Language of document : ECLI:EU:T:2024:463

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

10 juillet 2024 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises en raison de la situation en République démocratique du Congo – Gel des fonds – Restriction en matière d’admission sur le territoire des États membres – Maintien du nom du requérant sur les listes des personnes visées – Preuve du bien-fondé du maintien sur les listes – Erreur d’appréciation – Changement des circonstances de fait et de droit ayant présidé à l’adoption et au maintien des mesures restrictives »

Dans l’affaire T‑89/23,

Évariste Boshab, demeurant à Kinshasa (République démocratique du Congo), représenté par Mes T. Bontinck, P. De Wolf et A. Guillerme, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mmes M.-C. Cadilhac et S. Lejeune, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. R. da Silva Passos (rapporteur), président, S. Gervasoni et Mme I. Reine, juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 17 avril 2024,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le requérant, M. Évariste Boshab, demande, en substance, l’annulation, d’une part, de la décision (PESC) 2022/2412 du Conseil, du 8 décembre 2022, modifiant la décision 2010/788/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo (JO 2022, L 317, p. 122), et du règlement d’exécution (UE) 2022/2401 du Conseil, du 8 décembre 2022, mettant en œuvre l’article 9 du règlement (CE) no 1183/2005 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo (JO 2022, L 317, p. 32) et, d’autre part, de la décision (PESC) 2023/2768 du Conseil, du 8 décembre 2023, modifiant la décision 2010/788/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo (JO L, 2023/2768), et du règlement d’exécution (UE) 2023/2771 du Conseil, du 8 décembre 2023, mettant en œuvre l’article 9 du règlement (CE) no 1183/2005 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo (JO L, 2023/2771), en ce que ces actes (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués ») le concernent.

 Antécédents du litige

2        Le requérant est un ressortissant de la République démocratique du Congo ayant occupé, au sein de cet État, les fonctions de vice-Premier ministre et de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, puis de sénateur du Kasaï (République démocratique du Congo).

3        La présente affaire s’inscrit dans le cadre des mesures restrictives imposées par le Conseil de l’Union européenne en vue de l’instauration d’une paix durable en République démocratique du Congo et de l’exercice de pressions sur les personnes et les entités agissant en violation de l’embargo sur les armes imposé à cet État.

 Mesures adoptées par l’Union de manière autonome au regard de la situation en République démocratique du Congo

4        Le 18 juillet 2005, le Conseil a adopté, sur le fondement des articles 60, 301 et 308 CE, le règlement (CE) no 1183/2005, instituant certaines mesures restrictives spécifiques à l’encontre des personnes agissant en violation de l’embargo sur les armes imposé à la République démocratique du Congo (JO 2005, L 193, p. 1).

5        Le 20 décembre 2010, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2010/788/PESC, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de la République démocratique du Congo et abrogeant la position commune 2008/369/PESC (JO 2010, L 336, p. 30).

6        Le 12 décembre 2016, le Conseil a adopté, d’une part, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision (PESC) 2016/2231, modifiant la décision 2010/788 (JO 2016, L 336 I, p. 7) et, d’autre part, sur le fondement de l’article 215 TFUE, le règlement (UE) 2016/2230, modifiant le règlement no 1183/2005 (JO 2016, L 336 I, p. 1).

7        Selon l’article 9, paragraphe 2, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, les mesures restrictives en cause s’appliquaient jusqu’au 12 décembre 2017 et étaient prorogées, ou modifiées le cas échéant, si le Conseil estimait que leurs objectifs n’avaient pas été atteints.

 Critères appliqués pour adopter les mesures restrictives au regard de la situation en République démocratique du Congo

8        L’article 3, paragraphe 2, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, prévoyait ce qui suit :

« Les mesures restrictives prévues à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 5, paragraphes 1 et 2, sont instituées à l’encontre des personnes et entités :

a)      faisant obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en [République démocratique du Congo], notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’[É]tat de droit ;

b)      contribuant, en les planifiant, en les dirigeant ou en les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en [République démocratique du Congo] ;

c)      associées à celles visées [sous] a) et b),

dont la liste figure à l’annexe II. »

9        L’article 4, paragraphe 1, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, disposait que « [l]es États membres prennent les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire des personnes visées à l’article 3 ».

10      Aux termes de l’article 5, paragraphes 1 et 2, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, il était prévu ce qui suit :

« 1.      Sont gelés tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques que les personnes ou entités visées à l’article 3 possèdent ou contrôlent directement ou indirectement, ou qui sont détenus par des entités que ces personnes ou entités ou toute personne ou entité agissant pour leur compte ou sur leurs instructions, qui sont visées aux annexes I et II, possèdent ou contrôlent directement ou indirectement.

2.      Aucun fonds, autre avoir financier ou ressource économique n’est mis directement ou indirectement à la disposition des personnes ou entités visées au paragraphe 1 ou utilisé à leur profit. »

11      Aux termes de l’article 2 du règlement no 1183/2005, tel que modifié par le règlement 2016/2230, il est prévu ce qui suit :

« 1.      Sont gelés tous les fonds et ressources économiques qui appartiennent à une personne physique ou morale, à une entité ou à un organisme figurant sur la liste de l’annexe I ou de l’annexe I bis, qui sont en leur possession ou qui sont détenus ou contrôlés par ceux-ci, directement ou indirectement, y compris par un tiers agissant pour leur compte ou sur leurs instructions.

2.      Aucun fonds ou ressource économique n’est mis directement ou indirectement à la disposition des personnes physiques ou morales, entités ou organismes figurant sur la liste de l’annexe I ou de l’annexe I bis ni utilisé à leur profit. »

12      Aux termes de l’article 2 ter, paragraphe 1, du règlement no 1183/2005, tel que modifié par le règlement 2016/2230, il était prévu ce qui suit :

« L’annexe I bis comprend les personnes physiques ou morales, les entités ou les organismes désignés par le Conseil pour l’un des motifs suivants :

a)      faisant obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en [République démocratique du Congo], notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’[É]tat de droit ;

b)      préparant, dirigeant ou commettant des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en [République démocratique du Congo] ;

c)      étant associés aux personnes physiques ou morales, entités ou organismes visés [sous] a) et b). »

 Inscription initiale du nom du requérant sur les listes litigieuses

13      Le 29 mai 2017, le Conseil a adopté, d’une part, sur le fondement notamment de l’article 31, paragraphe 2, TUE et de l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2010/788, la décision d’exécution (PESC) 2017/905, mettant en œuvre la décision 2010/788 (JO 2017, L 138 I, p. 6) et, d’autre part, le règlement d’exécution (UE) 2017/904, mettant en œuvre l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 1183/2005 (JO 2017, L 138 I, p. 1).

14      Par ces actes, le nom du requérant a été inscrit sur les listes des personnes et des entités visées par les mesures restrictives qui figurent à l’annexe II de la décision 2010/788 et à l’annexe I bis du règlement no 1183/2005 (ci‑après, prises ensemble, les « listes litigieuses »), en application du critère d’inscription prévu à l’article 3, paragraphe 2, sous b), de la décision 2010/788 et à l’article 2 ter, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1183/2005, tels que modifiés, respectivement, par la décision 2016/2231 et le règlement 2016/2230 (ci-après le « critère d’inscription litigieux »).

15      Le Conseil a justifié une telle inscription par les motifs suivants :

« En sa qualité de vice-Premier ministre et ministre de l’[I]ntérieur et de la [S]écurité de décembre 2014 à décembre 2016, [le requérant] était officiellement responsable des services de police et de sécurité ainsi que de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux. À ce titre, il s’est rendu responsable de l’arrestation de militants et de membres de l’opposition, ainsi que d’un recours disproportionné à la force, notamment entre septembre 2016 et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa, pendant lesquelles de nombreux civils ont été tués ou blessés par les services de sécurité. [Il] a donc contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en [République démocratique du Congo]. »

16      Le requérant ainsi que sept autres personnes ont introduit un recours, enregistré sous le numéro d’affaire T‑582/17, tendant à l’annulation de la décision d’exécution 2017/905 et du règlement d’exécution 2017/904, pour autant que ces actes les concernaient. Ce recours a été rejeté par arrêt du 26 mars 2019, Boshab e.a./Conseil (T‑582/17, non publié, EU:T:2019:193).

 Prorogations successives de l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses

17      Les 11 décembre 2017 et 10 décembre 2018, par les décisions (PESC) 2017/2282 et (PESC) 2018/1940, modifiant la décision 2010/788 (JO 2017, L 328, p. 19 et JO 2018, L 314, p. 47) et par le règlement d’exécution (UE) 2018/1931, mettant en œuvre l’article 9 du règlement no 1183/2005 (JO 2018, L 314, p. 1), l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses a été maintenue, à deux reprises, avec les mêmes motifs, et ce jusqu’au 12 décembre 2019.

18      Le requérant a introduit deux recours contre ces actes pour autant qu’ils le concernaient, enregistrés, respectivement, sous les numéro d’affaires T‑171/18 et T‑111/19. Ces recours ont été rejetés, respectivement, par arrêts du 12 février 2020, Boshab/Conseil (T‑171/18, non publié, EU:T:2020:55), et du 3 février 2021, Boshab /Conseil (T‑111/19, non publié, EU:T:2021:54).

19      Les 9 décembre 2019, 10 décembre 2020 et 9 décembre 2021, par les décisions (PESC) 2019/2109, (PESC) 2020/2033 et (PESC) 2021/2181, modifiant la décision 2010/788 (JO 2019, L 318, p. 134, JO 2020, L 419, p. 30 et JO 2021, L 443, p. 75) et par les règlements d’exécution (UE) 2019/2101, (UE) 2020/2021 et (UE) 2021/2177, mettant en œuvre l’article 9 du règlement no 1183/2005 (JO 2019, L 318, p. 1, JO 2020, L 419, p. 5 et JO 2021, L 443, p. 3), l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses a été maintenue à trois autres reprises, et ce jusqu’au 12 décembre 2022. Les motifs de ces maintiens comprenaient la mention supplémentaire selon laquelle le requérant « a aussi participé à l’instrumentalisation et à l’aggravation de la crise dans la région du Kasaï, région dans laquelle [celui-ci] conserv[ait] une position d’influence en tant notamment que sénateur du Kasaï depuis mars 2019 ».

20      Le requérant a introduit trois recours contre ces actes pour autant qu’ils le concernaient, enregistrés, respectivement, sous les numéros d’affaires T‑107/20, T‑103/21 et T‑98/22. Ces recours ont été rejetés par arrêts du 15 septembre 2021, Boshab/Conseil (T‑107/20, non publié, EU:T:2021:583), du 27 avril 2022, Boshab/Conseil (T‑103/21, non publié, EU:T:2022:248), et du 8 mars 2023, Boshab/Conseil (T‑98/22, non publié, EU:T:2023:115).

21      Par courrier du 10 décembre 2021, le Conseil a notifié au requérant la décision 2021/2181 et le règlement d’exécution 2021/2177, avec un délai pour la présentation d’éventuelles observations fixé au 1er septembre 2022.

 Réexamen et sixième prorogation de l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses

22      Par courriers des 27 juin et 30 août 2022, les avocats du requérant ont demandé au Conseil la communication des éléments additionnels versés au dossier le concernant et ont transmis une attestation aux fins de démontrer l’absence de lien entre celui-ci et la situation d’instabilité sécuritaire dans la région du Kasaï. Par courrier du 14 juillet suivant, le Conseil les a informés de l’absence, à ce stade, de tels éléments et les a invités à communiquer des observations.

23      Par courrier du 13 octobre 2022, le Conseil leur a communiqué deux documents de travail et les a informés qu’il envisageait, au terme de la période de réexamen en 2022, de renouveler les mesures restrictives à l’égard du requérant, sans modification de l’exposé des motifs, en leur laissant un délai pour la présentation d’éventuelles observations sur ces documents.

24      Par courrier du 14 novembre 2022, les avocats du requérant ont transmis leurs observations, en soutenant que lesdits documents ne permettaient pas d’étayer et de justifier une sixième prorogation des mesures en cause. En particulier, compte tenu de l’évolution de la situation du requérant depuis l’inscription initiale de son nom sur les listes litigieuses, ils ont souligné l’absence d’actualisation et de bien-fondé de l’exposé des motifs retenu inchangé en vue de justifier le maintien de l’inscription de son nom sur ces listes.

25      Le 5 décembre 2022, à la suite d’une évaluation des circonstances en République démocratique du Congo, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2022/2377, modifiant la décision 2010/788 (JO 2022, L 314, p. 97), et le règlement (UE) 2022/2373, modifiant le règlement no 1183/2005 (JO 2022, L 314, p. 79), qui ont inséré quatre critères d’inscription supplémentaires à l’article 3, paragraphe 2, de la décision 2010/788 et à l’article 2 ter, paragraphe 1, du règlement no 1183/2005, aux dispositions sous c), d), e) et f) de ces paragraphes desdits articles. Cette insertion n’a pas eu d’incidence sur le critère d’inscription litigieux, repris à l’identique et en application duquel l’inscription initiale du nom du requérant sur les listes litigieuses avait été effectuée, puis maintenue par le Conseil (voir points 8, 11 et 14 ci-dessus).

26      Le 8 décembre 2022, le Conseil a adopté la décision 2022/2412 et le règlement d’exécution 2022/2401, par lesquels cette inscription a été prorogée, en application du critère d’inscription litigieux, jusqu’au 12 décembre 2023, l’exposé des motifs de ladite inscription, inchangé, se lisant comme suit :

« En sa qualité de vice-Premier ministre et ministre de l’[I]ntérieur et de la [S]écurité de décembre 2014 à décembre 2016, [le requérant] était officiellement responsable des services de police et de sécurité ainsi que de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux. À ce titre, il a été responsable de l’arrestation de militants et de membres de l’opposition, ainsi que d’un recours disproportionné à la force, y compris entre septembre 2016 et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa, pendant lesquelles de nombreux civils ont été tués ou blessés par les services de sécurité.

[Le requérant] a donc contribué à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en [République démocratique du Congo], en les planifiant, dirigeant ou commettant.

[Le requérant] a aussi participé à l’instrumentalisation et à l’aggravation de la crise dans la région du Kasaï, région dans laquelle il conserve une position d’influence, notamment en tant que sénateur du Kasaï depuis mars 2019. »

27      Par courrier du 9 décembre 2022, le Conseil a notifié ces actes au requérant, avec un délai pour la présentation d’éventuelles observations fixé au 1er septembre 2023. Il a ajouté que des éléments récents permettaient de procéder à une appréciation actualisée de sa situation et justifiaient cette décision de maintien du nom du requérant sur les listes litigieuses, dès lors que de graves violations des droits de l’homme perduraient en République démocratique du Congo, en particulier dans la région du Kasaï, et, en substance, que la constatation antérieure de l’existence d’un lien entre celui-ci et cette situation demeurait valide, compte tenu de sa fonction de sénateur qui en faisait une figure influente dans cette région. Il a ajouté que « [l]’exposé des motifs [le] concernant [était] resté inchangé par rapport à celui figurant en annexe de la décision [2021/2181], dans la mesure où ce dernier reflète avec exactitude les motifs justifiant [ce maintien, en application du] critère d[’inscription litigieux] ».

 Réexamen et septième prorogation de l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses

28      Par courrier du 17 octobre 2023, le Conseil a informé les avocats du requérant qu’il envisageait, au terme de la période de réexamen en 2023, de renouveler les mesures restrictives à son égard, sans modification de l’exposé des motifs. Il leur a également transmis deux documents de travail versés au dossier le concernant, avec un délai pour la présentation d’éventuelles observations.

29      Par courrier du 10 novembre 2023, les avocats du requérant ont transmis leurs observations en estimant, en substance, que ces documents étaient pour la plupart étrangers au requérant et que l’évolution de la situation particulière de ce dernier, au soutien de la coalition présidentielle, n’était pas de nature à justifier une septième prorogation des mesures en cause à son égard.

30      Le 8 décembre 2023, le Conseil a adopté la décision 2023/2768 et le règlement d’exécution 2023/2771, par lesquels l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses a été maintenue, en application du critère d’inscription litigieux, jusqu’au 12 décembre 2024, l’exposé des motifs de cette inscription demeurant inchangé (voir point 26 ci-dessus).

31      Par courrier du 11 décembre 2023, le Conseil a notifié ces actes au requérant, avec un délai pour la présentation d’éventuelles observations fixé au 1er septembre 2024. Il a ajouté, en substance, que les éléments récents versés au dossier justifiaient, de manière actualisée, le maintien de l’inscription de son nom sur les listes litigieuses, pour des motifs inchangés, dès lors que la constatation antérieure de l’existence d’un lien entre celui-ci et la situation d’instabilité et d’insécurité dans la région du Kasaï demeurait valide, compte tenu du maintien de la position d’influence qu’il tire de ses activités politiques dans le cadre de son mandat de sénateur. Il a ajouté que la création par le requérant d’une formation politique au soutien de la coalition de l’Union sacrée pour la Nation (USN) en faveur du président au pouvoir était de nature à renforcer cette position d’influence.

 Conclusions des parties

32      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        en substance, annuler les actes attaqués, pour autant que ces actes le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

33      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        à titre subsidiaire, en cas d’annulation des actes attaqués, maintenir les effets des décisions 2022/2412 et 2023/2768 en ce qui concerne le requérant jusqu’à la prise d’effet de l’annulation partielle des règlements d’exécution 2022/2401 et 2023/2771 ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

34      À l’appui de son recours, le requérant soulève deux moyens, tirés, le premier, d’une violation des droits de la défense et, en particulier, du droit d’être entendu et, le second, d’une erreur manifeste d’appréciation. Il y a lieu d’examiner, d’abord, le second moyen.

 Sur le second moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

35      Si le requérant a admis, lors de l’audience, ne pas contester le contexte général des mesures restrictives en cause et, à cet égard, la fragilité de la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo, notamment, dans la région du Kasaï, il déplore, néanmoins, pour chaque période de réexamen en 2022 et 2023, l’absence d’appréciation actualisée de sa situation particulière et, partant, le maintien de motifs d’inscription inchangés à son égard.

36      À cet égard, d’une part, le requérant estime que les circonstances de fait et de droit ayant présidé à l’adoption de ces mesures n’existent plus. Il reproche au Conseil d’avoir tenu compte de faits anciens et de fonctions qu’il n’occupe plus, sans établir au présent un lien suffisant, direct ou indirect, entre ses fonctions actuelles et les actes visés par lesdites mesures. Il précise ne plus exercer de fonction exécutive depuis au moins six ans avant l’adoption des actes attaqués et s’être distancié du parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) de l’ancien président. Il ajoute que le Conseil se réfère de manière abstraite à « une position d’influence » au titre de son mandat de sénateur du Kasaï depuis 2019, alors que l’écoulement du temps et l’évolution de la situation politique empêchent de conclure à la persistance d’un risque d’implication de sa part, du fait de ce mandat, dans la situation des droits de l’homme combattue. Selon lui, le Conseil a, ce faisant, procédé à une appréciation actualisée erronée de ses fonctions et de sa responsabilité dans la crise dans cette région et chercherait, en réalité, à établir qu’il est lié au gouvernement au pouvoir, ce qui revient à confondre les différents critères d’inscription. Par ailleurs, le maintien d’une activité sénatoriale et ses déclarations dans ce cadre participent de son droit à la liberté d’expression et d’association.

37      D’autre part, le requérant avance, s’agissant de la période de réexamen en 2022, que les éléments de preuve versés au dossier, s’ils décrivent une situation générale critique et, au mieux, sa participation à la vie politique de son pays, n’établissent cependant pas sa responsabilité dans cette situation. Selon lui, ces éléments, insuffisamment concrets, précis, concordants et, pour certains, obsolètes sont dépourvus de pertinence et de force probante afin d’étayer le maintien des motifs litigieux. Il produit une lettre de trois organisations non gouvernementales (ONG) reconnues, de nature, selon lui, à contredire les conclusions du Conseil sur sa situation particulière appréciée à la lumière du critère d’inscription litigieux. S’agissant de la période de réexamen en 2023, il fait valoir qu’il n’existe aucun élément nouveau au soutien du maintien des mesures restrictives en cause. Partant, les réexamens périodiques des mesures en 2022 et 2023 auraient été privés d’effet utile.

38      Pour ces raisons, le requérant soutient que les mesures en cause ne sont plus nécessaires à son égard au regard de l’objectif qui leur est associé et, dans ces conditions, que leur maintien va à l’encontre de leur nature conservatoire et provisoire et les transforme en peines pénales.

39      Le Conseil conteste ces arguments. Tout d’abord, son appréciation du contexte politique et sécuritaire en République démocratique du Congo ne dépasserait pas le cadre de la large marge d’appréciation dont il disposerait à cet égard. Il soutient que, malgré l’évolution de ce contexte depuis les élections présidentielles en 2018, la situation des droits de l’homme et du respect de l’État de droit, documentée par plusieurs rapports des Nations unies, demeurait préoccupante à la date des actes attaqués.

40      Ensuite, le Conseil rappelle qu’il n’est pas exigé que de nouvelles violations des droits de l’homme aient été commises au cours de la période précédant le réexamen, pourvu que le maintien des mesures en cause reste justifié au regard, notamment, du fait que les objectifs qu’elles visent n’auraient pas été atteints. Il souligne que, dans le cadre des recours précédents du requérant, sa situation particulière a été jugée suffisante afin de justifier leur maintien à son égard au vu, en particulier, de son rôle actif dans la situation d’instabilité sécuritaire dans la région du Kasaï. À ce sujet, il rappelle, en substance, la responsabilité du requérant dans des actes de violation des droits de l’homme ou atteintes à ces droits de 2024 à 2016. Il associe la constatation de ces actes à, d’une part, celle d’actes plus récents ayant contribué à cette situation dans la région du Kasaï et, d’autre part, au maintien de son mandat actuel, non contesté, de sénateur de cette région. Il souligne que cette conclusion ne saurait être infirmée par une distanciation du requérant à l’égard du régime et du parti de l’ancien président et qu’aucune preuve n’établit qu’il a changé de comportement et qu’il contribue désormais à l’apaisement des tensions et à la résolution de la crise dans la région du Kasaï. De plus, il estime que le fait que le requérant se rapproche de la coalition de l’USN, au soutien du président au pouvoir, est de nature à renforcer la position d’influence qu’il occupe au titre de ce mandat et donc le risque que les faits reprochés perdurent. Partant, il conclut à la perpétuation des circonstances de fait et de droit ayant présidé à l’adoption des mesures en cause et, ainsi, à la nécessité de leur maintien au titre des présents réexamens en vue de la réalisation de leurs objectifs. Quant au caractère pénal allégué desdites mesures, il souligne qu’elles sont de nature conservatoire.

41      Enfin, le Conseil avance qu’il disposait d’éléments constitutifs d’un faisceau d’indices concrets, précis et concordants, dont des articles de presse fiables, à même d’établir de manière actualisée, dans la continuité des éléments produits lors des renouvellements annuels précédents des mesures en cause, que le requérant reste un acteur politique influent. Selon lui, les nouveaux éléments produits au dossier en 2022 et 2023 attestent de l’exercice par le requérant de son mandat de sénateur, ce qui impliquerait que sa position d’influence dans la région du Kasaï n’a pas évolué d’une manière telle que les éléments de preuve ayant justifié l’inscription initiale et le maintien de son nom sur les listes litigieuses soient devenus obsolètes. Ainsi, en l’absence de changement significatif des contextes général et particulier, les éléments nouveaux versés au dossier permettent, selon lui, à la lumière des éléments plus anciens, d’établir que les faits initialement reprochés perdurent ou risquent de perdurer.

42      À titre liminaire, il importe de relever que le présent moyen doit être considéré comme étant tiré d’une erreur d’appréciation, et non d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, s’il est certes vrai que le Conseil dispose d’un certain pouvoir d’appréciation pour déterminer, au cas par cas, si les critères juridiques sur lesquels se fondent les mesures restrictives en cause sont remplis, il n’en demeure pas moins que les juridictions de l’Union doivent assurer un contrôle, en principe complet, de la légalité de l’ensemble des actes de l’Union (voir arrêt du 26 octobre 2022, Ovsyannikov/Conseil, T‑714/20, non publié, EU:T:2022:674, point 61 et jurisprudence citée ; arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 121).

43      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119).

44      Il appartient au Conseil, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne concernée, et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121, et du 28 novembre 2013, Conseil/Fulmen et Mahmoudian, C‑280/12 P, EU:C:2013:775, point 66).

45      À cette fin, il n’est pas requis que le Conseil produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne concernée (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122, et du 28 novembre 2013, Conseil/Fulmen et Mahmoudian, C‑280/12 P, EU:C:2013:775, point 67).

46      L’appréciation du caractère suffisamment solide de la base factuelle retenue par le Conseil doit être effectuée en examinant les éléments de preuve et d’information non de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent. En effet, le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe s’il fait état devant le juge de l’Union d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre l’entité sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime ou, en général, les situations combattues (voir arrêt du 20 juillet 2017, Badica et Kardiam/Conseil, T‑619/15, EU:T:2017:532, point 99 et jurisprudence citée).

47      Quant à la fiabilité et à la force probante des éléments de preuve, y compris ceux provenant de sources numériques, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, l’activité du juge de l’Union est régie par le principe de libre appréciation des preuves et que le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. À cet égard, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration ainsi que de son destinataire, et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable [voir arrêts du 31 mai 2018, Kaddour/Conseil, T‑461/16, EU:T:2018:316, point 107 et jurisprudence citée, et du 12 février 2020, Amisi Kumba/Conseil, T‑163/18, EU:T:2020:57, point 95 (non publié) et jurisprudence citée]. Cette appréciation des éléments s’effectue à la lumière des éventuelles observations présentées, notamment, par la personne ou l’entité concernée à leur sujet (voir, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 124).

48      À cet égard, en l’absence de pouvoirs d’enquête dans des pays tiers, l’appréciation des autorités de l’Union doit, de fait, se fonder sur des sources d’information accessibles au public, des rapports, des articles de presse ou d’autres sources d’information similaires [arrêt du 14 juillet 2021, Cabello Rondón/Conseil, T‑248/18, EU:T:2021:450, point 69 (non publié)]. Notamment, il ressort de la jurisprudence que le juge de l’Union peut prendre en considération des rapports d’organisations internationales (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2015, Ipatau/Conseil, C‑535/14 P, EU:C:2015:407, point 48). De même, les articles de presse peuvent être utilisés aux fins de corroborer l’existence de certains faits lorsqu’ils sont suffisamment concrets, précis et concordants quant aux faits qui y sont décrits (arrêt du 14 mars 2018, Kim e.a./Conseil et Commission, T‑533/15 et T‑264/16, EU:T:2018:138, point 108).

49      Par ailleurs, les mesures restrictives ont une nature conservatoire et, par définition, provisoire, dont la validité est toujours subordonnée à la perpétuation des circonstances de fait et de droit ayant présidé à leur adoption ainsi qu’à la nécessité de leur maintien en vue de la réalisation de l’objectif qui leur est associé. C’est ainsi qu’il incombe au Conseil, lors du réexamen périodique de ces mesures restrictives, de procéder à une appréciation actualisée de la situation et d’établir un bilan de l’impact de telles mesures, en vue de déterminer si elles ont permis d’atteindre les objectifs visés par l’inscription initiale des noms des personnes et des entités concernées sur la liste litigieuse ou s’il est toujours possible de tirer la même conclusion concernant lesdites personnes et entités (arrêts du 27 avril 2022, Ilunga Luyoyo/Conseil, T‑108/21, EU:T:2022:253, point 55 et du 26 octobre 2022, Ovsyannikov/Conseil, T‑714/20, non publié, EU:T:2022:674, point 67 ; voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 169).

50      Il en résulte que, pour justifier le maintien du nom d’une personne sur une liste des personnes et des entités faisant l’objet de mesures restrictives, il n’est pas interdit au Conseil de se fonder sur les mêmes éléments de preuve ayant justifié l’inscription initiale, la réinscription ou le maintien précédent du nom de la partie requérante sur ladite liste, pour autant que, d’une part, les motifs d’inscription demeurent inchangés et, d’autre part, le contexte n’a pas évolué d’une manière telle que ces éléments de preuve seraient devenus obsolètes (voir arrêts du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 169 et jurisprudence citée, et du 29 novembre 2023, Pumpyanskiy/Conseil, T‑734/22, non publié, EU:T:2023:761, point 45 et jurisprudence citée). À ce titre, l’évolution du contexte inclut la prise en considération, d’une part, de la situation du pays à l’égard duquel le système de mesures restrictives a été établi ainsi que de la situation particulière de la personne concernée (voir, en ce sens, arrêts du 26 octobre 2022, Ovsyannikov/Conseil, T‑714/20, non publié, EU:T:2022:674, point 78 ; du 6 septembre 2023, Shulgin/Conseil, T‑364/22, non publié, EU:T:2023:503, point 111, et du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 169) et, d’autre part, de l’ensemble des circonstances pertinentes et, notamment, la réalisation des objectifs visés par les mesures restrictives (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2022, Ilunga Luyoyo/Conseil, T‑108/21, EU:T:2022:253, point 56).

51      Dans ce cadre, le Conseil peut décider de maintenir sur les listes litigieuses les noms de personnes en conservant les motifs relatifs à des faits passés et retenus dans des décisions antérieures les concernant, sans que les personnes en cause aient commis de nouvelles violations des droits de l’homme au cours de la période précédant le réexamen, pourvu que ce maintien reste justifié au regard de l’ensemble des circonstances pertinentes et, notamment, au regard du fait que les objectifs visés par les mesures restrictives n’auraient pas été atteints (voir arrêt du 27 avril 2022, Ilunga Luyoyo/Conseil, T‑108/21, EU:T:2022:253, point 56 et jurisprudence citée ; arrêt du 8 mars 2023, Mutondo/Conseil, T‑94/22, non publié, EU:T:2023:120, point 50).

52      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le présent moyen.

53      En l’espèce, il résulte des considérants 3 et 4 de la décision 2016/2231 et du considérant 3 de la décision 2022/2377 que les mesures restrictives en cause s’appliquent à l’encontre, notamment, de personnes qui contribuent à de graves violations ou atteintes aux droits de l’homme et qu’elles ont, notamment, pour objectif de permettre une stabilisation de la situation en République démocratique du Congo en incitant le gouvernement à assurer un climat propice à la tenue d’un dialogue démocratique, à veiller au respect des droits de l’homme et de l’État de droit et à cesser toute instrumentalisation de la justice en vue de permettre de traduire, devant une justice indépendante, les auteurs d’atteintes graves à ces droits. À cette fin, elles visent, notamment, à faire pression sur les personnes qui appuient ou soutiennent le conflit armé, l’instabilité ou l’insécurité en République démocratique du Congo, ou qui en tirent profit.

54      En considération de ces objectifs, le nom du requérant a été inscrit sur les listes litigieuses, par la décision d’exécution 2017/905 et par le règlement d’exécution 2017/904, aux motifs, en substance, qu’il avait occupé les fonctions de vice-Premier ministre et de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et qu’il était, à ce titre, impliqué dans l’arrestation de militants et d’opposants politiques ainsi que dans un recours disproportionné à la force à l’encontre des civils, notamment en réponse à des manifestations organisées entre septembre et décembre 2016 en République démocratique du Congo.

55      De plus, par l’adoption des décisions 2019/2109, 2020/2033 et 2021/2181 et des règlements d’exécution 2019/2101, 2020/2021 et 2021/2177 portant, respectivement, troisième, quatrième et cinquième prorogations de l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses, le Conseil a ajouté, puis maintenu, à l’exposé des motifs d’une telle inscription la mention selon laquelle le requérant « a aussi participé à l’instrumentalisation et à l’aggravation de la crise dans la région du Kasaï dans laquelle il conserve une position d’influence en tant notamment que sénateur depuis mars 2019 ».

56      Statuant sur les recours en annulation dirigés contre ces actes, le Tribunal a constaté que le Conseil avait démontré à suffisance un lien entre le requérant et les objectifs des mesures restrictives en cause au regard de la situation sécuritaire en République démocratique du Congo, en particulier dans la région du Kasaï, et que l’ensemble des motifs d’inscription retenus à cette fin étaient établis (voir, en ce sens, arrêts du 15 septembre 2021, Boshab/Conseil, T‑107/20, non publié, EU:T:2021:583, points 164 à 178 ; du 27 avril 2022, Boshab/Conseil, T‑103/21, non publié, EU:T:2022:248, points 107 à 136, et du 8 mars 2023, Boshab/Conseil, T‑98/22, non publié, EU:T:2023:115, points 106 à 114).

57      Dans les actes attaqués, le Conseil a laissé inchangé ces motifs d’inscription alors que, d’une part, les faits retenus dans le premier alinéa de l’exposé desdits motifs se réfèrent aux fonctions gouvernementales du requérant qui avaient justifié l’inscription initiale de son nom sur les listes litigieuses, mais qu’il n’occupe plus depuis les élections présidentielles du 30 décembre 2018. D’autre part, les faits retenus dans le troisième alinéa de cet exposé des motifs visent sa position d’influence en tant que sénateur de la région du Kasaï depuis mars 2019, en l’associant à la crise dans cette région, ce qui avait déjà justifié le maintien de cette inscription à partir de cette date.

58      Dans ces circonstances, il importe donc de vérifier si le Conseil pouvait, au terme des réexamens effectués en 2022 et 2023 de la situation particulière du requérant sur la base de nouveaux éléments, appréciée à la lumière de la situation générale de la région du Kasaï, continuer de justifier le maintien du nom de celui-ci sur les listes litigieuses par des motifs inchangés. En particulier, il convient d’examiner si, au regard de l’ensemble des circonstances pertinentes et, notamment, des objectifs visés par les mesures en cause, le Conseil pouvait continuer de se référer à l’implication du requérant dans diverses violations des droits de l’homme entre septembre et décembre 2016, pour l’associer à la « conserv[ation d’] une position d’influence en tant notamment que sénateur » qui serait exercée de manière à soutenir la situation d’instabilité sécuritaire constatée dans la région du Kasaï.

59      En premier lieu, en ce qui concerne la situation sécuritaire générale en République démocratique du Congo et, plus précisément, dans la région du Kasaï, le requérant ne conteste pas que plusieurs rapports de l’Organisation des Nations unies, versés au dossier par le Conseil, étayent la commission, notamment par des agents de l’État, pendant les périodes de réexamen en 2022 et 2023, d’actes constitutifs de graves violations ou atteintes aux droits de l’homme en République démocratique du Congo et dans les provinces du Kasaï et du Kasaï Central, visés à l’article 3, paragraphe 2, sous b), de la décision 2010/788 et à l’article 2 ter, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1183/2005. Ainsi, le Conseil pouvait, sans commettre d’erreur d’appréciation, prendre ces actes en considération en vue de proroger les mesures restrictives en cause aux fins de réaliser les objectifs associés de soutien à l’État de droit et à la protection des droits de l’homme.

60      En second lieu, en ce qui concerne la situation particulière du requérant au moment de l’adoption des actes attaqués, premièrement, il est constant que celui-ci n’occupait plus les fonctions de vice-Premier ministre et de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité depuis une période importante de quatre ans au moment de l’adoption de la décision 2022/2412 et du règlement d’exécution 2022/2401 et de cinq ans au moment de l’adoption de la décision 2023/2768 et du règlement d’exécution 2023/2771. Il est également constant qu’il exerçait un mandat de sénateur de la région du Kasaï, et ce depuis plus de trois ans au moment de l’adoption de la décision 2022/2412 et du règlement d’exécution 2022/2401 et depuis plus de quatre ans au moment de l’adoption de la décision 2023/2768 et du règlement d’exécution 2023/2771.

61      Deuxièmement, il y a lieu de relever que le Conseil produit, en tant qu’éléments nouveaux versés au dossier et relatifs uniquement à la situation particulière du requérant, au titre de l’année 2022, quatre articles d’actualités en ligne tirés de sites Internet de radios et de médias en ligne, qui constituent les quatre premières pièces justificatives incluses dans le document de travail du 21 septembre 2022 portant la référence WK 12395/2022 INIT. Il ressort de ces articles que le requérant est décrit comme ayant récemment créé le groupe politique de l’Alliance pour des actions citoyennes (ACC), dont la mission est de « supporter la candidature [du président au pouvoir] en 2023 », en dissociation du PPRD et de la coalition du Front commun pour le Congo (FCC) de l’ancien président. Il est également précisé qu’il a rejoint la coalition de l’USN au soutien du président au pouvoir et qu’il a publiquement déclaré « [être] un républicain [qui] ne participera [j]amais à une quelconque [tentative de déstabilisation] contre l’[É]tat ».

62      Au titre de l’année 2023, les sept éléments produits par le Conseil, inclus dans le document de travail WK 11762/2023 REV 1, se réfèrent à la création par le requérant d’un parti politique, à sa distanciation de l’ancien président et à son soutien public, au sein de l’USN, à la candidature à l’élection présidentielle de décembre 2023 du président au pouvoir.

63      Troisièmement, il importe de rappeler que, en parallèle du contexte sécuritaire, ainsi que le Conseil l’a admis lui-même, le contexte politique en République démocratique du Congo a évolué depuis l’établissement des mesures restrictives en cause en 2016, et ce dans le sens d’une certaine ouverture démocratique à l’issue des élections présidentielles du 30 décembre 2018 (arrêt du 8 mars 2023, Boshab/Conseil, T‑98/22, non publié, EU:T:2023:115, point 76). Ainsi, au moment de l’adoption des actes attaqués, le régime au pouvoir était désormais lié à la coalition de l’USN, mise en place en 2021 au soutien du président au pouvoir, et ne procédait donc plus d’un accord de coalition avec des forces politiques proches de l’ancien président (voir, en ce sens, arrêt du 8 mars 2023, Ramazani Shadary/Conseil, T‑93/22, non publié, EU:T:2023:122, point 59).

64      Dès lors, au vu de l’ensemble de ces circonstances particulières et générales et à la lumière des objectifs poursuivis par les mesures en cause, tout d’abord, force est de constater que le contexte politique en République démocratique du Congo et l’activité politique du requérant, exercée désormais au soutien de l’USN en faveur du président au pouvoir, ont évolué d’une manière telle que les éléments de preuve, versés au dossier au titre des réexamens antérieurs et se rapportant au premier alinéa de l’exposé des motifs d’inscription litigieux, qui visent ses liens avec le régime et le président anciennement au pouvoir, sont devenus obsolètes. Par conséquent, ces éléments ne sauraient plus être pris en considération aux fins de l’examen de l’actualisation des circonstances de fait et de droit effectué par le Conseil au titre des périodes de réexamen en 2022 et 2023.

65      Ensuite, force est également de constater que les nouveaux éléments de preuves versés au dossier par le Conseil en 2023 et 2023, qui se rapportent au troisième alinéa de l’exposé des motifs d’inscription litigieux, se limitent, ainsi que cela ressort des points 61 et 62 ci-dessus, à établir que, de manière concordante avec le changement de contexte politique constaté, le requérant a renoncé à sa participation dans l’opposition du FCC, s’est publiquement distancié du régime anciennement au pouvoir et s’est rallié à la coalition du président au pouvoir, pour continuer de la sorte à participer à la vie politique de son pays.

66      Ce faisant, ces nouveaux éléments font uniquement état de l’évolution de l’activité politique du requérant en tant que sénateur de la République démocratique du Congo, pour la région du Kasaï, au soutien du président actuellement au pouvoir. En revanche, lesdits éléments n’étayent aucunement le fait que le requérant aurait, au cours des périodes de réexamen en 2022 et 2023, dépassé le cadre de l’exercice normal de ce mandat et, a fortiori, qu’il serait, en raison de l’influence politique qu’il a conservée à ce titre dans la région du Kasaï, impliqué, directement ou indirectement, dans la situation d’instabilité sécuritaire constatée dans cette région. Ainsi, ils ne permettent pas d’établir que, en raison dudit mandat et de son soutien du président au pouvoir, un lien subsiste entre ses activités sénatoriales et les actes constitutifs de graves violations ou atteintes aux droits de l’homme exposés au point 59 ci-dessus, qui se révèlent sans rapport avec de telles activités politiques.

67      Dans ces conditions, les éléments ajoutés au dossier par le Conseil au titre des deux périodes de réexamen considérées sont insuffisants, en tant que tels, pour démontrer le maintien par le requérant d’une influence exercée à des fins d’instrumentalisation et d’aggravation de la crise dans la région du Kasaï.

68      Enfin, il importe de relever que ces éléments ne s’inscrivent pas dans la continuité de ceux versés antérieurement au dossier par le Conseil, concernant les troisième, quatrième et cinquième prorogations de l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses, qui avaient permis, en tant que circonstances pertinentes, d’établir, en substance, qu’il demeurait impliqué dans des activités en lien avec l’instabilité de la délimitation administrative des frontières des régions du Kasaï et du Kasaï Central et, dans ce cadre, dans des actes de violations des droits de l’homme. Dès lors, s’il est vrai que, au titre des renouvellements précédents, les éléments de preuves ajoutés au dossier ont été examinés à la lumière de ceux plus anciens en raison de la continuité de l’ensemble de ces éléments, néanmoins, une telle appréciation ne saurait plus être effectuée en l’espèce à défaut d’une telle continuité.

69      Il résulte de ce qui précède que, dans le contexte de l’évolution de la situation particulière du requérant, exposée aux points 61 et 62 ci-dessus, et de la situation politique générale, exposée au point 63 ci-dessus, aucun élément du dossier, nouveau ou ancien, n’est de nature à démontrer le rôle joué par celui-ci du fait de ses responsabilités politiques, au moment de l’adoption des actes attaqués, dans la répression contre la population civile et la commission d’actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits prévus par le critère d’inscription litigieux.

70      Partant, le Conseil n’a pas soumis d’éléments susceptibles d’établir un lien entre des violations des droits de l’homme et le requérant depuis le réexamen effectué en 2021, soit près de deux ans avant l’adoption de la décision 2023/2768 et du règlement d’exécution 2023/2771.

71      Dès lors, compte tenu de l’évolution des circonstances de fait et de droit ayant présidé à l’adoption et au maintien des mesures restrictives en cause à l’égard du requérant, le Conseil n’a pas établi que celui-ci était encore en mesure d’exercer une influence négative sur la situation sécuritaire de la République démocratique du Congo et, en particulier, de la région du Kasaï.

72      Il s’ensuit que les circonstances retenues dans le troisième alinéa de l’exposé des motifs d’inscription litigieux, selon lesquelles le requérant a aussi participé à l’instrumentalisation et à l’aggravation de la crise dans la région du Kasaï, région dans laquelle il conserve une position d’influence en tant que sénateur du Kasaï depuis mars 2019, ne permettent pas, au titre des sixième et septième prorogations des mesures restrictives en cause, de conclure que le maintien de ces mesures à l’égard du requérant se justifiait en vue d’atteindre les objectifs qu’elles visent, à savoir soutenir l’amélioration de la situation des droits de l’homme dans cet État et, en particulier, dans la région du Kasaï.

73      La même conclusion s’applique a fortiori au premier alinéa de cet exposé des motifs, qui vise les anciennes fonctions du requérant de vice-Premier ministre et de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, et sa responsabilité à ce titre dans l’arrestation de militants et de membres de l’opposition, ainsi que dans le recours disproportionné à la force et à la répression violente à Kinshasa entre septembre 2016 et décembre 2016.

74      Par ailleurs, si le Conseil se prévaut du fait que le requérant s’est distancié du régime anciennement au pouvoir en République démocratique du Congo pour rejoindre la coalition au soutien du président au pouvoir, ce qui témoignerait d’un renforcement de sa position d’influence, il convient néanmoins de rappeler que, bien que, dans certaines circonstances propres à chaque situation, le Conseil puisse prendre en considération la proximité de la personne concernée à l’égard d’un régime particulier comme un élément pertinent au soutien du maintien de mesures restrictives à son égard, les circonstances de l’espèce ne permettent pas une telle analyse (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2022, Ilunga Luyoyo/Conseil, T‑108/21, EU:T:2022:253, point 77).

75      En effet, alors que le contexte politique a changé de telle manière que la configuration politique initiale n’existe plus et que, au moment de l’adoption des actes attaqués, le requérant n’occupait plus, depuis un laps de temps considérable, les fonctions exécutives qui avaient justifié, au regard de cette configuration politique, l’inscription de son nom sur les listes litigieuses, le Conseil reste en défaut d’apporter des éléments suffisants permettant de considérer que, au terme des deux périodes de réexamen en cause et du fait des fonctions sénatoriales du requérant, il existe encore un lien suffisant entre le requérant et la situation sécuritaire à l’origine des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits commis dans la région du Kasaï. Par conséquent, dans les circonstances propres de la présente affaire, un tel argument, qui, au surplus, manque de cohérence avec l’argumentation opposée dont se prévalait le Conseil dans le cadre des recours précédents du requérant, notamment celui dans l’affaire T‑103/21, ne saurait aboutir.

76      Partant, face aux contestations du requérant, le Conseil n’a pas été en mesure, à défaut d’appréciation actualisée de la situation du requérant, d’établir le bien-fondé du maintien des mesures restrictives en cause à son égard.

77      Il s’ensuit que le Conseil a commis une erreur d’appréciation en concluant, dans les actes attaqués, que l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses continuait d’être justifiée au motif qu’il avait contribué, en les planifiant, en les dirigeant ou en les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en République démocratique du Congo.

78      Au vu de ce qui précède, il convient d’accueillir le présent moyen et d’annuler les actes attaqués en ce qu’ils concernent le requérant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le premier moyen.

 Sur les effets dans le temps de l’annulation partielle des actes attaqués

79      À titre subsidiaire, le Conseil demande, par son deuxième chef de conclusions, que soient maintenus les effets des décisions 2022/2412 et 2023/2768 en ce qui concerne le requérant jusqu’à la prise d’effet de l’annulation partielle des règlements d’exécution 2022/2401 et 2023/2771.

80      Il résulte de l’article 60, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi n’a pas d’effet suspensif. L’article 60, second alinéa, de ce statut prévoit, cependant, que, par dérogation à l’article 280 TFUE, les décisions du Tribunal annulant un règlement, tel que, en l’espèce, les règlements d’exécution 2022/2401 et 2023/2771, ne prennent effet qu’à compter de l’expiration du délai pendant lequel un pourvoi peut être introduit ou, si un pourvoi a été introduit dans ce délai, à compter du rejet de celui-ci.

81      En ce qui concerne les effets dans le temps de l’annulation des décisions 2022/2412 et 2023/2768, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 264, second alinéa, TFUE, le Tribunal peut, s’il l’estime nécessaire, indiquer ceux des effets de l’acte annulé qui doivent être considérés comme définitifs.

82      En l’espèce, l’existence d’une différence entre la date d’effet de l’annulation des règlements d’exécution 2022/2401 et 2023/2771 et celle des décisions 2022/2412 et 2023/2768 serait susceptible d’entraîner une atteinte sérieuse à la sécurité juridique, ces actes imposant au requérant des mesures identiques (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2018, Klyuyev/Conseil, T‑731/15, EU:T:2018:90, point 263 et jurisprudence citée). Les effets de ces décisions doivent donc être maintenus, en ce qui concerne le requérant, jusqu’à la prise d’effet de l’annulation de ces règlements d’exécution.

 Sur les dépens

83      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision (PESC) 2022/2412 du Conseil, du 8 décembre 2022, modifiant la décision 2010/788/PESC en raison de la situation en la République démocratique du Congo, le règlement d’exécution (UE) 2022/2401 du Conseil, du 8 décembre 2022, mettant en œuvre l’article 9 du règlement (CE) no 1183/2005 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo, la décision (PESC) 2023/2768 du Conseil, du 8 décembre 2023, modifiant la décision 2010/788/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo et le règlement d’exécution (UE) 2023/2771 du Conseil du 8 décembre 2023, mettant en œuvre l’article 9 du règlement (CE) no 1183/2005 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en République démocratique du Congo sont annulés en ce que ces actes concernent M. Évariste Boshab.

2)      Les effets des décisions 2022/2412 et 2023/2768 sont maintenus à l’égard de M. Boshab jusqu’à la date d’expiration du délai de pourvoi visé à l’article 56, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ou, si un pourvoi est introduit dans ce délai, jusqu’au rejet du pourvoi.

3)      Le Conseil de l’Union européenne est condamné aux dépens.

da Silva Passos

Gervasoni

Reine

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 juillet 2024.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.