Language of document : ECLI:EU:T:2017:781

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

7 novembre 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative BiancalunA ‐ Rejet – Marque nationale figurative antérieure bianca – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Identité des produits – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑628/15,

Frame Srl, établie à San Giuseppe Vesuviano (Italie), représentée par Mes E. Montelione, M. Borghese et R. Giordano, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Bonne, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Bianca-Moden GmbH & Co. KG, établie à Ochtrup (Allemagne), représentée par Me P. Lange, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 7 août 2015 (affaire R 2720/2014‑5), relative à une procédure d’opposition entre Bianca-Moden et Frame,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, L. Calvo‑Sotelo Ibáñez‑Martín (rapporteur) et Mme I. Reine, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 11 novembre 2015,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 18 mars 2016,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 11 mars 2016,

à la suite de l’audience du 28 février 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 8 octobre 2012, la requérante, Frame Srl, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1) tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3, 24 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Savons ; parfums, huiles essentielles, produits cosmétiques, lotions pour les cheveux » ; 

–        classe 24 : « Tissus et produits textiles non compris dans d’autres classes ; jetés de lit ; tapis de table ; essuie-verres ; serviettes de toilette en matières textiles ; essuie-mains en matières textiles ; linge de bain à l’exception de l’habillement ; linge de maison ; linge de lit ; linge de table non en papier ; linge ouvré ; brocarts ; calicot ; canevas pour la tapisserie ou la broderie ; ronds de table non en papier ; haire [étoffe] ; couvertures de lit ; couvertures de lit en papier ; plaids ; embrasses en matières textiles ; literie [linge] ; basins ; cotonnades ; crêpe [tissu] ; crépon ; damas [étoffe] ; étiquettes en tissu ; mouchoirs de poche en matières textiles ; taies d’oreillers ; enveloppes de matelas ; feutre ; flanelle de santé ; flanelle [tissu] ; coiffes de chapeaux ; housses de protection pour meubles ; housses pour coussins ; housses d’oreillers ; housses pour abattants de toilettes ; doublures [étoffes] ; fanions non en papier ; gaze [tissu] ; gants de toilette ; jersey [tissu] ; cheviottes [étoffes] ; draps ; marabout [étoffe] ; filtrantes (matières –) [matières textiles] ; matières plastiques [succédanés du tissu] ; textiles (matières –) ; droguet ; tapis de billards ; blanchets pour l’imprimerie en matières textiles ; tentures murales en matières textiles ; édredons [couvre-pieds de duvet] ; portières [rideaux] ; coutil ; revêtements de meubles en matières plastiques ; revêtements de meubles en matières textiles ; sacs de couchage [enveloppes cousues remplaçant les draps] ; dessous de carafes [linge de table] ; étamine ; étamine de blutoir ; bannières ; toile ; chaussures (étoffes à doublure pour –) ; laine (tissus de –) ; aérostatiques (étoffes imperméables aux gaz pour ballons –) ; chemins de table ; linceuls ; taffetas [tissu] ; nappes non en papier ; moleskine [tissu] ; chanvre (toile de –) ; indienne ; toile à matelas ; toiles cirées [nappes] ; toiles gommées autres que pour la papeterie ; toiles à fromage ; bougran ; rideaux en matières textiles ou en matières plastiques ; rideaux de douche en matières textiles ou en matières plastiques ; tissus ; tissus adhésifs collables à chaud ; chanvre (tissus de –) ; jute (tissus de –) ; lin (tissus de ‑) ; rayonne (tissus de –) ; ramie (tissus de –) ; soie (tissus de –) ; patrons d’imprimerie (tissus de soie pour –) ; spart (tissus de –) ; tissus élastiques ; tissus imitant la peau d’animaux ; tissus en fibres de verre à usage textile ; tricots [tissus] ; non-tissés [textile] ; meubles (tissu pour –) ; tissus pour chaussures ; lingerie (tissus pour la –) ; tissus à usage textile ; tissus recouverts de motifs dessinés pour la broderie ; tissu chenillé ; frise [étoffe] ; sets de table non en papier ; serviettes de table en matières textiles ; serviettes à démaquiller en matières textiles ; treillis [toile de chanvre] ; couvre-lits ; tulles ; velours ; vitrages [rideaux] ; moustiquaires ; zéphyr [tissu] » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements en imitations du cuir ; vêtements en cuir ; automobilistes (habillement pour –) ; cyclistes (habillement pour –) ; vêtements de gymnastique ; robes ; peignoirs ; bain (peignoirs de –) ; antidérapants pour chaussures ; habits ; bandanas [foulards] ; bavoirs non en papier ; bonnets ; bérets ; sous-vêtements ; sous-vêtements sudorifuges ; blouses ; boas [tours de cou] ; body [justaucorps] ; bretelles ; crampons de chaussures de football ; corsets ; galoches ; calottes ; chaussures ; chaussures de sport ; bas ; bas sudorifuges ; chaussons ; chaussettes ; culottes ; chemisettes ; chemises ; vareuses ; camisoles ; chapeaux ; hauts-de-forme ; chapeaux en papier [habillement] ; manteaux ; capuchons [vêtements] ; carcasses de chapeaux ; chancelières non chauffées électriquement ; ceintures [habillement] ; ceintures porte-monnaie [habillement] ; collants ; cols ; faux-cols ; cache-corset ; chapellerie ; cache-col ; couvre-oreilles [habillement] ; layettes ; corselets ; costumes ; plage (costumes de –) ; costumes de mascarade ; cravates ; lavallières ; bain (bonnets de –) ; bonnets de douche ; bandeaux pour la tête [habillement] ; pochettes [habillement] ; foulards ; ferrures de chaussures ; doublures confectionnées [parties de vêtements] ; gabardines [vêtements] ; guêtres ; vestes ; vestes de pêcheurs ; jarretières ; jupes ; robes-chasubles ; tabliers [vêtements] ; gaines [sous-vêtements] ; gants [habillement] ; mitons ; gants de ski ; trépointes de chaussures ; imperméables ; confectionnés (vêtements –) ; vêtements en papier ; tricots [vêtements] ; jerseys [vêtements] ; jambières ; leggins [pantalons] ; livrées ; maillots ; bonneterie ; bain (costumes de –) ; chandails ; manchons [habillement] ; manipules [liturgie] ; pèlerines ; mantilles ; masques pour dormir ; jupes-shorts ; mitres [habillement] ; caleçons ; caleçons de bain ; gilets ; culottes pour bébés ; pantalons ; parkas ; pelisses ; fourrures [vêtements] ; empiècements de chemises ; chasubles ; pyjamas ; manchettes [habillement] ; ponchos ; pull-overs ; bouts de chaussures ; jarretelles ; fixe-chaussettes ; soutiens-gorge ; talonnettes pour chaussures ; talonnettes pour les bas ; sandales ; bain (sandales de –) ; saris ; sarongs ; souliers ; espadrilles ; bain (souliers de –) ; gymnastique (souliers de –) ; chaussures de plage ; chaussures de football ; sport (souliers de –) ; chaussures de ski ; châles ; écharpes ; slips ; brodequins ; guimpes [vêtements] ; paletots ; dessus (vêtements de –) ; dessous-de-bras ; sous-pieds ; jupons ; combinaisons [sous-vêtements] ; plastrons de chemises ; bottines ; bottes ; étoles [fourrures] ; semelles ; semelles intérieures ; talons ; poches de vêtements ; tee-shirts ; toges ; empeignes ; tiges de bottes ; turbans ; combinaisons de ski nautique ; combinaisons [vêtements] ; uniformes ; voilettes ; visières [chapellerie] ; sabots [chaussures] ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2/2013, du 3 janvier 2013.

5        Le 27 mars 2013, l’intervenante, Bianca-Moden GmbH & Co. KG, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001).

6        L’opposition était dirigée contre tous les produits visés par la demande d’enregistrement et énumérés au point 3 ci-dessus. Elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement 2017/1001] et reposait sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne verbale BIANCA, déposée le 3 mars 1998 et enregistrée le 12 juillet 1999 sous le numéro 761700, désignant les « vêtements » compris dans la classe 25 ;

–        la marque de l’Union européenne figurative déposée le 10 juin 1998 et enregistrée le 18 octobre 1999 sous le numéro 854240, désignant également les « vêtements » compris dans la classe 25, telle que reproduite ci-après :

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–        la marque allemande figurative déposée le 30 mai 2008 et enregistrée le 18 août 2008 sous le numéro 302008035102 (ci-après la « marque allemande antérieure »), telle que reproduite ci-après :

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7        Les produits désignés par la marque allemande antérieure relevaient notamment des classes 14, 18 et 25 et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 14 : « Métaux précieux et leurs alliages et produits en ces matières ou en plaqué compris dans cette classe ; articles de bijouterie-joaillerie, bijouterie, pierres précieuses; instruments de mesure du temps et chronométriques » ;

–        classe 18 : « Cuir et imitations cuir et produits en ces matières compris dans cette classe ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ».

8        Le 8 octobre 2013, dans ses observations sur l’opposition, la requérante a demandé que soit apportée la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures fondant l’opposition. L’intervenante a répondu à cette demande le 18 février 2014.

9        Le 27 août 2014, la division d’opposition a fondé son raisonnement sur l’examen du risque de confusion entre la marque demandée et la marque allemande antérieure. À cet égard, elle a accueilli partiellement l’opposition, en rejetant la demande d’enregistrement pour les produits relevant de la classe 25 suivants :

« Vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements en imitations du cuir ; vêtements en cuir ; automobilistes (habillement pour –) ; cyclistes (habillement pour –) ; vêtements de gymnastique ; robes ; peignoirs ; bain (peignoirs de –) ; bandanas [foulards] ; bavoirs non en papier ; bonnets ; bérets ; sous-vêtements ; sous-vêtements sudorifuges ; blouses ; boas [tours de cou] ; body [justaucorps] ; bretelles ; corsets ; bas ; bas sudorifuges ; chaussettes ; culottes ; chemisettes ; chemises ; vareuses ; camisoles ; chapeaux en papier [habillement] ; manteaux ; capuchons [vêtements] ; ceintures [habillement] ; ceintures porte-monnaie [habillement] ; collants ; cols ; faux-cols ; cache-corset ; couvre-oreilles [habillement] ; layettes ; corselets ; costumes ; plage (costumes de –) ; costumes de mascarade ; bandeaux pour la tête [habillement] ; foulards ; gabardines [vêtements] ; gants [habillement] ; tricots [vêtements] ; jerseys [vêtements] ; jambières ; leggins [pantalons] ; doublures confectionnées [parties de vêtements] ; vestes ; tabliers [vêtements] ; vêtements en papier ; dessus (vêtements de –) ; jarretelles ; fixe-chaussettes ; soutiens-gorge ; pyjamas ; ponchos ; pull-overs ; combinaisons [vêtements] ; uniformes ; voilettes ; combinaisons de ski nautique ; manchons [habillement] ; manipules [liturgie] ; pèlerines ; mantilles ; masques pour dormir ; culottes pour bébés ; pantalons ; parkas ; pelisses ; confectionnés (vêtements –) ; slips ; imperméables ; paletots ; caleçons ; caleçons de bain ; gilets ; jupons ; combinaisons [sous-vêtements] ; saris ; sarongs ; souliers ; tee-shirts ; toges ; plastrons de chemises ; gants de ski ; livrées ; maillots ; chasubles ; bain (costumes de –) ; chandails ; jupes-shorts ; fourrures [vêtements] ; bonneterie ; cravates ; lavallières ; châles ; guimpes [vêtements] ; étoles [fourrures] ; robes-chasubles ; gaines [sous-vêtements] ; mitons ; vestes de pêcheurs ; jarretières ; jupes ; écharpes ; dessous-de-bras ; sous-pieds ; cache-col ; pochettes [habillement] ; calottes ; chapeaux ; hauts-de-forme ; bain (bonnets de ‑) ; bonnets de douche ; turbans ; chapellerie ; visières [chapellerie] ; mitres [habillement] ; galoches ; chaussures de sport ; gymnastique (souliers de ‑) ; chaussures de plage ; chaussures de football ; sport (souliers de ‑) ; chaussures de ski ; sabots [chaussures] ; sandales ; bain (sandales de ‑) ; bottes ; bain (souliers de –) ; bottines ; chaussons ; espadrilles ; brodequins ; guêtres ; chancelières non chauffées électriquement ; semelles ; semelles intérieures ; manchettes [habillement] ; poches de vêtements ».

10      S’agissant des deux marques de l’Union européenne antérieures sur lesquelles l’opposition était également fondée, la division d’opposition a considéré que l’issue de la procédure en ce qui les concerne ne pouvait être différente, dans la mesure où ces marques couvraient une gamme de produits plus restreinte que la marque allemande antérieure.

11      Le 27 octobre 2014, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’opposition en ce que celle-ci avait refusé de faire droit à la demande d’enregistrement pour les produits relevant de la classe 25 énumérés au point 9 ci-dessus.

12      Par décision du 7 août 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours contre la décision de la division d’opposition. La chambre de recours a fondé son examen, à l’instar de la division d’opposition, sur le risque de confusion entre la marque demandée et la marque allemande antérieure. Elle a notamment indiqué être d’accord avec l’appréciation de la division d’opposition concernant l’identité ou la similitude partielle des produits en cause, les parties n’ayant émis aucun grief à cet égard. Pour ce qui concerne la comparaison des signes, la chambre de recours a considéré qu’ils étaient similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Enfin, en ce qui concerne l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours a estimé, en raison du caractère distinctif moyen de la marque allemande antérieure, non contesté par les parties, de la similitude des signes et de l’identité ou de la similitude des produits visés, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

13      Par un recours devant le Tribunal enregistré sous la référence T‑627/15, la requérante a par ailleurs attaqué la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 7 août 2015 (affaire R 2952/2014-5) refusant, sur opposition, d’admettre à l’enregistrement la marque verbale BIANCALUNA pour des produits relevant des classes 24 et 25.

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, en ce qu’elle a rejeté son recours contre la décision de la division d’opposition ;

–        renvoyer l’affaire devant l’EUIPO ;

–        à titre subsidiaire, réformer la décision attaquée de sorte qu’il soit fait droit à la demande d’enregistrement pour les produits suivants de la classe 25 : « Sous‑vêtements, pyjamas, tee-shirts, slips, culottes » ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

15      L’EUIPO et l’intervenanteconcluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la procédure

16      Dans ses écritures, l’intervenante a fait observer que certaines annexes de la requête n’étaient pas rédigées dans la langue de la procédure et a, par conséquent, demandé au Tribunal de ne pas les prendre en considération comme telles.

17      Conformément au point 108 des dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure du Tribunal, le greffier du Tribunal a cependant demandé à la requérante de déposer une traduction dans la langue de la procédure des annexes en question. Cette traduction a été déposée le 30 avril 2016 et ces annexes ainsi traduites ont été signifiées à l’intervenante. Par conséquent, rien ne s’oppose à ce que celles-ci soient prises en considération.

18      Toujours dans ses écritures, l’intervenante a relevé également que la requête n’était signée que par un seul des trois avocats de la requérante et a estimé qu’elle devait, dès lors, être regardée comme n’ayant été déposée que par ce seul signataire.

19      À cet égard, il suffit de constater que l’intervenante n’a pas invoqué l’irrecevabilité de la requête et que, en tout état de cause, cette dernière a bien été signée par l’un des trois avocats de la requérante, ce qui était suffisant au regard de l’article 19, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, de celui-ci, et de l’article 3 de la décision du Tribunal, du 14 septembre 2011, relative au dépôt et à la signification d’actes de procédure par la voie de l’application e-Curia (JO 2011, C 289, p. 9).

20      La circonstance que la requête n’ait pas été signée par les trois représentants de la requérante est donc sans pertinence.

 Sur l’objet du recours

21      Lors de l’audience, la requérante a précisé qu’elle limitait ses conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée en ce que celle-ci avait rejeté son recours contre la décision de la division d’opposition pour les « sous-vêtements, pyjamas et tee-shirts » relevant de la classe 25.

22      L’intervenante n’a pas soulevé d’objection à cet égard. En revanche, l’EUIPO a considéré que cette limitation de l’objet du recours était tardive.

23      Il importe, d’emblée, de rappeler que, aux termes de l’article 26, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 207/2009 (devenu article 31, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001), « la demande de marque […] doit contenir […] la liste des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé ». En outre, l’article 43, paragraphe 1, du règlement nº 207/2009 (devenu article 49, paragraphe 1 du règlement 2017/1001) prévoit que, devant l’EUIPO, « [l]e demandeur peut à tout moment retirer sa demande de marque [...] ou limiter la liste des produits ou services qu’elle contient ».

24      Par ailleurs, le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO que si, au moment où celle-ci a été prise, elle était entachée de l’un des motifs d’annulation ou de réformation visés à l’article 65, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009 (devenu article 72, paragraphe 2, du règlement 2017/1001). En effet, conformément à l’article 76 dudit règlement (devenu article 95 du règlement 2017/1001), le Tribunal doit statuer au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours. En revanche, le Tribunal ne saurait annuler ou réformer la décision de la chambre de recours pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son adoption [voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2014, Peri/OHMI (Forme d’un tendeur à vis), T‑171/12, EU:T:2014:817, points 13 et 14 et jurisprudence citée].

25      Il s’ensuit que, en principe, une limitation de la liste des produits ou des services figurant dans une demande de marque qui intervient postérieurement à l’adoption de la décision de la chambre de recours attaquée devant le Tribunal ne peut affecter la légalité de cette décision (voir arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 18 et jurisprudence citée).

26      Toutefois, il convient également de relever que la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO peut être contestée devant le Tribunal en ce qui concerne uniquement certains des produits ou des services figurant sur la liste visée par la demande d’enregistrement de la marque concernée. Dans un tel cas, cette décision devient définitive pour les autres produits ou services figurant sur la même liste (voir arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 19 et jurisprudence citée).

27      Compte tenu de cette possibilité, le Tribunal a interprété une déclaration devant lui du demandeur de la marque, postérieure donc à la décision de la chambre de recours, selon laquelle il retirait sa demande pour certains des produits visés initialement comme une déclaration que la décision litigieuse n’était contestée que pour autant que cette décision visait le reste des produits concernés, ou comme un désistement partiel, dans le cas où cette déclaration intervenait à un stade avancé de la procédure devant le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 20 et jurisprudence citée).

28      Toutefois, si la limitation de la liste des produits concernés a pour objet de modifier une ou plusieurs caractéristiques de cette liste de sorte qu’il ne puisse être exclu que cette modification ait un effet sur l’examen de la marque effectué par les instances de l’EUIPO au cours de la procédure administrative, une telle modification au stade du recours devant le Tribunal équivaudrait à une modification de l’objet du litige en cours d’instance, interdite par l’article 188 du règlement de procédure. Aussi, une telle limitation ne pourrait être prise en compte pour l’examen du bien-fondé du recours (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 21 et jurisprudence citée).

29      En l’espèce, la requérante a procédé à une limitation des produits visés par sa demande de marque de l’Union européenne lors de l’audience et donc postérieurement à l’adoption de la décision attaquée.

30      Il n’apparaît toutefois pas que cette limitation ait eu pour objet d’apporter à une ou plusieurs caractéristiques de la liste des produits pour lesquels la requérante avait demandé l’enregistrement de la marque en cause une modification susceptible d’influencer l’examen de cette marque par l’EUIPO, qui ne le soutient d’ailleurs pas.

31      Dans ces conditions, conformément à la jurisprudence citée au point 27 ci-dessus, il y a lieu de considérer que, lors de l’audience, la requérante s’est valablement désistée partiellement de son recours.

32      Partant, tant les conclusions en annulation que les conclusions subsidiaires en réformation doivent désormais être lues, conformément à la volonté de la requérante, comme étant dirigées contre la décision attaquée en ce que celle-ci a rejeté son recours contre la décision de la division d’opposition en ce qui concerne les « sous-vêtements, pyjamas et tee-shirts » relevant de la classe 25.

 Sur les conclusions en annulation

33      À l’appui de son recours, la requérante soulève un unique moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. À la lecture de ses développements, ce moyen peut néanmoins être divisé en deux branches, tirées, la première, de l’erreur résultant de la prise en considération de la seule marque allemande antérieure et, la seconde, de l’erreur commise dans l’appréciation de la similitude des signes et des produits en cause. Il convient de commencer l’examen du moyen par cette seconde branche.

34      La requérante fait en substance valoir qu’en l’absence de similitudes entre les signes et les produits en conflit il n’existerait pas de risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures.

 Observations liminaires

35      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement 2017/1001), il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

36      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

37      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des signes en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services désignés par les marques en cause. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

38      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur le public pertinent

39      Au point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, au vu de la nature des produits concernés, le risque de confusion devait être analysé du point de vue du grand public, qui est normalement informé et raisonnablement attentif et avisé et fait preuve d’un niveau d’attention moyen.

40      Il y a lieu de confirmer cette constatation, au demeurant non contestée.

 Sur la comparaison des signes

–       Observations liminaires

41      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30]. L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, la requérante conteste l’existence de similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle en opposant la marque demandée aux marques antérieures, qui comprendraient à la fois une marque verbale et des marques figuratives.

43      Il convient cependant de rappeler que la chambre de recours a limité son examen d’un risque de confusion à la comparaison de la marque demandée avec la marque allemande antérieure. De plus, cette marque est une marque figurative, composée d’un rectangle noir, d’un point blanc ainsi que d’un élément verbal, à savoir le terme « bianca ».

–       Sur la similitude visuelle

44      La chambre de recours a relevé, au point 30 de la décision attaquée, que, sur le plan visuel, les signes en conflit coïncident par le mot « bianca », qui constitue l’élément verbal de la marque allemande antérieure et qui est intégralement reproduit dans la marque demandée, dont il représente les six premières lettres. De plus, la chambre de recours a observé que les deux marques sont « stylisées », leur composante verbale étant écrite en lettres blanches sur un rectangle respectivement noir ou bleu, et que, en raison du début commun de leur élément verbal respectif, les deux signes en conflit sont visuellement similaires.

45      La requérante prétend, quant à elle, que la marque allemande antérieure est plutôt dépouillée, tandis que la marque demandée est composée, premièrement, du mot fantaisiste « biancaluna », comportant dix lettres de couleur blanche en italique, parmi lesquelles la première lettre « b » et la dernière lettre « a » sont écrites en majuscules et très élaborées, deuxièmement, d’un fond bleu à forme rectangulaire aux contours orange, troisièmement, d’un carré de couleur orange accolé au côté gauche et, quatrièmement, d’une partie d’un disque blanc placé dans ce carré et évoquant une demi-lune. La requérante ajoute que la demi-lune blanche placée dans le carré de couleur orange serait l’élément le plus important dans la perception de la marque par le public pertinent, de sorte que les marques en conflit ne seraient pas semblables sur le plan visuel.

46      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette analyse.

47      S’agissant du caractère dominant des éléments composant les marques en conflit, qui sont toutes deux des marques complexes, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, lors de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre, et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêts du 23 octobre 2002, MATRATZEN, T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35 ; du 8 février 2007, Quelle/OHMI – Nars Cosmetics (NARS), T‑88/05, non publié, EU:T:2007:45, point 58, et du 23 novembre 2010, Codorniu Napa/OHMI – Bodegas Ontañón (ARTESA NAPA VALLEY), T‑35/08, EU:T:2010:476, point 35]. Il importe également de rappeler que, lorsqu’un signe consiste à la fois en des éléments figuratifs et en des éléments verbaux, il ne s’ensuit pas automatiquement que c’est l’élément verbal qui doit toujours être considéré comme dominant [arrêts du 24 novembre 2005, Simonds Farsons Cisk/OHMI – Spa Monopole (KINJI by SPA), T‑3/04, EU:T:2005:418, point 45, et du 23 novembre 2010, ARTESA NAPA VALLEY, T‑35/08, EU:T:2010:476, point 36].

48      En l’espèce, s’agissant de la marque allemande antérieure, il y a lieu de constater, comme le soutient à juste titre l’EUIPO, que le rectangle noir et le point blanc sont susceptibles d’être perçus comme étant uniquement des éléments décoratifs, de sorte que le public pertinent ne perçoit vraisemblablement aucun de ces deux éléments comme étant dominant sur le plan visuel [voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2013, SFC Jardibric/OHMI – Aqua Center Europa (AQUA FLOW), T‑417/12, non publié, EU:T:2013:550, point 65]. Dans ce contexte, le mot « bianca » apparaît dominant.

49      En revanche, la marque demandée débute, non pas par le mot « bianca », mais par un croissant de lune aisément reconnaissable. De plus, ce croissant de lune figure dans un carré dont la couleur orange tranche par rapport au fond bleu sur lequel s’inscrit l’élément verbal. Ce croissant de lune est ainsi mis en exergue. De surcroît, la lune, à laquelle il est ainsi fait allusion, constitue un élément d’autant plus marquant que l’élément verbal de la marque demandée comporte le mot « luna ». Or, l’intervenante fait observer que, en allemand, celui-ci est un synonyme de « Mond » et qu’il peut être compris par le public pertinent comme signifiant précisément « lune ». Plus précisément, en tant que nom, le mot « luna » est un synonyme poétique de « Mond ». Il est ainsi utilisé notamment dans les contes de fée et désigne en outre, même en allemand, la déesse de la lune. Par ailleurs, l’adjectif « lunar » renvoie à ce qui concerne la lune, de même que l’adjectif « lunarisch », qui est cependant vieilli. En toute hypothèse, même en admettant que le mot « luna » n’est pas d’usage fréquent en allemand, la présence à ses côtés de l’élément figuratif représentant clairement un quartier de lune est, par association d’idées, de nature à faciliter la compréhension du mot par le public allemand. Il s’ensuit que le public allemand est effectivement en mesure de comprendre le sens du mot « luna ». Partant, pour le public pertinent, l’évocation de la lune apparaît deux fois dans la marque demandée, une première fois comme élément figuratif et une seconde fois comme élément verbal, et cette double évocation enveloppe l’élément verbal commun « bianca », dont l’importance s’en trouve ainsi réduite.

50      L’intervenante fait cependant valoir que le mot « luna » aurait un caractère descriptif dans la mesure où il serait compris comme une référence à la destination des produits couverts par la marque demandée en tant que chemises ou vêtements de nuit, tenues du soir et pyjamas. En conséquence, seul le mot « bianca » aurait un caractère distinctif.

51      Il y a, toutefois, lieu d’observer que la chambre de recours n’a pas considéré que la marque demandée ou l’une de ses composantes serait descriptive d’une caractéristique des produits concernés. De plus, les produits relevant de la classe 25 pour lesquels l’enregistrement de la marque demandée avait été refusé et qui justifiaient le recours devant la chambre de recours n’étaient pas limités à des vêtements de nuit ou du soir, comme en témoigne la liste reprise au point 9 du présent arrêt. La même observation s’impose au regard des produits auxquels la requérante a limité son recours devant le Tribunal. Les « sous-vêtements » et les « tee-shirts » ne sont pas des vêtements de nuit ou du soir. Quant aux « pyjamas », s’ils sont principalement portés la nuit et le soir, ils désignent aussi, plus généralement, des vêtements d’intérieur ou de temps libre amples et légers. En outre, la lune a, de tout temps, représenté une source naturelle de lumière nocturne. Partant, si le terme « lune » a été jugé descriptif de lampes en forme de lune qui produisaient un effet lumineux semblable à celui de la lune [arrêt du 4 février 2015, KSR/OHMI – Lampenwelt (Moon), T‑374/13, non publié, EU:T:2015:69, points 26 et 36], le rapport entre les produits concernés et le mot « luna » n’est pas aussi direct et concret pour aboutir à la même conclusion. De surcroît, la lune n’évoque pas que la nuit. Ses significations sont plus étendues. Par exemple, elle évoque la fraîcheur et suggère le mouvement, car son apparence change. La dimension symbolique et la diversité de ses significations sont donc telles que ses expressions figurative et verbale sont suffisamment imaginatives, dans la marque demandée, pour ne pouvoir être regardées comme une allusion à une caractéristique des produits concernés.

52      L’intervenante allègue cependant encore que, à supposer même que le mot « luna » ait un caractère distinctif, le signe composé du mot « biancaluna » pourrait conduire le public à croire que les produits en cause proviennent, à tout le moins, d’entreprises liées économiquement, auquel cas l’existence d’un risque de confusion devrait être retenue. Ce risque serait d’autant plus grand que le mot « bianca » serait le seul élément distinctif de la dénomination sociale Bianca-Moden GmbH & Co. KG.

53      Néanmoins, en l’espèce, le caractère dominant des expressions figurative et verbale de la lune résultant de leur conjugaison s’oppose à ce que l’élément « bianca » soit perçu comme une référence à la raison sociale de l’intervenante ou qu’il puisse faire croire au public pertinent que les produits concernés sont une ligne de vêtements de Bianca-Moden ou, tout au moins, celle d’une entreprise liée économiquement.

54      Il convient au demeurant d’observer que la marque demandée se distingue de la marque allemande antérieure non seulement par son élément dominant, mais aussi, plus largement, par l’impression d’ensemble qui s’en dégage.

55      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la circonstance selon laquelle les marques en conflit comprennent des éléments verbaux similaires ne permet pas, à elle seule, de conclure à l’existence d’une similitude visuelle entre les signes en conflit. En effet, la présence dans les signes d’éléments figuratifs ayant une configuration particulière est susceptible d’aboutir à ce que l’impression globale fournie par chaque signe soit différente (arrêts du 24 novembre 2005, KINJI by SPA, T‑3/04, EU:T:2005:418, point 48, et du 23 novembre 2010, ARTESA NAPA VALLEY, T‑35/08, EU:T:2010:476, point 43).

56      Or, comme le fait valoir la requérante, les différences stylistiques entre la marque allemande antérieure et la marque demandée sont importantes. La marque allemande antérieure n’est visuellement guère élaborée et se caractérise par sa sobriété. En effet, les lettres de l’élément « bianca » sont toutes dans une police de caractères très dépouillée et figurent dans un rectangle noir et austère. En revanche, la marque demandée présente la particularité d’être beaucoup plus ornementée. Comme cela a déjà été souligné, elle débute par un quartier de lune. Elle conjugue en outre le blanc, l’orange et le bleu. Les lettres de l’élément « biancaluna » sont en italique. La première lettre « b » et la dernière lettre « a » sont en lettres majuscules apprêtées. Enfin, contrairement à la marque allemande antérieure, la marque demandée ne comporte pas de point de ponctuation.

57      Il découle de ce qui précède que, en dépit du fait que l’élément « bianca » soit présent dans les deux signes en conflit, dans leur ensemble, ceux-ci ne sont pas similaires sur le plan visuel.

–       Sur la similitude phonétique

58      La chambre de recours a observé, au point 31 de la décision attaquée, que la prononciation des deux signes en litige coïncidait pour ce qui est de l’élément verbal « bianca », que les éléments figuratifs des marques en conflit n’avaient aucune incidence sur leur prononciation et que, en raison de leur début commun et donc de leur prononciation en partie similaire, la similitude des deux signes devait être admise sur le plan phonétique.

59      La requérante soutient au contraire qu’il n’y a pas de ressemblance sur le plan phonétique entre les marques en conflit, car leurs éléments figuratifs présentent un caractère dominant très distinctif.

60      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent cet argument.

61      Il convient de relever, à cet égard, que, au sens strict, la reproduction phonétique d’un signe complexe correspond en principe à celle de tous ses éléments verbaux, indépendamment de leurs spécificités graphiques, qui relèvent plutôt de l’analyse du signe sur le plan visuel [arrêt du 25 mai 2005, Creative Technology/OHMI – Vila Ortiz (PC WORKS), T‑352/02, EU:T:2005:176, point 42].

62      En l’espèce, la marque allemande antérieure est identifiée, d’un point de vue phonétique, par le mot « bianca ».

63      S’agissant de la marque demandée, force est de constater que le quartier de lune mis en exergue au début de celle-ci est une forme figurative et qu’une telle forme n’a, en principe, pas d’impact sur le plan phonétique. De plus, l’élément « bianca » est prononcé en premier, de sorte qu’il frappe sans aucun doute l’esprit des consommateurs de la manière la plus importante [voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Ferrero/OHMI – Tirol Milch (TiMi KiNDERJOGHURT), T‑140/08, EU:T:2009:400, point 57].

64      Toutefois, il a déjà été jugé, s’agissant certes d’une marque purement figurative, que, lorsqu’une telle marque représente une forme que le public pertinent est facilement à même de reconnaître et d’associer à un mot précis et concret, c’est par ce mot qu’il désignera ladite marque [arrêt du 7 mai 2015, Cosmowell/OHMI – Haw Par (GELENKGOLD), T‑599/13, EU:T:2015:262, point 53].

65      Or, en l’occurrence, le public pertinent peut facilement reconnaître le quartier de lune apparaissant d’emblée dans la marque demandée et est susceptible de verbaliser cet élément figuratif en lui associant un mot précis et concret, le mot « luna », qui se retrouve en écho dans la seconde partie de l’élément verbal.

66      Dans les conditions particulières de l’espèce, caractérisées par une double évocation figurative et verbale de la lune, il y a lieu de considérer, dans le prolongement de l’arrêt du 7 mai 2015, GELENKGOLD (T‑599/13, EU:T:2015:262), que, en mettant l’accent sur le début commun du seul élément verbal, la chambre de recours a négligé à tort le fait que l’élément figuratif de la marque demandée pouvait avoir une incidence sur la prononciation de celle-ci.

67      Par conséquent, il ne peut être exclu que les signes en conflit puissent être distingués sur le plan phonétique.

–       Sur la similitude conceptuelle

68      La chambre de recours a relevé, au point 33 de la décision attaquée, que le mot « bianca » est connu en Allemagne comme un prénom féminin. Elle a également considéré que le public allemand ne pouvait pas reconnaître un concept dans le terme composé des deux mots « bianca » et « luna », dans la mesure où ce dernier ne serait pas un mot allemand. Elle en a déduit que le « concept de la lune » invoqué devant elle par la requérante n’était pas convaincant, probablement même pas pour les consommateurs qui pourraient savoir que « luna » signifie « lune » dans certaines langues. En conséquence, la chambre de recours a considéré que la marque demandée n’avait pas de signification conceptuelle pour le public pertinent et elle a estimé que, en l’absence de renvoi à un concept, aucune différence entre les signes en conflit ne pouvait être constatée sur le plan conceptuel.

69      Devant le Tribunal, la requérante soutient que les marques antérieures évoquent un caractère immaculé et un concept de pureté, tandis que la marque demandée fait penser à la lune et à sa couleur blanche. La différence entre les marques en conflit serait d’autant plus importante que leur élément commun, le mot « bianca », ne serait pas l’élément dominant dans la marque demandée. En revanche, la forme de la lune et le mot « biancaluna » dans son ensemble auraient dans cette dernière une importance non négligeable.

70      La requérante ajoute que, tant du point de vue du consommateur de langue italienne que de celui d’un consommateur pratiquant une autre langue de l’Union européenne, le mot « biancaluna » présente un caractère distinctif, parce que les deux mots « bianca » et « luna » ainsi que leur combinaison « biancaluna » ne sont pas descriptifs des caractéristiques des produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé. De plus, selon les règles de la grammaire italienne, l’expression correcte serait « luna bianca », de sorte que la juxtaposition inversée des deux mots ne constituerait pas une expression connue en italien. L’expression « biancaluna » constituerait un néologisme et serait différente sur le plan conceptuel du sens à donner au mot « bianca ».

71      Au vu des arguments ainsi développés par la requérante, force est de rappeler qu’il a déjà été relevé, au point 51 ci-dessus, que la chambre de recours n’a pas considéré que la marque demandée serait descriptive d’une caractéristique des produits concernés. En outre, comme le plaide l’EUIPO, l’argument tiré par la requérante du caractère inhabituel de la juxtaposition des mots « bianca » et « luna » au regard de la grammaire italienne est dépourvu d’à-propos dans la mesure où le public pertinent est le public allemand.

72      S’agissant de la marque allemande antérieure, qui a été prise comme référence, la requérante ne peut être suivie lorsqu’elle soutient que celle-ci évoque un caractère immaculé et un concept de pureté. En effet, il ressort des constatations opérées au point 48 ci-dessus que le mot « bianca » est l’élément dominant de cette marque. Or, la requérante n’a pas expliqué en quoi ce mot évoquerait la pureté et un caractère immaculé pour le public pertinent. En particulier, la requérante n’a pas réfuté la constatation de la chambre de recours selon laquelle, en Allemagne, le mot « bianca » évoque seulement un prénom féminin.

73      S’agissant de la marque demandée, il convient d’observer que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le terme « luna » n’a aucune signification en Allemagne. Toutefois, ainsi que cela a déjà été relevé au point 49 ci-dessus, l’intervenante expose, à juste titre, que le mot « luna » y est un synonyme de « Mond », de sorte qu’il peut être compris par le public pertinent comme signifiant « lune ». En outre, il a été observé, au même point ainsi qu’au point 51 ci-dessus, que le terme « luna » a une connotation féérique et mythologique et qu’il est associé à d’autres notions, telles que la fraîcheur et le mouvement.

74      La chambre de recours a ainsi commis une erreur en estimant que le mot « luna » n’a pas de signification en allemand.

75      Toutefois, la chambre de recours a aussi considéré que le « concept de la lune », invoqué par la requérante dans ses écrits devant l’EUIPO, n’était pas convaincant, probablement même pas pour les consommateurs qui pourraient savoir que le mot « luna » signifie « lune ».

76      Il convient donc d’examiner également la validité de cette dernière assertion.

77      À cet égard, force est d’observer que, même si le consommateur allemand s’en tient à voir dans « bianca » un prénom féminin et ignore que ce prénom est aussi un mot qui, en italien, signifie « blanc » ou « blanche », il est confronté d’emblée, dans la marque demandée, à une représentation concrète et immédiatement reconnaissable d’une lune blanche. Aussi, dans le contexte figuratif spécifique de l’espèce et dans la mesure où le public allemand comprend le mot « luna » comme signifiant « lune », la chambre de recours a considéré à tort que le « concept de la lune » invoqué par la requérante n’était pas convaincant.

78      Partant, il est fort improbable que l’incompréhension, par le public allemand, du sens du mot « bianca » en italien puisse suffire à engendrer, chez ce public, une confusion d’ordre conceptuel avec la marque allemande antérieure, et cela, comme il a été exposé au point 53 ci-dessus, quand bien même le mot « bianca » est l’élément marquant de la dénomination sociale de l’intervenante.

79      Il s’ensuit que c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’aucune différence entre les signes en conflit ne pouvait être constatée sur le plan conceptuel.

–       En ce qui concerne la comparaison globale

80      Il résulte de tout ce qui précède que, selon une impression d’ensemble, malgré la présence de l’élément commun « bianca », les signes en conflit ne sont pas similaires sur les plans visuel et conceptuel et qu’ils sont également susceptibles d’être distingués sur le plan phonétique. Par conséquent, ces signes ne sont pas identiques ou similaires au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Au demeurant, il a déjà été jugé, en ce qui concerne des produits textiles comme en l’espèce, que la comparaison visuelle des signes doit prévaloir compte tenu du mode d’acquisition de ces produits [arrêt du 14 juillet 2016, Modas Cristal/EUIPO – Zorlu Tekstil Ürünleri Pazarlama (KRISTAL), T‑345/15, non publié, EU:T:2016:405, point 100]. Or, c’est précisément par son aspect visuel que la marque demandée se distingue le plus de la marque allemande antérieure.

 Sur les conséquences à tirer de la comparaison des signes

81      Au vu de l’examen ci-dessus, il apparaît que l’une des conditions cumulatives d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 fait défaut.

82      Partant, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a commis une erreur en confirmant la décision de la division d’opposition constatant l’existence d’un risque de confusion au sens de cette disposition.

83      La seconde branche du moyen, tirée de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, est ainsi fondée, sans qu’il soit besoin d’examiner l’argument soulevé par la requérante selon lequel il n’existerait aucun risque de confusion entre les produits désignés par la marque allemande antérieure et ceux visés par la marque demandée.

84      Partant, dès lors que, dans le cas d’une opposition fondée sur plusieurs marques antérieures nationales et de l’Union européenne, il n’y a aucune obligation, pour l’EUIPO, de donner priorité à ces dernières [ordonnance du 11 mai 2006, TeleTech Holdings/OHMI – Teletech International (TELETECH INTERNATIONAL), T‑194/05, EU:T:2006:124, point 35], il y a lieu d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la première branche du moyen, tirée de l’erreur résultant de la prise en considération de la seule marque allemande antérieure.

 Sur les conclusions tendant au renvoi de l’affaire devant l’EUIPO et tendant à la réformation de la décision attaquée

85      Dans son deuxième chef de conclusions, la requérante demande expressément que l’affaire soit renvoyée à l’EUIPO. Il y a cependant lieu de rappeler que, en application de l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009 (devenu article 72, paragraphe 6, du règlement 2017/1001), les mesures que comporte l’exécution d’un arrêt annulant en tout ou en partie la décision d’une chambre de recours incluent un nouvel examen par les chambres de recours de l’affaire qui a fait l’objet de cette décision [voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2013, Cytochroma Development/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑106/12, non publié, EU:T:2013:340, point 23]. Quant au troisième chef de conclusions tendant à la réformation de la décision attaquée, il est formulé à titre subsidiaire des conclusions en annulation auxquelles il est fait droit.

86      Par conséquent, il n’y a lieu ni d’ordonner expressément le renvoi de l’affaire à l’EUIPO ni de se prononcer sur les conclusions subsidiaires en réformation.

 Sur les dépens

87      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

88      En l’espèce, l’EUIPO et l’intervenante ont succombé. Partant, d’une part, il y a lieu de condamner l’EUIPO à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière. D’autre part, l’intervenante ayant succombé en ses conclusions, celle-ci supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 août 2015 (affaire R 2720/20145) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Frame Srl.

3)      Bianca-Moden GmbH & Co. KG supportera ses propres dépens.

Kanninen

Calvo-Sotelo Ibáñez-Martín

Reine

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 novembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.