attribué lors de son engagement en qualité d’agent contractuel, ainsi que de la réduction de sa rémunération qui s’en est suivie par rapport à celle dont il bénéficiait antérieurement et par rapport à celle dont jouissent d’autres personnes exerçant un travail similaire. Il évalue le montant de l’indemnité censée réparer ce préjudice à 25 000 euros.

86      À tout le moins, même si la décision attaquée devait ne pas être annulée, la Commission aurait adopté, en l’espèce, un comportement trompeur et fautif de nature à engager sa responsabilité extracontractuelle.

87      Selon la Commission, conformément à une jurisprudence constante, la demande en annulation étant irrecevable, sinon non fondée, il y aurait lieu de rejeter également la demande en indemnisation comme irrecevable (voir, notamment, ordonnance du Tribunal de première instance du 17 octobre 2002, Gómez-Reino/Commission, T‑215/02 R, RecFP p. I‑A‑199 et II‑1019, point 55, et arrêt du Tribunal de première instance du 30 septembre 2003, Martínez Valls/Parlement, T‑214/02, RecFP p. I‑A‑229 et II‑1117, point 43).

88      De plus, à supposer même que la décision attaquée soit illégale, les deux autres conditions nécessaires pour engager la responsabilité extracontractuelle des Communautés, à savoir la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué, ne seraient pas réunies.

89      La Commission observe également que, dans sa requête, le requérant n’a ni spécifié la ventilation entre le préjudice matériel et le préjudice moral invoqués ni justifié le montant réclamé, notamment compte tenu de la durée de son contrat d’agent contractuel, ce qui serait problématique au regard de l’exigence de précision de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance. En l’absence de telles précisions, il y aurait lieu, de surcroît, de supposer que le préjudice moral, s’il existe, serait purement théorique et réparable par l’annulation éventuelle de l’acte faisant grief (arrêt du Tribunal de première instance du 20 septembre 1990, Hanning/Parlement, T‑37/89, Rec. p. II‑463, point 83).

 Appréciation du Tribunal

90      Dans la mesure où le requérant sollicite la réparation du préjudice résultant, selon lui, de son classement au grade 1 du groupe de fonctions I, qui lui aurait été illégalement attribué lors de son engagement en qualité d’agent contractuel, et de la réduction subséquente de sa rémunération par rapport à celle qu’il percevait antérieurement en qualité d’agent auxiliaire et par rapport à celle que perçoivent d’autres personnes, fonctionnaires ou agents, exerçant des fonctions analogues aux siennes, la demande de réparation présente un lien étroit avec les conclusions en annulation. Il s’ensuit que le rejet des conclusions en annulation entraîne celui du recours en indemnité (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 9 février 1994, Latham/Commission, T‑3/92, RecFP p. I‑A‑23 et II‑83, point 37 ; du 12 mai 1998, O’Casey/Commission, T‑184/94, RecFP p. I‑A‑183 et II‑565, point 89, et du 18 février 2004, Esch‑Leonhardt e.a./BCE, T‑320/02, RecFP p. I‑A‑19 et II‑79, points 92 et 93 ; ordonnance du Tribunal du 18 mai 2006, Corvoisier e.a./BCE, F‑13/05, non encore publiée au Recueil, point 58).

 Sur les dépens

91      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

92      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 avril 2008.

Van Raepenbusch

Boruta

Kanninen

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      S. Van Raepenbusch

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.