Language of document : ECLI:EU:C:2022:382

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

12 mai 2022 (*)

« Manquement d’État – Environnement – Directive 2008/50/CE – Qualité de l’air ambiant – Article 13, paragraphe 1, et annexe XI – Dépassement systématique et persistant des valeurs limites fixées pour l’anhydride sulfureux (SO2) dans la zone BG0006 (Sud-Est), Bulgarie – Article 23, paragraphe 1, et annexe XV – Période de dépassement “la plus courte possible” – Mesures appropriées »

Dans l’affaire C‑730/19,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 3 octobre 2019,

Commission européenne, représentée par Mme Y. Marinova et M. E. Manhaeve, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

République de Bulgarie, représentée par Mmes E. Petranova et T. Mitova, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (septième chambre),

composée de Mme I. Ziemele, présidente de la sixième chambre, faisant fonction de président de la septième chambre, MM. T. von Danwitz et A. Kumin (rapporteur), juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République de Bulgarie,

en n’ayant pas respecté, de manière  systématique et persistante, dans la zone BG0006 (Sud-Est), d’une part, à partir de l’année 2007, la valeur limite horaire fixée pour l’anhydride sulfureux (SO2), et, d’autre part, à partir de l’année 2007, sauf au cours des années 2010 et 2012, la valeur limite journalière fixée pour le SO2, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe (JO 2008, L 152, p. 1), et

en n’ayant pas adopté, à partir du 11 juin 2010, de mesures appropriées pour garantir le respect des valeurs limites fixées pour le SO2 dans cette zone, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, et de l’annexe XV, section A, de la directive 2008/50, et notamment à l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 23 paragraphe 1, deuxième alinéa, de cette directive, de veiller à ce que la période de dépassement des valeurs limites susmentionnées de SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est) soit la plus courte possible.

 Le cadre juridique

 La directive 96/62/CE

2        L’article 8 de la directive 96/62/CE du Conseil, du 27 septembre 1996, concernant l’évaluation et la gestion de la qualité de l’air ambiant (JO 1996, L 296, p. 55), intitulé « Mesures applicables dans les zones où les niveaux dépassent la valeur limite », prévoyait, à ses paragraphes 1, 3 et 4 :

« 1.      Les États membres établissent la liste des zones et des agglomérations où les niveaux d’un ou de plusieurs polluants dépassent la valeur limite augmentée de la marge de dépassement.

[...]

3.      Dans les zones et les agglomérations visées au paragraphe 1, les États membres prennent des mesures pour assurer l’élaboration ou la mise en œuvre d’un plan ou programme permettant d’atteindre la valeur limite dans le délai fixé.

Ledit plan ou programme, auquel la population doit avoir accès, contient au moins les informations énumérées à l’annexe IV.

4.      Dans les zones et les agglomérations visées au paragraphe 1, où le niveau de plus d’un polluant est supérieur aux valeurs limites, les États membres fournissent un plan intégré englobant tous les polluants en cause. »

 La directive 1999/30/CE

3        La directive 1999/30/CE du Conseil, du 22 avril 1999, relative à la fixation de valeurs limites pour l’anhydride sulfureux, le dioxyde d’azote et les oxydes d’azote, les particules et le plomb dans l’air ambiant (JO 1999, L 163, p. 41), disposait, à son article 3, intitulé « Anhydride sulfureux » :

« 1.      Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les concentrations d’anhydride sulfureux dans l’air ambiant, évaluées conformément à l’article 7, ne dépassent pas les valeurs limites indiquées au point I de l’annexe I, à partir des dates y spécifiées.

Les marges de dépassement indiquées au point I de l’annexe I s’appliquent conformément à l’article 8 de la directive 96/62/CE.

2.      Les seuils d’alerte relatifs aux concentrations d’anhydride sulfureux dans l’air ambiant sont indiqués au point II de l’annexe I. 

[...] »

4        S’agissant de la protection de la santé humaine, l’annexe I de la directive 1999/30 fixait au 1er janvier 2005 la date à partir de laquelle les valeurs limites pour le SO2 devaient être respectées, à l’exception de la valeur limite pour la protection des écosystèmes, qui a été fixée au 19 juillet 2001, date en vertu de laquelle, selon l’article 12 de cette directive, les États membres devaient mettre en vigueur au plus tard les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à ladite directive.

5        Conformément à l’annexe I, point I, de la directive 1999/30, en ce qui concerne le SO2, les États membres doivent veiller à ce que la valeur limite journalière pour la protection de la santé humaine, de 125 microgrammes par mètre cube (μg/m3), ne soit dépassée plus de trois fois par an et la valeur limite horaire pour la protection de la santé humaine, de 350 μg/m3, ne soit dépassée plus de 24 fois par an.

 La directive 2008/50

6        La directive 2008/50, qui est entrée en vigueur le 11 juin 2008, a remplacé cinq actes législatifs préexistants, relatifs à l’évaluation et à la gestion de la qualité de l’air ambiant, notamment les directives 96/62 et 1999/30, qui ont été abrogées à compter du 11 juin 2010, ainsi qu’il ressort de l’article 31 de la directive 2008/50.

7        Les considérants 17 et 18 de la directive 2008/50 énoncent :

« (17)      Toutes les institutions concernées devraient étudier prioritairement les mesures à adopter au plan communautaire pour réduire les émissions à la source, et notamment pour améliorer l’efficacité de la législation communautaire relative aux émissions industrielles, limiter les émissions d’échappement des moteurs équipant les véhicules utilitaires lourds, réduire davantage, dans les États membres, le niveau autorisé d’émissions des principaux polluants et des émissions liées à l’approvisionnement des véhicules à essence dans les stations service, ainsi que pour contrôler la teneur en soufre des combustibles, y compris les combustibles marins.

(18)      Des plans relatifs à la qualité de l’air devraient être établis pour les zones et agglomérations dans lesquelles les concentrations de polluants dans l’air ambiant dépassent les valeurs cibles ou valeurs limites de qualité de l’air applicables, augmentées, le cas échéant, des marges de dépassement temporaire applicables. Les polluants atmosphériques sont produits par de multiples sources et activités. Pour assurer la cohérence entre les différentes politiques, ces plans relatifs à la qualité de l’air devraient si possible être cohérents et coordonnés avec les plans et programmes établis en application de la directive 2001/80/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 relative à la limitation des émissions de certains polluants dans l’atmosphère en provenance des grandes installations de combustion [(JO 2001, L 309, p. 1)], de la directive 2001/81/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2001, fixant des plafonds d’émission nationaux pour certains polluants atmosphériques (JO 2001, L 309, p. 22),] et de la directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2002 relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement [(JO 2002, L 189, p. 12)]. Il convient également de prendre dûment en considération les objectifs de qualité de l’air ambiant prévus par la présente directive, lorsque des autorisations sont accordées à des activités industrielles conformément à la directive 2008/1/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution [(JO 2008, L 24, p. 8)]. »

8        L’article 1er de la directive 2008/50, intitulé « Objet », dispose, à ses points 1 à 3 :

« La présente directive établit des mesures visant :

1)      à définir et à fixer des objectifs concernant la qualité de l’air ambiant, afin d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs pour la santé humaine et pour l’environnement dans son ensemble ;

2)      à évaluer la qualité de l’air ambiant dans les États membres sur la base de méthodes et de critères communs ;

3)      à obtenir des informations sur la qualité de l’air ambiant afin de contribuer à lutter contre la pollution de l’air et les nuisances et de surveiller les tendances à long terme et les améliorations obtenues grâce aux mesures nationales et communautaire ».

9        L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », prévoit, à ses points 5, 7, 8, 16 à 18 et 24 :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

5)      “valeur limite” : un niveau fixé sur la base des connaissances scientifiques, dans le but d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs sur la santé humaine et/ou l’environnement dans son ensemble, à atteindre dans un délai donné et à ne pas dépasser une fois atteint ;

[...]

7)      “marge de dépassement” : le pourcentage de la valeur limite dont cette valeur peut être dépassée dans les conditions fixées par la présente directive ;

8)      “plans relatifs à la qualité de l’air” : les plans énonçant des mesures visant à atteindre les valeurs limites ou valeurs cibles ;

[...]

16)      “zone” : une partie du territoire d’un État membre délimitée par lui aux fins de l’évaluation et de la gestion de la qualité de l’air ;

17)      “agglomération” : une zone qui constitue une conurbation caractérisée par une population supérieure à 250 000 habitants ou, lorsque la population est inférieure ou égale à 250 000 habitants, par une densité d’habitants au kilomètre carré à établir par les États membres ;

18)      “PM10” : les particules passant dans un orifice d’entrée calibré tel que défini dans la méthode de référence pour l’échantillonnage et la mesure du PM10, norme EN 12 341, avec un rendement de séparation de 50 % pour un diamètre aérodynamique de 10 μm ;

[...]

24)      “oxydes d’azote” : la somme du rapport de mélange en volume (ppbv) de monoxyde d’azote (oxyde nitrique) et de dioxyde d’azote, exprimé en unités de concentration massique de dioxyde d’azote (μg/m3) ;

[...] ».

10      L’article 13 de ladite directive, intitulé « Valeurs limites et seuils d’alerte pour la protection de la santé humaine », énonce, à son paragraphe 1 :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’ensemble de leurs zones et agglomérations, les niveaux d’anhydride sulfureux, de PM10, de plomb et de monoxyde de carbone dans l’air ambiant ne dépassent pas les valeurs limites fixées à l’annexe XI.

En ce qui concerne le dioxyde d’azote et le benzène, les valeurs limites indiquées à l’annexe XI ne peuvent pas être dépassées à partir des dates indiquées à ladite annexe.

Le respect de ces exigences est évalué conformément à l’annexe III.

Les marges de dépassement indiquées à l’annexe XI s’appliquent conformément à l’article 22, paragraphe 3, et à l’article 23, paragraphe 1. »

11      L’article 23 de la directive 2008/50, intitulé « Plans relatifs à la qualité de l’air », dispose, à son paragraphe 1 :

« Lorsque, dans une zone ou agglomération donnée, les niveaux de polluants dans l’air ambiant dépassent toute valeur limite ou toute valeur cible, majorée dans chaque cas de toute marge de dépassement, les États membres veillent à ce que des plans relatifs à la qualité de l’air soient établis pour cette zone ou agglomération afin d’atteindre la valeur limite ou la valeur cible correspondante indiquée aux annexes XI et XIV.

En cas de dépassement de ces valeurs limites après le délai prévu pour leur application, les plans relatifs à la qualité de l’air prévoient des mesures appropriées pour que la période de dépassement soit la plus courte possible. Ils peuvent comporter des mesures additionnelles spécifiques pour protéger les catégories de population sensibles, notamment les enfants.

Ces plans relatifs à la qualité de l’air contiennent au moins les informations énumérées à l’annexe XV, section A, et peuvent aussi inclure les mesures visées à l’article 24. Ils sont transmis à la Commission sans délai, et au plus tard deux ans après la fin de l’année au cours de laquelle le premier dépassement a été constaté.

Lorsque des plans relatifs à la qualité de l’air doivent être élaborés ou mis en œuvre pour plusieurs polluants, les États membres élaborent et mettent en œuvre, s’il y a lieu, des plans intégrés relatifs à la qualité de l’air couvrant tous les polluants concernés. »

12      L’article 27 de cette directive, intitulé « Transmission des informations et des rapports », prévoit :

« 1.      Les États membres veillent à ce que les informations sur la qualité de l’air ambiant soient mises à la disposition de la Commission dans les délais prévus par les mesures d’exécution visées à l’article 28, paragraphe 2.

2.      En tout état de cause, afin d’évaluer spécifiquement le respect des valeurs limites et des niveaux critiques ainsi que la réalisation des valeurs cibles, ces informations sont communiquées à la Commission, au plus tard neuf mois après la fin de chaque année, et comprennent :

a)      les modifications apportées au cours de l’année en question à la liste et à la délimitation des zones et des agglomérations établies en vertu de l’article 4 ;

b)      la liste des zones et des agglomérations dans lesquelles les niveaux d’un ou de plusieurs polluants sont supérieurs aux valeurs limites majorées de la marge de tolérance, s’il y a lieu, ou supérieurs aux valeurs cibles ou aux niveaux critiques ; et, pour ces zones et agglomérations :

i)      les niveaux évalués et, le cas échéant, les dates et périodes auxquelles ces niveaux ont été observés ;

ii)      s’il y a lieu, une évaluation de la part imputable aux sources naturelles et à la remise en suspension de particules provoquée par le sablage ou salage hivernal des routes dans les niveaux observés, déclarés à la Commission conformément aux articles 20 et 21.

3.      Les dispositions des paragraphes 1 et 2 s’appliquent aux informations réunies à partir du début de la deuxième année civile suivant l’entrée en vigueur des mesures d’exécution visées à l’article 28, paragraphe 2. »

13      L’article 33 de ladite directive, intitulé « Transpositions », dispose :

« 1.      Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive avant le 11 juin 2010. Ils transmettent immédiatement à la Commission le texte de ces dispositions.

Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

[...]

3.      Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions essentielles de droit interne qu’ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive. »

14      L’annexe XI de la même directive, intitulée « Valeurs limites pour la protection de la santé humaine », fixe, à sa section B, les valeurs limites suivantes pour le SO2 :

« Période de calcul de la moyenne

Valeur limite

Marge de dépassement

Date à laquelle la valeur limite doit être respectée

Anhydride sulfureux

Une heure

350 μg/m3, à ne pas dépasser plus de 24 fois par année civile

150 μg/m3 (43 %)

[En vigueur depuis le 1er janvier 2005]

Un jour

125 μg/m3, à ne pas dépasser plus de 3 fois par année civile

Néant

[En vigueur depuis le 1er janvier 2005] »


15      Au nombre des informations devant figurer dans les plans relatifs à la qualité de l’air ambiant, au sens de l’article 23 de la directive 2008/50, l’annexe XV, section A, de celle-ci indique :

« 1.      Lieu du dépassement

a)      région ;

b)      ville (carte) ;

c)      station de mesure (carte, coordonnées géographiques).

2.      Informations générales

a)      type de zone (ville, zone industrielle ou rurale) ;

b)      estimation de la superficie polluée (en km2) et de la population exposée à la pollution ;

c)      données climatiques utiles ;

d)      données topographiques utiles ;

e)      renseignements suffisants concernant le type d’éléments “cibles” de la zone concernée qui doivent être protégés.

3.      Autorités responsables

Nom et adresse des personnes responsables de l’élaboration et de la mise en œuvre des plans d’amélioration.

4.      Nature et évaluation de la pollution

a)      concentrations enregistrées les années précédentes (avant la mise en œuvre des mesures d’amélioration) ;

b)      concentrations mesurées depuis le début du projet ;

c)      techniques utilisées pour l’évaluation.

5.      Origine de la pollution

a)      liste des principales sources d’émissions responsables de la pollution (carte) ;

b)      quantité totale d’émissions provenant de ces sources (en tonnes/an) ;

c)      renseignements sur la pollution en provenance d’autres régions.

6.      Analyse de la situation

a)      précisions concernant les facteurs responsables du dépassement (par exemple, transports, y compris transports transfrontaliers, formation de polluants secondaires dans l’atmosphère) ;

b)      précisions concernant les mesures envisageables pour améliorer la qualité de l’air.

7.      Informations sur les mesures ou projets d’amélioration antérieurs au 11 juin 2008

a)      mesures locales, régionales, nationales et internationales ;

b)      effets observés de ces mesures.

8.      Informations concernant les mesures ou projets visant à réduire la pollution adoptés à la suite de l’entrée en vigueur de la présente directive

a)      énumération et description de toutes les mesures prévues dans le projet ;

b)      calendrier de mise en œuvre ;

c)      estimation de l’amélioration de la qualité de l’air escomptée et du délai prévu pour la réalisation de ces objectifs.

9.      Informations sur les mesures ou projets prévus ou envisagés à long terme

10.      Liste des publications, des documents, des travaux, etc. complétant les informations demandées au titre de la présente annexe ».

16      Il résulte de ce qui précède que, en remplaçant la directive 1999/30, la directive 2008/50 n’a pas fixé de nouvelles valeurs limites pour le SO2 et que les obligations incombant aux États membres en vertu des dispositions combinées de l’article 3, paragraphe 1, et de l’annexe I, point I, de la directive 1999/30 ont été maintenues dans les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50. Il est en effet expressément indiqué, à l’annexe XI de cette dernière, que les valeurs limites fixées pour le SO2 sont « en vigueur depuis le 1er janvier 2005 ».

17      En ce qui concerne la République de Bulgarie, l’obligation de respecter les valeurs limites fixées pour le SO2 est donc en vigueur depuis la date de son adhésion à l’Union européenne le 1er janvier 2007.

 La procédure précontentieuse

18      L’analyse du rapport annuel sur la qualité de l’air pour l’année 2007, présenté par la République de Bulgarie, indiquait que la valeur limite horaire, à savoir 350 μg/m3, et la valeur limite journalière, à savoir 125 μg/m3, fixées pour le SO2 n’avaient pas été respectées dans deux zones d’évaluation et de gestion de la qualité de l’air ambiant, à savoir les zones BG0005 (Sud-Ouest) et BG0006 (Sud-Est). Par conséquent, la Commission a adressé, le 26 juin 2009, une lettre de mise en demeure à cet État membre en l’invitant à indiquer les mesures prises pour parvenir à un respect durable de ces valeurs limites et pour empêcher leur dépassement ou limiter la durée de celui-ci.

19      La République de Bulgarie a répondu, par lettre du 26 août 2009, et confirmé que, au cours de l’année 2007, les valeurs limites fixées pour le SO2 dans l’air ambiant avaient été dépassées dans trois communes des zones visées par la lettre de mise en demeure. En outre, elle a indiqué les actions entreprises afin de se conformer aux obligations résultant de la directive 1999/30 au 1er janvier 2007.

20      L’analyse des données existantes à l’époque indiquait que, au cours de l’année 2008, la valeur limite journalière fixée pour le SO2 avait de nouveau été dépassée dans les deux zones BG0005 (Sud-Ouest) et BG0006 (Sud-Est) et que la valeur limite horaire fixée pour le SO2 avait été dépassée dans la zone BG0006 (Sud-Est). Dès lors, la Commission a émis, le 18 mars 2010, un avis motivé, dont la République de Bulgarie a accusé réception le 22 mars 2010.

21      La République de Bulgarie a répondu à cet avis motivé par une lettre du 20 mai 2010 puis par une lettre du 16 mai 2011 contenant des informations complémentaires précisant que, après l’année 2009, pouvait être observée une amélioration sensible de la qualité de l’air ambiant en ce qui concerne le SO2. Elle a indiqué, à cet égard, que, au cours de l’année 2007, les valeurs limites horaire et journalière fixées pour le SO2 ont été dépassées dans trois communes, à savoir Pernik, Galabovo et Dimitrovgrad, la première se trouvant dans la zone BG0005 (Sud-Ouest) et les deux autres dans la zone BG0006 (Sud-Est). Les données pour la zone BG0006 (Sud-Est) auraient montré que, pour l’année 2008, la valeur limite journalière a été respectée, et que, pour l’année 2009, le nombre de dépassements de cette valeur a été presque divisé par deux par rapport aux années précédentes. À Dimitrovgrad, les dépassements de ladite valeur auraient été presque quatre fois moindres que pendant les années précédentes. Pour la période du 1er janvier au 15 avril 2010, les points de contrôle dans les trois communes susmentionnées n’auraient relevé aucun dépassement. En outre, certaines mesures auraient été prises, comme la construction d’installations de désulfuration dans la zone BG0006 (Sud-Est) ainsi que la gazéification et le démantèlement de quatre blocs d’une centrale thermoélectrique dans la zone BG0005 (Sud-Ouest).

22      Toutefois, malgré ces mesures entreprises, les rapports annuels relatifs à la qualité de l’air pour les années 2009 à 2012 incluse auraient montré que le dépassement d’au moins l’une des valeurs limites fixées pour le SO2 avait persisté. Le 21 novembre 2013, la Commission a donc envoyé à la République de Bulgarie une lettre de mise en demeure complémentaire au motif qu’elle n’était pas parvenue à assurer le respect des valeurs limites journalière ou horaire fixées pour le SO2, conformément à l’article 13 de la directive 2008/50, dans les zones BG0005 (Sud-Ouest) et BG0006 (Sud-Est) pendant la période allant de l’année 2007 à l’année 2012 incluse. En outre, la Commission a reproché à cet État membre que, bien que s’étant engagé en faveur de la qualité de l’air et ayant adopté des plans relatifs à la qualité de l’air, celui-ci avait manqué aux obligations lui incombant en vertu des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, et de l’annexe XV, section A, de cette directive, et notamment à son obligation de veiller à ce que la période de dépassement soit la plus courte possible, conformément au deuxième alinéa de cette dernière disposition.

23      La République de Bulgarie a répondu à cette lettre de mise en demeure complémentaire par lettre du 20 janvier 2014, en indiquant que les sources contribuant le plus aux excès d’émissions de SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est) étaient les centrales thermiques les plus importantes de Bulgarie, Maritsa East 2 EAD, Kontur Global Maritsa East 3 AD, AES-3C Maritsa East I EOOD et Brikel EAD. En outre, cet État membre a précisé que, dans la commune de Sliven, la pollution était due en grande partie au secteur domestique et à l’incinération illégale de déchets.

24      Après avoir analysé la réponse de la République de Bulgarie et le dernier rapport annuel relatif à la qualité de l’air présenté par les autorités bulgares le 26 septembre 2014, la Commission a émis, le 26 novembre 2014, un avis motivé complémentaire, dont la République de Bulgarie a accusé réception le 27 novembre 2014, mettant en évidence que cet État membre avait manqué aux obligations lui incombant en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 du fait du non‑respect systématique et persistant, depuis l’année 2007 jusqu’à l’année 2013 incluse au moins, de la valeur limite horaire fixée pour le SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est) et, concernant les années 2007 à 2009, 2011 et 2013, de la valeur limite journalière fixée pour le même polluant. Cet avis motivé complémentaire concluait également que la République de Bulgarie avait manqué aux obligations lui incombant en vertu des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’annexe XV, section A, de cette directive ainsi que, en particulier, à l’obligation de veiller à ce que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible, et que ce manquement persistait. Elle a donc invité la République de Bulgarie à prendre les mesures nécessaires pour se conformer audit avis dans un délai de deux mois à compter de sa réception, délai qui a expiré le 27 janvier 2015.

25      En revanche, étant donné que le rapport relatif à la qualité de l’air visant les données relatives à l’année 2013 indiquait qu’avaient été respectées, dans la zone BG0005 (Sud-Ouest), tant la valeur limite horaire que la valeur limite journalière fixées pour le SO2, la Commission n’a pas maintenu, dans ledit avis motivé complémentaire, l’affirmation d’une violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 dans cette zone.

26      Les autorités bulgares ont répondu au même avis motivé complémentaire par lettre du 26 janvier 2015 et ont fourni des informations complémentaires par lettres datées du 27 février 2015, du 27 avril 2015 ainsi que du 31 juillet 2018.

27      S’agissant de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, les autorités bulgares n’ont pas contesté le non-respect de cette disposition, bien qu’elles aient soutenu que la situation s’était améliorée.

28      En particulier, dans sa réponse du 26 janvier 2015, la République de Bulgarie a reconnu que les données concernant le SO2 pour la période allant du début de l’année 2007 à la fin de l’année 2013 ainsi que les données préliminaires pour l’année 2014, concernant les communes de Galabovo et de Dimitrovgrad, situées dans la zone BG0006 (Sud-Est), indiquaient que les valeurs limites fixées pour ce polluant n’avaient pas été respectées.

29      Les autorités bulgares ont souligné, à cet égard, que le dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 à Galabovo s’expliquait par la présence, dans une région relativement restreinte autour de cette commune, des quatre plus grandes centrales thermiques de Bulgarie, qui sont des centrales au charbon, à savoir Brikel, située dans la commune de Galabovo même, Maritsa East 2, située dans le village de Kovachevo dans la commune de Radnevo, qui est voisine de celle de Galabovo, Kontur Global Maritsa East 3, située dans le village de Mednikarovo dans la commune de Galabovo, ainsi que AES-3C Maritsa East I, également située dans la commune de Galabovo. Bien que ces quatre centrales auraient été équipées progressivement d’installations de désulfuration, ce qui a entraîné une réduction significative des émissions de SO2, la République de Bulgarie n’a pas contesté que les dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2 persistaient.

30      À cet égard, elle a précisé que la principale raison pour ces dépassements à Galabovo, en l’absence de conditions météorologiques défavorables et d’autres sources de pollution, était le non-respect des conditions d’exploitation de certaines des grandes installations de combustion (ci-après les « GIC »), notamment la libération de fumées non traitées, dans la zone concernée, les inspections effectuées par les autorités compétentes ayant permis d’établir que la centrale Brikel rejetait illégalement de telles fumées. Quant à la commune de Dimitrovgrad, la République de Bulgarie a soutenu que, pour la période allant du 1er janvier au 28 février 2015, aucun dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 n’y avait cependant été enregistré. Les données à la disposition de la Commission auraient en outre indiqué qu’il n’y avait pas non plus eu de dépassements au cours des périodes ultérieures. Toutefois, les dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2 subsisteraient dans la commune de Galabovo.

31      Dans sa lettre du 31 juillet 2018, la République de Bulgarie a relevé que la présence de quatre GIC dans une zone relativement restreinte rendait très difficile la détermination tant de la cause réelle de la pollution que de la mesure dans laquelle chaque centrale influençait la qualité de l’air dans la commune de Galabovo.

32      En ce qui concerne l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50, la République de Bulgarie a fait valoir, dans ses réponses, qu’elle avait pris des mesures pour remédier aux dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2, telles que l’information de la population en cas de dépassement de ces valeurs et le renforcement du contrôle de l’exploitation des GIC.

33      Étant donné que le non-respect des valeurs limites horaire et journalière fixées pour le SO2 a persisté, la Commission a considéré que la République de Bulgarie ne respectait toujours pas les obligations qui lui incombent en vertu de la directive 2008/50 et a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

 Sur le premier grief, tiré d’une violation systématique et persistante des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50

 Argumentation des parties

34      Par son premier grief, la Commission fait valoir que la République de Bulgarie a violé l’obligation résultant de l’article 13 de la directive 2008/50, lu en combinaison avec l’annexe XI de celle-ci, du fait du non‑respect systématique et persistant, à partir de l’année 2007, de la valeur limite horaire fixée pour le SO2, et, à partir de l’année 2007, sauf au cours des années 2010 et 2012, de la valeur limite journalière fixée pour ce polluant, dans la zone BG0006 (Sud-Est).

35      À cet égard, la Commission rappelle d’emblée que, conformément à ces dispositions, les États membres sont tenus de veiller à ce que, dans l’ensemble de leurs zones et agglomérations, les niveaux de SO2 ne dépassent pas les valeurs limites fixées dans cette directive, à savoir la valeur limite horaire de 350 μg/m3 à ne pas dépasser plus de 24 fois par année civile et la valeur limite journalière de 125 μg/m3 à ne pas dépasser plus de trois fois par année civile.

36      La Commission soutient que, selon la jurisprudence constante de la Cour, la procédure visée à l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du non-respect par un État membre des obligations que lui imposent le traité FUE ou un acte de droit dérivé. Ainsi, le dépassement des valeurs limites suffit pour constater un manquement aux dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50. Dans ce contexte, la Commission fait valoir que le seul fait qu’un plan relatif à la qualité de l’air a été établi ne saurait être considéré comme une mesure par laquelle un État membre a satisfait aux obligations qui résultent de ces dispositions.

37      À titre de considérations complémentaires concernant les faits, la Commission précise que, en tenant compte des données fournies par la République de Bulgarie, il s’agit d’un dépassement persistant et systématique des valeurs limites fixées pour le SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est), cet État membre n’ayant pas bénéficié d’un report du délai en vertu de l’article 22 de la directive 2008/50 pour se conformer à ces valeurs limites. Ces circonstances n’auraient pas été contestées par cet État membre.

38      La Commission affirme également que les données relatives à la qualité de l’air pour les années 2014 à 2018 doivent être prises en compte dans le cadre de la présente procédure d’infraction. Ces données n’auraient pas été mises à sa disposition à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire, à savoir le 27 janvier 2015, puisqu’elles lui ont été communiquées par la République de Bulgarie respectivement aux mois de septembre des années 2015 à 2019. La Commission rappelle toutefois que, dans le cas d’un recours introduit au titre de l’article 258 TFUE, afin de faire constater un manquement systématique et persistant, la Cour admet qu’elle produise des éléments complémentaires visant, au stade de la procédure contentieuse, à étayer la généralité et la constance du manquement ainsi allégué. Dans ce cas, l’objet du recours en manquement pourrait s’étendre à des faits postérieurs à l’avis motivé complémentaire pour autant que ceux-ci sont de même nature et constitutifs d’un même comportement que les faits visés par cet avis. Or, en l’occurrence, les données des années 2014 à 2018 fournies par les autorités bulgares respectivement aux mois de septembre des années 2015 à 2019 répondraient à cette exigence.

39      La République de Bulgarie rappelle, à titre liminaire, qu’il ressort des données des rapports annuels présentés par elle, que, à la date de l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire, un dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 avait seulement été enregistré à un point de prélèvement dans la zone BG0006 (Sud-Est), situé sur le territoire de la commune de Galabovo. En revanche, sur tout le reste du territoire relevant de cette zone, après l’année 2014, ces valeurs limites auraient été respectées.

40      À cet égard, la République de Bulgarie déduit de la jurisprudence résultant des arrêts du 22 février 2018, Commission/Pologne (C‑336/16, EU:C:2018:94), ainsi que du 26 juin 2019, Craeynest e.a. (C‑723/17, EU:C:2019:533), que le premier grief, en ce que la Commission lui reproche une violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 en raison d’un non-respect systématique des valeurs limites fixées pour le SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est), sans préciser le seul endroit de cette zone où a été enregistré un dépassement de ces valeurs après le 27 janvier 2015, est non fondé et qu’il est impossible de déduire du dépassement desdites valeurs au point situé à Galabovo qu’il y a eu violation de cette disposition dans toute cette zone.

41      En outre, toujours dans ce contexte, la République de Bulgarie fait valoir, en substance, qu’il résulte de l’article 120, sous c), du règlement de procédure de la Cour et de la jurisprudence pertinente de celle-ci que toute requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et contenir l’exposé sommaire des moyens invoqués au soutien du recours, cette indication devant être suffisamment claire et précise pour permettre au défendeur de préparer sa défense et à la Cour d’exercer son contrôle. Il en découlerait que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours en application de l’article 258 TFUE est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête, afin de permettre à l’État membre concerné et à la Cour d’appréhender exactement la portée de la violation du droit de l’Union reprochée, condition nécessaire pour que ledit État membre puisse faire valoir utilement ses moyens de défense et pour que la Cour puisse vérifier l’existence du manquement allégué. De surcroît, une décision au titre de l’article 258, paragraphe 2, TFUE devrait établir un manquement réel de la part d’un État membre, tel qu’il existe objectivement dans la réalité.

42      En ce qui concerne plus particulièrement le dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 dans la zone dans laquelle est située la commune de Galabovo, la République de Bulgarie invoque l’article 36 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), qui dispose que l’Union reconnaît et respecte l’accès aux services d’intérêt économique général tel qu’il est prévu par les législations et les pratiques nationales, conformément aux traités, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union. L’importance que l’Union accorde aux services d’intérêt général ressortirait également de l’article 14 TFUE et du protocole (no 26) sur les services d’intérêt général, annexé au traité UE et au traité FUE, qui déterminent leur place dans les valeurs communes de l’Union.

43      À cet égard, la République de Bulgarie rappelle avoir indiqué à plusieurs reprises que le problème est dû à un héritage historique étant donné que, dans le bassin charbonnier de Maritsa iztok, se concentrent, sur une petite superficie, les centrales thermiques les plus importantes de Bulgarie, lesquelles constituent la principale source d’émissions de SO2 dans cette zone. En même temps, ces entreprises fourniraient des services d’intérêt social et économique à la population, à savoir de l’électricité et de la chaleur, et elles figurent parmi les principaux employeurs dans la région de Stara Zagora, constituant ainsi la principale source de revenus pour une grande partie de la population de cette région.

44      Ces centrales thermiques fonctionneraient au lignite, Mini Maritsa Iztok EAD exploitant le gisement le plus important de Bulgarie, lequel alimente quatre centrales thermiques de production d’électricité ainsi qu’une usine de fabrication de briquettes de lignite. Au cours de l’année 2019, il aurait été constaté que les réserves de charbon de la Bulgarie sont suffisantes pour assurer la production d’électricité pour les 60 prochaines années. Les centrales thermiques utilisant du charbon local assureraient environ 48 % de la production d’électricité et garantiraient la sécurité énergétique de la Bulgarie et la compétitivité de son économie. Ces centrales, classées, selon la législation nationale, en tant qu’installations stratégiques, feraient partie de l’infrastructure sensible dans le secteur de l’énergie et auraient donc une importance fondamentale pour la sécurité énergétique de la Bulgarie. Leur endommagement ou destruction aurait des conséquences graves sur des fonctions sociales vitales, la santé, la sécurité et le bien-être économique ou social de la population, de sorte que l’arrêt de leur exploitation aurait des conséquences néfastes pour cette dernière.

45      Au vu de toutes ces considérations, la République de Bulgarie demande à la Cour de rejeter comme non fondé le premier grief. Pour le cas où la Cour n’accepterait pas les arguments avancés par elle, elle demande de ne faire droit que partiellement à ce grief, à savoir uniquement pour ce qui concerne la région de Galabovo, et de le rejeter pour le surplus.

46      Enfin, la République de Bulgarie avance qu’il est possible, sur la base des données transmises à la Commission à l’égard du total des émissions de SO2 en tonnes par année en ce qui concerne les centrales thermiques Brikel, Maritsa East 2, Kontur Global Maritsa East 3 et AES-3C Maritsa East I, de conclure que la baisse des émissions de SO2 de ces centrales thermiques est de 91 %.

47      Dans son mémoire en réplique, la Commission rétorque, en ce qui concerne l’argument avancé par la République de Bulgarie selon lequel il est impossible de déduire du dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 à un seul point de prélèvement qu’il y a eu violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 dans toute la zone BG0006 (Sud-Est), que, en vertu de l’article 4 de cette directive, dans sa requête, elle a précisé que la République de Bulgarie avait enfreint les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de ladite directive du fait du non-respect systématique et persistant, dans la zone BG0006 (Sud-Est), des valeurs limites horaire et journalière pour le SO2, en indiquant expressément que ces dépassements persistants ne concernaient que la commune de Galabovo.

48      La Commission fait valoir que la République de Bulgarie en tire toutefois une conclusion erronée quand celle-ci affirme, dans son mémoire en défense, que la détermination de la moyenne des valeurs mesurées à tous les points de prélèvement d’une zone ou d’une agglomération ne permettrait pas d’établir le niveau d’exposition de la population en général aux polluants en cause. La Commission souligne que, conformément à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, le respect des valeurs limites des substances polluantes doit être assuré, par chacun des États membres, au niveau des zones et des agglomérations et non par rapport à la population concernée par les dépassements de ces valeurs limites.

49      Partant, selon la Commission, l’existence de dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2 dans une partie déterminée de la zone concernée, qui a été constatée sur la base de mesures à un seul point de prélèvement, est suffisante pour conclure à une violation des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50, même si aucun dépassement de ces valeurs n’est recensé dans le reste de cette zone à d’autres points de prélèvement. Cette interprétation serait pleinement conforme à la directive 2008/50 et à l’arrêt du 26 juin 2019, Craeynest e.a. (C‑723/17, EU:C:2019:533, points 67 et 68), qui, contrairement à ce que prétend la République de Bulgarie, ne fixerait pas un niveau déterminé d’exposition de la population aux polluants, mesuré en un certain nombre de points, en tant que seuil devant nécessairement être atteint pour que soit établie une violation de ces dispositions.

50      Selon la Commission, l’interprétation inverse, défendue par la République de Bulgarie, ne trouve aucun soutien dans la directive 2008/50. D’après les conditions relatives à la macro-implantation des points de prélèvement, figurant à l’annexe III, section B, de cette directive, la représentativité de l’exposition de la population ne serait pertinente que pour déterminer l’implantation des points de prélèvement. Ladite directive n’établirait cependant aucun lien entre la question de savoir si les valeurs limites fixées pour le SO2 ont été dépassées et le nombre de points auxquels des dépassements ont été recensés ou auxquels il existe une exposition spécifique de la population aux polluants qui peut être déduite des dépassements mesurés. Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, les États membres devraient veiller à ce que, dans leurs zones, les niveaux de SO2 ne dépassent pas les valeurs limites fixées à l’annexe XI de cette directive, ces valeurs étant absolues. La République de Bulgarie devrait donc veiller à ce que lesdites valeurs limites soient respectées dans la zone BG0006 (Sud-Est) dans son ensemble, y compris dans la commune de Galabovo, qui en fait partie.

51      S’agissant du caractère systématique et persistant du non-respect des valeurs limites fixées pour le SO2, la Commission fait valoir que les circonstances relevées par la République de Bulgarie, sur la base desquelles elle demande à la Cour de rejeter le recours comme non fondé, ne permettent pas de conclure à l’absence de violation des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50.

52      La Commission rappelle, à cet égard, qu’elle a indiqué dans sa requête que les dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2 étaient principalement dus, comme le soulignent également les autorités bulgares, aux quatre plus grandes centrales thermiques de Bulgarie et qu’elle a analysé toutes les mesures identifiées à cet égard par ces autorités. Elle n’aurait toutefois pas abordé, dans cette requête, l’hypothèse de la cessation des activités de ces centrales, dans la mesure où la directive 2008/50 laisse toute liberté aux États membres pour déterminer les mesures à prendre au niveau national afin de parvenir au résultat qu’elle impose, à savoir l’absence de dépassement de ces valeurs limites dès que possible. La République de Bulgarie n’aurait toutefois pas atteint ce résultat.

53      Dans ce contexte, cette institution souligne que la directive 2008/50 n’établit pas de dérogations à l’obligation de respecter les valeurs limites fixées pour le SO2, dérogations qui seraient fondées sur la source des émissions, ni un traitement spécial des entreprises susceptibles de présenter une importance sociale et économique particulière pour l’État membre concerné.

54      La directive 2008/50 fixerait des concentrations maximales de polluants dans l’air ambiant, indépendamment de leur source, et ne prévoirait pas d’intérêt public, notamment économique, qui primerait sur l’obligation de respecter les valeurs limites fixées pour les polluants. Indépendamment de la question de savoir si les entreprises concernées peuvent être considérées comme des fournisseurs de services d’intérêt économique général, ni la Charte ni les dispositions du traité FUE ne prévoient, en tant que telles, de dérogations au respect du droit de l’Union en matière de protection de l’environnement par de telles entreprises. L’article 37 de la Charte, consacré à la protection de l’environnement, indiquerait expressément qu’un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de sa qualité doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés conformément au principe du développement durable.

55      La République de Bulgarie, dans son mémoire en duplique, déplore l’approche formaliste de la Commission consistant à déduire du dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 dans une seule région d’une zone donnée une violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 également dans le reste de la zone, où les niveaux de SO2 sont conformes à ces valeurs. La division d’un État membre en zones et/ou en agglomérations est destinée à faciliter l’appréciation et la gestion de la qualité de l’air ambiant, mais ne doit pas nécessairement constituer une base pour l’approche effectuée par la Commission.

56      Dans ce contexte, la République de Bulgarie affirme qu’il ressort de l’arrêt du 26 juin 2019, Craeynest e.a. (C‑723/17, EU:C:2019:533, points 66 à 68), que, si le dépassement d’une valeur limite à un seul et unique point de prélèvement suffit pour qu’il y ait violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50, alors, l’absence de dépassement des valeurs limites à un point donné suffit pour que soit respectée cette disposition. Dès lors, la violation de ladite disposition doit être examinée seulement concernant le territoire de la commune de Galabovo, qui est le seul point où ont été enregistrés des dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2.

57      En outre, la République de Bulgarie relève qu’il ressort des considérants 1, 2, 5, 6 et 10 à 12 ainsi que de l’article 1er et de l’article 2, points 5 et 9 à 11, de la directive 2008/50 que l’exposition de la population et des écosystèmes à la pollution n’est pas seulement importante pour déterminer l’implantation des points de prélèvement. La Cour aurait jugé que l’objectif de cette directive est de protéger la santé humaine et l’environnement et que ladite directive prévoit donc, à cette fin, des mesures permettant de lutter contre les émissions de polluants à la source. Conformément à cet objectif, il conviendrait de déterminer la pollution de l’air effective à laquelle la population ou une partie de celle-ci est exposée et de garantir que des mesures appropriées soient prises afin de combattre les sources de cette pollution.

58      Enfin, la République de Bulgarie fait valoir que les États membres disposent d’une liberté d’appréciation quant aux mesures à prendre au niveau national afin d’assurer le respect des exigences de la directive 2008/50. Toutefois, ils devraient exercer cette liberté de façon à ne pas limiter d’autres droits fondamentaux de la population. Ainsi, afin de ne pas porter atteinte à d’autres droits sociaux et économiques fondamentaux des citoyens, l’État membre concerné ne pourrait pas prendre de mesures afin de faire cesser les dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2 dans les plus brefs délais, si cela aboutit à l’arrêt de l’activité des principales sources de pollution au SO2 dans la région concernée, à savoir les centrales thermiques.

59      Dans ce contexte, la République de Bulgarie relève que l’absence de dérogation expresse à l’obligation de respecter les valeurs limites pour le SO2, fondée sur la source des émissions, n’est pas une raison pour ne pas accepter les considérations d’un État membre concernant la sécurité énergétique, la sécurité, la sûreté ainsi que le bien-être économique et social de la population. Atteindre l’objectif de réduction des émissions à un niveau inférieur aux valeurs limites serait un processus qui, dans certaines situations, peut s’avérer difficile. À cet égard, la République de Bulgarie soutient que le délai nécessaire pour atteindre des niveaux de pollution de l’air inférieurs aux valeur limites en cause dépend de la situation au cas par cas et doit être apprécié en fonction de celle-ci.

 Appréciation de la Cour

60      À titre liminaire, il convient de relever, en premier lieu, que la Commission reproche à la République de Bulgarie d’avoir manqué, de manière systématique et persistante, aux obligations découlant des dispositions combinées de l’article 13 et de l’annexe XI de la directive 2008/50, dans la zone visée par le présent recours, à partir du 1er janvier 2007 et jusqu’à la date d’échéance du délai indiqué dans l’avis motivé complémentaire, à savoir le 27 janvier 2015. Or, dans la mesure où une partie de cette période se situe avant la date à laquelle les États membres étaient tenus de mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à ladite directive, fixée au 11 juin 2010, voire même avant la date d’entrée en vigueur de celle-ci, à savoir le 11 juin 2008, il convient de souligner que la Cour a déjà précisé que les griefs tirés des dispositions combinées de l’article 13 et de l’annexe XI de la directive 2008/50 sont recevables également pour la période allant du 1er janvier 2005 au 11 juin 2010, dès lors que les obligations prévues par lesdites dispositions trouvent leur origine dans la directive 1999/30, qui a été remplacée par la directive 2008/50, en particulier les dispositions combinées de l’article 3 de la directive 1999/30 et de l’annexe I de celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, points 65].

61      En second lieu, il convient de relever que, afin d’étayer la généralité et la constance du manquement reproché, la Commission s’appuie, dans sa requête, sur les données relatives à la qualité de l’air pour les années 2014 à 2018, qui lui ont été transmises par la République de Bulgarie conformément à l’article 27 de la directive 2008/50 respectivement au mois de septembre de chacune des années 2015 à 2019. Si ces données constituent ainsi des faits intervenus postérieurement à la date d’expiration du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire, il n’en reste pas moins qu’ils sont de même nature et constitutifs du même comportement que les faits exposés dans cet avis motivé, de telle sorte que l’objet du présent recours peut s’étendre à ceux-ci [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 66 et jurisprudence citée].

62      Ces précisions liminaires étant faites, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 1er, point 1, de la directive 2008/50, celle-ci établit des mesures visant à définir et à fixer des objectifs concernant la qualité de l’air ambiant, afin d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs pour la santé humaine et pour l’environnement dans son ensemble. Dans ce cadre, l’article 13, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive prévoit que les États membres veillent à ce que, dans l’ensemble de leurs zones et de leurs agglomérations, les niveaux, notamment, de SO2 dans l’air ambiant ne dépassent pas les valeurs limites fixées à l’annexe XI de ladite directive.

63      Il convient de rappeler que le grief tiré d’une violation de cet article 13 doit être apprécié en tenant compte de la jurisprudence constante de la Cour aux termes de laquelle la procédure prévue à l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du non-respect par un État membre des obligations que lui imposent le traité FUE ou un acte de droit dérivé [arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 77 et jurisprudence citée].

64      La Cour a, déjà à maintes reprises, souligné que le fait que sont dépassées les valeurs limites fixées pour les polluants dans l’air ambiant suffit en lui-même pour pouvoir constater un manquement aux dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 [voir arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 78 et jurisprudence citée].

65      Or, en l’espèce, les données résultant des rapports annuels relatifs à la qualité de l’air, présentées par la République de Bulgarie en vertu de l’article 27 de la directive 2008/50, montrent que, de l’année 2007 à l’année 2018 incluse, la valeur limite horaire fixée pour le SO2 et, de l’année 2007 à 2018 incluse, à l’exception des années 2010 et 2012, la valeur limite journalière fixée pour ce polluant ont été régulièrement dépassées dans la zone BG0006 (Sud-Est).

66      Plus particulièrement, il résulte de ces données que la valeur limite journalière de 125 μg/m3, qui ne doit pas être dépassée plus de trois fois par an, a été dépassée 26 fois au cours de l’année 2007, 28 fois au cours de l’année 2008, onze fois au cours de l’année 2009, six fois au cours de l’année 2011, cinq fois au cours de l’année 2013, quatre fois au cours de l’année 2014, onze fois au cours de l’année 2015, neuf fois au cours de l’année 2016, quinze fois au cours de l’année 2017 et sept fois au cours de l’année 2018. Partant, sauf au cours des années 2013 et 2014, le nombre de dépassements tolérés de trois fois par an a été, dans la période de référence, toujours dépassé de 100 %. Même si, à partir de l’année 2013 une tendance à la baisse peut être constatée, celle-ci est interrompue toutefois au cours des années 2015 et 2017, qui ont connu un nombre de dépassements excessif.

67      À l’égard de la valeur limite horaire de 350 μg/m3, qui ne doit pas être dépassée plus de 24 fois par an, il résulte desdites données que chaque année de la période concernée, un dépassement significatif du nombre de dépassements tolérés peut être constaté. Ainsi, cette valeur a été dépassée 189 fois au cours de l’année 2007, 167 fois au cours de l’année 2008, 80 fois au cours de l’année 2009, 32 fois au cours de l’année 2010, 73 fois au cours de l’année 2011, 48 fois au cours de l’année 2012, 57 fois au cours de l’année 2013, 83 fois au cours de l’année 2014, 118 fois au cours de l’année 2015, 85 fois au cours de l’année 2016, 117 fois au cours de l’année 2017 et 72 fois au cours de l’année 2018. Il en résulte que la valeur limite horaire a été dépassée au début de la période référence, au cours de l’année 2007, presque sept fois de plus que les 24 fois tolérées et, au cours de la meilleure année, 0,3 fois de plus que ces 24 fois. Contrairement à la valeur limite journalière, une nette tendance à la baisse ne peut pas être constatée. Au contraire, il résulte des données en cause que la concentration de SO2 après l’année 2010, où le dépassement est le plus bas, est beaucoup plus élevée, avec un dépassement même excessif au cours des années 2015 et 2017.

68      Il en résulte que les dépassements ainsi constatés doivent être considérés comme persistants et systématiques, sans que la Commission soit tenue d’apporter des preuves supplémentaires à cet égard [voir, par analogie, arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 82 et jurisprudence citée].

69      À cet égard, il convient de rappeler qu’un manquement peut, selon une jurisprudence constante de la Cour, demeurer systématique et persistant en dépit d’une éventuelle tendance partielle à la baisse mise en évidence par les données recueillies, qui n’aboutit toutefois pas à ce que l’État membre concerné se conforme aux valeurs limites au respect desquelles il est tenu [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 83 et jurisprudence citée]. Or, tel est le cas s’agissant des années 2007 à 2018 en cause en l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 65 à 67 du présent arrêt, les données présentées par la République de Bulgarie à cet égard ayant, de surcroît, trait au total des émissions de SO2 en tonnes par année et non au respect des valeurs limites fixées pour ce polluant par la directive 2008/50.

70      Dans ce contexte, il y a lieu de rejeter également l’argument, avancé par la République de Bulgarie, selon lequel le premier grief est dépourvu de fondement en ce que la Commission déduit du dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 au seul point situé à Galabovo qu’il y a eu violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 dans toute la zone BG0006 (Sud-Est), qui comprend également d’autres régions, dans lesquelles les niveaux de SO2 sont cependant conformes aux normes établies par cette directive.

71      À cet égard, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 64 du présent arrêt, le fait que sont dépassées les valeurs limites fixées pour les polluants dans l’air ambiant suffit en lui-même pour que puisse être constaté un manquement aux dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 [voir arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 78 et jurisprudence citée].

72      En outre, la violation de ces dispositions est examinée dans ce contexte au niveau des zones et des agglomérations, le dépassement des valeurs limites devant être analysé pour chaque zone ou agglomération sur la base des relevés effectués par chaque station de surveillance. La Cour a jugé, à cet égard, que l’article 13, paragraphe 1, et l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 doivent être interprétés en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dans laquelle ces dispositions s’inscrivent, en ce sens que, pour constater le dépassement d’une valeur limite fixée à l’annexe XI de cette directive pour la moyenne calculée par heure ou par jour, il suffit qu’un niveau de pollution supérieur à cette valeur soit mesuré à un point de prélèvement isolé [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 86 et jurisprudence citée].

73      Si la République de Bulgarie tire de cette jurisprudence la conclusion que la détermination de la moyenne des valeurs mesurées à tous les points de prélèvement d’une zone ou d’une agglomération ne permettrait pas d’établir le niveau d’exposition de la population en général aux polluants en cause, il convient de rappeler que cette jurisprudence ne fixe pas de niveau déterminé d’exposition de la population à ces polluants se traduisant en un certain nombre de points de prélèvement en tant que seuil qui doit nécessairement être atteint pour que soit établie une violation desdites dispositions. En outre, une telle interprétation ne trouve aucun fondement dans la directive 2008/50, l’existence d’une violation des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 découlant du fait même que les valeurs limites qui y sont fixées sont dépassées dans la zone concernée.

74      Dès lors, l’argument également avancé à cet égard par la République de Bulgarie, sans toutefois contester la recevabilité du présent recours, tiré d’une violation de l’article 120 du règlement de procédure ainsi que de l’article 258 TFUE, en raison du manque de précision du recours en ce qui concerne l’objet du litige et de la présentation incohérente des griefs, notamment en ce qui concerne le non-respect systématique des valeurs limites fixées pour le SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est), sans que la Commission ait précisé le seul endroit de cette zone où a été enregistré un dépassement de ces valeurs après le 27 janvier 2015, doit également être rejeté.

75      S’agissant de l’argument de la République de Bulgarie, selon lequel les quatre centrales thermiques, qui se trouvent dans la zone visée par le présent recours et qui font partie de l’infrastructure sensible de la Bulgarie, ont une importance particulière non seulement pour le bien‑être économique et social de la population locale, mais également pour celle de toute la Bulgarie, de sorte que l’arrêt de leur exploitation aurait des conséquences néfastes pour la population, il convient de constater que, d’une part, la Commission n’est pas habilitée, sur la base de la directive 2008/50, à demander la fermeture de telles installations, cette directive ne fixant que les concentrations maximales de polluants dans l’air ambiant et les conséquences en cas de leur dépassement.

76      D’autre part, il convient de relever que les valeurs limites fixées dans la directive 2008/50 doivent être respectées indépendamment de la source des polluants. Cette directive ne prévoit en tant que dérogation au respect de ces valeurs aucun intérêt public, ni économique, ni social ou sur le plan de la sécurité. Dans ce contexte, ainsi qu’il ressort du point 63 du présent arrêt, la procédure visée à l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du non-respect par un État membre des obligations que lui imposent le traité FUE ou un acte de droit dérivé. Le fait que sont dépassées les valeurs limites fixées pour les polluants dans l’air ambiant suffit ainsi pour constater un manquement aux dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 [voir arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, points 77 et 78 ainsi que jurisprudence citée].

77      De surcroit, il convient de rappeler que la Cour a déjà constaté que, dès lors que le constat objectif du non-respect par un État membre des obligations que lui imposent le traité FUE ou un acte de droit dérivé a été établi, il est sans pertinence que le manquement résulte de la volonté de l’État membre auquel il est imputable, de sa négligence ou bien encore de difficultés techniques auxquelles celui-ci aurait été confronté. Par conséquent, l’argument de la République de Bulgarie relatif à sa situation socio-économique ou en matière de sécurité de l’approvisionnement ne saurait être retenu [voir, en ce sens, arrêts du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie, C‑488/15, EU:C:2017:267, points 76 et 77, ainsi que du 24 octobre 2019, Commission/France (Dépassement des valeurs limites pour le dioxyde d’azote), C‑636/18, EU:C:2019:900, points 42 et 43].

78      Il résulte de ce qui précède que le premier grief doit être accueilli.

 Sur le second grief, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec l’annexe XV, section A, de celle-ci

 Argumentation des parties

79      Par son second grief, la Commission fait valoir que la République de Bulgarie a violé l’obligation résultant de l’article 23 de la directive 2008/50, lu seul et en combinaison avec l’annexe XV, section A, de celle-ci, dans la mesure où, à partir du 11 juin 2010, cet État membre n’a pas adopté, dans ses plans relatifs à la qualité de l’air, de mesures appropriées pour faire en sorte que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible.

80      La Commission souligne, à titre liminaire, que l’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2008/50 instaure un lien direct entre, d’une part, le dépassement des valeurs limites prévues par les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de cette directive et, d’autre part, l’établissement des plans relatifs à la qualité de l’air.

81      Il convient, selon la Commission, dans ce cadre, de procéder à une analyse au cas par cas des plans relatifs à la qualité de l’air établis par l’État membre concerné pour vérifier si ceux-ci sont en conformité avec l’article 23 de la directive 2008/50. Dans le cadre de cette appréciation, bien que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation pour la détermination des mesures à adopter, celles-ci doivent, en tout état de cause, permettre que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le polluant concerné soit la plus courte possible.

82      Afin de déterminer si un plan relatif à la qualité de l’air prévoit des mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le polluant concerné soit la plus courte possible, la Commission fait valoir qu’il convient de tenir compte de plusieurs facteurs, déduits, notamment, de la jurisprudence pertinente de la Cour.

83      Premièrement, le dépassement systématique et persistant des valeurs limites fixées pour un polluant pendant plusieurs années démontrerait, en soi, sans qu’il soit besoin d’examiner de manière détaillée le contenu des plans relatifs à la qualité de l’air établis par l’État membre concerné, que cet État membre n’a pas mis à exécution des mesures appropriées et efficaces pour que la période de dépassement de ces valeurs limites soit la plus courte possible.

84      Deuxièmement, il conviendrait de tenir compte du niveau absolu du dépassement desdites valeurs limites. Plus la durée d’un dépassement d’une ampleur importante est longue, plus celui-ci indiquerait l’inefficacité des mesures déjà adoptées en vue de l’amélioration de la qualité de l’air.

85      Troisièmement, la durée des futurs dépassements estimés des valeurs limites fixées pour le polluant concerné devrait également être prise en considération lors de l’évaluation des plans relatifs à la qualité de l’air, un délai particulièrement long ne pouvant être justifié que par des circonstances exceptionnelles.

86      Quatrièmement, une tendance à la hausse ou l’absence de variations substantielles des niveaux de concentration qui sont déjà supérieurs aux valeurs limites autorisées par la directive 2008/50 constituerait un élément additionnel indiquant le caractère non approprié des mesures prises.

87      Cinquièmement, un dépassement de ces valeurs limites sur une longue durée constituerait un indice important du fait que l’État membre concerné n’a pas rempli l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50.

88      Sixièmement, il devrait être tenu compte du contenu formel des plans relatifs à la qualité de l’air, en particulier du point de savoir si ceux-ci contiennent toutes les informations requises à l’annexe XV, section A, de la directive 2008/50.

89      Septièmement, le contenu matériel des plans relatifs à la qualité de l’air, en particulier l’adéquation entre le diagnostic posé dans ces plans et les mesures envisagées, l’analyse de la totalité des mesures possibles et leur nature contraignante ou seulement incitative ainsi que les sources de financement pour leur mise en œuvre seraient des facteurs dont il faudrait tenir compte dans le cadre de l’évaluation desdits plans.

90      À titre de considérations complémentaires concernant les faits, la Commission réaffirme que les données disponibles concernant les valeurs de SO2, l’analyse du plan relatif à la qualité de l’air pour la zone concernée et les autres mesures notifiées par les autorités bulgares corroborent le bien-fondé du second grief.

91      Elle fait valoir que les données disponibles indiquent un non-respect systématique et persistant, à partir de l’année 2007, des valeurs limites fixées pour le SO2 dans la zone BG0006 (Sud-Est). Ces valeurs limites auraient été dépassées de façon continue durant la période allant de l’année 2007 à l’année 2018, sauf la valeur limite journalière au cours des années 2010 et 2012. Par conséquent, au cours de l’année 2018, soit près de douze ans après que l’obligation de respecter les valeurs limites fixées pour le SO2 est entrée en vigueur pour la République de Bulgarie, le dépassement existerait toujours et la violation du droit de l’Union revêtirait donc un caractère systématique et persistant.

92      En outre, la Commission soutient que la tendance au dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 est stable. Même si les données révèlent une tendance à la baisse à certaines périodes, celle-ci ne perdurerait pas. Ainsi, à titre d’exemple, après que le nombre d’heures pour lesquelles la concentration de SO2 était supérieure à 350 μg/m3 est tombé de 189 heures au cours de l’année 2007 à 32 heures au cours de l’année 2010, il aurait de nouveau augmenté à partir de l’année 2010, pour atteindre 117 heures au cours de l’année 2017. Compte tenu de l’ampleur du dépassement, les baisses périodiques seraient manifestement insuffisantes pour que les valeurs limites fixées pour le SO2 puissent être respectées dans un avenir proche.

93      Concernant le niveau de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2, la Commission fait valoir que, au cours de l’année 2017, les valeurs enregistrées montraient un nombre de dépassements des valeurs limites horaires près de cinq fois supérieur au nombre autorisé, à savoir 117 heures au lieu de la valeur limite de 24 heures, et un nombre de dépassements des valeurs limites journalières cinq fois supérieur au nombre autorisé, à savoir15 jours au lieu de la valeur limite de 3 jours. Au cours de l’année 2018, il y aurait eu une diminution du nombre de dépassements, qui a été ramené à 72 heures et à 7 jours respectivement, mais cela serait encore respectivement trois fois et deux fois plus que ce qui est autorisé. En outre, ces baisses n’auraient pas présenté un caractère durable jusqu’à présent.

94      Ces données sont, selon la Commission, en elles-mêmes un indice que la République de Bulgarie n’a pas pris les mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible. L’analyse du plan relatif à la qualité de l’air et des mesures notifiées par cet État membre confirmerait cette constatation.

95      À la date considérée, à savoir le 27 janvier 2015, et à défaut de mention de tout autre plan par les autorités bulgares, le plan pertinent serait le « Programme visant à réduire les niveaux de polluants et à respecter les valeurs admissibles de substances nocives dans l’air ambiant » de la commune de Galabovo pour la période allant de l’année 2011 à l’année 2013, adopté le 18 août 2011 (ci-après le « plan de 2011 »). À titre liminaire, la Commission note que le plan de 2011 est incomplet au regard des exigences de l’annexe XV de la directive 2008/50, dans la mesure où il n’y a pas d’estimation de l’amélioration de la qualité de l’air escomptée ni du délai prévu pour la réalisation des objectifs poursuivis.

96      En tant que mesures spécifiques visant à réduire les concentrations de SO2 présentées dans le plan de 2011, sont, selon la Commission, mentionnées la mise à jour des ordonnances municipales concernant la qualité de l’air ambiant, des projets de rénovation de bâtiments et de construction d’installations produisant de l’énergie de substitution, une campagne d’information sur la qualité des combustibles utilisés et sur leur impact sur la qualité de l’air ambiant, ainsi que sur l’efficacité énergétique des bâtiments et son impact sur la consommation de combustibles, l’extension du réseau de chauffage urbain, la limitation des émissions des usines manufacturières grâce à un soutien dans le cadre des compétences des administrations municipales ainsi que l’arrêt de l’exploitation de la centrale de combustion Brikel.

97      La Commission soutient, à cet égard, que, si une partie des mesures prévues pourrait avoir un effet positif sur les concentrations de SO2, les mesures annoncées sont toutefois trop vagues et trop générales pour lutter efficacement contre la pollution atmosphérique dans la zone concernée et que, à la date de la rédaction de la requête, les autorités bulgares n’ont toujours pas fourni d’informations supplémentaires précises sur leur mise en œuvre. Elles n’auraient donné aucune information sur les mises à jour adoptées concernant les ordonnances municipales et il ne serait donc toujours pas clairement établi si le financement des travaux de rénovation des bâtiments et de gazéification ainsi que d’extension du réseau de chauffage urbain était assuré, ni combien de bâtiments étaient concernés par ces mesures ou si les habitudes de chauffage de la population ont évolué à la suite des campagnes d’information.

98      En ce qui concerne plus particulièrement la centrale de combustion Brikel, la Commission soutient qu’il ressort des informations dont elle dispose que les autorités bulgares n’ont pas notifié l’arrêt de son exploitation dans leurs réponses à l’avis motivé complémentaire. Au contraire, il ressortirait de leur réponse du 27 avril 2015 que cette centrale est encore en service et, eu égard aux violations constatées les 14 et 16 février 2015, une sanction aurait été prononcée contre l’entreprise pour non-respect des conditions de l’autorisation intégrée donnée à celle-ci. Ainsi, la mesure notifiée en ce qui concerne Brikel n’aurait pas pu avoir d’effet positif sur la qualité de l’air.

99      En outre, la Commission relève que, selon les autorités bulgares, la principale cause des niveaux excessifs de SO2 dans la commune de Galabovo, en l’absence de conditions météorologiques défavorables et d’autres sources de pollution, est le non-respect des conditions de fonctionnement de certaines GIC de la région, lesquelles rejettent des gaz de fumées non traités. Les autorités bulgares auraient donné des informations concernant différentes mesures relatives à un contrôle renforcé des activités de ces GIC et indiqué que toutes les autorisations intégrées délivrées à celles-ci prévoiraient l’obligation d’installer, dans les meilleurs délais, des systèmes de mesure du volume des fumées de combustion traversant les cheminées de dérivation, dans les cas où ces cheminées sont utilisées. En attendant l’installation de ces systèmes, les autorités compétentes devraient procéder à des contrôles renforcés pour vérifier que les cheminées de dérivation sont utilisées comme il est prévu. Toutefois, la République de Bulgarie n’aurait pas communiqué d’informations concernant une modification des autorisations intégrées, de sorte que la Commission en déduit que cette mesure n’a pas été mise en œuvre et qu’une mesure temporaire en matière de contrôle renforcé est appliquée.

100    La Commission relève également l’existence de « Lignes directrices méthodologiques pour la planification, la réalisation et le compte rendu des activités de contrôle concernant les grandes installations de combustion affectant la qualité de l’air dans des agglomérations ayant enregistré des dépassements de SO2 », adoptées aux fins du contrôle renforcé des GIC et approuvées par le ministère compétent. Selon la République de Bulgarie, les autorités compétentes ont procédé, conformément à ces lignes directrices, en cas de dépassement, à des inspections, donné des instructions pour réduire les émissions de SO2 et infligé des sanctions à Brikel en cas de non-respect de l’autorisation intégrée. Toutefois, la Commission soutient que lesdites lignes directrices ne constituent pas des mesures pertinentes au sens de l’article 23 de la directive 2008/50, étant donné que les obligations des autorités compétentes d’émettre des autorisations et d’effectuer des contrôles résultent de la directive 2008/1, remplacée par la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) (JO 2010, L 334, p. 17), et constituent des obligations régulières incombant aux autorités et devant être respectées dans tous les cas, quelle que soit la situation au regard du dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 et indépendamment du fait qu’un plan de qualité de l’air concernant une situation de pollution particulière a été adopté ou non.

101    La Commission soutient que, malgré certaines mesures prises par les autorités bulgares, dans le cadre d’un accord convenu avec le ministère de l’Environnement et de l’Eau, afin d’augmenter le taux de désulfuration et de réduire la concentration de dioxyde de soufre dans les gaz résiduaires, les dépassements considérables des valeurs limites fixées pour le SO2 se poursuivent. Les autorités bulgares considéreraient, à cet égard, que la principale raison des niveaux excessifs est le non-respect des conditions de fonctionnement des GIC. Partant, selon la Commission, cela signifie que ces mesures ne sont pas appliquées dans la pratique ou qu’elles sont insuffisantes pour garantir le respect des valeurs limites fixées pour le SO2. En outre, la Commission déplore que, en ce qui concerne cet accord, aucun texte ne lui ait été communiqué, de sorte qu’elle en conclut qu’il n’est pas formellement et juridiquement contraignant pour les exploitants, ce qui le prive de ses effets.

102    S’agissant des mesures envisagées portant sur l’augmentation temporaire du taux de désulfuration des installations ad hoc des centrales thermiques ainsi que sur une combustion accrue de la biomasse en pourcentage du combustible principal, ce qui nécessiterait une modification du système de combustion pour certaines centrales thermiques, la Commission soutient qu’elles font l’objet de discussions entre le ministère compétent et les exploitants de ces centrales, de sorte qu’elle se voit obligée de conclure que ces mesures ne sont actuellement pas, à la date de l’introduction du recours, mises en œuvre et qu’aucun plan ou financement n’est prévu pour apporter les modifications nécessaires aux systèmes de combustion des principaux polluants.

103    La Commission soutient également que, en ce qui concerne la pollution causée par le secteur des ménages, les autorités bulgares n’ont notifié de mesures spécifiques pour y remédier ni dans la réponse à l’avis motivé complémentaire ni dans les lettres qui ont suivi.

104    S’agissant de l’argument de la République de Bulgarie selon lequel, bien qu’il soit constant que les niveaux excessifs de SO2 dans le bassin de Maritsa iztok sont dus principalement au non-respect des conditions d’exploitation de certaines GIC, il serait difficile de déterminer quelle est la GIC responsable du dépassement en cause, étant donné que les quatre GIC concernées sont situées sur un territoire restreint, la Commission rappelle que, conformément à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50, les États membres doivent parvenir à un résultat, c’est-à-dire à la fin des dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2, celui-ci revêtant une importance considérable pour la santé humaine et devant être atteint dans les meilleurs délais. Il appartiendrait ainsi aux autorités nationales d’atteindre le résultat décrit par cette directive, en prenant toutes les mesures nécessaires à cet effet dans les meilleurs délais, de manière à ce que la période de dépassement de ces valeurs limites soit la plus courte possible.

105    Enfin, en ce qui concerne les informations données par les autorités bulgares relativement à des mesures futures, dont l’objectif est notamment de réduire les émissions de SO2 de 80 % d’ici à l’année 2023, par rapport à celles de l’année 2017, la Commission souligne que ces autorités n’ont pas indiqué la date précise ou la date estimée pour la mise en œuvre de ces mesures. Si plusieurs des mesures envisagées sont susceptibles d’avoir un effet positif sur l’air ambiant, leur mise en œuvre ne serait cependant prévue qu’à un stade ultérieur, pour la plupart à moyen ou à long terme, à savoir pour les années 2021 à 2023. Ainsi, même en supposant que les mesures prévues seront mises en œuvre de manière stricte et que leur financement sera assuré, ce qui n’aurait aucunement été garanti à la date de la rédaction de la requête, les résultats en ce qui concerne le respect des valeurs limites fixées pour le SO2 ne seraient pas attendus avant l’année 2023. La durée du non‑respect systématique et persistant de ces valeurs limites serait donc de seize ans et celle du non-respect de l’obligation de veiller à ce que la période de dépassement desdites valeurs limites soit la plus courte possible, prévue à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de ladite directive, de treize ans.

106    La République de Bulgarie fait valoir, à titre liminaire, que, en application de l’article 27 du Zakon za chistotata na atmosferniya Vazduh (loi relative à la pureté de l’air ambiant, DV n °45, du 28 mai 1996), telle que modifiée, toutes les communes de la zone BG0006 (Sud-Est) dans lesquelles les normes de qualité de l’air n’étaient pas respectées ont élaboré et adopté des plans relatifs à la qualité de l’air et mettent en œuvre les mesures prévues dans ces plans afin d’atteindre les valeurs limites fixées pour le SO2. Sur cette base, pendant la période allant de l’année 2014 à l’année 2018, aucun dépassement de ces valeurs n’aurait été enregistré dans cette zone, à l’exception de la commune de Galabovo.

107    La République de Bulgarie réitère les arguments avancés dans le cadre du premier grief, présente le programme pour diminuer les niveaux des polluants et pour respecter les normes établies en matière de substances nocives présentes dans l’air ambiant de la commune de Galabovo et fait référence à certaines mesures visant notamment à garantir le respect des valeurs limites fixées pour le SO2 dans cette commune.

108    En outre, la République de Bulgarie esquisse certaines mesures législatives prévoyant des échéanciers pour l’inspection et le contrôle des GIC, une procédure d’information ainsi que des mesures introduisant des dispositions visant à garantir la qualité des systèmes de mesure automatique. Elle renvoie également à d’autres mesures prises, décrites de manière détaillée dans les réponses à la lettre de mise en demeure, à l’avis motivé, à la mise en demeure complémentaire et à l’avis motivé complémentaire, ainsi que dans les informations complémentaires fournies. Grâce à ces actions, prises jusqu’à la date de la rédaction du mémoire en défense, qui visent notamment les quatre grandes centrales thermiques en cause, les émissions de SO2 auraient été divisées par dix, la baisse de ces émissions s’élevant à 91 %.

109    Enfin, la République de Bulgarie soutient que l’expression « la plus courte possible », employée à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50, ne précise pas exactement de délai, dès lors que le délai le plus court possible devrait être déterminé au cas par cas, sur la base de la situation concrète, ce qui l’amène à affirmer qu’elle s’est conformée à ses obligations en vertu de cette disposition dans la zone BG0006 (Sud-Est).

110    Elle considère donc qu’il convient de rejeter comme non fondé le second grief. Pour le cas où la Cour n’accepterait pas les arguments exposés dans ses observations, la République de Bulgarie demande de ne faire que partiellement droit à ce grief, uniquement pour ce qui concerne la région de Galabovo, et de le rejeter pour le surplus.

111    La Commission, dans son mémoire en réplique, rejette tous les arguments avancés par la République de Bulgarie, qui sont analogues à ceux exposés à l’égard du premier grief. Elle fait notamment valoir que l’État membre concerné peut décider lui-même de la manière dont il formule un plan sur la qualité de l’air et si celui-ci porte sur chacun des endroits concernés de la zone en cause, comme la République de Bulgarie l’a fait, ou sur toute cette zone. La Commission précise qu’elle n’a pas contesté le choix de la République de Bulgarie d’élaborer un plan portant uniquement sur la commune de Galabovo, ce qui ne signifie cependant pas que cet État membre n’a pas violé les dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’annexe XV, section А, de la directive 2008/50 en ce qui concerne ladite zone en tant que telle.

112    La Commission souligne, en outre, que le mémoire en défense ne contient aucune information dont on pourrait déduire que les mesures prises par la République de Bulgarie seraient appropriées afin de respecter les valeurs limites fixées pour le SO2. Plus particulièrement, le mémoire en défense ne fournirait aucune information sur les lacunes du plan de 2011, de sorte que la Commission maintient ses considérations exposées dans la requête. En outre, elle relève que le mémoire en défense ne contient pas non plus de renseignements sur la mise à jour des ordonnances municipales, sur les mesures de financement ou sur les résultats des campagnes d’information. La République de Bulgarie n’aurait pas non plus fait savoir si l’exploitation de l’installation de combustion Brikel a pris fin ni fourni d’informations sur les installations de désulfuration et sur l’accord conclu avec le ministère de l’Environnement.

113    Quant au contrôle accru de l’activité des quatre grandes centrales thermiques en cause, la Commission soutient que la République de Bulgarie n’a cependant pas fourni d’éléments concrets concernant un contrôle réalisé plus fréquemment. Il serait donc manifeste, compte tenu des données disponibles sur les dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2, qu’il s’agit d’une mesure insuffisante pour assurer le respect de ces valeurs limites. Le contrôle des émissions industrielles serait d’ailleurs une obligation régulière incombant aux autorités compétentes, qui doit être respectée dans tous les cas, indépendamment de l’existence d’une situation de dépassement des niveaux de SO2.

114    S’agissant du       décret élaboré afin d’inciter à utiliser des combustibles solides de meilleure qualité dans le secteur des ménages, la Commission fait valoir que cette mesure a été prise au mois de février 2020 et est entrée en vigueur le 22 mars suivant. Dès lors, ce décret constituerait une mesure extrêmement tardive, qui ne peut avoir d’effet sur les émissions provenant du chauffage domestique qu’à l’avenir.

115    En ce qui concerne les mesures futures, la République de Bulgarie fournirait des informations exclusivement au sujet du décret n° 6 dont les modifications sont au stade de projet et n’ont pas encore été adoptées. Les informations relatives au système d’alerte rapide auraient été prises en compte par la Commission lors de l’élaboration de sa requête, mais il ne ressort pas des observations de la République de Bulgarie que le système soit complet et opérationnel.

116    S’agissant de l’argument avancé par cet État membre selon lequel le dépassement des émissions de SO2 générées pendant la période allant des années 2007 à 2017 a considérablement diminué, la Commission, bien qu’elle apprécie ces réductions, relève cependant que les données communiquées ne font pas apparaître de nette tendance à la baisse pour toutes les installations. En outre, il ressortirait de la jurisprudence de la Cour qu’une éventuelle tendance à la baisse du dépassement des valeurs limites fixées pour le polluant concerné ne serait pas susceptible d’infirmer le constat que le manquement persiste.

117    La Commission signale également une certaine contradiction dans les allégations de la République de Bulgarie. Tandis que le mémoire en défense demeure fondé sur la circonstance que la présence de quatre GIC dans une zone relativement restreinte rend difficile la détermination tant de la cause réelle de la pollution que de la mesure dans laquelle chaque installation influence la qualité de l’air dans la commune de Galabovo, les données figurant dans le tableau intégré au point 72 de ce mémoire semblent indiquer exactement le contraire, à savoir qu’il est possible de mesurer les émissions de SO2 de chacune des quatre installations en cause. En tout état de cause, la Commission souligne que l’obligation incombant aux États membres de respecter les valeurs limites et d’établir des plans relatifs à la qualité de l’air de façon à ce que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible n’est pas liée à des difficultés d’identification de la source concrète de la pollution.

118    S’agissant de la modification apportée à l’autorisation d’exploitation concernant la centrale thermique Brikel au cours de l’année 2018, visant à établir la conformité avec les valeurs limites fixés pour le SO2, la Commission soutient que le mémoire en défense ne contient cependant pas d’information indiquant que la nouvelle installation de désulfuration aurait été déjà construite, ce qui n’est pas non plus confirmée par l’annexe B au mémoire en défense, dont il ressort, en réalité, que la construction en question a pris du retard.

119    Enfin, à l’égard de l’argument avancé par la République de Bulgarie, selon lequel la directive 2008/50 ne précise pas, dans le contexte de l’expression « la plus courte possible », figurant à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de celle-ci, de délai, la Commission rappelle que, conformément à cette disposition, les États membres doivent parvenir à un résultat, à savoir la fin des dépassements des valeurs limites fixées pour le polluant concerné, qui revêt une importance considérable pour la santé humaine et qu’il convient d’atteindre dans les meilleurs délais. Elle rappelle, à cet égard, que, dès lors que ces valeurs limites ont été dépassées de façon systématique et persistante pendant plus de trois années après l’expiration du délai de transposition de cette directive et que l’État membre concerné n’a pas adopté et mis à exécution des mesures appropriées le plus rapidement possible, une telle situation démontre par elle-même, sans qu’il soit besoin d’examiner de manière détaillée le contenu des plans relatifs à la qualité de l’air établis par la République de Bulgarie, que cet État membre n’a pas mis à exécution des mesures appropriées et efficaces pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible.

120    En conclusion, la Commission souligne que, au cours de l’année 2018, soit près de douze ans après que l’obligation de respecter les valeurs limites fixées pour le SO2 est devenue applicable à la République de Bulgarie, le dépassement persistait et était, de surcroît, particulièrement important, et que rien n’indique qu’il ait cessé à la date de l’introduction de la requête.

121    La République de Bulgarie conteste, dans son mémoire en duplique, l’affirmation de la Commission selon laquelle la tendance générale à la hausse des valeurs est restée stable dans la zone BG0006 (Sud-Est) en attirant l’attention sur le fait que, au cours de l’année 2007, les dépassements des normes en matière de SO2 ont été enregistrés dans quatre communes de cette zone. Après l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire, à savoir le 27 janvier 2015, à l’exception du point de prélèvement de Galabovo, aucun dépassement des normes dans la zone BG0006 (Sud-Est) n’aurait été enregistré.

122    Concernant plus précisément le grief tiré de la violation des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, et de l’annexe XV, section A, de la directive 2008/50 pour la commune de Galabovo, la République de Bulgarie soutient qu’il n’existe pas de règle conformément à laquelle l’absence de contestation expresse des affirmations d’une partie, dans le cadre de la procédure prévue à l’article 258 TFUE, équivaudrait à une acceptation de ces affirmations par l’autre partie.

123    Elle souligne également que les éléments sur lesquels se fonde la Commission pour soutenir que les plans relatifs à la qualité de l’air ne prévoient pas de mesures adéquates pour garantir que la durée du dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible sont des circonstances de fait probables mais non démontrées et ne permettent ainsi pas de conclure de manière catégorique à l’existence de l’infraction en cause.

124    En outre, la République de Bulgarie renvoie à des mesures prises qui correspondent aux mesures décrites sur le site Internet du Réseau européen d’information et d’observation pour l’environnement (Eionet), sur lequel a été rapportée au cours de l’année 2016 l’« Actualisation du programme destiné à diminuer des niveaux de polluants dans l’air et à atteindre les normes fixées en matière de substances nocives » pour la période allant de l’année 2014 à l’année 2018.

125    Enfin, la République de Bulgarie esquisse certaines mesures concrètes qui, bien que mises en œuvre après l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé complémentaire, à savoir le 27 janvier 2015, démontrent les efforts constants qu’elle continue de faire pour ramener les émissions de SO2 dans la région de la commune de Galabovo à un niveau conforme aux valeurs limites fixées pour ce polluant.

 Appréciation de la Cour

126    Il résulte de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 que, lorsque le dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 a lieu après le délai prévu pour leur application, l’État membre concerné est tenu d’établir un plan relatif à la qualité de l’air qui répond à certaines exigences.

127    Ainsi, ce plan doit prévoir les mesures appropriées pour que la période de dépassement de ces valeurs limites soit la plus courte possible et peut comporter des mesures additionnelles spécifiques pour protéger les catégories de population sensibles, notamment les enfants. De plus, en vertu de l’article 23, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2008/50, ledit plan doit contenir au moins les informations énumérées à l’annexe XV, section A, de cette directive et peut aussi inclure les mesures visées à l’article 24 de celle-ci. Le même plan doit être transmis à la Commission sans délai et au plus tard deux ans après la fin de l’année au cours de laquelle le premier dépassement a été constaté.

128    Ainsi qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour, l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 a une portée générale, étant donné qu’il s’applique, sans limitation dans le temps, aux dépassements de toute valeur limite de polluant fixée par cette directive, après le délai prévu pour son application, qu’il soit fixé par ladite directive ou par la Commission en vertu de l’article 22 de celle-ci [arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 138 et jurisprudence citée].

129    Il y a également lieu de relever que l’article 23 de la directive 2008/50 instaure un lien direct entre, d’une part, le dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 par les dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de cette directive et, d’autre part, l’établissement de plans relatifs à la qualité de l’air [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 139 et jurisprudence citée].

130    Ces plans ne peuvent être établis que sur le fondement de l’équilibre entre l’objectif de réduction du risque de pollution et les différents intérêts publics et privés en présence [arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 140 et jurisprudence citée].

131    Dès lors, le fait qu’un État membre n’a pas veillé à ce que ne soient pas dépassées les valeurs limites fixées pour le SO2 ne suffit pas, à lui seul, pour qu’il soit considéré que cet État membre a manqué aux obligations prévues à l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 141 et jurisprudence citée].

132    Cependant, il résulte de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 que, si les États membres disposent d’une certaine marge de manœuvre pour la détermination des mesures à adopter, celles-ci doivent, en tout état de cause, faire en sorte que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le polluant concerné soit la plus courte possible [arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 142 et jurisprudence citée].

133    Dans ces conditions, il convient de vérifier, par une analyse au cas par cas, si les plans relatifs à la qualité de l’air établis par l’État membre concerné sont en conformité avec l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 [arrêt du 3 juin 2021, Commission/Allemagne (Valeurs limites – NO2), C‑635/18, non publié, EU:C:2021:437, point 143 et jurisprudence citée].

134    En l’occurrence, force est de constater que, s’agissant des valeurs limites fixées pour le SO2, la République de Bulgarie a, de façon systématique et persistante, manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50 dans la zone litigieuse pendant la période couvrant, en ce qui concerne la valeur limite horaire, les années 2007 à 2018, et, en ce qui concerne la valeur limite journalière, les années 2007 à 2018, à l’exception des années 2010 et 2012, ainsi qu’il résulte de l’examen du premier grief.

135    Il convient de rappeler, dans ce contexte, que l’obligation d’établir, en cas de dépassements des valeurs limites fixées pour un polluant par la directive 2008/50, des plans relatifs à la qualité de l’air s’impose à l’État membre concerné depuis le 11 juin 2010. En effet, conformément à l’article 33, paragraphe 1, de cette directive, la République de Bulgarie devait mettre en vigueur, avant cette date, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à celle‑ci. Elle était, partant, tenue d’adopter et de mettre à exécution, le plus rapidement possible, des mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible, en application de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de ladite directive.

136    Or, il ressort des éléments figurant dans le dossier que la tendance générale au dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 est, malgré une tendance à la baisse pendant certaines périodes, stable. À titre d’exemple, après que le nombre d’heures pour lesquelles la concentration de SO2 était supérieure à 350 μg/m3 est tombé de 189 heures au cours de l’année 2007 à 32 heures au cours de l’année 2010, il a de nouveau augmenté à partir de l’année 2010, pour atteindre 117 heures au cours de l’année 2017. En ce qui concerne le niveau de dépassement de ces valeurs limites, au cours de l’année 2017, le nombre de dépassements atteignait près de cinq fois ce qui était autorisé pour les valeurs horaires, à savoir 117 heures au lieu de la valeur limite de 24 heures, et cinq fois ce qui était autorisé pour les valeurs journalières, à savoir quinze jours au lieu de la valeur limite de trois jours. Pour l’année 2018, il peut être observé une diminution du dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 s’élevant à 72 heures, en ce qui concerne la valeur limite horaire, et à sept jours, en ce qui concerne la valeur limite journalière. Toutefois, il convient de constater que de telles valeurs sont encore respectivement trois fois et deux fois plus élevées que ce qui est autorisé par la directive 2008/50. En outre, compte tenu de l’ampleur du dépassement, les baisses périodiques sont manifestement insuffisantes pour que les valeurs limites puissent être respectées dans un avenir proche.

137    Il s’ensuit que de telles données sont un indice permettant de considérer que la République de Bulgarie n’a pas pris les mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible.

138    En l’espèce, il convient de constater que, en Bulgarie, à la date de l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé complémentaire fixé au 27 janvier 2015, était en vigueur le plan de 2011 pour la période allant de l’année 2011 à 2013 ainsi que différentes mesures destinées à améliorer la qualité de l’air dans la commune de Galabovo. Il importe toutefois de souligner que, en vertu de l’article 23, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2008/50, un tel plan doit contenir au moins les informations énumérées à l’annexe XV, section A, de cette directive.

139    Or, il ressort du dossier soumis à la Cour que ce plan, bien que prévoyant certaines mesures susceptibles d’aboutir à une réduction du niveau des dépassements des valeurs limites fixées pour le SO2, ne contient pas les informations requises au regard des exigences spécifiées à l’annexe XV, section A, point 8, sous c), de la directive 2008/50, dans la mesure où il ne fournit pas d’estimation de l’amélioration de la qualité de l’air escomptée ni du délai prévu pour la réalisation des objectifs poursuivis, alors que ces informations sont d’une importance primordiale.

140    En outre, concernant certaines des mesures invoquées par la République de Bulgarie, il convient de constater que le dossier soumis à la Cour ne permet pas d’en déduire que ces mesures, déjà prises ou envisagées dans l’avenir, sont appropriées pour atteindre la conformité aux valeurs limites fixées pour le SO2 dans la directive 2008/50. D’une part, lesdites mesures sont souvent décrites de manière insuffisamment détaillée, sommaire ou vague. En outre, certaines mesures semblent être juridiquement non contraignantes. D’autre part, il manque, notamment, des informations concernant leur mise à jour, leur financement ou leur impact estimé sur la réalisation de l’objectif mentionné, et, de surcroît, des informations en ce qui concerne leur caractère opérationnel. À cela s’ajoute que certaines des mesures en cause semblent satisfaire à des obligations qui sont étrangères à la directive 2008/50 ou qui sont caractérisées par une tardiveté extrême.

141    Compte tenu des éléments figurant aux points 134 à 140 du présent arrêt, il y a lieu de relever que la République de Bulgarie n’a manifestement pas adopté en temps utile de mesures appropriées permettant d’assurer que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit la plus courte possible dans la zone concernée. Ainsi, le dépassement des valeurs limites journalière et annuelle fixées pour ce polluant est demeuré systématique et persistant durant, au moins dix années dans cette zone, en dépit de l’obligation incombant à cet État membre de prendre toutes les mesures appropriées et efficaces pour se conformer à l’exigence selon laquelle la période de dépassement de ces valeurs doit être la plus courte possible.

142    Or, une telle situation démontre par elle-même, sans qu’il soit besoin d’examiner de manière plus détaillée le contenu des plans relatifs à la qualité de l’air établis par la République de Bulgarie, que, en l’occurrence, cet État membre n’a pas mis à exécution des mesures appropriées et efficaces pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 soit « la plus courte possible », au sens de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50 [voir, par analogie, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 147 et jurisprudence citée].

143    S’agissant de l’argument de la République de Bulgarie, déjà invoqué dans le cadre du premier grief et selon lequel il est impossible de conclure du dépassement des normes de SO2 à un seul point de prélèvement d’une zone qu’il y a violation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2008/50 dans toute la zone, comprenant également d’autres régions, dans toutes lesquelles les niveaux de SO2 sont conformes aux normes établies, il convient de renvoyer aux points 71 à 73 du présent arrêt.

144    De même, en ce qui concerne l’argument de la République de Bulgarie, déjà avancé dans le cadre du premier grief, selon lequel les quatre centrales thermiques qui se trouvent dans la zone visée par le présent recours et qui font partie de l’infrastructure sensible de la Bulgarie relèvent d’une importance particulière non seulement pour le bien-être économique et social de la population locale, mais également pour celle de toute la Bulgarie, de sorte que l’arrêt de leur exploitation aurait des conséquences néfastes pour la population, il convient de renvoyer aux points 75 à 77 du présent arrêt.

145    S’agissant de l’argument de la République de Bulgarie selon lequel l’article 23, paragraphe 1, de la directive 2008/50 énonce que l’État membre en cause doit adopter un plan relatif à la qualité de l’air qui prévoit des mesures appropriées pour que la période de dépassement des valeurs limites fixées pour les polluants concernés soit la plus courte possible, sans préciser expressément de délai à cet égard, il convient de rappeler que cette considération ne saurait justifier un délai particulièrement long pour mettre un terme à un dépassement des valeurs limites, ce délai devant être apprécié, en tout état de cause, en tenant compte des références temporelles prévues par cette directive pour satisfaire aux obligations de celle-ci, et donc de la date du 11 juin 2010 pour l’adoption des plans relatifs à la qualité de l’air, ainsi que de l’importance des objectifs de la protection de la santé humaine et de l’environnement, poursuivis par ladite directive [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 148 et jurisprudence citée].

146    Il y a lieu de relever, à cet égard, que, selon le libellé même de l’article 23, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2008/50, le caractère approprié des mesures visées dans un plan relatif à la qualité de l’air doit être évalué en rapport à la capacité de ces mesures à garantir que la période de dépassement soit la plus courte possible, cette exigence étant plus stricte que celle applicable sous l’empire de la directive 96/62 qui se limitait à exiger des États membres qu’ils adoptent, dans un délai raisonnable, des mesures visant à mettre la qualité de l’air en conformité avec les valeurs limites fixées pour les polluants concernés [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 149 et jurisprudence citée].

147    C’est ainsi que, dans cette optique, l’article 23 de la directive 2008/50 impose que, lorsqu’un dépassement des valeurs limites fixées pour le SO2 a été constaté, une telle situation doit conduire le plus rapidement possible l’État membre concerné non seulement à adopter, mais aussi à mettre en œuvre, des mesures appropriées dans un plan relatif à la qualité de l’air, la marge de manœuvre dont dispose cet État membre en cas de dépassement de ces valeurs limites étant donc, dans ce contexte, limitée par cette exigence [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2020, Commission/Italie (Valeurs limites – PM10), C‑644/18, EU:C:2020:895, point 150].

148    Il s’ensuit que le second grief doit être accueilli.

149    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que la République de Bulgarie,

en n’ayant pas veillé à ce que ne soient pas dépassées, de façon systématique et persistante, dans la zone BG0006 (Sud-Est), d’une part, à partir de l’année 2007 jusqu’à l’année 2018 incluse, la valeur limite horaire fixée pour le SO2, et, d’autre part, à partir de l’année 2007 jusqu’à l’année 2018 incluse, à l’exception des années 2010 et 2012, la valeur limite journalière fixée pour ce polluant, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50, et

en n’ayant pas adopté, à partir du 11 juin 2010, de mesures appropriées pour garantir le respect des valeurs limites fixées pour le SO2 dans cette zone et, en particulier, en n’ayant pas veillé à ce que les plans relatifs à la qualité de l’air prévoient des mesures appropriées pour que la période de dépassement de ces valeurs limites soit la plus courte possible, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, et de l’annexe XV, section A, de cette directive.

 Sur les dépens

150    En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Bulgarie et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :

1)      La République de Bulgarie,

en n’ayant pas veillé à ce que ne soient pas dépassées, de façon systématique et persistante, dans la zone BG0006 (Sud-Est), d’une part, à partir de l’année 2007 jusqu’à l’année 2018 incluse, la valeur limite horaire fixée pour l’anhydride sulfureux (SO2), et, d’autre part, à partir de l’année 2007 jusqu’à l’année 2018 incluse, à l’exception des années 2010 et 2012, la valeur limite journalière fixée pour ce polluant, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 13, paragraphe 1, et de l’annexe XI de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, et

en n’ayant pas adopté, à partir du 11 juin 2010, de mesures appropriées pour garantir le respect des valeurs limites fixées pour le SO2 dans cette zone et, en particulier, en n’ayant pas veillé à ce que les plans relatifs à la qualité de l’air prévoient des mesures appropriées pour que la période de dépassement de ces valeurs limites soit la plus courte possible, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions combinées de l’article 23, paragraphe 1, et de l’annexe XV, section A, de cette directive.

2)      La République de Bulgarie est condamnée aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le bulgare.