Language of document : ECLI:EU:T:2014:55

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

4 février 2014(*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un fauteuil – Dessin ou modèle antérieur – Motif de nullité – Absence de caractère individuel – Article 6 et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 6/2002 »

Dans l’affaire T‑357/12,

Sachi Premium-Outdoor Furniture, Lda, établie à Estarreja (Portugal), représentée par Me M. Oehen Mendes, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Gandia Blasco, SA, établie à Valence (Espagne), représentée par Me I. Sempere Massa, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 27 avril 2012 (affaire R 969/2011‑3), relative à une procédure de nullité entre Gianda Blasco, SA et Sachi Premium-Outdoor Furniture, Lda,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur) et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 7 août 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 21 novembre 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 14 novembre 2012,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Sachi Premium-Outdoor Furniture, Lda, est titulaire du dessin ou modèle communautaire déposé le 14 mai 2009, enregistré le même jour sous le numéro 1512633-0003 (ci-après le « dessin ou modèle contesté ») auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) et publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires n° 116/2009, du 18 juin 2009.

2        Le dessin ou modèle contesté, destiné à être appliqué aux « fauteuils, canapés », est représenté comme suit :

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3        Le 1er avril 2010, l’intervenante, Gandia Blasco, SA, a présenté devant l’OHMI une demande en nullité du dessin ou modèle contesté, fondée sur les articles 4 à 9 du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

4        À l’appui de sa demande en nullité, l’intervenante a invoqué le dessin ou modèle communautaire enregistré le 9 décembre 2003 sous le numéro 52113-0001 (ci-après le « dessin ou modèle antérieur ») pour des « fauteuils », représenté comme suit :

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5        Par décision du 7 mars 2011, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité, au motif que le dessin ou modèle contesté était nouveau et présentait un caractère individuel au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, lu conjointement avec les articles 5 et 6 du même règlement.

6        Le 6 mai 2011, l’intervenante a formé un recours, au titre des articles 55 à 60 du règlement n° 6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

7        Par décision du 27 avril 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’annulation. D’une part, la chambre de recours a considéré que les dessins ou modèles en conflit n’étaient pas identiques au sens de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002. D’autre part, elle a déclaré nul le dessin ou modèle contesté au motif qu’il était dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 6 du règlement n° 6/2002. La chambre de recours a estimé que le dessin ou modèle contesté créait la même impression globale sur les utilisateurs avertis que le dessin ou modèle antérieur étant donné que toutes les caractéristiques essentielles de ce dernier y étaient reproduites et, afin qu’il se différencie, outre par de très légères variations, à peine perceptibles, seul un autre élément, trois coussins, qui pouvait généralement être associé à ce type de produit au cours de l’usage habituel de ce dernier, y avait été ajouté.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et déclarer valide le dessin ou modèle contesté ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

9        Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 19 février 2013, la requérante a renoncé à son chef de conclusions visant à ce que le Tribunal déclare valide le dessin ou modèle contesté.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

11      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        déclarer nul le dessin ou modèle contesté ;

–        statuer sur les dépens.

 En droit

12      La requérante soulève, en substance, un moyen unique tiré de la violation de l’article 6 du règlement n° 6/2002.

13      Selon l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, le caractère individuel doit être apprécié, dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, au regard de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti, qui doit être différente de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité. L’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 précise que, aux fins de cette appréciation, il doit être tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

14      S’agissant de la notion d’utilisateur averti, par rapport auquel le caractère individuel du dessin ou modèle communautaire contesté doit être apprécié, la chambre de recours l’a défini, en l’espèce, comme toute personne qui achète habituellement des fauteuils et les soumet à l’usage qui leur est destiné et qui a acquis des informations à ce sujet en parcourant des catalogues de fauteuils, en visitant les magasins pertinents, en téléchargeant des informations à partir de l’internet, ou qui est un revendeur de ces produits.

15      S’agissant du niveau d’attention de l’utilisateur averti, il convient de rappeler, à l’instar de la chambre de recours, que, selon la jurisprudence, la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté non d’une attention moyenne, mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré (arrêt de la Cour du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, Rec. p. I‑10153, point 53).

16      Il ressort également de la jurisprudence que, si l’utilisateur averti n’est pas le consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé qui perçoit habituellement un dessin ou un modèle comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’est pas non plus l’expert ou l’homme de l’art capable d’observer dans le détail les différences minimes susceptibles d’exister entre les modèles ou dessins en conflit. Ainsi, le qualificatif « averti » suggère que, sans être un concepteur ou un expert technique, l’utilisateur connaît différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d’un certain degré de connaissance quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement et, du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d’un degré d’attention relativement élevé lorsqu’il les utilise (arrêt PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, point 15 supra, point 59).

17      La chambre de recours a estimé que l’utilisateur averti en l’espèce était familiarisé avec le produit selon le niveau d’attention prévu par la jurisprudence citée aux points 15 et 16 ci-dessus.

18      La requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours concernant la définition et le niveau d’attention de l’utilisateur averti.

19      S’agissant du degré de liberté du créateur d’un dessin ou modèle, il ressort de la jurisprudence que celui-ci est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes à plusieurs dessins ou modèles appliqués au produit concerné [arrêts du Tribunal du 9 septembre 2011, Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne), T‑11/08, non publié au Recueil, point 32, et du 25 avril 2013, Bell & Ross/OHMI – KIN (Boîtier de montre-bracelet), T‑80/10, non publié au Recueil, point 112].

20      Partant, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est grande, moins des différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire des impressions globales différentes sur l’utilisateur averti. À l’inverse, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire des impressions globales différentes sur l’utilisateur averti. Ainsi, un degré élevé de liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle renforce la conclusion selon laquelle les dessins ou modèles ne présentant pas de différences significatives produisent une même impression globale sur l’utilisateur averti (arrêts Moteur à combustion interne, point 19 supra, point 33, et Boîtier de montre-bracelet, point 19 supra, point 113).

21      En l’espèce, la chambre de recours a estimé à juste titre que la liberté du créateur de fauteuils était presque illimitée, étant donné que les fauteuils pouvaient revêtir toute combinaison de couleurs, de modèles, de formes et de matériaux, et que la seule limitation pour le créateur consistait dans le fait que les fauteuils devaient être fonctionnels, à savoir qu’ils devaient au moins inclure une assise, un dossier et deux accoudoirs.

22      La requérante, sans contester cette appréciation de la chambre de recours, fait valoir que le degré de liberté du créateur est limité par « le style, la façon, la tendance, la mode dans lesquels le dessin ou modèle s’inscrit » et que ceux-ci doivent être pris en compte dans l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle.

23      À cet égard, il suffit de relever que, selon la jurisprudence citée au point 19 ci-dessus, le degré de liberté du créateur d’un dessin ou modèle peut être limité par des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou par des prescriptions légales applicables au produit. Cependant, une tendance générale en matière de design ne peut être considérée comme un facteur de limitation de la liberté du créateur [arrêt du Tribunal du 13 novembre 2012, Antrax It/OHMI – THC (Radiateurs de chauffage), T‑83/11 et T‑84/11, non encore publié au Recueil, point 95].

24      Le Tribunal a également jugé que la question de savoir si un dessin ou modèle suit ou non une tendance générale en matière de design est pertinente, tout au plus, par rapport à la perception esthétique du dessin ou modèle concerné et peut donc, éventuellement, exercer une influence sur le succès commercial du produit dans lequel ce dernier est incorporé. En revanche, elle est sans pertinence dans le cadre de l’examen du caractère individuel du dessin ou modèle concerné, qui consiste à vérifier si l’impression globale produite par ce dernier se différencie des impressions globales produites par les dessins ou modèles divulgués antérieurement, indépendamment des considérations esthétiques ou commerciales [arrêt du Tribunal du 22 juin 2010, Shenzhen Taiden/OHMI – Bosch Security Systems (Équipement de communication), T‑153/08, Rec. p. II‑2517, point 58].

25      S’agissant de la comparaison des impressions globales produites par le dessin ou modèle antérieur et par le dessin ou modèle contesté, la chambre de recours a relevé qu’ils partageaient de nombreux éléments identiques ou fortement similaires, à savoir : une structure générale rectangulaire incluant des cadres de forme rectangulaire servant d’accoudoirs ; des hauteurs des cadres inférieures à leurs largeurs ; des assises plates ; des dossiers verticaux plats ; des plaques rectangulaires juxtaposées et légèrement espacées sur les assises ; une planche sous les plaques de chaque côté des fauteuils ; des accoudoirs au même niveau que les limites supérieures des dossiers des fauteuils et reliés à la limite supérieure des dossiers des fauteuils. La chambre de recours a indiqué que les dessins ou modèles en conflit différaient par un nombre différent de plaques rectangulaires juxtaposées composant les assises et les dossiers des fauteuils représentés par les dessins ou modèles en conflit et par l’existence, dans le dessin ou modèle antérieur, d’un espace vide entre l’assise et le dossier du fauteuil, ainsi que par la présence de trois coussins dans le dessin ou modèle contesté et par une légère différence de distance entre l’assise du fauteuil et le sol. Elle a relevé que les différences entre les dessins ou modèles en conflit, à savoir un nombre différent de plaques rectangulaires juxtaposées composant les assises et les dossiers des fauteuils représentés par les dessins ou modèles en conflit et l’existence, dans le dessin ou modèle antérieur, d’un espace vide entre l’assise et le dossier du fauteuil, étaient nettement moins frappantes que l’impression globale produite par les nombreux éléments partiellement identiques et/ou fortement similaires. Elle a considéré que les impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit étaient presque identiques et que les légères différences étaient à peine perceptibles.

26      La chambre de recours a ensuite indiqué que la seule différence pertinente entre les dessins ou modèles en conflit résidait dans le fait que le dessin ou modèle contesté comprenait également trois coussins, qui n’étaient pas présents dans le dessin ou modèle antérieur. Elle a considéré que ce fait n’exerçait qu’un impact marginal sur les impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit, les coussins étant un élément ajouté à la version du fauteuil représentée par le dessin ou modèle antérieur et l’utilisateur averti accordant nettement plus d’importance à l’impression globale produite par la structure des fauteuils. La chambre de recours a conclu que le dessin ou modèle contesté créait la même impression globale sur les utilisateurs avertis que le dessin ou modèle antérieur étant donné que toutes les caractéristiques essentielles de ce dernier y étaient reproduites et, afin qu’il se différencie, outre par de très légères variations à peine perceptibles, seul un autre élément, trois coussins, qui pouvait généralement être associé à ce type de produit au cours de l’usage habituel de ce dernier, y avait été ajouté.

27      Par un premier grief, la requérante soutient qu’il existe une contradiction dans la décision attaquée. D’une part, au point 17 de la décision attaquée, dans le cadre de l’appréciation de la nouveauté au sens de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, la chambre de recours aurait relevé qu’il existait des différences entre les dessins ou modèles en conflit, résidant dans le nombre de plaques rectangulaires composant les assises et les dossiers des fauteuils représentés par ceux-ci et dans l’existence d’un espace entre le dossier et l’assise du dessin ou modèle antérieur, qui ne pouvaient être considérées comme des détails insignifiants et elle en aurait déduit que les dessins ou modèles en conflit n’étaient pas identiques. D’autre part, la chambre de recours aurait ignoré ces différences dans le cadre de l’appréciation du caractère individuel au sens de l’article 6 du règlement n° 6/2002 en indiquant, au point 31 de la décision attaquée, que la seule différence pertinente entre les dessins ou modèles en conflit résidait dans le fait que le dessin ou modèle contesté comprenait trois coussins, qui n’étaient pas présents dans le dessin ou modèle antérieur. Selon la requérante, les différences prises en considération lors de l’appréciation du critère de nouveauté devaient également être prises en considération lors de l’appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

28      Selon l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, « des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants ». Selon l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, le caractère individuel d’un dessin ou modèle doit être apprécié au regard de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti qui doit être différente de celle produite par le dessin ou modèle antérieur.

29      La détermination de la nouveauté et celle du caractère individuel d’un dessin ou modèle reposent donc sur des appréciations différentes. Le fait que les différences mentionnées au point 17 de la décision attaquée ne constituent pas des détails insignifiants et sont suffisantes pour considérer que les dessins ou modèles en conflit ne sont pas identiques n’exclut pas que ces différences ne sont pas suffisantes pour que ceux-ci produisent des impressions globales différentes.

30      À cet égard, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a pris en considération, dans son appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté, les différences mentionnées au point 17 de la décision attaquée. Elle a estimé que ces différences étaient légères, à peine perceptibles et nettement moins frappantes que l’impression globale produite par les nombreux éléments partiellement identiques et/ou fortement similaires qu’elle avait relevés entre les dessins ou modèles en conflit.

31      Le fait que des différences entre les dessins ou modèles en conflit mentionnées au point 17 de la décision attaquée soient légères, à peine perceptibles et ne conduisent pas à produire des impressions globales différentes pour l’utilisateur averti n’est pas en contradiction avec le constat que de telles différences sont suffisantes pour conclure que les dessins ou modèles en conflit ne sont pas identiques.

32      Partant, le premier grief de la requérante relatif à l’existence d’une contradiction dans la décision attaquée doit être rejeté.

33      Par un deuxième grief, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas pris en compte le dessin ou modèle contesté tel qu’il est enregistré pour apprécier son caractère individuel. Elle n’aurait pas tenu compte du fait que le dessin ou modèle contesté comporte des coussins.

34      À cet égard, il y a lieu de relever que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la seule différence pertinente entre les dessins ou modèles en conflit résidait dans le fait que le dessin ou modèle contesté comprenait trois coussins, qui n’étaient pas présents dans le dessin ou modèle antérieur. Elle a cependant considéré que le fait que le dessin ou modèle contesté comprenait trois coussins non compris dans le dessin ou modèle antérieur n’exerçait qu’un rôle marginal sur les impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit. Elle a estimé que les coussins étaient un élément que la requérante avait ajouté au fauteuil représenté par le dessin ou modèle antérieur et que, même si les coussins étaient ainsi devenus un élément du dessin ou modèle contesté, il s’agissait d’un élément relativement marginal, en ce sens que le fauteuil, avec ou sans les coussins, produisait sur l’utilisateur averti la même impression globale.

35      Il ressort de la décision attaquée que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a effectivement pris en compte le fait que le dessin ou modèle contesté comprenait des coussins et que les dessins ou modèles en conflit différaient du fait de la présence de coussins dans le dessin ou modèle contesté. La chambre de recours a seulement considéré que la présence de ces coussins ne conduisait pas à produire une impression globale différente entre le dessin ou modèle contesté et le dessin ou modèle antérieur.

36      La requérante fait valoir que la chambre de recours a estimé à tort que les coussins, du fait qu’ils n’étaient pas un élément fixe, n’étaient qu’un accessoire. Il serait indifférent que les coussins soient amovibles et ils joueraient un rôle important pour apprécier le caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

37      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a pris en compte le fait que les coussins n’étaient pas un élément fixe, mais des éléments qui étaient facilement séparés du produit principal, qu’ils étaient souvent vendus et achetés séparément, pour un coût relativement faible en comparaison de celui de la structure du fauteuil. Elle en a déduit que ces facteurs réduisaient l’importance qui pouvait être accordée aux coussins pour l’évaluation de l’impression globale et que l’utilisateur averti accorderait nettement plus d’importance à l’impression globale produite par les structures des fauteuils. La chambre de recours a ajouté que l’utilisateur averti pourrait percevoir les coussins comme un simple accessoire facultatif et qu’ils pourraient difficilement être qualifiés de « partie importante du dessin ou modèle ».

38      La chambre de recours a considéré à juste titre que les coussins, du fait qu’ils ne sont pas fixes, ont une importance moindre dans la perception de l’utilisateur averti, lequel sera plus sensible à la structure générale des fauteuils. Elle a considéré que l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit est dominée par la structure même des fauteuils et non par les coussins, qui peuvent être considérés comme des éléments secondaires. Contrairement à ce que prétend la requérante, il n’est pas indifférent que les coussins soient des éléments amovibles pour apprécier le caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

39      La requérante fait valoir que, du fait que la chambre de recours a examiné le dessin ou modèle contesté comme s’il était dépourvu de coussins, elle a estimé à tort qu’il semblait y avoir une légère différence de distance entre l’assise des fauteuils et le sol dans les dessins ou modèles en conflit, alors que cette différence est importante.

40      Il y a lieu de relever que les vues latérales des dessins ou modèles en conflit révèlent que les assises ne sont pas situées au milieu des cadres rectangulaires formant les côtés des fauteuils, mais qu’elles sont situées à un niveau plus bas. Ainsi, les fauteuils représentés par les dessins ou modèles en conflit ont tous les deux une assise basse par rapport à la structure générale du fauteuil.

41      Certes, un examen plus détaillé des dessins ou modèles en conflit révèle que les assises ne sont pas situées exactement à la même hauteur. Il n’en demeure pas moins que l’impression globale des dessins ou modèles en conflit est qu’il s’agit de fauteuils avec des assises basses et la chambre de recours a donc considéré à juste titre que la différence de distance entre l’assise des fauteuils et le sol dans les dessins ou modèles en conflit était « légère ».

42      Contrairement à ce que soutient la requérante, cette appréciation ne résulte pas de l’absence de prise en compte des coussins qui figurent dans le dessin ou modèle contesté, mais d’une comparaison de la structure des fauteuils représentés par les dessins ou modèles en conflit. Le fait que l’ajout des coussins rehausse l’assise du fauteuil représenté par le dessin ou modèle contesté est donc indifférent à cet égard.

43      Partant, le deuxième grief de la requérante doit être rejeté.

44      Par un troisième grief, la requérante fait valoir que les dessins ou modèles en conflit produisent des impressions globales différentes.

45      En premier lieu, s’agissant des différences entre les dessins ou modèles en conflit, premièrement, la requérante soutient à tort qu’il est clairement perceptible que la distance entre l’assise du fauteuil et le sol dans le dessin ou modèle contesté est plus grande que celle représentée dans le dessin ou modèle antérieur. En effet, il ressort du point 41 ci-dessus que la chambre de recours a constaté à juste titre que la différence de distance entre l’assise des fauteuils et le sol dans les dessins ou modèles en conflit était « légère ».

46      Deuxièmement, l’affirmation de la requérante selon laquelle les accoudoirs du fauteuil représenté par le dessin ou modèle contesté dépassent largement du dossier du fauteuil est erronée. En effet, il ressort clairement du dessin ou modèle contesté reproduit au point 2 ci-dessus que les accoudoirs sont au même niveau que la limite supérieure du dossier et que seul le coussin du dossier dépasse de la structure du fauteuil. La chambre de recours a donc considéré à juste titre que le fait que les accoudoirs étaient au même niveau que les limites supérieures des dossiers des fauteuils constituait un élément de similitude entre les dessins ou modèles en conflit.

47      Troisièmement, la requérante soutient que le fait que le coussin du dossier du fauteuil représenté par le dessin ou modèle contesté dépasse du cadre du fauteuil conduit à ce que celui-ci ne peut être confondu avec un cube et qu’il s’agit donc d’une différence avec le dessin ou modèle antérieur, qui produit une impression de cube parfait. À cet égard, il suffit de constater que la chambre de recours n’a pas fondé son appréciation selon laquelle les dessins ou modèles en conflit produisaient la même impression globale sur le constat qu’ils produisaient tous les deux une impression de cube parfait. La chambre de recours a même rejeté clairement cet argument de la requérante dans la décision attaquée en affirmant que l’impression de cube parfait du dessin ou modèle antérieur ne ressortait pas clairement des vues de celui-ci. Cet élément n’étant pas mentionné parmi les éléments de similitude pris en compte par la chambre de recours, cet argument est inopérant.

48      Quatrièmement, la requérante se contente de rappeler des différences entre les dessins ou modèles en conflit qui ont été pris en compte par la chambre de recours, à savoir que le dessin ou modèle contesté comporte trois coussins qui ne sont pas présents dans le dessin ou modèle antérieur, que les assises et les dossiers des dessins ou modèles en conflit sont composés d’un nombre différent de plaques rectangulaires juxtaposées et que le dessin ou modèle antérieur comporte un espace vide entre l’assise et le dossier du fauteuil.

49      Il ressort de ce qui précède que la requérante n’a pas démontré que la chambre de recours avait commis une erreur dans son appréciation des différences entre les dessins ou modèles en conflit.

50      En second lieu, s’agissant des éléments de similitude entre les dessins ou modèles en conflit pris en compte par la chambre de recours, premièrement, la requérante fait valoir que la structure générale rectangulaire du dessin ou modèle contesté est remise en cause par le fait que le coussin du dossier dépasse du cadre du fauteuil et par la présence d’un coussin cylindrique.

51      À cet égard, la chambre de recours a constaté que la structure du dessin ou modèle contesté était rectangulaire, comme l’avait indiqué la requérante elle-même, et qu’il ressortait des vues du dessin ou modèle antérieur qu’il avait également une structure rectangulaire dans laquelle le côté du fauteuil était plus long que l’avant et que sa hauteur. Ainsi, le constat de la chambre de recours selon lequel les dessins ou modèles en conflit avaient une « structure générale rectangulaire comprenant des cadres rectangulaires servant d’accoudoirs » ne concerne que la structure des fauteuils. La présence des coussins sur cette structure, dans le dessin ou modèle contesté, ne modifie pas le fait qu’il partage avec le dessin ou modèle antérieur une structure formée par deux cadres rectangulaires composant les côtés des fauteuils.

52      Deuxièmement, la requérante soutient que certains éléments similaires pris en compte par la chambre de recours, à savoir, que les hauteurs des cadres sont inférieures aux largeurs, l’existence d’assises plates, de dossiers verticaux plats et de plaques rectangulaires juxtaposées sur les assises, ne sont pas convaincants étant donné qu’ils sont communs à un grand nombre de fauteuils.

53      Il suffit de constater que le fait que des éléments soient communs à un grand nombre de fauteuils est sans influence sur le constat qu’ils sont communs aux fauteuils représentés par les dessins ou modèles en conflit et qu’ils participent donc de la même impression globale produite par ceux-ci.

54      Troisièmement, la requérante fait valoir que les plaques rectangulaires juxtaposées légèrement séparées sur les assises sont différentes dans les dessins ou modèles en conflit en ce qui concerne leur nombre, leur largeur et la distance qui les sépare et qu’elles sont couvertes par des coussins dans le dessin ou modèle contesté.

55      Certes, une vue latérale du dessin ou modèle contesté révèle que, sous les coussins, l’assise du fauteuil est composée de quatre plaques. Il se distingue en cela du dessin ou modèle antérieur par le fait que l’assise du fauteuil représenté par ce dernier est composée de trois plaques.

56      Toutefois, il y a lieu de relever qu’une partie du produit représenté par un dessin ou modèle qui est en dehors du champ de vision de l’utilisateur exerce une influence faible sur la perception qu’a celui-ci du dessin ou modèle en cause (arrêt Boîtier de montre-bracelet, point 19 supra, point 133). Ainsi, le fait que, sous les coussins, l’assise du fauteuil représenté par le dessin ou modèle contesté est composée de plaques n’a que peu d’importance dans l’appréciation de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti. Il en va donc de même du fait que le nombre de plaques est différent dans chacun des dessins ou modèles en conflit.

57      Dès lors, même si la chambre de recours a pu à juste titre prendre en compte comme élément de similitude que les assises des fauteuils représentés par les dessins ou modèles en conflit étaient composées de plaques rectangulaires juxtaposées, cet élément peu visible n’a que peu d’importance dans l’appréciation de l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté.

58      Quatrièmement, la requérante soutient à tort que la présence d’une planche sous les plaques de chaque côté des fauteuils est dictée par des exigences de stabilité et de structure. En effet, il suffit de rappeler que, en l’espèce, la chambre de recours a constaté à juste titre que la liberté du créateur était seulement limitée par le fait que les fauteuils doivent être fonctionnels et inclure une assise, un dossier et deux accoudoirs. La requérante n’a pas établi que la présence de cette planche résultait d’une contrainte technique pour la réalisation d’un fauteuil et le fait que de nombreux fauteuils ne contiennent pas cette planche contredit l’affirmation de la requérante.

59      Enfin, cinquièmement, l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a affirmé à tort que les accoudoirs des fauteuils étaient au même niveau que les limites supérieures des dossiers et qu’ils y étaient reliés doit être rejeté. Comme il a déjà été constaté au point 46 ci-dessus, il ressort clairement des dessins ou modèles en conflit que les accoudoirs des fauteuils sont reliés aux dossiers, ce qui est un élément commun à leurs structures, et que seul le coussin dépasse du dossier du fauteuil représenté par le dessin ou modèle contesté.

60      Il ressort de ce qui précède que la requérante n’a pas démontré que la chambre de recours avait commis une erreur dans son appréciation des éléments de similitude entre les dessins ou modèles en conflit, ni, partant, en considérant que les dessins ou modèles en conflit produisaient la même impression globale sur l’utilisateur averti. Partant, le troisième grief de la requérante doit être rejeté.

61      Dès lors, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant à l’absence de caractère individuel du dessin ou modèle contesté au sens de l’article 6 du règlement n° 6/2002.

62      Il ressort de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le moyen unique soulevé par la requérante.

63      Par ailleurs, il convient de relever que, par ses premier et deuxième chefs de conclusions, l’intervenante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours. Or, l’intervenante soutient que les dessins ou modèles en conflit sont identiques au sens de l’article 5 du règlement n° 6/2002, au motif que leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants. Il y a lieu de considérer que, par ces arguments, l’intervenante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les dessins ou modèles en conflit ne sont pas identiques et qu’elle soutient que la chambre de recours aurait dû accueillir sa demande en nullité sur le fondement de l’article 5 du règlement n° 6/2002 pour absence de nouveauté du dessin ou modèle contesté. Pour autant que ces arguments doivent être compris comme un moyen autonome fondé sur l’article 134, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, il convient de relever que ce moyen est incompatible avec les propres conclusions de l’intervenante et doit être rejeté dès lors qu’elle n’a pas conclu à l’annulation ou à la réformation de la décision attaquée, en vertu de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure [voir arrêt du Tribunal du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, non publié au Recueil, point 34, et la jurisprudence citée].

64      Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

65      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de ce dernier.

66      L’intervenante n’ayant pas conclu à la condamnation de la requérante aux dépens, il y a lieu de prévoir qu’elle supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 4, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sachi Premium-Outdoor Furniture, Lda est condamnée à ses propres dépens ainsi qu’aux dépens de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

3)      Gandia Blasco, SA est condamnée à ses propres dépens.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 février 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.