Language of document : ECLI:EU:T:2007:154

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

24 mai 2007(*)

« Concurrence – Abus de position dominante – Système de collecte et de valorisation d’emballages commercialisés en Allemagne et portant le logo Der Grüne Punkt – Décision constatant l’exploitation abusive d’une position dominante – Barrière à l’entrée – Redevance due au titre du ‘contrat d’utilisation du logo’ »

Dans l’affaire T‑151/01,

Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland GmbH, anciennement Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland AG, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Mes W. Deselaers, B. Meyring, E. Wagner et C. Weidemann, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée initialement par M. S. Rating, puis par M. P. Oliver, Mme H. Gading et M. M. Schneider, et enfin par MM. W. Mölls et R. Sauer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Vfw AG, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Mes H. F. Wissel et J. Dreyer, avocats,

et par

Landbell AG für Rückhol-Systeme, établie à Mayence (Allemagne),

BellandVision GmbH, établie à Pegnitz (Allemagne),

représentées par Mes A. Rinne et A. Walz, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet, l’annulation de la décision 2001/463/CE de la Commission, du 20 avril 2001, relative à une procédure d’application de l’article 82 [CE] (Affaire COMP D3/34493 – DSD) (JO L 166, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. R. García-Valdecasas, président, J. D. Cooke et Mme I. Labucka, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience des 11 et 12 juillet 2006,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

A –  Décret relatif à la prévention de la production des déchets d’emballages

1        Le 12 juin 1991, le gouvernement allemand a adopté la Verordnung über die Vermeidung von Verpackungsabfällen [décret relatif à la prévention de la production des déchets d’emballages (BGBl. 1991 I, p. 1234)], dont la version révisée – applicable dans la présente affaire – est entrée en vigueur le 28 août 1998 (ci-après le « décret » ou le « décret sur les emballages »). Ce décret a pour objet de prévenir et de diminuer les répercussions sur l’environnement des déchets d’emballages. À cet effet, il oblige les fabricants et les distributeurs à reprendre et à valoriser les emballages de vente usagés, en dehors du système public d’élimination des déchets.

2        Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, du décret, les emballages de vente (ci‑après les « emballages ») sont ceux qui emballent, aux points de vente, un article destiné au consommateur final. Il s’agit également des emballages utilisés par les commerces, la restauration et d’autres prestataires de services afin de permettre ou de faciliter la remise des produits au consommateur final (emballages de service), ainsi que la vaisselle et les couverts jetables.

3        L’article 3, paragraphe 7, du décret définit le fabricant comme toute personne qui fabrique des emballages, des matériaux d’emballages ou des produits permettant de fabriquer directement des emballages, ainsi que toute personne qui introduit des emballages sur le territoire allemand. Quant au distributeur, l’article 3, paragraphe 8, du décret énonce qu’il s’agit de toute personne qui met sur le marché des emballages, des matériaux d’emballages ou des produits permettant de fabriquer directement des emballages, ou encore des marchandises emballées, à n’importe quel niveau du circuit de distribution. Les sociétés de vente par correspondance constituent également des distributeurs au sens du décret. Enfin, le consommateur final est défini à l’article 3, paragraphe 10, du décret comme toute personne qui ne procède plus à la revente de la marchandise sous la forme sous laquelle elle lui a été livrée.

4        Les fabricants et les distributeurs d’emballages peuvent satisfaire de deux manières à l’obligation de reprise et de valorisation qui leur est imposée dans le décret.

5        D’une part, conformément à l’article 6, paragraphes 1 et 2, du décret, les fabricants et distributeurs doivent reprendre gratuitement les emballages utilisés par les consommateurs finaux, au point de vente ou à proximité immédiate de celui-ci, et les soumettre à une valorisation (ci-après le « système individuel »). L’obligation de reprise d’un distributeur se limite aux types, aux formes et aux tailles d’emballages ainsi qu’aux produits emballés qui font partie de son assortiment. Pour les distributeurs disposant de surfaces de vente inférieures à 200 m2, l’obligation de reprise se limite aux emballages des produits portant les marques vendues par le distributeur (article 6, paragraphe 1, quatrième et cinquième phrases, du décret). Selon l’article 6, paragraphe 1, troisième phrase, du décret, dans le cadre d’un système individuel, le distributeur doit signaler au consommateur final la possibilité de restituer l’emballage « par des panneaux clairement reconnaissables et lisibles ».

6        D’autre part, conformément à l’article 6, paragraphe 3, première phrase, du décret, les fabricants et les distributeurs peuvent adhérer à un système qui assure une collecte régulière, sur l’ensemble de la zone de chalandise du distributeur, des emballages de vente usagés auprès du consommateur final ou à proximité de son domicile afin de les soumettre à une valorisation (ci-après le « système collectif »). Les fabricants et distributeurs adhérant à un système collectif sont exonérés de leur obligation de reprise et de valorisation pour tous les emballages couverts par ce système. Selon le point 4, paragraphe 2, deuxième phrase, de l’annexe I de l’article 6 du décret, les fabricants et les distributeurs doivent faire apparaître leur participation à un système collectif « par l’étiquetage ou tout autre moyen approprié ». Ils peuvent ainsi faire mention de cette participation sur les emballages ou utiliser d’autres mesures, telles, par exemple, une information de la clientèle sur le lieu de vente ou une notice jointe à l’emballage.

7        En application de l’article 6, paragraphe 3, onzième phrase, du décret, les systèmes collectifs doivent être agréés par les autorités compétentes des Länder en cause. Pour être agréés, ces systèmes doivent, notamment, avoir un taux de couverture qui s’étende au territoire d’au moins un Land, réaliser des collectes régulières à proximité du domicile des consommateurs et avoir signé des accords avec les collectivités locales chargées de la gestion des déchets. Toute entreprise qui remplit ces conditions dans un Land peut y organiser un système collectif agréé.

8        Depuis le 1er janvier 2000, les systèmes individuels et les systèmes collectifs sont soumis au respect des mêmes taux de valorisation. Ces taux, qui figurent à l’annexe I du décret, varient selon la matière qui compose l’emballage. Le respect des obligations de reprise et de valorisation est garanti, dans le cas du système individuel, par des attestations délivrées par des experts indépendants et, dans le cas du système collectif, par la fourniture de données vérifiables sur les quantités d’emballages collectées et valorisées.

9        Par ailleurs, l’article 6, paragraphe 1, neuvième phrase, du décret indique que, si un distributeur ne remplit pas son obligation de reprise et de valorisation par le biais d’un système individuel, il doit le faire par le biais d’un système collectif.

10      À cet égard, dans leurs observations du 24 mai 2000, communiquées à la Commission dans le cadre de la procédure administrative (ci-après les « observations des autorités allemandes »), les autorités allemandes ont indiqué que le décret sur les emballages permettait au distributeur de combiner la reprise à proximité du commerce, dans le cadre d’un système individuel, et la collecte à proximité du consommateur final, dans le cadre d’un système collectif, en ne participant au système collectif que pour une partie des emballages qu’il avait mis sur le marché.

11      Dans les observations des autorités allemandes, il a également été indiqué que, si le distributeur choisissait de participer à un système collectif pour l’ensemble des emballages qu’il commercialisait, il n’était plus soumis aux obligations prévues à l’article 6, paragraphes 1 et 2, ce qui signifiait qu’une solution d’élimination individuelle a posteriori n’était pas possible. En revanche, si le distributeur choisissait de participer d’emblée à un système individuel, une participation ultérieure à un système collectif était possible si le taux de valorisation n’était pas atteint dans le cadre de l’élimination individuelle.

B –  Système collectif de Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland GmbH et contrat d’utilisation du logo

12      Depuis 1991, Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland GmbH (ci-après la « requérante » ou « DSD ») est la seule société qui exploite un système collectif sur l’ensemble du territoire allemand (ci-après le « système DSD »). À cet effet, DSD a été agréée, en 1993, par les autorités compétentes de tous les Länder.

13      Les relations entre DSD et les fabricants et distributeurs adhérant à son système sont régies par un contrat type qui a pour objet l’utilisation du logo Der Grüne Punkt (ci-après le « contrat » ou le « contrat d’utilisation du logo »). En signant ce contrat, l’entreprise adhérente est autorisée, contre rémunération, à apposer le logo Der Grüne Punkt sur les emballages de vente inclus dans le système DSD (article 1er, paragraphe 1, du contrat d’utilisation du logo).

14      DSD assure, pour le compte des entreprises qui adhèrent à son système, la collecte, le tri et la valorisation des emballages de vente usagés qu’ils décident de faire participer au système DSD, les déchargeant ainsi de leur obligation de reprise et de valorisation desdits emballages (article 2 du contrat).

15      Les entreprises adhérentes sont tenues de notifier les types d’emballage qu’elles désirent éliminer par le biais du système DSD et d’apposer le logo Der Grüne Punkt sur chaque emballage appartenant à ces types et destiné à la consommation intérieure en Allemagne afin que DSD puisse décharger l’entreprise adhérente de cette obligation (article 3, paragraphe 1, du contrat).

16      L’utilisateur du logo paie à DSD une redevance pour tous les emballages portant le logo Der Grüne Punkt qu’il distribue sur le territoire allemand en application du contrat d’utilisation du logo. Les exceptions à cette règle doivent faire l’objet d’un accord écrit séparé (article 4, paragraphe 1, du contrat). L’article 5, paragraphe 1, du contrat énonce également que tous les emballages portant le logo Der Grüne Punkt et distribués par l’utilisateur du logo sur le territoire allemand sont facturés (article 5, paragraphe 1, du contrat).

17      Le montant de la redevance est calculé à partir de deux types d’éléments, à savoir, d’une part, le poids de l’emballage et le type de matériau utilisé et, d’autre part, le volume ou la surface de l’emballage. Les redevances sont calculées sans majoration au titre des bénéfices et sont exclusivement destinées à couvrir les coûts de collecte, de tri et de valorisation, ainsi que les frais administratifs qui y sont afférents (article 4, paragraphes 2 et 3, du contrat). Les redevances peuvent être adaptées par décision de DSD si ces coûts varient.

18      Dans le cadre du système DSD, les emballages portant le logo Der Grüne Punkt peuvent être recueillis soit dans des poubelles spéciales et différenciées selon qu’il s’agit de métaux, de plastiques et de matières composites, soit dans des conteneurs installés à proximité des habitations (en particulier pour le papier et le verre), alors que les déchets résiduels doivent être jetés dans les poubelles du système public d’élimination des déchets.

19      Cependant, DSD ne collecte ni ne valorise elle-même les emballages usagés, mais sous-traite ce service à des entreprises locales de collecte. Les relations entre DSD et ces entreprises sont régies par un contrat type, modifié à plusieurs reprises, qui a pour objet la création et l’exploitation d’un système visant au ramassage et au tri des emballages. En vertu de ces contrats de services signés entre DSD et 537 entreprises locales, chacune de ces entreprises dispose du pouvoir exclusif de réaliser, dans une zone déterminée, la collecte d’emballages pour le compte de DSD. Une fois triés, ces emballages sont transportés vers un centre de recyclage pour y être valorisés.

20      Le contrat de services fait l’objet de la décision 2001/837/CE de la Commission, du 17 septembre 2001, dans à une procédure ouverte au titre de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaires COMP/34493 – DSD, COMP/37366 – Hofmann + DSD, COMP/37299 – Edelhoff + DSD, COMP/37291 – Rechmann + DSD, COMP/37288 – ARGE et cinq autres entreprises + DSD, COMP/37287 – AWG et cinq autres entreprises + DSD, COMP/37526 – Feldhaus + DSD, COMP/37254 – Nehlsen + DSD, COMP/37252 – Schönmakers + DSD, COMP/37250 – Altvater + DSD, COMP/37246 – DASS + DSD, COMP/37245 – Scheele + DSD, COMP/37244 – SAK + DSD, COMP/37243 – Fischer + DSD, COMP/37242 – Trienekens + DSD, COMP/37267 – Interseroh + DSD) (JO L 319, p. 1). Cette décision fait l’objet du recours en annulation introduit par la requérante dans l’affaire T-289/01, Duales System Deutschland/Commission.

 Faits à l’origine du litige

21      Le 2 septembre 1992, DSD a notifié à la Commission, outre ses statuts, un certain nombre d’accords, dont le contrat d’utilisation du logo et le contrat de services, en vue d’obtenir une attestation négative ou, à défaut, une décision d’exemption.

22      Après la publication au Journal officiel des Communautés européennes, le 23 juillet 1997 (JO C 100, p. 4) de la communication faite conformément à l’article 19, paragraphe 3, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), dans laquelle la Commission annonçait son intention de se déclarer favorable aux accords notifiés, celle-ci a reçu des observations de tiers intéressés concernant, notamment, différents aspects de l’application du contrat d’utilisation du logo. En particulier, ces tiers intéressés dénonçaient une prétendue distorsion de concurrence résultant du paiement d’une double redevance en cas de participation au système DSD et à celui d’un autre prestataire de services.

23      Le 15 octobre 1998, DSD a présenté à la Commission une série d’engagements destinés à éviter que les fabricants et distributeurs d’emballages adhérant au système DSD n’aient à payer une double redevance au cas où ils participeraient à un autre système collectif opérant au niveau régional. En particulier, DSD envisageait la situation dans laquelle des systèmes collectifs, limités à un ou plusieurs Länder, seraient créés parallèlement au système DSD. Dans cette hypothèse, des emballages d’un même type et d’un même distributeur ou fabricant pourraient être repris, dans ces Länder, par l’un des nouveaux systèmes collectifs et, dans les autres Länder, par le système DSD, et l’engagement de DSD à cet égard était le suivant  (considérants 4, 58 et 59 de la décision attaquée)

« Si des systèmes autres que [le système DSD], opérant à l’échelon régional, étaient mis en place et étaient officiellement agréés par les plus hautes autorités du Land conformément à l’article 6, paragraphe 3, du décret sur les emballages, [DSD] est disposée à appliquer le contrat d’utilisation du logo de façon telle que les adhérents aient la possibilité de participer à l’un de ces systèmes pour une partie de leurs emballages. [DSD] ne percevra alors aucune redevance au titre du contrat d’utilisation du logo pour les emballages collectés par de tels systèmes, ce deuxième type de collecte devant être attesté par des preuves. La deuxième condition posée pour l’exonération de la redevance due sur les emballages portant le logo [Der Grüne Punkt] est qu’il ne soit pas porté atteinte à la protection de la marque [Der Grüne Punkt]. »

24      Le 3 novembre 1999, la Commission a considéré que la série d’engagements présentée par DSD le 15 octobre 1998 devait également englober les systèmes individuels utilisés pour l’élimination d’une partie des emballages et non se limiter aux seuls systèmes collectifs.

25      Le 15 novembre 1999, certains fabricants d’emballages ont adressé une plainte à la Commission. Ils faisaient valoir que le contrat d’utilisation du logo empêchait la mise en place d’un système individuel de reprise des emballages. Ils considéraient que l’utilisation du logo, sans qu’il y ait pour autant prestation effective d’un service d’élimination des déchets par DSD, constituait un abus de position dominante de DSD.

26      Par lettre du 13 mars 2000, DSD a présenté à la Commission deux engagements supplémentaires. L’un d’entre eux visait le cas dans lequel les fabricants et distributeurs d’emballages choisiraient un système individuel pour une partie de leurs emballages et adhéreraient au système DSD pour la partie restante. Dans ce cas, DSD s’engageait à ne pas percevoir de redevance au titre du contrat d’utilisation du logo pour la partie des emballages reprise par le système individuel, à condition que des preuves relatives à ce deuxième type de collecte lui soient apportées. Ces preuves devaient être apportées conformément aux exigences mentionnées à l’annexe I, point 2, du décret sur les emballages. Dans sa lettre du 13 mars 2000, DSD indiquait également qu’il ne lui paraissait pas nécessaire de modifier la série d’engagements présentée le 15 octobre 1998 (voir considérants 7, 60 et 61 de la décision attaquée)

27      Le 3 août 2000, la Commission a adressé une communication des griefs à DSD, à laquelle celle-ci a répondu par lettre du 9 octobre 2000.

28      Le 20 avril 2001, la Commission a adopté la décision 2001/463/CE relative à une procédure d’application de l’article 82 [CE] (Affaire COMP D3/34493 – DSD) (JO L 166, p. 1, ci-après la « décision attaquée »).

 Procédure et conclusions des parties

29      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 juillet 2001, la requérante a introduit, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

30      Par acte séparé, déposé le même jour, la requérante a également introduit, en vertu de l’article 242 CE, une demande de sursis à l’exécution de l’article 3 de cette décision, ainsi que des articles 4, 5, 6 et 7 dans la mesure où ceux-ci se réfèrent à l’article 3, jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur le fond.

31      Par ordonnance du 15 novembre 2001, Duales System Deutschland/Commission (T‑151/01 R, Rec. p. II‑3295), le président du Tribunal a rejeté la demande de sursis à l’exécution de la décision attaquée.

32      Par requêtes enregistrées au greffe du Tribunal, respectivement, les 16, 19 et 20 juillet 2001, Vfw AG, Landbell AG für Rückhol-Systeme (ci-après « Landbell ») et BellandVision GmbH ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission. Les demandes d’intervention ont été signifiées aux parties, lesquelles ont fait part de leurs observations dans les délais impartis.

33      Par ordonnance du 5 novembre 2001, le Tribunal (cinquième chambre) a admis l’intervention de ces trois entreprises et celles-ci ont pu individuellement présenter leurs observations le 7 février 2002.

34      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, a adressé aux parties une série de questions pour réponses orales lors de l’audience. Ces questions portaient sur les différentes étapes du processus de collecte et de valorisation des emballages et sur les conditions dans lesquelles la concurrence entre les systèmes individuels et collectifs pourrait exister. Le Tribunal a également invité la Commission à produire un document présenté par les autorités allemandes dans le cadre de la procédure administrative. Le 26 juin 2006, la Commission a communiqué ce document.

35      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience des 11 et 12 juillet 2006.

36      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

37      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

38      Vfw conclut à ce qu’il plaise au Tribunal rejeter le recours.

39      Landbell conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

40      BellandVision conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

41      Avant d’examiner les arguments des parties sur la recevabilité et le fond du litige, il convient d’exposer le contenu de la décision attaquée.

A –  Décision attaquée

42      À la différence du décret, dans lequel il n’est pas précisé s’il est possible de combiner un système individuel et un système collectif ou encore de recourir à plusieurs systèmes collectifs pour reprendre et valoriser les emballages commercialisés, la décision attaquée prend comme point de départ la possibilité, pour un fabricant ou pour un distributeur d’emballages, de combiner ces différents systèmes afin de satisfaire aux obligations qui lui incombent au titre du décret.

43      Dans ce contexte, l’appréciation juridique de la Commission se divise en deux parties : la première partie est consacrée à l’analyse du comportement de DSD au regard de l’article 82 CE (considérants 65 à 160 et article 1er de la décision attaquée) et la seconde à l’examen des mesures permettant à la Commission, sur la base de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17, de mettre fin à l’abus constaté (considérants 161 à 167 et articles 3 à 7 de la décision attaquée). La décision attaquée ne se prononce pas sur la légalité du comportement de DSD au regard de l’article 86, paragraphe 2, CE.

1.     Sur la possibilité de combiner plusieurs systèmes de reprise et de valorisation pour satisfaire aux obligations du décret sur les emballages

44      La possibilité de faire appel à plusieurs systèmes de reprise et de valorisation pour satisfaire aux obligations du décret sur les emballages (ci-après les « systèmes mixtes ») constitue le postulat de la décision attaquée dans laquelle la Commission envisage les trois cas de figure suivants  (considérant 101 de la décision attaquée) :

–        le cas de figure n° 1 correspond au cas où un fabricant ou un distributeur utilise le système collectif (national) de DSD pour une partie de ses emballages et se sert d’un autre système collectif (régional) pour le reste des emballages ;

–        le cas de figure n° 2 correspond au cas où un fabricant ou un distributeur utilise le système DSD pour une partie de ses emballages et se sert d’un système individuel pour le reste des emballages ;

–        le cas de figure n° 3 correspond au cas où un fabricant ou un distributeur confie l’élimination de la totalité de ses emballages en Allemagne à des systèmes concurrents du système DSD, mais adhère dans d’autres États membres à un système utilisant le logo Der Grüne Punkt.

45      La décision attaquée expose plusieurs éléments permettant d’établir la possibilité de recourir à des systèmes mixtes. Ainsi, la décision relève qu’il ressort des observations des autorités allemandes, (considérant 20 de la décision attaquée) que le décret permet de combiner un système individuel et un système collectif en ne participant à un système collectif que pour la reprise d’une partie des emballages commercialisés. Dans cette hypothèse, les autorités allemandes précisent, toutefois, qu’il convient de définir clairement, tant à l’intention des consommateurs que des autorités, quels sont les emballages soumis à l’obligation de reprise aux points de vente ou à proximité immédiate de ceux-ci et quels sont ceux qui ne sont pas soumis à cette obligation (considérant 20 de la décision attaquée). La décision attaquée souligne également qu’il ressort d’une réponse antérieure des autorités allemandes que l’article 6, paragraphe 3, du décret n’implique pas que seul le recours à un système unique est possible. Les autorités allemandes n’auraient ainsi jamais eu l’intention de ne permettre la mise en place que d’un seul système collectif dans tout le pays ou dans chaque Land (considérant 23 de la décision attaquée).

46      Les observations des autorités allemandes permettent ainsi de constater que la présentation alternative du décret, selon laquelle un fabricant ou un distributeur d’emballages peut recourir à un système individuel ou à un système collectif pour respecter ses obligations, ne s’oppose pas à un système mixte. Au demeurant, le Tribunal relève que la requérante ne conteste pas, dans la présente affaire, la possibilité pour un fabricant ou un distributeur d’emballages d’avoir recours à un système mixte, mais conteste plutôt l’appréciation de son comportement par la Commission en ce qui concerne tant l’article 82 CE que l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17.

2.     Appréciation relative à l’article 82 CE

47      Selon la décision attaquée, DSD est la seule entreprise qui propose un système collectif sur tout le territoire allemand et le système DSD collecte environ 70 % des emballages de vente en Allemagne ainsi qu’environ 82 % des emballages de vente collectés en Allemagne chez les consommateurs (considérant 95 de la décision attaquée). La position dominante de DSD n’est pas contestée dans la présente affaire.

48      En l’espèce, l’abus de position dominante caractérisé dans la décision attaquée repose sur le fait que la redevance perçue par DSD auprès des fabricants et des distributeurs d’emballages qui adhèrent au système DSD n’est pas conditionnée à l’utilisation effective de ce système, mais calculée sur la base du nombre d’emballages portant le logo Der Grüne Punkt que ces fabricants et distributeurs commercialisent en Allemagne (article 4, paragraphe 1, et article 5, paragraphe 1, du contrat). Or, les fabricants et les distributeurs qui adhèrent au système DSD doivent apposer le logo Der Grüne Punkt sur chacun des emballages notifiés à DSD et destinés à la consommation en Allemagne (article 3, paragraphe 1, du contrat). Ainsi, selon la décision, DSD abuse de sa position dominante en ne liant pas la redevance due en application du contrat à l’utilisation effective du système DSD. En effet, il ressort de l’enquête menée par la Commission, sur la base de plaintes de clients ou de concurrents de DSD, que le mode de calcul de la redevance versée à DSD fait obstacle au souhait de certains fabricants d’emballages, clients du système DSD, de pouvoir faire appel à leur propre système individuel ou à un autre système collectif pour s’occuper d’une partie des emballages qu’ils commercialisent (considérants 100 à 102 de la décision attaquée).

49      À cet égard, la décision attaquée considère que la solution proposée par DSD, à savoir une renonciation à l’apposition du logo Der Grüne Punkt sur les emballages qui ne relèveraient pas du système DSD, mais d’un autre système, qu’il soit individuel ou collectif, échouerait face aux réalités économiques « dans un nombre non négligeable de cas » (considérant 103 de la décision attaquée). Une telle solution nécessiterait, en effet, un étiquetage sélectif des emballages (avec ou sans le logo Der Grüne Punkt), ce qui se traduirait par un surcoût significatif en cas de présentation uniforme de l’emballage ou de recours à des circuits de distribution différents (considérants 104 et 105 de la décision attaquée). De plus, une telle solution exigerait des fabricants et des distributeurs d’emballages qui utilisent des systèmes mixtes qu’ils s’assurent que les emballages portant le logo Der Grüne Punkt soient bien déposés aux endroits où le système DSD reprend ces emballages et que ceux sur lesquels ne figure pas ce logo soient déposés aux endroits où les autres systèmes en assurent le reprise, ce qui serait impossible en pratique (considérant 106 de la décision attaquée). Enfin, compte tenu du fait que, souvent, ce n’est qu’après avoir acheté le produit emballé ou, éventuellement, après l’avoir utilisé que le consommateur final décide s’il dépose l’emballage dans un système collectif à proximité de son domicile ou s’il le rapporte au point de vente pour le remettre dans un système individuel, il serait impossible d’affecter la partie des emballages revêtus du logo Der Grüne Punkt à l’un ou à l’autre type de collecte (considérant 107 de la décision attaquée).

50      Dans la décision attaquée, la Commission estime que les effets de l’abus, caractérisé en ce qui concerne le régime de redevance lié au contrat d’utilisation du logo, sont doubles. D’une part, en subordonnant exclusivement la redevance à l’utilisation du logo, DSD exposerait les entreprises qui n’utilisent pas le service de prise en charge de l’obligation d’élimination des emballages, ou qui ne l’utilisent que pour une partie des emballages, à des prix et à des conditions de transaction inéquitables. Du fait de la différence excessive entre le coût de fourniture du service et son prix, il s’agirait d’un cas d’exploitation abusive de position dominante au sens de l’article 82, paragraphe 2, sous a), CE (considérants 111 à 113 de la décision attaquée). D’autre part, du fait du régime de redevance défini par le contrat d’utilisation du logo, il ne serait pas économiquement rentable, pour les entreprises assujetties, d’adhérer à un système individuel ou collectif concurrent, car ces entreprises devraient soit verser une redevance à DSD, outre la rémunération due au concurrent, soit introduire des lignes d’emballages et des circuits de distribution distincts. Le régime de redevance rendrait ainsi plus difficile l’entrée sur le marché des concurrents du système DSD (voir considérants 114 et 115 de la décision attaquée).

51      La Commission décrit plus précisément l’abus constitué par la redevance contractuelle dans les trois cas de figure précités. S’agissant du cas de figure n° 1, celui d’un système mixte combinant l’utilisation du système collectif national DSD et celle d’un autre système collectif régional, la décision attaquée relève que cette hypothèse nécessite, actuellement, soit l’apposition d’un marquage différent selon le système utilisé, soit le versement d’une redevance due au titre des deux systèmes. Dès lors, le fait, pour DSD, d’exiger le versement de la redevance sur la quantité totale d’emballages commercialisés en Allemagne a pour effet de priver de toute rentabilité économique la participation à un système collectif régional (voir considérants 118 à 123 de la décision attaquée).

52      Afin de répondre à ce problème, DSD s’était engagée, dans le cadre de la procédure administrative (considérants 58 et 59 de la décision attaquée), à appliquer le contrat d’utilisation du logo de telle façon que les fabricants et distributeurs concernés aient la possibilité de participer à un autre système collectif pour une partie de leurs emballages, à condition, toutefois, d’en apporter la preuve et de ne pas porter atteinte à la protection de la marque Der Grüne Punkt. DSD refusant de supprimer la condition relative à la protection de la marque, expression qui n’était d’ailleurs pas explicitée, la décision attaquée a considéré que cet engagement ne suffisait pas à dissiper les doutes que la Commission avait exprimés (voir considérants 122 et 123 de la décision attaquée).

53      S’agissant du cas de figure n° 2, celui d’un système mixte combinant l’utilisation d’un système individuel et le système DSD, la décision attaquée expose que le fait pour DSD d’exiger le versement de la redevance sur la quantité totale des emballages commercialisés en Allemagne a pour effet d’exclure la participation à un système individuel pour une partie de ces emballages (voir considérants 124 à 128 de la décision attaquée).

54      Afin de répondre à ce problème, DSD s’était engagée, lors de la procédure administrative (considérants 60 et 61 de la décision attaquée), à ne pas percevoir de redevance au titre du contrat pour la partie des emballages reprise par un système individuel, à condition, toutefois, d’en apporter la preuve. Dans cet engagement, DSD précisait également que l’utilisation du logo Der Grüne Punkt restait limitée aux emballages repris par le système DSD et qu’il ne pouvait donc être apposé sur des emballages repris par le système individuel. Or, la Commission a considéré qu’il n’était guère concevable, en pratique, de mettre en place des lignes d’emballages et des circuits de distribution distincts, étant donné qu’il était quasiment impossible que le fabricant ou le distributeur d’emballages concerné puisse déterminer, à ce stade, quels étaient les emballages que le consommateur allait rapporter au système collectif et quels étaient ceux qu’il allait rapporter au système individuel. Dès lors, la Commission a estimé que cet engagement ne suffisait pas à dissiper les doutes qu’elle exprimait sur la situation de concurrence (voir considérants 127 et 128 de la décision attaquée).

55      S’agissant du cas de figure n° 3, qui suppose l’absence de participation au système DSD en Allemagne, mais la participation à un système de reprise et d’élimination qui utilise le logo Der Grüne Punkt dans un autre État membre, cas de figure dans lequel DSD pourrait demander le versement d’une redevance en Allemagne, la décision attaquée relève qu’un engagement et une déclaration de DSD présentés dans le cadre de la procédure administrative permettent de répondre aux problèmes identifiés par la Commission à cet égard (voir considérants 62 à 64 et 129 à 135 de la décision attaquée).

56      La décision attaquée précise que l’abus constaté n’est pas justifié par une prétendue incompatibilité entre les dispositions du décret et l’apposition du logo Der Grüne Punkt sur les emballages pour lesquels aucun service de prise en charge de l’obligation d’élimination des déchets n’est assuré (voir considérants 136 à 142 de la décision attaquée). Il ne serait pas non plus justifié par la nécessité de préserver le caractère distinctif du logo Der Grüne Punkt (voir considérants 143 à 153 de la décision attaquée). Sur ce point, la décision se réfère à un arrêt du Kammergericht Berlin (Tribunal régional de Berlin, Allemagne) du 14 juin 1994 et énonce que la fonction essentielle de ce logo est remplie « s’il signale au consommateur que celui-ci a la possibilité de faire éliminer l’emballage par DSD ». Dès lors, la fonction dudit logo n’exige pas qu’il soit apposé uniquement sur les emballages pris en charge par le système DSD en cas de collecte d’une partie seulement des emballages par ce système (voir considérant 145 de la décision attaquée).

57      La décision attaquée relève également que le commerce entre États membres est susceptible d’être affecté de manière sensible par l’exploitation abusive d’une position dominante constituée par les modalités de la redevance contractuelle litigieuse compte tenu des circonstances propres à la reprise et à la valorisation des emballages en Allemagne et dans le marché commun (voir considérants 155 à 160 de la décision attaquée). L’effet sur le commerce entre États membres n’est d’ailleurs pas contesté dans la présente affaire.

58      En conclusion de son appréciation au titre de l’article 82 CE, la décision attaquée indique que, dans certaines hypothèses, le comportement de DSD consistant à exiger le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt constitue un abus de position dominante. Cette infraction à l’article 82 CE est caractérisée à l’article 1er de la décision attaquée dans les termes suivants :

« Le comportement de [DSD] consistant à exiger, conformément à l’article 4, paragraphe 1, première phrase, et à l’article 5, paragraphe 1, première phrase, du contrat d’utilisation du logo, le versement d’une redevance pour la totalité des emballages de vente commercialisés en Allemagne avec le logo [Der Grüne Punkt] est incompatible avec le marché commun lorsque les entreprises assujetties en vertu du décret sur les emballages :

a)      ne recourent au service de prise en charge de l’obligation d’élimination des déchets prévue à l’article 2 du contrat d’utilisation du logo que pour une partie des emballages [cas de figure n° 1 et 2] ou n’y ont pas recours, mais mettent sur le marché en Allemagne un emballage standardisé, également commercialisé dans un autre pays membre de l’[Espace économique européen] et pour lequel elles adhèrent à un système de reprise utilisant le logo [Der Grüne Punkt] [cas de figure n° 3], et

b)      prouvent que, en ce qui concerne la quantité d’emballages, totale ou partielle, pour laquelle elles ne recourent pas au service de prise en charge de l’obligation d’élimination des déchets, elles s’acquittent des obligations de reprise qui leur sont imposées par le décret sur les emballages par le biais de systèmes collectifs concurrents ou de systèmes individuels. »

3.     Appréciation relative à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17

59      Après avoir constaté l’existence d’un abus de position dominante, la décision attaquée détermine, en application de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17, la manière dont DSD doit mettre fin à l’infraction constatée (considérants 161 à 167 et articles 2 à 7 de la décision attaquée).

60      La principale de ces mesures oblige DSD à ne pas percevoir de redevance sur les quantités d’emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt pour lesquelles il n’est pas fait appel au service de prise en charge de l’obligation d’élimination des déchets et pour lesquelles les obligations imposées dans le décret sur les emballages sont remplies d’une autre manière. Cette mesure, définie à l’article 3 de la décision attaquée, en ce qui concerne les cas de figure n° 1 et 2, est la suivante :

« DSD est tenue de s’engager envers tous les signataires du contrat d’utilisation du logo à ne pas percevoir de redevance sur les quantités d’emballages de vente commercialisés en Allemagne avec le logo [Der Grüne Punkt], pour lesquelles il n’est pas fait appel au service de prise en charge de l’obligation d’élimination des déchets conformément à l’article 2 dudit contrat d’utilisation du logo et pour lesquelles les obligations imposées par le décret sur les emballages sont remplies d’une autre manière.

L’engagement visé au premier alinéa remplace une disposition dérogatoire prévue à l’article 4, paragraphe 1, deuxième phrase, du contrat d’utilisation du logo. »

61      Par ailleurs, à l’article 5 de la décision attaquée, la Commission expose comme suit les règles de preuve requises dans ces cas de figure :

« 1. [Cas de figure n° 1] Si une partie ou la totalité des emballages est reprise par un système collectif concurrent, la confirmation du gestionnaire du système attestant que la quantité correspondante est prise en charge par ce système collectif concurrent constitue une preuve suffisante que les obligations imposées par le décret sur les emballages mentionnées aux articles 3 et 4 sont remplies d’une autre manière.

2. [Cas de figure n° 2] Si une partie ou la totalité des emballages est collectée par un système individuel, la présentation, ultérieurement, de l’attestation d’un expert indépendant indiquant que les obligations de reprise et de valorisation ont été remplies suffit. L’attestation peut être établie soit individuellement pour chaque fabricant ou distributeur, soit pour l’ensemble des entreprises participant au système individuel.

3. DSD ne peut en aucun cas exiger que l’attestation soit produite à une date antérieure à celle prévue par le décret sur les emballages.

4. En ce qui concerne les éléments de preuve à présenter à DSD, il suffit, indépendamment de la version correspondante du décret sur les emballages, que l’attestation confirme aux cocontractants que les exigences de reprise et de valorisation sont remplies pour un volume déterminé d’emballages.

5. Si l’attestation devait contenir d’autres données, celles-ci peuvent être rendues indéchiffrables.

6. Tant l’attestation du gestionnaire du système que l’attestation de l’expert indépendant peuvent être remplacées par un certificat d’un commissaire aux comptes, qui confirme après coup que les obligations imposées par le décret sur les emballages sont remplies pour une quantité déterminée d’emballages.

7. Aucune autre disposition du contrat d’utilisation du logo ne peut être appliquée d’une manière qui aurait pour effet de renforcer les exigences concernant les éléments de preuve à fournir à DSD. »

62      L’article 4 de la décision envisage la situation particulière du cas de figure n° 3:

« 1. DSD n’est pas autorisée à percevoir de redevance pour les emballages repris dans un autre État membre par un système de reprise et de valorisation avec utilisation du logo [Der Grüne Punkt] et qui sont commercialisés sur le territoire d’application du décret sur les emballages avec le logo, à condition qu’il soit attesté que les obligations imposées par le décret sur les emballages sont remplies d’une manière autre que par adhésion au système mis en place par DSD conformément à l’article 6, paragraphe 3, du décret.

2. DSD peut subordonner l’exonération de la redevance à la condition que, sur les emballages visés au paragraphe 1, à proximité du logo [Der Grüne Punkt], l’attention du consommateur final soit attirée, par une mention en ce sens ou sous toute autre forme appropriée, sur le fait que l’emballage n’est pas repris par le système mis en place par DSD conformément à l’article 6, paragraphe 3, du décret.

3. En cas de désaccord sur la lisibilité de la mention, les parties demandent à la Commission, dans un délai d’une semaine après qu’une partie ou les deux parties ont constaté le désaccord, de nommer un expert.

L’expert a pour mission de constater, dans un délai de quatre semaines, si les différentes présentations de la mention envisagées par les parties répondent aux exigences formulées au paragraphe 2, compte tenu des fonctions de base qui doivent être celles d’un emballage […] »

63      C’est dans ce contexte, qu’il convient d’examiner les arguments des parties.

B –  Sur la recevabilité du recours

1.     Sur la recevabilité du recours en ce qu’il vise l’article 4 de la décision attaquée

64      La Commission fait valoir que le recours vise à l’annulation de l’ensemble de la décision attaquée sans évoquer la situation particulière exposée à l’article 4, qui serait séparable du reste de la décision attaquée. Le silence de la requérante sur ce point ne serait pas conforme aux prescriptions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal et le recours devrait être déclaré irrecevable en ce qu’il vise l’article 4 de la décision attaquée.

65      La requérante fait valoir que, conformément aux exigences du règlement de procédure, la requête contient un exposé clair et précis des faits et des moyens de droit qui permet à la Commission de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle (ordonnance du Tribunal du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20). En particulier, la requête énumère les raisons pour lesquelles les dispositions litigieuses du contrat d’utilisation du logo ne peuvent pas être considérées comme étant abusives au regard de l’article 82 CE, ce qui aurait pour effet de priver de tout fondement les mesures prévues à l’article 4 de la décision attaquée.

66      Le Tribunal relève que la décision attaquée caractérise un abus de position dominante (article 1er) et impose de ce fait certaines obligations à DSD en vue de faire cesser cet abus (articles 3 à 7). En particulier, la Commission, à l’article 4 de la décision attaquée, impose une obligation visant à faire cesser l’abus de position dominante dans le cas où un fabricant ou un distributeur prévoit de commercialiser des emballages dans un autre État membre que l’Allemagne en adhérant à un système de reprise et de valorisation qui utilise le logo Der Grüne Punkt, mais qui, pour les mêmes emballages commercialisés en Allemagne, s’acquitte de ses obligations sans participer au système DSD.

67      Or, dans le cadre du premier moyen du recours, tiré de la violation de l’article 82 CE, la requérante demande l’annulation de la décision attaquée en ce qu’il y serait constaté, de façon erronée, l’existence d’un abus de position dominante. Si le Tribunal accueillait favorablement ce moyen, alors toutes les obligations imposées à DSD par la décision attaquée, visant à faire cesser cet abus, devraient être annulées sans qu’il soit nécessaire d’examiner la situation particulière visée à l’article 4 de la décision attaquée.

68      De même, dans le cadre du deuxième moyen du recours, tiré de la violation de l’article 3 du règlement n° 17 et de celle du principe de proportionnalité, la requérante demande l’annulation de l’obligation imposée à l’article 4 de la décision attaquée, en ce qu’elle serait disproportionnée compte tenu de la possibilité d’étiqueter sélectivement les emballages ou de renoncer à l’utilisation de la marque « Der Grüne Punkt », qu’elle reviendrait à obliger DSD à effectuer ses prestations en étant payée ultérieurement et qu’elle exclurait le versement d’une redevance pour la seule utilisation de la marque.

69      Force est donc de constater que la requête satisfait aux conditions de forme prescrites à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure et que le Tribunal est ainsi en mesure d’exercer son contrôle. La demande de la Commission tendant à ce que soit constatée l’irrecevabilité du recours en ce qu’il vise l’article 4 de la décision attaquée doit, par conséquent, être rejetée.

2.     Sur la production de moyens en cours d’instance

70      La Commission soutient que la réplique contient trois moyens nouveaux, relatifs à une nouvelle interprétation du contrat d’utilisation du logo (voir point 115 ci-après), à la critique de citations d’une ancienne version du décret sur les emballages dans la présentation des faits de la décision attaquée et au fait que le consommateur ne pourrait pas demander à des systèmes individuels de collecter des emballages à proximité de son domicile. Ces moyens devraient donc être déclarés irrecevables.

71      Le Tribunal relève que, aux termes de l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, la production de nouveaux moyens en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit ou de fait qui se sont révélés pendant la procédure. À cet égard, un moyen qui constitue une ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (voir arrêt du Tribunal du 10 avril 2003, Travelex Global and Financial Services et Interpayment Services/Commission, T‑195/00, Rec. p. II‑1677, points 33 et 34, et la jurisprudence citée).

72      En l’espèce, les prétendus moyens nouveaux critiqués par la Commission ne constituent, en réalité, que des arguments développés par la requérante en réponse à l’argumentation présentée par la Commission dans la défense au titre du premier moyen tiré de la violation de l’article 82 CE.

73      En conséquence, la fin de non-recevoir invoquée par la Commission en ce qui concerne la production de moyens nouveaux en cours d’instance doit être rejetée.

3.     Sur la prise en considération de certaines annexes produites par la requérante

a)     Sur les annexes préparées par Me C. Weidemann

74      La Commission souligne que les annexes préparées par Me C. Weidemann, l’un des avocats de DSD, concernant la gestion environnementale de l’économie des emballages en Allemagne (annexe A à la requête) et la justification du système DSD au regard de l’article 86 CE (annexe A à la réplique), contiennent des explications qui ne sont pas reprises dans les mémoires de la requérante. Dès lors, le Tribunal ne devrait pas prendre en considération ces annexes, dans la mesure où une allégation de violation de la législation ne peut pas être faite par simple renvoi à des annexes.

75      Le Tribunal relève que, afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit, sur lesquels celui-ci se fonde, ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (arrêt de la Cour du 15 décembre 1961, Société Fives Lille Cail e.a./Haute Autorité, 19/60, 21/60, 2/61 et 3/61, Rec. p. 561, 588 ; arrêt du Tribunal du 21 septembre 2005, EDP/Commission, T‑87/05, Rec. p. II‑3745, point 155, et la jurisprudence citée). À cet égard, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure, doivent figurer dans la requête (ordonnance du Tribunal du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 49 ; arrêt EDP/Commission, précité, point 155, et la jurisprudence citée).

76      En l’espèce, il convient de constater que les annexes préparées par Me Weidemann, concernant la gestion environnementale de l’économie des emballages en Allemagne et la justification du système de la requérante au regard de l’article 86 CE constituent de véritables mémoires présentés par l’un des avocats qui représentent DSD devant le Tribunal. Les éléments essentiels de l’argumentation en droit développée dans ces annexes doivent donc figurer dans la requête ou la réplique, qui doit renvoyer à des extraits de ces annexes afin d’en étayer ou d’en compléter le contenu et non se contenter de renvoyer globalement auxdites annexes.

77      Or, lorsqu’elle évoque la première de ces annexes, la requête ne fait qu’indiquer – sans donner d’autres explications – que la conclusion à laquelle parvient MWeidemann, au terme de son examen de la gestion environnementale de l’économie des emballages en Allemagne, est également celle qui est exposée dans la requête, sans indiquer à quels points spécifiques de cette annexe de 54 pages il est fait référence.

78      Ce n’est que par rapport à cette seule indication, de laquelle il ressort que l’auteur de l’annexe partage l’analyse présentée dans la requête, qu’il convient de prendre en considération l’annexe sur la gestion environnementale de l’économie des emballages en Allemagne.

79      Pour ce qui est de la seconde annexe préparée par MWeidemann, relative à la justification du système de DSD au regard de l’article 86 CE, il y a lieu de relever que cette annexe de 58 pages a été présentée « à titre complémentaire » au stade de la réplique, laquelle renvoie « entièrement aux développements de l’annexe pour l’exposé des moyens qui ont trait à l’article 86 CE ».

80      En principe, de telles indications ne peuvent pas être considérées comme suffisantes au regard de la jurisprudence précitée, dans la mesure où un renvoi global à une annexe ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit qui doivent figurer dans la requête. La réplique prend soin, toutefois, de présenter un résumé succinct du contenu de cette annexe, lequel complète l’argumentation présentée sur ce point dans la requête et permet, en tant que tel, à la Commission de préparer sa défense et au Tribunal d’examiner le troisième moyen tiré de la violation de l’article 86 CE, paragraphe 2, CE.

81      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que l’annexe concernant la justification du système de la requérante au regard de l’article 86 CE ne sera prise en considération par le Tribunal que dans la mesure où elle se rapporte spécifiquement à des arguments expressément invoqués par DSD dans ses écritures.

b)     Sur les enquêtes d’opinion jointes à la réplique

82      La Commission fait valoir que la requérante n’a pas motivé le retard apporté à la présentation des offres de preuve constituées, notamment, par deux enquêtes d’opinion jointes à la réplique, ce qui serait contraire à l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure.

83      Le Tribunal relève que les enquêtes d’opinion produites par la requérante dans la réplique ne sont pas des offres de preuves au sens de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure, mais servent à étayer l’argumentation présentée, dans la réplique, en réponse à des arguments exposés dans la défense, sur les rôles joués par la marque Der Grüne Punkt et par le consommateur final dans la reprise et la valorisation des emballages.

84      En conséquence, la fin de non recevoir opposée par la Commission en ce qui concerne les enquêtes d’opinions jointes à la réplique doit être rejetée.

C –  Sur le fond

85      La requérante invoque trois moyens à l’appui de son recours. Le premier est tiré de la violation de l’article 82 CE. Le deuxième est pris de la violation de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17 et du principe de proportionnalité. Le troisième est tiré de la violation de l’article 86, paragraphe 2, CE.

1.     Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 82 CE

a)     Observations liminaires sur la thèse de la licence obligatoire gratuite

 Arguments des parties

86      La requérante fait valoir que, à l’article 3 de la décision attaquée, la Commission l’oblige à concéder une « licence obligatoire gratuite » de sa marque Der Grüne Punkt aux entreprises qui adhèrent à son système, dans la mesure où le logo correspondant à cette marque peut désormais, du fait de la décision, être apposé sur tous les emballages, indépendamment du système de reprise et de valorisation concerné. Or, selon la jurisprudence de la Cour, une licence obligatoire d’un droit de propriété intellectuelle ne pourrait être octroyée que dans des « circonstances exceptionnelles », à savoir quand le refus de licence concerne un droit de propriété industrielle dont la licence est indispensable à l’exercice de l’activité en cause et qu’il est de nature à exclure toute concurrence sur le marché dérivé et quand ce refus n’est pas objectivement justifié (arrêts de la Cour du 6 avril 1995, RTE et ITP/Commission, dit « Magill », C‑241/91 P et C‑242/91 P, Rec. p. I‑743, points 50 à 56, et du 26 novembre 1998, Bronner, C‑7/97, Rec. p. I‑7791, point 39). Aucune de ces circonstances n’étant établie dans la présente affaire, aucun abus de position dominante ne pourrait être caractérisé sur la base de l’article 82 CE. À l’appui de sa thèse, la requérante expose, en substance, les arguments suivants : premièrement, la marque Der Grüne Punkt ne serait pas indispensable pour participer à un système concurrent du système DSD ; deuxièmement, la concurrence ne serait pas exclue par les dispositions contractuelles litigieuses ; troisièmement, plusieurs raisons objectives justifieraient le comportement de DSD, à savoir la nécessité de réaliser les objectifs du décret, celle de préserver les différentes fonctions de la marque Der Grüne Punkt, laquelle ne pourrait faire l’objet d’une licence obligatoire au regard du droit des marques, et celle de permettre le bon fonctionnement du système DSD.

87      La Commission, soutenue par les parties intervenantes, relève que la décision attaquée n’oblige pas DSD à concéder des licences obligatoires gratuites contraires au droit international et au droit communautaire. L’abus caractérisé résulterait du seul fait que le régime de redevance serait contraire à l’article 82 CE en ce que DSD exigerait d’être rémunérée pour un service qu’elle n’assurerait pas et dont il serait démontré qu’il aurait été assuré par un autre système.

 Appréciation du Tribunal

88      Dans le cadre du premier moyen, qui vise l’article 82 CE, la requérante conteste, en substance, les conséquences qui découleraient de la mise en œuvre de l’obligation adoptée sur la base de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17, telle qu’elle est exposée à l’article 3 de la décision attaquée (voir point 60 ci-dessus), afin de mettre fin à l’abus de position dominante caractérisé à l’article 1er de la décision (voir point 58 ci-dessus). Selon la requérante, l’obligation définie à l’article 3 de la décision l’oblige à octroyer une « licence obligatoire gratuite » de la marque Der Grüne Punkt pour des emballages destinés à être éliminés par des systèmes concurrents du système DSD.

89      Cependant, en critiquant la légalité d’une telle licence obligatoire, la requérante soutient que la marque Der Grüne Punkt n’est pas indispensable pour participer à un système concurrent du système DSD (voir point 93 ci-après) et que la concurrence n’est pas exclue par les dispositions contractuelles litigieuses (voir point 95 ci-après). Cette argumentation revient à dire que le comportement de DSD, tel que caractérisé à l’article 1er de la décision attaquée, n’a pas d’incidence sur la concurrence et ne constitue donc pas un abus de position dominante au sens de l’article 82 CE.

90      De même, la requérante allègue que le régime de redevance défini par le contrat d’utilisation du logo est justifié par des considérations tirées du décret (voir points 98 à 100 ci-après), du droit des marques (voir points 103 à 114 ci-après) et de la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du système DSD (voir points 115 et 116 ci-après). Ces considérations représenteraient autant de justifications objectives du régime de redevance qui fait l’objet de l’abus caractérisé à l’article 1er de la décision et ce régime ne pourrait, dès lors, pas être considéré comme abusif au regard de l’article 82 CE.

91      Partant, plutôt que d’examiner les conséquences que pourraient avoir les arguments de la requérante sur l’obligation imposée à l’article 3 de la décision attaquée – à savoir, selon DSD, la « licence obligatoire gratuite » – lesquelles relèvent du deuxième moyen consacré à la violation de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17, il convient de limiter l’appréciation du Tribunal dans le cadre du premier moyen – qui vise l’article 82 CE – aux seuls arguments relatifs à l’abus de position dominante caractérisé à l’article 1er de la décision attaquée. En effet, faute d’abus de position dominante au regard de l’article 82 CE, l’article 3 de la décision litigieuse serait sans fondement en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17, puisqu’il n’y aurait plus d’infraction à faire cesser. A contrario, en présence d’un abus de position dominante, la Commission dispose bien, en application de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17, du pouvoir d’obliger l’entreprise concernée à mette fin à l’infraction constatée.

92      C’est dans ce contexte qu’il convient d’exposer les arguments des parties relatifs à l’abus de position dominante caractérisé dans la décision attaquée.

b)     Arguments des parties relatifs à l’abus de position dominante

 i) Sur l’absence de nécessité d’utiliser la marque Der Grüne Punkt pour participer à un système concurrent du système DSD

93      En premier lieu, la requérante soutient qu’une licence obligatoire de sa marque n’est aucunement indispensable, au sens de l’arrêt Magill, précité, pour permettre à un fabricant ou à un distributeur d’emballages d’opter pour un système concurrent (point 50 et arrêt Bronner, précité, point 41). Or, ce sur ce point, dans la décision attaquée, la Commission se contenterait d’indiquer qu’il serait seulement plus « commode et plus simple » d’apposer la marque de DSD sur les emballages pour lesquels il est fait appel à un système concurrent afin d’éviter le surcoût lié au marquage sélectif des emballages (voir considérants 103 à 105 de la décision attaquée). À cet égard, la requérante souligne que, en cas d’utilisation concurrente d’un autre système que le système DSD, le logo Der Grüne Punkt pourrait être apposé ou non sur les emballages, selon le système auquel il est fait appel. Ce procédé serait d’ailleurs utilisé dans le secteur vinicole, où seules sont étiquetées avec la marque de DSD les bouteilles qui sont vendues dans les commerces de détail et qui ne sont pas rapportées au magasin, dans les secteurs de la construction et de l’informatique, où les produits sont vendus dans des emballages portant la marque de DSD en cas de livraisons aux commerces de détail et dans des emballages ne portant pas cette marque en cas de livraisons aux commerces spécialisés ou aux clients professionnels et dans le secteur de l’alimentation, où les grands emballages, les conserves et les cartons n’ont pas d’étiquette revêtue de la marque lorsqu’ils sont livrés à l’industrie, aux restaurants et aux cantines, alors qu’ils en ont une lorsqu’ils sont livrés aux commerces de détail. Les fabricants et distributeurs d’emballages pourraient donc faire en sorte que les emballages revêtus du logo Der Grüne Punkt ne soient déposés que dans les installations du système DSD et que les emballages sur lesquels ne figure pas ce logo ne soient déposés qu’aux endroits où un système concurrent en assure l’élimination.

94      La Commission, Landbell et BellandVision font valoir que le marquage sélectif n’est pas économiquement rentable pour les fabricants et distributeurs d’emballages. Vfw rappelle également que DSD exigeait de ses clients qu’ils payent la redevance pour tous les emballages portant la marque Der Grüne Punkt, et ce indépendamment du fait que ces emballages soient ou non effectivement éliminés par le système DSD.

 ii) Sur l’absence d’élimination de la concurrence en l’absence de licence obligatoire de la marque Der Grüne Punkt

95      En deuxième lieu, la requérante critique la décision attaquée en ce qu’il y est indiqué (considérant 115) que le régime de la redevance rend plus difficile l’entrée sur le marché des concurrents du système DSD, ce qui ne suffirait pas à caractériser l’élimination de la concurrence requise par l’arrêt Magill, précité (point 56, et arrêt Bronner, précité, point 41). En effet, du fait des exigences du décret, les systèmes individuels ne pourraient, en règle générale, concurrencer le système DSD que pour les emballages livrés dans les petites entreprises d’artisanat, de commerce et d’industrie. Sur ce petit segment de marché, il existerait environ 40 systèmes individuels qui n’utiliseraient pas la marque Der Grüne Punkt, et les quantités attribuées à de tels systèmes auraient augmenté de plus de 60 % entre 1997 et 2000. Plusieurs grandes chaînes de distribution seraient également passées à un autre système que le système DSD, ce qui serait donc possible sans difficulté et sans que DSD soit tenue de délivrer une licence obligatoire. Il ne saurait donc être question d’une entrée sur le marché rendue plus difficile.

96      La Commission conteste les données fournies par la requérante qui s’expliqueraient par la réforme de 1998 et le fait qu’il y aurait eu, initialement, très peu d’emballages relevant de systèmes individuels.

 iii) Sur les différentes justifications du comportement de DSD

97      En troisième lieu, la requérante soutient que les dispositions litigieuses du contrat d’utilisation du logo sont nécessaires afin de garantir la réalisation des objectifs du décret, de préserver les différentes fonctions de la marque Der Grüne Punkt – laquelle ne peut, en toute hypothèse, faire l’objet d’une licence obligatoire – et de permettre le bon fonctionnement du système DSD.

–       Sur la nécessité de garantir les objectifs du décret

98      La requérante expose le contenu de l’obligation de transparence liée au principe de responsabilité du produit, qui est consacrée dans le décret sur les emballages et dont l’objet est, selon les observations des autorités allemandes, d’« établir, avec transparence pour les consommateurs et les autorités, quel emballage est soumis à l’obligation de reprise dans le magasin ou à proximité directe et quel emballage ne l’est pas » ( réponse à la question n° 2.a). Ainsi, en cas de recours à un système collectif, l’obligation de transparence prendrait la forme d’une obligation d’étiquetage définie au point 4, paragraphe 2, de l’annexe I de l’article 6 du décret, aux termes duquel « les fabricants et distributeurs doivent indiquer la participation [d’un emballage au système collectif] par étiquetage ou par d’autres mesures appropriées », alors que, en cas d’utilisation d’un système individuel, elle prend la forme de l’obligation d’indication définie à l’article 6, paragraphe 1, troisième phrase, du décret, selon lequel « le distributeur doit signaler au consommateur final privé la possibilité de restitution [des emballages] par des panneaux clairement identifiables et lisibles ». Cette obligation de transparence permettrait de savoir si, pour un emballage donné, le fabricant ou le distributeur responsable de cet emballage remplit ses obligations par le biais d’un système individuel ou par celui d’un système collectif. Cela permettrait également au consommateur de savoir à quel système il doit rapporter cet emballage. Dès lors, un emballage participant au système DSD devrait être repris et valorisé par ce système et à un emballage participant à un autre système collectif ou un système individuel devrait être repris et valorisé par ledit système. Un emballage ne pourrait pas relever de deux systèmes.

99      La requérante expose, ensuite, que l’article 3 de la décision attaquée viole cette obligation de transparence, puisqu’il serait désormais possible que des emballages participant à des systèmes concurrents portent la marque Der Grüne Punkt, qui identifie le système DSD. Or, si tous les emballages portaient cette marque, le consommateur ne pourrait pas savoir lesquels qui devraient être rapportés au point de vente, parce qu’ils relèveraient d’un système individuel, et lesquels qui devraient être déposés à proximité de son domicile, parce qu’ils relèveraient d’un système collectif. À cet égard, la requérante fait observer qu’il est impossible de déterminer avec certitude ex ante si un emballage concret sera effectivement éliminé par le système DSD ou par un autre système et qu’il est également impossible de déterminer, même ex post, qu’un consommateur a effectivement éliminé un emballage par le biais du système DSD (considérant 134 de la décision attaquée). Ce serait justement pour cela qu’il serait précisé dans le décret que le consommateur doit être informé par un étiquetage clair afin de savoir si l’emballage concret en question participe au système DSD et doit, par conséquent, y être apporté.

100    En outre, la requérante soutient que l’obligation de reprise et de valorisation d’un système individuel ne s’applique pas aux emballages participant à un système collectif (voir lettre du ministère de l’Environnement du Land de Bade-Wurtemberg du 27 novembre 2001, p. 7). En effet, selon le décret, de tels emballages seraient « libérés » de cette obligation, parce qu’ils sont attribués au système DSD et portent le logo Der Grüne Punkt. Ces emballages ne pourraient donc pas être repris par un système individuel. Le décret viserait à éviter un « combat pour les déchets », dans lequel des systèmes concurrents chercheraient à collecter n’importe quelles quantités d’emballages afin de pouvoir atteindre leurs taux de valorisation. Une concurrence équitable et ordonnée supposerait plutôt que les différents systèmes ne reprennent et ne valorisent que les emballages pour lesquels ils assument la responsabilité de l’élimination du produit (cas des systèmes individuels) ou reprennent cette responsabilité (cas des systèmes collectifs).

101    Par ailleurs, la requérante fait valoir que la décision attaquée interprète de façon erronée les observations des autorités allemandes, quand elle affirme que le consommateur peut librement décider s’il fait valoriser les emballages par le système DSD ou par un autre système lorsque le fabricant ou le distributeur d’emballages décide de recourir au système DSD en combinaison avec un autre système collectif ou avec un système individuel (considérants 138, 141 et 145 de la décision attaquée). En réponse à une question de la Commission, les autorités allemandes auraient seulement indiqué que, en cas de recours à un système individuel et à un système collectif, le consommateur était libre de choisir de laisser l’emballage dans le magasin, ou de l’y rapporter, ou de le soumettre à une élimination à proximité du domicile, car « le décret sur les emballages ne contient pas d’indications précises obligeant le consommateur final à la restitution » (réponse à la question 1.b.aa). Or, la notion d’élimination à proximité du domicile ne ferait référence qu’à l’élimination par le biais des organismes publics d’élimination des déchets, la « poubelle grise », et non à l’élimination par le biais du système DSD, qui se trouve également à proximité du domicile, la « poubelle jaune ». Le consommateur ne serait donc pas libre de choisir le système d’élimination utilisé.

102    La Commission fait valoir que la requérante exagère l’importance du marquage, dans la mesure où l’obligation de reprise et de valorisation s’applique à des quantités d’emballages et non à des emballages précis. De plus, selon Landbell et BellandVision, le décret n’impose pas que la marque de DSD soit apposée sur les emballages.

–       Sur les justifications relatives au droit des marques

103    En premier lieu, la requérante fait valoir que, dans la décision attaquée, la Commission nie la fonction distinctive – également appelée fonction d’origine – de la marque Der Grüne Punkt, dont l’objectif serait de distinguer les emballages attribués au système DSD de ceux relevant d’un système collectif ou individuel concurrent, en permettant que cette marque soit apposée sur des emballages destinés à être éliminés par un autre système que le système DSD. Or, une telle atteinte à la fonction distinctive de la marque Der Grüne Punkt serait, par principe, contraire aux droits des marques allemand, communautaire et international.

104    Pour ce qui est du droit allemand, la requérante relève que la marque Der Grüne Punkt est enregistrée en Allemagne en tant que marque collective et qu’elle permet donc de « distinguer les marchandises ou services des entreprises affiliées au titulaire de la marque collective de ceux d’autres entreprises en termes d’origine commerciale ou géographique, de sorte, de qualité ou d’autres propriétés » [article 97, paragraphe 1, du Markengesetz du 25 octobre 1994]. Dès lors, une licence obligatoire de la marque Der Grüne Punkt aurait pour effet de priver cette marque de son caractère distinctif et risquerait d’entraîner sa radiation.

105    S’agissant du droit communautaire, la requérante souligne que l’objet spécifique de la marque Der Grüne Punkt, à savoir le fait de garantir à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit marqué (arrêt de la Cour du 10 octobre 1978, Centrafarm, 3/78, Rec. p. 1823, points 11 à 14) et de protéger son titulaire contre des risques de confusion (voir arrêt de la Cour du 30 novembre 1993, Deutsche Renault, C‑317/91, Rec. p. I‑6227, point 30, et la jurisprudence citée), ne serait plus respecté au cas où certains emballages participant au système DSD et d’autres relevant d’un système concurrent sont revêtus indistinctement de la marque Der Grüne Punkt, de sorte que le concurrent de DSD pourrait profiter de la notoriété du système DSD.

106    Par ailleurs, la requérante souligne que l’illicéité de principe des licences obligatoires de marques est consacrée à l’article 5 A de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, du 20 mars 1883, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 et modifiée le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 828, nº 11847, p. 108), ratifiée par tous les États membres, et à l’article 21 de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, du 15 avril 1994 (annexe 1 C de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce), ratifié par tous les États membres et approuvé par la Communauté européenne par la décision 94/800/CE du Conseil du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords de négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1, 214) , qui ne prévoient pas de licences obligatoires pour les marques.

107    La Commission relève que la décision attaquée ne concerne que le régime de redevance mis en place par DSD et non les effets présumés de la décision sur son activité en tant que titulaire de la marque Der Grüne Punkt. À cet égard, le seul effet de la décision serait d’éviter que les entreprises qui font appel au système DSD payent une double redevance en cas d’utilisation d’un autre système. Landbell et BellandVision soulignent également que la décision attaquée ne concerne que les rapports juridiques entre DSD et ses cocontractants, dans le cadre du contrat d’utilisation du logo, et ne donne pas à des tiers, qui ne seraient pas cocontractants, le droit d’utiliser la marque Der Grüne Punkt.

108    En second lieu, la requérante soutient que la décision attaquée méconnaît la fonction distinctive de la marque Der Grüne Punkt, qui permet d’influencer le comportement du consommateur en matière d’élimination des déchets d’une manière essentielle au fonctionnement de son système. En effet, si le consommateur ne remet pas l’emballage portant le logo Der Grüne Punkt dans le système DSD, la requérante risque de ne plus atteindre les taux de valorisation prévus dans le décret et de perdre son agrément. De même, si le consommateur remet dans le système DSD un emballage sur lequel n’est pas apposé le logo Der Grüne Punkt, la requérante reste tenue de valoriser cet emballage même si les taux imposés sont déjà atteints (voir point 1, paragraphe 5, première phrase, de l’annexe I de l’article 6 du décret).

109    Dans ce contexte, la requérante critique l’affirmation qui figure aux considérants 138, 139 et 145 de la décision attaquée, selon laquelle la fonction essentielle du logo Der Grüne Punkt serait remplie dès lors que celui-ci signale au consommateur qu’il a la possibilité de faire éliminer l’emballage par DSD, en ce qu’elle repose sur une citation hors contexte de l’arrêt du Kammergericht Berlin de 1994 (note 22 de la décision attaquée). En effet, le passage cité dans la décision se limiterait à constater que la marque Der Grüne Punkt ne contient pas d’affirmation relative au caractère recyclable de l’emballage. Or, dans un autre passage de l’arrêt, le Kammergericht reconnaîtrait la fonction d’appel de la marque Der Grüne Punkt en jugeant que des suremballages pouvaient faire figurer cette marque pour des motifs environnementaux supérieurs, bien qu’il y ait, dans un certain sens, tromperie à l’égard du consommateur.

110    De même, la requérante conteste également l’affirmation contenue dans la décision attaquée, selon laquelle le consommateur peut librement décider s’il fait valoriser l’emballage en question par le système DSD ou par un système individuel ou collectif concurrent (considérant 145 de la décision attaquée), étant donné qu’il est fondamental que le consommateur puisse identifier, par le biais de la marque Der Grüne Punkt, le fait que l’emballage en cause relève du système DSD et non d’un autre système. À cet égard, la requérante soutient que la fonction distinctive de sa marque est confirmée par des enquêtes d’opinion réalisées pour la préparation de la réplique. Ainsi, 60,8 % des consommateurs interrogés comprendraient la marque Der Grüne Punkt comme une « indication quant à une organisation tout à fait spécifique qui est responsable de l’élimination et la valorisation de tels emballages » et 27,9 % de ces consommateurs citeraient concrètement le système DSD (voir résultats de l’enquête réalisée par l’institut Infratest Burke, rapport daté d’août 2001, annexe 85 à la réplique), ce qui démontrerait le lien existant entre la marque et le système DSD dans l’esprit des consommateurs. Selon une autre enquête d’opinion, réalisée par le même institut, seulement 3,3 % des consommateurs interrogés indiqueraient que la marque véhicule l’information qui lui est attribuée dans la décision attaquée, à savoir l’indication d’une possibilité d’élimination (voir résultats de l’enquête réalisée par l’institut Infratest Burke, rapport daté d’août 2001, annexe 86 à la réplique).

111    Enfin, la requérante fait valoir que le fait d’apposer la marque Der Grüne Punkt sur un emballage participant à un système concurrent porte atteinte à la fonction distinctive de cette marque, puisque les consommateurs sont trompés dans tous les cas de figure envisagés dans la décision attaquée. En effet, pour la requérante, même en cas de recours à plusieurs systèmes, le consommateur doit toujours pouvoir déterminer pour chaque emballage le système auquel il doit faire appel, qu’il s’agisse du système DSD – via la marque Der Grüne Punkt –, d’un autre système collectif – via un moyen conforme au point 4, paragraphe 2, de l’annexe I de l’article 6 du décret – ou d’un système individuel – via un moyen conforme à l’article 6, paragraphe 1, du décret. Ainsi, en cas d’utilisation concurrente d’un système individuel et du système DSD, près de 48,4 % des consommateurs interrogés dans le cadre d’une des enquêtes d’opinion précitées ne comprendraient pas les informations contradictoires représentées, d’une part, par l’indication d’une reprise en magasin conformément à l’article 6, paragraphe 1, du décret, et, d’autre part, par l’indication transmise par le logo Der Grüne Punkt d’une reprise à proximité du domicile par le biais du système DSD.

112    Plus largement, la requérante fait valoir que la décision attaquée aboutira à ce que presque tous les emballages portent en Allemagne la marque Der Grüne Punkt. Ainsi, la participation au système DSD à hauteur de 1 % des emballages commercialisés pourrait permettre à un utilisateur du logo d’utiliser gratuitement cette marque pour les 99 % restant. Le système DSD risquerait donc, à court terme, d’avoir à traiter des emballages apportés par erreur à son système et pour lesquels DSD ne percevrait pas de redevance. De plus, et presque simultanément, compte tenu de la limitation de la signification de la marque Der Grüne Punkt à une simple possibilité d’élimination, les résultats de la collecte du système DSD devraient reculer et elle risquerait de ne plus atteindre les taux légaux de valorisation.

113    Par ailleurs, la requérante fait valoir que la marque Der Grüne Punkt remplit également une fonction de contrôle qui permet de prévenir et de poursuivre les abus commis par les fabricants et les distributeurs d’emballages qui utilisent le système DSD sans payer de redevance par le biais de contrôles effectués dans les magasins, de contrôles par tri ou de contrôles par les autorités. À cet égard, la décision attaquée rendrait plus difficile une protection effective contre le problème des profiteurs qui avait failli mener DSD à la faillite en 1993.

114    La Commission, soutenue par les parties intervenantes, rappelle que, en l’absence de tromperie ou de confusion, la fonction d’origine d’une marque, qui sert à distinguer ou à individualiser l’origine d’une marchandise ou d’un service, n’est pas affectée. Or, en l’espèce, la perception de la marque Der Grüne Punkt par le consommateur final achetant des biens de consommation et recourant à différents systèmes pour en éliminer les emballages, se résumerait à l’indication qu’il est possible d’assurer l’élimination de l’emballage par le système de la requérante. De plus, la marque Der Grüne Punkt ne jouerait pas un rôle déterminant lors de la collecte des emballages, étant donné que les poubelles jaunes et les conteneurs de verre et de papier utilisés par le système DSD sont loin de porter l’indication de cette marque dans toutes les zones de collecte. Ce serait d’ailleurs pour cette raison que les consommateurs n’associeraient pas les bacs de collecte avec le logo, mais avec le type de matériau concerné.

–       Sur le bon fonctionnement du système DSD

115    Après avoir initialement fait valoir que les dispositions litigieuses relatives à la redevance étaient proportionnées aux services rendus, dans la mesure où la rémunération forfaitaire de l’autorisation d’utiliser la marque Der Grüne Punkt et de la mise à disposition du système DSD constituait la seule solution praticable faute de pouvoir déterminer exactement le nombre d’emballages concrètement apportés au système DSD, la requérante a fait valoir, au stade de la réplique, que la redevance due au titre des dispositions litigieuses ne valait que pour les emballages pour lesquels il était fait appel au système DSD. Ainsi, la licence conférée par DSD au titre du contrat d’utilisation du logo ne vaudrait que pour les emballages participant au système DSD et non pour ceux relevant d’un autre système collectif ou d’un système individuel. Une telle restriction de la licence aux emballages portant le logo Der Grüne Punkt serait conforme au décret, qui exigerait un étiquetage clair des emballages participant à un système collectif afin d’indiquer que le fabricant ou le distributeur concerné est « libéré » de l’obligation de reprendre et de valoriser ces emballages, laquelle relèverait désormais de la responsabilité de DSD [ordonnance du Verwaltungsgerichtshof Kassel (tribunal administratif supérieur de Kassel, Allemagne) du 20 août 1999]. Or, un tel système ne pourrait pas fonctionner si les emballages pour lesquels il n’était pas fait appel au système DSD portaient également le logo identifiant ce système. Aucune disposition du contrat d’utilisation du logo ne permettrait ou n’obligerait donc l’utilisateur du logo à apposer la marque Der Grüne Punkt sur les emballages pour lesquels il ne ferait pas appel au système DSD et il n’existerait pas de déséquilibre entre la prestation de DSD (la reprise et la valorisation des emballages) et la redevance demandée en contrepartie.

116    S’agissant de la référence faite par la Commission à l’arrêt du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), du 15 mars 2001, rendu dans l’affaire BäKo, la requérante relève que, dans cet arrêt, le Bundesgerichtshof n’a pas jugé que les dispositions contractuelles relatives à la redevance n’étaient pas appropriées. Au contraire, il constaterait que la requérante ne peut pas réclamer l’intégralité de la redevance au titre de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 5, paragraphe 1, du contrat d’utilisation du logo pour les emballages qui ne relèvent pas de sa compétence légale, à savoir ceux relevant de l’industrie et des grandes entreprises. En effet, dans cette hypothèse, qui n’est pas visée dans la décision attaquée (note 14 de la décision attaquée), la requérante n’avait pas fourni le service de prise en charge des obligations auquel il avait été fait appel. Or, dans la présente affaire, les emballages en cause porteraient la marque Der Grüne Punkt et tomberaient indiscutablement dans le champ de compétence de DSD, c’est-à-dire qu’ils seraient déposés chez les consommateurs finaux privés auprès desquels DSD fournirait le service de prise en charge des obligations de traitement et de valorisation des emballages, et ce même lorsque les consommateurs apporteraient l’emballage par erreur à un système public d’élimination des déchets ou à un système concurrent de collecte et de valorisation des emballages.

117    La Commission souligne que, en cas de recours au système DSD et à un autre système collectif ou à un système individuel, la relation entre la prestation effectuée par DSD et la redevance demandée en contrepartie serait déséquilibrée si elle se limitait à prendre en considération l’apposition, sur l’emballage, du logo Der Grüne Punkt, parce qu’un tel système ne tiendrait pas compte de la réalité du service fourni aux entreprises adhérentes.

118    Par ailleurs, la Commission relève que l’argumentation présentée par la requérante dans la réplique, selon laquelle la redevance s’appliquerait uniquement aux emballages traités par son système, est contraire à sa pratique antérieure. À cet égard, la Commission invoque, d’une part, l’arrêt BäKo (point 116 ci-dessus), dans lequel le Bundesgerichtshof a jugé que, contrairement à ce qu’affirmait DSD, aucune créance ne pouvait être détenue par cette entreprise contre l’un de ses clients en ce qui concernait les emballages portant la marque Der Grüne Punkt qui étaient livrés à des preneurs professionnels. D’autre part, la Commission se réfère à l’affaire Hetzel, dans laquelle DSD invoquait le contrat d’utilisation du logo pour s’opposer à la demande de l’un de ses clients d’être remboursé de la part de la redevance correspondant aux emballages pour lesquels DSD n’était pas en mesure d’assurer un service de prise en charge de l’obligation d’élimination [arrêt de l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne), du 11 août 1998, affaire Hertzel, qui a fait l’objet d’un pourvoi devant le Bundesgerichtshof].

c)     Appréciation du Tribunal

 i) Sur l’abus caractérisé dans la décision attaquée

119    Selon la décision attaquée, le comportement de DSD consistant à exiger le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt, alors même que la preuve est rapportée que, en ce qui concerne la quantité d’emballages pour laquelle le fabricant ou le distributeur ne recourt pas au système DSD, les obligations de reprise et de valorisation prévues dans le décret sont remplies par le biais d’un autre système collectif ou d’un système individuel, est un abus de position dominante (voir point 58 ci-dessus). Les effets de cet abus sont, selon la décision attaquée doubles, et caractérisent tout à la fois un abus d’exploitation des clients de DSD, du fait de la disproportion entre la rémunération exigée et le service réalisé, et une barrière à l’entrée de concurrents proposant des solutions alternatives au système DSD, compte tenu des coûts liés à l’utilisation conjointe d’un autre système que le système DSD (voir point 50 ci-dessus).

120    À cet égard, il convient de rappeler que la notion d’exploitation abusive est une notion objective qui vise les comportements d’une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure d’un marché où, en raison, précisément, de la présence de l’entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli et qui ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou services sur la base des prestations des opérateurs économiques, au maintien du degré de concurrence existant encore sur le marché ou au développement de cette concurrence (arrêt de la Cour du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche/Commission, 85/76, Rec. p. 461, point 91).

121    En particulier, il ressort de l’article 82, paragraphe 2, sous a), CE qu’une telle pratique abusive peut notamment consister à imposer de façon directe ou indirecte des prix ou des conditions de transactions non équitables. Ainsi, il y a exploitation abusive lorsqu’une entreprise en position dominante exige pour ses services des redevances disproportionnées par rapport à la valeur économique de la prestation fournie (arrêts de la Cour du 13 novembre 1975, General Motors/Commission, 26/75, Rec. p. 1367 ; du 14 février 1978, United Brands/Commission, 27/76, Rec. p. 207, points 235 à 268, et du 11 novembre 1986, British Leyland/Commission, 226/84, Rec. p. 3263, points 27 à 30).

122    De même, une entreprise en position dominante peut entraver de manière abusive l’entrée de concurrents, en liant, en droit ou en fait, les acheteurs à ses services et en les empêchant ainsi de s’approvisionner auprès de fournisseurs concurrents (voir, en ce sens, arrêt Hoffmann-La Roche/Commission, précité, point 90).

 ii) Sur l’exclusivité revendiquée par la requérante

123    Dans ce contexte, le principal argument avancé par la requérante dans son recours est que la concurrence entre les systèmes ne peut s’effectuer qu’en considération, d’une part, du fait que le fabricant ou le distributeur concerné transfère à DSD les emballages pour lesquels il souhaite être libéré de l’obligation de reprise et de valorisation imposée dans le décret et, d’autre part, du fait que le consommateur final doit pouvoir clairement identifier les emballages qu’il peut remettre au système DSD et ceux qu’il peut remettre à un autre système collectif ou à un système individuel (voir point 115 ci-dessus).

124    La marque Der Grüne Punkt permettrait ainsi, tout à la fois, d’indiquer quels sont les emballages transférés à DSD, et donc libérés des obligations de reprise et de valorisation qui incombent au fabricant et au distributeur, et de signaler au consommateur ce qu’il doit en faire, ce qui permettrait de garantir la réalisation de la mission confiée à DSD par ce fabricant ou ce distributeur d’emballages. En conséquence, seuls les emballages pour lesquels il est fait appel au système DSD devraient être marqués du logo Der Grüne Punkt correspondant à ce système, puisqu’il s’agit des emballages pour lesquels la requérante dispense contractuellement et légalement le fabricant ou le distributeur concerné de son obligation de reprise et de valorisation au titre du décret. De plus, le fait que l’emballage en cause ne fasse l’objet que d’une seule indication quant au système de reprise et de valorisation à utiliser permettrait d’influencer le comportement du consommateur final, qui, ainsi, ne serait pas trompé par d’autres indications lui demandant de rapporter cet emballage à un autre système.

125    Sur la base de cette argumentation, la requérante fait valoir que son régime de redevance ne constitue pas un abus au regard de l’article 82 CE, étant donné que ce régime limite la rémunération due en contrepartie de la prestation de reprise et de valorisation par le biais du système DSD aux seuls emballages portant le logo Der Grüne Punkt pour lesquels le fabricant ou le distributeur d’emballages a demandé à être libéré de ses obligations au titre du décret. À titre d’exemple, cela signifierait que, si un fabricant ou un distributeur d’emballages décidait de commercialiser 100 emballages en Allemagne et de confier la reprise et la valorisation de la moitié de ces emballages à DSD, il devrait apposer le logo Der Grüne Punkt sur 50 emballages pour indiquer au consommateur que ces 50 emballages sont destinés à être repris et valorisés par DSD à laquelle il a confié la responsabilité de traiter ces emballages. Si ce fabricant ou distributeur décidait d’apposer le logo sur les 100 emballages qu’il commercialise, il devrait alors payer une redevance calculée sur cette base – et ce même si, concrètement, seulement 50 emballages se retrouvaient dans le système DSD – étant donné que DSD se retrouverait potentiellement obligée de reprendre et de valoriser les 100 emballages portant le logo Der Grüne Punkt qui lui ont été confiés en application du décret. L’étendue de la redevance versée en vertu du contrat d’utilisation du logo dépendrait ainsi du nombre d’emballages portant le logo Der Grüne Punkt.

126    Pour autant, la requérante ne conteste pas le fait que le fabricant ou le distributeur d’emballages peut combiner le système DSD avec un autre système collectif ou avec un système individuel afin, notamment, d’éviter de payer un service qui ne serait pas concrètement assuré par le système DSD (voir point 46 ci-dessus). Cependant, dans une telle hypothèse, la requérante soutient que ce fabricant ou distributeur devrait être à même – avant de remettre le produit au consommateur final – de distinguer les emballages pour lesquels il fait appel au système DSD de ceux pour lesquels il fait appel à un autre système. Pour reprendre l’exemple précité, cela signifierait que, pour l’autre moitié des 100 emballages mis sur le marché, le fabricant ou le distributeur devrait faire apparaître la participation à un autre système collectif que le système DSD par une mention sur l’emballage ou toute autre mesure appropriée ou veiller, en cas de recours à un système individuel, à ce que le distributeur signale au consommateur final la possibilité de restitution de l’emballage au point de vente. En tout état de cause, la requérante estime que le logo Der Grüne Punkt ne pourrait pas être apposé sur les 50 emballages pour lesquels ce fabricant ne ferait pas appel au système DSD.

127    À suivre l’argumentation de la requérante, le logo Der Grüne Punkt serait exclusif et il ne pourrait pas être utilisé conjointement avec une autre indication susceptible d’identifier un système concurrent du système DSD. Les emballages marqués du logo Der Grüne Punkt relèveraient exclusivement de son système et ne pourraient pas être pris en compte par un autre système.

128    Pour étayer cette argumentation et contester le contenu de la décision attaquée, la requérante invoque tant la manière dont s’exerce la concurrence (voir point 93), laquelle pourrait se dérouler sur la base d’un marquage exclusif des emballages en considération du système utilisé (voir point 95), que le décret (voir points 98 à 100), le droit des marques (voir points 103 à 113) et les nécessités propres au fonctionnement du système DSD (voir points 115 et 116), qui imposeraient ledit marquage exclusif en cas d’utilisation du système DSD.

 iii) Sur les modalités de fonctionnement des systèmes mixtes

129    L’examen de l’argumentation de la requérante oblige le Tribunal à en vérifier les prémisses. Il importe, notamment, d’établir si, comme l’affirme la requérante, le fabricant ou le distributeur d’emballages transfère à DSD un nombre déterminé d’emballages destinés à être revêtus du logo Der Grüne Punkt et si, ce que conteste la requérante, les emballages confiés à DSD peuvent relever en même temps d’un autre système de reprise et de valorisation que le système DSD.

130    Lors de l’audience, les parties ont été interrogées sur les modalités de fonctionnement des systèmes mixtes afin de permettre au Tribunal de savoir quel était le rôle de l’emballage en tant que tel, et, plus particulièrement, de l’emballage portant le logo Der Grüne Punkt, dans la réalisation des obligations de reprise et de valorisation imposées dans le décret. Cet exposé contradictoire permet au Tribunal d’opérer les constatations suivantes.

131    Premièrement, il y a lieu de relever que les taux de valorisation établis à l’annexe I de l’article 6 du décret sur les emballages sont calculés en pourcentage de la masse de matière commercialisée effectivement reprise et valorisée et non en fonction du nombre ou du type d’emballages concernés, qu’ils soient revêtus ou non d’un logo identifiant un système collectif. Le point 1, paragraphe 1, de l’annexe I de l’article 6 du décret énonce ainsi que les fabricants et les distributeurs d’emballages doivent satisfaire aux exigences relatives à la valorisation des emballages qu’ils ont commercialisés et qu’il en est de même pour ce qui est des opérateurs de systèmes collectifs en ce qui concerne les emballages pour lesquels les fabricants ou les distributeurs participent à de tels systèmes. À cet égard, il est précisé au point 1, paragraphe 2, de l’annexe I de l’article 6 du décret que les quantités d’emballages pertinentes sont déterminées « en pourcentage de la masse », qu’il s’agisse des emballages commercialisés par le fabricant ou le distributeur ou de ceux pour lesquels le fabricant ou le distributeur participe à un système collectif. De plus, depuis le 1er janvier 2000, les systèmes individuels et les systèmes collectifs sont soumis aux mêmes taux de valorisation par matière (considérant 19 de la décision attaquée).

132    Deuxièmement, il découle de ce qui précède que la répartition des quantités d’emballages entre les différents systèmes, décidée par le fabricant ou le distributeur d’emballages, ne porte pas sur des quantités d’emballages prédéfinies, mais sur les masses de matière qui correspondent à ces emballages. En pratique, cela signifie que, lorsqu’un fabricant d’emballages décide de confier à DSD la reprise et la valorisation de la moitié des emballages en matière plastique qu’il commercialise en Allemagne, DSD se voit confier le soin de reprendre et de valoriser une quantité de matière correspondant à la moitié de ces emballages. Pour satisfaire aux taux de valorisation prévus dans le décret, DSD doit donc démontrer aux autorités allemandes avoir soumis à valorisation 60 % de la masse de plastique qui lui a été confiée par ce fabricant (60 % étant le taux de valorisation applicable au plastique). De même, si le fabricant peut démontrer s’être déchargé sur DSD de son obligation de reprise et de valorisation en ce qui concerne la moitié de la quantité de plastique commercialisée, il devra, par ailleurs, prouver qu’il a repris et valorisé la quantité de matière restante, correspondant à l’autre moitié, par le biais d’un système individuel ou d’un autre système collectif.

133    Troisièmement, dès que les taux de valorisation prévus dans le décret sont atteints et que la répartition des quantités d’emballages entre systèmes s’opèrent sur la base des masses de matières concernées et non en fonction des emballages en tant que tels, qu’ils soient ou non revêtus du logo Der Grüne Punkt, ce dernier n’a pas le rôle et l’importance que lui prête la requérante. Ainsi, un fabricant ou un distributeur d’emballages qui décide de confier à DSD la reprise et la valorisation d’une partie des emballages qu’il commercialise en Allemagne et d’assurer la reprise et la valorisation de l’autre partie de ces emballages soit lui-même, par le biais d’un système individuel, soit en la confiant à un autre système collectif doit seulement répartir les quantités de matières entre les différents systèmes concernés sans se préoccuper de définir concrètement le comportement du consommateur final, contrairement à ce qu’affirme la requérante.

134    Pour reprendre l’exemple concret d’une chaîne de restauration rapide, évoqué lors de l’audience, cela signifie que, lorsque le consommateur final achète un sandwich vendu dans un emballage destiné à conserver la chaleur, ce consommateur peut librement décider de consommer le produit sur place et de remettre l’emballage dans les poubelles mises en place par la chaîne de restauration rapide, dans le cadre de son système individuel, ou d’emporter ce produit chez lui pour remettre par la suite l’emballage dans les installations de collecte de DSD situées à proximité de son domicile. Cet emballage peut donc être remis dans les deux systèmes de collecte et de valorisation proposés par la chaîne de restauration rapide pour satisfaire aux obligations prévues dans le décret.

135    Contrairement à ce qu’allègue la requérante (voir point 112), le fait que l’emballage en cause soit éventuellement revêtu du logo Der Grüne Punkt, alors même qu’il peut être repris et valorisé par un autre système, ne porte pas atteinte au bon fonctionnement du système DSD, étant donné que ce qui importe, dans la relation contractuelle entre la requérante et le fabricant ou le distributeur d’emballages, est de garantir que les quantités de matière à valoriser mises sur le marché soient effectivement reprises et valorisées pour atteindre les taux prévus dans le décret. Or, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, la satisfaction de ces taux pour le système DSD ne repose pas sur le fait de savoir si l’emballage en cause porte ou non le logo Der Grüne Punkt.

136    Aussi, dans le cas où une chaîne de restauration rapide commercialise 100 tonnes de plastique sur une année donnée et où elle sait, au vu des résultats de l’année antérieure, que 50 de ces 100 tonnes se retrouvent dans son propre système individuel, elle doit faire appel à un système collectif pour démontrer que les 50 autres tonnes de plastique mises sur le marché seront reprises et valorisées conformément aux obligations du décret. Si le comportement des clients de cette chaîne de restauration rapide est conforme à cette répartition des quantités, soit 50 tonnes de plastique à reprendre et à valoriser par le biais d’un système individuel et 50 autres tonnes de plastique à reprendre et à valoriser par le bais d’un système collectif, les taux de valorisation des différents systèmes en cause seront atteints.

137    Si, toutefois, le comportement des clients de cette chaîne n’est pas conforme à la répartition anticipée des quantités, alors des mécanismes de correction seront mis en œuvre afin de prendre en compte cette réalité. Par exemple, si seulement 10 tonnes de plastique se retrouvent dans le système individuel, la chaîne de restauration rapide devra alors racheter les 40 tonnes de plastique manquantes auprès des systèmes qui se trouvent en situation de surplus pour avoir, précisément, dû reprendre et valoriser 40 tonnes de plastique supplémentaires. De même, si 90 tonnes de plastique se retrouvent dans le système individuel, la chaîne de restauration rapide pourra demander la réduction de sa redevance auprès du système collectif concerné, dans la mesure où cette chaîne aura démontré qu’elle a repris et valorisé 40 des 50 tonnes qui lui avait été confiées. Ces possibilités de rectification permettent de garantir que chaque système satisfait aux obligations prescrites dans le décret tout en étant rémunéré en fonction du service effectivement fourni.

138    De telles possibilités de rectification des quantités de matière attribuées contractuellement en fonction des résultats concrets de la collecte et de la valorisation existent également dans le cas où un fabricant ou un distributeur d’emballage décide d’avoir recours à deux ou à plusieurs systèmes collectifs, tel le système DSD et le système Landbell. À titre incident, il convient, d’ailleurs, de relever que ces possibilités de rectification ont été concrétisées dans un accord de compensation, invoqué lors de l’audience, qui permet aux différents gestionnaires de systèmes de partager les quantités de matière valorisées par les entreprises de collecte auxquels ils font appel en considération des quantités de matière pour lesquelles ils sont responsables au titre des contrats signés avec les fabricants et les distributeurs d’emballages.

139    En conséquence, il ressort de ce qui précède que le fabricant ou le distributeur d’emballages ne transfère pas à DSD un nombre déterminé d’emballages destinés à être revêtus du logo Der Grüne Punkt, mais plutôt une quantité de matière que ce fabricant ou ce distributeur va commercialiser en Allemagne et dont il entend confier au système DSD la reprise et la valorisation. Il est donc possible pour un fabricant ou un distributeur d’emballages de faire appel à des systèmes mixtes pour se conformer aux taux de valorisation fixés dans le décret.

 iv) Sur les critiques de la requérante relatives à l’analyse exposée dans la décision attaquée

140    Cet exposé des modalités pratiques de fonctionnement des systèmes mixtes permet d’apprécier la portée des critiques de la requérante relatives à l’analyse exposée dans la décision attaquée.

141    À titre liminaire, il convient de rappeler que seules les dispositions du contrat d’utilisation du logo relatives à la redevance sont qualifiées d’abusives par la décision attaquée (à savoir l‘article 4, paragraphe 1, et l’article 5, paragraphe 1, du contrat). La décision attaquée ne critique donc pas le fait que l’article 3, paragraphe 1, du contrat impose au fabricant ou au distributeur qui souhaite utiliser le système DSD d’apposer le logo Der Grüne Punkt sur chaque emballage notifié et destiné à la consommation intérieure. En revanche, la Commission considère comme abusif le comportement de DSD consistant à exiger le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec ledit logo alors que la preuve est rapportée que certains de ces emballages ont été repris et valorisés par un autre système collectif ou par un système individuel.

–       Sur l’absence de nécessité d’apposer le logo Der Grüne Punkt sur tous les emballages en cas de recours à un système mixte du fait de la possibilité d’utiliser un marquage sélectif en fonction du système utilisé

142    En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel il ne serait pas nécessaire que le logo Der Grüne Punkt figure sur l’emballage en cas de recours à un système mixte, compte tenu de la possibilité d’apposer ou non la marque Der Grüne Punkt sur les emballages en fonction du système auquel il est fait appel, il ressort de ce qui précède qu’aucune disposition du décret n’impose le marquage sélectif des emballages.

143    De plus, ainsi qu’il est exposé dans la décision attaquée (considérants 103 à 107 de la décision attaquée), le marquage sélectif des emballages en fonction du système utilisé aurait pour conséquence d’entraîner un surcoût significatif pour les fabricants et les distributeurs qui souhaiteraient commercialiser un emballage uniforme en Europe ou recourir à des systèmes mixtes, du fait de la nécessité d’intervenir au stade de la ligne d’emballages et de contrôler sa commercialisation jusqu’au stade de la remise au consommateur final. En outre, de tels efforts risquent d’être vains, compte tenu du fait que c’est le consommateur final et non le fabricant ou le distributeur qui décide du lieu de reprise et de valorisation de l’emballage. En tout état de cause, dans son argumentation, la requérante ne conteste pas que le marquage sélectif a pour effet de dissuader les fabricants et les distributeurs d’emballages de faire appel à d’autres systèmes que le système DSD, ce qui constitue, précisément, l’un des effets du comportement de DSD qualifié d’abusif dans la décision attaquée (considérants 114 et 115 de la décision attaquée).

144    Au demeurant, il y a lieu de relever que les exemples de marquages sélectifs cités par la requérante ne relèvent pas du champ d’application de la décision attaquée, dans la mesure où ils concernent des secteurs pour lesquels une partie des emballages en cause, celle qui est destinée à des clients professionnels, est située en dehors du domaine d’intervention de la requérante, qui s’occupe d’emballages destinés au consommateur final.

145    Force est donc de constater que la solution du marquage sélectif, préconisée par la requérante, n’est pas imposée dans le décret et ne permet pas de mettre fin à l’abus caractérisé dans la décision attaquée.

–       Sur les arguments pris de l’absence d’élimination de la concurrence

146    En deuxième lieu, s’agissant des arguments de la requérante selon lequel la concurrence n’est pas éliminée par le comportement litigieux de DSD étant donné que les quantités d’emballages attribuées aux systèmes individuels ont augmenté de 60 % entre 1997 et 2000 et que certains clients de DSD sont passés de son système à un autre système collectif (voir point 95 ci-dessus), il convient de relever que ces données n’envisagent pas le cas des systèmes mixtes utilisant en partie le système DSD et, en partie, un autre système collectif ou un système individuel.

147    De plus, l’augmentation des quantités attribuées aux systèmes individuels citée par la requérante n’apparaît pas déterminante au vu des données communiquées par la Commission dans la duplique, dans la mesure où très peu d’emballages étaient effectivement pris en charge par des systèmes individuels en 1997 et que seulement 333 000 tonnes ont été collectées par des systèmes individuels en 2000, soit seulement 6 % des 5,5 millions de tonnes collectées par le système DSD cette année-là.

148    En tout état de cause, ces données ne peuvent suffire à remettre en cause l’appréciation de la Commission, dans la décision attaquée, en ce qui concerne le caractère abusif, au regard de l’article 82 CE, du comportement de DSD, qui consiste à exiger le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt, alors même que la preuve est rapportée que certains de ces emballages ont été repris et valorisés par un autre système collectif ou par un système individuel.

149    L’argument pris du développement des systèmes individuels et du passage de certains clients du système DSD à un autre système collectif doit donc être rejeté.

–       Sur la nécessité de garantir les objectifs du décret

150    En troisième lieu, pour ce qui est de la nécessité de garantir les objectifs du décret en permettant à la requérante d’imposer que les emballages qui sont confiés au système DSD soient exclusivement revêtus du logo Der Grüne Punkt (voir points 98 à 100 ci-dessus), il ressort de l’exposé des modalités pratiques du fonctionnement des systèmes mixtes qu’une telle exclusivité n’est pas imposée dans le décret en cas de recours à des systèmes mixtes. De plus, l’examen de ces modalités pratiques permet d’établir que le logo n’a pas l’incidence que lui prête la requérante, étant donné que les taux de valorisation qui doivent être atteints pour respecter les obligations de reprise et de valorisation énoncées dans le décret sont calculés en fonction de la matière collectée et non en fonction de la marque apposée sur les emballages.

151    À cet égard, s’agissant de la détermination du rôle joué par le consommateur final, il importe de relever que la requérante s’accorde à reconnaître qu’il est impossible de déterminer avec certitude ex ante si un emballage concret sera effectivement éliminé par le système DSD. De plus, la requérante ne peut valablement contester que, en réponse à une question de la Commission qui souhaitait savoir s’il était exact que, « d’après le décret sur les emballages, le consommateur est libre de choisir s’il laisse l’emballage dans le magasin ou s’il l’y rapporte, ou s’il le soumet à l’élimination à proximité du domicile », les autorités allemandes ont répondu que « le décret ne contient pas d’indications précises obligeant le consommateur final à la restitution » et que « la supposition contenue dans la question de la Commission est donc correcte » (voir observations des autorités allemandes, réponse à la question 1.b.aa; reprise dans la décision attaquée, considérant 20 en bas de page n° 8. Sur ce point, la requérante ne peut alléguer que la notion d’« élimination à proximité du domicile » vise l’élimination par le bais du système public d’élimination des déchets et non le recours à un système collectif, étant donné qu’il ressort clairement de l’intitulé de la question n° 1 posée par la Commission, qui porte sur les moyens de respecter les taux de valorisation prévus dans le décret, et du contenu des observations des autorités allemandes en réponse à la question n° 1, sous a), qui précise que la collecte à proximité du consommateur final s’effectue par le bais d’un système collectif, que cette notion renvoie à un système collectif au sens de l’article 6, paragraphe 3, du décret.

152    En conséquence, aucun argument présenté par la requérante ne permet de remettre en cause la décision attaquée en ce qu’il y est indiqué que le décret laisse au consommateur final la liberté de décider, en cas de système mixte, à quel système il rapporte l’emballage (considérants 138, 141 et 145 de la décision attaquée)

153    Par ailleurs, pour ce qui est de la possibilité d’indiquer au consommateur qu’un emballage peut être repris et valorisé par plusieurs systèmes, il ressort de la décision attaquée (considérants 141 et 145 de la décision attaquée) que les différents modes de publicité prévus dans le décret – à savoir l’étiquetage ou tout autre moyen approprié pour les systèmes collectifs (point 4, paragraphe 2, de l’annexe I de l’article 6 du décret) et le signalement de la possibilité de restitution de l’emballage au point de vente pour les systèmes individuels (article 6, paragraphe 1, troisième phrase, du décret) – permettent d’informer le consommateur final des différentes possibilités de restitution proposées pour l’emballage en cause sans pour autant valider l’argumentation de la requérante, selon laquelle l’apposition du logo Der Grüne Punkt sur un emballage aurait pour effet d’empêcher la reprise et la valorisation par un autre système que le système DSD.

154    À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il n’est pas précisé dans le décret que le logo Der Grüne Punkt ne peut pas figurer sur les emballages collectés dans le cadre d’un système collectif concurrent ou d’un système individuel s’ils respectent, par ailleurs, les conditions imposées dans le décret pour identifier le système utilisé en combinaison avec le système DSD. De telles indications peuvent être cumulatives et un même emballage peut ainsi relever de plusieurs systèmes en même temps. C’est en ce sens que la Commission interprète, à juste titre, le contenu de l’obligation de transparence définie par les autorités allemandes dans leur observations, selon lesquelles il convient de définir clairement, tant à l’intention des consommateurs que des autorités, quels sont les emballages soumis à l’obligation de reprise aux points de vente ou à proximité immédiate de ceux-ci et quels sont ceux qui ne sont pas soumis à cette obligation (voir observations des autorités allemandes, réponse à la question 2.a, dernière phrase; considérants 20, 141 et 142 de la décision attaquée).

155    Les arguments relatifs à la nécessité de garantir les objectifs du décret doivent donc être rejetés.

–       Sur les justifications relatives au droit des marques

156    En quatrième lieu, s’agissant des arguments de la requérante relatifs au droit des marques (voir points 103 à 113 ci-dessus), il y a lieu de relever que le fait que le logo Der Grüne Punkt et l’indication d’un « moyen approprié » désignant un autre système collectif au sens du point 4, paragraphe 2, de l’annexe I de l’article 6 du décret figurent sur un même emballage, en cas d’utilisation conjointe de deux systèmes collectifs, et le fait qu’apparaisse sur un même emballage le logo Der Grüne Punkt et l’indication d’une possibilité de restitution au magasin, en cas d’utilisation conjointe du système DSD et d’un système individuel, ne portent pas atteinte à la fonction essentielle de la marque DSD (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 5 octobre 1988, Volvo, 238/87, Rec. p. 6211, point 9, et Magill, précité, points 49 et 50 ; arrêt du Tribunal du 16 décembre 1999, Micro Leader/Commission, T‑198/98, Rec. p. II‑3989, point 56). En effet, ainsi qu’il est rapporté dans la décision attaquée, il ressort d’un arrêt du Kammergericht Berlin du 14 juin 1994 que cette marque « se limite à énoncer, pour le service visé, que le produit sur lequel il figure peut être éliminé au moyen du système DSD » sans fournir d’indication sur la qualité du service proposé (considérant 145 de la décision attaquée). De plus, en cas d’attribution d’une partie des emballages à un concurrent de DSD, le consommateur est libre de décider s’il fait valoriser l’emballage par le système DSD ou par le système concurrent.

157    Ainsi, dès lors que la fonction du logo Der Grüne Punkt est d’identifier la possibilité d’élimination de l’emballage en cause via le système DSD et que ce logo peut être apposé conjointement avec d’autres signes ou d’autres mécanismes permettant d’identifier une autre possibilité d’élimination via un système individuel ou un système collectif concurrent, il ne peut être allégué que la décision attaquée constitue une atteinte disproportionnée au droit des marques ou, en tout état de cause, une atteinte non justifiée par la nécessité d’éviter un abus de position dominante au sens de l’article 82 CE.

158    À cet égard, la critique émise par la requérante sur l’utilisation qui est faite, dans la décision attaquée, de l’arrêt du Kammergericht Berlin (voir point 109 ci-dessus) n’est pas pertinente. Cette critique se limite à relever le contexte particulier dans lequel intervient l’arrêt, dans lequel le Kammergericht Berlin réfute l’idée selon laquelle le logo Der Grüne Punkt pourrait donner des indications sur la qualité du service d’élimination des déchets, sans pour autant remettre en cause la conclusion à laquelle parvient la Commission, à savoir que plusieurs indications informant le consommateur sur la conduite à tenir en ce qui concerne les différents systèmes susceptibles de le reprendre et de le valoriser peuvent figurer sur un même emballage. L’exemple, exposé ci-dessus, de la chaîne de restauration rapide illustre ainsi la signification concrète de la marque Der Grüne Punkt lorsqu’elle est apposée sur un emballage dont la collecte et la valorisation relèvent également d’un autre système.

159    Quant aux arguments tirés des enquêtes d’opinion fournies par la requérante (voir point 110 ci-dessus), il convient de relever que les résultats de ces enquêtes ne remettent pas en cause le raisonnement exposé dans la décision attaquée. En effet, il est logique que les consommateurs identifient le logo Der Grüne Punkt apposé sur l’emballage comme étant l’indication que celui-ci peut être remis dans les installations de collecte situées à proximité de leur domicile. Cependant, cela ne permet pas de connaître les réactions de ces consommateurs en présence d’un emballage sur lequel sont apposés plusieurs logos identifiant des systèmes collectifs. Or, la Commission et les parties intervenantes indiquent, à cet égard, ce qui a été confirmé lors de l’audience, que les installations de collecte utilisées par ces systèmes sont généralement les mêmes et que, la plupart du temps, le consommateur dépose les emballages dans ces installations en fonction de la matière utilisée et non en fonction du logo figurant sur l’emballage. De même, en ce qui concerne l’hypothèse d’un système mixte combinant le système DSD et un système individuel, l’indication selon laquelle 48,4 % des consommateurs ne comprendraient pas les indications contradictoires renvoyant à ces deux systèmes ne paraît pas pertinente compte tenu du fait qu’elles ne font qu’indiquer le libre choix offert au consommateur en cas de système mixte et que, dès lors, elles ne sauraient créer de contradiction, comme l’illustre l’exemple de la chaîne de restauration rapide examiné ci-dessus.

160    En outre, il y a lieu de relever que l’argument pris de la tromperie à l’égard du public visé par la marque ne saurait prospérer (voir point 111 ci-dessus), étant donné que le contrat d’utilisation du logo ne concerne que les utilisateurs dudit logo, à savoir les fabricants et les distributeurs d’emballages qui ont recours au système DSD, et non les consommateurs.

161    Au demeurant, il convient d’observer qu’accepter l’exclusivité revendiquée par la requérante n’aurait d’autre effet que d’empêcher les fabricants et distributeurs d’emballages de recourir à un système mixte et de légitimer la possibilité, pour la requérante, d’être rémunérée pour un service dont les intéressés ont pourtant démontré qu’il n’a pas été concrètement effectué puisque confié à un autre système collectif ou à un système individuel selon les modalités définies à l’article 1er de la décision attaquée.

162    Les arguments relatifs au droit des marques doivent donc être rejetés, puisqu’il n’est pas porté atteinte à la fonction propre à la marque Der Grüne Punkt en cas de systèmes mixtes.

–       Sur le bon fonctionnement du système DSD

163    En dernier lieu, s’agissant des arguments relatifs à la nécessité de respecter le bon fonctionnement du système DSD (voir points 115 et 116 ci-dessus), il ressort de ce qui précède que celui-ci n’est pas remis en cause en cas de systèmes mixtes. En tout état de cause, les nécessités propres au fonctionnement du système DSD ne sauraient être à même de justifier le comportement de la requérante, caractérisé dans les arrêts BäKo du Bundesgerichtshof et Hertzel de l’Oberlandesgericht Düsseldorf, cités par la Commission (voir points 116 et 118 ci-dessus), les différentes plaintes présentées à la Commission (considérants 3 et 6 de la décision attaquée) et la thèse présentée initialement par DSD dans sa requête (voir point 115 ci-dessus), consistant à exiger le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt, alors même que la preuve est rapportée que certains de ces emballages ont été repris et valorisés par un autre système collectif ou par un système individuel.

 v) Conclusion

164    Il ressort de ce qui précède que, conformément à ce qui est indiqué dans la décision attaquée, ni le décret sur les emballages, ni le droit des marques, ni les nécessités propres au fonctionnement du système DSD n’autorisent la requérante à exiger des entreprises qui font appel à son système le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt, lorsque ces entreprises démontrent qu’elles ne recourent pas au système DSD pour une partie ou la totalité de ces emballages.

165    En conséquence, le premier moyen doit être rejeté.

2.     Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l’article 3 du règlement n° 17 et de la violation du principe de proportionnalité

166    La requérante expose que, selon l’article 3 du règlement n° 17, la Commission peut, par voie de décision, obliger les entreprises à mettre fin à l’infraction constatée. La décision visant à faire cesser l’infraction doit respecter le principe de proportionnalité et ne peut, par conséquent, ordonner que ce qui est approprié et nécessaire pour mettre fin à l’infraction et pour rétablir la légalité au regard des règles qui ont été méconnues (arrêts du Tribunal du 10 juillet 1991, ITP/Commission, T‑76/89, Rec. p. II‑575, point 80, et du 8 juin 1995, Langnese-Iglo/Commission, T‑7/93, Rec. p. II‑1533, point 209). Or, en l’espèce, les mesures imposées par les articles 3, 4 et 5 de la décision attaquée ne satisferaient pas à ces exigences.

a)     Sur le marquage sélectif

167    En substance, la requérante allègue que le marquage sélectif des emballages en fonction du système utilisé est plus approprié que l’obligation imposée dans la décision attaquée.

168    La requérante relève que, dans la décision attaquée, la Commission indique que, pour les clients de DSD, l’étiquetage sélectif d’un emballage uniforme (avec ou sans la marque Der Grüne Punkt) échouerait « dans un nombre non négligeable de cas face aux réalités économiques » (considérant 103 de la décision attaquée). Aucune licence obligatoire ne devrait donc être imposée dans les cas où l’étiquetage sélectif n’échouerait pas du fait des réalités économiques. Dans de tels cas, un abus de position dominante serait, en soi, exclu et les mesures prévues à l’article 3 et à l’article 4, paragraphe 1, de la décision attaquée seraient disproportionnées.

169    La Commission souligne que la décision attaquée envisage des hypothèses où les emballages sont tous identiques et qu’elle expose les raisons pour lesquelles il ne serait pas réaliste de demander aux fabricants et aux distributeurs d’emballages de différencier les emballages selon le système de reprise et de valorisation auquel il est fait appel.

170    Le Tribunal rappelle que, au stade de la caractérisation de l’abus de position dominante, la décision attaquée a examiné l’argumentation de DSD selon laquelle les fabricants et distributeurs d’emballages qui font appel à son système devaient être à même de renoncer à apposer le logo Der Grüne Punkt sur les emballages qui ne relevaient pas du système DSD. Selon la décision attaquée, le marquage sélectif des emballages, en fonction du système utilisé, ne constitue pas une solution appropriée permettant aux fabricants et aux distributeurs d’emballages d’utiliser un système individuel ou un autre système collectif en combinaison avec le système DSD. En effet, la Commission estime que cela entraînerait un surcoût significatif des frais de production et de distribution (considérants 104 et 105 de la décision attaquée), qu’il est difficile voire impossible de contrôler le parcours d’un emballage dans le circuit de commercialisation (considérant 106 de la décision attaquée) et qu’il appartient au consommateur de décider du lieu de remise en cas de recours à un système individuel et à un système collectif (considérant 107 de la décision attaquée).

171    C’est dans ce contexte qu’il convient de comprendre l’extrait de la décision attaquée, cité par la requérante, aux termes duquel la renonciation à apposer le logo Der Grüne Punkt sur les emballages qui ne relèvent pas du système DSD « échouerait dans un nombre non négligeable de cas face aux réalités économiques » (considérant 103 de la décision attaquée).

172    Pour autant, il ne saurait être déduit de cette appréciation que les mesures imposées aux articles 3 à 5 de la décision attaquée sont disproportionnées. En effet, ces mesures se limitent à obliger DSD à ne pas percevoir de redevance sur la totalité des emballages marqués du logo Der Grüne Punkt lorsqu’il est démontré qu’une partie de ces emballages a été reprise et valorisée par le biais d’un autre système. Or, ainsi qu’il ressort de l’examen des modalités de fonctionnement des systèmes mixtes, effectué dans le cadre du premier moyen (voir points 131 à 138 ci-dessus), la concurrence entre systèmes s’effectue sur le fondement des quantités de matière à valoriser et non en fonction de quantités prédéfinies d’emballages qui relèveraient exclusivement – via notamment le marquage sélectif – de l’un ou de l’autre des systèmes auxquels il est fait appel. De plus, les mesures en cause ne portent pas atteinte d’une manière disproportionnée aux intérêts de DSD, puisque celle-ci reste rémunérée pour le service qu’elle assure, à savoir la reprise et la valorisation des quantités de matière confiées par les fabricants et les distributeurs d’emballages qui adhèrent à son système.

173    Dès lors, le fait qu’il puisse être théoriquement possible d’apposer sélectivement le logo sur les emballages ne saurait avoir pour conséquence d’entraîner l’annulation des mesures précitées, étant donnée que cette solution est plus coûteuse et difficile à mettre en œuvre pour les fabricants et les distributeurs d’emballages que les mesures définies aux articles 3 à 5 de la décision attaquée, lesquelles visent seulement à limiter la rémunération du service proposé par DSD au service effectivement rendu par son système.

174    Au demeurant, accepter le principe du marquage sélectif reviendrait pour la Commission à permettre à DSD de continuer d’abuser de sa position dominante, dans la mesure où les coûts liés à cette solution et les difficultés pratiques de sa mise en œuvre risquent de dissuader les clients de DSD de faire appel à un autre système que le système DSD pour reprendre et valoriser en Allemagne une partie (cas de figure n° 1 et 2) ou la totalité de leurs emballages (cas de figure n° 3).

175    En conséquence, il y a lieu de rejeter ce premier grief.

b)     Sur l’imposition d’une licence obligatoire sans restriction dans le temps

176    La requérante soutient que l’article 3 et l’article 4, paragraphe 1, de la décision attaquée sont disproportionnés parce qu’ils l’obligent à accorder aux tiers une licence d’utilisation de la marque Der Grüne Punkt sans restriction dans le temps, et ce même en cas de non-participation au système DSD, alors que la seule motivation donnée sur ce point tiendrait au fait que l’entrée sur le marché serait rendue beaucoup plus difficile en raison des dispositions litigieuses du contrat (voir considérant 115 de la décision attaquée). Une licence obligatoire ne pourrait donc être envisagée que pour la période correspondant à l’entrée des concurrents sur le marché.

177    La Commission souligne que les concurrents potentiels de la requérante seraient de nouveau écartés du marché si leurs clients redevenaient assujettis à la redevance due à DSD pour les quantités retirées du système DSD.

178    Le Tribunal rappelle que, dans le cadre de son appréciation relative à l’article 82 CE, la décision attaquée a considéré que le comportement de DSD consistant à exiger le versement d’une redevance pour la totalité des emballages commercialisés en Allemagne avec le logo Der Grüne Punkt était constitutif d’un abus d’exploitation et d’une barrière à l’entrée (considérants 110 à 135 et article 1er de la décision attaquée). Selon la décision, la redevance ne peut pas être exigée quand les fabricants et distributeurs d’emballages qui recourent au système DSD pour une partie seulement des emballages commercialisés en Allemagne démontrent qu’ils s’acquittent des obligations de reprise et de valorisation imposées dans le décret par le biais de systèmes collectifs concurrents ou de systèmes individuels (cas de figure n° 1 et 2). De même, la redevance ne peut pas être exigée quand les fabricants et distributeurs d’emballages qui n’ont pas recours au système DSD en Allemagne, mais commercialisent dans ce pays un emballage standardisé qu’ils commercialisent également dans un autre État membre pour lequel ils adhèrent à un système de reprise utilisant le logo Der Grüne Punkt démontrent qu’ils s’acquittent des obligations imposées dans le décret par le biais de systèmes collectifs concurrents ou de systèmes individuels (cas de figure n°  3).

179    C’est afin de faire cesser cette infraction à l’article 82 CE, que la Commission impose à DSD de respecter les obligations définies à l’article 3 et à l’article 4, paragraphe 1, de la décision attaquée.

180    Ces obligations ne visent donc pas des tiers, mais des fabricants ou des distributeurs d’emballages qui sont soit des cocontractants de DSD dans le cadre du contrat d’utilisation du logo (cas de l’article 3 qui vise les cas de figure n° 1 et 2), soit des titulaires d’une licence d’utilisation de la marque Der Grüne Punkt dans un autre État membre, dans le cadre d’un système de reprise ou de valorisation utilisant le logo correspondant à cette marque (cas de l’article 4, paragraphe 1, qui vise le cas de figure n° 3).

181    De même, ces obligations n’ont pas pour objet d’imposer à DSD une licence sans restriction dans le temps pour l’utilisation de la marque Der Grüne Punkt, mais seulement d’obliger DSD à ne pas percevoir de redevance sur la totalité des emballages revêtus du logo Der Grüne Punkt lorsqu’il est démontré que la totalité ou une partie seulement de ces emballages a été reprise et valorisée par le biais d’un autre système.

182    En conséquence, aussi longtemps que les utilisateurs du logo Der Grüne Punkt rapportent la preuve que les quantités d’emballages pour lesquels ils ne font pas appel au système DSD ont effectivement été reprises et valorisées par le ou les systèmes collectifs ou individuels auxquels ils font appel, la requérante ne peut pas alléguer qu’il serait disproportionné de lui demander de ne pas être payée pour un service qu’elle ne rend pas.

183    Par suite, il y a lieu de rejeter ce deuxième grief.

c)     Sur l’obligation de prestation préalable

184    La requérante relève qu’il ressort de l’article 3, première phrase, de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 5, paragraphes 2 et 3, de la décision attaquée, que les utilisateurs du logo peuvent librement refuser de payer la redevance pour l’utilisation de la marque Der Grüne Punkt en affirmant qu’ils ont l’intention de ne plus avoir recours au système DSD pour une partie de leurs emballages et qu’ils vont remplir les obligations résultant du décret par le biais d’une solution individuelle d’élimination. L’article 5, paragraphes 3 et 7, de la décision attaquée interdit à la requérante de demander la présentation de l’attestation d’un expert avant la date prévue dans le décret (soit le 1er mai de l’année suivante) ou de réclamer d’autres justifications. Cette mesure serait disproportionnée et conduirait à une répartition inéquitable des risques, dans la mesure où la requérante devrait renoncer au paiement préalable de la redevance et renvoyer ce paiement à une procédure de production de la preuve qui se tiendrait seize mois plus tard, tout en supportant, pendant cette période, le risque de liquidité de son client.

185    La Commission fait valoir que l’hypothèse selon laquelle la quasi-totalité des emballages distribués serait retirée du système de DSD n’est guère vraisemblable, en raison des obligations de preuve qui y sont afférentes. De plus, la notion de « prestation préalable » serait inexacte, étant donné que la requérante ne serait contrainte à obtenir un paiement a posteriori que si les autres systèmes de collecte n’atteignaient pas les taux prévus. Or, les entreprises qui proposent des systèmes de collecte individuels ne conseilleront pas à leurs clients d’agir ainsi puisqu’elles s’efforcent d’atteindre le taux prévu pour la quantité qui leur est contractuellement attribuée afin d’échapper à l’obligation d’acquérir une licence partielle a posteriori auprès d’un concurrent, complétée le cas échéant par un paiement d’intérêts, si ce taux n’est pas atteint.

186    À titre liminaire, le Tribunal relève que l’hypothèse avancée par la requérante selon laquelle certains utilisateurs du logo pourraient refuser de payer la redevance pour l’utilisation de la marque Der Grüne Punkt en affirmant qu’ils ont l’intention de ne plus avoir recours au système DSD pour une partie de leurs emballages n’est, en pratique, guère vraisemblable compte tenu du fait que le décret impose à ces utilisateurs de rapporter la preuve qu’ils ont bien respecté leurs obligations de reprise et de valorisation des emballages commercialisés par le biais d’un autre système et que, si tel n’était pas le cas, ces utilisateurs devraient alors acheter les quantités manquantes auprès du système DSD si ce système avait repris les quantités de matière correspondant à ces emballages (voir points 137 et 138 ci-dessus).

187    Par ailleurs, il ressort de l’article 5, paragraphe 3, de la décision attaquée que « DSD ne peut en aucun cas exiger que l’attestation soit produite à une date antérieure à celle prévue par le décret sur les emballages » et de l’article 5, paragraphe 7, qu’« aucune autre disposition du contrat d’utilisation du logo ne peut être appliquée d’une manière qui aurait pour effet de renforcer les exigences concernant les éléments de preuve à fournir à DSD ».

188    Ces mesures visent à garantir la possibilité, pour le fabricant ou le distributeur d’emballages qui fait appel à un système collectif concurrent ou à un système individuel pour une partie des emballages qu’il commercialise, de fournir à DSD l’attestation du gestionnaire ou de l’expert indépendant, ou encore le certificat d’un commissaire aux comptes, nécessaire pour démontrer que les obligations imposées dans le décret sont remplies par un autre système que le système DSD pour une quantité déterminée d’emballages (voir article 5, paragraphes 1, 2, 4 et 6).

189    Dès lors, la requérante ne saurait alléguer que ces mesures sont disproportionnées étant donné que ce processus de certification est valable pour tous les systèmes, y compris pour le système DSD, et qu’elle n’avance pas de raisons particulières justifiant qu’il soit dérogé à ce processus. De plus, la notion de « prestation préalable » invoquée par la requérante est trompeuse, étant donné que DSD est rémunérée en considération des quantités de matière qui lui sont confiées par ses clients et que ce n’est qu’en cas de problème, c’est-à-dire si les autres systèmes de collecte n’atteignent pas les taux prévus pour les quantités qui leur ont été confiées, que DSD peut demander à être payée pour le surplus.

190    En conséquence, il y a lieu de rejeter ce troisième grief.

d)     Sur l’exclusion d’une redevance adéquate pour la seule utilisation de la marque

191    La requérante fait valoir que, par les articles 3 et 4 de la décision attaquée, la Commission l’oblige à ne pas percevoir de redevance lorsqu’il est prouvé que les obligations issues du décret sont respectées par une autre méthode. DSD ne serait donc pas en droit de réclamer une redevance aux utilisateurs du logo pour la simple utilisation de la marque Der Grüne Punkt. Cette exclusion serait contraire à la jurisprudence de la Cour qui admettrait la perception d’une redevance raisonnable (arrêt Volvo, précité, point 11).

192    La Commission souligne que la décision attaquée n’impose pas de licence obligatoire à DSD, mais vise seulement à éviter que DSD ne perçoive de redevance quand l’emballage sur lequel est apposé le logo n’est pas repris et valorisé par le système DSD. Lors de l’audience, la Commission a précisé que, comme le contrat d’utilisation du logo notifié par DSD ne distingue pas la redevance due au titre de l’utilisation de la marque de celle due au titre de l’utilisation du système DSD, la décision ne se prononce pas sur la question de savoir si une redevance peut être demandée pour la simple utilisation de la marque.

193    Le Tribunal relève que l’obligation imposée à DSD, à l’article 3 de la décision attaquée, permet aux fabricants et aux distributeurs qui font appel à son système pour une partie seulement de leurs emballages de ne pas verser de redevance à DSD lorsque la preuve est rapportée que les emballages revêtus du logo Der Grüne Punkt n’ont pas été collectés et valorisés par le système DSD mais par un système concurrent.

194    Pour autant, même dans ce cas, il ne saurait être exclu que la marque Der Grüne Punkt apposée sur l’emballage en cause puisse avoir une valeur économique en tant que telle, puisqu’elle permet d’indiquer au consommateur que l’emballage en cause peut être apporté au système DSD, comme cela est d’ailleurs indiqué dans la décision attaquée (considérant 145 de la décision attaquée). Ainsi, même si ledit emballage n’est pas effectivement apporté au système DSD et qu’il est démontré que son équivalent en matière a été collecté ou valorisé par un système concurrent, il n’en demeure pas moins que la marque laisse au consommateur la possibilité d’éliminer cet emballage par le biais du système DSD. Une telle possibilité offerte au consommateur pour tous les emballages commercialisés avec le logo Der Grüne Punkt, qu’ils relèvent ou non du système DSD, après vérification des quantités collectées, est susceptible d’avoir un prix, qui, même s’il ne peut représenter le prix effectif de la prestation de collecte et de valorisation comme cela pouvait être le cas en application des dispositions litigieuses du contrat d’utilisation du logo, devrait pouvoir être versé à DSD en contrepartie de la prestation offerte en l’espèce, à savoir la mise à disposition de son système.

195    Interrogée sur ce point lors de l’audience, la Commission a reconnu que cette question n’était pas envisagée dans la décision attaquée, laquelle se limitait à examiner la légalité du comportement de DSD en ce qui concernait le versement d’une redevance pour une prestation dont la preuve était rapportée qu’elle n’était pas effectuée par le système DSD mais par un autre système.

196    En conséquence, il y a lieu de relever que la décision attaquée doit être interprétée en ce sens qu’elle n’exclut pas la possibilité pour DSD de percevoir une redevance adéquate pour la seule utilisation de la marque lorsqu’il est démontré que l’emballage portant le logo Der Grüne Punkt a été repris et valorisé par un autre système.

e)     Sur la possibilité d’apposer une mention explicative

 Arguments des parties

197     La requérante soutient que l’obligation définie à l’article 3, premier alinéa, de la décision attaquée est disproportionnée dans la mesure où elle l’empêche d’exiger des utilisateurs du logo qu’ils apposent une mention explicative sur les emballages dans les cas de figure n° 1 et 2. Selon DSD, une telle mention explicative, qui pourrait être apposée sans grande difficulté par les fabricants et les distributeurs d’emballages qui font appel à son système, permettrait d’atténuer la violation de la marque Der Grüne Punkt qui résulterait de la décision attaquée. Ladite mention pourrait ainsi indiquer au consommateur que, dans tel ou tel Land, l’emballage ne participe pas au système DSD mais à un autre système collectif (cas de figure n° 1) ou que, même si l’emballage est étiqueté du logo Der Grüne Punkt, certains points de vente ne font pas appel au système correspondant mais à un système individuel (cas de figure n° 2).

198    Par ailleurs, la requérante relève que, d’après l’article 4, paragraphe 2, de la décision attaquée, elle peut exiger des fabricants ou des distributeurs d’emballages qui ne font pas appel au système DSD en Allemagne, mais commercialisent dans un autre État membre un emballage standardisé pour lequel ils adhèrent à un système de reprise utilisant le logo Der Grüne Punkt (cas de figure n° 3), qu’ils apposent une mention explicative sur l’emballage afin d’attirer l’attention du consommateur sur le fait que cet emballage n’est pas repris par le système DSD en Allemagne. Selon la requérante, une telle mesure serait disproportionnée, étant donné qu’une autre mesure, à savoir la dissimulation totale du logo Der Grüne Punkt et non la simple apposition d’une mention explicative à côté dudit logo, porterait moins atteinte à la fonction d’origine de sa marque.

199    La Commission observe que, en ce qui concerne le cas de figure n° 1, rien ne permet de penser que le décret interdise à des systèmes concurrents d’utiliser le même logo. De l’avis de la requérante, les entreprises assujetties devraient modifier la mention explicative à chaque introduction du système concurrent dans un nouveau Land. Pour cela, il faudrait, notamment dans la phase de lancement de la concurrence, modifier continuellement les emballages. Pour le cas de figure n° 2, une mention explicative sur l’emballage serait impossible. S’agissant du cas de figure n°3, la Commission expose que, si la marque Der Grüne Punkt bénéficiait de la protection alléguée par la requérante, les fabricants devraient prévoir différents emballages pour chaque État membre, ce qui ne serait pas rentable économiquement et constituerait une entrave aux échanges.

 Appréciation du Tribunal

200    Pour ce qui est du grief relatif à l’article 3, premier alinéa, de la décision attaquée, il y a lieu de relever que l’apposition des mentions explicatives souhaitées par la requérante ne saurait avoir pour effet de faire cesser l’abus de position dominante caractérisé à l’article 1er de la décision. De telles mentions explicatives reposeraient, en effet, sur l’idée qu’il serait possible de distinguer les emballages revêtus du logo Der Grüne Punkt, qui relèvent du système DSD, de ceux sur lesquels est apposé le logo Der Grüne Punkt mais qui ne relèvent pas du système DSD et qui devraient donc faire l’objet d’une mention destinée à attirer l’attention du consommateur. Or, ainsi que cela a été exposé (voir points 131 à 138 ci‑dessus), les modalités de fonctionnement des systèmes mixtes ne reposent pas sur l’identification des emballages par les consommateurs, qui restent libres de décider à quel système il vont rapporter l’emballage, mais sur l’attribution de masses de matière à valoriser.

201    L’apposition des mentions explicatives souhaitées par la requérante ne permettrait donc pas de faire cesser l’abus de position dominante caractérisé par la Commission dans les cas de figure n° 1 et 2.

202    En conséquence, il y a lieu de rejeter le grief relatif au caractère disproportionné de l’article 3, paragraphe 1, de la décision attaquée en ce qu’il n’envisage pas la possibilité d’apposer une mention explicative.

203    Pour ce qui est du grief relatif à l’article 4, paragraphe 2, de la décision attaquée, il y a lieu de relever qu’il ressort de cette mesure que « DSD peut subordonner l’exonération de la redevance à la condition que, sur les emballages visés [par le cas de figure n° 3], à proximité du logo [Der Grüne Punkt], l’attention du consommateur final soit attirée, par une mention en ce sens ou sous toute autre forme appropriée, sur le fait que l’emballage n’est pas repris par le système mis en place par DSD, conformément à l’article 6, paragraphe 3, du décret ». Cette disposition consiste en la simple reprise d’un engagement proposé par DSD dans le cadre de la procédure administrative (considérants 63 et 133 de la décision attaquée). DSD ne peut donc alléguer, dans le cadre de la présente procédure, qu’une solution autre que celle qu’elle a, elle-même, proposée à la Commission constitue, désormais, une solution plus appropriée pour répondre au problème identifié lors de la procédure. En outre, accepter la solution préconisée par la requérante, à savoir la dissimulation du logo Der Grüne Punkt plutôt que la mention explicative à proximité dudit logo, reviendrait à imposer aux fabricants d’emballages de prévoir différents types emballages pour chaque État membre, ce qui ne serait pas économiquement rationnel.

204    En conséquence, il y a lieu de rejeter le grief relatif au caractère disproportionné de l’article 4, paragraphe 2, de la décision attaquée en ce qu’il impose d’apposer une mention explicative sur l’emballage, alors qu’il aurait été possible de dissimuler le logo Der Grüne Punkt.

3.     Sur le troisième moyen tiré de la violation de l’article 86, paragraphe 2, CE et de celle de l’article 253 CE

a)     Arguments des parties

205    La requérante fait valoir qu’une violation de l’article 82 CE est exclue parce qu’elle est chargée d’un service d’intérêt économique général au sens de l’article 86, paragraphe 2, CE, à savoir la gestion des déchets à des fins environnementales et, plus précisément, la collecte et la valorisation des emballages sur tout le territoire allemand y compris dans les zones rurales non rentables (arrêts de la Cour du 27 avril 1994, Almelo, C‑393/92, Rec. p. I‑1477, point 47, et du 23 mai 2000, Sydhavnens Sten & Grus, C‑209/98, Rec. p. I‑3743, points 75 et 76 ; arrêt du Tribunal du 27 février 1997, FFSA e.a./Commission, T‑106/95, Rec. p. II‑229, point 72). Ce service d’intérêt économique général lui aurait été imparti par les Länder allemands du fait de la reconnaissance du système DSD au titre de l’article 6, paragraphe 3, onzième phrase, du décret. Or, la décision attaquée menacerait la réalisation, à des conditions économiquement acceptables, de ce service, puisqu’elle détruirait l’effet de signal de la marque Der Grüne Punkt et risquerait de ne plus lui permettre d’éliminer les déchets sur tout le territoire. De même, la décision attaquée violerait l’obligation de motivation qui lui incomberait au titre de l’article 253 CE, puisqu’elle ne se prononcerait pas sur l’article 86, paragraphe 2, CE.

206    La Commission, soutenue par les parties intervenantes, conteste l’affirmation selon laquelle DSD serait titulaire d’un service d’intérêt économique général confié par les autorités régionales responsables des déchets, dans la mesure où tout opérateur de système collectif pourrait obtenir la même autorisation que DSD sur la base de l’article 6, paragraphe 3, onzième phrase, du décret. De plus, il découlerait du décret que le législateur n’aurait pas voulu empêcher la coexistence de systèmes individuels et de systèmes collectifs, en parallèle au système mis en place par la requérante. Cette concurrence ne serait pas un risque, mais l’objectif du décret.

b)     Appréciation du Tribunal

207    Selon l’article 86, paragraphe 2, CE, les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général sont soumises aux règles du traité, notamment aux règles de concurrence, pour autant que l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été impartie. Cet article dispose également que le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de la Communauté.

208    En l’espèce, il convient de relever que, à supposer même que la requérante soit chargée d’un service d’intérêt économique général au sens de l’article 86, paragraphe 2, CE, et ce au même titre que tous les systèmes collectifs homologués par les autorités des Länder, il n’en demeure pas moins que le risque d’une remise en cause de cette mission du fait de la décision attaquée n’est pas démontré.

209    En effet, contrairement à ce qui est allégué par la requérante dans le cadre du présent moyen, le fait que DSD ne puisse pas être rémunérée pour une prestation dont il est démontré qu’elle est effectuée par un autre système ne permet nullement d’établir que la décision attaquée menace la réalisation, à des conditions économiquement acceptables, du service de reprise et de valorisation confié au système DSD.

210    En particulier, il ressort des points 156 à 158 ci-dessus, que la décision attaquée ne remet pas en cause la fonction essentielle de la marque Der Grüne Punkt dans le cadre du contrat d’utilisation du logo. De même, aucun élément présent au dossier ne permet de conclure que la décision attaquée risque de ne plus permettre à DSD d’éliminer les emballages sur tout le territoire allemand.

211    Par ailleurs, la requérante n’ayant pas invoqué le bénéfice de l’article 86, paragraphe 2, CE dans le cadre de la procédure administrative, il ne saurait être reproché à la Commission de n’avoir pas motivé sa décision sur ce point.

212    En conséquence, il y a lieu de rejeter le troisième moyen.

213    Il ressort de ce qui précède que le recours doit être rejeté en totalité.

 Sur les dépens

214    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses conclusions et la Commission, Landbell et BellandVision ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens, il y a lieu de condamner cette dernière à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, Landbell et BellandVision, y compris ceux afférents à la procédure de référé. Vfw, qui n’a pas conclu à la condamnation de la requérante aux dépens, supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante, Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland GmbH, supportera ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par la Commission, par Landbell AG Rückhol-Systeme et par BellandVision GmbH, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

3)      Vfw AG supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

García-Valdecasas

Cooke

Labucka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mai 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. D. Cooke


Table des matières

Cadre juridique

A –  Décret relatif à la prévention de la production des déchets d’emballages

B –  Système collectif de Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland GmbH et contrat d’utilisation du logo

Faits à l’origine du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

A –  Décision attaquée

1.  Sur la possibilité de combiner plusieurs systèmes de reprise et de valorisation pour satisfaire aux obligations du décret sur les emballages

2.  Appréciation relative à l’article 82 CE

3.  Appréciation relative à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17

B –  Sur la recevabilité du recours

1.  Sur la recevabilité du recours en ce qu’il vise l’article 4 de la décision attaquée

2.  Sur la production de moyens en cours d’instance

3.  Sur la prise en considération de certaines annexes produites par la requérante

a)  Sur les annexes préparées par Me C. Weidemann

b)  Sur les enquêtes d’opinion jointes à la réplique

C –  Sur le fond

1.  Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 82 CE

a)  Observations liminaires sur la thèse de la licence obligatoire gratuite

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

b)  Arguments des parties relatifs à l’abus de position dominante

i) Sur l’absence de nécessité d’utiliser la marque Der Grüne Punkt pour participer à un système concurrent du système DSD

ii) Sur l’absence d’élimination de la concurrence en l’absence de licence obligatoire de la marque Der Grüne Punkt

iii) Sur les différentes justifications du comportement de DSD

–  Sur la nécessité de garantir les objectifs du décret

–  Sur les justifications relatives au droit des marques

–  Sur le bon fonctionnement du système DSD

c)  Appréciation du Tribunal

i) Sur l’abus caractérisé dans la décision attaquée

ii) Sur l’exclusivité revendiquée par la requérante

iii) Sur les modalités de fonctionnement des systèmes mixtes

iv) Sur les critiques de la requérante relatives à l’analyse exposée dans la décision attaquée

–  Sur l’absence de nécessité d’apposer le logo Der Grüne Punkt sur tous les emballages en cas de recours à un système mixte du fait de la possibilité d’utiliser un marquage sélectif en fonction du système utilisé

–  Sur les arguments pris de l’absence d’élimination de la concurrence

–  Sur la nécessité de garantir les objectifs du décret

–  Sur les justifications relatives au droit des marques

–  Sur le bon fonctionnement du système DSD

v) Conclusion

2.  Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l’article 3 du règlement n° 17 et de la violation du principe de proportionnalité

a)  Sur le marquage sélectif

b)  Sur l’imposition d’une licence obligatoire sans restriction dans le temps

c)  Sur l’obligation de prestation préalable

d)  Sur l’exclusion d’une redevance adéquate pour la seule utilisation de la marque

e)  Sur la possibilité d’apposer une mention explicative

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

3.  Sur le troisième moyen tiré de la violation de l’article 86, paragraphe 2, CE et de celle de l’article 253 CE

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

Sur les dépens



* Langue de procédure: l’allemand.