Language of document : ECLI:EU:T:2014:864

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

8 octobre 2014 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative FAIRGLOBE – Marques nationales verbales antérieures GLOBO – Motif relatif de refus –Absence d’usage sérieux des marques antérieures – Article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) n° 207/2009 – Règle 22, paragraphes 3 et 4, du règlement (CE) n° 2868/95 »

Dans l’affaire T‑300/12,

Lidl Stiftung & Co. KG, établie à Neckarsulm (Allemagne), représentée par Mes M. Wolter et A. Berger, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

A Colmeia do Minho Ldª, établie à Aldeia de Paio Pires (Portugal),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 2 avril 2012 (affaire R 1981/2010-2), relative à une procédure d’opposition entre A Colmeia do Minho Ldª et Lidl Stiftung & Co. KG,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis (rapporteur), président, O. Czúcz et A. Popescu, juges,

greffier : Mme S. Bukšek Tomac, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 9 juillet 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 novembre 2012,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 5 mars 2013,

vu le mémoire en duplique déposé au greffe du Tribunal le 2 mai 2013,

à la suite de l’audience du 11 juin 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 8 mai 2008, la requérante, Lidl Stiftung & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

Image not found

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 29 et 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Viande, poisson, volaille et gibier, ces articles également congelés ; viandes et charcuteries ; extraits de viande ; mollusques et crustacés ; fruits et légumes conservés, séchés et cuits, ces articles également immergés dans le sucre et/ou le vinaigre ; gelées ; confitures, marmelades ; œufs, lait et produits laitiers, compris dans la classe 29, boissons lactées mélangées à prédominance de lait ; conserves de viandes, de charcuteries, de poissons, de fruits et de légumes ; noix préparées ; huiles et graisses comestibles ; plats préparés et surgelés compris dans la classe 29 ; produits et aliments diététiques non à usage médical (compris dans la classe 29) » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; boissons à base de café, thé, cacao, chocolat ; cappucino ; préparations au café, au cacao et au chocolat pour la fabrication de boissons alcooliques ou non ; farines et préparations faites de céréales ; pâtes ; pain, pâtisserie, confiserie ; sucreries, chocolat et produits à base de chocolat ; glaces comestibles ; miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever, fécule à usage alimentaire ; sel ; moutarde ; mayonnaise, ketchup ; vinaigre, sauces (condiments), sauces à salade ; épices ; plats préparés et surgelés compris dans la classe 30 ; produits et aliments diététiques non à usage médical (compris dans la classe 30) ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 29/2008, du 21 juillet 2008.

5        Le 20 octobre 2008, A Colmeia do Minho Ldª (ci-après « l’opposante ») a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée, notamment pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée, notamment, sur les marques nationales antérieures suivantes :

–        la marque verbale portugaise GLOBO, enregistrée le 3 juin 1996 sous le numéro 311549 et désignant les produits relevant de la classe 29 correspondant à la description suivante : « Confitures, marmelade, confiseries et compotes » ;

–        la marque verbale portugaise GLOBO, enregistrée le 15 février 2001 sous le numéro 337398 et désignant notamment les produits relevant des classes 29 et 30 correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Viande conservée, poissons conservés et légumes conservés ; concentrés, pulpes de purées de fruits et de légumes ; flocons de pommes de terre et purée de pommes de terre ; gelées alimentaires ; huile et pulpe de palme ; apéritifs salés ; plats préparés et précuits de viande, poisson et légumes » ;

–        classe 30 : « Sauces, condiments en ce compris lait de coco, masses de céréales et dérivés, pétales de maïs et céréales pour petit-déjeuner ; semoule de manioc ; pastilles, tablettes, bonbons, chocolats, pralines, préparations couvertes de sucre et de chocolat ; arômes alimentaires, sirop de sucre, caramel liquide, chocolat en poudre et granulés ; plats préparés au sucre roux et précuits de céréales ; desserts (préparés non compris dans une autre classe) ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        Sur demande de la requérante, l’opposante a été enjointe de fournir la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures pour les produits pour lesquels elles étaient enregistrées et sur lesquels l’opposition était fondée.

9        Par lettre du 14 janvier 2010, l’OHMI a invité l’opposante à apporter ladite preuve dans un délai de deux mois, soit au plus tard le 15 mars 2010. Le 18 février 2010, l’opposante a répondu à l’OHMI en lui indiquant de se référer aux documents qu’elle avait présentés aux fins de la preuve de l’usage sérieux de ses marques antérieures dans ses observations datant du 17 novembre 2009 et qui consistaient en une série de six factures.

10      Le 1er octobre 2010, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition. Elle a considéré que l’usage sérieux des marques antérieures avait été démontré pour certains des produits mentionnés au point 6 ci-dessus et qu’il existait un risque de confusion entre lesdites marques et la marque demandée s’agissant des produits en conflit qui étaient identiques ou semblables. L’opposition a été rejetée pour le reste desdits produits.

11      Le 12 octobre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision d’opposition.

12      Par décision du 2 avril 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a partiellement accueilli le recours.

13      En premier lieu, s’agissant de la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures, la chambre de recours a estimé que l’opposante, par la production de six factures contenant des références au signe verbal GLOBO, avait démontré à suffisance de droit que lesdites marques antérieures avaient fait l’objet d’un usage sérieux au Portugal. En effet, elle a considéré, en substance, que les factures étaient un moyen de preuve fiable et courant et que celles apportées par l’opposante en l’espèce donnaient une indication de l’intensité de l’usage, les chiffres de vente y figurant devant être considérés comme suffisants aux fins de la preuve de l’usage sérieux. En revanche, la chambre de recours a considéré que ces preuves ne concernaient que les produits suivants : les « [C]onfitures, marmelade, confiseries et compotes » et les « [L]égumes conservés ; pulpes de purées de fruits ; flocons de pommes de terre ; gelées alimentaires ; apéritifs salés ; plats préparés et précuits de viande » relevant de la classe 29, ainsi que les « [C]ondiments en ce compris lait de coco, granulés de chocolat » relevant de la classe 30.

14      En second lieu, s’agissant de l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion, la chambre de recours a considéré, au regard du degré d’attention moyen des consommateurs à l’égard des produits de consommation courante en cause, en substance, que les marques en conflit présentaient, sur le plan visuel, un certain degré de similitude, sur le plan phonétique, un faible degré de similitude et, sur le plan conceptuel, une similitude claire pour la partie importante du public pertinent pour qui le terme « fair » n’a pas de signification. Après avoir relevé que le caractère distinctif des marques antérieures était normal, la chambre de recours a ainsi conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, pour les produits en conflit qui étaient identiques, ainsi que pour ceux qui présentaient une similitude d’un degré à tout le moins moyen, à savoir : les « [F]ruits et légumes conservés, séchés et cuits, ces articles également immergés dans le sucre et/ou le vinaigre ; gelées ; confitures, marmelade ; conserves de fruits et de légumes ; noix préparées ; huiles et graisses comestibles » relevant de la classe 29, ainsi que les « [C]afé, cacao ; succédanés du café ; boissons à base de café, cacao, chocolat ; cappucino ; préparations au café, au cacao, et au chocolat pour la fabrication de boissons alcooliques ou non ; confiserie ; sucreries, chocolat et produits à base de chocolat ; glaces comestibles ; moutarde ; mayonnaise, ketchup ; vinaigre, sauces (condiments), sauces à salade ; épices ; produits et aliments diététiques non à usage médical (compris dans la classe 30) » relevant de la classe 30.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, en ce qu’elle a fait droit à l’opposition ;

–        condamner l’OHMI aux dépens ;

–        condamner l’opposante aux dépens de la procédure devant l’OHMI.

16      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours en annulation dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés par l’OHMI.

17      Lors de l’audience du 11 juin 2014, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a modifié son dernier chef de conclusions tendant à condamner l’opposante aux dépens de la procédure devant l’OHMI en le circonscrivant aux dépens exposés aux fins de la procédure devant la chambre de recours.

 En droit

18      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, en substance, de la violation des dispositions combinées de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 et de la règle 22, paragraphes 3 et 4, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1) et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

19      S’agissant du premier moyen, la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir retenu que l’usage sérieux des marques antérieures avait été prouvé. Selon elle, les éléments de preuve produits par l’opposante n’atteignent pas le niveau de preuve requis pour attester du caractère sérieux de l’usage.

20      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

 Rappel des principes généraux dégagés par la jurisprudence

21      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque communautaire antérieure ou bien, aux termes du paragraphe 3 du même article, d’une marque nationale antérieure, qui a formé opposition, doit apporter la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux, dans l’Union ou dans l’État membre où elle est protégée, pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services.

22      Selon une jurisprudence constante, la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque communautaire consiste à limiter les conflits entre deux marques, à moins qu’il n’existe un juste motif économique à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure découlant d’une fonction effective de celle-ci sur le marché [voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, Rec, EU:T:2004:225, points 36 à 38, et du 30 novembre 2009, Esber/OHMI – Coloris Global Coloring Concept (COLORIS), T‑353/07, EU:T:2009:475, point 20].

23      En outre, en vertu de la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure.

24      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, Rec, EU:C:2003:145, point 43).

25      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (arrêt VITAFRUIT, point 22 supra, EU:T:2004:225, point 40, et arrêt COLORIS, point 22 supra, EU:T:2009:475, point 22).

26      Pour examiner le caractère sérieux de l’usage de la marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement. En outre, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque antérieure ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être en rapport avec d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque antérieure soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux [arrêt du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, Rec, EU:T:2004:223, point 36 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt Ansul, point 22 supra, EU:C:2003:145, point 39].

27      Toutefois, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que la partie ayant formé l’opposition apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée (arrêt HIPOVITON, point 22 supra, EU:T:2004:223, point 37).

28      De plus, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné (arrêt du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, Rec, EU:T:2004:292, point 28, et arrêt COLORIS, point 22 supra, EU:T:2009:475, point 24).

29      C’est à l’aune des considérations susmentionnées qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve apportés par l’opposante démontraient, à suffisance de droit, l’usage sérieux des marques antérieures pour les produits en cause.

 Observations liminaires

30      À titre liminaire, il convient d’observer que, la demande de marque communautaire de la requérante ayant été publiée le 21 juillet 2008, la période de cinq années visée à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 s’étend du 21 juillet 2003 au 20 juillet 2008 (ci-après la « période pertinente »). Les marques antérieures étant des marques nationales, le territoire pertinent aux fins de la preuve de l’usage sérieux se limite à celui de l’État membre où celles-ci sont protégées, à savoir le Portugal.

31      Devant la division d’opposition, dans ses observations datant du 17 novembre 2009 (voir point 9 ci-dessus), l’opposante a fourni six factures (ci-après « les six factures »), à savoir :

–        les factures FT0100713 et FT010716, datées du 21 avril 2006 ;

–        les factures FT0100489 et FT0100495, datées du 15 janvier 2007 ;

–        la facture FT0100689, datée du 25 janvier 2008 ;

–        la facture FT0100972, datée du 4 février 2008.

32      Il est constant que seules ces six factures ont été produites. Le Tribunal observe que, au cours de la procédure devant l’OHMI, l’opposante, en dépit de la lettre que ce dernier lui a envoyée le 14 janvier 2010 (voir point 9 ci-dessus), n’a transmis aucun autre document de sorte que la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures repose sur les seules six factures mentionnées ci-dessus.

 Sur la valeur probante des six factures

 Sur le destinataire des six factures

33      La requérante fait valoir que les six factures sont toutes adressées au même client, au sujet duquel l’opposante n’aurait fourni aucune information.

34      L’OHMI conteste l’argument de la requérante.

35      Il convient de relever, ainsi que le fait valoir, en substance, l’OHMI, que cet argument manque en fait. En effet, il ressort des observations que l’opposante a fournies à l’OHMI au stade du recours devant la chambre de recours que ledit client est une filiale du groupe Auchan qui, par la suite, revend les produits en cause aux magasins appartenant audit groupe implantés dans plusieurs villes au Portugal.

36      De plus, la circonstance que, en l’espèce, la preuve de l’usage de la marque antérieure n’a été apportée que pour la vente de produits à destination d’un seul client ne permet pas d’exclure a priori son caractère sérieux (voir arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, Rec, EU:C:2006:310, point 76 et jurisprudence citée).

 Sur la lisibilité des six factures

37      La requérante soutient que le manque de lisibilité des six factures met en doute la fiabilité des informations qui y figurent.

38      L’OHMI conteste les arguments de la requérante et fait notamment valoir qu’il reste possible, avec l’agrandissement nécessaire, de discerner les informations pertinentes sur les six factures.

39      À cet égard, il convient de mettre en exergue la très faible intelligibilité desdites factures. La chambre de recours, au point 23 de la décision attaquée, constate elle-même que les six factures comportent des montants « approximatifs » et « très difficiles à déchiffrer ». Lors de l’audience, l’OHMI a d’ailleurs admis que celles-ci étaient « quasiment illisibles ».

40      Il ressort, de plus, de l’analyse de la documentation contenue dans le dossier de l’OHMI, transmis au Tribunal, que les six factures étaient accompagnées de traductions qui n’étaient que partielles. En effet, il convient de constater que lesdites traductions ne relatent que les produits faisant l’objet des transactions et ne reprennent pas les montants chiffrés des ventes, sur lesquels aucune indication ne saurait ainsi en être tirée.

41      Il s’ensuit que les montants des ventes figurant sur l’original des six factures sont cités par les parties tels qu’ils ont été déchiffrés par elles et le Tribunal observe qu’il ne peut vérifier lesdites données chiffrées.

 Sur l’importance de l’usage

42      La requérante estime que la preuve de l’importance de l’usage doit être apportée pour chaque produit visé par les marques antérieures. La chambre de recours aurait erronément considéré que les ventes des divers produits pouvaient être agrégées, et ce jusqu’à atteindre un volume minimal acceptable de ventes pour démontrer l’usage sérieux. Les éléments fournis ne permettraient donc d’établir que des conjectures à faible valeur probante s’agissant tant de la valeur commerciale que de la fréquence des ventes.

43      L’OHMI réfute les arguments de la requérante. Il fait observer que la chambre de recours pouvait effectuer un examen de l’importance de l’usage en tenant compte des catégories de produits. À cet égard, il fait remarquer qu’un volume suffisant de ventes pour les catégories de produits en question a été constaté par la chambre de recours, étayant son argumentation par les montants de vente tirés des six factures. En outre, les chiffres de vente, certes relativement faibles, seraient contrebalancés par différents facteurs, et notamment par le fait que les factures ne sont qu’illustratives des montants réels des ventes. Selon l’OHMI, il peut en être conclu que l’usage en l’espèce n’est pas symbolique, mais est objectivement de nature à créer ou à préserver un débouché pour les produits.

44      Il y a lieu de relever que le montant total des six factures, s’élevant à 44 000 euros (voir point 20 de la décision attaquée), n’est pas le montant pertinent à prendre en compte en l’espèce, puisque les articles figurant sur les six factures ne font pas tous référence au signe GLOBO, ainsi qu’il a été confirmé par les parties lors de l’audience. Il s’agit donc de se référer aux montants des ventes des articles dont le libellé contient une référence au signe GLOBO, ainsi que la chambre de recours le constate elle-même au point 23 de la décision attaquée.

45      Premièrement, il convient de constater, à l’instar de la requérante, que c’est de façon erronée que la chambre de recours s’est bornée à se fonder, ainsi qu’il ressort du même point 23 de la décision attaquée, sur les montants totaux des factures (tels que 8 300, 2 000 et 3 900 euros), correspondant à l’agrégation des chiffres de vente de tous les articles faisant référence au signe GLOBO spécifiés sur chaque facture.

46      À cet égard, il convient d’observer que, certes, dans certaines circonstances, la chambre de recours n’est pas tenue d’exiger une preuve de l’usage pour tous les produits relevant d’une même catégorie ou sous-catégorie de produits.

47      En effet, selon la jurisprudence, il résulte de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 que, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou de ces services n’emporte protection, dans une procédure d’opposition, que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou les services pour lesquels la marque a effectivement été utilisée. En revanche, si une marque a été enregistrée pour des produits ou des services définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est possible d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de la catégorie concernée, alors la preuve de l’usage sérieux de la marque pour lesdits produits ou services couvre nécessairement toute cette catégorie aux fins de l’opposition [arrêts du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec, EU:T:2005:288, point 45, et du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 23]. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de « partie des produits ou des services » ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou des sous-catégories cohérentes (voir, en ce sens, arrêts ALADIN, précité, EU:T:2005:288, point 46, et RESPICUR, précité, EU:T:2007:46, point 24).

48      Cette jurisprudence permet donc de considérer que la preuve de l’usage sérieux pour des produits entrant dans une catégorie cohérente et homogène couvre toute cette catégorie. En l’espèce, il doit être constaté que peuvent être identifiées, au sein de la liste des produits visés par les marques antérieures, plusieurs catégories ou sous-catégories de produits cohérentes et homogènes, pour chacune desquelles la preuve de l’usage sérieux doit être apportée, et ce au moyen des chiffres de vente correspondant aux produits pertinents entrant dans ces catégories ou sous-catégories.

49      Or, ainsi qu’il a été relevé au point 45 ci-dessus, la chambre de recours a pris en compte les montants totaux de chaque facture correspondant à l’agrégation des chiffres de vente de tous les articles faisant référence au signe GLOBO, alors même que les produits y figurant ne relevaient pas tous d’une même catégorie de produits cohérente et homogène. En particulier, il ressort de la traduction partielle de la facture FT0100495, dont le montant total de 8 300 euros est cité par la chambre de recours au point 23 de la décision attaquée, que les produits listés sur cette facture sont des légumes ou des fruits en conserve, mais également, par exemple, de la gelée alimentaire et du chocolat en granulés. Cependant, ces produits ne relèvent pas des mêmes catégories de produits, voire ne relèvent pas des mêmes classes de produits. Au demeurant, la chambre de recours semble avoir pris en compte également des produits tels que le sucre vanillé et le bicarbonate de sodium qui, tout en figurant sur ladite facture assortis du signe GLOBO, ne relèvent pourtant pas de la liste de produits pour lesquels elle a considéré que l’usage sérieux avait été démontré (voir point 13 ci-dessus).

50      Il en résulte que la chambre de recours aurait dû tenir compte des chiffres de vente relatifs aux produits pertinents entrant dans une catégorie ou sous-catégorie cohérente et homogène au lieu de se référer à la somme résultant de la vente de l’entièreté des produits référencés sous le signe GLOBO figurant sur chacune des six factures.

51      Cela constitue une erreur qui a vicié son raisonnement s’agissant de l’examen de l’importance de l’usage.

52      Deuxièmement, il convient de constater que, même si le Tribunal tenait compte des chiffres de vente détaillés correspondant à des catégories et sous-catégories de produits, ainsi que le fait valoir l’OHMI dans son mémoire en réponse, ceux-ci ne démontrent que des montants se mesurant en centaines d’euros selon les produits.

53      Or, bien qu’il résulte de la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus que, si l’usage n’a pas à être quantitativement important pour être qualifié de sérieux, celui-ci doit tout de même être prouvé par des actes d’usage objectivement propres à créer ou à conserver un débouché pour les produits. Cependant, il y a lieu de relever que, en l’espèce, les chiffres de vente sont très faibles et ne suffisent donc pas pour exclure la possibilité d’un usage qui ne serait que purement symbolique.

54      À cet égard, l’argument de l’OHMI selon lequel les faibles montants des ventes s’expliqueraient par la circonstance que les factures ne sont qu’illustratives de la réalité du volume commercial ne saurait prospérer.

55      S’il ne saurait être exigé du titulaire d’une marque antérieure qu’il apporte la preuve de chacune des transactions effectuées sous cette marque au cours de la période pertinente de cinq ans visée à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, il est néanmoins nécessaire pour ledit titulaire invoquant des factures à titre d’élément de preuve, qu’il en présente des exemplaires dans une quantité qui permette d’exclure toute possibilité d’usage purement symbolique de ladite marque et, par conséquent, qui soit suffisante pour prouver son usage sérieux (voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 2014, Aloe Vera of America/OHMI – Detimos (FOREVER), T‑528/11, Rec, EU:T:2014:10, point 43).

56      En l’espèce, toutefois, il convient de relever que l’opposante n’a pas fourni d’exemplaires de factures dans une quantité qui permette d’exclure toute possibilité d’usage purement symbolique des marques antérieures. De plus, l’opposante n’ayant transmis aucun autre élément de preuve, ainsi qu’il a été constaté au point 40 ci-dessus, les faibles volumes de ventes figurant sur les six factures ne peuvent constituer l’indice déterminant d’un usage qui, ramené à la réalité des ventes, n’est pas minime. Celles-ci ne sauraient, dès lors, constituer des illustrations de montants réels.

57      Du reste, il doit être relevé que, de l’aveu de la chambre de recours, les six factures ne donnent qu’une indication « prima facie » (voir point 22 de la décision attaquée) de l’intensité de l’usage, alors qu’il a été rappelé au point 28 ci-dessus que, selon la jurisprudence, l’usage sérieux ne pouvait être présumé.

58      Il s’ensuit que, à la lumière des développements ci-dessus concernant l’erreur de raisonnement de la chambre de recours, les six factures ne permettent pas de conclure à la preuve d’un volume suffisant de l’usage, pour les produits et catégories de produits cités au point 13 ci-dessus.

 Sur l’appréciation globale des facteurs pertinents du cas d’espèce

59      En vertu d’une jurisprudence constante, telle que rappelée au point 26 ci-dessus, pour examiner le caractère sérieux de l’usage de la marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte.

60      Il y a donc lieu d’examiner si le très faible volume de commercialisation de ces produits sous les marques antérieures a pu être compensé par d’autres facteurs.

61      S’agissant de l’intensité ou de la constance dans le temps de l’usage, il convient de constater que les six factures concernent des ventes qui s’échelonnent entre la fin du mois d’avril 2006 et le début du mois de février 2008.

62      Si l’OHMI fait valoir que cela démontre une certaine uniformité et régularité dans le temps des transactions, il importe d’observer que les six factures ne prouvent cependant que quatre actes d’usages ponctuels, compte tenu du fait que certaines transactions ont eu lieu les mêmes jours (voir point 31 ci-dessus).

63      Dès lors que les six factures ne prouvent que quatre actes d’usages ponctuels sur une période de vingt-deux mois, il ne saurait être conclu ni à une forte intensité ni à une certaine constance dans le temps de l’usage desdites marques.

64      S’agissant des caractéristiques du marché pertinent et de la nature des produits en cause, il convient d’observer, tout d’abord, que la plupart des produits pertinents en l’espèce étant des produits de consommation courante, un prix très raisonnable leur est appliqué et il ne s’agit donc pas de produits de luxe, coûteux et vendus en quantité limitée sur un marché étroit, mais bien de produits destinés à être vendus à un grand nombre de consommateurs sur l’ensemble du territoire portugais [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2008, Rykiel création et diffusion de modèles/OHMI – Cuadrado (SONIA SONIA RYKIEL), T‑131/06, EU:T:2008:135, point 54].

65      Dès lors, la nature desdits produits en cause ne saurait expliquer le faible volume commercial démontré en l’espèce.

66      Ensuite, quant à la structure du marché pertinent, il convient de rejeter l’argument formulé par l’OHMI dans son mémoire en réponse ainsi que lors de l’audience, se prévalant à cette occasion de l’arrêt du 13 janvier 2011, Park/OHMI – Bae (PINE TREE) (T‑28/09, EU:T:2011:7), selon lequel le faible volume commercial examiné par catégories de produits serait justifié par la taille restreinte du marché, à savoir le marché des aliments exotiques.

67      En effet, il ne ressort pas de la liste des produits pertinents visés par les marques antérieures, telle qu’elle figure au point 13 ci-dessus, que ceux-ci ne soient que des produits exotiques.

68      À cet égard, ainsi qu’il a été rappelé au point 14 ci-dessus, la chambre de recours a considéré, après avoir retenu que les produits en cause étaient des produits de consommation courante, que le public visé en l’espèce était le grand public au Portugal, sans mentionner le fait que ledit public serait restreint à une catégorie spécifique de consommateurs.

69      De plus, il doit être observé que l’opposante ne s’est jamais prévalue de l’orientation de la vente de ses produits vers un marché limité aux aliments de type exotique.

70      Par ailleurs, il convient de constater que la décision attaquée ne mentionne aucun autre facteur pertinent aux fins de ladite appréciation globale. En effet, il y a lieu d’observer que les six factures n’apportent, à cet égard, aucune indication supplémentaire.

71      S’il est vrai que la production de factures est un moyen de preuve acceptable de l’usage sérieux, ainsi qu’il découle de la règle 22, paragraphe 4, du règlement n° 2868/95, il n’en reste pas moins que l’opposante a choisi de se limiter à la production de six factures aux fins de la preuve de l’usage sérieux de ses marques antérieures.

72      Il ressort pourtant du dossier de la procédure devant l’OHMI que l’opposante a eu l’opportunité de déposer des éléments de preuve complémentaires concernant l’usage sérieux de ses marques. Or, il convient de relever que les éléments complémentaires qui auraient pu non seulement permettre de donner des indications supplémentaires quant à l’importance de l’usage des marques antérieures, mais également de corroborer la nature de l’usage, comme des brochures, des catalogues ou des publicités mentionnant des produits des marques antérieures, ne sont pas d’une nature telle qu’il aurait été difficile pour l’opposante de les obtenir, celle-ci n’ayant d’ailleurs pas invoqué l’impossibilité de produire de tels éléments [voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2011, Advance Magazine Publishers/OHMI – Capela & Irmãos (VOGUE), T‑382/08, EU:T:2011:9, point 51 et jurisprudence citée].

73      En outre, conformément à la jurisprudence citée au point 27, puisque le volume commercial de l’exploitation de la marque était limité, il aurait été d’autant plus nécessaire que l’opposante ait fourni de telles indications supplémentaires.

74      Il convient de constater enfin que l’OHMI ne saurait se prévaloir, ainsi qu’il l’a soutenu lors de l’audience, de l’arrêt du 16 novembre 2011, Buffalo Milke Automotive Polishing Products/OHMI – Werner & Mertz (BUFFALO MILKE Automotive Polishing Products) (T‑308/06, Rec, EU:T:2011:675), dans lequel le Tribunal a jugé que les éléments de preuve présentés lors de la procédure devant l’OHMI, et notamment neuf factures présentant de faibles montants de ventes, étaient suffisants aux fins de démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure en question. En effet, il y a lieu de constater que les factures n’étaient pas, contrairement au cas d’espèce, l’unique moyen de preuve utilisé, puisque la titulaire de la marque antérieure avait apporté devant la division d’opposition divers éléments au titre desquels on trouvait des brochures, des copies d’emballage, une attestation sur l’honneur et des rapports sur le chiffre d’affaires. Ce n’est que conjointement à ces éléments de preuve que les factures ont été considérées comme étant en mesure de démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure, ainsi qu’il ressort notamment des points 67 et 76 dudit arrêt.

75      L’appréciation du critère de l’importance de l’usage, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt en question, a donc été réalisée en mettant en relation le faible volume commercial démontré par les factures avec les autres éléments de preuve tels que les barèmes de prix, les rapports sur le chiffre d’affaires et la déclaration sur l’honneur, et en tenant compte en outre du fait que les factures concernaient de petites quantités vendues à divers distributeurs, ce qui permettait de mettre en perspective le faible montant des ventes par rapport, notamment, à la fréquence de celles-ci et à leur portée géographique potentielle.

76      Au demeurant, ainsi que le soutient la requérante, il peut être valablement fait référence à l’arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM) (T‑427/09, Rec, EU:T:2011:480), dans lequel le Tribunal a constaté que c’était à juste titre que des factures, qui ne présentaient qu’une très faible intensité de l’usage, limitée dans le temps, même accompagnées d’autres documents, certes à faible valeur probante, n’ont pas permis à la chambre de recours de constater que la preuve de l’usage sérieux était suffisante. Il peut être conclu, a fortiori, qu’en l’espèce les six factures, seules, ne démontrant que quatre actes d’usages ponctuels et un faible volume de vente respectivement à chaque catégorie cohérente et homogène de produits ne permettent pas d’établir à suffisance de droit le caractère sérieux de l’usage.

77      Il résulte de ce qui précède que, en l’espèce, il n’existe aucun facteur, au sens de la jurisprudence citée au point 26, qui permette de contrebalancer les déficiences des six factures en tant que preuve de l’usage sérieux des marques antérieures.

78      Ainsi, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur l’argument de la requérante selon lequel les six factures ne prouveraient pas la nature de l’usage dès lors qu’elles ne démontreraient pas la présence effective sur le marché de produits commercialisés sous les marques antérieures, notamment eu égard à des ventes effectuées à un seul client professionnel et donc sans lien direct avec les consommateurs finaux, il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures avait été apportée par l’opposante en l’espèce.

79      En conséquence, il y a lieu d’accueillir le premier moyen et d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner le deuxième moyen invoqué par la requérante.

 Sur les dépens

80      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

81      L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

82      Par ailleurs, s’agissant de la demande formulée par la requérante relative aux dépens de la procédure devant la chambre de recours, il appartiendra à la chambre de recours de statuer, à la lumière du présent arrêt, sur les frais afférents à cette procédure [voir, en ce sens, arrêt du 5 décembre 2012, Consorzio vino Chianti Classico/OHMI – FFR (F.F.R.), T‑143/11, EU:T:2012:645, point 74].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 2 avril 2012 (affaire R 1981/2010-2), relative à une procédure d’opposition entre A Colmeia do Minho Ldª et Lidl Stiftung & Co. KG est annulée en tant qu’elle a constaté que l’usage sérieux des marques antérieures avait été démontré à suffisance de droit.

2)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Lidl Stiftung & Co.

Berardis

Czúcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 octobre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.