Language of document : ECLI:EU:T:2008:64

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

11 mars 2008 (*)

« Responsabilité non contractuelle – Non-renouvellement d’un contrat de travail financé par le FED – Absence de comportement illégal de la Commission – Compétence du Tribunal »

Dans l’affaire T‑301/05,

Philippe Guigard, demeurant à Paris (France), représenté initialement par Mes S. Rodrigues et A. Jaume, puis par Mes Rodrigues et C. Bernard-Glanz, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée initialement par M. D. Martin et Mme K. Herrmann, puis par M. F. Dintilhac et Mme G. Boudot, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours en indemnité visant à obtenir la réparation du préjudice prétendument subi par le requérant en raison du comportement prétendument fautif de la Commission lors du non-renouvellement de son contrat de travail conclu dans le cadre de la coopération technique entre la Communauté et la République du Niger financée par le Fonds européen de développement (FED),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz (rapporteur), juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 octobre 2007,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        La quatrième convention conclue entre les États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et la Communauté économique européenne, signée à Lomé le 15 décembre 1989 (approuvée par la décision 91/400/CECA, CEE du Conseil et de la Commission, du 25 février 1991, concernant la conclusion de la quatrième convention ACP-CEE, JO L 229, p. 1), telle que révisée par l’accord signé à Maurice le 4 novembre 1995 (JO 1998, L 156, p. 3, ci-après la « quatrième convention de Lomé »), prévoit en son article 312 :

« 1.      Le gouvernement de chaque État ACP désigne un ordonnateur national qui le représente pour toutes les opérations financées sur les ressources du Fonds [européen de développement] gérées par la Commission […]

2.      L’ordonnateur national peut déléguer une partie de ses attributions ; il informe l’ordonnateur principal des délégations auxquelles il a procédé. »

2        La quatrième convention de Lomé stipule en son article 313, paragraphe 2, sous k), qu’au cours de l’exécution des opérations et sous réserve pour lui d’en informer le délégué de la Commission l’ordonnateur national décide du recrutement des consultants et d’autres experts de l’assistance technique.

3        Par ailleurs, l’article 314 de la quatrième convention de Lomé prévoit que tout document et toute proposition soumis par l’ordonnateur national à la Commission ou au délégué pour accord ou approbation est approuvé ou réputé approuvé dans les délais fixés par ladite convention, ou, à défaut, dans les 30 jours.

4        En outre, l’article 317 de la quatrième convention de Lomé prévoit :

« Le délégué reçoit les instructions nécessaires et les pouvoirs pour faciliter et accélérer la préparation, l’instruction et l’exécution des projets et programmes, ainsi que l’appui nécessaire pour ce faire. À cette fin, et en étroite collaboration avec l’ordonnateur national, le délégué :

a)      à la demande de l’État ACP concerné, participe et offre une assistance dans la préparation des projets et programmes et dans les négociations des contrats d’assistance technique ;

[…] »

 Antécédents du litige

5        Le 1er novembre 2001, le ministère des Finances et de l’Économie de la République du Niger, faisant fonction d’ordonnateur national (ci-après l’« ON »), a donné mandat à la Commission de « négocier, établir et conclure le contrat avec l’expert qui sera choisi par le Niger […] sur proposition de la Commission […] et de participer à la gestion du contrat au nom et pour le compte du Niger […] conformément aux dispositions contractuelles prévues dans le contrat type entre la Commission et l’expert établi par la Commission » (ci-après le « mandat »).

6        Le 7 mars 2002, le requérant, M. Guigard, a conclu un contrat de travail à durée déterminée avec la Commission qui, en tant que mandataire du gouvernement de la République du Niger, l’a engagé en qualité d’assistant technique auprès du ministère de l’Équipement et des Transports à Niamey (Niger) (ci-après le « contrat de travail »), financé par le Fonds européen de développement (FED).

7        Selon l’article 4 du contrat de travail, celui-ci est entré en vigueur le 10 mars 2002 pour une durée d’un an et venait à expiration le 9 mars 2003.

8        L’article 5 du contrat de travail stipule qu’il est régi par le droit belge et notamment par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, y compris les dispositions de cessation de contrat par l’une ou l’autre des deux parties contractantes.

9        En outre, selon l’article 6 du contrat de travail, tout litige entre les parties contractantes est soumis aux tribunaux de Bruxelles.

10      L’article 3, deuxième alinéa, des dispositions générales applicables aux contrats de travail à durée déterminée des assistants techniques pour les actions de coopération au bénéfice des pays tiers et dans le cadre de l’aide humanitaire ou alimentaire de la Communauté européenne, annexées au contrat de travail et qui en font partie intégrante (ci-après les « dispositions générales »), prévoit que le contrat de travail « pourra être renouvelé une seule fois, sur une même mission, pour une période déterminée, si le besoin [se] présente ».

11      Le 27 décembre 2002, l’ON a adressé une lettre au chef de la délégation de la Commission au Niger demandant le renouvellement du contrat de travail pour une durée de 30 mois.

12      Par courrier électronique de la Commission du 4 mars 2003, le requérant a été informé que le contrat de travail n’allait pas être prolongé.

13      Par lettre du 7 mars 2003 adressée au chef de délégation, l’ON a réitéré la demande de reconduction du contrat de travail pour une durée de 30 mois, en se référant explicitement à l’article 314 de la quatrième convention de Lomé.

14      Par lettre du même jour envoyée par le chef de délégation, la Commission a informé l’ON qu’elle ne pouvait accéder à sa demande et que le requérant en avait été informé.

 Procédure et conclusions des parties

15      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 août 2005, le requérant a introduit le présent recours.

16      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 14 novembre 2005, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Le requérant a déposé ses observations sur cette exception d’irrecevabilité le 13 janvier 2006.

17      Par ordonnance du Tribunal du 28 septembre 2006, l’exception d’irrecevabilité a été jointe au fond.

18      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a posé par écrit des questions aux parties, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.

19      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 4 octobre 2007.

20      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté, du fait du comportement fautif de la Commission consécutif au non-renouvellement, dans des conditions irrégulières, du contrat de travail ;

–        condamner la Commission au versement de dommages et intérêts, pour réparation du préjudice tant professionnel (pour un premier montant indicatif de 350 000 euros) que moral (pour un montant laissé à la juste et équitable appréciation du Tribunal) ;

–        condamner la Commission aux dépens.

21      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou, subsidiairement, non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Arguments des parties

22      La Commission soutient que le Tribunal devrait décliner sa compétence au motif que le présent litige découlerait de l’interprétation du contrat de travail qui est régi par le droit belge et notamment par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, y compris les dispositions de cessation de contrat par l’une ou l’autre des deux parties contractantes.

23      À cet égard, la Commission indique que, selon la requête, le « comportement fautif » qu’on lui reproche est le « non-renouvellement, dans des conditions irrégulières, du contrat de travail », lequel serait clairement régi par ledit contrat et donc par la loi du 3 juillet 1978.

24      La Commission fait observer que, selon l’article 6 du contrat de travail, tout litige entre les parties contractantes est soumis aux tribunaux de Bruxelles. Or, il ne serait pas contesté que le contrat de travail ne contient pas de clause compromissoire au sens de l’article 238 CE, de sorte que seuls les tribunaux de Bruxelles seraient compétents pour régler un litige relatif à sa cessation. Le contexte plus général de la quatrième convention de Lomé ne saurait interférer ou contredire les dispositions claires du contrat de travail. La Commission rappelle la jurisprudence du Tribunal selon laquelle il suffit que la demande indemnitaire repose sur un fondement contractuel pour que le Tribunal décline sa compétence en l’absence de clause compromissoire au sens de l’article 240 CE (ordonnance du Tribunal du 18 juillet 1997, Nutria/Commission, T‑180/95, Rec. p. II‑1317).

25      Quant à l’argument du requérant selon lequel la poursuite des relations contractuelles aurait dû se concrétiser par la conclusion d’un deuxième contrat juridiquement distinct du premier, il ne tiendrait pas compte de l’article 3, deuxième alinéa, des dispositions générales qui prévoit explicitement la possibilité de renouvellement du contrat. Or, la Commission souligne que le requérant lui-même fait référence à cette disposition dans la requête.

26      En ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel le contrat de travail ne régit pas la poursuite des relations contractuelles au-delà de son terme, la Commission allègue que le requérant préjuge de la technique juridique de renouvellement qui aurait pu être employée en cas de prolongation de l’assistance technique. Bien que ce ne soit pas l’usage, il aurait en effet été tout à fait possible de simplement modifier l’article 4 du contrat de travail fixant la durée par un addendum. Or, en cas d’addendum au contrat de travail existant, ce serait bien les mêmes règles dudit contrat qui seraient applicables durant la période de prolongation. En tout état de cause, même dans l’hypothèse de la conclusion d’un nouveau contrat de travail entre la Commission et le requérant, celui-ci aurait été régi par les mêmes règles de résolution des litiges.

27      En outre, le requérant ne saurait affirmer qu’il ne fait aucun doute que les tribunaux de Bruxelles se déclareraient incompétents s’ils étaient saisis du présent litige. En effet, d’une part, le requérant ne fournirait aucun élément de droit pour étayer une telle affirmation. D’autre part, les tribunaux de Bruxelles auraient régulièrement l’occasion de se prononcer sur des litiges entre la Commission et des cocontractants dans la mesure où une telle clause attributive de compétence serait insérée dans certains types de contrat de droit privé signés par la Commission, dont notamment les contrats de travail pour les experts de l’assistance technique.

28      Enfin, la Commission souligne que l’essentiel des préjudices que le requérant invoque découlent directement du non-renouvellement du contrat et relèvent donc bien de la responsabilité contractuelle dont l’éventuelle mise en cause incombe aux tribunaux de Bruxelles.

29      Le requérant soutient que son recours est fondé exclusivement sur la violation d’obligations non contractuelles incombant à la Commission. Premièrement, il reproche à la Commission de ne pas avoir respecté la répartition des compétences entre l’ON et le chef de délégation, telle que prévue à l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé, ni, en tout état de cause, le délai impératif de 30 jours visé à l’article 314 de ladite convention pour répondre à la requête de l’ON quant au renouvellement du contrat de travail. Deuxièmement, il reproche à la Commission d’avoir méconnu les principes de bonne administration, de sollicitude et de protection de la confiance légitime.

30      En outre, selon le requérant, la poursuite des relations contractuelles entre les parties aurait dû être concrétisée par la conclusion d’un nouveau contrat qui n’aurait pas été le prolongement du contrat de travail mais aurait pu prendre la forme d’un contrat de prestation de services. En effet, la quatrième convention de Lomé n’imposerait pas de forme juridique pour les relations contractuelles avec les experts de l’assistance technique. Si, dans la requête, le requérant vise l’hypothèse du « renouvellement » de son contrat de travail, ce serait uniquement parce qu’une demande en ce sens aurait été faite par le ministre de l’Équipement et des Transports nigérien.

31      Par ailleurs, le contrat de travail ne régirait pas la poursuite des relations contractuelles au-delà de son terme. La question de la continuation des relations contractuelles au-delà dudit terme ne serait pas liée à la cessation du contrat de travail qui, en tout état de cause, était prévue pour le 9 mars 2003, indépendamment d’une suite éventuelle des relations contractuelles. Le présent litige ne serait donc pas un litige « fondé sur le présent contrat » au sens de l’article 6 du contrat de travail ayant lié les parties du 10 mars 2002 au 9 mars 2003. Il s’agirait au contraire d’un litige portant sur le non-respect de la procédure de mise en oeuvre des projets financés par le FED régie par la quatrième convention de Lomé. Il ne ferait donc aucun doute que les tribunaux de Bruxelles se déclareraient incompétents s’ils étaient saisis du présent litige. De plus, le juge communautaire ayant compétence exclusive pour connaître, en vertu de l’article 235 CE, des litiges relatifs à l’indemnisation d’un dommage imputable à la Communauté, les voies de recours nationales ne pourraient ipso facto permettre d’assurer au requérant une protection efficace de ses droits (arrêts du Tribunal du 13 décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T‑481/93 et T‑484/93, Rec. p. II‑2941, point 72, et du 20 mars 2001, Bocchi Food Trade International/Commission, T‑30/99, Rec. p. II‑943, point 32).

32      Enfin, quant à la nature du dommage qu’il aurait subi, le requérant allègue que, dans le système de responsabilité non contractuelle instauré par l’article 288, deuxième alinéa, CE, tel qu’interprété par la jurisprudence communautaire, si l’on peut considérer que la faute invoquée doit trouver sa source dans une obligation non contractuelle, une telle exigence ne serait pas requise pour le dommage.

 Appréciation du Tribunal

33      Il convient de rappeler que, en vertu des dispositions combinées des articles 225 CE et 238 CE, le Tribunal n’est compétent pour statuer, en première instance, sur les litiges de nature contractuelle portés devant lui par des personnes physiques ou morales qu’en vertu d’une clause compromissoire.

34      En l’absence de clause compromissoire au sens de l’article 238 CE, le Tribunal ne saurait, lorsqu’il est saisi d’un recours en indemnité présenté sur le fondement de l’article 235 CE, statuer sur ce recours dans la mesure où il porte, en réalité, sur une demande de dommages et intérêts d’origine contractuelle. Faute de quoi, le Tribunal étendrait sa compétence juridictionnelle au-delà des litiges dont la connaissance lui est limitativement réservée par l’article 240 CE, dès lors que cette disposition confie, au contraire, aux juridictions nationales la compétence de droit commun pour connaître des litiges auxquels la Communauté est partie (ordonnance Nutria/Commission, point 24 supra, point 39, et ordonnance du Tribunal du 18 juillet 1997, Oleifici Italiani/Commission, T‑44/96, Rec. p. II‑1331, point 38).

35      En l’espèce, il n’est pas contesté qu’une telle clause fait défaut et que, en vertu de l’article 6 du contrat de travail, tout litige entre les parties contractantes ou toute prétention, d’une partie contre l’autre, fondée sur le présent contrat, qui n’a pu faire l’objet d’un règlement amiable entre les parties contractantes est soumis aux tribunaux de Bruxelles.

36      La compétence du Tribunal pour statuer sur le présent recours dépend dès lors de la réponse à la question préalable de savoir si la responsabilité que la Commission peut encourir en raison du comportement qui lui est reproché est ou non de nature contractuelle (voir, en ce sens, ordonnance Nutria/Commission, point 24 supra, point 28, et arrêt du Tribunal du 25 mai 2004, Distilleria Palma/Commission, T‑154/01, Rec. p. II‑1493, point 37).

37      À cet égard, il y a lieu de constater qu’il ressort de la requête que le comportement fautif que le requérant reproche à la Commission est le « non-renouvellement, dans des conditions irrégulières, du contrat de travail ».

38      En outre, l’article 3, deuxième alinéa, des dispositions générales, qui font partie intégrante du contrat de travail, stipule que le contrat peut être « renouvelé une seule fois, sur une même mission, pour une période déterminée, si le besoin [se] présente », dans le respect de la loi belge du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail. Il y a lieu de relever à cet égard que le requérant se réfère expressément à cette disposition pour fonder son grief tiré du non-renouvellement du contrat de travail.

39      De même, les lettres de l’ON adressées à la Commission le 27 décembre 2002 et le 7 mars 2003, produites par le requérant en annexe à la requête au soutien de son allégation tirée du caractère fautif du non-renouvellement du contrat de travail, font expressément état d’un « renouvellement de contrat » ou encore d’une « reconduction du contrat ».

40      Il résulte de ce qui précède que, dans la mesure où le requérant fonde ses allégations sur l’absence de renouvellement du contrat de travail par la Commission, le Tribunal est incompétent pour connaître du présent recours.

41      Toutefois, il ressort également de la requête que le requérant invoque la violation d’obligations non contractuelles incombant à la Commission dans le cadre de l’application de la quatrième convention de Lomé à l’occasion de l’exécution d’un projet d’assistance technique financé par le FED, à savoir la violation de l’article 313, paragraphe 2, sous k), et de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé, ainsi que la violation des principes de bonne administration, de sollicitude et de protection de la confiance légitime.

42      Dans la mesure où l’article 313, paragraphe 2, sous k), et l’article 314 de la quatrième convention de Lomé, de même que les principes de bonne administration, de sollicitude et de protection de la confiance légitime, peuvent se rapporter à la conclusion d’un nouveau contrat indépendamment du premier, leur prétendue violation est détachable des liens contractuels unissant les parties au contrat de travail. Le Tribunal est donc compétent pour statuer sur le présent recours en ce qu’il porte sur la violation de ces dispositions et principes.

 Sur le fond

43      Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le dommage invoqué (arrêt de la Cour du 30 juin 2005, Alessandrini e.a./Commission, C‑295/03 P, Rec. p. I‑5673, point 61, et arrêt du Tribunal du 3 février 2005, Chiquita Brands e.a./Commission, T‑19/01, Rec. p. II‑315, point 76).

44      Dès lors que l’une des conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions (arrêt de la Cour du 15 septembre 1994, KYDEP/Conseil et Commission, C‑146/91, Rec. p. I‑4199, point 81, et arrêt du Tribunal du 20 février 2002, Förde-Reederei/Conseil et Commission, T‑170/00, Rec. p. II‑515, point 37).

45      En l’espèce, il convient d’examiner, en premier lieu, la condition relative à l’existence du comportement prétendument fautif de la Commission.

 Arguments des parties

46      Les comportements prétendument fautifs de la Commission invoqués par le requérant sont, d’une part, une violation de la quatrième convention de Lomé et, d’autre part, une violation des principes généraux de bonne administration, de sollicitude et de protection de la confiance légitime.

47      En premier lieu, en ce qui concerne la violation de la quatrième convention de Lomé, le requérant fait valoir que la Commission, en s’opposant au renouvellement du contrat de travail, a violé l’article 313, paragraphe 2, sous k), de ladite convention qui donnerait compétence exclusive à l’ON pour le recrutement des experts de l’assistance technique, la seule obligation de l’ON étant d’en informer le chef de délégation. La Commission aurait ainsi violé la répartition des compétences entre l’ON et le chef de délégation qui découle de cette disposition. À cet égard, le requérant fait notamment valoir que la Commission a été saisie officiellement le 27 décembre 2002 par l’ON d’une proposition de reconduction du contrat de travail en sa faveur.

48      Le requérant fait encore remarquer que le mandat vise la négociation, l’établissement et la conclusion du contrat avec l’expert et non la conclusion d’un nouveau contrat au terme de ce premier contrat. Le requérant précise, en outre, que ce genre d’habilitation, qui serait tout à fait courant et expressément prévu par la quatrième convention de Lomé, ne s’assimile en aucune manière à une délégation par l’ON de son pouvoir de décision, en vertu de l’article 313, paragraphe 2, sous k), de ladite convention, pouvoir qu’il retient en toute circonstance, mais constitue un mandat de gestion. Ladite habilitation aurait d’ailleurs été donnée après que le choix de l’ON s’est porté sur le requérant. Par ailleurs, dans la mesure où l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé attribue à l’ON le pouvoir de décider du recrutement des consultants et des autres experts de l’assistance technique, et dans l’hypothèse où, en application de cette disposition, le renouvellement du contrat d’un expert aurait été décidé par l’ON, la Commission n’aurait pu s’y opposer qu’en amenant l’ON à revoir sa décision, car ce serait ce dernier, et lui seul, qui décide. La Commission ne pourrait, en aucun cas, se substituer à l’ON ou invoquer l’habilitation qui lui a été donnée par l’ON pour négocier, établir et conclure un contrat avec un expert, ni pour décider à sa place de la conclusion ou non d’un nouveau contrat.

49      Par ailleurs, dans sa réponse du 26 mai 2006 aux questions du Tribunal, le requérant allègue, à titre subsidiaire, que la violation de la répartition des compétences prévue à l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé et le refus de la Commission de porter assistance à l’ON pour la conclusion d’un nouveau contrat avec le requérant impliquent aussi une violation de l’article 317, sous a), de ladite convention.

50      En outre, la Commission aurait également violé l’article 314 de la quatrième convention de Lomé en ne respectant pas le délai impératif de réponse de 30 jours prévu pour répondre à la proposition de l’ON quant au renouvellement du contrat. En effet, la demande de renouvellement du contrat du requérant aurait fait l’objet d’une requête officielle de la part de l’ON en date du 27 décembre 2002. Faute de réponse de la Commission, bien après l’expiration du délai impératif de réponse de 30 jours, l’ON aurait saisi à nouveau la Commission par lettre du 7 mars 2003 pour faire « application de l’article 314 de la [quatrième] convention de Lomé » et faire acter le « renouvellement du contrat ». Ce ne serait que par une lettre du même jour que la Commission aurait finalement fait connaître sa décision de ne pas donner suite à la demande de renouvellement.

51      En deuxième lieu, en ce qui concerne la prétendue violation des principes de bonne administration et de sollicitude, le requérant allègue que l’attitude adoptée par la Commission en l’espèce viole manifestement lesdits principes généraux, qu’elle serait pourtant tenue de respecter dans son action, conformément à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre à Nice (JO 2000, C 364, p. 1), et à la jurisprudence du Tribunal qui assimile ces principes à des garanties procédurales conférées par l’ordre juridique communautaire (arrêt du Tribunal du 17 mars 2005, Agraz e.a./Commission, T‑285/03, Rec. p. II‑1063, point 49). Par ailleurs, le requérant conteste le point de vue de la Commission selon lequel lesdits principes seraient uniquement d’application dans des situations dans lesquelles l’administration communautaire dispose d’un large pouvoir d’appréciation, car l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne ferait pas de distinction entre pouvoir d’appréciation et compétence liée.

52      En effet, si la Commission n’était pas d’accord pour renouveler le contrat de travail, elle aurait dû justifier sa position auprès de l’ON de façon à le faire revenir sur sa décision. Or, la Commission aurait non seulement réagi avec beaucoup de retard (près de 70 jours au lieu des 30 jours requis), mais aurait de surcroît mis l’ON devant le fait accompli par son courrier du 7 mars 2003, en arguant d’une décision de son siège. Toutefois, le requérant se demande pour quelle raison cette prétendue décision du siège n’avait pas été préalablement portée à la connaissance de l’ON. En tout état de cause, la Commission serait restée en défaut de faire état d’une telle décision du siège.

53      Par ailleurs, en ne répondant pas dans les délais requis aux sollicitations tant de l’ON que du requérant, la Commission aurait pu créer chez ce dernier une confiance légitime dans le respect de la procédure de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé et donc dans le caractère acquis, 30 jours après notification de la demande de l’ON, du renouvellement du contrat de travail. Dès lors, en décidant brutalement de ne pas procéder à ce renouvellement, la Commission aurait méconnu la confiance légitime qu’elle avait suscitée chez le requérant. Cette confiance se serait avérée d’autant plus légitime que, ayant été informé du litige, M. N., à l’époque membre de la Commission chargé des questions de développement, avait tenu à préciser par écrit que le requérant demeurait éligible pour des missions dans d’autres pays. Or, cet engagement n’aurait pas été respecté.

54      La Commission conteste les arguments du requérant et conclut que, la première condition pour engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté, à savoir l’existence d’un comportement illégal de la Commission, n’étant pas remplie, le recours devrait être rejeté pour cette seule raison.

 Appréciation du Tribunal

55      Selon une jurisprudence constante, le comportement illégal reproché à une institution communautaire pouvant donner lieu à l’engagement de la responsabilité de la Communauté doit consister en une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers (voir arrêt de la Cour du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, point 42, et la jurisprudence citée).

56      En ce qui concerne l’exigence selon laquelle la violation d’une telle règle de droit doit être suffisamment caractérisée, le critère décisif pour considérer que cette exigence est remplie est celui de la méconnaissance manifeste et grave par cette institution des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation. Lorsque l’institution en cause ne dispose que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit communautaire peut suffire à établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée (arrêt Bergaderm et Goupil/Commission, point 55 supra, points 43 et 44).

57      En l’espèce, le requérant invoque, en substance, deux manquements de la Commission, susceptibles d’engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté, à savoir, d’une part, la violation de l’article 313, paragraphe 2, sous k), et de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé et, d’autre part, la violation des principes généraux de bonne administration, de sollicitude et de protection de la confiance légitime.

58      S’agissant, en premier lieu, de la prétendue violation de l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé, le requérant soutient que la Commission, en s’opposant à la conclusion d’un nouveau contrat de travail, a méconnu la répartition des compétences entre l’ON et le chef de délégation découlant de ladite disposition en ce que celle-ci conférerait une compétence exclusive à l’ON pour décider du recrutement des experts de l’assistance technique.

59      Il suffit de constater, à cet égard, que, en vertu de l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé, c’est à l’ON qu’il incombe, au cours de l’exécution des opérations et sous réserve pour lui d’en informer le délégué de la Commission, de décider du recrutement de consultants et d’autres experts de l’assistance technique.

60      Dans ces circonstances, le caractère éventuellement fautif de l’absence de conclusion d’un nouveau contrat de travail avec le requérant ne saurait être imputable qu’à l’ON et non à la Commission.

61      Il s’ensuit que les arguments du requérant tirés d’une violation de l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé ne sauraient établir l’existence d’un comportement fautif de la Commission.

62      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument du requérant, formulé au demeurant seulement lors de l’audience, selon lequel la faute commise par la Commission consisterait dans l’absence de mise en œuvre de la décision de l’ON de conclure un nouveau contrat avec le requérant.

63      Premièrement, aucune des deux lettres des 27 décembre 2002 et 7 mars 2003 ne fait expressément état d’une décision de l’ON de conclure un nouveau contrat avec le requérant, ni ne donne injonction à la Commission de conclure un tel contrat.

64      Deuxièmement, le requérant n’a pas précisé, en dépit des questions adressées en ce sens par le Tribunal, les dispositions de la quatrième convention de Lomé, ni aucune autre disposition applicable en la matière, desquelles il ressortirait que, à supposer que l’ON ait effectivement décidé d’engager le requérant, il appartenait à la Commission de conclure elle-même un contrat avec le requérant afin de mettre en œuvre cette décision. Il convient d’observer à cet égard que, si la Commission a certes conclu et signé le premier contrat avec le requérant, elle ne l’a toutefois fait qu’en vertu d’un mandat qui lui avait été concédé par l’ON à cette fin le 1er novembre 2001. Or, le requérant n’a pas soutenu que l’ON aurait octroyé un mandat de même nature à la Commission afin de conclure un nouveau contrat avec lui, ni que le mandat du 1er novembre 2001 était toujours en vigueur. En tout état de cause, ce dernier confère à la Commission mandat de « négocier, établir et conclure le contrat avec l’expert qui sera choisi par le Niger […] sur proposition de la Commission ». Il ne ressort toutefois d’aucune pièce du dossier, et le requérant ne l’a d’ailleurs nullement soutenu, que la Commission a proposé de conclure un nouveau contrat avec le requérant.

65      Troisièmement, il ne ressort d’aucune pièce du dossier que l’ON, après avoir été informé par courrier du 7 mars 2003 de la Commission que celle-ci ne pouvait pas accéder à sa demande de renouvellement du contrat de travail, ait contesté cette position et exigé qu’elle conclue un nouveau contrat avec le requérant en exécution de la décision que l’ON aurait prise.

66      Par ailleurs, dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal, le requérant allègue, à titre subsidiaire, que la violation de la répartition des compétences prévue à l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé et le refus de la Commission de porter assistance à l’ON pour la conclusion d’un nouveau contrat avec lui impliquent également une violation de l’article 317, sous a), de ladite convention, selon lequel le délégué de la Commission, à la demande de l’État ACP concerné, participe et offre une assistance dans la préparation des projets et des programmes et dans les négociations des contrats d’assistance technique.

67      À cet égard, il suffit de rappeler que, aux termes de l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Or, force est de constater en l’espèce que le requérant s’est prévalu de la violation de l’article 317, sous a), de la quatrième convention de Lomé pour la première fois dans ses réponses aux questions du Tribunal et que, dès lors, ce grief doit être rejeté comme tardif.

68      En tout état de cause, ce grief ne saurait être retenu dès lors qu’il se confond en substance avec celui tiré de la prétendue violation par la Commission de l’article 313, paragraphe 2, sous k), de la quatrième convention de Lomé, lequel a été rejeté.

69      S’agissant, en deuxième lieu, de la prétendue violation par la Commission de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé, le requérant reproche à la Commission de ne pas avoir respecté le délai impératif de 30 jours qui y est fixé pour répondre à la proposition de l’ON relative au renouvellement du contrat.

70      Il convient d’abord de rappeler à cet égard qu’en vertu de cet article tout document et toute proposition soumis par l’ON à la Commission ou à son délégué pour accord ou approbation est approuvé ou réputé approuvé dans les délais fixés par la quatrième convention de Lomé ou, à défaut, dans les 30 jours.

71      En l’espèce, l’ON a adressé une première lettre à la Commission en date du 27 décembre 2002 par laquelle il a demandé le renouvellement du contrat de travail du requérant pour une durée de 30 mois à compter de mars 2003. Dans une deuxième lettre du 7 mars 2003 adressée également à la Commission, l’ON lui a rappelé que le contrat de travail arrivait à son terme le 9 mars 2003 et s’est référé à « l’article 314 de la [quatrième] convention de Lomé […] pour reconduire [le] contrat afin que le ministère employeur soit fixé et investisse l’intéressé dans ses tâches dans la durée ».

72      Force est de constater que, contrairement à l’allégation du requérant, la lettre de l’ON du 7 mars 2003 ne vise pas, d’une part, à informer la Commission de l’écoulement du délai de 30 jours depuis son courrier du 27 décembre 2002 et que, en application de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé, la décision qu’aurait prise l’ON de renouveler le contrat de travail est réputée approuvée, ni, d’autre part, à enjoindre à la Commission de faire acter ladite décision de renouvellement. En revanche, cette lettre mentionne explicitement, pour la première fois, l’application de ladite disposition, ce qui a pour effet de déclencher le délai de 30 jours seulement à partir de cette date.

73      Or, la Commission a informé l’ON de sa réponse négative quant au renouvellement du contrat du requérant par courrier du même jour, soit dans le respect dudit délai. Partant, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir commis une faute à cet égard.

74      En tout état de cause, à supposer même qu’il faille considérer que la lettre du 27 décembre 2002 a déclenché le délai de 30 jours, il suffit de constater que l’article 314 de la quatrième convention de Lomé prévoit expressément la possibilité pour la Commission de s’abstenir de prendre position sur toute proposition de l’ON dans le délai imparti ainsi que les conséquences qui découlent de cette abstention, à savoir que la proposition de l’ON est réputée approuvée. Il s’ensuit que l’absence de réponse de la Commission dans le délai de 30 jours à partir du 27 décembre 2002 ne saurait être constitutive d’une faute ayant causé le dommage allégué.

75      En effet, dans ces conditions, eu égard au régime prévu par l’article 313, paragraphe 2, sous k), et par l’article 314 de la quatrième convention de Lomé, il revenait à l’ON d’exercer pleinement son pouvoir de décision relatif au recrutement du requérant et, le cas échéant, de tirer les conséquences du silence de la Commission quant au choix du requérant et de procéder aux formalités nécessaires afin de conclure un nouveau contrat de travail avec ce dernier.

76      Dans ces circonstances, il n’apparaît pas que la Commission ait violé la quatrième convention de Lomé, de sorte que l’argumentation du requérant à cet égard doit être rejetée, sans qu’il soit besoin d’examiner si lesdits articles ont pour effet de conférer des droits aux particuliers.

77      En tout état de cause, à supposer même que le fait que la Commission ait répondu négativement par le courrier du 7 mars 2003 à la lettre de l’ON du 27 décembre 2002 puisse être considéré comme un comportement fautif en raison du non-respect du délai de 30 jours visé à l’article 314 de la quatrième convention de Lomé, cette faute n’est pas susceptible d’avoir causé le dommage allégué par le requérant. En effet, ladite réponse de la Commission est dépourvue d’effet juridique dès lors que, d’une part, il a été établi ci-dessus qu’il revenait à l’ON d’exercer pleinement son pouvoir de décision relatif au recrutement du requérant et, d’autre part, ainsi qu’il a été constaté au point 64 ci-dessus, le requérant n’a pas établi qu’il revenait à la Commission de conclure elle-même le contrat afin de mettre en œuvre la prétendue décision de l’ON de recruter le requérant.

78      S’agissant, en troisième lieu, de la prétendue violation des principes généraux, le requérant fait valoir, d’une part, que la Commission a méconnu les principes de bonne administration et de sollicitude en ce que sa réponse à la lettre de l’ON du 27 décembre 2002 ne serait intervenue que le 7 mars 2003, de sorte qu’elle aurait informé l’ON de l’absence de conclusion d’un nouveau contrat de travail avec le requérant près de 70 jours plus tard au lieu du délai de 30 jours requis par la quatrième convention de Lomé, et aurait ainsi mis l’ON devant le fait accompli.

79      Il suffit de constater à cet égard que le grief du requérant se confond en substance avec la prétendue violation par la Commission de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé. Or, ainsi que cela résulte des points 71 à 76 ci-dessus, la Commission n’a pas méconnu ladite disposition.

80      Il résulte de ce qui précède que la Commission n’a pas violé les principes de bonne administration et de sollicitude, de sorte que l’argumentation du requérant doit être rejetée.

81      Le requérant fait valoir, d’autre part, que la Commission, en décidant de ne pas procéder à la conclusion d’un nouveau contrat de travail, a méconnu la confiance légitime du requérant dans le respect de la procédure de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé et donc dans le caractère acquis, 30 jours après la demande de l’ON, de la conclusion dudit contrat de travail. À cet égard, le requérant se prévaut de la lettre du 9 avril 2003 du membre de la Commission, M. N., chargé à l’époque des questions de développement, de laquelle il ressort que le requérant demeurait éligible pour une nouvelle mission éventuelle.

82      Selon une jurisprudence constante, le droit de réclamer la protection de la confiance légitime, qui constitue l’un des principes fondamentaux de la Communauté, s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration communautaire, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître chez lui des espérances fondées. Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants et émanant de sources autorisées et fiables. En revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (voir arrêt du Tribunal du 19 mars 2003, Innova Privat-Akademie/Commission, T‑273/01, Rec. p. II‑1093, point 26, et la jurisprudence citée).

83      Force est de constater que le grief du requérant repose sur la prétendue violation de l’article 314 de la quatrième convention de Lomé. Or, il a été établi aux points 71 à 76 ci-dessus que la Commission n’a pas méconnu ladite disposition, de sorte que l’argument du requérant doit être rejeté à cet égard.

84      En ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel sa confiance légitime en la conclusion d’un nouveau contrat aurait été renforcée par la lettre du 9 avril 2003 du membre de la Commission M. N., il y a d’abord lieu de relever que l’obtention d’un nouveau contrat de travail n’est pas un droit dont bénéficie le requérant. Ensuite, il convient de constater que, outre le fait que ladite lettre est postérieure aux faits de l’espèce ayant conduit au manquement prétendument fautif de la Commission, ladite lettre indique notamment que, « M. Guigard étant repris sur la liste des experts individuels pour des travaux d’assistance technique au profit des pays tiers dans le cadre de la coopération extérieure de la Communauté européenne, il reste éligible pour une nouvelle mission éventuelle ». Il en ressort ainsi d’emblée qu’elle ne contient aucun engagement formel de la part de la Commission quant à la conclusion d’un nouveau contrat de travail avec le requérant mais fait, tout au plus, état de la possibilité d’un engagement pour une nouvelle mission éventuelle.

85      Il s’ensuit que la lettre de M. N. ne contient aucune assurance précise qui aurait pu faire naître chez le requérant des espérances fondées au sens de la jurisprudence citée au point 82 ci-dessus, de sorte que l’argument du requérant doit être rejeté.

86      Par conséquent, la Commission n’a pas violé le principe de protection de la confiance légitime.

87      La condition liée au comportement illégal de la Commission n’étant, dès lors, pas remplie en l’espèce, le recours doit être rejeté sans qu’il apparaisse nécessaire d’examiner les autres conditions d’engagement de ladite responsabilité.

 Sur les dépens

88      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à l’ensemble des dépens, conformément aux conclusions de la Commission.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Philippe Guigard est condamné aux dépens.

Jaeger

Tiili

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 mars 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : le français.