Language of document : ECLI:EU:T:2017:101

Édition provisoire

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

17 février 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale GATEWIT – Marque de l’Union européenne figurative antérieure wit software – Dénomination sociale nationale antérieure Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel, SA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑351/14,

Construlink – Tecnologias de Informação, SA, établie à Lisbonne (Portugal), représentée par Mes M. Lopes Rocha et A. Bertrand, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Lukošiūtė et M. D. Hanf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel, SA, établie à Lisbonne, représentée par Mes F. Teixeira Baptista et C. Tomás Pedro, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 6 mars 2014 (affaire R 1059/2013-1), relative à une procédure d’opposition entre Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel et Construlink – Tecnologias de Informação,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová (rapporteur) et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mai 2014,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 5 novembre 2014,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 novembre 2014,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 26 janvier 2015,

vu le mémoire en duplique de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 24 mars 2015,

vu le mémoire en duplique de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 9 avril 2015,

à la suite de l’audience du 5 juillet 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 15 juillet 2011, la requérante, Construlink Tecnologias de Informação, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal GATEWIT.

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Conception de systèmes informatiques ; création et entretien de sites Internet pour des tiers ; recherche et développement de nouveaux produits (pour des tiers) ; élaboration (conception) de logiciels ; conseils en informatique ».

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 157/2011, du 22 août 2011.

5        Le 22 novembre 2011, l’intervenante, Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel, SA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée d’une part sur la marque de l’Union européenne figurative déposée le 24 septembre 2008 et enregistrée le 29 mai 2009 sous le numéro 7251879, telle que reproduite ci-après :

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7        Les produits et les services visés par la marque de l’Union européenne antérieure relevaient des classes 9, 38 et 42 et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Programmes et logiciels informatiques » ;

–        classe 38 : « Télécommunications » ;

–        classe 42 : « Conseils en matériel et logiciels informatiques ; programmation pour ordinateurs ; services de conception de systèmes informatiques ; maintenance de logiciels ; recherches et développements de nouveaux produits (pour des tiers) ; mise à jour de logiciels ; conception de logiciels informatiques ».

8        L’opposition était fondée d’autre part sur la dénomination sociale Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel, SA, enregistrée au Portugal le 24 novembre 2000 pour l’activité commerciale de « conseil et développement de logiciels pour l’internet mobile, systèmes d’information, commercialisation de logiciels et formation », faisant l’objet d’une utilisation dans la vie des affaires, dont la portée n’est pas seulement locale, et conférant à son titulaire le droit prévu à l’article 239, paragraphe 2, sous a), du código da propriedade industrial (code de la propriété industrielle portugais).

9        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement n° 207/2009.

10      Le 12 avril 2013, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité.

11      Le 11 juin 2013, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 6 mars 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition, au motif que celle-ci violait l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, et rejeté intégralement la demande d’enregistrement. Selon la chambre de recours, il existait un risque de confusion entre les marques en conflit dans l’esprit d’une partie du public du territoire pertinent pour tous les services désignés par lesdites marques. Par ailleurs, les consommateurs portugais seraient induits en erreur et amenés à croire que la marque demandée appartient ou est liée à la société dénommée Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel, SA.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        délivrer une commission rogatoire afin que des témoins soient auditionnés au Portugal ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        juger la demande d’enregistrement entièrement fondée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande de commission rogatoire ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande de commission rogatoire ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés devant la chambre de recours.

16      Lors de l’audience, la requérante a indiqué, en réponse à une question du Tribunal, se désister du premier chef de conclusions, tendant à la délivrance d’une commission rogatoire. À sa demande, les autres parties ayant été entendues, la requérante a en outre été autorisée à déposer, pour le 19 juillet 2016 au plus tard, la version en langue de procédure d’un jugement rendu, le 1er juillet 2016, par le tribunal da propiedade intelectual de Lisboa (tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne, Portugal).

17      Le 19 juillet 2016, la requérante a déposé ledit document au greffe du Tribunal.

18      Par actes déposés respectivement au greffe du Tribunal les 18 et 22 août 2016, l’EUIPO et l’intervenante ont fait valoir leurs observations sur ce même document.

19      La procédure orale a été close le 31 août 2016.

 En droit

 Sur la recevabilité du troisième chef de conclusions, visant à ce que le Tribunal juge la demande d’enregistrement entièrement fondée

20      L’EUIPO soutient que le troisième chef de conclusions est irrecevable, dans la mesure où il tend à obtenir du Tribunal une décision déclaratoire, ce qui excède les pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 65, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 207/2009.

21      La requérante conclut au rejet de la fin de non-recevoir ainsi soulevée par l’EUIPO, au motif que le troisième chef de conclusions n’est que la conséquence logique de l’annulation de la décision attaquée.

22      À cet égard, il importe de rappeler que, conformément à l’article 65, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, le recours contre une décision de la chambre de recours ne peut aboutir qu’à l’annulation ou à la réformation de ladite décision par le Tribunal. En vertu de l’article 65, paragraphe 6, de ce même règlement, l’EUIPO est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du Tribunal.

23      Il s’ensuit, selon une jurisprudence constante, que des conclusions visant à obtenir du Tribunal qu’il fasse des déclarations en droit sont irrecevables [voir arrêt du 27 septembre 2011, El Jirari Bouzekri/OHMI – Nike International (NC NICKOL), T‑207/09, non publié, EU:T:2011:537, point 17 et jurisprudence citée].

24      En l’espèce, le troisième chef de conclusions vise à ce que le Tribunal déclare que la demande d’enregistrement est entièrement fondée et tend, ainsi, à obtenir de celui-ci qu’il fasse des déclarations en droit. Ce chef de conclusions doit donc être rejeté comme étant irrecevable.

 Sur la recevabilité du jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne produit, pour la première fois, devant le Tribunal

25      Lors de l’audience, la requérante s’est bornée à indiquer que le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne qu’elle souhaitait produire était un élément venant à l’appui du présent recours. Par ledit jugement, tel que produit après l’audience dans la langue de procédure, le tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne a notamment rejeté la demande de l’intervenante visant à l’annulation de la marque verbale GATEWIT enregistrée par la requérante au Portugal sous le numéro 484007 au motif que la condition requise par l’article 245, paragraphe 1, sous c), du code de la propriété industrielle portugais, selon laquelle les marques en conflit devaient être à tel point similaires que le consommateur ne serait pas en mesure de les distinguer à moins de les examiner ou de les comparer attentivement, n’était pas remplie par rapport à la marque antérieure.

26      L’intervenante soutient que la requérante est irrecevable à invoquer ce jugement, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence, le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 65 du règlement no 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui.

27      L’EUIPO estime que la requérante peut invoquer le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne uniquement au soutien de moyens pris de la violation de dispositions du règlement no 207/2009.

28      Il ressort de la jurisprudence que des décisions de justice nationales, bien que non invoquées dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO, ont été déclarées recevables [voir arrêt du 1er février 2012, Carrols/OHMI – Gambettola (Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL), T‑291/09, EU:T:2012:39, point 34 et jurisprudence citée].

29      Comme il a été jugé au point 71 de l’arrêt du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT) (T‑277/04, EU:T:2006:202), ni les parties ni le Tribunal lui-même ne peuvent être empêchés de s’inspirer, dans l’interprétation du droit de l’Union européenne, d’éléments tirés de la jurisprudence de l’Union, nationale ou internationale. Il s’ensuit qu’une partie doit avoir la possibilité de se référer à des décisions de justice nationales pour la première fois devant le Tribunal, dès lors qu’il ne s’agit pas de reprocher à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte des éléments de fait figurant dans une décision nationale précise, mais d’avoir violé une disposition du règlement no 207/2009, et d’invoquer la jurisprudence à l’appui de ce moyen.

30      En l’espèce, comme il ressort du point 32 ci-dessous, la requérante invoque, à l’appui du présent recours, des moyens pris de la violation de dispositions du règlement no 207/2009.

31      Par conséquent, la requérante est recevable à invoquer le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne.

 Sur le fond

32      La requérante avance deux moyens à l’appui du présent recours. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Le second moyen est pris d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, de ce même règlement.

33      Dans le cadre du premier moyen, la requérante soutient que la chambre de recours a violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en constatant à tort, dans la décision attaquée, l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

34      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante et concluent au rejet du premier moyen comme étant, en substance, non fondé.

35      Il importe de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

36      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services en cause [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

37      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

38      Au point 15 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que, dans la mesure où le droit antérieur était une marque de l’Union européenne, le territoire pertinent aux fins de l’appréciation du risque de confusion était celui de l’Union.

39      Outre que ladite constatation n’est pas critiquée par les parties, elle est conforme à la jurisprudence. En effet, selon l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, l’existence d’un risque de confusion résultant de la similitude, d’une part, entre la marque dont l’enregistrement est demandé et une marque antérieure et, d’autre part, entre les produits ou les services que ces marques désignent doit être appréciée dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée (arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 51, et du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, EU:C:2007:514, point 60).

40      Partant, il y a lieu d’entériner l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le territoire pertinent est celui de l’Union.

41      Au point 17 de la décision attaquée, la chambre de recours a par ailleurs constaté, au sujet du public pertinent, que « [l]es […] services en cause [étaie]nt destinés à la fois au grand public et à des professionnels du secteur informatique ». Elle a estimé que, « [a]ux fins de l’appréciation globale des marques, le consommateur moyen de la catégorie […] de services [étai]t censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé » et que, « [e]n ce qui concern[ait] […] les services destinés à des professionnels, leur niveau d’attention et de vigilance sera[it] supérieur ».

42      La requérante soutient que, dans le cadre de cette constatation, la chambre de recours a omis de tenir compte de ce que, comme cela aurait été attesté par les documents produits dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO, elle-même et l’intervenante ne commercialisaient ou ne fournissaient effectivement que des services destinés à un public professionnel spécialisé en informatique, lequel avait un niveau d’attention très élevé.

43      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

44      Lorsque les marques en conflit sont enregistrées ou demandées à l’enregistrement pour différents produits ou services, la chambre de recours est tenue d’identifier les consommateurs qui, sur le territoire pertinent, sont susceptibles d’utiliser chacun de ces produits ou de ces services.

45      En outre, selon la jurisprudence, le public pertinent, pour apprécier l’existence d’un risque de confusion, n’est composé que des consommateurs qui sont susceptibles d’utiliser tant les produits ou les services couverts par la marque antérieure que ceux désignés par la marque dont l’enregistrement est demandé [voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Apple Computer/OHMI – TKS-Teknosoft (QUARTZ), T‑328/05, non publié, EU:T:2008:238, point 23, et du 30 septembre 2010, PVS/OHMI – MeDiTA Medizinische Kurierdienst (medidata), T‑270/09, non publié, EU:T:2010:419, point 28].

46      De plus, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte, au sein de chaque groupe de consommateurs identifié, le consommateur moyen des produits ou des services en cause, lequel est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction des produits ou des services en cause [voir, en ce sens, arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

47      Enfin, l’appréciation globale du risque de confusion doit être effectuée en prenant en considération le consommateur moyen qui a le niveau d’attention le moins élevé [voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO), T‑220/09, non publié, EU:T:2011:392, point 21 et jurisprudence citée].

48      À titre liminaire, il convient d’observer que, conformément à la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus, seuls les services visés au point 61 ci-dessous (ci-après les « services concernés ») ont été pris en compte par la chambre de recours aux fins d’apprécier l’existence d’un risque de confusion, de sorte qu’il n’y a pas lieu, en l’espèce, de s’intéresser aux « programmes et logiciels informatiques », relevant de la classe 9, aux « télécommunications », relevant de la classe 38, ainsi qu’à la « mise à jour de logiciels » et à la « maintenance de logiciels », relevant de la classe 42, couverts par la marque antérieure.

49      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’EUIPO peut seulement prendre en compte la liste de produits ou de services telle qu’elle figure dans la demande de marque, sous la seule réserve des éventuelles modifications de cette dernière, conformément à l’article 43 du règlement n° 207/2009. Par conséquent, la requérante n’ayant pas modifié la liste des services visés par sa demande de marque, ses affirmations afférentes aux services spécifiques pour lesquels elle a utilisé ou a l’intention d’utiliser la marque demandée sont dépourvues de pertinence en l’espèce [arrêts du 24 janvier 2013, Yordanov/OHMI – Distribuidora comercial del frio (DISCO DESIGNER), T‑189/11, non publié, EU:T:2013:34, point 43, et du 15 mars 2016, Nezi/OHMI – Etam (E), T‑645/13, non publié, EU:T:2016:145, point 77].

50      Cela étant observé, indépendamment des griefs précisément soulevés par les parties, le Tribunal peut toujours examiner toute question qui, telle la définition du public pertinent, participe de l’analyse globale de l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En effet, lorsqu’il est appelé à apprécier la légalité d’une décision d’une chambre de recours de l’EUIPO, le Tribunal ne saurait être lié par une appréciation erronée des faits par cette chambre, dans la mesure où ladite appréciation fait partie des conclusions dont la légalité est contestée devant lui (arrêt du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, EU:C:2008:739, point 48).

51      En l’espèce, c’est à bon droit que la chambre de recours a relevé, au point 17 de la décision attaquée, que les services concernés étaient destinés à la fois au grand public et à des professionnels spécialisés en informatique.

52      Au sein de l’Union, le matériel informatique (ordinateurs, tablettes, smartphone, etc.) et les produits informatiques (logiciels, etc.) correspondent, pour une grande part, à des produits standardisés, simples d’utilisation, peu techniques, largement distribués dans tous types de commerces, et ce à des coûts abordables. Il s’agit, dans cette mesure, de produits de consommation courante destinés au grand public [voir, en ce sens, arrêts du 26 juin 2008, SHS Polar Sistemas Informáticos/OHMI – Polaris Software Lab (POLARIS), T‑79/07, non publié, EU:T:2008:230, point 27, et du 5 décembre 2013, Grebenshikova/OHMI – Volvo Trademark (SOLVO), T‑394/10, non publié, EU:T:2013:627, point 19]. De même, à la suite de ou en rapport avec l’acquisition de matériel et de produits informatiques de consommation courante, il est fréquent que des services de conseils en informatique soient fournis au grand public.

53      Par conséquent, s’agissant des « conseils en informatique », relevant de la classe 42, désignés par la marque demandée et des « conseils en matériel et [en] logiciels informatiques », relevant de la classe 42, couverts par la marque antérieure, la chambre de recours a pu constater à bon droit, au point 17 de la décision attaquée, que ceux-ci étaient également destinés au grand public. En outre, c’est à bon droit, au regard de la jurisprudence citée aux points 46 et 47 ci-dessus, que la chambre de recours a tenu compte, dans ce même point, du niveau d’attention du consommateur moyen au sein du grand public et estimé, en substance, n’avoir aucune raison de constater que le niveau d’attention de celui-ci serait plus élevé que la normale.

54      S’agissant de la « conception de systèmes informatiques », de la « création et [de l’]entretien de sites Internet pour des tiers », de la « recherche et [du] développement de nouveaux produits (pour des tiers) », de l’« élaboration (conception) de logiciels », relevant de la classe 42, visés par la marque demandée, ainsi que de la « programmation pour ordinateurs », des « services de conception de systèmes informatiques », des « recherches et [des] développements de nouveaux produits (pour des tiers) » et de la « conception de logiciels informatiques », relevant de la classe 42, couverts par la marque antérieure, il y a lieu de constater que, lorsque le consommateur n’achète pas un produit standard, déjà disponible dans le commerce, mais se tourne vers un fournisseur spécialisé dans la conception, la création, la recherche et le développement de programmes informatiques, il cherche à obtenir un produit correspondant à un besoin spécifique, qui implique une interaction importante avec le fournisseur et, partant, relativement plus technique et plus coûteux qu’un produit standard. Le plus souvent, ces services s’adressent à des spécialistes et des commerçants dont le degré d’attention est généralement élevé [voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2015, Klaes/OHMI – Klaes Kunststoffe (Klaes), T‑453/13, non publié, EU:T:2015:98, points 3 et 24]. Toutefois, il arrive que certains consommateurs du grand public puissent ponctuellement avoir recours à des services informatiques de conception et de programmation. Dans un tel cas, leur degré d’attention sera cependant plus élevé que la normale, du fait qu’il s’agit de services spécialisés, qui ne s’acquièrent pas quotidiennement et qui représentent un investissement financier important.

55      Par conséquent, la chambre de recours a commis une erreur, au point 17 de la décision attaquée, en constatant également pour les services informatiques de conception et de programmation que le consommateur moyen au sein du grand public ne ferait pas preuve d’un niveau d’attention plus élevé que la normale.

56      Toutefois, l’EUIPO soutient en substance, dans ses écritures, que la conclusion qu’il a tirée, au point 37 de la décision attaquée, sur l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, point b), du règlement n° 207/2009, était également valable en ce qui concerne des consommateurs ayant un niveau d’attention plus élevé que la normale, de sorte que la décision attaquée couvrait également l’hypothèse selon laquelle le public pertinent des services concernés était composé de tels consommateurs.

57      À cet égard, il importe de relever que, au point 36 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que « [la] conclusion [selon laquelle le public pertinent risquait de confondre les marques en conflit] n’[étai]t pas affectée par le fait que le public pertinent a[vait] un degré d’attention élevé ». Cette phrase peut effectivement être comprise en ce sens que la chambre de recours a également constaté l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit des consommateurs des services concernés ayant un niveau d’attention plus élevé que la normale.

58      L’erreur relevée au point 55 ci-dessus n’a donc pas eu d’incidence sur le bien-fondé de la décision attaquée en ce qui concerne le niveau d’attention du public pris en compte pour l’appréciation du risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, dans la mesure où la chambre de recours a vérifié l’existence d’un tel risque, également pour les services informatiques de conception et de programmation, dans l’esprit de consommateurs ayant un niveau d’attention plus élevé que la normale.

59      Il y a donc lieu de poursuivre l’examen du premier moyen.

 Sur la comparaison des services concernés

60      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits ou des services en cause [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

61      Aux points 28 et 29 de la décision attaquée, la chambre de recours, en indiquant faire siennes les constatations de la division d’opposition, a uniquement retenu l’identité des services, relevant de la classe 42, visés par la marque demandée, et de certains services, relevant également de cette classe, couverts par la marque antérieure, à savoir, premièrement, la « conception de systèmes informatiques » visée par la marque demandée et les « services de conception de systèmes informatiques » couverts par la marque antérieure, deuxièmement, la « création et [l’]entretien de sites Internet pour des tiers » visés par la marque demandée et la « programmation pour ordinateurs » couverte par la marque antérieure et, troisièmement, l’« élaboration (conception) de logiciels », la « recherche et [le] développement de nouveaux produits (pour des tiers) » et les « conseils en informatique » visés par la marque demandée et la « conception de logiciels informatiques », la « mise à jour de logiciels », la « maintenance de logiciels », les « recherches et développements de nouveaux produits (pour des tiers) » ainsi que les « conseils en matériel et logiciels informatiques » couverts par la marque antérieure.

62      Il y a lieu d’entériner ces constatations de la chambre de recours. Outre que, comme le soutiennent à bon droit l’EUIPO et l’intervenante, ces constatations ne sont pas, en tant que telles, critiquées par la requérante, elles sont exemptes de toute erreur dans la mesure où les services concernés sont effectivement identiques ou doivent être considérés comme tels parce que les uns sont inclus dans une catégorie plus générale formée par les autres [voir arrêt du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 29 et jurisprudence citée].

 Sur la comparaison des marques en conflit

63      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

64      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

65      Si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en demeure pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux, qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir, en ce sens, arrêts du 13 février 2007, RESPICUR, T‑256/04, EU:T:2007:46, point 57 ; du 13 février 2008, Sanofi-Aventis/OHMI – GD Searle (ATURION), T‑146/06, non publié, EU:T:2008:33, point 58, et du 11 juin 2014, Klingel/OHMI – Develey (JUNGBORN), T‑401/12, non publié, EU:T:2014:507, point 35].

66      En règle générale, un terme fantaisiste attirera davantage l’attention du public [voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 43]. En outre, en général, le public ne considérera pas un élément descriptif faisant partie d’une marque complexe comme l’élément distinctif et dominant de l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêt du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, EU:T:2003:184, point 53].

67      En l’espèce, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, en dépit de certaines différences visuelles et phonétiques, les marques en conflit étaient globalement similaires, en raison de leur élément distinctif commun « wit ».

–       Sur les éléments dominants ou les plus importants des marques en conflit

68      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a notamment constaté que, dans la marque antérieure, l’élément « wit » était dominant, en raison de son caractère fantaisiste et du caractère descriptif de l’élément « software » – qui correspondait à un mot internationalement utilisé et généralement compris comme désignant des programmes et d’autres informations d’exploitation utilisées par un ordinateur et, partant, non distinctif par rapport aux services concernés –, lequel pouvait même être considéré comme étant négligeable pour une partie importante du public pertinent, et du fait que l’élément « wit » dominait l’impression visuelle de la marque antérieure, en raison de sa taille sensiblement plus grande et de sa position centrale dans le signe, ainsi que de la police de caractères inhabituelle dans laquelle il était écrit.

69      Il convient d’entériner ces constatations de la chambre de recours relatives au caractère dominant de l’élément « wit » dans la marque antérieure. Outre qu’elles ne sont pas, en tant que telles, critiquées par la requérante, elles sont exemptes de toute erreur.

70      En outre, aux points 23 à 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a, en substance, considéré que le public pertinent décomposerait la marque demandée en deux éléments, à savoir « gate » et « wit », dans la mesure où il analyserait la marque demandée comme étant composée des mots anglais « gate » et « wit », le premier de ces mots étant descriptif et, partant, dépourvu de caractère distinctif par rapport aux services concernés puisqu’il était largement employé dans le secteur des technologies de l’information et de l’informatique.

71      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en jugeant que l’élément « wit » était l’élément le plus distinctif et le plus important au sein de la marque demandée et que l’élément « gate », même s’il n’était pas négligeable, était d’une importance réduite dans cette marque, malgré sa première position dans celle-ci, en raison de son caractère descriptif par rapport aux services concernés. Il ressortirait d’un dictionnaire en ligne que la chambre de recours aurait retenu un sens très spécifique du mot « gate » que seuls les consommateurs spécialisés en informatique pourraient percevoir, sans que cela les amène à confondre les marques en conflit, en raison de leur niveau d’attention et de vigilance élevé.Quant au grand public, celui-ci, comme l’aurait constaté à juste titre la division d’opposition, n’attribuerait aucune signification spécifique à l’élément « gate » par rapport aux services concernés et, partant, n’analyserait pas la marque demandée comme étant la combinaison de deux mots anglais. La décision attaquée résulterait donc d’un choix terminologique arbitraire et erroné effectué par la chambre de recours. Enfin, elle soutient, en substance, que l’élément « wit » a un faible caractère distinctif intrinsèque, car il est contenu dans de nombreuses marques antérieures désignant des produits ou des services relevant des classes 9, 38 et 42.

72      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

73      Conformément à la jurisprudence citée au point 65 ci-dessus, la question de savoir si le public pertinent décomposera ainsi la marque demandée dépend du point de savoir si ces éléments, ou l’un ou l’autre d’entre eux, auront, pour l’ensemble du public, une signification concrète ou ressembleront à des mots qu’il connaît. Tout d’abord, aucune des parties n’a soutenu que le terme « gatewit » formait une unité logique, dans quelque langue que ce soit. Ensuite, il n’est pas contesté par les parties que, comme l’a relevé à bon droit la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, seuls les consommateurs qui possèdent une connaissance approfondie de l’anglais seront capables de percevoir l’élément « wit » comme un mot anglais décrivant, selon un dictionnaire en ligne, l’« aptitude naturelle à percevoir et à comprendre » ou l’« intelligence » d’une personne et, par extension, la personne dotée d’une telle aptitude ou d’une telle intelligence. Quant à l’élément « gate », qui, comme l’a relevé à bon droit la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, désigne notamment, en informatique et selon le même dictionnaire en ligne, un circuit informatique comportant plusieurs entrées mais une seule sortie qui peut être activée par des combinaisons particulières d’entrées, son sens ne pourra être compris, comme le relève à bon droit la requérante, que par les consommateurs, du grand public ou professionnels, spécialisés en informatique, lesquels sont généralement familiers de l’usage courant de termes anglais pour décrire les produits ou les services informatiques [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 novembre 2007, Gateway/OHMI – Fujitsu Siemens Computers (ACTIVY Media Gateway), T‑434/05, non publié, EU:T:2007:359, point 38].

74      Il convient de poursuivre l’examen du premier moyen à l’égard de la partie du public pertinent composée des consommateurs, du grand public ou professionnels, spécialisés en informatique (ci-après les « consommateurs spécialisés en informatique »), qui constituent une partie substantielle et non négligeable des consommateurs des services de conseil en informatique. En effet, la constatation de l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, point b), du règlement n° 207/2009 par rapport à ces seuls consommateurs pourrait suffire, en application de la jurisprudence [voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2002, MATRATZEN, T‑6/01, EU:T:2002:261, point 38 ; du 24 juin 2014, Hut.com/OHMI – Intersport France (THE HUT), T‑330/12, non publié, EU:T:2014:569, point 58 et jurisprudence citée, et du 4 juillet 2014, Advance Magazine Publishers/OHMI – Montres Tudor (GLAMOUR), T‑1/13, non publié, EU:T:2014:615, point 36], à justifier légalement la décision attaquée.

75      S’agissant du caractère le plus distinctif et le plus important de l’élément « wit » dans la marque demandée, lié au caractère fantaisiste de cet élément et au caractère descriptif de l’élément « gate », il y a lieu de l’entériner, dans le cas des services concernés, pour les consommateurs spécialisés en informatique. En effet, ces derniers seront en mesure de percevoir le caractère descriptif de l’élément « gate », qui correspond à un mot anglais ayant un sens spécifique en informatique. Par ailleurs, ces consommateurs, même s’ils ont une connaissance approfondie de l’anglais, n’attribueront aucune signification descriptive particulière à l’élément « wit », dans la mesure où ce mot n’est employé, en anglais, que pour décrire l’aptitude ou l’intelligence spécifique de personnes et non de choses inanimées, matérielles ou immatérielles, telles celles qui peuvent correspondre, en anglais ou dans le domaine informatique, au mot « gate ». C’est pourquoi, dans le contexte de l’espèce, le terme « wit » sera perçu comme un terme fantaisiste.

76      Quant à l’argument tiré, en substance, de ce que l’élément « wit » de la marque demandée serait dépourvu de caractère distinctif, en raison de l’usage prétendument répandu de celui-ci sur le marché, celui-ci repose, en pratique, sur la référence faite par la requérante à huit marques de l’Union européenne et à une marque internationale antérieures composées de l’élément « wit » ou contenant cet élément. Même à supposer que ces marques soient effectivement utilisées sur le marché de l’Union, il ne saurait en être déduit que l’élément « wit », qui les compose ou qu’elles contiennent, présente un caractère répandu sur ce territoire, le nombre neuf demeurant peu élevé par rapport à la taille dudit marché. En outre, il y a lieu de rappeler que le facteur pertinent aux fins de contester le caractère distinctif d’un élément consiste dans sa présence effective sur le marché en cause et non dans des registres. Or, la requérante n’a pas attesté la présence effective des marques antérieures qu’elle invoque sur le marché de l’Union [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 8 mars 2013, Mayer Naman/OHMI – Daniel e Mayer (David Mayer), T‑498/10, non publié, EU:T:2013:117, point 77]. Le présent argument doit donc être écarté.

77      En conséquence, il y a lieu de relever que la constatation de la chambre de recours selon laquelle l’élément « wit » est le plus distinctif et le plus important de la marque demandée, en raison du caractère fantaisiste de cet élément et du caractère descriptif de l’élément « gate », est correcte en ce qui concerne les consommateurs spécialisés en informatique.

–       Sur la similitude visuelle

78      Sur le plan visuel, la chambre de recours a jugé, au point 22 de la décision attaquée, que l’élément « wit » était dominant dans la marque antérieure, en raison de la position centrale qu’il occupait dans le signe, de sa police inhabituelle et de sa taille sensiblement plus grande que celle de l’autre élément, « software », composant le signe, lequel était, de plus, descriptif des services concernés et, comme tel, faiblement distinctif. Compte tenu de ce que les marques en conflit partageaient les lettres de leur élément commun « wit », mais différaient par la stylisation particulière de cet élément dans la marque antérieure et par leurs éléments additionnels « software » ou « gate », la chambre de recours a conclu, au point 23 de la décision attaquée, qu’elles présentaient un faible degré de similitude visuelle.

79      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que les marques en conflit présentaient un degré faible de similitude sur le plan visuel, alors que, comme l’avait constaté à bon droit la division d’opposition, elles ne présentaient aucune similitude de cet ordre. Le fait que les marques en conflit partageraient l’élément « wit » ne serait pas déterminant. En effet, dans la marque antérieure, le caractère hautement stylisé de l’élément « wit » lui conférerait un caractère visuellement dominant, alors que, dans la marque demandée, comme l’aurait relevé à bon droit la division d’opposition et conformément à la jurisprudence, la première position occupée par l’élément « gate » impliquerait qu’il attirerait davantage l’attention du consommateur et, partant, revêtirait plus d’importance sur le plan visuel que l’élément « wit », placé en seconde position.

80      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

81      À cet égard, il y a lieu de considérer que les consommateurs spécialisés en informatique percevront les marques en conflit comme étant similaires, compte tenu du fait qu’ils décomposeront la marque demandée en deux éléments, « gate » et « wit », et focaliseront leur attention sur le second de ces éléments, compte tenu de son caractère fantaisiste par rapport aux services concernés et du caractère descriptif que le premier de ces éléments revêtira pour eux (voir points 66 et 73 ci-dessus), de sorte qu’ils compareront principalement l’élément « wit » de la marque demandée à l’élément « wit » dominant dans la marque antérieure (voir point 69 ci-dessus).

82      À l’égard des consommateurs spécialisés en informatique, la circonstance que l’élément « gate » soit placé au début de la marque demandée et l’élément « wit » à la fin de cette marque n’aura donc pas pour conséquence, comme dans d’autres circonstances invoquées par la requérante, que lesdits consommateurs accorderont plus d’importance, sur le plan visuel, à l’élément « gate ».

83      De plus, même si, comme le soutient la requérante, l’élément « wit » dans la marque antérieure est hautement stylisé, cela n’affecte pas l’identification dans celle-ci des lettres « w », « i » et « t », bien alignées de gauche à droite. Ainsi, comme le relève à juste titre l’EUIPO, l’élément « wit » reste parfaitement lisible et visuellement identifiable, dans la marque antérieure, en dépit de ladite stylisation, de sorte qu’il pourra être comparé, en tant que tel, à l’élément « wit » de la marque demandée.

84      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que, par rapport aux consommateurs spécialisés en informatique, la similitude visuelle entre les marques en conflit sera d’un degré normal et, donc, plus élevé que le « faible degré » de similitude constaté par la chambre de recours, au point 23 de la décision attaquée.

85      Cette erreur ne peut toutefois justifier l’annulation de la décision attaquée, dans la mesure où elle ne remet pas en cause le bien-fondé de celle-ci.

–       Sur la similitude phonétique

86      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a estimé, au point 24 de la décision attaquée, que la prononciation identique des lettres de leur élément commun « wit », qui était l’élément distinctif et dominant de la marque antérieure, et la circonstance que, compte tenu de son caractère descriptif, l’élément additionnel « software » de celle-ci pourrait être souvent omis par le public pertinent suffisaient à conclure à l’existence d’une similitude phonétique entre les marques en conflit, même si leurs éléments additionnels « software » ou « gate » se prononçaient différemment.

87      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que, dans la mesure où les marques en conflit partageaient l’élément « wit », elles étaient similaires sur le plan phonétique, alors qu’elles ne présentent aucune similitude de cet ordre. D’une part, lorsqu’elles seraient prononcées en anglais, les marques en conflit différeraient en ce qui concerne l’accent tonique, le rythme et la musicalité. D’autre part, comme l’aurait relevé à bon droit la division d’opposition et conformément à la jurisprudence, les éléments placés en première position dans les marques en conflit revêtiraient plus d’importance sur le plan phonétique que les éléments qui les suivraient. Or, les éléments « wit », dans la marque antérieure, et « gate », dans la marque demandée, ne seraient pas similaires sur le plan phonétique.

88      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

89      En l’espèce, la prononciation de l’élément « wit », que les marques contiennent toutes les deux, coïncide, alors même que, pour les consommateurs spécialisés en informatique, cet élément sera perçu comme étant le plus distinctif et important dans lesdites marques et, même, comme étant l’élément dominant dans la marque antérieure (voir point 69 ci-dessus), qui sera, le plus souvent, seul pris en compte par les consommateurs spécialisés en informatique.

90      À l’égard de ces derniers consommateurs, et comme le relève à juste titre l’EUIPO, la circonstance que l’élément « gate » soit placé au début du signe demandé et l’élément « wit » à la fin dudit signe n’aura donc pas pour conséquence, comme dans d’autres circonstances invoquées par la requérante, que les consommateurs accorderont plus d’importance sur le plan auditif à l’élément « gate ».

91      Par conséquent, la chambre de recours a constaté à bon droit, au point 24 de la décision attaquée, que les marques en conflit étaient similaires sur le plan auditif.

–       Sur la similitude conceptuelle

92      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a jugé, au point 25 de la décision attaquée, que les marques étaient similaires, en raison de leur élément distinctif commun « wit » qui, même s’il pouvait être compris par les consommateurs ayant une connaissance suffisante de l’anglais comme signifiant l’« aptitude naturelle à percevoir et à comprendre », ne pourrait se voir attribuer aucune signification particulière par rapport aux services concernés, alors que les éléments additionnels « software » ou « gate » des marques en conflit seraient perçus, par une partie substantielle, même non anglophone, du public pertinent, comme étant descriptifs de ces mêmes services. En effet, en informatique, le terme « software » renverrait aux programmes informatiques, alors que le terme « gate » serait employé pour désigner un circuit informatique comportant plusieurs entrées mais une seule sortie pouvant être activée par des combinaisons particulières d’entrées.

93      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que, dans la mesure où les marques en conflit partageaient l’élément « wit », elles étaient similaires sur le plan conceptuel, alors qu’elles renvoyaient à des concepts radicalement différents. En effet, tandis que la marque antérieure aurait une signification précise en anglais, tel ne serait pas le cas de la marque demandée, qui n’aurait aucune signification directement évocatrice par rapport aux services concernés et serait donc perçue par le public pertinent comme étant purement fantaisiste. Elle prétend, sans autres précisions, que la marque antérieure a une signification précise en anglais, tandis que la marque demandée n’a aucun contenu directement évocateur et est donc purement fantaisiste.

94      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

95      À cet égard et comme il a déjà été relevé au point 73 ci-dessus, il y a lieu de relever que les consommateurs spécialisés en informatique seront en mesure de connaître le sens technique du mot « gate » dans le domaine informatique et, plus précisément, qu’ils percevront celui-ci comme renvoyant à un circuit informatique comportant plusieurs entrées mais une seule sortie qui peut être activée par des combinaisons particulières d’entrées ou, à tout le moins, comme un terme descriptif d’un appareil ou d’une fonction technique utilisés dans le secteur des technologies de l’information et de l’informatique. Cela implique d’une part que, conformément à la jurisprudence citée au point 65 ci-dessus, les consommateurs spécialisés en informatique décomposeront la marque demandée en deux éléments, à savoir « gate » et « wit », qu’ils compareront essentiellement à l’élément « wit » dominant dans la marque antérieure (voir point 69 ci-dessus). Cela implique d’autre part que ces mêmes consommateurs percevront conceptuellement l’élément « gate » comme étant descriptif des services concernés.

96      En revanche, comme il a été observé également au point 73 ci-dessus, à supposer même que certains consommateurs ayant une connaissance approfondie de l’anglais, au sein des consommateurs spécialisés en informatique, connaissent le sens du mot « wit » en anglais, ils ne seront pas en mesure de lui attribuer une signification particulière par rapport aux services concernés (voir point 75 ci-dessus). Ainsi, l’élément « wit » sera conceptuellement perçu par l’ensemble des consommateurs spécialisés en informatique comme étant fantaisiste.

97      Il y a donc lieu de conclure que les consommateurs spécialisés en informatique n’associeront pas l’élément « wit », commun aux marques en conflit, à une notion particulière, de sorte que la comparaison conceptuelle demeurera neutre puisque ce terme ne renverra, pour eux, à aucun concept particulier [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 2 février 2016, Antica Azienda Agricola Vitivinicola Dei Conti Leone De Castris/OHMI – Vicente Gandía Pla (ILLIRIA), T‑541/14, non publié, EU:T:2016:51, points 40 et 41].

98      Par conséquent, il y a lieu de relever que la chambre de recours a commis une erreur, au point 25 de la décision attaquée, en constatant que les marques en conflit seraient similaires sur le plan conceptuel, notamment pour les consommateurs spécialisés en informatique, du fait qu’elles partagent l’élément « wit ».

99      Cela étant, compte tenu de la similitude visuelle et auditive des marques en conflit, en raison de leur élément distinctif commun « wit », nullement contrebalancée par quelque différence conceptuelle que ce soit, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu, au point 26 de la décision attaquée, à l’existence d’une similitude entre ces marques, notamment pour les consommateurs spécialisés en informatique. Il y a donc lieu de poursuivre l’examen du premier moyen.

 Sur le risque de confusion

100    Aux points 36 et 37 de la décision attaquée, la chambre de recours a déduit de l’identité ou de la similitude des services concernés et de la similitude globale des marques en conflit que les différences entre ces dernières ne suffisaient pas à écarter le risque que le public pertinent puisse croire que ces services provenaient de la même entreprise ou d’entreprises économiquement liées, en particulier si l’on tenait compte du fait que les consommateurs n’avaient que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques mais devaient se fier à l’image imparfaite qu’ils en avaient gardée en mémoire. Elle a observé que cette conclusion n’était pas affectée par le fait que le public pertinent ait un degré d’attention élevé. Selon elle, il était, dès lors, probable que le public pertinent croie que les services liés à l’informatique de la requérante constituent une nouvelle variante des services proposés par l’intervenante, de sorte qu’il existait, en l’espèce, un risque de confusion entre les marques en conflit, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

101    La requérante soutient que la conclusion de la chambre de recours selon laquelle, en dépit de certaines différences visuelles et phonétiques, les marques en conflit seraient globalement similaires, en raison de leur élément distinctif commun « wit », serait fondée sur une analyse erronée. Selon la requérante, le fait que plusieurs marques de l’Union européenne contenant notamment l’élément « wit » ont déjà été enregistrées pour désigner des produits ou des services relevant des classes 9, 38 et 42 et ont coexisté avec la marque antérieure atteste que la présence de cet élément dans des marques n’est pas suffisante pour créer une similitude entre celles-ci. En outre, l’absence de similitude entre les marques en conflit serait renforcée par le fait que le premier élément de la marque demandée, à savoir l’élément « gate », serait un élément original, alors que le second élément de la marque antérieure, à savoir l’élément « software », serait un élément purement descriptif.

102    Lors de l’audience, la requérante a en outre indiqué, de manière générale, que le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne confirmait le bien-fondé du présent recours et, notamment, du premier moyen.

103    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

104    Concernant le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne, l’EUIPO et l’intervenante ont notamment soutenu que celui-ci n’était pas pertinent en l’espèce, dans la mesure où il avait été invoqué par la requérante sans être préalablement devenu définitif, il concernait une demande d’annulation d’une marque nationale enregistrée et non, comme en l’espèce, l’opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne et il portait sur l’application et l’interprétation de la législation portugaise, qui différait des dispositions du règlement n° 207/2009 dont la violation était alléguée dans le cadre du présent recours.

105    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques en conflit et de celle des produits ou des services désignés par celles-ci. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services en cause peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques en conflit, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

106    À cet égard et par rapport aux consommateurs spécialisés en informatique, la chambre de recours a conclu à bon droit, conformément à la jurisprudence applicable, à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En effet, même s’il y a lieu de retenir que le niveau d’attention de ces consommateurs sera en l’espèce plus élevé que la normale, tout risque de confusion ne peut être écarté dans la mesure où les services en conflit sont identiques et où les marques en conflit sont similaires et ne diffèrent que par des éléments peu distinctifs. Comme l’a observé à bon droit la chambre de recours, il est donc probable que les consommateurs spécialisés en informatique croient que les services désignés par la marque demandée constituent une nouvelle variante de ceux proposés par l’intervenante.

107    Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, et dans le cadre d’une appréciation globale de ceux-ci, il y a lieu d’approuver la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe un risque de confusion entre les marques en conflit, pour l’ensemble des services concernés, dans l’esprit de la partie résiduelle, mais néanmoins significative ou non négligeable, au sens de la jurisprudence citée au point 74 ci-dessus, du public pertinent constituée par les consommateurs spécialisés en informatique.

108    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument que la requérante semble vouloir tirer de la coexistence de marques antérieures composées de l’élément « wit » ou le contenant sur le territoire de l’Union (voir point 76 ci-dessus). Certes, il n’est pas entièrement exclu que, dans certains cas, la coexistence de marques antérieures sur le marché puisse éventuellement éliminer l’existence d’un risque de confusion entre des marques en conflit. Néanmoins, une telle éventualité ne saurait être prise en considération que si, à tout le moins, au cours de la procédure concernant l’examen de motifs relatifs de refus devant l’EUIPO, le demandeur de la marque de l’Union européenne a dûment démontré que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent entre les marques antérieures dont il se prévaut et la marque antérieure qui fonde l’opposition, dans la mesure où celui-ci serait habitué à voir ces marques sans les confondre, et sous réserve que les marques antérieures en cause et les marques en conflit soient identiques [arrêts du 11 mai 2005, Grupo Sada/OHMI – Sadia (GRUPO SADA), T‑31/03, EU:T:2005:169, point 86, et du 20 janvier 2010, Nokia/OHMI – Medion (LIFE BLOG), T‑460/07, EU:T:2010:18, point 68], et ce tant sur leurs éléments verbaux que figuratifs, et se réfèrent aux mêmes produits ou services [arrêt du 21 février 2013, Seven for all mankind/Seven, C‑655/11 P, non publié, EU:C:2013:94, points 48 et 49]. Or, en l’espèce, cette double condition n’est pas remplie. Outre que les marques en conflit ne sont pas identiques aux marques antérieures, la requérante n’a pas établi que la coexistence des marques antérieures qu’elle invoque reposerait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre lesdites marques.

109    Par ailleurs, c’est à bon droit que l’EUIPO et l’intervenante soutiennent que le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne n’est pas pertinent en l’espèce. Indépendamment même du fait que, au moment de sa production, ce jugement n’aurait pas encore été définitif, il y a lieu de relever que celui-ci repose sur une application et une interprétation de l’article 245, paragraphe 1, sous c), du code de la propriété industrielle portugais qui diffère de celles de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En effet, contrairement à l’application et à l’interprétation de l’article 245, paragraphe 1, sous c), du code de la propriété industrielle portugais retenues dans ledit jugement, l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et la jurisprudence rendue sur le fondement de cette disposition n’imposent pas d’établir une similitude entre les marques en conflit telle que le consommateur ne serait pas en mesure de les distinguer à moins de les examiner ou de les comparer attentivement. En outre, pour autant que le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne recourt, dans le cadre de l’application et de l’interprétation de l’article 245, paragraphe 1, sous c), du code de la propriété industrielle portugais, à une « théorie de la distance » permettant d’apprécier le caractère distinctif des marques en conflit en tenant compte d’autres marques antérieures, non identiques à celles-ci, sans même rechercher si lesdites marques étaient effectivement présentes sur le marché et si les consommateurs étaient habitués à les voir sans les confondre, celui-ci s’est écarté de la jurisprudence rendue dans le cadre de l’application et de l’interprétation du règlement n° 207/2009 (voir points 76 et 108 ci-dessus). Il s’ensuit que la solution retenue dans le jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne, sur le fondement de l’article 245, paragraphe 1, sous c), du code de la propriété industrielle portugais, n’est pas directement transposable, comme l’a suggéré la requérante à l’audience, à la présente affaire, qui porte sur l’application et l’interprétation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Faute d’autres précisions fournies par la requérante, il y a donc lieu d’écarter les arguments qu’elle prétend tirer en l’espèce de ce jugement.

110    Dans la mesure où la conclusion de la chambre de recours confirmée au point 107 ci-dessus suffit à justifier l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 au cas d’espèce, il y a lieu de rejeter le premier moyen, tiré d’une violation de cette disposition.

111    Or, l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 au cas d’espèce suffit à justifier la décision attaquée, par laquelle la chambre de recours a, d’une part, annulé intégralement la décision de la division d’opposition, qui rejetait l’opposition de l’intervenante dans son intégralité, et, d’autre part, rejeté la demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour l’ensemble des services visés par celle-ci. Par conséquent, le rejet du premier moyen suffit à justifier le rejet, comme étant non fondé, du présent recours, en ce qu’il vise à l’annulation de la décision attaquée.

112    Ainsi et sans même qu’il soit besoin de statuer sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, il y a lieu de rejeter le présent recours.

 Sur les dépens

113    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En outre, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme étant des dépens récupérables.

114    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’EUIPO aux fins de la présente procédure et par l’intervenante aux fins de la procédure devant la chambre de recours, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Construlink Tecnologias de Informação, SA supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) aux fins de la présente procédure et par Wit-Software, Consultoria e Software para a Internet Móvel, SA aux fins de la procédure devant la chambre de recours.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 février 2017.

Signatures



Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Sur la recevabilité du troisième chef de conclusions, visant à ce que le Tribunal juge la demande d’enregistrement entièrement fondée

Sur la recevabilité du jugement du tribunal de la propriété intellectuelle de Lisbonne produit, pour la première fois, devant le Tribunal

Sur le fond

Sur le public pertinent

Sur la comparaison des services concernés

Sur la comparaison des marques en conflit

– Sur les éléments dominants ou les plus importants des marques en conflit

– Sur la similitude visuelle

– Sur la similitude phonétique

– Sur la similitude conceptuelle

Sur le risque de confusion

Sur les dépens


* Langue de procédure: l’anglais.