Language of document : ECLI:EU:T:2012:1

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

9 janvier 2012 (*)

« Recours en annulation – Aides d’État – Contrats concernant la vente de logements dans le cadre de la privatisation des logements publics à Neubrandenburg – Plainte – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité – Recours en carence »

Dans l’affaire T‑407/09,

Neubrandenburger Wohnungsgesellschaft mbH, établie à Neubrandenburg (Allemagne), représentée par Mes M. Núñez-Müller et J. Dammann, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Martenczuk et K. Gross, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Bavaria Immobilien Beteiligungsgesellschaft mbH & Co. Objekte Neubrandenburg KG, établie à Berlin (Allemagne),

et

Bavaria Immobilien Trading GmbH & Co. Immobilien Leasing Objekt Neubrandenburg KG, établie à Berlin (Allemagne),

représentées par Me C. von Donat, avocat,

parties intervenantes,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation de la prétendue décision de la Commission contenue dans la lettre du 29 juillet 2009 déclarant que certains contrats conclus par la requérante concernant la vente de logements dans le cadre de la privatisation de logements publics à Neubrandenburg ne relèvent pas du champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE et, d’autre part, une demande visant à faire constater la carence de la Commission, au sens de l’article 232 CE, dans la mesure où cette dernière n’aurait pas pris position sur lesdits contrats sur la base de l’article 4 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, V. Vadapalas et K. O’Higgins (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La requérante, Neubrandenburger Wohnungsgesellschaft mbH, est une entreprise communale (« kommunale Eigengesellschaft ») de droit allemand, détenue à 100 % par la ville de Neubrandenburg (Allemagne). Elle a pour objet la fourniture d’une quantité suffisante de logements dans cette ville et ses environs.

2        La requérante est propriétaire de plusieurs terrains à Neubrandenburg, sur lesquels sont implantés douze immeubles de logements locatifs, représentant un total de 557 logements.

3        Le 21 janvier 1998, afin de pouvoir assumer les charges d’entretien de ces immeubles, qui se trouvaient dans un état de délabrement, ainsi que des dettes datant de l’époque de l’ancienne République démocratique allemande, la requérante a conclu plusieurs contrats à long terme (ci-après les « contrats litigieux ») avec cinq entreprises liées à l’ancienne banque Berliner Bankgesellschaft, dont les intervenantes, Bavaria Immobilien Beteiligungsgesellschaft mbH & Co. Objekte Neubrandenburg KG et Bavaria Immobilien Trading GmbH & Co. Immobilien Leasing Objekt Neubrandenburg KG. Les contrats litigieux comprenaient notamment un contrat d’emphytéose, un contrat d’administration générale, un contrat forfaitaire global et des contrats de cession. Ils n’ont pas été notifiés préalablement à la Commission des Communautés européennes.

4        Par lettre du 30 mars 2007, la requérante a déposé une plainte auprès de la Commission sur la base de l’article 20, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1), concernant des aides d’État d’un montant de 23 millions d’euros environ qu’elle avait prétendument octroyées par les contrats litigieux. Elle a demandé l’ouverture d’une procédure formelle d’examen conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE (devenu article 108, paragraphe 2, TFUE).

5        La Commission a ouvert une enquête et a transmis la plainte à la République fédérale d’Allemagne. Ensuite, par courrier du 6 août 2007, elle a demandé des renseignements au ministère de l’Économie. Toutes les réponses de ce ministère ont été transmises à la requérante, qui a présenté une série d’observations, le 5 novembre 2007, le 26 février 2008, le 15 juillet 2008, le 30 septembre 2008, le 18 décembre 2008 et le 6 mars 2009.

6        Par lettre du 4 juin 2009, la requérante a demandé à la Commission, en vertu de l’article 232, deuxième alinéa, CE, d’ouvrir, dans un délai de deux mois, c’est-à-dire avant le 4 août 2009, la procédure formelle d’examen prévue par l’article 88, paragraphe 2, CE.

7        Par lettre du 29 juillet 2009 (ci-après la « lettre attaquée »), la Commission a répondu notamment ce qui suit :

« Les services de la Commission ont, de leur côté, examiné la conformité des contrats litigieux avec les conditions du marché et sont parvenus à la même conclusion que la juridiction [nationale], à savoir que ces contrats n’impliquent pas d’aide d’État au sens de l’article 87 CE. De plus, les services de la Commission intègrent dans leur argumentation une analyse de cash flow apportant la démonstration arithmétique que les contrats sont conformes aux conditions du marché. Les services de la Commission fondent leur évaluation de la conformité des contrats aux conditions du marché sur une appréciation globale de ceux-ci. En effet, […] les contrats font référence l’un à l’autre et n’auraient pas été conclus l’un sans l’autre. Il s’agit manifestement d’une opération de financement sous forme de ‘sale and lease back’. »

8        La Commission a précisé, dans la partie de la lettre attaquée intitulée « Conclusions », ce qui suit :

« Les services compétents de la [direction générale (DG) de la c]oncurrence considèrent donc, à titre provisoire, que les contrats litigieux faisant l’objet de [la] plainte n’impliquent pas d’aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Cette position ne constitue toutefois pas la position définitive de la Commission ; il s’agit seulement de constatations préliminaires établies par les services de la DG Concurrence d’après les informations disponibles à ce stade. Toute autre information pertinente de [la requérante] apportant des éléments substantiellement nouveaux et ne répétant pas des allégations déjà effectuées pourrait donner lieu à une nouvelle évaluation des faits. Ces informations, de même que, le cas échéant, une version non confidentielle de celles-ci, devront être communiquées par écrit à la DG Concurrence dans le mois suivant la date de la présente. Si aucune observation ne nous parvient dans les délais impartis, [la] plainte sera réputée retirée. »

9        Par lettre du 26 août 2009, la requérante a répondu à la lettre attaquée en contestant l’appréciation des faits opérée par la Commission et en l’invitant à ouvrir la procédure formelle d’examen dans un délai de deux semaines, c’est-à-dire avant le 9 septembre 2009.

10      Par lettre du 15 septembre 2009, la Commission a indiqué à la requérante que sa lettre du 26 août 2009 n’avait pas encore été traitée en raison de la période de congés et de la charge élevée de travail. Elle lui a toutefois signalé qu’une prise de position lui serait communiquée dans les semaines suivantes, après analyse de ses observations, tout en lui demandant de confirmer si elle acceptait cette approche.

11      Par lettre du 22 septembre 2009, la requérante a exprimé son désaccord avec l’approche proposée par la Commission en exposant que cette dernière souhaitait retarder la procédure et en relevant que le gestionnaire du dossier au sein de la Commission n’était pas en congé.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 octobre 2009, la requérante a introduit le présent recours.

13      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 21 décembre 2009, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité en application de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

14      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 3 février 2010, Bavaria Immobilien Beteiligungsgesellschaft mbH & Co. Objekte Neubrandenburg KG et Bavaria Immobilien Trading GmbH & Co. Immobilien Leasing Objekt Neubrandenburg KG ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnance du 28 avril 2010, le président de la quatrième chambre du Tribunal a admis cette intervention.

15      La requérante a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité le 19 février 2010.

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision contenue dans la lettre attaquée ;

–        à titre subsidiaire, déclarer, conformément à l’article 232 CE, que la Commission s’est illégalement abstenue d’ouvrir la procédure formelle d’examen, conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE ;

–        condamner la Commission aux dépens.

17      Dans son exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours en annulation irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, déclarer le recours en carence irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

18      Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter l’exception d’irrecevabilité.

19      Les parties intervenantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante à l’ensemble des dépens, y compris ceux des intervenantes.

20      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la cinquième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

21      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, le Tribunal a posé des questions aux parties, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.

 En droit

22      En vertu de l’article 114, paragraphes 1 et 4, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’exception d’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. Le Tribunal estime que, en l’espèce, il est suffisamment éclairé par les pièces du dossier et qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

23      Au soutien de ses conclusions, la Commission soulève deux fins de non-recevoir, tirées, la première, du défaut d’acte attaquable au sens de l’article 230 CE et, la seconde, d’une mise en œuvre incorrecte de la procédure préliminaire prévue à l’article 232 CE. Le recours serait également irrecevable dans son ensemble au motif que la requérante ne posséderait pas qualité pour agir.

24      Il convient d’examiner, en premier lieu, la demande en annulation et, dans l’hypothèse où celle-ci devrait être déclarée irrecevable, la demande en constatation d’une carence.

 Sur la demande en annulation

25      Il ressort d’une jurisprudence constante que le recours en annulation au sens de l’article 230 CE est ouvert à l’égard de tous les actes pris par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (voir arrêt de la Cour du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, Rec. p. I‑5829, point 29, et la jurisprudence citée).

26      En particulier, en matière d’aides d’État, il convient de relever que la Commission peut prendre une décision au titre du règlement n° 659/1999 et de l’article 88, paragraphes 2 et 3, CE sans pour autant la désigner comme telle. À cet égard, force est de constater que, selon la jurisprudence constante, concernant la recevabilité des recours en annulation, il convient de s’attacher à la substance même de l’acte contesté ainsi qu’à l’intention de son auteur pour qualifier cet acte. Ainsi, constitue en principe un acte attaquable une mesure qui fixe définitivement la position de la Commission au terme d’une procédure administrative et qui vise à produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale, qui n’ont pas de tels effets (voir, en ce sens, arrêts de la Cour Athinaïki Techniki/Commission, point 25 supra, points 41 et 42, et du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, Rec. p. I‑669, point 52).

27      En revanche, la forme dans laquelle un acte ou une décision sont pris est, en règle générale, indifférente pour la recevabilité d’un recours en annulation. Il est donc, en principe, sans incidence sur la qualification de l’acte contesté que celui-ci satisfasse ou non à certaines exigences formelles, à savoir s’il est dûment intitulé par son auteur, s’il est suffisamment motivé ou s’il mentionne les dispositions qui constituent sa base légale. Pour cette raison, il est sans pertinence que cet acte ne soit pas désigné comme une « décision » ou qu’il ne se réfère pas aux dispositions pertinentes du règlement n° 659/1999 (voir, en ce sens, arrêt Athinaïki Techniki/Commission, point 25 supra, points 43 et 44, et la jurisprudence citée).

28      Il convient donc de déterminer si, par la lettre attaquée, compte tenu de sa substance et de l’intention de la Commission, cette institution a définitivement fixé, au terme d’une des procédures prévues par l’article 88 CE et par le règlement n° 659/1999, sa position sur les contrats litigieux.

29      S’agissant de l’interprétation du contenu de la lettre attaquée, il y a lieu de rappeler qu’il est constaté, à plusieurs reprises, et, notamment, dans la partie intitulée « Conclusions » (voir point 8 ci-dessus), qu’elle ne constitue pas la position définitive de la Commission. En outre, cette dernière indique que ses conclusions se fondent sur les « informations fournies jusqu’à présent par la plaignante » ainsi que sur les « informations disponibles à ce stade » et que certaines informations contiennent des lacunes importantes. Il ressort de la lettre attaquée que la Commission s’est bornée à communiquer sa première analyse quant aux contrats litigieux, tout en invitant la requérante à soumettre des observations dans un délai d’un mois, en l’absence desquelles sa plainte serait réputée retirée.

30      En l’espèce, la requérante ne saurait soutenir que la lettre attaquée a produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter ses intérêts en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique. Il ne saurait être conclu du libellé de la dernière phrase de la lettre attaquée, à savoir, « [s]i aucune observation ne nous parvient dans les délais impartis, [la] plainte sera réputée retirée », pour regrettable qu’il soit, que, ainsi que le prétend la requérante, la Commission a pris une décision mettant un terme à l’enquête préliminaire et refusant d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE. Au contraire, force est de constater qu’aucune décision n’a été prise, ni à la date de l’envoi de la lettre attaquée, ni à l’expiration du délai d’un mois prévu dans celle-ci, la requérante ayant déposé des observations le 26 août 2009. En revanche, la Commission s’est montrée prête à reconsidérer sa position initiale à la lumière de « [t]oute autre information pertinente […] apportant des éléments substantiellement nouveaux et ne répétant pas des allégations déjà effectuées » fournie par la requérante.

31      En outre, et à la différence de la situation à l’origine de l’arrêt Athinaïki Techniki/Commission, cité au point 25 ci-dessus, il n’est pas possible d’interpréter la lettre attaquée comme contenant une décision de classement de la plainte ou selon laquelle l’enquête ne serait plus poursuivie. Force est de constater que, par cette lettre, la Commission se borne à définir sa position sur les contrats litigieux. En tout état de cause, une éventuelle décision de classement n’aurait pu être prise qu’après examen des observations de la requérante du 26 août 2009, ainsi qu’il était clairement indiqué dans la lettre de la Commission du 15 septembre 2009. Il convient de relever que, dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante reconnaît que, après l’envoi de la lettre attaquée, la Commission ne s’était pas prononcée de nouveau « sur le fond ».

32      Par ailleurs, en ce qui concerne les circonstances de l’envoi de la lettre attaquée, il convient de constater que, par sa communication du 15 septembre 2009, la Commission a clairement indiqué à la requérante que la procédure administrative était toujours en cours, ce qui, au demeurant, a été confirmé en réponse aux questions écrites posées par le Tribunal, la Commission ayant indiqué que, à cette date, ladite procédure n’était pas clôturée.

33      Dans ces circonstances, et eu égard aux considérations relatives à la nature provisoire de la prise de position y figurant, la lettre attaquée ne saurait être considérée comme produisant des effets juridiques contraignants de sorte à constituer un acte attaquable.

34      Il y a donc lieu de conclure que la lettre attaquée ne constitue ni de par sa substance ni de par la volonté de son auteur un acte susceptible de recours au titre de l’article 230 CE, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la qualité à agir de la requérante.

35      Dès lors, il convient de conclure de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur la demande en constatation d’une carence

36      Par sa demande visant à la constatation d’une carence, introduite à titre subsidiaire, la requérante demande au Tribunal de constater que la Commission a violé l’article 88, paragraphe 2, CE et le règlement n° 659/1999, dans la mesure où elle n’a pas ouvert la procédure formelle prévue par ledit article, et que, par conséquent, elle a été inactive au sens de l’article 232 CE.

37      Selon une jurisprudence constante, la voie de recours prévue à l’article 232 CE est fondée sur l’idée que l’inaction illégale de l’institution mise en cause permet de saisir la Cour afin que celle-ci déclare que l’abstention d’agir est contraire au traité, lorsque l’institution concernée n’a pas remédié à cette abstention. Par ailleurs, afin de statuer sur le bien-fondé des conclusions en carence, il y a lieu de vérifier si, au moment de la mise en demeure de la Commission au sens de l’article 232 CE, il pesait sur elle une obligation d’agir (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 19 mai 2011, Ryanair/Commission, T‑423/07, non encore publié au Recueil, points 25 et 26).

38      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 232, deuxième alinéa, CE, un recours en carence n’est recevable que si l’institution en cause a été préalablement invitée à agir. Cette mise en demeure de l’institution est une formalité essentielle et a pour effet, d’une part, de faire courir le délai de deux mois dans lequel l’institution est tenue de prendre position et, d’autre part, de délimiter le cadre dans lequel un recours pourra être introduit au cas où l’institution s’abstiendrait de prendre position. Bien que non soumise à une condition de forme particulière, il est, néanmoins, nécessaire que la mise en demeure soit suffisamment explicite et précise pour permettre à la Commission de connaître de manière concrète le contenu de la décision qu’il lui est demandé de prendre et faire ressortir qu’elle a pour objet de contraindre celle-ci à prendre parti (arrêt du Tribunal du 3 juin 1999, TF1/Commission, T‑17/96, Rec. p. II‑1757, point 41).

39      Force est de constater que, en l’espèce, la lettre du 4 juin 2009, qui se réfère expressément à l’article 232 CE et à l’article 88, paragraphe 2, CE, satisfait à toutes les exigences susmentionnées pour pouvoir être considérée comme une lettre de mise en demeure au sens de l’article 232 CE visant à ce qu’une décision soit prise sur la plainte du 30 mars 2007.

40      Toutefois, il ressort du dossier que la Commission a pris position sur l’invitation à agir de la requérante du 4 juin 2009 en indiquant, en substance, dans la lettre attaquée, que les contrats litigieux n’étaient pas contraires aux conditions du marché et que, dès lors, il n’était pas nécessaire de procéder à une enquête formelle. Force est de constater que même un acte qui n’est pas susceptible de recours en annulation peut constituer une prise de position mettant fin à la carence, s’il s’inscrit dans une procédure devant, en principe, déboucher sur un acte juridique lui-même susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation (arrêts du Tribunal du 27 juin 1995, Guérin automobiles/Commission, T‑186/94, Rec. p. II‑1753, point 25, et du 17 février 1998, Pharos/Commission, T‑105/96, Rec. p. II‑285, point 43). Dès lors, la lettre attaquée constitue, en tout état de cause, une prise de position, au sens de l’article 265 TFUE.

41      Il convient d’ajouter que le fait que, dans la lettre attaquée, la Commission n’a pas donné à la requérante la réponse que celle-ci souhaitait n’empêche pas qu’elle a, d’une part, examiné la question soulevée par la requérante et, d’autre part, pris position sur cette question (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 novembre 1992, Buckl e.a./Commission, C‑15/91 et C‑108/91, Rec. p. I‑6061, points 16 et 17, et ordonnance du Tribunal du 20 juin 2005, Deutsche Bahn/Commission, T‑361/02, non publiée au Recueil, point 25).

42      Or, une carence prend fin à la date de réception de la prise de position de l’institution par l’auteur de la mise en demeure (arrêt du Tribunal du 27 janvier 2000, Branco/Commission, T‑194/97 et T‑83/98, Rec. p. II‑69, point 55). En l’espèce, à supposer même qu’il y ait eu carence de la part de la Commission, cette carence a pris fin avec la réception par la requérante de la lettre attaquée. Le recours est donc irrecevable.

43      Dans l’hypothèse où la lettre du 26 août 2009 devrait être considérée comme constituant une nouvelle invitation à la Commission à agir, force est de constater que, même si elle répondait à toutes les exigences requises (voir point 38 ci-dessus), afin de faire courir le délai de deux mois, et non pas de deux semaines, dans lequel l’institution est tenue de prendre position, la requérante aurait introduit le présent recours le 9 octobre 2009, à savoir avant l’expiration du délai prévu par l’article 265, deuxième alinéa, TFUE.

44      Il en résulte que le recours tendant à ce qu’il soit constaté que la Commission a illégalement omis d’ouvrir la procédure prévue par l’article 88, paragraphe 2, CE doit être rejeté comme irrecevable.

45      Partant, il convient de considérer que le recours est irrecevable tant en ce qui concerne le chef de conclusions présenté à titre principal qu’en ce qui concerne celui présenté à titre subsidiaire et qu’il doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

46      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

47      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission et des parties intervenantes, conformément aux conclusions de ces dernières.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Neubrandenburger Wohnungsgesellschaft mbH est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission et par Bavaria Immobilien Beteiligungsgesellschaft mbH & Co. Objekte Neubrandenburg KG et Bavaria Immobilien Trading GmbH & Co. Immobilien Leasing Objekt Neubrandenburg KG.

Fait à Luxembourg, le 9 janvier 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       S. Papasavvas


* Langue de procédure : l’allemand.