Language of document : ECLI:EU:T:2007:312

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

18 octobre 2007 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative OMEGA 3 – Marque nationale verbale antérieure PULEVA-OMEGA 3 – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement CE n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑28/05,

Ekabe International SCA, établie à Luxembourg (Luxembourg), représentée par Me C. de Haas, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Ebro Puleva, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me P. Casamitjana Lleonart, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 6 octobre 2004 (affaire R 117/2001‑4), relative à une procédure d’opposition entre Puleva SA (devenue Ebro Puleva, SA) et Ekabe International SCA,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras, président, F. Dehousse et D. Šváby, juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 janvier 2005,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 4 août 2005,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 28 juillet 2005,

à la suite de l’audience du 9 novembre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 avril 1998, la société Cema a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque figurative en couleur dont l’enregistrement a été demandé est la suivante :

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3        Le produit pour lequel l’enregistrement de la marque a été demandé relève de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspond à la description suivante : « Margarine ».

4        Le 11 janvier 1999, la demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires.

5        Le 12 avril 1999, l’intervenante, Puleva SA (devenue Ebro Puleva, SA), a formé une opposition, au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée.

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était un risque de confusion entre la marque demandée et la marque nationale verbale antérieure PULEVA-OMEGA3 de l’intervenante, enregistrée en Espagne le 22 mars 1999 sous le numéro 2140889 pour des produits relevant de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Viandes, poissons, volailles et gibiers ; extraits de viandes, fruits et légumes conservés, séchés et cuits ; gelées, confitures, compotes, œufs ; huiles et graisses comestibles, plats préparés à base de viande, poisson ou légumes et spécialement laits et produits laitiers ».

7        Les 7 février et 10 mai 2000, l’intervenante et la société Cema ont respectivement présenté des observations supplémentaires.

8        Par décision du 24 novembre 2000, la division d’opposition a accueilli l’opposition, au motif que les produits et les signes en cause étaient similaires et qu’il existait, dès lors, un risque de confusion dans l’esprit du public espagnol.

9        Le 26 janvier 2001, la société Cema a formé un recours contre la décision de la division d’opposition.

10      Le 6 avril 2001, l’intervenante a présenté ses observations devant la chambre de recours.

11      Le 28 août 2002, la société Cema a transféré sa demande de marque communautaire à Primalliance, SAS.

12      Le 30 août 2004, Primalliance a transféré la demande de marque communautaire à la requérante, Ekabe International, SCA.

13      Par décision du 6 octobre 2004 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et a confirmé la décision de la division d’opposition, au motif que les produits en cause étaient similaires ou identiques et qu’il existait un certain degré de similarité entre les signes.

14      En ce qui concerne la comparaison des produits, la chambre de recours a précisé, au point 11 de la décision attaquée, que le produit couvert par la marque demandée, à savoir la margarine, était considérablement semblable ou identique aux produits que sont les huiles, les graisses comestibles et les produits laitiers et qui sont couverts par la marque antérieure.

15      S’agissant de la comparaison entre les signes, la chambre de recours a considéré, au point 14 de la décision attaquée, que l’élément « omega 3 » présentait un caractère distinctif normal en ce qui concerne les produits couverts par la demandée et que, dès lors, il convenait d’en tenir compte lors de la comparaison des marques en conflit. La chambre de recours a précisé que le consommateur moyen espagnol ne percevait pas, au moment de la demande d’enregistrement de la marque demandée, que cet élément était descriptif en ce qui concerne les caractéristiques essentielles des produits concernés, au motif qu’il était peu probable que le consommateur moyen espagnol associe l’élément « omega 3 » à des acides gras polyinsaturés dont la valeur nutritionnelle contribue à prévenir les maladies cardiovasculaires. Quant aux extraits de divers sites Internet produits par la requérante et faisant référence à l’élément « omega 3 », la chambre de recours a précisé qu’un examen attentif n’en étayait pas les arguments de la requérante selon lesquels l’élément « omega 3 » appartenait au langage courant et selon lesquels une grande partie du public espagnol connaissait ses propriétés médicales ou nutritionnelles.

16      Sur le plan visuel, la chambre de recours a précisé, aux points 15 et 16 de la décision attaquée, que l’élément « omega 3 » constituait l’élément dominant de la marque demandée, alors que l’élément figuratif semblait indubitablement moins important et contribuait peu au caractère distinctif de la marque demandée. Ni la présence du terme « puleva » dans la marque antérieure, ni les éléments figuratifs de la marque demandée ne permettraient aux consommateurs d’établir une distinction suffisante entre les signes en conflit. Sur le plan phonétique, la chambre de recours a précisé, au point 17 de la décision attaquée, que les marques en conflit étaient similaires dans la mesure où elles avaient en commun l’élément « omega 3 » mais différaient quant à leur longueur et à leur rythme en présence de l’élément « puleva » dans la marque antérieure. Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a précisé, au point 18 de la décision attaquée, que le consommateur moyen n’était pas capable d’établir une relation conceptuelle entre l’élément verbal « omega 3 » et le type d’acides gras polyinsaturés du même nom connu pour ses propriétés médicales et qu’il serait tout au plus capable d’identifier le terme « omega » comme étant la dernière lettre de l’alphabet grec. Quant à l’élément « puleva » de la marque antérieure, la chambre de recours a précisé qu’il était un mot fantaisiste qui n’avait aucune connotation en espagnol.

17      La chambre de recours a conclu qu’il existait dès lors un risque de confusion entre les marques en conflit pour les consommateurs espagnols au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

 Conclusions des parties

18      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler et réformer la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

19      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        condamner chacune des parties devant le Tribunal à supporter ses propres dépens dans le cas où le recours serait accueilli.

20      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

21      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

 Arguments des parties

22      La requérante considère qu’il n’y a pas de risque de confusion entre les marques en conflit dès lors que le consommateur espagnol ne retiendra des deux signes en cause que le mot « puleva » dans la marque antérieure, d’une part, et le graphisme et les couleurs particulières associées à l’élément « omega 3 » dans la marque demandée, d’autre part.

23      Premièrement, la requérante fait valoir que l’élément « omega 3 » est descriptif et usuel pour désigner des produits alimentaires dont ce type d’acides gras polyinsaturés constitue un composant chimique. La requérante produit, au soutien de cet argument, des documents relatifs à l’existence de produits alimentaires sur le marché espagnol mettant en exergue l’élément « omega 3 », ainsi qu’à l’existence de marques déposées en Espagne comprenant cet élément. Il ressortirait, en outre, des articles de presse diffusés sur le territoire espagnol et des extraits de sites Internet produits par la requérante en annexe à sa requête que le consommateur moyen espagnol connaît bien les propriétés bénéfiques des acides gras polyinsaturés de type omega 3 et ne considère nullement cet élément comme constituant un signe distinctif. Le caractère descriptif ou usuel auprès du public espagnol de l’élément « omega 3 » pour des produits alimentaires aurait été, en outre, reconnu par l’Oficina Española de Patentes y Marcas (Office espagnol des brevets et des marques) et confirmé en appel par les Tribunales Superiores de Justicia (Cours supérieures de justice) dans le cadre d’affaires relatives à des oppositions similaires. La requérante considère, dès lors, qu’il est erroné d’affirmer que l’élément « omega 3 » est dominant au sein des deux marques en conflit. Le raisonnement de la chambre de recours serait, en outre, contradictoire dès lors que, pour justifier une similarité conceptuelle entre les marques en conflit, elle aurait estimé que le consommateur espagnol connaîtrait suffisamment l’élément « omega 3 ».

24      Deuxièmement, la requérante soutient que seul l’élément « puleva » est inhabituel et présente un caractère distinctif dans la marque antérieure. Le fait que cet élément soit la dénomination sociale du titulaire de la marque antérieure ne ferait pas de ce mot un élément secondaire de cette marque. La requérante fait valoir que soit l’élément « puleva » bénéficie d’une certaine notoriété auprès du public espagnol, auquel cas la marque antérieure serait bien connue et focaliserait l’attention du public, soit l’élément « puleva » n’est pas particulièrement connu, auquel cas il devrait être considéré comme arbitraire et donc distinctif pour les produits concernés. Selon la requérante, le mot « puleva » sert précisément à garantir l’origine des produits et permet donc aux consommateurs de distinguer les produits de l’intervenante de ceux de ses concurrents. La requérante ajoute que le mot « puleva » positionné en tête de la marque antérieure en constitue l’élément dominant sur le plan visuel, puisque le consommateur le lit en premier, et l’élément dominant sur le plan phonétique, car les syllabes « pu » et « va » sont très clairement audibles. De plus, la lettre « p » serait une consonne de prononciation très marquée qui retiendrait l’attention du consommateur. En outre, le mot « puleva » n’aurait aucun sens, alors que le consommateur espagnol saurait, au moins approximativement, que les acides gras polyinsaturés de type omega 3 ont des propriétés bénéfiques en ce qui concerne les maladies cardiovasculaires.

25      Troisièmement, la requérante observe que l’élément figuratif de la marque demandée est tout à fait distinctif. La requérante observe que l’élément « omega 3 » est stylisé, si bien que le chiffre « 3 » semble s’inscrire dans la continuité de la lettre « a » du mot « omega ». La marque demandée serait, en outre, représentée dans des couleurs très vives, à savoir le vert, le jaune, le bleu et le rouge, lesquelles retiendraient l’attention du consommateur. Selon la requérante, l’élément figuratif de la marque demandée, à savoir un arc-en-ciel vert, jaune et bleu débouchant sur un coeur rouge qui est situé entre la lettre « o » et la lettre « m » du mot « omega », est également un élément distinctif.

26      Quatrièmement, la requérante affirme qu’il sera possible pour les consommateurs espagnols de procéder à une comparaison directe entre les produits couverts par les marques en conflit. Selon la requérante, il ne s’agit pas de comparer la margarine avec l’intégralité des produits alimentaires relevant de la classe 29, mais seulement de la comparer avec le lait et les produits laitiers ainsi que les huiles et les graisses comestibles. Le consommateur espagnol serait en mesure de comparer directement, par exemple, toutes ces boissons lactées placées les unes à côté des autres sur les rayons et de faire son choix en fonction de la marque ou du prix du produit.

27      Enfin, la requérante observe que conférer à une marque telle que la marque antérieure, constituée de l’élément « puleva-omega3 », un monopole sur l’élément « omega 3 » crée une insécurité juridique très préjudiciable alors que ce mot devrait pouvoir être librement utilisé (arrêt de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C‑108/97 et C‑109/97, Rec. p. I‑2779, point 25).

28      L’OHMI rétorque que, dès lors que la requérante n’a pas démontré en temps utile que l’élément « omega 3 » était susceptible d’être perçu comme descriptif par le public pertinent espagnol, la chambre de recours a jugé à juste titre que cet élément était aussi distinctif et dominant au sein de la marque antérieure que l’élément « puleva ». Les ressemblances dans leur ensemble entre les signes en conflit incitent, selon l’OHMI, à trancher en faveur de leur similarité. Les produits concernés étant identiques ou très similaires, l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit en Espagne serait justifiée.

29      À l’égard des pièces produites par la requérante devant le Tribunal, l’OHMI observe qu’elles n’ont pas été produites devant la chambre de recours et que, partant, elles sont par principe irrecevables.

30      Tout d’abord, l’intervenante soutient que l’élément « omega 3 » est en lui-même dominant et distinctif, et dépourvu de caractère descriptif ou usuel. Selon l’intervenante, l’élément « omega 3 » est éventuellement connu d’un certain public spécialisé, mais il n’est pas connu du public en général et notamment pas du consommateur espagnol moyen non spécialisé.

31      Ensuite, l’intervenante soutient qu’il existe une similitude évidente entre les deux marques en conflit. Selon l’intervenante, l’élément « omega 3 » est l’élément prédominant dans chacune des deux marques en conflit, étant donné que cet élément verbal est celui que le consommateur moyen retient d’emblée, aussi bien du point de vue visuel que du point de vue phonétique. Le fait que la marque demandée contient un élément figuratif n’aurait pas d’importance en raison de la prédominance de l’élément verbal sur l’élément figuratif.

32      En outre, l’intervenante observe que la requérante limite la comparaison entre les produits couverts par les marques en conflit au seul secteur des produits lactés, des huiles et des graisses. Selon l’intervenante, indépendamment de l’existence sur le marché d’autres marques contenant l’élément « omega 3 », il existe une grande similitude entre les produits couverts par les signes en cause.

33      Enfin, l’intervenante fait observer que les arguments de la requérante entraîneraient un refus absolu d’enregistrement de la marque demandée. Ainsi, l’Oficina Española de Patentes y Marcas aurait refusé l’enregistrement de la marque verbale OMEGA 3 pour des produits relevant de la classe 30 que l’intervenante avait demandé, au motif que le signe en cause était exclusivement constitué d’indications descriptives des caractéristiques des produits.

 Appréciation du Tribunal

 Sur la recevabilité de certaines pièces produites par la requérante devant le Tribunal

34      La requérante produit, en annexes 4 à 21, 24 à 27 et 33 à sa requête, des éléments factuels qui n’ont pas été produits devant l’OHMI, ainsi qu’il ressort de la consultation du dossier de la procédure devant la chambre de recours, transmis au Tribunal en application de l’article 133, paragraphe 3, de son règlement de procédure. Le Tribunal constate que seuls les extraits de sites Internet que la requérante a produits en annexe 30 à sa requête ont été produits durant la procédure devant les instances de l’OHMI.

35      Il y a lieu de rappeler ici que, selon une jurisprudence constante, le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours au sens de l’article 63 du règlement nº 40/94. Or, des faits qui sont invoqués devant le Tribunal sans avoir été portés auparavant devant les instances de l’OHMI ne sauraient affecter la légalité d’une telle décision que si l’OHMI avait dû les prendre en considération d’office. À cet égard, il résulte de l’article 74, paragraphe 1, in fine, du règlement nº 40/94, selon lequel, dans une procédure concernant les motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen de l’OHMI est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties, que celui-ci n’est pas tenu de prendre en considération, d’office, des faits qui n’ont pas été avancés par les parties. Partant, de tels faits ne sont pas susceptibles de mettre en cause la légalité d’une décision de la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 13 juillet 2004, Samar/OHMI – Grotto (GAS STATION), T‑115/03, Rec. p. II‑2939, point 13, et du 21 avril 2005, PepsiCo/OHMI – Intersnack Knabber-Gebäck (RUFFLES), T‑269/02, Rec. p. II‑1341, point 35].

36      Il s’ensuit que les documents produits par la requérante dans les annexes 4 à 21, 24 à 27 et 33 doivent être écartés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante.

 Sur le bien-fondé du moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94

37      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

38      En vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement nº 40/94, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

39      En l’espèce, la marque antérieure sur laquelle se fonde l’opposition est enregistrée et protégée en Espagne. Partant, afin d’établir l’existence éventuelle d’un risque de confusion entre les marques en conflit, il convient de tenir compte du point de vue du public pertinent en Espagne.

40      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celles des produits ou des services désignés [arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 32, et la jurisprudence citée].

41      Il y a lieu de constater que la conclusion tirée dans la décision attaquée par la chambre de recours en ce qui concerne la similitude ou l’identité des produits désignés par les signes en conflit n’est pas contestée par la requérante. Seule la question de savoir si la chambre de recours a considéré à bon droit que les signes en conflit étaient globalement similaires est débattue entre les parties.

42      Il y a donc lieu d’examiner la question de la similitude entre les signes en conflit.

43      Il est de jurisprudence constante que ne peuvent être considérées comme étant similaires une marque complexe et une autre marque, identique ou présentant une similitude avec l’un des composants de la marque complexe, que lorsque celui-ci constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque complexe. Tel est le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque soient négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 33, et du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, Rec. p. II‑1515, point 44].

44      La requérante fait valoir que c’est à tort que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, au motif qu’elles ont en commun l’élément verbal « omega 3 ». Selon la requérante, contrairement à ce qui a été retenu dans la décision attaquée, l’élément « omega 3 » doit être considéré comme étant descriptif des caractéristiques des produits concernés et, pour cette raison, c’est le terme « puleva » qui constitue l’élément dominant de la marque antérieure. Dès lors, il n’existerait, en l’espèce, aucun risque de confusion entre les deux marques en conflit.

45      Il convient de relever à cet égard que, selon la jurisprudence, si, lorsqu’on examine l’impression d’ensemble produite sur le public pertinent par une marque demandée, un composant dépourvu de caractère distinctif constitue l’élément dominant émanant de ladite marque, alors que les autres éléments figuratifs et graphiques qui la composent sont de nature accessoire, ne présentant aucun aspect, notamment en termes de fantaisie ou quant à la manière dont ils sont combinés, de nature à permettre à la marque en question d’accomplir sa mission essentielle en ce qui concerne les produits et les services sur lesquels porte la demande d’enregistrement, l’ensemble de la marque demandée est dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 et elle doit être refusée à l’enregistrement (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, Rec. p. I‑7975, points 73 à 75).

46      La même conclusion s’impose, s’agissant d’une marque demandée dont l’élément dominant, dans l’impression d’ensemble produite sur le public pertinent, consiste en un élément verbal entièrement descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, tandis que les éléments figuratifs que cette marque comporte ne sont pas suffisamment frappants dans l’esprit du public pertinent pour retenir son attention, au détriment de l’élément verbal descriptif, et conférer au signe en question, considéré dans son ensemble, un effet distinctif (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général M. Léger sous l’arrêt BioID/OHMI, précité, Rec. p. I‑7979, point 75).

47      En outre, si, certes, le demandeur d’une marque communautaire ne saurait, dans le cadre d’une procédure d’opposition, contester la validité de la marque antérieure invoquée en opposition au motif que son enregistrement serait contraire à l’article 7 du règlement nº 40/94 [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 71], s’agissant, en revanche, d’un motif absolu de refus qui s’opposerait à l’enregistrement de la marque communautaire demandée, l’OHMI a la faculté, parallèlement à une procédure d’opposition, de rouvrir la procédure d’examen afin de vérifier l’existence éventuelle d’un tel motif [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 avril 2003, Durferrit/OHMI – Kolene (NU-TRIDE), T‑224/01, Rec. p. II‑1589, point 73].

48      Eu égard à ces considérations, le Tribunal estime qu’il y a lieu, en l’espèce, d’examiner, tout d’abord, si, dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée sur le public pertinent, l’élément verbal « omega 3 » constitue l’élément dominant émanant de ladite marque complexe, et ce indépendamment du caractère descriptif ou non de cet élément.

49      Contrairement à ce que fait valoir la requérante, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 15 de la décision attaquée, que l’élément verbal « omega 3 », écrits en caractères de couleur verte, de grande taille et ombrés de jaune, constitue l’élément dominant de la marque demandée, en ce qu’il attirera en premier l’attention du consommateur de par sa position centrale dans la marque en question. En revanche, l’élément figuratif de cette même marque, à savoir l’arc-en-ciel vert, jaune et bleu qui surplombe l’élément « omega 3 » et débouche sur un cœur rouge, qui est situé entre la lettre « o » et la lettre « m » du mot « omega », est d’une taille nettement moins grande et contribue donc peu au caractère distinctif de ladite marque.

50      Dans ces conditions, le moyen unique formé par la requérante doit être rejeté, sans qu’il soit nécessaire pour le Tribunal de se prononcer sur le caractère descriptif ou non, pour les produits visés par les marques en conflit, de l’élément verbal dominant « omega 3 », en ce qui concerne le public espagnol. En effet, à supposer même que cet élément soit descriptif, ainsi que le prétend la requérante, une annulation de la décision attaquée pour ce motif amènerait nécessairement l’OHMI, auquel il incomberait de tirer les conséquences du dispositif et des motifs de l’arrêt du Tribunal [arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 33 ; du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 12, et du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS), T‑388/00, Rec. p. II‑4301, point 19], à rouvrir la procédure d’examen de la demande de marque communautaire de la requérante et de la rejeter sur la base des considérations énoncées aux points 45 à 49 ci-dessus.

51      Or, un requérant n’a aucun intérêt légitime à l’annulation d’une décision, dans le cas où cette annulation ne pourrait que donner lieu à l’intervention d’une nouvelle décision aboutissant au même résultat que la décision annulée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, Rec. p. II‑5167, point 97, et la jurisprudence citée].

52      En revanche, dans l’hypothèse où il faut considérer que l’élément « omega 3 » n’est pas descriptif, c’est à juste titre que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, compte tenu du caractère dominant de l’élément verbal « omega 3 » dans la marque demandée.

53      Force est de constater que la requérante n’avance pas, dans cette hypothèse, d’arguments précis pour contester le bien-fondé de la décision de la chambre de recours.

54      Il y a lieu de relever, de façon générale, que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents (arrêt MATRATZEN, précité, point 30). Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, sont pertinents les aspects visuel, phonétique et conceptuel. En outre, l’appréciation de la similitude entre deux marques doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 23, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 25).

55      À cet égard, le Tribunal estime qu’il convient, en première analyse, de considérer que, dans le cas où l’unique élément verbal dominant d’une marque complexe est identique, sur le plan visuel et sur le plan phonétique, à l’un des deux seuls éléments constituant une marque verbale antérieure, et où ces éléments, pris ensemble ou isolément, n’ont, sur le plan conceptuel, aucune signification pour le public concerné, les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, sont normalement à considérer comme similaires au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

56      En l’espèce, il y a lieu de constater que, sur le plan visuel et sur le plan phonétique, l’élément « omega 3 » est à la fois le second des deux éléments constituant la marque antérieure (le premier étant l’élément « puleva ») et l’unique élément verbal de la marque demandée, dont il constitue l’élément dominant (voir point 49 ci-dessus).

57      Si le public ciblé ne considère pas l’élément « omega 3 » comme étant descriptif des produits concernés, cet élément sera perçu par le public pertinent comme présentant un caractère fantaisiste et intrinsèquement distinctif.

58      Étant donné qu’il en va de même de l’élément « puleva », il y a lieu de considérer que ces deux éléments ont un pouvoir attractif équivalent à l’égard du public pertinent et que, accolés ensemble dans l’expression « puleva-omega 3 », ils seront perçus par ce public comme dominants à parts égales, sans que l’élément « omega 3 » perde son caractère distinctif.

59      Dans ces circonstances, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu que les marques en conflit, considérées chacune dans son ensemble en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants, étaient similaires.

60      Compte tenu de ce qui précède, le public pertinent est susceptible de penser que les produits alimentaires revêtus de la marque demandée peuvent provenir de l’entreprise titulaire de la marque antérieure. En conséquence, le degré de similitude entre les marques en conflit est suffisant pour pouvoir considérer qu’il existe un risque de confusion entre celles-ci.

61      Quant à la circonstance invoquée par la requérante selon laquelle le consommateur espagnol pourra directement comparer les produits couverts par les marques en conflit, elle ne saurait écarter le risque de confusion ainsi établi. En effet, rien ne permet d’affirmer que les produits de la requérante et ceux de l’intervenante seraient commercialisés, comme le soutient la requérante, les uns à côté des autres. Au contraire, le Tribunal estime qu’il est exact de considérer, comme l’a constaté la chambre de recours dans la décision attaquée, que le consommateur moyen de produits alimentaires n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques. Ainsi, le consommateur observant des produits alimentaires prend en considération et retient l’élément prédominant du signe qui lui permet, lors d’une acquisition ultérieure, de répéter l’expérience. Or, lorsque le public ciblé trouvera des produits désignés par la marque demandée, dont l’élément dominant est identique à l’un des deux composants de la marque antérieure, il est tout à fait probable qu’il attribuera la même origine commerciale aux produits en question.

62      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

63      Le recours doit, dès lors, être rejeté.

 Sur les dépens

64      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Ekabe International SCA est condamnée aux dépens.

Vilaras

Dehousse        Šváby



Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 octobre 2007.


Le greffier              Le président




E. Coulon       

M. Vilaras


* Langue de procédure : le français.