Language of document : ECLI:EU:T:2005:433

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
30 novembre 2005


Affaire T-361/03


Philippe Vanlangendonck

contre

Commission des Communautés européennes

« Fonctionnaires – Concours général – Non‑inscription sur la liste de réserve – Violation de l’avis de concours – Égalité de traitement »

Objet : Recours ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation de la décision du jury du concours COM/A/10/01 de ne pas inscrire le requérant sur la liste de réserve de ce concours et, d’autre part, une demande de dommages-intérêts.

Décision : Le recours est rejeté. Chaque partie supportera ses propres dépens.


Sommaire


1.      Fonctionnaires – Recours – Objet – Injonction à l’administration – Irrecevabilité

(Statut des fonctionnaires, art. 91)

2.      Fonctionnaires – Concours – Pouvoir d’appréciation du jury – Limites – Avis de concours

(Statut des fonctionnaires, annexe III, art. 1er, § 1)

3.      Fonctionnaires – Concours – Jury – Établissement de la liste de réserve – Nombre de candidats à inscrire – Règle recommandant l’établissement d’une liste comportant un nombre de lauréats d’au moins le double de celui des emplois mis au concours – Non‑application aux concours ouverts en vue de constituer une réserve de recrutement

(Statut des fonctionnaires, art. 29, § 1, alinéa 1, point 2 ; annexe III, art. 5, alinéa 5)

4.      Fonctionnaires – Concours – Concours sur titres et épreuves – Contenu des épreuves – Épreuves orales – Pouvoir d’appréciation du jury – Portée – Contrôle juridictionnel – Limites

(Statut des fonctionnaires, annexe III)

5.      Fonctionnaires – Égalité de traitement – Notion – Recrutement – Concours – Différence de traitement, parmi les candidats ayant obtenu le minimum requis, entre ceux occupant un rang permettant leur inscription sur la liste de réserve et les autres – Légalité

6.      Fonctionnaires – Égalité de traitement – Recrutement – Concours – Taux de réussite plus élevé pour les candidats d’une certaine nationalité que pour les autres – Absence de discrimination en raison de la nationalité

7.      Fonctionnaires – Concours – Concours sur titres et épreuves – Obligations du jury – Examen comparatif des mérites des candidats – Existence d’une égalité de mérites entre plusieurs candidats – Admissibilité

(Statut des fonctionnaires, annexe III)

8.      Fonctionnaires – Recours – Demande en indemnité liée à une demande en annulation – Rejet de la demande en annulation entraînant le rejet de la demande en indemnité

(Statut des fonctionnaires, art. 90 et 91)


1.      Dans le cadre d’un recours introduit au titre de l’article 91 du statut, des conclusions tendant à ordonner à une institution d’adopter certaines mesures sont irrecevables. En effet, le Tribunal ne peut, dans l’exercice de ses compétences, adresser une injonction aux institutions communautaires ou se substituer à ces dernières, la compétence du juge communautaire étant limitée au contrôle de la légalité de l’acte attaqué.

(voir point 25)

Référence à : Tribunal 20 juin 2001, Buisson/Commission, T‑243/99, RecFP p. I‑A‑131 et II‑601, point 37, et la jurisprudence citée


2.      Si l’autorité investie du pouvoir de nomination dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour fixer les conditions d’un concours, le jury est lié par le texte de l’avis de concours tel qu’il a été publié. Les termes de l’avis de concours constituent aussi bien le cadre de légalité que le cadre d’appréciation pour le jury de concours.

(voir point 32)

Référence à : Cour 18 février 1982, Ruske/Commission, 67/81, Rec. p. 661, point 9 ; Tribunal 16 avril 1997, Fernandes Leite Mateus/Conseil, T‑80/96, RecFP p. I‑A‑87 et II‑259, point 27 ; Tribunal 5 mars 2003, Staelen/Parlement, T‑24/01, RecFP p. I‑A‑79 et II‑423, point 47 ; Tribunal 21 octobre 2004, Schumann/Commission, T‑49/03, non encore publié au Recueil, point 63


3.      Un concours, organisé en vue d’établir une liste de réserve, relève de l’article 29, paragraphe 1, second alinéa, du statut. Cette disposition prévoit que la procédure de concours peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement et non pas uniquement en vue de pourvoir à la vacance de certains emplois déterminés, comme le prévoit le premier alinéa de ce même paragraphe. Or, s’il s’agit de constituer une telle réserve de recrutement, le nombre de postes à pourvoir ne saurait, à l’évidence, être chiffré à l’avance avec certitude. Les dispositions de l’article 5, cinquième alinéa, de l’annexe III du statut, recommandant l’établissement d’une liste comportant un nombre de lauréats d’au moins le double de celui des emplois mis au concours, ne s’appliquent donc que dans les cas relevant de l’article 29, paragraphe 1, premier alinéa, du statut et non pas dans ceux relevant du second alinéa de cette même disposition. Dès lors, on ne saurait se fonder sur l’article 5, cinquième alinéa, de l’annexe III du statut pour affirmer un droit d’un requérant à ce que le jury augmente le nombre des lauréats.

(voir point 35)


4.      Le jury d’un concours dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant au contenu détaillé des épreuves prévues dans le cadre d’un concours. Il n’appartient au juge communautaire de censurer ce contenu qu’au cas où celui‑ci sort du cadre indiqué dans l’avis de concours ou n’a pas de commune mesure avec les finalités de l’épreuve du concours.

S’agissant, plus particulièrement, des épreuves orales d’un concours, le pouvoir d’appréciation du jury se trouve encore élargi par la liberté et l’incertitude caractérisant ce type d’épreuve, qui est, de par sa nature même, moins uniformisé que l’épreuve écrite et dont le contenu peut varier en fonction de l’expérience et de la personnalité des différents candidats ainsi que des réponses qu’ils fournissent aux questions du jury.

(voir points 38 et 39)

Référence à : Cour 8 mars 1988, Sergio e.a./Commission, 64/86, 71/86 à 73/86 et 78/86, Rec. p. 1399, point 22 ; Tribunal 23 mars 2000, Gogos/Commission, T‑95/98, RecFP p. I‑A‑51 et II‑219, point 36 ; Tribunal 9 novembre 2004, Vega Rodríguez/Commission, T‑285/02 et T‑395/02, non encore publié au Recueil, point 35


5.      Il y a violation du principe d’égalité de traitement lorsque deux catégories de personnes, dont les situations juridiques et factuelles ne présentent pas de différence essentielle, se voient appliquer un traitement différent ou lorsque des situations différentes sont traitées de manière identique.

Dans un concours qui, contrairement à un examen, est fondé sur une appréciation comparative des mérites des candidats, une inégalité de traitement fondée sur une différence de position dans le classement des candidats ne saurait être qualifiée d’illégale. En effet, l’inscription, sur la liste de réserve, des candidats à un concours dépend du rang occupé par ceux‑ci dans le classement final. Dès lors, il n’y a pas discrimination entre les candidats ayant dépassé le nombre de points éliminatoires sans pour autant obtenir suffisamment de points pour figurer au rang utile dans le classement et les candidats ex aequo qui ont obtenu suffisamment de points pour occuper le dernier rang utile de ce classement.

(voir points 47 et 48)

Référence à : Tribunal 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T‑100/92, RecFP p. I‑A‑83 et II‑275, point 50 ; Tribunal 25 mai 2000, Elkäim et Mazuel/Commission, T‑173/99, RecFP p. I‑A‑101 et II‑433, point 64


6.      S’agissant d’un concours général sur épreuves, dans le cadre duquel chaque candidat concourt avec tous les autres, y compris ceux ayant la même nationalité que lui, pour un nombre limité de places sur la liste de réserve et dont le résultat final dépend uniquement des notes obtenues par les candidats dans toutes les épreuves, il ne saurait être déduit du seul nombre plus élevé de réussites des candidats d’une certaine nationalité par rapport à ceux des autres nationalités une présomption de discrimination à l’encontre de ces derniers.

(voir point 53)


7.      L’obligation de procéder à un examen comparatif des mérites des candidats d’un concours n’exclut pas que cet examen aboutisse au constat qu’il existe une égalité de mérites entre deux ou plusieurs de ces candidats.

(voir point 57)

Référence à : Tribunal 18 septembre 2003, Callebaut/Commission, T‑241/01, RecFP p. I‑A‑215 et II‑1061, point 44


8.      Les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation, qui ont, elles‑mêmes, été rejetées comme non fondées.

(voir point 65)

Référence à : Tribunal 25 juin 2003, Pyres/Commission, T‑72/01, RecFP p. I‑A‑169 et II‑861, point 85, et la jurisprudence citée