Language of document : ECLI:EU:T:2008:575

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

16 décembre 2008 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale MANSO DE VELASCO – Marque nationale verbale antérieure VELASCO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑259/06,

Miguel Torres, SA, établie à Vilafranca del Penedés (Espagne), représentée par Mes E. Armijo Chávarri et A. Castán Pérez-Gómez, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Laporta Insa, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Navisa Industrial Vinícola Española, SA, établie à Montilla (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 29 juin 2006 (affaire R 865/2005‑1), relative à une procédure d’opposition entre Navisa Industrial Vinícola Española, SA et Miguel Torres, SA,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. J. Azizi, président, Mme E. Cremona (rapporteur) et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 20 septembre 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 13 décembre 2006,

à la suite de l’audience du 12 février 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 15 juin 2001, la requérante, Miguel Torres, SA, a présenté, auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), au titre du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, une demande d’enregistrement en tant que marque communautaire du signe verbal MANSO DE VELASCO.

2        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Boissons alcooliques, à l’exception des bières ».

3        Le 7 janvier 2002, la demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires nº 3/2002.

4        Le 4 avril 2002, l’opposante, la société Navisa Industrial Vinícola Española, a formé une opposition à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée.

5        L’opposition était basée sur l’enregistrement de la marque verbale espagnole VELASCO n° 214212 pour certains produits et services relevant des classes 30, 32 et 33 au sens de l’arrangement de Nice, et correspondant à la description suivante : « Oenologie, vins, moûts, bières, vinaigres, et en particulier vins de quinquina et vermouths ». L’opposition était fondée sur tous les produits protégés par la marque antérieure et était dirigée contre tous les produits désignés dans la demande de marque communautaire.

6        Par décision du 25 mai 2005, la division d’opposition de l’OHMI a fait droit à l’opposition formée contre la marque demandée et a rejeté, par conséquent, l’enregistrement de celle-ci en tant que marque communautaire. La division d’opposition a motivé sa décision en considérant qu’il existait un risque de confusion, ainsi qu’un risque d’association, en raison de l’identité existant entre les produits concernés et des similitudes phonétiques et visuelles constatées entre les deux marques en conflit. La division d’opposition a également indiqué que l’enregistrement de la marque demandée était susceptible d’induire le consommateur espagnol à penser que la marque MANSO DE VELASCO était utilisée pour désigner un type particulier de vins de la marque VELASCO et, par conséquent, que les produits visés par l’une et l’autre marque provenaient d’une même entreprise.

7        Le 22 juillet 2005, la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’opposition de l’OHMI.

8        Par décision du 29 juin 2006 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a rejeté le recours et a confirmé la décision de la division d’opposition. Dans sa décision, la chambre de recours a constaté, d’une part, que la similitude des produits en cause était quasi totale et, d’autre part, que la reproduction intégrale de la marque nationale antérieure VELASCO dans la marque demandée MANSO DE VELASCO créait une similitude visuelle, phonétique et conceptuelle d’un degré moyen entre celles‑ci. La chambre de recours a également estimé que, en vertu du principe d’interdépendance, la quasi-identité des produits en cause compenserait largement le degré plus faible de similitude constaté entre les signes en conflit. Sur la base de ces constatations, elle a conclu qu’il existait un risque significatif pour les consommateurs, qui connaissaient déjà la marque VELASCO, de croire que la marque MANSO DE VELASCO désignait une nouvelle catégorie de vin, de la même origine commerciale. Ainsi, en confirmant la décision de la division d’opposition, elle a refusé l’enregistrement de la marque demandée.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

 Arguments des parties

12      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours en ce qui concerne tant la similitude des produits en cause que la similitude entre les marques en conflit.

13      Tout d’abord, la requérante conteste l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle il existe une quasi-identité des produits concernés. Selon elle, il existe seulement une similitude moyenne, voire faible, entre les produits concernés. À l’exception des « vins » auxquels renvoient les deux marques, les domaines d’application de celles-ci ne coïncideraient pas. La marque demandée couvrirait un éventail plus large de boissons alcoolisées (telles que les whiskies, les genièvres, les vodkas, les eaux-de-vie ou les liqueurs) qui ne seraient pas visées par la marque nationale antérieure. Cette dernière désignerait des produits (les vinaigres, les moûts et les bières) qui, à leur tour, ne seraient pas inclus dans la marque demandée.

14      Ensuite, la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours au regard de la similitude entre les signes en conflit. En rappelant la jurisprudence selon laquelle une marque complexe et une autre marque, identique ou semblable à l’un des composants de la marque complexe, ne peuvent être considérées comme étant similaires que si ce composant constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque complexe, elle critique la décision attaquée en ce qu’elle se fonderait implicitement sur la considération selon laquelle le terme « velasco » constitue l’élément dominant et distinctif de la marque demandée. Selon elle, en l’espèce, l’élément qui caractérise la marque demandée serait, au contraire, le terme « manso ».

15      En premier lieu, le terme « velasco » désignerait un nom de famille très commun en Espagne et, de ce fait, présenterait un caractère distinctif diminué. Cela serait démontré par le nombre important d’abonnés aux lignes téléphoniques figurant sur l’annuaire téléphonique publié sur Internet et dont le nom de famille est Velasco (1 234 abonnés à Barcelone et 2 959 abonnés à Madrid). En revanche, le nombre d’abonnés aux lignes téléphoniques dont le nom de famille est Manso démontrerait que ce nom est moins répandu (148 abonnés à Barcelone et 680 abonnés à Madrid).

16      En second lieu, le terme « velasco » serait une dénomination utilisée avec une certaine fréquence dans le domaine des boissons alcooliques, comme le démontreraient des exemples de marques déjà enregistrées en Espagne comportant le terme « velasco », en l’occurrence CASTILLO DE VELASCO, MIGUEL TORRES VIÑEDO DEL GOBERNADOR MANSO DE VELASCO, AMBROSIO DE VELASCO, CONCHA VELASCO, ZOCO AMBROSIO VELASCO, BARON DE VELASCO, MANSO DE VELASCO. La chambre de recours aurait donc erronément considéré que les exemples susmentionnés, déjà avancés par la requérante au cours de la procédure administrative, ne suffisaient pas à démontrer que le nom de famille Velasco est communément utilisé pour désigner du vin en Espagne. En cas de doutes à cet égard, la chambre de recours aurait pu et dû inviter la requérante à clarifier ce détail conformément aux articles 61 et 74 du règlement n° 40/94.

17      Par ailleurs, la requérante fait valoir que, pour apprécier le caractère dominant d’un ou de plusieurs éléments d’une marque complexe, il peut être tenu compte, de manière accessoire, de la position des différents composants dans la configuration de la marque en question. Elle estime donc que, dès lors que le nom Manso constitue le premier mot figurant dans la marque demandée, le consommateur aura tendance à abréger la marque demandée en retenant davantage le terme « manso » que le terme « velasco ».

18      S’agissant de la comparaison visuelle, selon la requérante, les deux premiers éléments de la marque demandée, en l’occurrence le terme « manso » et la préposition « de », lui confèrent une singularité visuelle distincte de la perception visuelle de la marque antérieure. S’agissant de la comparaison phonétique, la marque antérieure consisterait en un seul mot composé de trois syllabes (« ve », « las », « co »), alors que la marque demandée contiendrait trois termes et serait composée de six syllabes, à savoir « man », « so », « de », « ve », « las », « co ». Les marques en conflit présenteraient, ainsi, des suites de syllabes clairement différentes.

19      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la requérante estime que le consommateur pertinent percevra les deux signes en conflit comme faisant allusion à des noms de famille espagnols. Contrairement à la conclusion de la chambre de recours, cette considération ne permettrait pas de conclure que les marques en cause sont identiques d’un point de vue conceptuel dans la mesure où le consommateur moyen espagnol de vins et d’autres boissons alcooliques serait en mesure de distinguer parfaitement l’une et l’autre de façon automatique, et ce sans réflexion préalable. En effet, le nom de famille Manso de Velasco serait perçu comme un nom de famille noble et rare tandis que le nom de famille Velasco serait, à l’inverse, perçu comme un nom de famille commun.

20      La requérante conclut donc que, compte tenu des différences existant entre les marques en conflit ainsi que du degré de similitude moyen, voire faible, entre les produits concernés, il ne peut exister un risque de confusion. Elle fait valoir, en outre, l’existence de deux précédents nationaux afin de démontrer qu’il n’existe pas de risque de confusion entre les marques en conflit, ces précédents étant notamment l’arrêt du Tribunal Supremo (Cour suprême espagnole) du 3 mai 2001 et une décision de l’Office des brevets et des marques espagnol.

21      L’OHMI rejette les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

22      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, une marque est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

23      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

24      Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

25      À cet égard, le législateur communautaire a précisé, au septième considérant du règlement n°40/94, que l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et, notamment, de la connaissance de la marque sur le marché, de l’association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, du degré de similitude entre les marques en conflit ainsi qu’entre les produits ou les services désignés.

 Sur le public pertinent

26      En l’espèce, la marque nationale antérieure est enregistrée et protégée en Espagne. Partant, afin d’établir l’existence éventuelle d’un risque de confusion entre les signes en conflit, il convient de tenir compte du point de vue du public pertinent espagnol.

27      En outre, les produits visés par les marques en conflit sont des produits de consommation courante. Par conséquent, à l’instar de ce qu’a considéré la chambre de recours, le public ciblé, par rapport auquel doit s’effectuer l’analyse du risque de confusion, est constitué par le consommateur moyen espagnol de vins et de boissons alcooliques, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

 Sur la similitude des produits concernés

28      Au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est bornée à conclure à la quasi-identité des produits visés par les marques en conflit. Elle n’a toutefois pas effectué une analyse détaillée en vue d’apprécier la similitude existant entre les produits visés par les deux marques en conflit.

29      Il convient de rappeler que, pour apprécier la similitude entre les produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre les produits concernés. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, point 23, et arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS), T‑388/00, Rec. p. II‑4301, point 51]. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBeBé), T‑164/03, Rec. p. II‑1401, point 53].

30      En outre, en vertu de la règle 2, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), tel que modifié, la classification des produits et des services résultant de l’arrangement de Nice est établie à des fins exclusivement administratives. Des produits ne peuvent, par conséquent, être considérés comme étant différents au seul motif qu’ils figurent dans des classes différentes.

31      Ainsi, les produits ou les services en cause ne doivent pas nécessairement relever de la même classe, voire d’une même catégorie au sein d’une classe donnée, pour pouvoir faire valablement l’objet d’une comparaison et donner lieu de conclure à l’existence ou à l’absence d’une similitude entre ces produits ou ces services [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 15 mars 2006, Eurodrive Services and Distribution/OHMI – Gómez Frías (euroMASTER), T‑31/04, non publié au Recueil, points 3 à 5, 31 et suivants, et du 13 juillet 2004, AVEX/OHMI – Ahlers (a), T‑115/02, Rec. p. II‑2907, points 24 à 27].

32      À la lumière de ce qui précède, force est de constater que, en l’espèce, contrairement à ce que la requérante semble faire valoir, ce ne sont pas uniquement les produits « vins » désignés par la marque nationale antérieure, mais également les produits relevant des catégories « vins de quinquina » et « vermouths » visés par cette dernière qui doivent être considérés comme étant identiques aux produits désignés par la marque demandée, dans la mesure où ces produits sont inclus dans la catégorie plus large des « boissons alcooliques (à l’exception des bières) » visée par la marque demandée.

33      S’agissant des produits qui appartiennent à la catégorie de boissons alcooliques autres que les « vins », « vins de quinquina » et « vermouths », tels que les vodkas, les whiskies, les genièvres, s’il est vrai, comme la requérante le fait valoir à juste titre, qu’ils ne sont pas identiques aux produits visés par la marque nationale antérieure, il n’en reste pas moins que ces produits présentent certaines caractéristiques communes avec lesdits produits désignés par la marque nationale antérieure. En effet, ainsi que l’OHMI l’a relevé à juste titre, leur nature est similaire, dans la mesure où ils présentent un certain degré d’alcool ; leur utilisation et leur mode de consommation sont similaires, puisqu’ils peuvent notamment être servis lors d’événements ; leur destination coïncide en ce qu’ils visent le public adulte, l’alcool étant normalement consommé par les personnes âgées de plus de 18 ans ; enfin, les canaux de distribution sont les mêmes, ces produits se trouvant dans les mêmes points de vente. Partant, il convient de conclure que les boissons alcooliques autres que les « vins », « vins de quinquina » et « vermouths » ont un certain degré de similitude avec les produits visés par la marque nationale antérieure.

34      Quant aux autres produits visés par la marque nationale antérieure, il y a lieu de constater que les « bières » sont expressément exclues de la demande de marque, que les « moûts » ne contiennent nécessairement pas d’alcool et que les « vinaigres » ne constituent pas des boissons. En tout état de cause, au vu de leur nature, de leur destination et de leur utilisation, il ne peut y avoir, tout au plus, qu’une faible similitude entre ces produits et les produits visés par la marque demandée. Enfin, pour ce qui concerne l’« œnologie », à savoir la science qui étudie les techniques d’élaboration et de conservation des vins, ainsi que la culture de la vigne et les aspects économiques et techniques de ces activités, il convient de considérer que, dans la mesure où elle peut faire l’objet de services, l’œnologie présente une complémentarité avec une partie des produits visés par la marque demandée, à savoir les vins, de sorte qu’il existe un certain degré de similitude entre ces produits et ces services. Elle n’est en revanche pas complémentaire, de manière évidente, des produits autres que les vins visés par la marque demandée.

35      Il résulte de ce qui précède que l’appréciation générale de la chambre de recours, selon laquelle les produits concernés sont quasi identiques, doit être nuancée comme suit : s’agissant des « vins », « vins de quinquina » et « vermouths », les produits visés par la marque demandée sont identiques aux produits visés par la marque nationale antérieure ; s’agissant des autres boissons alcooliques, les produits visés par la marque demandée présentent un certain degré de similitude avec les produits visés par la marque nationale antérieure ; s’agissant des « bières », des « moûts » et des « vinaigres », les produits visés par la marque demandée sont tout au plus faiblement semblables aux produits visés par la marque nationale antérieure ; enfin, quant à l’« œnologie », une partie des produits visés par la marque demandée, à savoir les vins, peuvent présenter un rapport de complémentarité avec celle-ci, tandis que les produits visés par la marque demandée, autres que les vins, n’ont, en revanche, aucune complémentarité évidente avec celle-ci.

36      Il convient par ailleurs de constater, s’agissant de l’argumentation présentée par la requérante consistant à alléguer que les domaines d’application des marques en cause ne coïncident pas à l’exception des vins, qui sont couverts par les deux marques en cause, que celle-ci n’a soutenu ni devant la chambre de recours ni devant le Tribunal que la marque demandée devrait au moins être admise partiellement pour les produits qu’elle estime non similaires.

 Sur la similitude des signes en conflit

37      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques par le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 34, et la jurisprudence citée).

38      En outre, ne peuvent être considérées comme étant similaires une marque complexe et une autre marque, identique ou présentant une similitude avec l’un des composants de la marque complexe, que lorsque celui‑ci constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque complexe. Tel est le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 33 ; du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, Rec. p. II‑1515, point 44 ].

39      Cependant, selon la jurisprudence de la Cour, dans le cadre de l’examen de l’existence d’un risque de confusion, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (ordonnance de la Cour du 28 avril 2004, Matratzen Concord/OHMI, C-3/03 P, Rec. p. I-3657, point 32 ; arrêts de la Cour du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, Rec. p. I‑8551, point 29 ; du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 41, et Nestlé/OHMI, point 37 supra, point 42).

40      En outre, selon cette jurisprudence, ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts OHMI/Shaker, point 39 supra, point 42 ; Nestlé/OHMI, point 37 supra, point 43, et ordonnance de la Cour du 24 septembre 2007, Torres/OHMI et Bodegas Muga, C‑405/06 P, non publiée au Recueil, point 32).

41      En ce qui concerne les similitudes visuelle et phonétique entre les marques en conflit, la chambre de recours a estimé que, en raison du fait que la marque nationale antérieure composée du seul élément verbal « velasco » était entièrement reproduite dans la marque demandée, constituée de l’expression « manso de velasco », les marques en cause présentaient un degré de similitudes visuelle et phonétique s’élevant à 50 %.

42      Quant à la comparaison conceptuelle, tout d’abord, elle a constaté que les parties s’accordaient sur le fait que le consommateur pertinent interprétera l’élément « velasco » commun aux deux marques comme étant un nom patronymique. Elle en a conclu que, en ce qui concerne cet élément, les deux marques étaient identiques d’un point de vue conceptuel. Ensuite, la chambre de recours, en partant de la considération selon laquelle des différences pouvaient exister selon la signification attribuée à l’élément « manso », a également analysé cet élément du point de vue conceptuel, en distinguant deux hypothèses.

43      Dans un premier cas, à savoir si le mot « manso » est interprété comme étant un autre nom patronymique, elle a considéré que le nom complet (Manso de Velasco) présentait une certaine similitude avec le nom Velasco et que cette similitude se répercutait dans les marques en conflit. Dans le second cas, à savoir si le mot « manso » est interprété comme étant un terme générique, elle a estimé que l’élément dominant de la marque demandée était constitué par le nom Velasco, ce qui impliquerait également une certaine similitude, puisque cet élément figure dans les deux marques. Au point 18 de la décision attaquée, elle a conclu que le degré de similitude entre les deux marques en cause pouvait raisonnablement être qualifié de moyen.

–       Sur la détermination de l’élément dominant de la marque demandée

44      Il convient d’analyser, tout d’abord, les arguments de la requérante tirés de ce que la décision attaquée est implicitement fondée sur la considération selon laquelle le terme « velasco » constitue l’élément dominant et distinctif de la marque demandée, alors que l’élément caractérisant la marque demandée est, au contraire, le terme « manso ».

45      À cet égard, s’agissant, en premier lieu, du terme « velasco », il convient de constater que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, il ne résulte pas de la décision attaquée que la chambre de recours aurait implicitement considéré que ce terme constituait l’élément dominant de la marque demandée. En effet, ainsi qu’il ressort du point 43 ci-dessus, la chambre de recours a expressément constaté ce fait dans l’hypothèse où le mot « manso » est apprécié dans son sens générique. Toutefois, ni dans cette hypothèse ni dans l’autre hypothèse envisagée par la chambre de recours, à savoir l’hypothèse où le terme « manso » a un sens patronymique, il ne peut être considéré, comme le prétend la requérante, que la chambre de recours a commis une erreur en ne constatant pas que le terme « velasco » aurait perdu une partie significative de son caractère distinctif, de sorte que le consommateur devrait lui accorder une importance moindre par rapport au terme « manso » dans la marque demandée.

46      En effet, quant à l’argument selon lequel le terme « velasco » serait doté d’un caractère distinctif diminué du fait que, tel qu’il ressort du nombre d’abonnés aux lignes téléphoniques à Barcelone et à Madrid, ce mot constitue un patronyme fortement répandu en Espagne, il y a lieu de rappeler qu’un patronyme répandu peut remplir la fonction d’origine de la marque et donc être distinctif pour les produits concernés lorsqu’il ne se heurte pas à un motif de refus d’enregistrement, tel que le caractère générique ou descriptif de la marque ou l’existence d’un droit antérieur (arrêt de la Cour du 16 septembre 2004, Nichols, C‑404/02, Rec. p. I‑8499, point 30).

47      L’existence du caractère distinctif d’une marque constituée par un nom patronymique, même répandu, doit être apprécié concrètement, selon les critères applicables à tout autre signe. Des critères d’appréciation généraux plus stricts, tirés, par exemple, d’un nombre préétabli de personnes portant le même nom, au‑delà duquel ce nom pourrait être considéré comme dépourvu de caractère distinctif, du nombre d’entreprises fournissant des produits ou des services du type de ceux en cause dans la demande d’enregistrement ou de l’utilisation répandue ou non de patronymes dans le secteur concerné, ne sauraient être appliqués à de telles marques (arrêt Nichols, point 46 supra, points 25 et 26). Par conséquent, en l’espèce, l’argument suivant lequel le mot « velasco » constitue un patronyme répandu à Barcelone et à Madrid est dépourvu de pertinence pour l’appréciation du caractère distinctif de ce terme.

48      Pour ce qui est de l’argument selon lequel le terme « velasco » aurait perdu une partie significative de son caractère distinctif, puisqu’il serait une dénomination qui est souvent utilisée dans le domaine des boissons alcooliques, force est de constater, à l’instar de l’OHMI, que la requérante est restée en défaut de l’étayer. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a constaté dans la décision attaquée, les sept marques invoquées par la requérante, comprenant le mot « velasco », ne reflètent que leur inscription au registre espagnol des marques, et non la situation sur le marché. En tout état de cause, sept marques ne sauraient constituer un nombre suffisamment représentatif pour conclure que le mot « velasco » est couramment usité par les entreprises actives dans le secteur du vin et des autres boissons alcooliques au vu du nombre très élevé d’entreprises actives en Espagne dans ledit secteur.

49      Par ailleurs, il ne peut être reproché à la chambre de recours de n’avoir pas invité la requérante à préciser si le nom de famille Velasco est communément utilisé pour désigner du vin en Espagne, car, ainsi que l’OHMI l’a fait observer à juste titre, aux termes de l’article 74, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Il incombe donc à celles-ci de présenter les moyens et les demandes qu’elles jugent nécessaires pour étayer leurs conclusions.

50      En revanche, pour ce qui est de la perception du terme « velasco » par le public pertinent, tel que défini aux points 26 et 27 ci-dessus, le Tribunal partage le constat de la chambre de recours selon lequel le mot « velasco » est doté d’un caractère distinctif pour le consommateur pertinent et peut remplir la fonction d’identification de l’origine commerciale des produits en cause. En effet, le fait qu’il existe une marque antérieure dont le seul élément est le mot « velasco » démontre à suffisance de droit que cette expression est de nature, en elle‑même, à identifier l’origine commerciale des produits concernés, contrairement à ce que la requérante tente de démontrer. Par ailleurs, comme il a été relevé ci-dessus, la requérante est restée en défaut de prouver que le terme « velasco » est couramment utilisé pour désigner les vins et d’autres boissons alcooliques.

51      S’agissant, en second lieu, de l’élément « manso », la requérante soutient que ledit terme constitue l’élément dominant et distinctif de la marque demandée. Cependant, le Tribunal estime que rien ne permet de considérer que le public pertinent ne tiendra pas systématiquement compte de l’élément « velasco » de la marque demandée au point de n’en mémoriser que le premier élément, à savoir le mot « manso ».

52      En effet, quant à l’argument de la requérante selon lequel le consommateur serait enclin à écourter la marque demandée de façon à garder davantage en mémoire le mot « manso » que le mot « velasco » en raison de la position initiale du premier mot dans ladite marque, il suffit de rappeler que, si, afin d’apprécier le caractère dominant d’un ou de plusieurs éléments d’une marque complexe, la position relative des différents composants dans la configuration d’une telle marque peut, de manière accessoire, être prise en compte, cette position relative ne confère pas nécessairement un caractère dominant à un élément d’une marque rendant négligeables, dans l’impression d’ensemble, les autres éléments composant cette marque (arrêt du Tribunal du 11 juillet 2006, Torres/OHMI – Bodegas Muga (Torre Muga), T‑247/03, non publié au Recueil Torre Muga, point 50).

53      Eu égard à ce qui précède et à la jurisprudence citée aux points 37 à 40 ci-dessus, il y a lieu de considérer, aux fins de la comparaison des signes en conflit, que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en ne relevant pas, d’une part, que le terme « velasco » aurait perdu une partie significative de son caractère distinctif pour indiquer l’origine commerciale du produit, de sorte que le consommateur lui accorderait une importance moindre par rapport au terme « manso » dans la marque demandée et, d’autre part, que l’élément dominant et distinctif de cette marque serait le terme « manso ».

–       Sur la comparaison visuelle

54      S’agissant de la comparaison visuelle, la chambre de recours a considéré que le degré de similitude entre les marques en conflit s’élevait à 50 %, en raison du fait que la marque nationale antérieure VELASCO était entièrement reproduite dans la marque demandée.

55      À cet égard, il y a lieu d’observer que, en l’espèce, les marques en conflit sont purement verbales, étant donné qu’elles ne comportent aucun élément figuratif. À l’instar de la chambre de recours, le Tribunal estime que, du point de vue visuel, les marques en conflit présentent à la fois des éléments de similitude et des différences. En effet, s’il est vrai que la marque demandée comporte un nombre distinct d’éléments, à savoir « manso », « de » et « velasco », et est plus longue que la marque nationale antérieure, force est de constater que l’élément « velasco » est identique dans les deux marques en conflit. Cet élément verbal est non seulement commun aux deux marques, mais constitue également le seul élément de la marque nationale antérieure et, dès lors, la marque nationale antérieure en tant que telle. Dès lors, il convient de considérer que les éléments « manso » et « de » compris dans la marque demandée ne confèrent pas nécessairement à celle-ci une singularité visuelle telle que, lors de la perception de la marque demandée, le consommateur ciblé aura une impression d’ensemble totalement différente de celle qu’il retiendra de la marque nationale antérieure.

56      Par conséquent, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans son analyse de la similitude visuelle des marques en conflit.

–       Sur la comparaison phonétique

57      S’agissant de la similitude phonétique, la chambre de recours a également considéré que le niveau de similitude entre les marques en conflit s’élevait à 50 %, du fait que la marque nationale antérieure était entièrement reproduite dans la marque demandée.

58      À cet égard, force est de constater que, sous l’angle phonétique, il existe également à la fois des éléments de similitude et des différences entre les marques en cause. En effet, s’il est vrai que la structure syllabique et le rythme sonore de la marque demandée diffèrent de ceux de la marque antérieure, l’élément « velasco », qui constitue le seul élément de la marque nationale antérieure, est identique dans les deux marques en conflit. En outre, ainsi que l’OHMI l’a fait observer à juste titre, le Tribunal relève que, d’un point de vue phonétique, dans l’élément commun « velasco », l’accent tonique porte sur la même syllabe, à savoir la syllabe « las ». Il convient également de rappeler que le fait que l’élément commun « velasco » ne se situe pas au début de la marque demandée n’est pas décisif, dans la mesure où, s’il est vrai que la partie initiale des marques verbales peut être susceptible de retenir l’attention du consommateur davantage que les parties suivantes de celles-ci, cette considération ne saurait valoir dans tous les cas [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 mai 2007, Trek Bicycle/OHMI – Audi (ALLTREK), T‑158/05, non publié au Recueil, point 70, et la jurisprudence citée].

59      À la lumière de ces considérations, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur quant à l’analyse de la similitude phonétique des marques en conflit.

–       Sur la comparaison conceptuelle

60      Il convient également de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans l’appréciation de la similitude conceptuelle des marques en conflit, telle qu’exposée aux points 42 et 43 ci-dessus.

61      En effet, s’agissant, en premier lieu, du terme « velasco », il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, qu’il est constant entre les parties que ce terme est perçu par le consommateur moyen espagnol en tant que nom de famille ou patronyme. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que les deux marques étaient conceptuellement identiques pour ce qui est de leur élément commun « velasco ».

62      S’agissant, en second lieu, du terme « manso », le Tribunal partage le constat de la chambre de recours selon lequel, quelle que soit la perception que le consommateur moyen espagnol de vins et d’autres boissons alcooliques aura de ce terme, ledit élément verbal, même s’il apporte une certaine nuance au sens du terme « velasco » compris dans la marque demandée par rapport au sens de la marque nationale antérieure, n’a toutefois pas une valeur sémantique de nature à rendre les marques en conflit suffisamment différentes sur un plan conceptuel. Tel est le cas dans les deux hypothèses considérées par la chambre de recours, et ce que le mot « manso » soit perçu par le public pertinent comme étant un terme générique ou qu’il soit perçu, tout comme le nom Velasco, comme étant un nom de famille ou un patronyme.

63      Or, s’agissant spécifiquement de la première hypothèse susmentionnée, il y a lieu de considérer, à l’instar de la chambre de recours et contrairement à ce que soutient la requérante, qu’il ne saurait être exclu que le public pertinent perçoive le mot « manso » comme étant un terme générique et non comme étant un patronyme. À cet égard, il convient de relever que, contrairement aux affirmations de la requérante à l’audience, le mot « manso » peut avoir dans la langue espagnole une signification liée à la propriété foncière, ainsi qu’il est indiqué dans le Diccionario de la lengua española de la Real Academia Española. Ladite signification de ce mot, dont l’étymologie se trouve dans le terme latin du Moyen Âge « mansus », désigne soit une propriété rustique, villa ou « masía », c’est‑à‑dire une maison de labour (casa de labor) composée d’une propriété rustique agricole et d’élevage, typique du territoire occupé anciennement par le royaume d’Aragon, soit des terrains, exemptés de toutes charges, appartenant généralement aux monastères ou aux paroisses.

64      Par ailleurs, sur le marché espagnol, il est fréquent de conférer aux vins et aux autres boissons alcooliques des dénominations composées d’un terme faisant allusion à un type de parcelle ainsi qu’à son propriétaire, qui indiquent, en général, la provenance du produit concerné (voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2005, Murúa Entrena/OHMI – Bodegas Murúa (Julián Murúa Entrena), T‑40/03, Rec. p. II‑2831, point 56). Il suffit de citer quelques exemples de vins tels que Vega Sicilia, Coto de Imaz, Lagar de Cervera, Terras Gaudas, Quinta de Couselo, Viña Pomal, Altos de Tamarón, Finca Sobreño, Señorío de Beade ou Dehesa La Granja. Dans ces exemples, les mots « vega », « coto », « lagar », « terras », « quinta », « viña », « altos », « finca », « señorío » ou « dehesa » évoquent un type de parcelle ainsi que son nom ou celui de son propriétaire.

65      Il est donc possible que, même s’il n’est pas cultivé et ainsi n’est pas précisément au courant de la signification spécifique du terme « manso », lequel relève davantage du registre soutenu de la langue espagnole, le consommateur moyen espagnol de vins attribuera audit terme dans la marque demandée la signification de « domaine » ou de « propriété », et percevra ainsi la marque demandée en tant que « domaine de (la famille) Velasco » ou « propriété de (la famille) Velasco ».

66      En conclusion, dans l’hypothèse où le terme « manso » est interprété comme étant un terme générique, indiquant un type de parcelle, et où l’expression constituant la marque demandée est, par conséquent, interprétée dans le sens de « propriété de (la famille) Velasco », le Tribunal partage le constat de la chambre de recours selon lequel le consommateur espagnol de vins et d’autres boissons alcooliques sera en mesure d’établir un lien conceptuel entre les deux marques en conflit. Partant, à la lumière de ces considérations, il convient de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur à cet égard.

67      Toutefois, même dans la seconde hypothèse considérée par la chambre de recours, à savoir, si le terme « manso » est perçu comme un patronyme et, par conséquent, si l’expression « manso de velasco » est perçue comme étant un nom de famille composé, noble, distingué et peu usité, il convient de constater, comme la chambre de recours, que le consommateur moyen espagnol de vins et d’autres boissons alcooliques restera en mesure d’établir un lien conceptuel entre les deux marques en conflit.

68      En effet, même si l’élément verbal « manso » ajoute une certaine nuance au terme « velasco » de la marque demandée par rapport à la marque nationale antérieure, notamment en en faisant un nom de famille plus aristocratique et insigne, il ne peut toutefois rendre les marques en conflit suffisamment différentes pour que l’impression de similitude conceptuelle puisse être exclue. Il convient dès lors de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant que le nom complet Manso De Velasco gardait une certaine similitude avec le nom Velasco, et que cette similitude se répercutait, en toute logique, dans les marques en conflit.

69      À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que les marques en conflit présentent globalement un niveau non négligeable de similitude d’un point de vue conceptuel, et ce indépendamment de la question de savoir si le mot « manso » de la marque demandée est perçu comme étant un patronyme ou non. En effet, la présence du terme « velasco » dans les deux marques en conflit, qui sera compris dans les deux cas comme étant un patronyme, est suffisante pour permettre au consommateur pertinent d’établir un lien conceptuel entre les deux marques en conflit. En revanche, l’ajout du mot « manso » n’altère pas la signification du mot « velasco » d’une manière telle qu’il crée, pour le public pertinent, une impression conceptuelle de la marque demandée différente de celle de la marque antérieure.

70      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en constatant, dans le cas d’espèce, une similitude conceptuelle entre les deux marques.

–       Sur l’appréciation globale du risque de confusion

71      Il convient de rappeler d’emblée que le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce. Cette appréciation globale tient compte, notamment, de la connaissance de la marque sur le marché ainsi que du degré de similitude des marques et des produits ou des services désignés. À cet égard, elle implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, de sorte qu’un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement (arrêts de la Cour Canon, point 29 supra, point 17, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I-3819, point 19 ; arrêt Torre Muga, point 52 supra, points 40 et 41).

72      Dans l’appréciation globale du risque de confusion entre les marques en conflit, la chambre de recours a estimé, au point 19 de la décision attaquée, que, en vertu du principe d’interdépendance entre les facteurs, la quasi-identité des produits concernés compenserait largement le niveau de similitude moins élevé entre les marques en conflit et qu’il existerait un risque de confusion entre lesdites marques. Bien que l’appréciation de la chambre de recours relative à la quasi-identité des produits visés doive être nuancée à la lumière des considérations figurant aux points 28 à 36 ci-dessus, le Tribunal partage la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe, en l’occurrence, un risque de confusion entre les marques en conflit.

73      En effet, les éléments de similitude concernant les produits désignés par les marques en cause ainsi que les éléments de similitude concernant celles-ci l’emportent sur leurs éléments de dissemblance, d’autant plus que la marque antérieure est entièrement incluse dans la marque demandée. Ainsi que la chambre de recours l’a relevé à juste titre dans la décision attaquée, il est concevable que, en raison de la présence du terme « velasco » dans les deux marques en conflit, le consommateur concerné perçoive l’adjonction du mot « manso » dans la marque demandée comme une façon de distinguer une gamme de vins provenant de l’entreprise titulaire de la marque antérieure ou, à tout le moins, d’une entreprise liée économiquement à celle‑ci [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 juillet 2005, Miles International/OHMI – Biker Miles (Biker Miles), T‑385/03, Rec. p. II‑2665, point 49, et la jurisprudence citée].

74      Cette appréciation ne saurait être infirmée par les autres arguments de la requérante fondés sur la coexistence des marques en conflit sur le marché espagnol.

75      À cet égard, il convient de rappeler que le régime communautaire des marques est un système autonome constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national, et qu’une décision provenant d’une instance nationale ne saurait lier ni les instances de l’OHMI ni le juge communautaire [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47 ; du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 47, et du 11 juillet 2007, Mülhens/OHMI – Minoronzoni (TOSCA BLU), T‑150/04, non encore publié au Recueil, point 40]. En outre, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base du règlement nº 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire.

76      Certes, il n’est pas entièrement exclu que, dans certains cas, la coexistence de marques antérieures sur le marché puisse éventuellement amoindrir le risque de confusion constaté par les instances de l’OHMI entre deux marques en conflit. Néanmoins, une telle éventualité ne saurait être prise en considération que si, à tout le moins au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’OHMI, le demandeur de la marque communautaire a dûment démontré que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre la marque antérieure dont il se prévaut et la marque antérieure sur laquelle est fondée l’opposition et sous réserve que les marques antérieures en cause et les marques en conflit soient identiques [arrêts du Tribunal du 11 mai 2005, Grupo Sada/OHMI – Sadia (GRUPO SADA), T‑31/03, Rec. p. II‑1667, point 86, et du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, Rec. p. II‑5309, point 72].

77      Toutefois, en l’espèce, au cours de la procédure administrative, la requérante n’a apporté aucun élément de preuve de la coexistence des marques en conflit sur le marché espagnol reposant sur l’absence d’un risque de confusion entre celles‑ci. En effet, d’une part, elle s’est limitée à produire un extrait de la base de données espagnole d’enregistrement des marques et, d’autre part, elle n’a produit ni dans le cadre de la procédure administrative, ni devant le Tribunal le jugement dont elle prétend qu’il aurait confirmé le rejet de l’opposition. Or, les informations fournies ne permettent aucunement de démontrer que le risque de confusion entre les marques en conflit est amoindri et, a fortiori, écarté. La requérante invoque aussi l’arrêt du Tribunal Supremo du 3 mai 2001, précité (voir point 20 ci-dessus). Toutefois, il convient de constater que les marques antérieures en cause dans cet arrêt ne sont pas identiques aux marques en conflit, de sorte que cet arrêt ne peut constituer une preuve à l’appui de l’argument de la requérante (arrêt CRISTAL Castellblanch, point 76 supra, point 73).

78      À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le moyen unique tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 et, par voie de conséquence, le présent recours.

 Sur les dépens

79      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui‑ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Miguel Torres, SA est condamnée aux dépens.

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 décembre 2008.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.