Language of document : ECLI:EU:T:2009:346

ARRÊT DU 23. 9. 2009 – AFFAIRE T-99/06

PHILDAR / OHMI – COMERCIAL JACINTO PARERA (FILDOR)

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

23 septembre 2009 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale FILDOR – Marque nationale semi‑figurative antérieure PHILDAR – Marque nationale verbale antérieure FILDOR – Marques internationales verbale et semi‑figurative antérieures PHILDAR – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), articles 62 et 73 du règlement (CE) n° 40/94 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), articles 64 et 75 du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑99/06,

Phildar SA, établie à Roubaix (France), représentée par Me E. Baud, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Commercial Jacinto Parera, SA, établie à Barcelone (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 16 janvier 2006 (affaire R 245/2004‑2), relative à une procédure d’opposition entre Phildar SA et Commercial Jacinto Parera, SA,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (septième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, D. Šváby (rapporteur) et E. Moavero Milanesi, juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 30 mars 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 13 juin 2006,

à la suite de l’audience du 15 janvier 2009,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 26 mai 1998, Comercial Jacinto Parera, SA, a présenté une demande de marque communautaire verbale FILDOR auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 22 à 26, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        « cordes, cordeaux, filets, tentes, bâches, voiles, sacs, matières de rembourrage (crin, capoc, plumes, algues marines), matières textiles fibreuses brutes, naturelles ou artificielles », relevant de la classe 22 ;

–        « fils et filés de toutes classes, en écheveaux, bobines, pelotes ou autres formes », relevant de la classe 23 ;

–        « tissus, bonneterie, dessus-de-lit et tapis de table, linge de maison », relevant de la classe 24 ;

–        « vêtements et chaussures », relevant de la classe 25 ;

–        « dentelles et broderies, rubans et cordons, boutons et boutons‑pression, crochets et oeillets, épingles et aiguilles, fleurs artificielles », relevant de la classe 26.

3        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires le 19 mars 1999.

4        Le 15 juin 1999, la requérante, Phildar SA, anciennement Les Fils de Louis Mulliez SA, a formé une opposition en vertu de l’article 42, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 41, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), à l’encontre de cette demande d’enregistrement, sur la base de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009] (procédure d’opposition B 165 235). L’opposition était fondée sur les droits antérieurs de la requérante suivants :

–        la marque verbale française n° 744927, FILDOR, enregistrée le 22 avril 1968 ;

–        la marque semi-figurative internationale n° 217674, enregistrée le 25 février 1979 avec effet en Allemagne, en Italie, en Autriche, au Portugal et dans les pays du Benelux, reproduite ci-après :

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–        la marque verbale internationale n° 311325, PHILDAR, enregistrée le 1er avril 1986 avec effet en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Autriche, au Portugal et dans les pays du Benelux ;

–        la marque semi-figurative française en couleurs n° 97660080, enregistrée le 22 janvier 1997, reproduite ci‑après :

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5        Les marques antérieures ont été enregistrées pour des produits relevant, respectivement, des classes :

–        22 à 26 et correspondant à la description suivante :

–        « cordes, cordeaux, filets, tentes, bâches, voiles, sacs; matières de rembourrage (crin, capoc, plumes, algues marines) », relevant de la classe 22 ;

–        « fils et filés à tricoter de toutes classes et toutes classes de fils en fibres naturelles, artificielles ou synthétiques, coton, laine, angora », relevant de la classe 23 ;

–        « tissus, bonneterie, dessus-de-lit et tapis de table, linge de maison », relevant de la classe 24 ;

–        « vêtements en général, bas, collants, chaussettes, vêtements tissés avec mailles et tricotés, sous-vêtements, corsets, cravates, bretelles, gants, bottes, chaussures et pantoufles », relevant de la classe 25 ;

–        « dentelles et broderies, rubans et cordons ; boutons et boutons‑pression, crochets et œillets, épingles et aiguilles, fleurs artificielles », relevant de la classe 26 ;

–        22 à 26 et correspondant notamment à la description suivante : « Cordes, ficelles, filets, tentes, bâches, voiles, sacs ; matières de rembourrage (crin, kapok, plumes, algues de mer, etc.) ; matières textiles fibreuses brutes ; laines à tricoter pures ou mélangées ; fils de mercerie ; tissus, couvertures de lit et de table, mouchoirs, lingerie de maison, tentures ; bas, chaussettes ; lingerie de corps, lingerie féminine en rayonne et nylon ; vêtements confectionnés, sous-vêtements et survêtements ; bottes, souliers, pantoufles ; dentelles et broderies, rubans et lacets ; boutons, boutons à pression, crochets et œillets, épingles et aiguilles ; fleurs artificielles » ;

–        23 à 26 et correspondant notamment à la description suivante : « Fils de laine ou de poil, fils de soie, fils de chanvre, lin, jute, rayonne, fibranne et autres fibres, fils de coton, mercerie ; tissus de laine ou de poil, tissus de soie, tissus de chanvre, lin, jute, rayonne, fibranne et autres fibres, tissus de coton, lingerie de ménage ; vêtements confectionnés en tous genres, lingerie de corps, bonneterie, ganterie, corsets ; broderies, passementerie, galons, boutons, dentelles, rubans, mercerie, aiguilles et épingles » ;

–        22 à 26 et correspondant notamment à la description suivante :

–        « cordes, ficelles, filets, tentes, bâches, sacs de conditionnement (enveloppes et petits sacs) d’emballage textile, sacs pour le transport et le stockage de matières en vrac, matières de rembourrage (à l’exception du caoutchouc ou du plastique), matières textiles fibreuses brutes, fibres textiles », relevant de la classe 22 ;

–        « fils et filés destinés à un usage textile, laines à tricoter (pures ou mélangées), fils de lin ou toutes espèces de fils composés de fibres naturelles, artificielles ou synthétiques, coton (fils de toutes espèces), laine, angora », relevant de la classe 23 ;

–        « tissus, dessus de lit et tapis de table, produits textiles non compris dans d’autres classes : draps, taies d’oreillers, couvertures de lit, linge de table, serviettes, mouchoirs, lingerie de maison, torchons, tissus non tissés, feutre, tissus tissés, tissus tricotés, tissus pour confection, tissus d’ameublement, tapisserie, tentures », relevant de la classe 24 ;

–        « prêt-à-porter, bonneterie et articles tricotés, sous-vêtements, linge de corps, pyjamas, robes de chambre, jupes, robes, pantalons, vestes, manteaux, chemises en tous genres, cravates, écharpes, gants, ceintures, chapeaux, vêtements imperméables, vêtements de sport, chaussures, chaussettes, bas, collants, bottes, chaussures et pantoufles, vêtements en tous genres pour hommes, dames et enfants », relevant de la classe 25 ;

–        « dentelles et broderies, rubans et cordons, crochets et œillets, épingles et aiguilles, fleurs artificielles », relevant de la classe 26.

6        La requérante a été invitée à prouver l’usage de ses droits antérieurs. Elle a fourni des documents à cet égard, y compris des catalogues de produits et des échantillons.

7        Par décision du 21 février 2001, la division d’opposition a tout d’abord constaté qu’il n’existait pas d’éléments prouvant l’usage des deux enregistrements internationaux de la requérante. S’agissant de la marque verbale française antérieure FILDOR, la division d’opposition a constaté l’usage de cette marque seulement pour les produits suivants : « Vêtements, en particulier vêtements en tricot, fibres naturelles (laine, coton) ou synthétiques ; boutons ; fils et filés à tricoter de toutes espèces et toutes espèces de fils en fibres naturelles, artificielles ou synthétiques, coton, laine, angora ». Considérant qu’il y avait une identité entre la marque demandée et la marque française antérieure FILDOR, elle a fait droit à l’opposition et a rejeté la demande de marque communautaire pour les produits suivants : « Fils et filés de toutes classes, en écheveaux, bobines, pelotes ou autres formes (classe 23) ; bonneterie (classe 24) ; vêtements, chaussures (classe 25) ; boutons et boutons-pression, crochets et œillets (classe 26) ». Ensuite, s’agissant des autres produits visés par la demande de la marque, la division d’opposition a rejeté l’opposition et a fait droit à la demande, en raison de l’absence de similitude entre ces produits et ceux protégés par la marque française antérieure FILDOR. Enfin, la division d’opposition a jugé inutile l’examen de l’opposition sur la base de l’enregistrement français du signe semi-figuratif PHILDAR, estimant que les produits, pour lesquels l’usage de cette marque avait été démontré, étaient identiques à ceux de l’enregistrement français antérieur FILDOR.

8        Les deux parties ont formé un recours contre cette décision de la division d’opposition. Il ressort du recours de la requérante que celle-ci n’a pas contesté la constatation de la division d’opposition concernant le non-usage de ses marques internationales.

9        Par décision du 9 octobre 2002, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’opposition en raison du fait que, d’une part, un usage suffisant de la marque antérieure française FILDOR n’avait pas été démontré et, d’autre part, la division d’opposition avait eu tort de ne pas tenir compte de l’enregistrement de la marque semi‑figurative française PHILDAR pour tous les produits protégés par celle-ci. En effet, selon la chambre de recours, cette dernière marque ne faisait pas objet d’une obligation d’usage au moment de la publication de la demande d’enregistrement de la marque communautaire FILDOR. Ainsi, elle a renvoyé l’affaire à la division d’opposition afin de comparer la demande de marque communautaire FILDOR avec la marque semi-figurative française antérieure PHILDAR. Il est constant que la requérante n’a pas contesté cette décision de la chambre de recours devant le Tribunal.

10      Par décision du 20 février 2004, tout d’abord, la division d’opposition a repris les constatations figurant dans sa décision précédente s’agissant de l’usage des marques antérieures de la requérante. Ensuite, elle a déclaré, en raison « des motifs d’économie de procédure », qu’elle ne prenait en considération que la marque semi-figurative antérieure française PHILDAR, celle-ci ne faisant pas objet d’une obligation d’usage. Enfin, considérant qu’il existait un risque de confusion entre les marques en cause, étant donné que tous les produits désignés par ces dernières étaient identiques et que les marques, bien que différentes sur le plan visuel, étaient très similaires sur le plan phonétique et similaires sur le plan conceptuel, elle a rejeté la demande de marque communautaire.

11      Le 2 avril 2004, Comercial Jacinto Parera a formé un recours contre cette décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 16 janvier 2006 (ci‑après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a annulé cette décision de la division d’opposition et a rejeté l’opposition dans son entièreté. Elle a, en substance, considéré, s’agissant des produits en cause, qu’il y a, pour certains, une identité et, pour d’autres, une similitude entre ceux désignés dans la demande de marque et ceux protégés par la marque antérieure semi‑figurative PHILDAR. S’agissant de la comparaison des signes, la chambre de recours a considéré que les marques en cause étaient différentes d’un point de vue visuel, mais qu’il existait une certaine similitude sur le plan phonétique. Selon elle, une comparaison conceptuelle ne peut être prise en compte en l’espèce. La chambre de recours a, ensuite, constaté que les produits relevant des classes 22 à 26, contre lesquels l’opposition était dirigée, étaient généralement vendus de façon à permettre un contrôle visuel des marques en conflit, et, en conséquence, elle a considéré que l’aspect visuel des marques prédominait sur toute similitude phonétique aux fins de l’appréciation du risque de confusion. Partant, la chambre de recours a conclu qu’il n’existait pas un tel risque entre les marques en cause dans l’esprit du public pertinent.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant l’OHMI pour qu’il statue sur l’opposition « fondée notamment sur la marque française antérieure FILDOR » ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer irrecevable le chef de conclusions concernant le renvoi de l’affaire devant lui ;

–        rejeter le recours pour le surplus ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions

15      L’OHMI demande que le deuxième chef de conclusions de la requérante soit déclaré irrecevable en ce qu’il vise à obtenir du Tribunal le prononcé d’une injonction de renvoyer l’affaire devant ses instances pour qu’il statue sur l’opposition.

16      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 63, paragraphe 6, du règlement n° 40/94 (devenu article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009), l’OHMI est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge communautaire. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser à l’OHMI une injonction. Il incombe en effet à l’OHMI de tirer les conséquences du dispositif et des motifs de l’arrêt qui sera rendu par le Tribunal [voir arrêt du Tribunal 19 novembre 2008, Rautaruukki/OHMI (RAUTARUUKKI), T‑269/06, non publié au Recueil, point 13, et la jurisprudence citée].

17      Il convient donc de rejeter comme irrecevable le deuxième chef de conclusions de la requérante.

  Sur la recevabilité des nouveaux éléments de preuve annexés à la requête

 Arguments des parties

18      L’OHMI fait valoir que les annexes 20 à 22 de la requête sont irrecevables. Il soutient qu’elles n’ont pas été présentées à la chambre de recours et ne peuvent, par conséquent, être prises en compte, conformément à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal.

19      La requérante ne s’est pas prononcée à ce sujet.

 Appréciation du Tribunal

20      À titre liminaire, il convient de relever que, dans les annexes 20 à 22 de sa requête, la requérante a joint plusieurs documents, d’une part, destinés à prouver que les produits portant la marque PHILDAR sont vendus par l’intermédiaire d’un réseau de magasins exclusifs offrant uniquement des produits de cette marque, ou, pour une partie mineure desdits produits, par l’intermédiaire de magasins multimarques, mais exclusivement dans des « espaces » signalés par le signe PHILDAR, et, d’autre part, destinés à prouver la notoriété de la marque semi-figurative française antérieure PHILDAR. Dans ces annexes, la requérante a joint une étude de l’image de ladite marque PHILDAR, un extrait d’un contrat de franchise standard « PHILDAR », ainsi qu’un extrait d’un document précontractuel d’information communiqué aux franchisés de la requérante. Il est constant que ces documents n’ont pas été produits dans le cadre de la procédure devant l’OHMI.

21      À cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de ces preuves est contraire à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours (voir arrêt RAUTARUUKKI, point 16 supra, point 20, et la jurisprudence citée).

22      Force est donc de constater que la requérante ne saurait invoquer, pour démontrer que les produits protégés par sa marque semi-figurative française antérieure PHILDAR font l’objet d’une distribution par le biais d’un réseau exclusif ou pour démontrer que cette marque est notoire, les éléments de preuve qu’elle a produits, pour la première fois, en annexes 20 à 22 de sa requête. En effet, des faits qui sont invoqués devant le Tribunal sans avoir été portés auparavant devant les instances de l’OHMI ne sauraient affecter la légalité d’une décision de la chambre de recours que si l’OHMI avait dû les prendre en considération d’office. Ainsi qu’il découle de l’article 74, paragraphe 1, in fine, du règlement n° 40/94 (devenu article 76, paragraphe 1, in fine), selon lequel, dans une procédure concernant les motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen de l’OHMI est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties, celui-ci n’est pas tenu de prendre en considération, d’office, des faits qui n’ont pas été avancés par les parties. Partant, de tels faits ne sont pas susceptibles de mettre en cause la légalité d’une décision de la chambre de recours [arrêt du Tribunal du 1er mars 2005, Sergio Rossi/OHMI – Sissi Rossi (SISSI ROSSI), T‑169/03, Rec. p. II‑685, point 25 ; voir également, en ce sens, arrêt RAUTARUUKKI, point 16 supra, points 21 et 22].

23      Les annexes 20 à 22 de la requête doivent donc être déclarées irrecevables, sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante.

 Sur le fond

24      À l’appui de son recours, la requérante soulève des moyens tirés, premièrement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, deuxièmement, de la violation de l’article 73 dudit règlement (devenu article 75 du règlement n° 207/2009), en ce que la chambre de recours ne lui a pas donné la possibilité de s’exprimer sur le mode d’achat des produits en cause, troisièmement, de la violation de l’article 62, paragraphe 1, dudit règlement (devenu article 64, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), en ce que la chambre de recours a rejeté l’opposition en s’appuyant uniquement sur la marque semi-figurative française antérieure PHILDAR, sans examiner notamment la marque verbale française antérieure FILDOR. À titre subsidiaire, elle demande au Tribunal de renvoyer l’affaire, pour cette raison, devant la chambre de recours.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

–       Arguments des parties

25      La requérante prétend, en substance, que la marque demandée FILDOR et la marque semi-figurative française antérieure PHILDAR sont très similaires sur les plans visuel et phonétique. Elle soutient, à cet égard, que la chambre de recours a omis de tenir compte de ce que l’élément verbal « phildar » est dominant dans cette dernière marque. Selon la requérante, l’élément figuratif de celle-ci est négligeable, car descriptif ou, du moins, peu distinctif au regard des produits en cause. En outre, la chambre de recours aurait omis de tenir compte du caractère distinctif inhérent à ladite marque semi-figurative française. La requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il n’existe pas un risque de confusion entre les marques en conflit.

26      La requérante prétend, à titre subsidiaire, que, même si le Tribunal jugeait que les marques en conflit n’étaient pas visuellement similaires, il devrait prendre en considération que les similitudes phonétiques entre celles-ci l’emportent sur leurs différences visuelles. Selon la requérante, la chambre de recours a fait une analyse erronée des modes d’achat des produits en cause. Elle soutient également que la décision attaquée est contraire à la procédure d’opposition B 99 681.

27      L’OHMI soutient que les marques en cause sont différentes sur le plan visuel, que, bien qu’elles présentent quelques similitudes sur le plan phonétique, leurs différences de prononciation sont clairement perceptibles et qu’il n’y a pas d’élément pour trouver ou exclure une similitude conceptuelle. Selon lui, c’est à juste titre que la chambre de recours a tenu compte des conditions « objectives » de commercialisation et qu’elle a conclu qu’une plus grande importance serait attachée à la perception visuelle des marques. L’OHMI soutient que, implicitement, la chambre de recours a tenu compte d’un caractère distinctif normal de la marque antérieure.

28      L’OHMI fait valoir que c’est à bon droit que la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion. En outre, la prétendue contradiction avec la décision rendue dans le cadre de la procédure d’opposition B 99 681 serait indifférente.

–       Appréciation du Tribunal

29      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

30      L’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit donc être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir arrêt de la Cour du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié au Recueil, point 33, et la jurisprudence citée).

31      Cette appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles‑ci, en tenant compte, en particulier, de leurs éléments distinctifs et dominants (voir arrêt T.I.M.E. ART/OHMI, point 30 supra, point 34, et la jurisprudence citée).

32      Elle implique, en outre, une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services couverts. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou services couverts peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement. Par conséquent, il convient d’interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion, dont l’appréciation, quant à elle, dépend notamment de la connaissance de la marque sur le marché et du degré de similitude entre la marque et le signe ainsi qu’entre les produits ou services désignés (voir arrêt T.I.M.E. ART/OHMI, point 30 supra, point 35, et la jurisprudence citée).

33      En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever que la requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours, faite au point 16 de la décision attaquée, selon laquelle il y a, entre les produits visés par la demande de marque FILDOR et ceux protégés par la marque semi-figurative antérieure PHILDAR, pour certains une identité et pour d’autres une similitude. La requérante ne conteste pas non plus que, eu égard aux produits en cause, le public pertinent est constitué du consommateur moyen, ayant un degré normal d’attention. Elle ne met pas non plus en doute l’appréciation, faite au point 17 de la décision attaquée, selon laquelle le territoire à prendre en compte pour la comparaison des signes en conflit est le territoire de la France, la marque semi-figurative antérieure PHILDAR étant une marque française.

34      En second lieu, s’agissant de la comparaison des marques en cause, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours considère qu’elles sont différentes du point de vue visuel, mais qu’il existe une certaine similitude sur le plan phonétique. En particulier, quant à la différence visuelle, elle résulte, selon la chambre de recours, du fait qu’il y a un élément graphique dans la marque antérieure PHILDAR, que le nombre de lettres est différent et que trois des lettres sont elles-mêmes différentes (« p » , « h » et « a »). Quant à la comparaison conceptuelle, la chambre de recours affirme qu’elle ne peut être prise en compte en l’espèce (points 19 à 23 de la décision attaquée). La chambre de recours a, par ailleurs, écarté comme non pertinente la référence à la procédure d’opposition B 99 681 (point 24 de la décision attaquée).

35      S’agissant de l’argument de la requérante tiré de la prétendue omission de la chambre de recours d’indiquer l’élément dominant de la marque semi-figurative française antérieure PHILDAR, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut être limitée à la seule prise en considération d’un composant d’une marque complexe et à sa comparaison avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants d’une marque complexe sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, points 41 et 42).

36      Par ailleurs, dans l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 35].

37      En l’espèce, tout d’abord, il y a lieu de constater que, comme cela ressort du dossier de l’OHMI, selon les informations publiées au Bulletin officiel de la propriété intellectuelle français pour la marque semi-figurative française antérieure PHILDAR, le « mot ‘phildar’ s’inscrit en blanc et l’image graphique (pelote de laine stylisée) en vert sur fond bleu marine ».

38      Ensuite, il convient de relever que la chambre de recours ne s’est pas prononcée sur l’élément dominant de la marque semi-figurative antérieure PHILDAR. Il ressort néanmoins de son appréciation de la similitude des signes, faite au point 19 de la décision attaquée, qu’elle n’a considéré comme négligeable ni l’élément figuratif ni l’élément verbal de cette marque antérieure, dans la mesure où elle se réfère à ces deux éléments pour constater que cette marque diffère, sur le plan visuel, de la marque demandée. Il peut en être déduit, en application de la jurisprudence citée au point 35 ci-dessus, que la chambre de recours n’a pas considéré qu’un des composants de ladite marque antérieure serait susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci.

39      La requérante allègue cependant qu’il convient de considérer que l’élément graphique de ladite marque antérieure, à savoir l’image d’une pelote de laine stylisée, est négligeable en raison du fait qu’il est descriptif ou, du moins, peu distinctif au regard des produits en cause.

40      Il convient de rappeler, à cet égard, que selon la jurisprudence l’évaluation du caractère distinctif d’un signe doit être faite en relation avec les produits sur lesquels l’opposition est fondée [arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 54].

41      Le Tribunal considère, d’abord, que l’élément graphique de la marque semi-figurative antérieure PHILDAR n’est pas dépourvu d’une certaine originalité. Ensuite, il convient de relever qu’il occupe une place équivalente à celle prise par l’élément verbal « phildar », à savoir la place centrale de la marque antérieure. Même à considérer que certains consommateurs verraient dans cet élément graphique une « pelote de laine », cela ne suffirait pas pour rendre cet élément descriptif des produits désignés par la marque semi-figurative antérieure, d’une part, dans la mesure où les catégories de produits visées par cette marque sont libellées de telle sorte qu’elles incluent également des produits dont le lien avec l’image de la « pelote de laine » n’est pas suffisamment étroit et, d’autre part, eu égard au fait que l’image de la pelote ressort nettement de l’ensemble, en raison du contraste de couleur par rapport au reste de la marque, de telle sorte qu’elle est, vraisemblablement, mémorisée par les consommateurs au même titre que le mot « phildar », et ce d’autant plus qu’il s’agit d’une forme stylisée relativement simple.

42      À cet égard, il convient d’ajouter que, selon la jurisprudence, le caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [arrêt du Tribunal du 16 mai 2007, Merant/OHMI – Focus Magazin Verlag (FOCUS), T‑491/04, non publié au Recueil, point 49]. Il s’ensuit, a fortiori, que le caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci doive être considéré comme négligeable.

43      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a tenu compte, dans son appréciation de la similitude des marques en cause, tant de l’élément verbal que de l’élément graphique de la marque semi‑figurative antérieure PHILDAR. En effet, dans le contexte du cas d’espèce, cet élément graphique constitue, comme le souligne l’OHMI, à l’évidence un élément supplémentaire de différenciation visuelle. Il convient de considérer qu’il garde une position distinctive autonome, sans pour autant constituer l’élément dominant de la marque antérieure.

44      Eu égard à la présence de cet élément graphique dans la marque antérieure, ainsi qu’aux différences constatées par la chambre de recours entre les mots « fildor » et « phildar », c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les marques en cause étaient différentes sur le plan visuel. Aucun argument de la requérante ne saurait remettre en cause une telle constatation.

45      S’agissant de la prétendue contradiction entre la décision attaquée et la procédure d’opposition B 99 681, il convient d’écarter cet argument de la requérante comme inopérant.

46      À cet égard, il convient de relever que, selon la requérante, il y a contradiction entre, d’une part, la prise en compte, par la chambre de recours, de l’élément figuratif de la marque antérieure PHILDAR et, d’autre part, la conclusion de la division d’opposition dans la procédure d’opposition B 99 681 et, plus particulièrement, son appréciation selon laquelle, dans une marque espagnole FILDOR combinée avec le dessin d’une « pelote de fil », ce dessin était « principalement descriptif » et ne possédait pas de caractère distinctif particulier.

47      Or, il y a lieu de rappeler que la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base du règlement n° 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI [arrêt du Tribunal du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 61].

48      En tout état de cause, force est de constater que la requérante n’a pas démontré l’existence de situations comparables à celle de la présente espèce.

49      En effet, les marques en conflit dans la procédure d’opposition B 99 681 se distinguaient de celles en cause dans la présente affaire dans la mesure où il ne s’agissait pas de la marque semi-figurative PHILDAR, mais d’une marque verbale PHILDAR. En outre, le dessin d’une « pelote de fil » avec lequel est combiné le mot « fildor » dans la marque espagnole faisant l’objet de la procédure d’opposition B 99 681, dessin auquel se réfère la requérante, est différent du dessin d’une « pelote de laine » de la marque semi-figurative PHILDAR dans la présente affaire.

50      Il ne saurait donc être conclu à une contradiction entre les deux décisions en cause, contrairement à ce que soutient la requérante.

51      S’agissant, ensuite, de la comparaison phonétique entre les marques en cause, la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, que les signes en conflit se prononcent « fildar » et « fildor », ne se différenciant que par les lettres « a » et « o » dans la seconde syllabe. Néanmoins, selon la chambre de recours, lorsque les signes sont prononcés dans leur ensemble par un francophone, il est possible de déceler ces différences dans la dernière syllabe des mots. Dès lors, en tenant compte de la prononciation identique de la première syllabe « fil » des deux signes et de la prononciation identique des première et dernière lettres de la seconde syllabe – « d » et « r » – dans les deux marques, la chambre de recours a conclu que les signes sont phonétiquement proches l’un de l’autre, mais que la différence phonétique perceptible entre les voyelles « a » et « o » limitera cette similitude phonétique.

52      Le Tribunal considère que cette appréciation de la chambre de recours est correcte et n’est pas invalidée par l’allégation de la requérante selon laquelle les marques sont très similaires sur le plan phonétique dans la mesure où les deux voyelles « a » et « o » sont des voyelles faibles, d’autant plus qu’elles sont entourées des mêmes consonnes et qu’elles passeront donc inaperçues et ne compenseront pas l’étroite similitude phonétique. En effet, d’une part, il y a lieu de considérer que c’est à juste titre que la chambre de recours a tenu compte de la prononciation par le public francophone, au regard duquel il ne peut être exclu que les différences en cause puissent être perçues. D’autre part, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la chambre de recours n’a pas conclu à une compensation des similitudes phonétiques par les différences de prononciation liées aux voyelles « a » et « o », mais a uniquement constaté que ces dernières limiteraient lesdites similitudes. Il n’en demeure pas moins que la chambre de recours a admis que les marques étaient, dans une certaine mesure, phonétiquement proches l’une de l’autre.

53      Par ailleurs, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle il y avait une contradiction par rapport à la procédure d’opposition B 99 681, dans laquelle il a été constaté que les marques PHILDAR et FILDOR étaient presque identiques sur le plan phonétique, il convient de relever que, contrairement à la présente affaire, dans le cadre de laquelle le territoire pertinent est la France et les consommateurs sont francophones, il s’agissait, dans ladite procédure d’opposition, de l’Espagne et de consommateurs hispanophones. Or, en France, la prononciation des suffixes des marques en cause est plus marquée qu’en Espagne et, dès lors, la similitude phonétique moins forte, les consommateurs percevant plus facilement la prononciation différente des lettres « a » et « o » dans les mots « phildar » et « fildor ».

54      S’agissant de la comparaison sur le plan conceptuel, il suffit de relever que la requérante n’a pas remis en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il n’y a pas d’éléments pour trouver ou pour exclure une similitude conceptuelle entre les signes (point 22 de la décision attaquée). L’OHMI a partagé, dans son mémoire en réponse, cette appréciation. Dans la mesure où il est revenu, à l’audience, sur cette position et a soutenu que les marques étaient différentes sur le plan conceptuel, il convient de constater qu’il s’agit d’un argument nouveau et donc irrecevable.

55      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu, au point 23 de la décision attaquée, que les signes en cause étaient différents d’un point de vue visuel, mais qu’il existait une certaine similitude sur le plan phonétique et qu’une comparaison conceptuelle ne pouvait être prise en compte en l’espèce.

56      La requérante a néanmoins remis en cause l’appréciation finale du risque de confusion entre les marques en conflit dans la mesure où la chambre de recours a tenu compte des circonstances dans lesquelles ces marques se présenteront généralement sur le marché.

57      À cet égard, la requérante soutient, à titre subsidiaire, que le Tribunal, même s’il jugeait que les marques en cause ne sont pas visuellement similaires, devrait prendre en considération que les similitudes phonétiques entre ces marques l’emportent sur leurs différences visuelles. Elle fait valoir dans ce contexte que, au moment de déterminer quel élément – visuel ou phonétique – était le plus important pour le public pertinent, la chambre de recours a fait une analyse erronée des modes d’achats de ces produits, puisque ces modes ne correspondent pas à la réalité. Cette analyse est, selon la requérante, également contraire au principe d’appréciation globale du risque de confusion, ainsi qu’à la fonction des marques.

58      Il importe de constater que la chambre de recours admet, au point 25 de la décision attaquée, que, dans l’appréciation globale des signes en cause, il est possible que la simple similitude phonétique entre les marques puisse créer un risque de confusion. Elle se réfère, à cet égard, à la jurisprudence constante de la Cour (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 28), et du Tribunal [arrêts du 15 janvier 2003, Mystery Drinks/OHMI – Karlsberg Brauerei (MYSTERY), T‑99/01, Rec. p. II‑43, point 42, et du 24 novembre 2005, GfK/OHMI – BUS (Online Bus), T‑135/04, Rec. p. II‑4865, point 79]. Cependant, la chambre de recours considère que, lors de l’appréciation de l’importance à accorder à la similitude phonétique entre les signes, il convient de prendre en compte les modes probables d’achat des produits contre lesquels l’opposition est dirigée.

59      Ainsi, la chambre de recours a entrepris, aux points 26 à 29 de la décision attaquée, une analyse très détaillée, produit par produit, pour apprécier les modes probables d’achat des produits relevant des classes 22 à 26 contre lesquels l’opposition était dirigée afin d’évaluer l’importance à accorder à la similitude phonétique entre les marques en cause.

60      S’agissant des produits en cause relevant de la classe 22 (voir point 2 ci‑dessus, premier tiret), la chambre de recours a considéré qu’il était improbable que la plupart des produits assez volumineux énumérés soient achetés sur une base purement orale. Ainsi, elle a affirmé, pour la plupart de ces produits, qu’ils étaient généralement achetés parmi un éventail de produits de marque présentés dans des salles d’exposition, des catalogues et des magasins dans lesquels une comparaison visuelle des produits était possible. Pour ces produits, les ventes ne s’effectueront, selon la chambre de recours, généralement pas au comptoir. S’agissant, en particulier, des « cordeaux » relevant de la classe 22, la chambre de recours a considéré que, bien qu’ils soient susceptibles d’être achetés au comptoir des quincailleries, le choix des marques est susceptible d’être moins important pour le public pertinent que les critères de quantité et de qualité. Dès lors, ce ne serait que lorsque les consommateurs de ces produits se verraient présenter au comptoir les différentes sortes de cordeaux répondant à leurs exigences de qualité et de quantité qu’ils seraient en mesure de comparer visuellement les marques identifiant les fabricants des différents produits. En conséquence, l’élément visuel de la marque demandée revêtira, selon la chambre de recours, une importance primordiale pour les consommateurs des produits précités (point 26 de la décision attaquée).

61      En ce qui concerne tous les produits relevant de la classe 23 mentionnés dans la demande de marque (voir point 2 ci-dessus, deuxième tiret), la chambre de recours a considéré qu’ils étaient tous parfois vendus au comptoir dans les petites ou moyennes merceries, voire dans les rayons de mercerie de magasins plus grands. Toutefois, selon la chambre de recours, les consommateurs se concentreront essentiellement sur la couleur, le choix de la quantité et de la qualité des divers fils et filés et souhaiteront généralement examiner plusieurs échantillons avant d’effectuer leur achat. L’élément phonétique d’une marque revêt dès lors, en ce qui concerne ces produits, selon la chambre de recours, une importance très limitée (point 27 de la décision attaquée).

62      S’agissant des produits relevant de la classe 26 mentionnés dans la demande de marque (voir point 2 ci-dessus, dernier tiret), la chambre de recours a affirmé que les mêmes appréciations s’appliquaient mutatis mutandis. En particulier, en ce qui concerne les « fleurs artificielles » relevant de cette classe, la chambre de recours a constaté qu’elles seraient généralement exposées ou figureraient dans des catalogues et ne seraient pas achetées de manière purement orale. En tout état de cause, selon la chambre de recours, la marque apposée sur ces produits est susceptible de revêtir peu d’importance pour les consommateurs qui seront influencés par l’apparence extérieure des produits (point 28 de la décision attaquée).

63      Enfin, s’agissant des produits visés par la demande de marque relevant des classes 24 et 25 (voir point 2 ci-dessus, troisième et quatrième tirets), la chambre de recours a constaté qu’il s’agissait des articles pour lesquels les consommateurs auraient tendance à se concentrer sur les produits eux‑mêmes et examineraient généralement le produit et la marque d’assez près avant d’effectuer leur achat (point 29 de la décision attaquée).

64      Considérant ce qui précède, la chambre de recours a conclu que l’aspect visuel des marques prédominait sur toute similitude phonétique aux fins de l’appréciation du risque de confusion (point 30 de la décision attaquée). Dès lors, selon la chambre de recours, bien qu’il existe, pour certains des produits en cause, une identité et, pour d’autres, une similitude, ainsi qu’une similitude phonétique entre les marques en question, la différence visuelle l’emporte sur ces éléments. En conséquence, la chambre de recours a conclu qu’il n’existait pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent entre les marques en cause (point 30 de la décision attaquée).

65      La requérante conteste l’exactitude de l’appréciation de la chambre de recours des conditions de commercialisation des produits en cause en faisant valoir, en outre, que la réalité des conditions de cette commercialisation aurait pu être aisément démontrée et expliquée à la chambre de recours, si cette question avait été discutée devant elle. La requérante souligne à cet égard que la chambre de recours ne s’appuie sur aucun élément de preuve pour parvenir à sa conclusion concernant les méthodes de vente des produits en cause.

66      Contrairement à ce qu’affirme la chambre de recours, la requérante prétend qu’elle ne vend pas ses produits dans des salles d’exposition, des quincailleries ou des merceries. Elle précise à cet égard qu’elle est, depuis 1986, membre et administrateur de la Fédération française de la franchise et qu’elle a mis en place depuis 1965 un véritable réseau de magasins vendant uniquement des produits de la marque PHILDAR. Ce réseau serait constitué principalement de franchisés (529 en France) utilisant l’enseigne PHILDAR ainsi que de ses succursales (66 en France). Enfin, la requérante soutient que, pour une partie mineure de ses opérations en France, elle vend ses produits par l’intermédiaire de magasins multimarques, mais exclusivement dans des « espaces » signalés par le signe PHILDAR. Dès lors, selon elle, le consommateur ne sera jamais dans une situation lui permettant de comparer visuellement les marques identifiant les fabricants des différents produits en cause, contrairement à ce qu’affirme la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée.

67      L’OHMI, qui soutient la position de la chambre de recours, affirme, en substance, que l’argument de la requérante selon lequel les produits vendus sous la marque antérieure sont commercialisés par des circuits de distribution exclusifs, ce qui exclut que les consommateurs puissent voir un produit portant la marque FILDOR à côté d’un produit portant la marque PHILDAR et comparer ces marques visuellement, n’est pas convaincant. Il fait valoir que, même s’il ne peut être exclu que les produits en cause puissent parfois être vendus à la suite d’une commande orale, ces circonstances sont relativement marginales et ne correspondent pas aux circonstances « habituelles » dans lesquelles les produits désignés par les marques sont commercialisés.

68      Le Tribunal rappelle, à cet égard, que, selon la jurisprudence, seule la prise en compte des conditions « objectives » de commercialisation des produits désignés par les marques en conflit se justifie, en particulier dans la perspective de déterminer le poids respectif à accorder aux aspects visuel, phonétique et conceptuel des marques en conflit [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 janvier 2006, Devinlec/OHMI – TIME ART (QUANTUM), T‑147/03, Rec. p. II‑11, points 104 et 105]. Dès lors, les modalités de commercialisation « particulières » des produits désignés ne sont pas pertinentes dans l’analyse du risque de confusion.

69      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel, en substance, les produits vendus sous sa marque antérieure sont commercialisés par des circuits de distribution exclusifs, ce qui exclut que les consommateurs puissent voir un produit portant la marque FILDOR à coté d’un produit portant la marque PHILDAR et comparer ces marques visuellement, il y a lieu, à titre liminaire, de constater que cet argument ne s’écarte pas du cadre du litige dont la chambre de recours était saisie bien qu’il contienne, aux fins de contester l’exactitude des affirmations de la chambre de recours relatives aux modes de vente des produits en cause, des explications factuelles entièrement nouvelles.

70      Ensuite, dans la mesure où, comme cela ressort des points 25 à 30 de la décision attaquée, l’appréciation, par la chambre de recours, du risque de confusion entre les marques en cause est intimement liée à la question de savoir quels sont les modes probables d’achat des produits en cause et, plus particulièrement, quelle est l’importance de l’élément phonétique lors de l’achat, il ne saurait être exclu que la conclusion de la chambre de recours faite au point 30 de la décision attaquée, selon laquelle l’aspect visuel prédomine lors de l’achat de ces produits, puisse avoir une influence déterminante sur la constatation du risque de confusion.

71      Quant à la question de savoir quels sont les modes probables de commercialisation des produits couverts par la marque antérieure, en premier lieu, il convient de considérer, comme le soutient à juste titre l’OHMI, que l’argumentation de la requérante relative à la commercialisation exclusive de ses produits par l’intermédiaire d’un réseau à part (voir point 66 ci-dessus) relève de modes particuliers de commercialisation, qui, au sens de la jurisprudence citée au point 68 ci‑dessus, ne sont pas pertinents dans l’analyse du risque de confusion.

72      En effet, les modalités de commercialisation particulières des produits désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques qui poursuit un but d’intérêt général, à savoir celui que le public pertinent ne puisse courir le risque d’être induit en erreur à propos de l’origine commerciale des produits en cause, ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques (arrêt QUANTUM, point 68 supra, point 104).

73      Ainsi, en l’espèce, même s’il avait été démontré que les produits protégés par la marque antérieure n’avaient été vendus que par l’intermédiaire d’un réseau exclusif de vente, et ce durant une longue période, cela ne saurait avoir pour conséquence de conférer audit réseau les caractéristiques d’un mode normal de commercialisation des produits en cause. En effet, les conditions « objectives » de commercialisation auxquelles se réfère l’arrêt QUANTUM, point 68 supra, sont les modalités de commercialisation « normales » des produits désignés par les marques en conflit, c’est‑à‑dire celles auxquelles il est normal de s’attendre pour la catégorie des produits désignés par lesdites marques. Partant, il est indifférent que les produits en cause de la requérante soient vendus dans le cadre d’un réseau exclusif, pour autant qu’il n’est pas démontré qu’il est normal de s’attendre également pour les catégories des produits en question fabriqués par ses concurrents à ce qu’ils soient vendus, en règle générale, dans de telles conditions d’exclusivité.

74      À cet égard, le Tribunal ne saurait souscrire à la thèse de la requérante, présentée à l’audience, selon laquelle, dans le cas où le détenteur de la marque décide, pour des raisons stratégiques, de ne vendre ses produits que par l’intermédiaire d’un réseau de franchisés, il n’y a pas d’autre mode habituel « objectif » d’achat des produits en cause. En effet, cette prétention méconnaît le fait que les produits visés par la marque antérieure sont des produits courants, qui relèvent, par leur nature, des conditions objectives de commercialisation.

75      En second lieu, il convient donc d’examiner, en faisant abstraction de toute particularité de commercialisation avancée par la requérante, l’argument selon lequel les consommateurs ne verraient pas les produits de la marque FILDOR à côté des produits de la marque PHILDAR et ne pourraient donc comparer ces marques visuellement.

76      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire (arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 58 supra, point 26, et arrêt MYSTERY, point 58 supra, point 32).

77      Il convient de considérer que cette circonstance peut influer sur l’importance à donner aux éléments de similitude ou de différence des signes, et, partant, sur l’appréciation finale du risque de confusion. Or, en l’espèce, force est de constater que la chambre de recours n’a pas tenu compte, dans l’appréciation dudit risque, de cette circonstance. Au contraire, elle a fondé son appréciation aux points 26 à 29 de la décision attaquée sur l’idée que la comparaison visuelle directe des produits en cause constituera la règle, ou même que les consommateurs examineront certains de ces produits et leurs marques de manière assez détaillée (point 29 de la décision attaquée).

78      En effet, premièrement, pour les produits relevant de la classe 22, elle a affirmé qu’un tel examen visuel comparatif des produits sous marque serait possible notamment dans des salles d’exposition, sur la base de catalogues ou dans les magasins en général, voire, pour les « cordeaux », au comptoir des quincailleries (voir point 60 ci-dessus). Deuxièmement, pour les produits relevant de la classe 23, la chambre de recours a souligné que, bien qu’il s’agisse de produits parfois vendus au comptoir de merceries ou dans les rayons de mercerie de magasins plus grands, les consommateurs souhaiteront généralement examiner plusieurs échantillons de ces produits avant d’effectuer leur achat (voir point 61 ci-dessus). Troisièmement, les mêmes considérations s’appliquent, selon la chambre de recours, aux produits relevant de la classe 26. En particulier, s’agissant des « fleurs artificielles » relevant de cette classe, elles seraient exposées ou figureraient dans des catalogues, leurs marques revêtant, selon la chambre de recours, peu d’importance pour les consommateurs qui seraient influencés par l’apparence extérieure des produits (voir point 62 ci-dessus). Quatrièmement, en ce qui concerne les produits relevant des classes 24 et 25, la chambre de recours a constaté que les consommateurs examineraient d’assez près tant ces produits que leur marque avant d’effectuer leur achat (voir point 63 ci-dessus).

79      Le Tribunal considère que la chambre de recours a commis une erreur dans les appréciations susvisées, et ce indépendamment du fait que la requérante commercialise ses produits de manière spécifique par des canaux de distribution exclusifs. En effet, s’il est, certes, envisageable, comme l’affirme la chambre de recours, que lors d’un premier achat des produits en cause un consommateur peut procéder à l’examen comparatif des différentes sortes de produits ou, pour certains, de leurs échantillons, il ne peut en être conclu que le consommateur, lors d’achats ultérieurs, réitérera son examen comparatif étant donné qu’il est susceptible de faire son choix en fonction de son expérience positive ou négative à l’issue d’un premier achat. C’est précisément dans cette dernière situation que la marque joue sa fonction essentielle, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 mars 2008, Compagnie générale de diététique/OHMI (GARUM), T‑341/06, non publié au Recueil, point 29].

80      Or, dans la mesure où le consommateur ne se trouvera pas, dans ce dernier cadre, en principe, en situation de comparaison directe entre les marques, mais devra se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire, au sens de la jurisprudence citée au point 76 ci-dessus, il ne saurait être conclu, en l’espèce, comme l’a fait la chambre de recours au point 30 de la décision attaquée, que l’aspect visuel prédomine sur toute similitude phonétique aux fins de l’appréciation du risque de confusion, de sorte que les différences visuelles l’emportent sur les similitudes phonétiques nonobstant l’identité ou la similitude des produits en cause.

81      En effet, le Tribunal considère que, même en admettant que certains produits désignés par les marques en cause soient normalement vendus dans des salles d’exposition ou dans des magasins où le consommateur choisit lui-même les produits et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ces produits, c’est-à-dire qu’il les achète dans des conditions où, comme cela ressort de la jurisprudence, l’aspect visuel des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, Rec. p. II‑3471, point 49], il n’en demeure pas moins que l’aspect phonétique reste en l’espèce également pertinent dans l’appréciation du risque de confusion, et la similitude sur ce plan ne peut être simplement négligée.

82      À cet égard, d’une part, il y a lieu de considérer que l’importance de certaines différences visuelles peut être amoindrie par le fait que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques en conflit et doit se fier à l’image imparfaite qu’il en a gardée en mémoire. D’autre part, le consommateur peut être amené, comme le soutient la requérante, à choisir des produits des catégories en question par exemple à la suite d’une publicité à la télévision ou parce qu’il en a entendu parler, auxquels cas il se peut qu’il mémorise, outre l’aspect visuel, également l’impression phonétique de la marque en cause. Or, il a déjà été constaté que la seule similitude phonétique peut, dans certains cas, mener à un risque de confusion (voir point 58 ci-dessus). En effet, il ne peut être exclu que le consommateur puisse se laisser guider dans son choix par l’impression phonétique imparfaite qu’il a gardée de la marque antérieure, qui peut, notamment, lui rappeler quelque chose de commun avec un « fil ». L’importance de l’aspect phonétique n’est que soulignée pour certains des produits concernés tels les « cordeaux » relevant de la classe 22, les différents produits relevant de la classe 23, ainsi que ceux relevant de la classe 26, au regard desquels la chambre de recours a admis qu’ils sont vendus, en principe, au comptoir, c’est‑à‑dire oralement (points 26 à 28 de la décision attaquée).

83      En outre, s’agissant des « fleurs artificielles » relevant de la classe 26, il y a lieu de constater que l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la marque apposée sur ces produits est susceptible de ne revêtir que « peu d’importance » n’a pas de fondement et, comme le soutient la requérante, elle est contraire à la fonction des marques. En effet, accepter que le consommateur prend sa décision d’achat uniquement au vu des produits et de leur apparence extérieure sans prêter attention à la marque qui les désigne reviendrait à nier toute utilité aux marques [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 17 avril 2008, Dainichiseika Colour & Chemicals Mfg./OHMI – Pelikan (Représentation d’un pélican), T‑389/03, non publié au Recueil, point 100]. D’ailleurs, il convient de constater que même la catégorie « fleurs artificielles » peut couvrir des produits relativement sophistiqués au regard desquels la marque constitue un signe important de qualité dont le consommateur n’omet pas de tenir compte et de se rappeler. Partant, il convient de considérer que même pour ces produits l’aspect phonétique est plus présent que dans l’hypothèse avancée par la chambre de recours dans laquelle le consommateur n’en restait qu’à un examen comparatif de leur apparence.

84      S’agissant, ensuite, de l’appréciation de la chambre de recours visant les produits relevant des classes 24 et 25, c’est-à-dire essentiellement les « tissus, vêtements et chaussures », selon laquelle les consommateurs examineront d’assez près tant ces produits que leur marque avant d’effectuer leur achat, premièrement, il convient de considérer, en ce qui concerne le secteur de l’habillement, que celui-ci comprend des produits de qualité et de prix très différents. S’il est possible que le consommateur soit plus attentif au choix d’une marque lorsqu’il achète un vêtement particulièrement coûteux, une telle attitude du consommateur ne saurait être présupposée, sans aucune preuve, à l’égard de l’ensemble des produits du secteur en cause (voir, en ce sens, arrêt NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection, point 81 supra, point 43). Deuxièmement, ces considérations s’appliquent, mutatis mutandis, aux « chaussures » et aux « tissus ». Il s’ensuit que l’appréciation susvisée de la chambre de recours doit être considérée comme erronée et, ainsi que l’affirme à juste titre la requérante, il ne peut en être déduit que l’aspect phonétique des marques en cause serait ignoré lors de l’achat desdits produits.

85      Il résulte de tout ce qui précède que, dans les circonstances de l’espèce, la seule différence visuelle ne suffit pas pour écarter le risque que le public puisse croire que les produits en cause sont offerts par la même entreprise ou, le cas échéant, par des entreprises liées économiquement.

86      Eu égard à cette conclusion, il n’y a pas lieu d’examiner l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a omis de prendre en considération le degré de caractère distinctif de la marque antérieure (point 25 ci-dessus).

87      Il résulte de tout ce qui précède que le premier moyen doit être accueilli et, par conséquent, la décision attaquée doit être annulée.

88      Le Tribunal juge cependant opportun d’analyser également le deuxième moyen de la requérante.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 73 du règlement n° 40/94

–       Arguments des parties

89      La requérante fait valoir, en substance, qu’elle n’a pas eu la possibilité de présenter son point de vue sur l’appréciation des modes d’acquisition des produits concernés. En effet, selon elle, la chambre de recours s’est appuyée, dans le cadre de l’analyse de ces modes d’acquisition, sur des faits qui n’ont été abordés par aucune des parties pendant la procédure d’opposition, ni dans les différentes décisions qui ont précédé la décision attaquée. Le fait qu’elle n’ait pas pu présenter son point de vue sur ces éléments serait d’autant plus préjudiciable que, selon elle, la chambre de recours a utilisé sa nouvelle argumentation « originale et soustraite à toute contestation » pour renverser la décision précédente de la division d’opposition. Partant, la chambre de recours aurait violé l’article 73 du règlement n° 40/94.

90      L’OHMI soutient, en substance, que la chambre de recours n’était pas tenue d’inviter les parties à présenter leurs observations sur les circonstances dans lesquelles les produits sont vendus et sur leur impact sur la perception des signes par le public.

–       Appréciation du Tribunal

91      Il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que, selon l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94 (devenu article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009), les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des marques communautaires, le principe général de protection des droits de la défense. En vertu de ce principe général du droit communautaire, les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit à être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel mais non à la position finale que l’administration entend adopter [voir arrêt du Tribunal du 24 septembre 2008, Anvil Knitwear/OHMI – Aprile e Aprile (Aprile), T‑179/07, non publié au Recueil, point 23, et la jurisprudence citée].

92      En l’espèce, le Tribunal considère que la décision attaquée contient non seulement la position finale de la chambre de recours sur les circonstances dans lesquelles les produits sont vendus et sur leur impact sur la perception des signes par le public, mais aussi des éléments de fait qui ont, dans les circonstances du cas d’espèce, constitué le fondement de la décision attaquée.

93      En effet, il est vrai que l’appréciation de la chambre de recours, aux points 26 à 29 de la décision attaquée, selon laquelle les produits sont normalement vendus de façon à permettre un contrôle visuel des marques ainsi que sa conclusion, au point 30 de la décision attaquée, selon laquelle il convient de donner plus d’importance relative à la comparaison visuelle des signes qu’à leur comparaison phonétique, ce qui conduisait en l’espèce à écarter tout risque de confusion, doivent être considérées, ainsi que le fait valoir l’OHMI, comme la position finale de la chambre de recours, qui ne relève pas, selon la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus, du champ d’application de l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94. Néanmoins, les affirmations de la chambre de recours, aux mêmes points de la décision attaquée, selon lesquelles, en substance, les produits en cause sont vendus dans des salles d’exposition, des quincailleries ou des merceries, affirmations sur lesquelles s’est appuyée la chambre de recours dans sa position finale, sont des éléments de fait auxquels cet article trouve à s’appliquer.

94      À cet égard, tout d’abord, il convient de relever que, selon la jurisprudence, la chambre de recours peut prendre en considération, outre les faits avancés explicitement par les parties à la procédure d’opposition, des faits notoires, c’est-à-dire des faits qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou qui peuvent être connus par des sources généralement accessibles [arrêt du Tribunal du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, Rec. p. II‑1739, points 29 et suivants], ou des faits concernant les modes habituels de commercialisation des produits assimilables à des faits notoires [voir, par analogie, arrêt du Tribunal 10 septembre 2008, Astex Therapeutics/OHMI – Protec Health International (astex TECHNOLOGY), T‑48/06, non publié au Recueil, point 43].

95      Ensuite, il y a lieu de rappeler que l’existence d’un concept de commercialisation est un facteur extrinsèque au droit conféré par la marque communautaire [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (TELE AID), T‑355/00, Rec. p. II‑1939, point 42, et DaimlerChrysler/OHMI (CARCARD), T‑356/00, Rec. p. II‑1963, point 46]. En outre, un concept de commercialisation, ne dépendant que du choix de l’entreprise concernée, est susceptible de changer postérieurement à l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire et ne saurait donc avoir une incidence quelconque sur l’appréciation du risque de confusion dans le cadre d’une procédure d’opposition. Dès lors, l’examen d’un tel concept particulier ne s’impose pas d’office à la chambre de recours qui n’est pas non plus tenue de demander aux parties de s’exprimer à cet égard.

96      Enfin, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, afin d’apprécier le degré de similitude existant entre deux ou plusieurs marques en conflit, il y a lieu de déterminer leurs degrés de similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle et, le cas échéant, d’évaluer l’importance qu’il convient d’attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (arrêts de la Cour du 12 janvier 2006, Ruiz‑Picasso e.a./OHMI, C‑361/04 P, Rec. p. I‑643, point 37, et OHMI/Shaker, point 35 supra, point 36).

97      Il s’ensuit que, dans la mesure où le risque de confusion doit être apprécié notamment au regard des conditions dans lesquelles les produits relevant des catégories en cause sont commercialisés, lesquelles déterminent en partie l’importance respective des aspects visuel, phonétique ou conceptuel des marques en conflit, il appartenait à la requérante, si telle était son intention, de soulever les arguments factuels et de fournir les éléments de preuve concernant la manière « objective » de commercialiser les produits en cause, et ce lors de la procédure devant la chambre de recours ou devant la division d’opposition. Il ne saurait être conclu que, la requérante n’ayant pas saisi la possibilité de s’exprimer sur lesdits modes de commercialisation, elle n’était pas en mesure de faire connaître utilement son point de vue à cet égard.

98      Il ne saurait donc être considéré, dans ces circonstances, que la chambre de recours a violé l’article 73 du règlement n° 40/94, et ce d’autant plus que les produits en cause sont relativement courants, c’est-à-dire que la chambre de recours pouvait, à leur égard, prendre en considération certains faits qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou qui peuvent être connus par des sources généralement accessibles au sens de la jurisprudence citée au point 94 ci-dessus, notamment en l’absence d’autres informations de la part des parties à la procédure administrative.

99      Il importe encore de préciser que, conformément à la jurisprudence, la prise en compte, par les instances de l’OHMI, des conditions « objectives » de commercialisation des produits désignés par les marques en conflit se justifie pleinement, en particulier dans la perspective de déterminer le poids respectif à accorder aux aspects visuel, phonétique et conceptuel des marques en conflit (arrêt T.I.M.E. ART/OHMI, point 30 supra, point 59, et arrêt QUANTUM, point 68 supra, points 104 et 105).

100    En l’espèce, il est constant que ce n’est que dans ce dernier contexte que la chambre de recours a pris en considération les modes probables d’achat des produits en cause et, plus particulièrement, la circonstance qu’ils seront achetés oralement et en a tiré des appréciations juridiques relatives à l’importance à accorder à la similitude phonétique entre les signes.

101    Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que la décision attaquée ne viole pas l’article 73 du règlement n° 40/94 en ce qu’elle méconnaîtrait le droit de la requérante à être entendue, dans la mesure où cette dernière avait la possibilité de présenter, notamment devant la chambre de recours, son point de vue sur les modes probables d’achat des produits désignés par les marques en conflit.

102    Partant, le deuxième moyen de la requérante doit être rejeté.

103    Eu égard à la conclusion figurant au point 87 ci-dessus, selon laquelle le premier moyen doit être accueilli et, par conséquent, la décision attaquée doit être annulée, il n’y a pas lieu d’examiner les troisième et quatrième moyens invoqués par la requérante.

 Sur les dépens

104    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

105    L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 16 janvier 2006 (affaire R 245/2004-2) est annulée.

2)      L’OHMI est condamné aux dépens.

Forwood

Šváby

Moavero Milanesi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 septembre 2009.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.