Language of document : ECLI:EU:T:2014:1063

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

11 décembre 2014 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire tridimensionnelle – Forme d’une boîte de chocolats – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑440/13,

Zakład Wyrobów Cukierniczych « Millano » Krzysztof Kotas, établie à Przeźmierowo (Pologne), représentée par Me B. Kański, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 22 mai 2013 (affaire R 755/2012-2), concernant une demande d’enregistrement d’un signe tridimensionnel constitué par la forme d’une boîte de chocolats comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse (rapporteur) et A. M. Collins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 août 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 16 décembre 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 octobre 2011, la requérante, Zakład Wyrobów Cukierniczych « Millano » Krzysztof Kotas, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe tridimensionnel suivant :

Image not foundImage not found

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Boîtes de chocolats ».

4        Par décision du 16 février 2012, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en raison du défaut de caractère distinctif de la marque demandée.

5        Le 16 avril 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 22 mai 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de réformer la décision attaquée en faisant droit au recours du 16 avril 2012.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la portée et la recevabilité des conclusions

9        Il convient de relever que les conclusions de la requérante visent, en substance, l’annulation de la décision attaquée et l’enregistrement de la marque demandée.

10      Or, il convient d’emblée de préciser que, quoi qu’il en soit de la légalité de la décision attaquée, la seconde de ces demandes, visant l’enregistrement de la marque demandée, est irrecevable.

11      En effet, premièrement, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’OHMI [voir, en ce sens, arrêts du 29 janvier 2013, Germans Boada/OHMI (Carrelette manuelle) T‑25/11, EU:T:2013:40, points 18 et 20, et du 28 novembre 2013, Vitaminaqua/OHMI – Energy Brands (vitaminaqua) T‑410/12, EU:T:2013:615, point 16].

12      Deuxièmement, pour autant que la demande visant l’enregistrement de la marque demandée peut être comprise comme visant à ce que le Tribunal adopte la décision que la chambre de recours aurait dû prendre, il convient de rappeler que les instances de l’OHMI compétentes en la matière n’adoptent pas de décision formelle constatant l’enregistrement d’une marque communautaire qui pourrait faire l’objet d’un recours. Par conséquent, la chambre de recours n’est pas compétente pour connaître d’une demande visant à ce qu’elle enregistre une marque communautaire. Dans ces circonstances, il n’appartient pas davantage au Tribunal de connaître d’une demande de réformation visant à ce qu’il modifie la décision d’une chambre de recours en ce sens (voir arrêt vitaminaqua, point 11 supra, EU:T:2013:615, point 17 et jurisprudence citée).

 Sur le fond

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

14      La requérante reproche à la chambre de recours de n’avoir pas examiné si la marque demandée divergeait de manière significative de la norme et des habitudes de la branche d’activité concernée et présenterait, donc, une particularité de nature à attirer l’attention. L’absence sur le marché de miniboîtes de chocolats avec un support extrudé de la forme de la marque demandée justifierait de constater le caractère distinctif de cette marque. Contrairement à ce qu’aurait retenu l’OHMI, la marque demandée serait inhabituelle dans ses formes et atypique, ce qui la rendrait distinctive. La chambre de recours reprocherait, de manière illogique, à la requérante de ne pas pouvoir rapporter la preuve – impossible – qu’il n’existerait sur le marché aucune autre entreprise fabricant des boîtes de chocolat de la même forme que la marque demandée. La marque demandée serait clairement distinctive.

15      L’OHMI conteste la position de la requérante.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif sont refusées à l’enregistrement.

17      Le caractère distinctif d’une marque au sens de cette disposition signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 20 octobre 2011, Freixenet/OHMI, C‑344/10 P et C‑345/10 P, Rec, EU:C:2011:680, point 42 et jurisprudence citée).

18      Les critères d’appréciation du caractère distinctif des marques tridimensionnelles constituées par l’apparence du produit lui-même ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques (arrêt Freixenet/OHMI, point 17 supra, EU:C:2011:680, point 45).

19      Toutefois, il convient de tenir compte, dans le cadre de l’application de ces critères, du fait que la perception du consommateur moyen n’est pas nécessairement la même dans le cas d’une marque tridimensionnelle, constituée par l’apparence du produit lui-même, que dans le cas d’une marque verbale ou figurative, qui consiste en un signe indépendant de l’apparence des produits qu’elle désigne. En effet, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et il pourrait donc s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif d’une telle marque tridimensionnelle que d’établir celui d’une marque verbale ou figurative (arrêt Freixenet/OHMI, point 17 supra, EU:C:2011:680, point 46).

20      Dans ces conditions, seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine, n’est pas dépourvue de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 (arrêt Freixenet/OHMI, point 17 supra, EU:C:2011:680, point 47).

21      Le caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêt Freixenet/OHMI, point 17 supra, EU:C:2011:680, point 43).

22      En l’espèce, il est constant que les produits visés dans la demande de marque sont des produits de consommation courante et que le public pertinent est le consommateur moyen.

23      La chambre de recours, à l’issue d’une analyse de la marque demandée, prise en chacun de ses éléments, à savoir, un groupe de cubes et un support moulé, puis en la combinaison desdits éléments, a conclu que cette marque était dépourvue de caractère distinctif. La chambre de recours a ainsi relevé que cette marque, à savoir un signe tridimensionnel résultant de la combinaison de 18 cubes d’apparence chocolatée, non reliés entre eux, de base carrée et de côtés en forme de trapèze, et d’un support moulé comportant 18 creux ayant chacun la forme d’un chocolat, disposés en trois rangées de six creux chacune, était banale et dépourvue de tout élément de nature à lui permettre de jouer, auprès du public pertinent, un rôle d’indication d’origine commerciale.

24      La requérante n’avance aucun argument de nature à contredire cette appréciation.

25      S’agissant, tout d’abord, de l’argument selon lequel la chambre de recours aurait dû examiner si la marque demandée divergeait de manière significative de la norme et des habitudes du secteur, c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé qu’il était notoire que les formes géométriques simplifiées étaient généralement utilisées comme formes pour des produits en chocolat et que, par conséquent, les cubes qui constituaient un élément de la marque demandée ne se démarquaient pas significativement de la norme ou des habitudes du secteur. S’agissant de l’élément formé du support moulé, c’est également à juste titre que la chambre de recours a relevé qu’il constituait un mode habituel de présentation d’un nombre déterminé de petits chocolats et que le fait de présenter des petits chocolats dans un support extrudé avec des creux pour les accueillir, en trois rangées parallèles de six chocolats, était banal et habituel. Dans son appréciation globale de la marque, la chambre de recours a correctement conclu à l’absence de caractère distinctif.

26      Ainsi, contrairement à ce que suggère la requérante, la chambre de recours s’est bien, à travers son examen de la marque demandée, interrogée si cette marque présentait une particularité de nature à la rendre distinctive. Il se trouve que la chambre de recours a, en substance et correctement, conclu à l’absence d’une telle particularité.

27      S’agissant, ensuite, de la critique formulée par la requérante selon laquelle les appréciations de la chambre de recours reviendraient à exiger d’elle la preuve impossible à fournir qu’aucune autre entreprise ne produit la même forme de boîte de chocolats, il suffit de constater que ce n’est pas tant la chambre de recours qui exige une telle preuve que la requérante qui procède, la première, à une affirmation gratuite quant à sa qualité de seul producteur de cette forme de boîte de chocolat.

28      Quoi qu’il en soit, la circonstance alléguée que la requérante serait la seule à produire la forme d’emballage correspondant à la marque demandée n’implique pas que cette marque présente un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Ce qui importe, aux termes de la jurisprudence citée au point 20 ci-dessus, c’est que la marque demandée diverge, de manière significative, de la norme ou des habitudes du secteur. Or, la requérante n’a apporté aucun démenti sérieux à la constatation de la chambre de recours selon laquelle tel n’était pas le cas.

29      En conclusion, c’est à bon droit que la chambre de recours, confirmant la décision de l’examinateur, a refusé l’enregistrement de la marque demandée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

30      Le recours doit donc être rejeté.

 Sur les dépens

31      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il convient de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Zakład Wyrobów Cukierniczych « Millano » Krzysztof Kotas est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : le polonais.