Language of document : ECLI:EU:T:2008:475

ARRÊT DU 5. 11. 2008 – AFFAIRE T-256/06


DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

5 novembre 2008 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale HONEYCOMB – Motif absolu de refus – Caractère descriptif –Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑256/06,

Neoperl Servisys AG, établie à Reinach (Suisse), représentée par Me H. Börjes-Pestalozza, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. R. Pethke, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 17 juillet 2006 (affaire R 1388/2005‑4), concernant la demande d’enregistrement du signe verbal HONEYCOMB comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Papasavvas et N. Wahl (rapporteur), juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 septembre 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 décembre 2006,

à la suite de l’audience du 5 mai 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 octobre 2002, la requérante, Neoperl Servisys AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal HONEYCOMB.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 11 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Régulateurs de jet ».

4        Par décision du 29 septembre 2005, l’examinateur a rejeté, au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94, la demande de la requérante.

5        Le 21 novembre 2005, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 17 juillet 2006 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté ce recours au motif que la marque demandée était descriptive des produits concernés au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 et était, de ce fait, dépourvue de tout caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

7        La chambre de recours a, tout d’abord, estimé que le public visé par la marque demandée était composé tant par des professionnels que par le grand public de langue anglaise.

8        S’agissant du caractère descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, de la marque demandée, la chambre de recours a considéré, d’une part, que l’embout des régulateurs de jet pouvait présenter une structure alvéolée. Elle a relevé, d’autre part, que le terme « honeycomb » décrivait notamment, selon le Merriam-Webster’s Online Dictionary, « un objet semblable à une alvéole d’abeille par sa structure ou par son aspect, en particulier un matériau structuré cellulaire fort et léger ». Selon la chambre de recours, les consommateurs concernés comprendront sans peine le terme « honeycomb » comme une indication renvoyant à l’une des caractéristiques des régulateurs de jet, à savoir la forme alvéolée de leur embout.

9        La chambre de recours a également estimé que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au motif que les signes décrivant des caractéristiques des produits ou des services sous une forme directement discernable par le consommateur sont, de ce fait, normalement aussi dépourvus de caractère distinctif, étant donné que l’indication en cause sera comprise comme une information purement objective.

10      Enfin, la chambre de recours a relevé que les enregistrements du signe demandé dans des pays tiers ne sont pas décisifs pour l’application de l’article 7 du règlement n° 40/94, puisque ce dernier a mis en place un système autonome de protection de la marque communautaire.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI à publier la demande d’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le deuxième chef de conclusions comme irrecevable ;

–        rejeter le recours comme non fondé pour le surplus ;

–        condamner la requérante aux dépens.

13      Lors de l’audience, la requérante a renoncé à son deuxième chef de conclusions, tendant à ce que le Tribunal ordonne à l’OHMI de procéder à l’enregistrement de la marque demandée, ce dont il a été pris acte.

 En droit

 Arguments des parties

14      Au soutien de son recours, la requérante soulève deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

15      S’agissant du premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, la requérante fait valoir que la question centrale en l’espèce est de savoir si, du point de vue du public concerné, il existe, compte tenu de la signification de la marque demandée, un lien direct et concret entre cette dernière et la catégorie de produits pour laquelle l’enregistrement a été demandé.

16      Elle soutient, tout d’abord, que le terme « honeycomb » se compose d’un substantif principal (comb) et d’un substantif accessoire (honey). Ce dernier élément verbal, sur lequel porte l’accentuation en raison de sa position au début du signe en cause, ne permettrait pas, à lui seul, d’établir un lien avec les produits en cause. Dès lors, le signe demandé apparaîtrait comme fantaisiste.

17      La requérante fait ensuite valoir qu’en anglais le terme « honeycomb » est principalement compris comme signifiant « rayon de miel ». Selon elle, si le mot « dessin », « structure » ou encore « construction » lui est ajouté, le terme « honeycomb » peut aussi être compris comme se référant à une structure ou à une construction en forme de nid d’abeilles. Or, les définitions du mot « honeycomb » citées dans la décision attaquée ne renverraient pas directement et clairement à la structure en forme de nid d’abeilles de l’embout des régulateurs de jet. En effet, il existerait sur le marché différents modèles de régulateurs de jet qui ont une structure autre que celle en forme de nid d’abeilles, à savoir en réseau de mailles, en couronne circulaire ou radiale.

18      En outre, la requérante soutient que, même s’agissant des régulateurs de jet en forme de nid d’abeilles, les consommateurs visés ne perçoivent pas, à première vue, ladite forme. En effet, lorsqu’ils regardent la face de l’embout d’un régulateur de jet, les consommateurs doivent exercer un certain effort mental pour le considérer en trois dimensions.

19      Il s’ensuit, selon la requérante, que le signe demandé n’a pas de caractère descriptif par rapport aux produits en question et qu’il n’existe pas de lien direct entre le terme « honeycomb » et lesdits produits. Par conséquent, la décision attaquée serait entachée d’une erreur en ce qui concerne l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94.

20      S’agissant du second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, la requérante estime que cette disposition est également violée, puisque la chambre de recours a, dans la décision attaquée, déduit l’absence de caractère distinctif du signe demandé essentiellement de son caractère descriptif.

21      Enfin, la requérante invoque la circonstance que le signe demandé a été enregistré dans plusieurs pays tiers, notamment aux États-Unis.

22      L’OHMI conteste les arguments soulevés par la requérante.

 Appréciation du Tribunal

23      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du même règlement énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

24      Selon une jurisprudence constante, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous [voir arrêt du Tribunal du 14 juin 2007, Europig/OHMI (EUROPIG), T‑207/06, Rec. p. II‑1961, point 24, et la jurisprudence citée].

25      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne, de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative (voir arrêt EUROPIG, précité, point 25, et la jurisprudence citée).

26      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (voir arrêt EUROPIG, précité, point 27, et la jurisprudence citée).

27      Il importe également de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés [voir arrêt du Tribunal du 7 juin 2005, Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft/OHMI (MunichFinancialServices), T‑316/03, Rec. p. II‑1951, point 26, et la jurisprudence citée].

28      En l’espèce, les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé sont des régulateurs de jet.

29      Quant au public par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus en cause, il est constitué, ainsi que cela ressort du point 16 de la décision attaquée, sans que cela ait été contesté par la requérante, par le consommateur moyen anglophone. En effet, d’une part, les produits visés par la demande de marque, qui s’adressent tant à un public de professionnels qu’au grand public, sont destinés à la consommation générale et, d’autre part, le signe en cause est composé de termes issus de la langue anglaise.

30      Partant, il y a lieu d’examiner s’il existe, du point de vue de ce public, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe HONEYCOMB et les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé.

31      À cet égard, force est de constater que le terme « honeycomb » renvoie, notamment, à une forme ou à une structure alvéolée ou comparable à une alvéole d’abeilles, ainsi qu’il ressort du point 18 de la décision attaquée.

32      Associé aux produits visés, le mot « honeycomb » pourra être utilisé pour désigner la forme alvéolée de l’embout des régulateurs de jet, lequel, en permettant de moduler la puissance du jet d’eau, constitue une caractéristique pertinente des produits visés par la demande de marque.

33      Il s’ensuit que le signe HONEYCOMB présente un rapport suffisamment direct et concret avec les produits visés par la demande d’enregistrement.

34      Aucun des arguments soulevés par la requérante n’est de nature à remettre en cause cette conclusion.

35      Tout d’abord, contrairement à ce qu’avance la requérante, il est indifférent que des produits identiques à ceux visés par la marque demandée présentent parfois, voire souvent, des structures non alvéolées. En effet, il résulte de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, que la possibilité que la marque demandée soit utilisée pour désigner une caractéristique du produit ou du service en cause suffit pour refuser son enregistrement (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 97).

36      S’agissant, ensuite, de l’argument selon lequel le terme « honeycomb » n’a pas de signification concrète sur le plan strictement technique, il ne saurait davantage être retenu. En effet, dans le cadre de l’appréciation du caractère descriptif d’un signe, la question de savoir si sa signification a un sens technique n’est pas pertinente [arrêt du Tribunal du 6 novembre 2007, RheinfelsQuellen H. Hövelmann/OHMI (VOM URSPRUNG HER VOLLKOMMEN), T‑28/06, Rec. p. II‑4413, point 35]. Il suffit que l’expression, par le signe en cause, d’une qualité ou d’une caractéristique du produit visé entraîne directement son association audit produit.

37      En outre, contrairement à ce que la requérante a fait valoir, il est peu probable que le public concerné dissociera en deux termes distincts le signe HONEYCOMB, puisque celui revêt, ainsi que l’a mentionné la chambre de recours au point 18 de la décision attaquée, une signification bien précise.

38      S’agissant, enfin, de l’argument tiré de l’enregistrement du signe demandé dans plusieurs pays tiers, notamment aux États-Unis, il suffit de rappeler que, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence, le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêt du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47]. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente.

39      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 doit être rejeté.

40      Quant au moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort très clairement de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés s’applique pour que le signe en cause ne puisse être enregistré comme marque communautaire (arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29).

41      Par conséquent, il convient, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second moyen, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

42      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Neoperl Servisys AG est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Papasavvas

Wahl

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 novembre 2008.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.