Language of document : ECLI:EU:T:2007:314

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

19 octobre 2007 (*)

« Non‑lieu à statuer – Marchés publics – Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) – Annulation de l’appel d’offres – Recours devenu sans objet »

Dans l’affaire T‑69/05,

Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE, établie à Athènes (Grèce), représentée par Me N. Korogiannakis, avocat,

partie requérante,

contre

Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), représentée initialement par MM. A. Cuvillier et D. Detken, puis par M. Cuvillier et Mme S. Gabbi, en qualité d’agents, assistés de Me J. Stuyck, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet l’annulation de la décision de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), du 3 décembre 2004, rejetant l’offre soumise par la requérante dans le cadre de la procédure d’appel d’offres concernant la prestation de services informatiques pour la création d’un réseau Extranet entre les agences nationales des États membres, l’EFSA et la Commission, ainsi que de la décision d’attribuer le marché à un autre soumissionnaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCEDES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, J. Azizi et Mme E. Cremona, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Cadre juridique

1        L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) est une agence européenne instituée par le règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’EFSA et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO L 31, p. 1).

2        L’article 185, paragraphe 1, du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, ci-après le « règlement financier ») dispose que :

«La Commission arrête un règlement financier-cadre des organismes créés par les Communautés, dotés de la personnalité juridique et qui reçoivent effectivement des subventions à la charge du budget. La réglementation financière de ces organismes ne peut s’écarter du règlement-cadre que si les exigences spécifiques de leur fonctionnement le nécessitent et avec l’accord préalable de la Commission. »

3        L’article 74 du règlement (CE, Euratom) n° 2343/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, portant règlement financier-cadre des organismes visés à l’article 185 du règlement financier (JO L 357, p. 72) énonce :

« En ce qui concerne la passation des marchés publics, les dispositions pertinentes du règlement financier général ainsi que de ses modalités d’exécution s’appliquent. »

4        Cette disposition est reprise à l’article 74 du règlement financier de l’EFSA, adopté le 13 octobre 2003, et à l’article 54 du règlement établissant les modalités d’exécution de certaines dispositions dudit règlement financier, adopté le 18 janvier 2005.

5        La passation des marchés publics des institutions communautaires est assujettie aux dispositions du titre V de la première partie du règlement financier, ainsi qu’aux dispositions du titre V de la première partie du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement financier (JO L 357, p. 1, ci-après les « modalités d’exécution »). Ces dispositions s’inspirent des directives communautaires en la matière, notamment, pour les marchés de services, de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1), telle que modifiée, et pour les marchés de fournitures, de la directive 93/36/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures (JO L 199, p. 1), telle que modifiée.

6        L’article 100, paragraphe 2, du règlement financier dispose :

« Le pouvoir adjudicateur communique à tout candidat ou soumissionnaire écarté les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre et, à tout soumissionnaire ayant fait une offre recevable et qui en fait la demande par écrit, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire.

Toutefois la communication de certains éléments peut être omise dans les cas où elle ferait obstacle à l’application des lois, serait contraire à l’intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles-ci. »

7        L’article 101 du règlement financier dispose :

« Le pouvoir adjudicateur peut, jusqu’à la signature du contrat, soit renoncer au marché, soit annuler la procédure de passation du marché, sans que les candidats ou les soumissionnaires puissent prétendre à une quelconque indemnisation.

Cette décision doit être motivée et portée à la connaissance des candidats ou des soumissionnaires. »

8        L’article 149 des modalités d’exécution, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, prévoit que :

« 1. Les pouvoirs adjudicateurs informent dans les meilleurs délais les candidats et les soumissionnaires des décisions prises concernant l’attribution du marché, y inclus les motifs pour lesquels ils ont décidé de renoncer à passer un marché pour lequel il y a eu mise en concurrence ou de recommencer la procédure.

2. Le pouvoir adjudicateur communique, dans un délai maximal de quinze jours de calendrier à compter de la réception d’une demande écrite, les informations mentionnées à l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier. »

 Faits et procédure

9        Par un avis de marché du 7 août 2004, publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2004, S 153), l’EFSA a lancé un appel d’offres, sous la référence EFSA/IT/00012, portant sur « des logiciels et services pour la mise en place d’un Extranet entre les agences nationales des États membres, l’EFSA et la Commission ».

10      Le 20 septembre 2004, la requérante, en association avec Sineura Spa, a soumis une proposition en réponse à l’appel d’offres susmentionné.

11      Par lettre du 3 décembre 2004 (ci-après la « décision attaquée »), l’EFSA a informé la requérante que son offre n’avait pas été retenue, car « elle ne répondait pas aux critères de sélection ».

12      Le même jour, la requérante a envoyé, par courrier recommandé et par télécopie, une lettre à l’EFSA lui demandant plusieurs informations, concernant le nom de l’attributaire et de son ou ses partenaire(s) ou sous-traitant(s) éventuel(s) et le pourcentage du marché attribué à ce(s) dernier(s) ; le motif pour lequel l’offre de la requérante ne satisfaisait pas aux critères de sélection ; la marque du système d’Extranet proposé par le soumissionnaire sélectionné ; les notes accordées pour chaque critère d’attribution retenu dans l’offre technique de la requérante et dans celle de l’attributaire ; le contenu du rapport du comité d’évaluation et la comparaison entre l’offre financière de la requérante et celle de l’attributaire et, plus particulièrement, entre les notes attribuées à chacune de ces offres.

13      Par lettre du 10 décembre 2004, la requérante a sollicité la communication desdites informations.

14      Par lettre du 15 décembre 2004, la requérante, en manifestant sa surprise quant à l’exclusion de son offre au motif d’une prétendue non-conformité aux critères de sélection, a formulé des commentaires sur le critère relatif aux références des utilisateurs de l’application logicielle proposée, dénommée Mermig, et a insisté sur le fait que son offre contenait davantage de références de clients de la plate-forme Mermig.

15      Le même jour, l’EFSA a adressé à la requérante, en réponse à sa lettre du 3 décembre 2004, une lettre avec en annexe la « grille d’évaluation combinée », reprenant les notes attribuées, pour chacun des critères d’attribution, à l’offre technique tant de l’attributaire que d’un soumissionnaire non retenu, l’offre de la requérante n’ayant pas été examinée au regard des critères d’attribution, dès lors qu’elle avait été éliminée sur le fondement d’un critère de sélection. Elle informait également la requérante que l’offre retenue était celle de HP Belgium, qui avait pour sous-traitant Plumtree Inc., et précisait que le critère de sélection auquel l’offre de la requérante ne satisfaisait pas était celui décrit au document II – Cahier des charges de l’appel d’offres, partie IV, section 3.2, concernant « [l]es coordonnées de trois clients de [la] société ayant acheté et utilisé avec satisfaction les produits et services décrits [...], au cours des trois dernières années ». Quant à ce critère, la lettre indiquait que la requérante n’avait pas réussi la phase de sélection, parce que le comité d’évaluation avait constaté que deux de ses clients, notamment le Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap (ministère de la communauté flamande) et l’Office des publications officielles des Communautés européennes (EUR-OP), ne satisfaisaient pas aux critères susmentionnés. L’EFSA affirmait, plus précisément, s’être renseignée auprès de ces deux clients le 13 octobre 2004 et avoir relevé que le premier n’avait pas encore acheté ni utilisé les produits et services décrits dans le cahier des charges de l’appel d’offres, et que le second n’était pas satisfait de l’ergonomie ainsi que de la convivialité du système. En revanche, un autre client, la direction générale (DG) « Presse et communication » de la Commission, auprès de laquelle l’EFSA s’était également renseignée, avait précisé qu’il était satisfait du produit et des services de la requérante.

16      Toujours en date du 15 décembre 2004, la requérante a répondu à l’EFSA par le biais d’une lettre dans laquelle elle a formulé plusieurs objections quant à la décision rejetant son offre et a affirmé que l’EFSA aurait dû la contacter pour demander des clarifications ou bien tenir compte de l’une des nombreuses autres références mentionnées dans son offre. Elle a, en outre, demandé qu’une copie des déclarations faites par l’EUR-OP par écrit lui soit transmise et a invité l’EFSA à organiser une réunion conjointe avec l’EUR-OP afin de mieux vérifier les affirmations de celui‑ci.

17      Par lettre du 22 décembre 2004, l’EFSA a informé la requérante qu’elle avait suspendu la signature du contrat relatif à l’appel d’offres. Elle y précise :

«  Comme suite à notre courrier du 3 décembre 2004, nous souhaitons vous informer que l’EFSA a suspendu la signature du contrat relatif à l’appel d’offres visé en objet afin de pouvoir examiner les observations faites par des soumissionnaires.

Veuillez noter que, en tant qu’autorité contractante, l’EFSA est en droit soit d’abandonner, soit d’annuler cette procédure d’appel d’offres sans compensation, et ce jusqu’à la signature du contrat.

Vous serez ultérieurement informé par écrit du résultat final de cette procédure d’appel d’offres ».

18      Le 23 décembre 2004, l’EFSA a envoyé à la requérante deux lettres par courriel. Dans la première, envoyée en réponse à la question concernant l’accès aux documents, formulée par la requérante dans sa télécopie du 3 décembre 2004, elle a joint le rapport du comité d’évaluation et cinq annexes, à savoir le procès-verbal d’ouverture des offres ; les lignes directrices pour la vérification des références ; le procès-verbal de la réunion du 3 novembre 2004, lors de laquelle le comité d’évaluation a sélectionné les soumissionnaires admis à la phase d’attribution ; la vérification des références pour chaque soumissionnaire et les procès-verbaux ou présentations. Dans la seconde, envoyée en réponse à la lettre de la requérante du 15 décembre 2004, elle a fourni d’autres explications concernant certains aspects de l’avis donné par le comité d’évaluation.

19      La requérante a répondu le 30 décembre 2004, manifestant son désaccord avec les commentaires de l’EFSA figurant dans sa dernière lettre et l’informant qu’elle s’exprimerait la semaine suivante sur l’ensemble de ces commentaires.

20      Par télécopie du 4 janvier 2005, la requérante a envoyé une nouvelle lettre à l’EFSA, dans laquelle elle a adressé plusieurs critiques quant à la décision de rejeter son offre, et, plus généralement, quant à la procédure de sélection suivie par celle‑ci.

21      Par lettre du 7 février 2005, envoyée à la requérante et aux autres soumissionnaires, l’EFSA a annoncé sa décision d’annuler l’appel d’offres. Elle a justifié ladite décision par « le risque sérieux que l’attribution du marché [pouvait] donner lieu à une situation [contraire aux] règles de passation des marchés publics qu’[elle était] tenue d’observer ».

22      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 février 2005, la requérante a introduit le présent recours.

23      Le 3 mars 2005, la requérante a été informée oralement par l’EFSA que le produit auquel se référait l’appel d’offres litigieux avait déjà été acheté directement auprès d’un fournisseur sans lancement d’un appel d’offres et que l’attribution des services s’y rapportant ferait l’objet d’un nouvel appel d’offres, portant la référence EFSA.IT.2005.006.

24      Le 4 mars 2005, la requérante a envoyé une télécopie à l’EFSA pour l’informer qu’elle ne participerait pas au nouvel appel d’offres EFSA.IT.2005.006, car elle considérait que la procédure était totalement illégale. Dans la même lettre, elle exprimait son regret quant au fait que l’EFSA ait procédé de façon aussi hâtive à un nouvel appel d’offres sans attendre l’issue de la procédure qu’elle avait entamée devant le Tribunal, et l’a invité à s’abstenir de créer d’autres produits et services similaires, à annuler immédiatement le nouvel appel d’offres ainsi qu’à procéder à une évaluation équitable des offres soumises dans le cadre de l’appel d’offres litigieux.

25      Le 14 mars 2005, l’EFSA a envoyé un courriel à la requérante dans lequel elle l’informait qu’elle venait de prendre connaissance de sa requête et lui demandait si elle avait reçu la lettre communiquant l’annulation de l’appel d’offres, dont elle annexait une copie en format électronique.

26      La requérante a répondu par télécopie le 16 mars 2005, en précisant qu’elle avait reçu l’avis d’annulation, pour la première fois, par le biais du courriel susmentionné. Elle se plaignait, en outre, du fait que l’EFSA avait décidé d’acquérir directement auprès d’un fournisseur le produit auquel faisait référence l’appel d’offres litigieux. Elle exprimait, enfin, son étonnement quant au fait que l’EFSA avait décidé de communiquer avec elle en utilisant l’adresse de sa filiale à Bruxelles, alors que l’adresse officielle de communication des documents en Grèce était clairement indiquée dans son offre.

27      Le 19 mars 2005, l’avis d’annulation de l’appel d’offres a été publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2005, S 56).

28      Le 5 avril 2005, l’EFSA a adressé un courrier à la requérante, expliquant qu’elle était en droit d’annuler la procédure d’attribution du marché en conformité avec les dispositions du règlement financier et de la lettre d’invitation à soumissionner. En rappelant à la requérante que la décision d’annulation lui avait été envoyée le 7 février 2005 et les raisons pour lesquelles, à son avis, le recours devait être considéré comme étant irrecevable, l’EFSA a invité celle‑ci à participer à une réunion en vue de discuter de ces problèmes.

29      Le 15 avril 2005, le conseil de la requérante, faisant suite à des conversations téléphoniques avec le service juridique de l’EFSA, a marqué son accord pour ladite réunion, en proposant plusieurs dates.

30      Par courriel du même jour, le directeur du service juridique de l’EFSA a répondu qu’il n’était pas possible d’organiser la réunion aux dates proposées et que, « compte tenu de l’avancement de la préparation du mémoire […], à ce moment il ne [leur] sembl[ait] plus opportun de tenir une telle réunion ».

31      Le 19 mai 2005, l’EFSA a déposé son mémoire en défense, dans le cadre duquel elle allègue, en substance, que le présent recours est irrecevable et sans objet.

32      Le 14 juillet 2005, la requérante a fait parvenir sa réplique contenant, notamment, ses observations sur les arguments de l’EFSA à cet égard, sans toutefois modifier ses moyens et conclusions en considération de l’annulation de l’appel d’offres.

33      À titre de mesures d’organisation de la procédure, le Tribunal a, par lettre du 17 janvier 2007, posé des questions aux parties et invité l’EFSA à produire une copie de la « chronologie » de son courrier sortant, prouvant la date d’enregistrement des courriers envoyés. La requérante a répondu dans les délais impartis. Quant à l’EFSA, bien que sa réponse ait été déposée hors délai, le Tribunal a décidé de la verser également au dossier.

 Conclusions des parties

34      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de l’EFSA d’écarter son offre et d’attribuer le contrat à l’adjudicataire ainsi que toutes les décisions ultérieures de l’EFSA en rapport avec la première ;

–        ordonner à l’EFSA de réexaminer son offre en fonction de critères équitables et transparents ;

–        condamner l’EFSA aux dépens même en cas de rejet du recours.

35      L’EFSA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, déclarer le recours irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, déclarer le recours non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Sur le non-lieu à statuer

 Arguments des parties

36      L’EFSA fait valoir, en premier lieu, que le recours est sans objet, car, avant le dépôt de la requête, elle avait procédé à l’annulation de l’appel d’offres et en avait informé la requérante, par lettre du 7 février 2005, ainsi que les neuf autres soumissionnaires, qui en avaient tous confirmé la réception.

37      Elle fait valoir que, selon une jurisprudence bien établie, un recours formé à l’encontre d’une décision qui a été retirée au cours de la procédure doit être considéré comme sans objet et, par conséquent, comme irrecevable en raison de l’absence d’intérêt, parce que la décision attaquée est devenue « inapplicable » et a donc cessé de produire tout autre effet juridique (arrêt du Tribunal du 24 octobre 1997, EISA/Commission, T‑239/94, Rec. p. II‑1839, point 34, et ordonnance du Tribunal du 31 juillet 2000, BSB-Fleischimport/Commission, T‑31/00, non publiée au Recueil, points 11 et 14 ; voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 11 juillet 1990, Neotype Techmashexport/Commission et Conseil, C‑305/86 et C‑160/87, Rec. p. I‑2945, points 14 et 15).

38      Dès lors que l’appel d’offres a été annulé le 7 février 2005, c’est-à-dire avant la date d’introduction du présent recours, l’EFSA conclut qu’il est sans objet et qu’il n’y a pas lieu pour le Tribunal de statuer sur ledit recours.

39      L’EFSA conteste l’argument de la requérante selon lequel celle-ci n’aurait reçu l’information concernant l’annulation de l’appel d’offres que par le biais du courriel qu’elle lui a envoyé le 14 mars 2005. Elle conteste également l’objection de la requérante selon laquelle elle aurait dû utiliser l’adresse officielle de communication indiquée dans son offre au lieu de l’adresse de sa filiale à Bruxelles.

40      À cet égard, elle précise, en premier lieu, que l’adresse de Bruxelles est l’une des quatre imprimées sur le papier à en-tête ordinaire de la requérante et a, dès lors, été fournie par la requérante elle-même, et, en second lieu, que d’autres lettres avaient été régulièrement reçues par celle-ci, au cours de la procédure, à ladite adresse. Elle fait référence, notamment, à la lettre du 3 décembre 2004, communiquant le rejet de l’offre, qui a été sans aucun doute possible reçue par la requérante, étant donné qu’elle l’a annexée à sa requête.

41      Selon l’EFSA, la question de savoir si la requérante a bien reçu la décision d’annulation serait sans incidence sur le fait établi que, à la date d’introduction du recours, la procédure de passation de marché avait pris fin en raison de son annulation par l’EFSA conformément à l’article 101 du règlement financier. Elle ajoute que la portée juridique de cette annulation n’est pas liée à l’obligation d’information autonome mentionnée au second alinéa dudit article. Le non‑respect de l’obligation d’information ne saurait affecter l’existence ou la validité de la décision d’annulation de l’appel d’offres.

42      Par ailleurs, l’EFSA considère qu’elle n’était nullement tenue d’envoyer cette lettre par télécopie ou par courrier recommandé ni de contrôler la réception effective de la lettre par les soumissionnaires.

43      Enfin, l’EFSA soutient que la décision d’annulation du 7 février 2005 est conforme aux dispositions des règlements financiers.

44      Quant à l’allégation de la requérante selon laquelle la décision ultérieure d’attribuer une partie du marché, à savoir l’achat du produit, à l’adjudicataire de l’appel d’offres annulé et de préparer un nouvel appel d’offres pour les services afférents audit produit serait contraire tant à l’appel d’offres litigieux qu’aux dispositions régissant la passation des marchés publics, l’EFSA fait valoir qu’elle est irrecevable dès lors que ces décisions ne font pas l’objet du présent recours.

45      Dans son mémoire en réplique, la requérante soutient, tout d’abord, qu’elle n’a reçu la lettre de l’EFSA concernant l’annulation de l’appel d’offres que par un courriel du 14 mars 2005. Elle conteste, ensuite, l’affirmation de l’EFSA selon laquelle ladite lettre lui aurait été envoyée le 7 février 2005. À cet égard, elle fait valoir que, selon une jurisprudence constante, c’est sur l’EFSA que pèse la charge de la preuve de l’envoi et, jusqu’à présent, celle-ci n’a fourni aucun élément probant ou même un indice à l’appui de ses affirmations.

46      La requérante soutient, en outre, que la lettre par laquelle l’EFSA a communiqué l’annulation de l’appel d’offres n’est pas motivée et ne remplit ni l’obligation indiquée au point 13 de la lettre d’invitation à soumissionner ni celle de l’article 101 du règlement financier et de l’article 149, paragraphe 1, des modalités d’exécution.

47      En tout état de cause, la requérante maintient que la décision de l’EFSA d’attribuer directement à l’adjudicataire la partie du contrat concernant l’achat du produit qui faisait l’objet de l’appel d’offres contesté, alors que celui-ci avait déjà été annulé, et d’entamer une nouvelle procédure pour les services liés au produit en question viole l’appel d’offres et le droit des marchés publics.

48      La requérante estime, enfin, que la lettre de l’EFSA du 7 février 2005 annulant l’appel d’offres et la décision subséquente d’attribuer directement une partie de l’objet de l’appel d’offres au consortium retenu avant de procéder à un nouvel appel d’offres pour les prestations de services relatives au produit déjà acheté constituent un abus de pouvoir. En effet, en lançant un nouvel appel d’offres ne concernant que les services, l’EFSA aurait donné un avantage évident au fournisseur du produit, qui serait le mieux placé pour effectuer des prestations de services sur un logiciel qu’il a lui-même conçu.

 Appréciation du Tribunal

49      Par sa demande de non-lieu à statuer, l’EFSA soulève un incident de procédure qu’il convient, en vertu de l’article 114, paragraphe 3, du règlement de procédure, de régler sans ouvrir la procédure orale, le Tribunal s’estimant éclairé par les pièces du dossier.

50      Il est constant, en l’espèce, que la procédure d’attribution du marché litigieux n’a pas été achevée, l’appel d’offres litigieux ayant été annulé par le pouvoir adjudicateur le 7 février 2005. Cette décision a été communiquée, par courrier simple, aux soumissionnaires et publiée, par la suite, au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne le 19 mars 2005.

51      À cet égard, il convient d’observer, à titre liminaire, que le règlement financier et les modalités d’exécution ne comportent aucune disposition imposant expressément au pouvoir adjudicateur qui a procédé à un appel d’offres de mener à son terme une procédure d’attribution d’un marché (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 18 juin 2002, HI, C‑92/00, Rec. p. I‑5553, point 41, et ordonnance de la Cour du 16 octobre 2003, Kauppatalo Hansel, C‑244/02, Rec. p. I‑12139, point 30 ; arrêt du Tribunal du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T‑203/96, Rec. p. II‑4239, point 55). Il ressort, en particulier, de l’article 101 du règlement financier, de l’article 149, paragraphe 1, des modalités d’exécution, ainsi que du point 13 de la lettre d’invitation à soumissionner du 7 août 2004, d’une part, que le pouvoir adjudicateur peut, jusqu’à la signature du contrat, soit renoncer au marché, soit annuler la procédure de passation du marché, sans que les candidats ou les soumissionnaires puissent prétendre à une quelconque indemnisation et, d’autre part, que cette décision doit être motivée et portée à la connaissance des candidats ou des soumissionnaires dans les meilleurs délais. Lesdites dispositions ne prévoient pas, en outre, que la décision de renoncer au marché ou d’annuler la procédure de passation du marché soit limitée aux cas exceptionnels ou soit nécessairement fondée sur des motifs graves (voir, en ce sens et par analogie, arrêts de la Cour du 16 septembre 1999, Fracasso et Leitschutz, C‑27/98, Rec. p. I‑5697, points 23 et 25 ; HI, précité, point 40, et ordonnance Kauppatalo Hansel, précitée, point 29).

52      En l’espèce, il y a lieu de constater que, par l’adoption de la décision du 7 février 2005 annulant l’appel d’offres, l’EFSA a rendu la décision attaquée caduque, car il n’existait plus de marché à attribuer. Elle est parvenue à cette décision, après avoir estimé qu’il y avait un risque sérieux que l’attribution du marché soit contraire aux règles de passation des marchés publics qu’elle était tenue d’observer.

53      Le Tribunal estime que, dans ces circonstances, la caducité de la décision attaquée, qui a engendré sa disparition de l’ordre juridique communautaire, produit des effets équivalents à ceux d’un arrêt d’annulation, sans préjudice du droit du requérant de contester, le cas échéant, dans le cadre d’un recours distinct, la légalité de la décision d’annulation de l’appel d’offres. En effet, un arrêt du Tribunal qui annulerait la décision attaquée n’entraînerait aucune conséquence juridique supplémentaire par rapport aux conséquences découlant de sa caducité. La requérante ne conserve, dès lors, aucun intérêt à obtenir l’annulation de la décision attaquée. Il s’ensuit que le présent recours est devenu sans objet et que, par conséquent, il n’y a plus lieu de statuer (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 8 mars 1993, Lezzi Pietro/Commission, C‑123/92, Rec. p. I‑809, point 10 ; ordonnances du Tribunal du 13 juin 1997, TEAM et Kolprojekt/Commission, T‑13/96, Rec. p. II‑983, point 28, et du 6 décembre 1999, Elder/Commission, T‑178/99, Rec. p. II‑3509, points 20 et 21, et la jurisprudence citée).

54      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante selon lequel elle n’aurait pas reçu la décision d’annulation avant la date de dépôt de sa requête et que celle-ci lui aurait été erronément envoyée à l’adresse de sa filiale en Belgique au lieu d’être envoyée à l’adresse indiquée dans son offre.

55      À cet égard, il convient d’observer que le fait que l’EFSA ait décidé d’envoyer ladite décision à l’adresse de la requérante en Belgique n’a d’incidence ni sur sa portée ni sur sa validité. Il y a lieu de relever, ainsi que le souligne l’EFSA, que l’adresse du bureau de Bruxelles de la requérante figure parmi les quatre imprimées sur son papier à en‑tête. Il est constant, en outre, que d’autres communications de l’EFSA avaient bien été reçues antérieurement par la requérante à son adresse en Belgique. Parmi celles‑ci figure, notamment, la décision attaquée qui, par ailleurs, avait été envoyée, elle aussi, par courrier simple, comme cela a été confirmé par l’EFSA en réponse à une question écrite du Tribunal. Il ne ressort pas non plus des pièces versées au dossier que la requérante ait reproché à l’EFSA de lui avoir envoyé ces lettres à son adresse en Belgique et non à celle en Grèce. L’EFSA ne disposait, dès lors, d’aucun élément qui pouvait la dissuader d’envoyer la lettre communiquant l’annulation de l’appel d’offres à l’adresse du bureau de la requérante à Bruxelles, étant donné qu’elle avait la certitude que, auparavant, celle‑ci avait bien reçu sa correspondance.

56      Il convient, également, de relever qu’aucune disposition régissant la procédure de passation du marché en cause n’obligeait l’EFSA à effectuer une quelconque communication inhérente à la procédure en question à l’adresse principale des soumissionnaires non retenus. Il en est de même pour ce qui est des modalités de communication desdites décisions. Ainsi que le souligne l’EFSA, le Tribunal considère que celle‑ci n’était tenue, par aucune disposition régissant la matière, de respecter des formalités d’envoi de ces communications lui permettant de vérifier la réception effective de la part des soumissionnaires, bien qu’il soit regrettable qu’elle n’ait pas estimé opportun de suivre une modalité de communication apte à lui assurer une telle vérification.

57      À la lumière de ces considérations, le Tribunal estime que l’argument de la requérante est dénué de pertinence aux fins d’établir si le recours est sans objet et qu’il ne peut concerner, le cas échéant, que la question relative au règlement des dépens. En effet, même à supposer que la requérante n’ait pas reçu la décision d’annulation de la procédure de passation du marché avant le dépôt de sa requête, il n’en demeure pas moins que cette décision a été, par la suite, rendue publique par le biais de sa publication au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne. Il faut donc en déduire que le recours est devenu sans objet, à tout le moins et en tout état de cause, à la suite de ladite publication et qu’il n’y a plus lieu de statuer à cet égard.

58      S’agissant de l’argument de la requérante, tiré d’un manque de motivation suffisante de la décision annulant l’appel d’offres, le Tribunal, en relevant qu’un tel argument concerne une décision distincte de celle objet du présent recours, constate que la requérante n’a pas demandé à être autorisée à substituer de nouvelles conclusions à celles de sa requête et qu’elle n’a pas, par ailleurs, clairement étendu ou adapté ses conclusions et ses moyens initiaux à la décision ultérieure ou présenté des conclusions supplémentaires contre celle‑ci. Cet argument est, dès lors, irrecevable en ce qu’il vise à modifier l’objet du recours.

59      Il en va de même pour ce qui est de l’allégation de la requérante tirée de la prétendue violation de l’appel d’offre et du droit des marchés publics ainsi que de l’existence d’un prétendu abus de pouvoir que le pouvoir adjudicateur aurait commis en décidant d’attribuer, après avoir annulé l’appel d’offres litigieux, une partie du marché, à savoir l’achat du produit, au même adjudicataire de celui‑ci, et de procéder à une nouvelle procédure de passation pour ce qui est des services afférents audit produit.

60      Le Tribunal estime que ces décisions n’ont pas le même objet que celui de la décision attaquée dans le présent recours. En effet, sur la base du peu d’informations contenues dans le dossier, l’attribution du marché relatif à l’achat du produit semble être intervenue au terme d’une procédure négociée et dans le cadre d’un contrat-cadre déjà existant, tandis que la procédure de passation relative aux services afférents audit produit aurait fait l’objet d’une nouvelle publication au Journal officiel de l’Union européenne. Les deux procédures en cause se distinguent, dès lors, nettement de la procédure de passation du marché litigieuse.

61      Il s’ensuit que cette allégation visant, en substance, à l’annulation des décisions susmentionnées, dont le contenu exact ne ressort pas clairement du dossier, doit être déclarée irrecevable en ce qu’elle vise à modifier l’objet du présent recours.

62      De surcroît, ainsi qu’il ressort de la télécopie envoyée à l’EFSA par la requérante le 4 mars 2005, celle‑ci estimait, à l’époque, que ces décisions pouvaient être entachées d’illégalité. Rien ne l’aurait empêchée, dès lors, d’invoquer tout moyen relatif à l’illégalité de ces décisions à l’appui d’un recours en annulation introduit contre celles‑ci.

63      Il convient, enfin, d’observer que la circonstance que la requérante ne pourrait plus obtenir gain de cause par le biais du présent recours en annulation et serait vraisemblablement forclose à introduire un nouveau recours visant à annuler les décisions prises par l’EFSA à la suite de l’annulation de l’appel d’offres litigieux ne l’empêche pas de présenter, le cas échéant, une demande de réparation des préjudices qu’elle pourrait alléguer avoir subis du fait du comportement prétendument illégal de l’EFSA au cours de toute la procédure d’appel d’offres contestée.

64      À la lumière des considérations qui précèdent, le Tribunal constate que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer.

 Sur les dépens

65      L’EFSA considère que, ayant adopté la décision d’annulation en conformité avec les dispositions des règlements financiers, elle n’a pas conduit la requérante à exposer des frais frustratoires ou vexatoires. Par conséquent, elle demande que la requérante soit condamnée aux dépens.

66      Dans son mémoire en réplique, la requérante estime, au contraire, que l’EFSA doit supporter les dépens de la procédure, dès lors que cette procédure a été entamée uniquement ou partiellement parce que celle‑ci n’a pas réagi dans des délais raisonnables. Elle ajoute que, en l’espèce, l’EFSA ne s’est pas assurée de lui faire parvenir à temps la décision annulant l’appel d’offres.

67      Aux termes de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non‑lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

68      En l’espèce, il convient d’observer, en premier lieu, que, s’il est certes vrai que la décision annulant l’appel d’offres litigieux a été adoptée par l’EFSA le 7 février 2005, soit quatre jours avant l’introduction du présent recours, force est de constater que l'EFSA n’a pas établi son allégation selon laquelle la requérante aurait pris connaissance de cette décision à une date antérieure à l’introduction de son recours. Au contraire, il ressort du dossier que la requérante a pris connaissance de cette décision, pour la première fois, le 14 mars 2005, soit postérieurement à l’introduction du recours.

69      En deuxième lieu, il y a lieu de considérer que l’appel d’offres a été annulé, selon les dires mêmes de l’EFSA, notamment en raison des contestations avancées par la requérante lors de la procédure administrative.

70      En troisième lieu, il ressort du dossier que l’EFSA, après avoir demandé et obtenu la disponibilité de la requérante à participer à une réunion ayant pour but de discuter les questions liées à la recevabilité du recours, par courriel du 15 avril 2005, a, en substance, décliné sa disponibilité, en considération de l’avancement de la préparation de son mémoire en défense, qui a été déposé plus d’un mois après, à savoir le 19 mai 2005.

71      En quatrième lieu, il y a lieu de relever que l’EFSA, n’avançant pas la moindre justification, n’a pas respecté le délai qui lui a été imparti pour répondre aux questions écrites du Tribunal.

72      Au vu de ces considérations, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en décidant que l’EFSA supportera l’ensemble des dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Il n’y a pas lieu de statuer sur le présent recours.

2)      L’EFSA supportera l’ensemble des dépens.

Fait à Luxembourg, le 19 octobre 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’anglais.