Language of document : ECLI:EU:T:2024:326

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

29 mai 2024 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine – Gel des fonds – Liste des personnes, des entités et des organismes auxquels s’applique le gel des fonds et des ressources économiques – Inscription et maintien du nom du requérant sur la liste – Notion de “femme ou homme d’affaires influents” – Article 2, paragraphe 1, sous g), de la décision 2014/145/PESC – Article 3, paragraphe 1, sous g), du règlement (UE) no 269/2014 – Erreur d’appréciation »

Dans l’affaire T‑363/22,

Farkhad Teimurovich Akhmedov, demeurant à Bakou (Azerbaïdjan), représenté par Mes W. Julié et A. Beauchemin, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. B. Driessen et Mme M.  Di Gaetano, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. D. Spielmann, président, Mme M. Brkan (rapporteure) et M. S. L. Kalėda, juges,

greffier : Mme I. Kurme, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure, notamment :

–        la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 juin 2022,

–        le mémoire en adaptation déposé par le requérant au greffe du Tribunal le 24 novembre 2022,

–        le mémoire en adaptation déposé par le requérant au greffe du Tribunal le 20 mai 2023,

–        le courrier du 19 décembre 2023 par lequel le requérant a déclaré renoncer au chef de conclusions tendant à l’indemnisation de ses préjudices matériel et moral,

à la suite de l’audience du 9 janvier 2024,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le requérant, M. Farkhad Teimurovich Akhmedov, demande l’annulation, premièrement, de la décision (PESC) 2022/582 du Conseil, du 8 avril 2022, modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2022, L 110, p. 55), et du règlement d’exécution (UE) 2022/581 du Conseil, du 8 avril 2022, mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2022, L 110, p. 3) (ci-après, pris ensemble, les « actes initiaux »), deuxièmement, de la décision (PESC) 2022/1530 du Conseil, du 14 septembre 2022, modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2022, L 239, p. 149), et du règlement d’exécution (UE) 2022/1529 du Conseil, du 14 septembre 2022, mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2022, L 239, p. 1) (ci-après, pris ensemble, les « actes de maintien de septembre 2022 »), et troisièmement, de la décision (PESC) 2023/572 du Conseil, du 13 mars 2023, modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2023, L 75I, p. 134), et du règlement d’exécution (UE) 2023/571 du Conseil, du 13 mars 2023, mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2023, L 75I, p. 1) (ci-après, pris ensemble, les « actes de maintien de mars 2023 »), en tant que ces actes (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués ») le concernent.

 Antécédents du litige

2        Le requérant est de nationalités russe et azerbaïdjanaise.

3        Le 17 mars 2014, le Conseil de l’Union européenne a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2014/145/PESC, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2014, L 78, p. 16).

4        À la même date, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE, le règlement (UE) no 269/2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2014, L 78, p. 6).

5        Le 24 février 2022, le président de la Fédération de Russie a annoncé une opération militaire en Ukraine et, le même jour, les forces armées russes ont attaqué l’Ukraine à plusieurs endroits du pays.

6        Le 25 février 2022, au vu de la gravité de la situation en Ukraine, le Conseil a adopté, d’une part, la décision (PESC) 2022/329, modifiant la décision 2014/145 (JO 2022, L 50, p. 1), et, d’autre part, le règlement (UE) 2022/330, modifiant le règlement no 269/2014 (JO 2022, L 51, p. 1), afin notamment d’amender les critères en application desquels des personnes physiques ou morales, des entités ou des organismes pouvaient être visés par les mesures restrictives en cause. Selon le considérant 11 de la décision 2022/329, le Conseil a estimé qu’il convenait de modifier les critères de désignation applicables de façon à inclure les personnes et entités qui apportaient un soutien au gouvernement de la Fédération de Russie ou qui tiraient avantage de ce gouvernement ainsi que les personnes et entités qui lui fournissaient une source substantielle de revenus et les personnes physiques ou morales associées aux personnes et entités figurant sur la liste en cause.

7        L’article 2, paragraphes 1 et 2, de la décision 2014/145, dans sa version modifiée par la décision 2022/329, se lit comme suit :

« 1. Sont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant :

[…]

g)      à des femmes et hommes d’affaires influents ou des personnes morales, des entités ou des organismes ayant une activité dans des secteurs économiques qui fournissent une source substantielle de revenus au gouvernement de la Fédération de Russie, qui est responsable de l’annexion de la Crimée et de la déstabilisation de l’Ukraine,

[…]

2. Aucun fonds ni aucune ressource économique n’est, directement ou indirectement, mis à la disposition des personnes physiques ou morales, des entités ou des organismes dont la liste figure à l’annexe, ou mis à leur profit. ».

8        Les modalités de ce gel de fonds sont définies à l’article 2, paragraphes 3 à 6, de la décision 2014/145.

9        Le règlement no 269/2014, dans sa version modifiée par le règlement 2022/330, impose l’adoption de mesures de gel de fonds et définit les modalités de ce gel en des termes identiques, en substance, à ceux de la décision 2014/145 telle que modifiée. En effet, l’article 3, paragraphe 1, sous a) à g), de ce règlement reprend pour l’essentiel l’article 2, paragraphe 1, sous a) à g), de ladite décision.

10      Dans ce contexte, le 8 avril 2022, le Conseil a adopté les actes initiaux par lesquels le nom du requérant a été ajouté, respectivement, à la liste annexée à la décision 2014/145 telle que modifiée et à celle figurant à l’annexe I du règlement no 269/2014 tel que modifié (ci-après les « listes litigieuses »). Les motifs d’inscription du nom du requérant sur lesdites listes sont les suivants :

« [Le requérant] est un homme d’affaires russe actif dans le secteur de l’énergie et dans la politique locale russe. Il a fondé Tansley Trading, qui fournissait des équipements aux producteurs de gaz russes, et est devenu actionnaire minoritaire de Nort[h]gas, une compagnie pétrolière et gazière de Sibérie, ainsi que président de Bechtel Energy. Proche du Kremlin, il est un homme d’affaires influent ayant une activité dans des secteurs économiques qui constituent une source substantielle de revenus pour le gouvernement de la Fédération de Russie. »

11      Le 11 avril 2022, le Conseil a publié au Journal officiel de l’Union européenne un avis à l’attention des personnes, entités et organismes faisant l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2014/145, modifiée par la décision 2022/582, et par le règlement no 269/2014, mis en œuvre par le règlement d’exécution 2022/581 (JO 2022, C 157, p. 11). Cet avis indiquait, notamment, que les personnes concernées pouvaient adresser au Conseil une demande de réexamen de la décision par laquelle leurs noms avaient été inscrits sur les listes annexées auxdits actes.

12      Par courrier du 31 mai 2022, le requérant a adressé au Conseil une demande de réexamen des actes initiaux.

13      Par courrier du 7 juin 2022, le requérant a demandé au Conseil la communication du dossier de preuves ayant servi de fondement à l’adoption des mesures restrictives le concernant.

14      Par courrier du 16 juin 2022, le Conseil a communiqué au requérant les informations figurant dans le dossier portant la référence WK 5041/2022 INIT (ci-après le « premier dossier de preuves »).

 Faits postérieurs à l’introduction du présent recours

15      Le 14 septembre 2022, le Conseil a adopté les actes de maintien de septembre 2022 par lesquels les mesures prises à l’encontre du requérant ont été prolongées jusqu’au 15 mars 2023.

16      Dans les actes de maintien de septembre 2022, le Conseil a justifié la prorogation des mesures restrictives visant le requérant en reprenant l’ensemble des motifs des actes initiaux repris au point 10 ci-dessus.

17      Par courrier du 15 septembre 2022, le Conseil a répondu à la demande de réexamen du requérant du 31 mai 2022, en rejetant cette demande et en lui notifiant sa décision de maintenir son nom sur les listes litigieuses.

18      Par courrier du 2 novembre 2022, le requérant a adressé au Conseil une nouvelle demande de réexamen.

19      Par courrier du 22 décembre 2022, le Conseil a informé le requérant de son intention de maintenir les mesures restrictives à son égard en modifiant les motifs d’inscription sur le fondement du dossier de preuves portant la référence WK 5041/2022 ADD 1 REV 1 (ci-après le « deuxième dossier de preuves ») et l’a invité à faire valoir ses observations avant le 12 janvier 2023.

20      Par courrier du 12 janvier 2023, le requérant a formulé des observations en réponse à la lettre du Conseil du 22 décembre 2022.

21      Par courrier du 6 février 2023, le Conseil a informé le requérant de son intention de maintenir les mesures restrictives à son égard en modifiant les motifs d’inscription et a transmis les informations figurant dans les dossiers portant la référence WK 1558/2023 INIT (ci-après le « troisième dossier de preuves ») et WK 1565/2023 INIT (ci-après le « quatrième dossier de preuves »). Le Conseil a invité le requérant à faire valoir ses observations avant le 21 février 2023.

22      Le 21 février 2023, le requérant a formulé des observations en réponse à la lettre du 6 février 2023.

23      Le 13 mars 2023, le Conseil a adopté les actes de maintien de mars 2023, qui ont prolongé les mesures prises à l’encontre du requérant jusqu’au 15 septembre 2023. Les motifs d’inscription du nom du requérant ont été modifiés, conformément à ce que le Conseil avait annoncé dans son courrier du 6 février 2023 et se lisent comme suit :

« [Le requérant] est un homme d’affaires russe qui a été actif dans le secteur de l’énergie et dans la politique locale russe. Il a fondé Tansley Trading, qui fournissait des équipements aux producteurs de gaz russes, et est devenu actionnaire minoritaire de Nort[h]gas, une compagnie pétrolière et gazière de Sibérie. Il serait proche du Kremlin et a été un homme d’affaires influent ayant une activité dans des secteurs économiques qui constituent une source substantielle de revenus pour le gouvernement de la Fédération de Russie, qui est responsable de l’annexion de la Crimée et de la déstabilisation de l’Ukraine. Il réside en Russie et y a toujours des intérêts commerciaux, y compris dans le secteur des technologies de l’information et dans le secteur forestier. »

24      Par courrier du 14 mars 2023, le Conseil a répondu aux lettres du requérant des 2 novembre 2022, 12 janvier 2023 et 21 février 2023 et lui a notifié sa décision de maintenir son nom sur les listes litigieuses.

 Conclusions des parties

25      Dans le dernier état de ses conclusions, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués en ce qu’ils le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

26      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        à titre subsidiaire, si les actes attaqués devaient être annulés en ce qu’ils concernent le requérant, ordonner le maintien des effets de la décision 2023/572 jusqu’à ce que l’annulation partielle du règlement d’exécution 2023/571 prenne effet ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

27      À l’appui du recours, le requérant invoque cinq moyens. Le premier moyen est tiré d’une exception d’illégalité de l’article 2, paragraphe 1, sous g), de la décision 2014/145 telle que modifiée par la décision 2022/329 et de l’article 3, paragraphe 1, sous g), du règlement no 269/2014 tel que modifié par le règlement 2022/330. Il invoque en outre, un deuxième moyen tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective et de l’obligation de motivation, un troisième moyen tiré d’une erreur « manifeste » d’appréciation et un quatrième moyen tiré d’une violation du droit de propriété. Dans le cadre de son premier mémoire en adaptation, le requérant invoque également un cinquième moyen tiré d’une violation des droits de la défense.

28      Le Tribunal estime opportun d’examiner en premier le troisième moyen tiré d’une erreur « manifeste » d’appréciation.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur « manifeste » d’appréciation

29      En substance, le requérant fait valoir que le Conseil n’apporte pas d’éléments concrets, précis et concordants permettant de constituer une base factuelle suffisante afin d’étayer l’inscription de son nom sur les listes litigieuses. Il conteste la valeur probante des preuves produites par le Conseil au soutien de l’inscription et du maintien de son nom sur les listes litigieuses et fait valoir le caractère erroné des appréciations figurant dans la motivation des actes attaqués.

30      Le Conseil conteste le bien-fondé de ce moyen.

 Considérations liminaires

31      Il importe de relever que ce moyen doit être considéré comme tiré d’une erreur d’appréciation, et non d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, s’il est certes vrai que le Conseil dispose d’un certain pouvoir d’appréciation pour déterminer, au cas par cas, si les critères juridiques sur lesquels se fondent les mesures restrictives en cause sont remplis, il n’en reste pas moins que les juridictions de l’Union doivent assurer un contrôle, en principe complet, de la légalité de l’ensemble des actes de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 3 juillet 2014, National Iranian Tanker Company/Conseil, T‑565/12, EU:T:2014:608, points 54 et 55, et du 26 octobre 2022, Ovsyannikov/Conseil, T‑714/20, non publié, EU:T:2022:674, point 61 et jurisprudence citée).

32      Par ailleurs, il ressort de la motivation des actes attaqués que le requérant s’était vu appliquer uniquement le critère g). C’est donc à l’aune du respect des conditions d’application du critère g) qu’il y a lieu d’examiner les arguments du requérant.

33      Par conséquent, les arguments du requérant selon lesquels le Conseil n’aurait pas démontré le bien-fondé de son inscription au titre du critère prévu à l’article 2, paragraphe 1, sous f), de la décision 2014/145 et par l’article 3, paragraphe 1, sous f), du règlement no 269/2014 doivent être rejetés comme inopérants.

34      En outre, il convient de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne exige, notamment, que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119, et du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 128).

35      C’est à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée, et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121, et du 3 juillet 2014, National Iranian Tanker Company/Conseil, T‑565/12, EU:T:2014:608, point 57).

36      À cette fin, il n’est pas requis que le Conseil produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne concernée (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122, et du 28 novembre 2013, Conseil/Fulmen et Mahmoudian, C‑280/12 P, EU:C:2013:775, point 67).

37      L’appréciation du bien-fondé de ces motifs doit être effectuée en examinant les éléments de preuve et d’information non de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent. En effet, le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe s’il fait état devant le juge de l’Union d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre la personne sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime ou, en général, les situations combattues (voir, en ce sens, arrêt du 20 juillet 2017, Badica et Kardiam/Conseil, T‑619/15, EU:T:2017:532, point 99 et jurisprudence citée).

38      Par ailleurs, il convient de rappeler que les mesures restrictives ont une nature conservatoire et, par définition, provisoire, dont la validité est toujours subordonnée à la perpétuation des circonstances de fait et de droit ayant présidé à leur adoption ainsi qu’à la nécessité de leur maintien en vue de la réalisation de l’objectif qui leur est associé. C’est ainsi qu’il incombe au Conseil, lors du réexamen périodique de ces mesures restrictives, de procéder à une appréciation actualisée de la situation et d’établir un bilan de l’impact de telles mesures, en vue de déterminer si elles ont permis d’atteindre les objectifs visés par l’inscription initiale des noms des personnes et des entités concernées sur la liste en cause ou s’il est toujours possible de tirer la même conclusion concernant lesdites personnes et entités (voir arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 168 et jurisprudence citée).

39      Pour justifier le maintien du nom d’une personne sur la liste, il n’est pas interdit au Conseil de se fonder sur les mêmes éléments de preuve ayant justifié l’inscription initiale, la réinscription ou le maintien précédent du nom de la personne concernée sur la liste, pour autant que, d’une part, les motifs d’inscription demeurent inchangés et, d’autre part, le contexte n’ait pas évolué d’une manière telle que ces éléments de preuve seraient devenus obsolètes. Ce contexte inclut non seulement la situation du pays à l’égard duquel le système de mesures restrictives a été établi, mais également la situation particulière de la personne concernée (voir arrêt du 26 octobre 2022, Ovsyannikov/Conseil, T‑714/20, non publié, EU:T:2022:674, point 78 et jurisprudence citée).

40      C’est à l’aune de ces principes jurisprudentiels qu’il convient d’examiner le bien-fondé des arguments du requérant.

 Sur les éléments de preuve produits par le Conseil

41      En l’espèce, pour justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses dans le cadre des actes initiaux, le Conseil a fourni le premier dossier de preuves mentionné au point 13 ci-dessus, comportant les éléments suivants :

–        un extrait du site Internet Wikipédia consulté le 10 mars 2022 (pièce no 1 du premier dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet du magazine économique Forbes consulté le 10 mars 2022 (pièce no 2 du premier dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet « Rumafia.net », consulté le 10 mars 2022 (pièce no 3 du premier dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet du journal Times consulté le 10 mars 2022 (pièce no 4 du premier dossier de preuves) ;

42      Pour justifier le maintien de l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses par les actes de maintien de septembre 2022, le Conseil s’est appuyé sur les mêmes motifs d’inscription et les mêmes preuves que pour les actes initiaux.

43      Pour justifier le maintien du nom du requérant sur les listes litigieuses par les actes de maintien de mars 2023, le Conseil a fourni le deuxième dossier de preuves mentionné au point 19 ci-dessus ainsi que les troisième et quatrième dossiers de preuves mentionnés au point 21 ci-dessus.

44      Le deuxième dossier de preuves comporte les éléments suivants :

–        un extrait du livre Proof of Corruption par Door Seth Abramson, publié le 12 septembre 2020 et consulté le 18 juillet 2022 (pièce no 1 du deuxième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet Clearly Trade Watch publié le 29 janvier 2018 et consulté le 18 juillet 2022 (pièce no 2 du deuxième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet Regnum publié le 18 juin 2022 et consulté le 19 juillet 2022 (pièces no 3 et 6 du deuxième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet « Baku.WS » publié le 12 octobre 2016, consulté le 19 juillet 2022 (pièces no 4 et 7 du deuxième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet du journal Daily Mail publié le 13 mars 2018, consulté le 19 juillet 2022 (pièce no 5 du deuxième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet du département du Trésor américain consulté le 6 décembre 2022 (pièce no 8 du deuxième dossier de preuves).

45      Le troisième dossier de preuves comporte les éléments suivants :

–        un extrait du site Internet « Presscentr.ru » publié le 31 mars 2022, consulté le 31 janvier 2023 (pièce no 1 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet « List-org.com » consulté le 31 janvier 2023 (pièce no 2 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet russe de l’Apple Store consulté le 31 janvier 2023 (pièce no 3 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet Business Insider publié le 1er avril 2021, consulté le 31 janvier 2023 (pièce no 4 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet « archive.org » concernant un article publié par « EY » le 7 juillet 2015 et consulté le 31 décembre 2022 (pièce no 5 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet Statista consulté le 15 décembre 2022 (pièce no 6 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet de la société Schneider Group publié le 21 décembre 2021, consulté le 15 décembre 2022 (pièce no 7 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet 24smi consulté le 20 février 2023 (pièce no 8 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet Google maps consulté le 20 février 2023 (pièce no 9 du troisième dossier de preuves) ;

–        un extrait du site Internet Russia Beyond publié le 7 mai 2012, consulté le 20 février 2022 (pièce no 10 du troisième dossier de preuves).

46      Le quatrième dossier de preuves contient un résumé d’éléments de preuves classifiés, non transmis au Tribunal, portant sur la résidence permanente du requérant en Russie et sur le fait qu’il possède des comptes bancaires en Russie.

 Sur l’application au requérant du critère g)

47      Concernant le critère g), il convient de constater que ce critère se réfère à la notion de « femme ou homme d’affaires influents » en corrélation avec l’exercice d’une « activité dans des secteurs économiques qui fournissent une source substantielle de revenus au gouvernement de la Fédération de Russie », sans autre condition concernant un lien, direct ou indirect, avec ledit gouvernement. La finalité poursuivie par ce critère est en effet d’exercer une pression maximale sur les autorités russes, afin que celles-ci mettent fin à leurs actions et politiques déstabilisant l’Ukraine ainsi qu’à l’agression militaire de ce pays (arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 138).

48      À cet égard, il existe un lien logique entre le fait de cibler les hommes et femmes d’affaires influents ayant une activité dans des secteurs économiques fournissant des revenus substantiels au gouvernement russe, d’une part, et l’objectif des mesures restrictives en l’espèce, qui est d’accroître la pression sur la Fédération de Russie ainsi que le coût des actions de cette dernière visant à compromettre l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, d’autre part (voir arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 139 et jurisprudence citée).

49      En outre, l’objectif des mesures restrictives en cause n’est pas de sanctionner certaines personnes ou entités en raison de leurs liens avec la situation en Ukraine ou de leurs liens avec le gouvernement russe, mais d’imposer des sanctions économiques à la Fédération de Russie, afin d’accroître la pression sur celle-ci ainsi que le coût de ses actions visant à compromettre l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine et de mettre un terme, aussi vite que possible, à l’agression subie par celle-ci (voir arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 144 et jurisprudence citée).

50      C’est donc à l’aune de cette interprétation du critère g) qu’il convient d’examiner le bien-fondé des motifs d’inscription et de maintien retenus dans les actes attaqués.

–       Concernant les actes initiaux et les actes de maintien de septembre 2022

51      Le requérant soutient que chacune des affirmations figurant dans les motifs d’inscription est soit inexacte soit obsolète de sorte que les motifs invoqués par le Conseil pour justifier son inscription sur les listes litigieuses sont entachés d’une erreur d’appréciation et ne permettent pas d’établir que le requérant est un homme d’affaires influent ayant une activité dans un secteur économique qui fournit une source substantielle de revenus à ce gouvernement.

52      Premièrement, le requérant fait valoir que le Conseil ne saurait se fonder sur des faits qui se rapportent aux activités économiques exercées par le requérant il y a plus de dix ans et qui n’ont donc aucun lien avec les événements qui se déroulent actuellement en Ukraine.

53      Deuxièmement, le requérant conteste être « proche du Kremlin ». À cet égard, il fait valoir qu’il a été ajouté sur la liste établie par le département du Trésor américain en raison du seul fait qu’il possède un patrimoine d’une valeur nette d’un milliard de dollars des États-Unis (USD) (environ 900 millions d’euros) ou plus. En outre, il soutient que les différents litiges qui l’ont opposé à la société Gazprom sont de nature à démontrer qu’il n’a pas fait fortune grâce au gouvernement russe. Dans la réplique, le requérant fait valoir que les allégations du Conseil selon lesquelles il aurait participé à des négociations visant à régler des litiges internationaux entre la Russie et la Turquie comme quelqu’un « qui a travaillé étroitement avec Poutine et le connaît bien » reposent sur un article ne figurant pas dans le premier dossier de preuves.

54      Troisièmement, en ce qui concerne son engagement dans « la politique locale russe », le requérant fait valoir que sa participation à la politique russe s’est limitée à deux mandats locaux et s’est achevée en 2009, il y a plus de dix ans.

55      Quatrièmement, le requérant conteste être « un homme d’affaires russe actif dans le secteur de l’énergie ». À cet égard, le requérant ne conteste pas avoir fondé la société Tansley Trading, mais il fait valoir que celle-ci a été dissoute en 1999. En outre, il ne conteste pas avoir été actionnaire minoritaire de la société Northgas, mais il soutient qu’il a vendu toutes ses actions de cette société en 2012. Le requérant conteste l’allégation du Conseil selon laquelle il serait le président de la société Bechtel Energy. En effet, il aurait racheté les parts que détenait la société Bechtel Energy dans la société Northgas en 1996, mais n’aurait jamais été le président de cette société ni exercé aucune autre fonction au sein de celle-ci.

56      Par ailleurs, le requérant fait valoir qu’il a publiquement critiqué le gouvernement russe à plusieurs reprises.

57      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

58      Le Conseil fait valoir que les motifs d’inscription correspondent au critère g) et que les éléments de ces motifs sont avérés. Selon le Conseil, le requérant a été actif dans le secteur de l’énergie qui fournit une source de revenus substantielle au gouvernement russe. Le fait qu’il soit possible que le requérant, comme il le prétend, ne soit plus actif dans le secteur de l’énergie n’enlèverait rien au fait qu’il y a bien été actif par le passé et que cette activité passée lui a permis de conserver des liens étroits avec le gouvernement russe.

59      Le Conseil fait valoir que le requérant est un homme d’affaires influent en raison du fait qu’il possède une fortune estimée à plus d’un milliard de USD et qu’il figure sans discontinuer, depuis 2011, sur la liste des 200 personnes les plus riches de Russie. Par ailleurs, le Conseil constate que, indépendamment de la dissolution de Tansley Trading et de la vente de Northgas, le requérant est un « homme d’affaires influent » dans l’industrie pétrolière et gazière russe qui fournit une source substantielle de revenus au gouvernement russe, dès lors que ces deux sociétés occupent une place importante dans ce secteur.

60      En outre, pour démontrer la qualité d’homme d’affaires influent du requérant, le Conseil fait valoir que celui-ci a participé à des négociations visant à régler des litiges internationaux entre la Russie et la Turquie et qu’à cette occasion, le ministre turc des affaires étrangères l’a décrit comme un intermédiaire diplomatique « qui a travaillé étroitement avec Poutine et le connaît bien » et qu’il a figuré sur la liste dite « du Kremlin » établie par le département du Trésor américain qui dresse la liste des grandes personnalités politiques et des hommes ou femmes d’affaires de la Fédération de Russie dont la fortune nette est estimée à au moins un milliard de USD.

61      Concernant la participation du requérant à la politique locale russe, le Conseil fait valoir que le requérant ne conteste pas avoir été le représentant élu du territoire de Krasnodar (Russie) puis du district autonome de Iamalo-Nénétsie au sein de la chambre haute de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie entre 2004 et 2009.

62      En ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel il aurait été publiquement critique vis-à-vis du gouvernement russe, le Conseil soutient que la preuve fournie par le requérant, à savoir une entrevue diffusée sur YouTube, est inaccessible et qu’il ne peut pas vérifier la transcription fournie par le requérant. En outre, le Conseil estime qu’il n’existe aucun document prouvant que le requérant s’est ouvertement exprimé contre le gouvernement de la Fédération de Russie ou contre M. Poutine.

63      Il y a lieu de relever que les motifs retenus à l’égard du requérant qui se rattachent au critère g) ont trait au fait qu’il serait un homme d’affaires russe actif dans le secteur de l’énergie et dans la politique locale russe, qu’il aurait fondé la société Tansley Trading, qui fournissait des équipements aux producteurs de gaz russes, et serait devenu actionnaire minoritaire de Northgas, une compagnie pétrolière et gazière de Sibérie, ainsi que président de Bechtel Energy et qu’il serait proche du Kremlin.

64      Eu égard au libellé du critère g), il y a lieu de considérer que les personnes visées doivent être considérées comme influentes du fait de leur importance dans le secteur dans lequel elles exercent leur activité et de l’importance que revêt ce secteur pour l’économie russe. À cet égard, la notion d’« homme d’affaires influent » doit donc être comprise comme visant l’importance de ces derniers au regard, notamment, de leurs statuts professionnels, de l’importance de leurs activités économiques, de l’ampleur de leurs possessions capitalistiques ou de leurs fonctions au sein d’une ou de plusieurs entreprises dans lesquelles ils exercent ces activités (voir arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 143 et jurisprudence citée).

65      Il convient d’examiner si le requérant est un homme d’affaires influent au sens du critère g).

66      Premièrement, s’agissant du rôle du requérant en tant que fondateur de Tansley Trading, il ressort des pièces nos 1 à 3 du premier dossier de preuves que le requérant a fondé cette société en 1987. Selon la pièce no 3 du premier dossier de preuves, à savoir l’extrait du site Internet « Rumafia.net », la société Tansley Trading a été modifiée pour devenir Farco Group Limited. Or, le requérant a produit un extrait provenant de la société Bureau van Dijk reprenant les informations légales concernant la société Tansley Trading selon lequel la société Tansley Trading a changé de nom en 1994 pour devenir Farco Services et a été ensuite dissoute en 1999.

67      Du fait de ladite dissolution en 1999, il convient de considérer que le requérant a démontré ne plus avoir de liens avec la société Tansley Trading.

68      Deuxièmement, concernant le rôle du requérant en tant qu’actionnaire minoritaire de la société Northgas, il ressort des pièces nos 2 et 3 du premier dossier de preuves que le requérant est devenu actionnaire minoritaire de cette société en 1993. La pièce no 3 précise que Northgas a été établie en 1993 et que la société américaine Bechtel Energy détenait 44 % des parts, que la société Urengoigazprom, une filiale de Gazprom, détenait 51 % des parts tandis que les 5 % restant appartenaient à Tansley Trading, détenus par le requérant. Il ressort des pièces nos 1 à 3 que le requérant a acquis en 1998 les parts de Northgas détenues par la société Bechtel Energy. Ces parts se sont ajoutées aux 5 % que le requérant détenait déjà dans la société Northgas et ce dernier a donc détenu, après cette acquisition, 49 % des parts de Northgas. Toutefois, il ressort de ces mêmes éléments de preuve que le requérant a vendu l’intégralité de ses parts dans la société Northgas en 2012.

69      Cela est d’ailleurs confirmé par le requérant qui a produit des articles publiés par Bloomberg et par Reuters le 6 novembre 2012 décrivant la vente de ses parts dans Northgas à la société Novatek et n’est pas contesté par le Conseil.

70      Ainsi, le requérant a vendu toutes ses parts dans la société Northgas et n’exerce plus aucune fonction au sein de cette société depuis 2012.

71      Le Conseil fait valoir qu’il n’est pas limité à appliquer les mesures restrictives aux seuls femmes et hommes d’affaires influents qui génèrent actuellement une source substantielle de revenus pour le gouvernement russe et allègue un risque de contournement des mesures restrictives par la cession des parts de sociétés.

72      À cet égard, concernant le critère g), il y a lieu de relever que la notion de « femme et homme d’affaires influent » se réfère à des éléments factuels qui s’inscrivent à la fois dans le passé et dans la durée. Dès lors, le fait que les motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses se réfèrent à une situation factuelle qui existait avant l’adoption des actes initiaux et qui aurait très récemment été modifiée n’emporte pas nécessairement l’obsolescence des mesures restrictives adoptées à son égard par lesdits actes (voir, par analogie, arrêt du 12 février 2020, Amisi Kumba/Conseil, T‑163/18, EU:T:2020:57, point 83).

73      Toutefois, en l’espèce, la situation du requérant a été modifiée plus de dix ans avant leur adoption. Par conséquent, prendre en considération les activités du requérant remontant à dix ans ou plus aurait pour conséquence de figer sa situation dans un passé lointain et révolu et à priver de tout effet utile l’exercice du réexamen périodique prévu, notamment, à l’article 6, troisième alinéa, de la décision 2014/145 et à l’article 14, paragraphe 4, du règlement no 269/2014, tels que modifiés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 26 octobre 2022, Ovsyannikov/Conseil, T‑714/20, non publié, EU:T:2022:674, point 86 et jurisprudence citée).

74      Ainsi, étant donné que la société Tansley Trading qui était détenue par le requérant a été dissoute en 1999 et que le requérant a vendu ses parts dans la société Northgas en 2012, il ne peut pas être considéré comme un homme d’affaires influent dans le secteur de l’énergie en raison de ses participations passées dans les sociétés Tansley Trading et Northgas.

75      Troisièmement, concernant le rôle du requérant en tant que président de Bechtel Energy, cette partie des motifs d’inscription repose sur la pièce no 2 du premier dossier de preuves, qui est un extrait du magazine Forbes consacré au requérant, selon lequel ce dernier a acquis en 1998, 44 % des parts d’un autre investisseur, Bechtel Energy, et « est devenu président » sans autre précision. Or, le requérant a produit un extrait du magazine Forbes consacré au requérant, consulté le 16 juin 2022, qui fait apparaître que cet extrait a été mis à jour par rapport à la pièce no 2 du premier dossier de preuves et qu’il indique désormais que le requérant a acquis en 1998, 44 % des parts d’un autre investisseur, Bechtel Energy, et « est devenu président de Nort[h]gas ». Le requérant a également produit un lien vers le site Internet de la société Bechtel démontrant qu’il n’a jamais été le président ou le directeur général de cette société.

76      Partant, les motifs d’inscription du nom du requérant sont entachés d’une erreur de fait, car le requérant n’était pas président de la société Bechtel Energy au moment de l’adoption des actes initiaux.

77      Quatrièmement, concernant le rôle du requérant dans la politique locale russe, il ressort des pièces nos 1 et 3 du premier dossier de preuves que le requérant a été un membre du Soviet Federatsii Federal’nogo Sobrania Rossiskoï Federatsii (Conseil de la Fédération de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie) en tant que représentant de la région de Krasnodar à partir de 2004, puis de la région autonome de Iamalo-Nénétsie à partir de 2007 et qu’il a démissionné de ces fonctions en 2009. Le requérant ne conteste pas ces faits, mais fait valoir qu’il a cessé l’exercice de toute fonction politique en 2009.

78      Il y a lieu de relever que les éléments sur lesquels le Conseil base sa constatation relative à l’implication du requérant dans la politique locale remontent à plus de dix ans avant l’adoption des actes initiaux. Par conséquent, en application de la jurisprudence citée au point 73 ci-dessus, prendre en considération ces activités politiques remontant à dix ans ou plus aurait pour conséquence de figer sa situation dans un passé lointain et révolu. Ainsi, la partie des motifs indiquant au présent que le requérant est un homme d’affaires russe actif dans la politique locale russe n’est pas fondée.

79      Cinquièmement, s’agissant de la partie des motifs relative au fait que le requérant serait « proche du Kremlin » et de l’argument du Conseil concernant le rôle joué par le requérant dans la résolution d’un différend international entre la Russie et la Turquie dans le cadre duquel il a été qualifié de personne « qui a travaillé étroitement avec Poutine et le connaît bien », il convient de rappeler que le critère g) n’implique pas, pour le Conseil, de démontrer l’existence de liens étroits ou d’une relation d’interdépendance avec le gouvernement de la Fédération de Russie (arrêt du 15 novembre 2023, OT/Conseil, T‑193/22, EU:T:2023:716, point 145).

80      Il en résulte que la partie des motifs d’inscription décrivant le requérant comme « proche du Kremlin » ainsi que l’argument du Conseil concernant le rôle joué par le requérant dans la résolution d’un différend international entre la Russie et la Turquie pourraient être pris en considération en tant qu’éléments de contexte, mais ne sauraient justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses sur la base du critère g).

81      Eu égard aux éléments exposés aux points 66 à 80 ci-dessus, il y a lieu de conclure que le Conseil n’a pas apporté un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants, susceptibles de mettre en évidence le fait que le requérant était, au sens du critère g), un homme d’affaires influent ayant des activités dans des secteurs économiques qui fournissaient une source substantielle de revenus au gouvernement de la Fédération de Russie aux dates d’adoption des actes initiaux et des actes de maintien de septembre 2022.

82      En outre, cette conclusion n’est pas davantage remise en cause par l’argument du Conseil selon lequel le requérant est un homme important en raison de sa fortune qui se chiffre à plus d’un milliard de USD et en raison du fait qu’il figure depuis 2011 sur la liste des personnes les plus riches de Russie publiée par le magazine Forbes ainsi que sur la liste dite « du Kremlin » établie par le département du Trésor américain. Il convient de constater que ces éléments qui ont trait à la fortune personnelle du requérant ne sont pas, à eux seuls, suffisants pour démontrer l’importance du requérant dans un secteur important pour l’économie russe au sens du critère g), à savoir en l’espèce, le secteur énergétique.

83      Partant, le Conseil a commis une erreur d’appréciation en considérant que le requérant était un homme d’affaires influent ayant une activité dans des secteurs économiques qui fournissaient une source substantielle de revenus au gouvernement de la Fédération de Russie, au sens du critère g).

84      S’agissant des actes de maintien de septembre 2022, il y a lieu de constater que les motifs justifiant le maintien du nom du requérant sur les listes en cause sont identiques à ceux des actes initiaux et que le Conseil s’est fondé sur les mêmes éléments de preuve ayant conduit à l’inscription initiale du nom du requérant sur les listes litigieuses.

85      Par conséquent, le maintien du requérant sur les listes litigieuses dans les actes de septembre 2022 est entaché de la même erreur d’appréciation que celle constatée au point 83 ci-dessus.

–       Concernant les actes de maintien de mars 2023

86      Le requérant fait valoir que le Conseil, en dehors d’une référence non pertinente aux intérêts commerciaux dans les secteurs de l’informatique et de la foresterie, persiste à se référer aux activités passées et aux anciennes fonctions du requérant sans démontrer en quoi ce comportement passé est pertinent pour justifier le maintien de son inscription sur les listes litigieuses.

87      Concernant sa proximité avec le gouvernement russe, le requérant soutient que le changement de formulation des motifs montre que les allégations de liens avec le gouvernement russe sont des informations non confirmées. En outre, le requérant fait valoir que sa participation au règlement d’un différend entre la Russie et la Turquie s’est limitée à conseiller le ministre turc des affaires étrangères sur la base de son expérience passée en tant qu’homme d’affaires en Russie, ce qui ne démontrerait pas qu’il est « proche du Kremlin ».

88      Concernant les nouveaux motifs selon lesquels le requérant a des intérêts commerciaux dans les secteurs informatique et forestier russes et qu’il a une résidence en Russie, le requérant fait valoir que ces affirmations ne suffisent pas à le considérer comme un homme d’affaires influent ayant des activités dans un secteur fournissant une source substantielle de revenus pour le gouvernement russe.

89      Premièrement, le requérant ne conteste pas avoir des intérêts commerciaux dans la société Udan LLC enregistrée en décembre 2021 dont l’activité principale est la culture de plants de conifères, mais soutient que cette société n’a pas encore généré de chiffre d’affaires. En outre, le requérant confirme être actionnaire minoritaire dans la société Avigal LLC, dans le secteur informatique, mais fait valoir que cette société, qui possède la plateforme Talkme, est une start-up qui n’a pas encore de chiffre d’affaires tandis que la plateforme Talkme n’aurait que 10 000 utilisateurs. Concernant les pièces no 4, no 5 et no 7 du troisième dossier de preuves, le requérant fait valoir qu’elles ne sont pas pertinentes car la plateforme Talkme, appartenant à Avigal LLC, ne fait pas l’objet de la réglementation russe mise en avant dans le dossier de preuves laquelle exige que les appareils mobiles et les téléphones intelligents soient équipés de logiciels russes préinstallés. Selon le requérant, le fait qu’il ait des intérêts commerciaux en Russie à travers ces deux sociétés qui opèrent dans un secteur mineur de l’économie russe ne font certainement pas de lui un « homme d’affaires influent ».

90      Deuxièmement, concernant sa prétendue résidence en Russie, le requérant soutient qu’il ne vit pas en Russie. Selon le requérant, le Conseil aurait confondu deux villages en Russie et n’aurait pas mentionné le fait qu’il a vendu à son fils en 2019 la maison qu’il possédait en Russie. Aujourd’hui, le requérant vivrait en Azerbaïdjan, où il aurait également ses principaux intérêts commerciaux et superviserait des activités caritatives.

91      Concernant le résumé des informations classifiées inclus dans le quatrième dossier de preuves, le requérant fait valoir que les éléments de preuves classifiés relatifs à sa résidence en Russie et à ses comptes bancaires en Russie sont irrecevables étant donné qu’ils ne lui ont pas été communiqués et que ses comptes bancaires en Russie ne sont pas pertinents pour l’inscription de son nom sur les listes litigieuses.

92      Le Conseil conteste cette argumentation.

93      Premièrement, le Conseil soutient avoir changé les motifs d’inscription pour qu’ils reflètent l’activité passée du requérant, à savoir le fait qu’il « a été » actif dans le secteur de l’énergie et qu’il « était » un homme d’affaires influent. Selon le Conseil, ces informations sont toujours de nature à le conduire à tirer la même conclusion quant à l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause. En outre, le Conseil soutient avoir ajouté des références aux intérêts commerciaux du requérant dans les secteurs forestier et informatique en raison des nouvelles informations révélées lors du réexamen.

94      Deuxièmement, concernant le motif selon lequel le requérant « serait proche du Kremlin », le Conseil fait valoir qu’il reflète simplement un état de fait, en raison de son statut passé de membre de l’Assemblée fédérale et que ces liens ne semblent pas avoir été rompus avec le temps. Le Conseil soutient également que le requérant entretient toujours des liens étroits avec des acteurs économiques et politiques influents comme le montrent les contacts du requérant avec le ministre turc des affaires étrangères.

95      Troisièmement, selon le Conseil, le fait que le requérant ait une résidence en Russie témoigne du maintien de ses liens dans ce pays, sans qu’ait d’influence à cet égard le transfert de la propriété de sa maison à son fils. Le Conseil fait également valoir que la preuve fournie par le requérant qu’il réside en Azerbaïdjan n’est pas suffisante.

96      Il y a lieu de constater que, dans le cadre des actes de maintien de mars 2023, le Conseil a modifié les motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses afin d’indiquer que ce dernier « a été actif dans le secteur de l’énergie et dans la politique locale russe » et « serait proche du Kremlin ». En outre, le Conseil a ajouté un motif selon lequel le requérant « réside en Russie et y a toujours des intérêts commerciaux, y compris dans le secteur des technologies de l’information et le secteur forestier ».

97      Le Conseil s’est également fondé sur les deuxième et troisième dossiers de preuves, contenant respectivement huit et dix éléments de preuve, et le quatrième dossier de preuves, dont il a communiqué au requérant un résumé des informations qui y étaient contenues en raison de sa confidentialité.

98      Il convient donc de vérifier si l’ensemble des éléments de preuve soumis par le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe et constitue un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour étayer les motifs d’inscription des actes de maintien de mars 2023.

99      En premier lieu, concernant l’implication passée du requérant dans le secteur de l’énergie et dans la politique locale, le Conseil n’a apporté aucun élément additionnel démontrant de quelle manière une telle implication passée permettait de qualifier le requérant d’homme d’affaires influent au sens du critère g). En effet, ainsi qu’il ressort du point 64 ci-dessus, au regard du critère g), les personnes visées doivent être considérées comme influentes du fait de leur importance dans le secteur dans lequel elles exercent leur activité et de l’importance que revêt ce secteur pour l’économie russe. Or, ainsi qu’il ressort des points 73 et 74 ci-dessus, le requérant ne peut pas être considéré comme un homme d’affaires influent en raison de ses participations passées dans les sociétés Tansley Trading et Northgas.

100    En second lieu, s’agissant des motifs tirés de ce que le requérant réside en Russie et a des intérêts commerciaux en cours en Russie, notamment dans les secteurs de l’informatique et de la foresterie, il y a lieu de relever, tout d’abord, concernant le secteur de la foresterie, qu’il ressort de la pièce no 3 du deuxième dossier de preuves, qui est un extrait du site Internet « regnum.ru » publié le 18 juin 2022 que le requérant possède la société Udan LLC. Le requérant ne conteste pas qu’il possède cette société, enregistrée en décembre 2021, dont l’activité principale est la culture de plants d’arbres à des fins de reboisement.

101    Dans la mesure où le requérant est capable d’exercer une influence sur la société Udan LLC, pour déterminer s’il relève de la qualité de l’homme d’affaires influent au sens du critère g), il y a lieu d’examiner l’importance du requérant dans le secteur dans lequel il exerce son activité et de vérifier si cette société est importante dans le secteur économique dans laquelle elle opère.

102    À cet égard, le Conseil n’apporte aucun élément de preuve de l’importance de Udan LLC dans le secteur de la foresterie. En outre, il ressort d’un rapport d’audit de la société Udan LLC portant sur l’année 2021 produit par le requérant que la société Udan LLC est active depuis le 10 décembre 2021 et qu’elle n’a pas généré de chiffre d’affaires pour l’année 2021. Le requérant a également produit la déclaration d’impôts sur les sociétés de cette société pour l’année 2022 selon laquelle cette société a dégagé des bénéfices hors exploitation de 502 263 roubles russes (RUB) (environ 4 700 euros).

103    Par conséquent, le Conseil ne saurait se fonder sur les intérêts commerciaux du requérant dans ce secteur, lesquels se limitent aux activités de Udan LLC, pour considérer que le requérant est un homme d’affaires influent au sens du critère g).

104    Ensuite, s’agissant des intérêts du requérant dans le secteur de l’informatique, il ressort de la pièce no 1 du troisième dossier de preuves, qui est un extrait du site Internet « presscentr.ru » publié le 31 mars 2022 et de la pièce no 8 qui est un extrait du site Internet « 24smi.org » consulté le 20 février 2023, que le requérant a investi 100 millions de RUB (environ 950 000 euros) dans une nouvelle plateforme de diffusion en continu appelée Talkme. La pièce no 2 du troisième dossier de preuves est un extrait du site Internet « List-org.com » qui publie des informations sur les sociétés russes. Il ressort de cet élément de preuve que le requérant détient 25 % de la société Avigal laquelle détient depuis le 12 mai 2021 la plateforme Talkme.

105    Le requérant ne conteste pas être un actionnaire minoritaire de la société Avigal. Toutefois, il fait valoir que la société Avigal est une petite start-up qui n’a pas généré de chiffre d’affaires et que la plateforme Talkme n’a que 10 000 utilisateurs.

106    Eu égard à la participation à hauteur de 25 % détenue par le requérant dans la société Avigal qui contrôle la plateforme Talkme, il convient, pour déterminer si le requérant est un homme d’affaires influent au sens du critère g), d’examiner l’importance du requérant dans le secteur dans lequel il exerce son activité et de vérifier si cette société est importante dans le secteur économique dans laquelle elle opère.

107    À cet égard, il ressort de la pièce no 2 du troisième dossier de preuves que la société Avigal a été enregistrée le 20 novembre 2019 et a été inscrite le 3 octobre 2021 comme micro-entreprise dans le registre des petites et moyennes entreprises. Il ressort également de cet élément de preuve que la société Avigal n’a dégagé aucun chiffre d’affaires pour l’année 2021.

108    En outre, les pièces nos 4, 5 et 7 du troisième dossier de preuves mettent en évidence les changements législatifs en Russie qui obligent tous les ordinateurs, mobiles multifonctions et télévisions à avoir des logiciels russes préinstallés. La pièce no 3 du troisième dossier de preuves est un extrait du site Internet russe de l’Apple store consulté par le Conseil le 31 janvier 2023 qui met en évidence qu’il était possible à cette date d’y télécharger l’application de la plateforme Talkme. Toutefois, ces éléments ne démontrent pas l’importance de la société Avigal et de la plateforme Talkme dans le secteur de l’informatique. En outre, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, le Conseil a indiqué que la société Avigal n’était pas une société importante. Par conséquent, les éléments de preuve rapportés par le Conseil concernant cette société ne permettent pas d’apprécier son importance, tant sur le plan économique qu’en termes d’influence.

109    Il s’ensuit que le Conseil ne saurait se fonder sur les intérêts commerciaux du requérant dans le secteur informatique, lesquels se limitent aux activités d’Avigal, pour considérer que le requérant est un homme d’affaires influent au sens du critère g).

110    S’agissant de la partie des motifs selon lequel le requérant serait proche du gouvernement russe, ainsi qu’il ressort du point 79 ci-dessus, l’application du critère g) ne nécessite pas pour le Conseil de prouver des liens avec le gouvernement russe. Par conséquent, la partie des motifs d’inscription selon laquelle le requérant « serait proche du Kremlin » pourrait être prise en considération en tant qu’élément de contexte, mais ne saurait justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses sur la base du critère g). Il en va de même de l’argument du Conseil selon lequel le requérant entretient toujours des liens étroits avec des acteurs économiques et politiques influents comme le montrerait le rôle du requérant dans le règlement d’un différend entre la Turquie et la Russie et les contacts du requérant avec le ministre turc des affaires étrangères.

111    En outre, la partie des motifs tirés de ce que le requérant aurait sa résidence en Russie est dénuée de pertinence au regard du critère g). En effet, ainsi qu’il ressort du point 64 ci-dessus, les personnes visées par le critère g) doivent être considérées comme influentes du fait de leur importance dans le secteur dans lequel elles exercent leur activité et de l’importance que revêt ce secteur pour l’économie russe. Le lieu de résidence est sans influence sur la qualité d’homme d’affaires influent du requérant au regard du critère g).

112    Eu égard aux éléments exposés ci-dessus, il y a lieu de conclure que le Conseil n’a pas apporté un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants, susceptibles de mettre en évidence le fait que le requérant était un homme d’affaires influent ayant des activités dans des secteurs économiques qui fournissaient une source substantielle de revenus au gouvernement de la Fédération de Russie à la date d’adoption des actes de maintien de mars 2023.

113    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu d’accueillir le troisième moyen et d’annuler, par conséquent, les actes attaqués en ce qu’ils concernent le requérant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens invoqués par ce dernier.

114    S’agissant de la demande présentée par le Conseil à titre subsidiaire (voir point 26, deuxième tiret, ci-dessus) tendant, en substance, au maintien des effets de la décision 2023/572 jusqu’à l’expiration du délai prévu pour l’introduction d’un pourvoi visant le présent arrêt et, en cas de pourvoi, jusqu’à la décision statuant sur celui-ci, il suffit de relever que la décision 2023/572 n’a produit d’effets que jusqu’au 15 septembre 2023. Par conséquent, l’annulation de celle-ci par le présent arrêt n’a pas de conséquence sur la période postérieure à cette date, de sorte qu’il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la question du maintien des effets de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Klymenko/Conseil, T‑195/21, EU:T:2021:925, point 113 et jurisprudence citée).

 Sur les dépens

115    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision (PESC) 2022/582 du Conseil, du 8 avril 2022, modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, le règlement d’exécution (UE) 2022/581 du Conseil, du 8 avril 2022, mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, la décision (PESC) 2022/1530 du Conseil, du 14 septembre 2022, modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, le règlement d’exécution (UE) 2022/1529 du Conseil, du 14 septembre 2022, mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, la décision (PESC) 2023/572 du Conseil, du 13 mars 2023, modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, et le règlement d’exécution (UE) 2023/571 du Conseil, du 13 mars 2023, mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine, sont annulés en ce qu’ils concernent M. Farkhad Teimurovich Akhmedov.

2)      Le Conseil de l’Union européenne est condamné aux dépens.

Spielmann

Brkan

Kalėda

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 mai 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.