Language of document : ECLI:EU:T:2017:782

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

7 novembre 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale BIANCALUNA – Marque nationale figurative antérieure bianca – Économie de procédure – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Identité des produits – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑627/15,

Frame Srl, établie à San Giuseppe Vesuviano (Italie), représentée par Mes E. Montelione, M. Borghese et R. Giordano, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Bonne, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Bianca-Moden GmbH & Co. KG, établie à Ochtrup (Allemagne), représentée par Me P. Lange, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 7 août 2015 (affaire R 2952/2014‑5), relative à une procédure d’opposition entre Bianca-Moden et Frame,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, L. Calvo‑Sotelo Ibáñez‑Martín (rapporteur) et Mme I. Reine, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 11 novembre 2015,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 18 mars 2016,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 11 mars 2016,

à la suite de l’audience du 28 février 2017,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        Le 9 octobre 2012, la requérante, Frame Srl, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1) tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal BIANCALUNA.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3, 24 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Savons ; parfums, huiles essentielles, produits cosmétiques, lotions pour les cheveux » ;

–        classe 24 : « Tissus et produits textiles non compris dans d’autres classes ; jetés de lit ; tapis de table ; essuie-verres ; serviettes de toilette en matières textiles ; essuie-mains en matières textiles ; linge de bain à l’exception de l’habillement ; linge de maison ; linge de lit ; linge de table non en papier ; linge ouvré ; brocarts ; calicot ; canevas pour la tapisserie ou la broderie ; ronds de table non en papier ; haire [étoffe] ; couvertures de lit ; couvertures de lit en papier ; plaids ; embrasses en matières textiles ; literie [linge] ; basins ; cotonnades ; crêpe [tissu] ; crépon ; damas [étoffe] ; étiquettes en tissu ; mouchoirs de poche en matières textiles ; taies d’oreillers ; enveloppes de matelas ; feutre ; flanelle de santé ; flanelle [tissu] ; coiffes de chapeaux ; housses de protection pour meubles ; housses pour coussins ; housses d’oreillers ; housses pour abattants de toilettes ; doublures [étoffes] ; fanions non en papier ; gaze [tissu] ; gants de toilette ; jersey [tissu] ; cheviottes [étoffes] ; draps ; marabout [étoffe] ; filtrantes (matières –) [matières textiles] ; matières plastiques [succédanés du tissu] ; textiles (matières –) ; droguet ; tapis de billards ; blanchets pour l’imprimerie en matières textiles ; tentures murales en matières textiles ; édredons [couvre-pieds de duvet] ; portières [rideaux] ; coutil ; revêtements de meubles en matières plastiques ; revêtements de meubles en matières textiles ; sacs de couchage [enveloppes cousues remplaçant les draps] ; dessous de carafes [linge de table] ; étamine ; étamine de blutoir ; bannières ; toile ; chaussures (étoffes à doublure pour –) ; laine (tissus de –) ; aérostatiques (étoffes imperméables aux gaz pour ballons –) ; chemins de table ; linceuls ; taffetas [tissu] ; nappes non en papier ; moleskine [tissu] ; chanvre (toile de –) ; indienne ; toile à matelas ; toiles cirées [nappes] ; toiles gommées autres que pour la papeterie ; toiles à fromage ; bougran ; rideaux en matières textiles ou en matières plastiques ; rideaux de douche en matières textiles ou en matières plastiques ; tissus ; tissus adhésifs collables à chaud ; chanvre (tissus de –) ; jute (tissus de –) ; lin (tissus de ‑) ; rayonne (tissus de –) ; ramie (tissus de –) ; soie (tissus de –) ; patrons d’imprimerie (tissus de soie pour –) ; spart (tissus de –) ; tissus élastiques ; tissus imitant la peau d’animaux ; tissus en fibres de verre à usage textile ; tricots [tissus] ; non-tissés [textile] ; meubles (tissu pour –) ; tissus pour chaussures ; lingerie (tissus pour la –) ; tissus à usage textile ; tissus recouverts de motifs dessinés pour la broderie ; tissu chenillé ; frise [étoffe] ; sets de table non en papier ; serviettes de table en matières textiles ; serviettes à démaquiller en matières textiles ; treillis [toile de chanvre] ; couvre-lits ; tulles ; velours ; vitrages [rideaux] ; moustiquaires ; zéphyr [tissu] » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements en imitations du cuir ; vêtements en cuir ; automobilistes (habillement pour –) ; cyclistes (habillement pour –) ; vêtements de gymnastique ; robes ; peignoirs ; bain (peignoirs de –) ; antidérapants pour chaussures ; habits ; bandanas [foulards] ; bavoirs non en papier ; bonnets ; bérets ; sous-vêtements ; sous-vêtements sudorifuges ; blouses ; boas [tours de cou] ; body [justaucorps] ; bretelles ; crampons de chaussures de football ; corsets ; galoches ; calottes ; chaussures ; chaussures de sport ; bas ; bas sudorifuges ; chaussons ; chaussettes ; culottes ; chemisettes ; chemises ; vareuses ; camisoles ; chapeaux ; hauts-de-forme ; chapeaux en papier [habillement] ; manteaux ; capuchons [vêtements] ; carcasses de chapeaux ; chancelières non chauffées électriquement ; ceintures [habillement] ; ceintures porte-monnaie [habillement] ; collants ; cols ; faux-cols ; cache-corset ; chapellerie ; cache-col ; couvre-oreilles [habillement] ; layettes ; corselets ; costumes ; plage (costumes de –) ; costumes de mascarade ; cravates ; lavallières ; bain (bonnets de –) ; bonnets de douche ; bandeaux pour la tête [habillement] ; pochettes [habillement] ; foulards ; ferrures de chaussures ; doublures confectionnées [parties de vêtements] ; gabardines [vêtements] ; guêtres ; vestes ; vestes de pêcheurs ; jarretières ; jupes ; robes-chasubles ; tabliers [vêtements] ; gaines [sous-vêtements] ; gants [habillement] ; mitons ; gants de ski ; trépointes de chaussures ; imperméables ; confectionnés (vêtements) ; vêtements en papier ; tricots [vêtements] ; jerseys [vêtements] ; jambières ; leggins [pantalons] ; livrées ; maillots ; bonneterie ; bain (costumes de –) ; chandails ; manchons [habillement] ; manipules [liturgie] ; pèlerines ; mantilles ; masques pour dormir ; jupes-shorts ; mitres [habillement] ; caleçons ; caleçons de bain ; gilets ; culottes pour bébés ; pantalons ; parkas ; pelisses ; fourrures [vêtements] ; empiècements de chemises ; chasubles ; pyjamas ; manchettes [habillement] ; ponchos ; pull-overs ; bouts de chaussures ; jarretelles ; fixe-chaussettes ; soutiens-gorge ; talonnettes pour chaussures ; talonnettes pour les bas ; sandales ; bain (sandales de –) ; saris ; sarongs ; souliers ; espadrilles ; bain (souliers de –) ; gymnastique (souliers de –) ; chaussures de plage ; chaussures de football ; sport (souliers de –) ; chaussures de ski ; châles ; écharpes ; slips ; brodequins ; guimpes [vêtements] ; paletots ; dessus (vêtements de –) ; dessous-de-bras ; sous-pieds ; jupons ; combinaisons [sous-vêtements] ; plastrons de chemises ; bottines ; bottes ; étoles [fourrures] ; semelles ; semelles intérieures ; talons ; poches de vêtements ; tee-shirts ; toges ; empeignes ; tiges de bottes ; turbans ; combinaisons de ski nautique ; combinaisons [vêtements] ; uniformes ; voilettes ; visières [chapellerie] ; sabots [chaussures] ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 20/2013, du 29 janvier 2013.

5        Le 22 avril 2013, l’intervenante, Bianca-Moden GmbH & Co. KG, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001).

6        L’opposition était dirigée contre tous les produits visés par la demande d’enregistrement et énumérés au point 3 ci-dessus. Elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n °207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement 2017/1001] et reposait sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne verbale BIANCA, déposée le 3 mars 1998 et enregistrée le 12 juillet 1999 sous le numéro 761700, désignant les « vêtements » compris dans la classe 25 ;

–        la marque de l’Union européenne figurative déposée le 10 juin 1998 et enregistrée le 18 octobre 1999 sous le numéro 854240, désignant également les « vêtements » compris dans la classe 25, telle que reproduite ci-après :

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–        la marque allemande figurative déposée le 30 mai 2008 et enregistrée le 18 août 2008 sous le numéro 302008035102 (ci-après la « marque allemande antérieure »), telle que reproduite ci-après :

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7        Les produits désignés par la marque allemande antérieure relevaient notamment des classes 14, 18 et 25 et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :


–        classe 14 : « Métaux précieux et leurs alliages et produits en ces matières ou en plaqué compris dans cette classe ; articles de bijouterie-joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; instruments de mesure du temps et chronométriques » ;

–        classe 18 : « Cuir et imitations cuir et produits en ces matières compris dans cette classe ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ».

8        Le 11 novembre 2013, dans ses observations sur l’opposition, la requérante a demandé que soit apportée la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures fondant l’opposition. L’intervenante a répondu à cette demande le 6 mars 2014.

9        Le 19 septembre 2014, la division d’opposition a fondé son raisonnement sur l’examen du risque de confusion entre la marque demandée et la marque allemande antérieure. À cet égard, elle a accueilli partiellement l’opposition, en rejetant la demande d’enregistrement pour les produits suivants :

–        les produits relevant de la classe 24, libellés comme suit : « Tissus non compris dans d’autres classes ; serviettes de toilette en matières textiles ; essuie-mains en matières textiles ; linge de bain à l’exception de l’habillement ; brocarts ; calicot ; ronds de table non en papier ; haire [étoffe] ; basins ; cotonnades ; crêpe [tissu] ; crépon ; damas [étoffe] ; étiquettes en tissu ; feutre ; flanelle [tissu] ; coiffes de chapeaux ; doublures [étoffes] ; gaze [tissu] ; jersey [tissu] ; cheviottes [étoffes] ; marabout [étoffe] ; textiles (matières –) ; droguet ; coutil ; dessous de carafes [linge de table] ; étamine de blutoir ; toile ; chaussures (étoffes à doublure pour –) ; laine (tissus de –) ; chemins de table ; taffetas [tissu] ; moleskine [tissu] ; chanvre (toile de –) ; indienne ; toiles gommées autres que pour la papeterie ; toiles à fromage ; bougran ; tissus ; tissus adhésifs collables à chaud ; chanvre (tissus de –) ; jute (tissus de ‑) ; lin (tissus de –) ; rayonne (tissus de –) ; ramie (tissus de –) ; soie (tissus de –) ; patrons d’imprimerie (tissus de soie pour –) ; spart (tissus de –) ; tissus élastiques ; tissus imitant la peau d’animaux ; tissus en fibres de verre à usage textile ; tricots [tissus] ; non-tissés [textile] ; meubles (tissu pour –) ; tissus pour chaussures ; lingerie (tissus pour la –) ; tissus à usage textile ; tissu chenillé ; frise [étoffe] ; sets de table non en papier ; treillis [toile de chanvre] ; couvre-lits ; tulles ; velours ; zéphyr [tissu] » ;

–        les produits relevant de la classe 25, libellés comme suit : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements en imitations du cuir ; vêtements en cuir ; automobilistes (habillement pour –) ; cyclistes (habillement pour –) ; vêtements de gymnastique ; robes ; peignoirs ; bain (peignoirs de –) ; habits ; bandanas [foulards] ; bavoirs non en papier ; bonnets ; bérets ; sous-vêtements ; sous-vêtements sudorifuges ; blouses ; boas [tours de cou] ; body [justaucorps] ; bretelles ; crampons de chaussures de football ; corsets ; galoches ; calottes ; chaussures ; chaussures de sport ; bas ; bas sudorifuges ; chaussons ; chaussettes ; culottes ; chemisettes ; chemises ; vareuses ; camisoles ; chapeaux ; hauts-de-forme ; chapeaux en papier [habillement] ; manteaux ; capuchons [vêtements] ; chancelières non chauffées électriquement ; ceintures [habillement] ; ceintures porte-monnaie [habillement] ; collants ; cols ; faux-cols ; cache-corset ; chapellerie ; cache-col ; couvre-oreilles [habillement] ; layettes ; corselets ; costumes ; plage (costumes de –) ; costumes de mascarade ; cravates ; lavallières ; bain (bonnets de –) ; bonnets de douche ; bandeaux pour la tête [habillement] ; pochettes [habillement] ; foulards ; gabardines [vêtements] ; guêtres ; vestes ; vestes de pêcheurs ; jarretières ; jupes ; robes-chasubles ; tabliers [vêtements] ; gaines [sous-vêtements] ; gants [habillement] ; mitons ; gants de ski ; imperméables ; confectionnés (vêtements –) ; vêtements en papier ; tricots [vêtements] ; jerseys [vêtements] ; jambières ; leggins [pantalons] ; livrées ; maillots ; bonneterie ; bain (costumes de –) ; chandails ; manchons [habillement] ; manipules [liturgie] ; pèlerines ; mantilles ; masques pour dormir ; jupes-shorts ; mitres [habillement] ; caleçons ; caleçons de bain ; gilets ; culottes pour bébés ; pantalons ; parkas ; pelisses ; fourrures [vêtements] ; chasubles ; pyjamas ; manchettes [habillement] ; ponchos ; pull-overs ; jarretelles ; fixe-chaussettes ; soutiens-gorge ; sandales ; bain (sandales de –) ; saris ; sarongs ; souliers ; espadrilles ; bain (souliers de –) ; gymnastique (souliers de –) ; chaussures de plage ; chaussures de football ; sport (souliers de –) ; chaussures de ski ; châles ; écharpes ; slips ; brodequins ; guimpes [vêtements] ; paletots ; dessus (vêtements de –) ; dessous-de-bras ; sous-pieds ; jupons ; combinaisons [sous-vêtements] ; plastrons de chemises ; bottines ; bottes ; étoles [fourrures] ; semelles ; semelles intérieures ; poches de vêtements ; tee-shirts ; toges ; turbans ; combinaisons de ski nautique ; combinaisons [vêtements] ; uniformes ; voilettes ; visières [chapellerie] ; sabots [chaussures] ».

10      S’agissant des deux marques de l’Union européenne antérieures sur lesquelles l’opposition était également fondée, la division d’opposition a considéré que l’issue de la procédure en ce qui les concerne ne pouvait être différente, dans la mesure où ces marques couvraient une gamme de produits plus restreinte que la marque allemande antérieure.

11      Le 19 novembre 2014, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’opposition en ce que celle-ci avait refusé de faire droit à la demande d’enregistrement pour les produits relevant des classes 24 et 25 énumérés au point 9 ci-dessus.

12      Par décision du 7 août 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours contre la décision de la division d’opposition. La chambre de recours a fondé son examen, à l’instar de la division d’opposition, sur le risque de confusion entre la marque demandée et la marque allemande antérieure. Elle a notamment indiqué être d’accord avec l’appréciation de la division d’opposition concernant l’identité ou la similitude partielles des produits en cause, les parties n’ayant, en substance, émis aucun grief à cet égard. Pour ce qui concerne la comparaison des signes, la chambre de recours a considéré qu’ils étaient similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Enfin, en ce qui concerne l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours a estimé, en raison du caractère distinctif moyen de la marque allemande antérieure, non contesté par les parties, de la similitude des signes et de l’identité ou de la similitude des produits visés, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

13      Par un recours devant le Tribunal enregistré sous la référence T‑628/15, la requérante a par ailleurs attaqué la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 7 août 2015 (affaire R 2720/2014-5) refusant, sur opposition, d’admettre à l’enregistrement, pour des produits relevant de la classe 25, la marque figurative suivante :

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II.    Conclusion des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle a rejeté son recours contre la décision de la division d’opposition ;

–        renvoyer l’affaire devant l’EUIPO ;

–        à titre subsidiaire, réformer la décision attaquée de sorte qu’il soit fait droit à la demande d’enregistrement pour les produits suivants de la classe 25 : « Sous‑vêtements, pyjamas, tee-shirts, slips, culottes » ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

15      L’EUIPO et l’intervenanteconcluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

A.      Sur la procédure

16      Dans ses écritures, l’intervenante a fait observer que certaines annexes de la requête n’étaient pas rédigées dans la langue de la procédure et a, par conséquent, demandé au Tribunal de ne pas les prendre en considération comme telles.

17      Conformément au point 108 des dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure du Tribunal, le greffier du Tribunal a cependant demandé à la requérante de déposer une traduction dans la langue de la procédure des annexes en question. Cette traduction a été déposée le 30 avril 2016 et ces annexes ainsi traduites ont été signifiées à l’intervenante. Par conséquent, rien ne s’oppose à ce que celles-ci soient prises en considération.

18      Toujours dans ses écritures, l’intervenante a relevé également que la requête n’était signée que par un seul des trois avocats de la requérante et a estimé qu’elle devait, dès lors, être regardée comme n’ayant été déposée que par son seul signataire.

19      À cet égard, il suffit de constater que l’intervenante n’a pas invoqué l’irrecevabilité de la requête et que, en tout état de cause, cette dernière a bien été signée par l’un des trois avocats de la requérante, ce qui était suffisant au regard de l’article 19, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, de celui-ci et de l’article 3 de la décision du Tribunal, du 14 septembre 2011, relative au dépôt et à la signification d’actes de procédure par la voie de l’application e-Curia (JO 2011, C 289, p. 9).

20      La circonstance que la requête n’ait pas été signée par les trois représentants de la requérante est donc sans pertinence.

B.      Sur l’objet du recours

21      Lors de l’audience, la requérante a précisé qu’elle limitait ses conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée en ce que celle-ci avait rejeté son recours contre la décision de la division d’opposition pour les « sous-vêtements, pyjamas et tee-shirts » relevant de la classe 25.

22      L’intervenante n’a pas soulevé d’objection à cet égard. En revanche, l’EUIPO a considéré que cette limitation de l’objet du recours était tardive.

23      Il importe, d’emblée, de rappeler que, aux termes de l’article 26, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 207/2009 (devenu article 31, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001), « la demande de marque […] doit contenir […] la liste des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé ». En outre, l’article 43, paragraphe 1, du règlement nº 207/2009 (devenu article 49, paragraphe 1 du règlement 2017/1001) prévoit que, devant l’EUIPO, « [l]e demandeur peut à tout moment retirer sa demande de marque [...] ou limiter la liste des produits ou services qu’elle contient ».

24      Par ailleurs, le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO que si, au moment où celle-ci a été prise, elle était entachée de l’un des motifs d’annulation ou de réformation visés à l’article 65, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009 (devenu article 72, paragraphe 2, du règlement 2017/1001). En effet, conformément à l’article 76 dudit règlement (devenu article 95 du règlement 2017/1001), le Tribunal doit statuer au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours. En revanche, le Tribunal ne saurait annuler ou réformer la décision de la chambre de recours pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son adoption [voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2014, Peri/OHMI (Forme d’un tendeur à vis), T‑171/12, EU:T:2014:817, points 13 et 14 et jurisprudence citée].

25      Il s’ensuit que, en principe, une limitation de la liste des produits ou des services figurant dans une demande de marque qui intervient postérieurement à l’adoption de la décision de la chambre de recours attaquée devant le Tribunal ne peut affecter la légalité de cette décision (voir arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 18 et jurisprudence citée).

26      Toutefois, il convient également de relever que la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO peut être contestée devant le Tribunal en ce qui concerne uniquement certains des produits ou des services figurant sur la liste visée par la demande d’enregistrement de la marque concernée. Dans un tel cas, cette décision devient définitive pour les autres produits ou services figurant sur la même liste (voir arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 19 et jurisprudence citée).

27      Compte tenu de cette possibilité, le Tribunal a interprété une déclaration devant lui du demandeur de la marque, postérieure donc à la décision de la chambre de recours, selon laquelle il retirait sa demande pour certains des produits visés initialement comme une déclaration que la décision attaquée n’était contestée que pour autant que cette décision visait le reste des produits concernés, ou comme un désistement partiel, dans le cas où cette déclaration intervenait à un stade avancé de la procédure devant le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 20 et jurisprudence citée).

28      Toutefois, si la limitation de la liste des produits concernés a pour objet de modifier une ou plusieurs caractéristiques de cette liste de sorte qu’il ne puisse être exclu que cette modification ait un effet sur l’examen de la marque effectué par les instances de l’EUIPO au cours de la procédure administrative, une telle modification au stade du recours devant le Tribunal équivaudrait à une modification de l’objet du litige en cours d’instance, interdite par l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal. Aussi, une telle limitation ne pourrait être prise en compte pour l’examen du bien-fondé du recours (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 25 septembre 2014, Forme d’un tendeur à vis, T‑171/12, EU:T:2014:817, point 21 et jurisprudence citée).

29      En l’espèce, la requérante a procédé à une limitation des produits visés par sa demande de marque de l’Union européenne lors de l’audience et donc postérieurement à l’adoption de la décision attaquée.

30      Il n’apparaît toutefois pas que cette limitation ait eu pour objet d’apporter à une ou plusieurs caractéristiques de la liste des produits pour lesquels la requérante avait demandé l’enregistrement de la marque en cause une modification susceptible d’influencer l’examen de cette marque par l’EUIPO, qui ne le soutient d’ailleurs pas.

31      Dans ces conditions, conformément à la jurisprudence citée au point 27 ci-dessus, il y a lieu de considérer que, lors de l’audience, la requérante s’est valablement désistée partiellement de son recours.

32      Partant, tant les conclusions en annulation que les conclusions subsidiaires en réformation doivent désormais être lues, conformément à la volonté de la requérante, comme étant dirigées contre la décision attaquée en ce que celle-ci a rejeté son recours contre la décision de la division d’opposition en ce qui concerne les « sous-vêtements, pyjamas et tee-shirts » relevant de la classe 25.

C.      Sur les conclusions en annulation et tendant au renvoi de l’affaire devant l’EUIPO

33      À l’appui de son recours, la requérante soulève un unique moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. À la lecture de ses développements, ce moyen peut néanmoins être divisé en deux branches, tirées, la première, de l’erreur résultant de la prise en considération de la seule marque allemande antérieure et, la seconde, de l’erreur commise dans l’appréciation de la similitude des signes et des produits en cause. Il convient de commencer l’examen du moyen par cette seconde branche.

1.      Sur la seconde branche, tirée de l’erreur commise dans l’appréciation de la similitude des signes et des produits en cause

34      La requérante fait en substance valoir qu’en l’absence de similitudes entre les signes et les produits en conflit il n’existerait pas de risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures.

a)      Observations liminaires

35      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement 2017/1001), il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

36      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

37      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des signes en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services désignés par les marques en cause. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

38      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

b)      Sur le public pertinent

39      Au point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, au vu de la nature des produits concernés, le risque de confusion devait être analysé du point de vue du grand public, qui est normalement informé et raisonnablement attentif et avisé et fait preuve d’un niveau d’attention moyen.

40      Il y a lieu de confirmer cette constatation, au demeurant non contestée.

c)      Sur la comparaison des signes

41      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30]. L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, la requérante invoque des griefs communs, d’une part, aux appréciations des similitudes visuelle et phonétique et, d’autre part, aux appréciations des similitudes visuelle et conceptuelle. Il incombe donc au Tribunal de vérifier si ces similitudes existent en tenant compte de la présentation des arguments de la requérante.

1)      Sur les griefs communs aux appréciations des similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle

43      À titre liminaire, la requérante fait observer, de manière générale, que les trois marques antérieures consistent en une marque verbale et en deux marques figuratives, tandis que la marque demandée est seulement une marque verbale.

44      Il convient cependant de rappeler que la chambre de recours a limité son examen d’un risque de confusion à la comparaison de la marque demandée avec la marque allemande antérieure. De plus, cette marque est une marque figurative, composée d’un rectangle noir, d’un point blanc ainsi que d’un élément verbal, à savoir le terme « bianca ».

45      Or, rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence de similitudes entre une marqueverbale, d’une part, et une marquefigurative, comprenant des éléments verbaux, d’autre part, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique et verbale capable de donner lieu à des impressions visuelle, phonétique et conceptuelle [voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 43].

46      Cela étant précisé, la requérante conteste l’existence d’une similitude tant visuelle que phonétique au motif que, sur ces plans, il n’existe aucune ressemblance entre les marques en cause, puisque leurs éléments figuratifs présenteraient un caractère dominant et très distinctif. De plus, l’expression « biancaluna » se distinguerait du mot « bianca » non seulement sur le plan visuel, mais aussi sur le plan conceptuel

47      Parmi ses arguments, la requérante fait référence, en ce qui concerne la marque demandée, à des éléments de la marque figurative faisant l’objet de l’affaire T‑628/15, évoquée au point 13 ci-dessus, et qui est ainsi étrangère à la présente affaire. Il n’y a donc pas lieu de tenir compte de tels éléments, seuls ceux de la marque demandée devant être comparés à ceux de la marque allemande antérieure.

2)      Sur la similitude visuelle

48      La chambre de recours a relevé, au point 30 de la décision attaquée, que, sur le plan visuel, les signes en conflit coïncident par le mot « bianca », qui constitue l’élément verbal de la marque allemande antérieure et qui est intégralement reproduit dans la marque demandée, dont il représente les six premières lettres. De plus, la chambre de recours a observé que la marque allemande antérieure n’est que légèrement ornementée et que, en raison du début commun de leur élément verbal respectif, les deux signes en conflit étaient visuellement similaires.

49      Il y a néanmoins lieu de rappeler que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et qu’il ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

50      Toutefois, en l’espèce, il convient de relever que, dans la marque – verbale – demandée, l’élement « bianca », placé en début de signe, attire le regard en premier, de sorte que l’élément « luna » est plutôt neutralisé [voir, par analogie, arrêt du 14 octobre 2009, Ferrero/OHMI – Tirol Milch (TiMi KiNDERJOGHURT), T‑140/08, EU:T:2009:400, point 57]. En effet, dans les signes verbaux ou dans les signes contenant un élément verbal, le consommateur prête généralement une plus grande attention à la première partie et s’en souviendra plus clairement que du reste du signe. Cela signifie que le début d’un signe influence en général grandement l’impression d’ensemble produite par la marque [voir, en ce sens, arrêts du 25 mars 2009, L’Oréal/OHMI – Spa Monopole (SPA THERAPY), T‑109/07, EU:T:2009:81, point 30, et du 15 décembre 2009, Trubion Pharmaceuticals/OHMI – Merck (TRUBION), T‑412/08, non publié, EU:T:2009:507, point 40].

51      De surcroît, il y a lieu d’admettre, ainsi que le soutient à juste titre l’EUIPO, que, dans la marque allemande antérieure, le rectangle noir et le point blanc sont susceptibles d’être perçus comme étant uniquement des éléments décoratifs, de sorte que le public pertinent ne perçoit vraisemblablement aucun de ces éléments comme étant dominant sur le plan visuel [voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2013, SFC Jardibric/OHMI – Aqua Center Europa (AQUA FLOW), T‑417/12, non publié, EU:T:2013:550, point 65].

52      Il découle de ce qui précède que, malgré la présence de l’élément « luna » dans la marque demandée ainsi que du rectangle noir et du point blanc dans la marque allemande antérieure, selon une impression d’ensemble, les deux signes en conflit apparaissent similaires sur le plan visuel. Il convient donc d’approuver en cela l’appréciation de la chambre de recours.

3)      Sur la similitude phonétique

53      La chambre de recours a observé, au point 31 de la décision attaquée, que la prononciation des deux signes en litige coïncidait pour ce qui est de l’élément verbal « bianca » et que, en raison de leur début commun et donc de leur prononciation en partie similaire, leur similitude devait être admise sur le plan phonétique.

54      À cet égard, il y a lieu de constater que, si la marque allemande antérieure comporte moins de syllabes que la marque demandée, l’élément « bianca » est prononcé en premier, de sorte qu’il frappe sans aucun doute l’esprit des consommateurs de la manière la plus importante (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, TiMi KiNDERJOGHURT, T‑140/08, EU:T:2009:400, point 57).

55      Il s’ensuit que, en dépit du fait que l’élément « luna » soit ajouté à l’élément « bianca » dans la marque demandée, les signes en litige peuvent être réputés similaires sur le plan phonétique, comme l’a soutenu la chambre de recours.

4)      Sur la similitude conceptuelle

56      S’agissant de la similitude conceptuelle, la chambre de recours a relevé, au point 33 de la décision attaquée, que le mot « bianca » est connu en Allemagne comme un prénom féminin. Elle a également considéré que le public allemand ne pouvait pas reconnaître un concept dans le terme composé des deux mots « bianca » et « luna », dans la mesure où ce dernier terme ne serait pas un mot allemand. La chambre de recours en a déduit que le « concept de la lune » invoqué devant elle par la requérante n’était pas convaincant, probablement même pas pour les consommateurs qui pourraient savoir que « luna » signifie « lune » dans certaines langues. En conséquence, la chambre de recours a considéré que la marque demandée n’avait pas de signification conceptuelle pour le public pertinent et elle a estimé que, en l’absence de renvoi à un concept, aucune différence entre les signes en conflit ne pouvait être constatée sur le plan conceptuel.

57      Il convient de rappeler que, si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en demeure pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci, sur le plan conceptuel, en des éléments verbaux qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [arrêt du 12 novembre 2008, ecoblue/OHMI – Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (Ecoblue), T‑281/07, non publié, EU:T:2008:489, points 30 et 35].

58      Devant le Tribunal, la requérante soutient que, tant du point de vue du consommateur de langue italienne que de celui d’un consommateur pratiquant une autre langue de l’Union européenne, le mot « biancaluna » présente un caractère distinctif, parce que les deux mots « bianca » et « luna » ainsi que leur combinaison « biancaluna » ne sont pas descriptifs des caractéristiques des produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé. De plus, selon les règles de la grammaire italienne, l’expression correcte serait « luna bianca », de sorte que la juxtaposition inversée des deux mots ne constituerait pas une expression connue en italien. L’expression « biancaluna » constituerait un néologisme et serait différente sur le plan conceptuel du sens à donner au mot « bianca ».

59      Il y a lieu d’observer d’emblée que la chambre de recours n’a pas considéré que la marque demandée serait descriptive d’une caractéristique des produits concernés.

60      Cela étant précisé, la requérante n’a pas réfuté la constatation de la chambre de recours selon laquelle le mot « bianca » correspondrait, en Allemagne, à un prénom féminin. En outre, comme le relève à juste titre l’EUIPO, l’argument de la requérante tiré du caractère inhabituel de la juxtaposition des mots « bianca » et « luna » au regard de la grammaire italienne est dépourvu d’à-propos dans la mesure où, pour la marque allemande antérieure, le public pertinent est le consommateur moyen allemand.

61      Par ailleurs, dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le terme « luna » n’a aucune signification en Allemagne. Toutefois, l’intervenante expose, à juste titre, que le mot « luna » y est un synonyme de « Mond », de sorte qu’il peut être compris par le public pertinent comme signifiant « lune ». Plus précisément, en tant que nom, le mot « luna » est un synonyme poétique de « Mond » et désigne en outre, même en allemand, la déesse de la lune. Par ailleurs, l’adjectif « lunar » renvoie à ce qui concerne la lune, de même que l’adjectif « lunarisch », qui est cependant vieilli.

62      L’erreur ainsi commise par la chambre de recours quant au fait que le mot « luna » serait inconnu en allemand est cependant sans conséquence en l’espèce dans la mesure où il a été considéré, en tout état de cause, que le « concept de la lune », invoqué par la requérante dans ses écrits devant l’EUIPO, n’était pas convaincant, probablement même pas pour les consommateurs qui pourraient savoir que le mot « luna » signifie « lune ».

63      Cette conclusion doit en effet être acceptée. La requérante n’établit pas, en l’espèce, que la seule association du mot « luna » au mot « bianca », dont elle ne conteste pas qu’il soit un prénom féminin pour le public allemand, aurait, pour celui-ci, une charge conceptuelle particulière par rapport au signe BIANCA.

64      Au contraire, « bianca » est l’élément distinctif de la dénomination sociale de l’intervenante, comme celle-ci le fait valoir. Aussi, accolé exclusivement au mot « luna », il peut être perçu comme une référence à cette dernière et le signe BIANCALUNA peut faire croire au public pertinent que les produits concernés sont une ligne de vêtements de Bianca-Moden ou, tout au moins, celle d’une entreprise liée économiquement.

65      Partant, en toute hypothèse, il peut être considéré que c’est à juste titre que la chambre de recours a, en définitive, considéré que la comparaison des signes en conflit n’avait révélé aucune différence sur le plan conceptuel.

5)      Sur la comparaison globale

66      Il résulte de la comparaison d’ensemble des signes en conflit que la chambre de recours a considéré à juste titre que ces derniers étaient similaires compte tenu de leurs similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle.

d)      Sur la comparaison des produits

67      La chambre de recours a indiqué, au point 24 de la décision attaquée, qu’elle ne voyait aucune raison de contester l’appréciation de la division d’opposition, qui avait conclu que les produits compris dans les classes 24 et 25 concernés par la demande d’enregistrement et les produits couverts par la marque allemande antérieure étaient en partie identiques et en partie similaires.

68      Dans sa requête, la requérante a contesté cette appréciation en soutenant qu’il n’existait aucun risque de confusion entre les produits désignés par la marque allemande antérieure, en ce que celle-ci porterait sur des « vêtements du dessus », et ceux visés par la marque demandée, dans la mesure où il s’agirait de « sous-vêtements ».

69      Comme l’observe cependant l’EUIPO, les produits couverts par la marque allemande antérieure ne se limitent pas à des « vêtements du dessus », mais s’étendent à la catégorie des « vêtements » au sens large, comportant des « sous-vêtements ».

70      De surcroît, il convient de rappeler (voir point 21 ci-dessus) que, invitée lors de l’audience à clarifier ses prétentions, la requérante a précisé qu’elle limitait son recours aux « sous-vêtements, pyjamas et tee-shirts » relevant de la classe 25. Or, les pyjamas et les tee-shirts ne peuvent en eux-mêmes être qualifiés de « sous-vêtements » pour les besoins de la distinction effectuée par la requérante dans sa requête. En effet, les pyjamas sont des vêtements de nuit ou d’intérieur et de temps libre amples et légers composés d’une veste et d’un pantalon, tandis que les tee-shirts sont des pièces d’habillement en coton, sans col et à manches courtes, dont la forme rappelle celle de la lettre majuscule T, et qui peuvent être portés indifféremment comme sous-vêtements ou comme vêtements du dessus.

71      Par conséquent, la distinction que la requérante a prétendu opérer dans sa requête entre les « vêtements du dessus », qui caractériseraient les produits visés par la marque allemande antérieure, et les « sous-vêtements », qui définiraient en substance les produits visés par la marque demandée, est sans fondement.

e)      Sur le risque de confusion

72      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

73      La chambre de recours a estimé, en l’espèce, que la marque allemande antérieure était dotée d’un caractère distinctif moyen, ce qui n’a pas été contesté par les parties. Elle a aussi considéré que les signes étaient similaires et que les produits en cause étaient soit identiques, soit similaires. En conséquence, elle a considéré qu’il existait effectivement un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent pour les produits en cause.

74      La requérante, pour sa part, s’est bornée, quant à l’appréciation globale du risque de confusion, à réaffirmer, à tort, l’existence de prétendues différences entre les produits concernés et les signes en conflit. Partant, il suffit de constater, à la lumière des considérations ci-dessus, que doit être approuvée la conclusion de la chambre de recours confirmant l’appréciation de la division d’opposition.

75      Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que la seconde branche du moyen, tirée de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, n’est pas fondée.

2.      Sur la première branche, tirée de l’erreur résultant de la prise en considération de la seule marque allemande antérieure

76      La requérante prétend que la chambre de recours a commis une erreur en basant exclusivement son raisonnement sur l’examen d’un risque de confusion entre la marque demandée et la marque allemande antérieure, pour laquelle aucune preuve de l’usage ne devait être produite. Ce faisant, l’EUIPO aurait éludé la question des marques de l’Union européenne antérieures dont elle avait demandé que soit établi l’usage et l’EUIPO n’aurait pas statué sur la coexistence des marques en litige sur la totalité du marché de l’Union.

77      À cet égard, il convient de rappeler que, dans le cas d’une opposition fondée sur plusieurs marques antérieures nationales et de l’Union européenne, il n’y a aucune obligation, pour l’EUIPO, de donner priorité à ces dernières. Ainsi qu’il découle du sixième considérant du règlement n° 207/2009 (devenu le septième considérant du règlement 2017/1001), le droit des marques de l’Union européenne ne se substitue pas aux droits des marques des États membres [voir, en ce sens, ordonnance du 11 mai 2006, TeleTech Holdings/OHMI – Teletech International (TELETECH INTERNATIONAL), T‑194/05, EU:T:2006:124, point 35]. De plus, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 existe dans une partie de l’Union [arrêt du 21 mars 2011, Visti Beheer/OHMI – Meister (GOLD MEISTER), T‑372/09, non publié, EU:T:2011:97, point 20].

78      Or, il résulte de l’examen de la seconde branche du moyen que la chambre de recours a pu conclure à juste titre à l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et la marque allemande antérieure.

79      Partant, la première branche du moyen est inopérante.

80      Les conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée et au renvoi de l’affaire devant l’EUIPO doivent dès lors être rejetées.

D.      Sur les conclusions en réformation

81      À titre subsidiaire, la requérante demande au Tribunal de réformer la décision attaquée de sorte que, au vu des points 21 et suivants ci-dessus, il soit fait droit à sa demande d’enregistrement pour les produits suivants relevant de la classe 25 : « Sous‑vêtements, pyjamas et tee-shirts ».

82      Aucune des branches du moyen soulevé par la requérante au soutien de ses conclusions en annulation n’étant fondée, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les conclusions en réformation.

 Sur les dépens

83      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Frame Srl est condamnée aux dépens.

Kanninen

Calvo-Sotelo Ibáñez-Martín

Reine

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 novembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.