Language of document : ECLI:EU:T:2012:525

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

8 octobre 2012 (*)

« Recours en annulation – Accès aux documents– Règlement (CE) n° 1049/2001 – Avis établi par le service juridique du Conseil concernant une proposition de règlement du Parlement et du Conseil, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement, du Conseil et de la Commission – Confirmation du refus d’accorder l’accès intégral –Irrecevabilité – Délai de recours – Notion d’’acte attaquable’ au sens de l’article 263 TFUE – Acte confirmatif »

Dans l’affaire T‑62/12,

ClientEarth, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par Mes O. Brouwer et P. van den Berg, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme C. Fekete et M. B. Driessen, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la lettre du Conseil du 1er décembre 2011, portant la référence 24/c/01/11, refusant d’accorder à la requérante l’accès intégral à l’avis établi par le service juridique du Conseil (document n° 6865/09) sur le projet d’amendements du Parlement européen à la proposition de la Commission européenne de règlement modifiant le règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, N. Wahl (rapporteur) et S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents au litige

1        La requérante, ClientEarth, est une association caritative enregistrée depuis le 26 mars 2006 auprès de la Charity Commission for England and Wales (Royaume-Uni).

2        Par demande du 17 juin 2010 (ci après la « première demande »), la requérante a introduit une demande d’accès intégral à l’avis du service juridique du Conseil (document n° 6865/09) sur le projet d’amendements du Parlement européen à la proposition de la Commission européenne de règlement modifiant le règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43, ci-après le « document litigieux »). Par lettre du même jour, le Conseil a refusé de faire droit à cette demande. Par courriel du 8 juillet 2010, la requérante a présenté une demande dite « confirmative » auprès du Conseil, conformément à l’article 8 du règlement n° 1049/2001. Le Conseil a maintenu son refus par décision du 26 juillet 2010 (ci-après la « première décision »).

3        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 septembre 2010, la requérante a introduit un recours en annulation contre la première décision, qui a été enregistré sous la référence T‑452/10. Par ordonnance du 6 septembre 2011, ClientEarth/Conseil (T‑452/10, non publiée au Recueil), le Tribunal a rejeté le recours comme manifestement irrecevable.

4        Le Tribunal a constaté que la requête ne satisfaisait pas aux exigences de l’article 19, premier, troisième et quatrième alinéas, ainsi que de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut, et de l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, dans la mesure où la requérante n’était pas représentée par un tiers.

5        Après l’ordonnance rendue dans l’affaire ClientEarth/Conseil, précitée, la requérante a, le 22 septembre 2011, réintroduit une demande d’accès au document litigieux (ci-après la « nouvelle demande »). Par lettre du 12 octobre 2011, le Conseil n’a pas fait suite à cette demande. Le 26 octobre 2011, la requérante a présenté une demande confirmative auprès de ce dernier.

6        Le 15 novembre 2011, la requérante a introduit un pourvoi devant la Cour contre l’ordonnance ClientEarth/Conseil, précitée, actuellement pendant (C‑573/11 P).

7        Le 1er décembre 2011, le Conseil a envoyé une lettre à la requérante à laquelle était jointe une annexe intitulée « Demande confirmative […] – demande de réévaluation de la [première décision] », dans laquelle le Conseil a informé la requérante de son refus de lui donner accès au document litigieux (ci-après l’« acte attaqué »). Le document contient, notamment aux points 3 et 6 à 8, la motivation suivante :

« 3.      […] Les arguments présentés à l’appui de la demande confirmative de la requérante correspondent pour l’essentiel à ceux énoncés dans la [première demande] de cette dernière.

[…]

6.      La présente demande de la requérante constitue une nouvelle demande au titre du règlement n° 1049/2001 portant sur une question déjà couverte par la [première décision]. En substance, cela revient à demander une réévaluation de la décision susmentionnée du Conseil refusant l’accès au [document litigieux].

7.      Le Conseil n’a pu constater aucune modification de la situation de droit ou de fait par rapport à celle à l’origine de la [première décision] et la requérante n’a mentionné aucun élément dans ce sens. En conséquence, le Conseil estime que les conditions dans lesquelles il a refusé la [première demande] sont toujours d’actualité.

8.      Le Conseil confirme par conséquent la [première décision] qu’elle a prise à l’égard de la [première demande] de la requérante […] Pour les raisons énoncées dans ladite décision, il n’est pas en mesure d’accorder l’accès intégral au [document litigieux] ».

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 février 2012, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’acte attaqué ;

–        condamner le Conseil à supporter les dépens exposés par elle, conformément à l’article 87 du règlement de procédure, y compris les dépens exposés par les parties intervenantes.

9        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 7 mai 2012, le Royaume de Danemark a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la requérante.

10      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 10 mai 2012, le Conseil a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure, par lequel il conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours manifestement irrecevable ou dénué de tout fondement en droit en application de l’article 111 du règlement de procédure ;

–        à titre subsidiaire, surseoir à statuer jusqu’à ce que la Cour rende sa décision dans l’affaire pendante ClientEarth/Conseil (C‑573/11 P) ;

–        condamner la requérante aux dépens.

11      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, les 16 et 28 mai 2012, le Royaume de Suède et la République de Finlande ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la requérante.

12      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 11 juillet 2012, la requérante a présenté ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil. Elle y conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité comme manifestement dénuée de tout fondement en droit ;

–        rejeter la demande de surseoir à statuer.

 En droit

13      En vertu de l’article 114, paragraphes 1 et 4, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

14      Le Conseil fait valoir que le présent recours est irrecevable au motif qu’il n’a pas été formé dans le délai prévu à l’article 263 TFUE. À cet égard, en premier lieu, le Conseil soutient que la requérante donne une présentation erronée des faits et conteste effectivement la première décision. En second lieu, le Conseil fait observer que la requérante n’a pas présenté de faits nouveaux modifiant substantiellement sa position.

15      S’agissant du prétendu manque de présentation de faits nouveaux, il convient d’examiner directement le second grief du Conseil.

16      Le Conseil soutient qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour (ordonnance de la Cour du 29 juin 2009, Nuova Agricast/Commission, C‑225/08 P, non publiée au Recueil, et arrêt de la Cour du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, Rec. p. I‑669) qu’un requérant qui demande deux fois le même document et qui conteste devant le Tribunal les deux décisions rendues subséquemment doit apporter des faits nouveaux et substantiels justifiant une demande de réexamen de la décision antérieure devenue définitive. Selon le Conseil, la requérante n’a pas, dans sa seconde demande, invoqué de faits nouveaux et substantiels modifiant sa situation, et l’unique raison pour laquelle la requérante aurait introduit une nouvelle demande serait l’ordonnance ClientEarth/Conseil, précitée, déclarant son premier recours irrecevable. Le Conseil soutient que l’irrecevabilité du premier recours résulte de facteurs attribuables à la requérante et conteste que cela puisse constituer des faits nouveaux au sens de cette jurisprudence.

17      La requérante conteste les arguments du Conseil. Elle avance, en substance, que, selon l’article 6, paragraphe 1, dernier alinéa, du règlement n° 1049/2001, le demandeur n’est pas obligé de justifier sa demande d’accès aux documents. Elle soutient qu’il ressort précisément de l’arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, que la jurisprudence relative aux recours dirigés contre des décisions confirmatives ne peut être étendue au régime instauré par le règlement n° 1049/2001. Dans ledit arrêt, en annulant l’ordonnance du Tribunal sous pourvoi, la Cour se serait éloignée de sa jurisprudence antérieure issue notamment de l’ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée. Selon la requérante, il ressort de cet arrêt que, dans le cas d’une deuxième demande identique d’accès aux documents, les institutions sont, dans tous les cas, obligées de procéder à un réexamen du refus. Cela constitue en soi une nouvelle appréciation de fait et de droit, rendant un nouveau refus susceptible d’un contrôle par le juge de l’Union. Ainsi, selon la requérante, elle est en droit d’introduire un recours contre l’acte attaqué, conformément à la solution proposée par l’avocat général M. Mengozzi dans ses conclusions sous cet arrêt (Rec. p. I‑671, point 138).

18      S’agissant de l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée, la requérante fait également valoir que cette affaire se distingue de la présente affaire. Elle soutient que, dans cette affaire, la Commission ne pouvait aucunement procéder à un réexamen dès lors qu’un État membre s’était s’opposé à la divulgation des documents demandés en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, ce qui, selon elle, a pour effet de faire sortir la demande du champ d’application dudit règlement.

19      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, ne sont susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation que les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (arrêts de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9 ; du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e.a./Commission, C‑131/03 P, Rec. p. I‑7795, point 54, et Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 51).

20      Il découle également d’une jurisprudence bien établie concernant la recevabilité des recours en annulation qu’il convient de s’attacher à la substance même des actes attaqués ainsi qu’à l’intention de leurs auteurs pour qualifier ces actes. À cet égard, constituent, en principe, des actes attaquables les mesures qui fixent définitivement la position d’une institution au terme d’une procédure administrative et qui visent à produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, à l’exclusion, notamment, des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale, qui n’ont pas de tels effets, ainsi que des actes purement confirmatifs d’un acte antérieur non attaqué dans les délais (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, Rec. p. I‑5829, point 42, et Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 52).

21      Pour déterminer si un acte peut faire l’objet d’un recours en vertu de l’article 263 TFUE, c’est à son contenu, davantage qu’à sa présentation formelle, qu’il convient de s’attacher (arrêts IBM/Commission, précité, point 9, et Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 55).

22      Quant au caractère confirmatif d’une décision, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, un acte ne saurait être considéré comme une simple confirmation d’une décision antérieure que s’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à celle-ci (arrêts de la Cour du 10 décembre 1980, Grasselli/Commission, 23/80, Rec. p. 3709, point 18 ; du 14 septembre 2006, Commission/Fernández Gómez, C‑417/05 P, Rec. p. I‑8481, point 46, et ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée, point 38).

23      La jurisprudence concernant les actes confirmatifs vise à assurer le respect des délais de recours ainsi que l’autorité de la chose jugée et, partant, à protéger le principe de sécurité juridique (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 octobre 2007, Commission/Parlement et Conseil, C‑299/05, Rec. p. I‑8695, point 29, et ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée, point 58). En effet, les règles concernant les délais de recours sont d’ordre public et doivent être appliquées par le juge de l’Union de manière à assurer la sécurité juridique ainsi que l’égalité des justiciables devant la loi afin d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, Rec. p. I‑439, point 101 ; ordonnance de la Cour du 16 octobre 2010, Internationale Fruchtimport Gesellschaft Weichert/Commission, C‑73/10 P, Rec. p. I‑11535, point 50, et ordonnance du Tribunal du 1er septembre 2011, Maftah/Commission, T‑101/09, non publiée au Recueil, points 29 et 41).

24      En ce qui concerne le règlement n° 1049/2001, il convient de relever que ses articles 7 et 8, en prévoyant une procédure en deux temps, ont pour objectif de permettre, d’une part, un traitement rapide et facile des demandes d’accès aux documents des institutions concernées ainsi que, d’autre part, de manière prioritaire, un règlement à l’amiable des différends pouvant éventuellement surgir. Pour les cas dans lesquels un tel différend ne peut être résolu entre les parties, l’article 8, paragraphe 1, prévoit deux voies de recours, à savoir un recours juridictionnel et le dépôt d’une plainte auprès du Médiateur européen (arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 53).

25      Ladite procédure, en ce qu’elle prévoit la présentation d’une demande confirmative, permet notamment à l’institution concernée de réexaminer sa position avant de prendre une décision définitive de refus susceptible de faire l’objet d’un recours devant les juridictions de l’Union. Une telle procédure permet de traiter avec davantage de promptitude les demandes initiales et, en conséquence, de répondre le plus souvent aux attentes du demandeur, tout en permettant à cette institution d’adopter une position circonstanciée avant de refuser définitivement l’accès aux documents demandés, notamment si celui-ci réitère sa demande de divulgation nonobstant un refus motivé de ladite institution (arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 54).

26      Il convient, par ailleurs, de souligner que le règlement n° 1049/2001 octroie un droit d’accès très large aux documents des institutions concernées, le bénéfice d’un tel droit n’étant pas subordonné, en application de l’article 6, paragraphe 1, de ce règlement, à une justification de la demande. En outre, en vertu de l’article 4, paragraphe 7, de celui-ci, les exceptions visées aux paragraphes 1 à 3 de cet article ne sauraient s’appliquer qu’au cours de la période durant laquelle la protection se justifie eu égard au contenu du document (arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 56).

27      Il s’ensuit qu’une personne peut former une nouvelle demande d’accès portant sur des documents auxquels l’accès lui a été précédemment refusé. Une telle demande oblige l’institution concernée à examiner si le refus d’accès antérieur demeure justifié au regard d’une modification de la situation de droit ou de fait intervenue entre-temps (arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, point 57).

28      En l’espèce, il convient de relever, premièrement, que la première et la nouvelle demandes se fondent toutes deux sur le règlement n° 1049/2001, c’est-à-dire sur la même base juridique (voir, en ce sens, ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée, point 44).

29      Deuxièmement, il est à relever que les deux demandes portent sur le même document, à savoir le document litigieux.

30      Troisièmement, les deux demandes ont été introduites par la même personne, en l’occurrence la requérante.

31      Quatrièmement, lors de son réexamen, le Conseil n’a pu identifier d’éléments nouveaux. Comme cela a été indiqué au point 7 ci-dessus, l’acte attaqué renvoie explicitement à la motivation de la première décision.

32      Enfin, la requérante n’a pas fait valoir que sa situation de droit ou de fait s’est modifiée depuis l’adoption de la première décision. En effet, dans ses écritures, la requérante n’identifie aucun fait nouveau, à l’exception d’événements résultant du processus législatif, sans expliquer toutefois comment de tels événements d’ordre général sont de nature à modifier sa situation personnelle (voir, en ce sens, ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée, point 41), et ce de façon significative (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général M. Mengozzi sous l’arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précitées, points 150 et 166, et la jurisprudence citée).

33      Par ailleurs, la thèse de la requérante selon laquelle il ressortirait de l’arrêt Internationaler Hilfsfonds/Commission, précité, que tout acte d’une institution qui refuse l’accès aux documents à la suite d’un réexamen qui ne dévoile aucun élément nouveau constitue, dès lors, une nouvelle appréciation de fait et de droit rendant recevable un recours dirigé contre le bien-fondé d’un refus d’accès antérieur, procède d’une lecture erronée de cet arrêt.

34      En effet, en rappelant expressément, aux points 52 et 57 de cet arrêt, que les « actes purement confirmatifs d’un acte antérieur non attaqué dans les délais » ne constituent pas des actes attaquables et que la réintroduction d’une demande d’accès aux documents oblige toutefois l’institution concernée « à examiner si le refus d’accès antérieur demeure justifié au regard d’une modification de la situation de droit ou de fait intervenue entre-temps », la Cour a confirmé sa jurisprudence relative aux actes confirmatifs selon laquelle un acte ne saurait être considéré comme une simple confirmation d’une décision antérieure que s’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à celle-ci (voir point 22 ci-dessus). Au point 58 de ce même arrêt, la Cour a relevé que le refus contesté en cause dans cette affaire établissait une « position définitive », dès lors qu’il mettait fin à une longue série de démarches accomplies par le requérant, incluant, notamment, une décision du Médiateur selon laquelle la pratique administrative de la Commission constituait un cas de mauvaise administration. La Cour en a conclu (point 62) que l’acte litigieux était susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation. Il s’ensuit que, contrairement à la solution retenue en première instance, lesdites démarches constituaient, selon la Cour, effectivement une modification de la situation de fait du requérant, intervenue entre-temps.

35      Il convient également de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la jurisprudence relative aux décisions confirmatives ne serait pas transposable aux demandes d’accès aux documents tombant dans le champ d’application du règlement n° 1049/2001. En effet, la Cour a déjà eu l’occasion de rejeter un tel argument (ordonnance Nuova Agricast/Commission, précitée, point 60).

36      Quant à l’argument selon lequel l’opposition par un État membre, au titre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, à la divulgation d’un document émanant de cet État aurait pour effet de faire sortir une demande d’accès à de tels documents du champ d’application dudit règlement et, partant, de rendre tout réexamen d’une demande d’accès impossible, il suffit de relever que cette thèse ne correspond pas à la jurisprudence de la Cour (arrêts de la Cour du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, Rec. p. I‑11389, points 75 et 76, et du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, C‑135/11 P, non encore publié au Recueil, points 57 à 59).

37      Il résulte de tout ce qui précède que l’acte attaqué constitue un acte purement confirmatif par rapport à la première décision. Partant, il n’est pas susceptible de faire l’objet d’un recours au titre de l’article 263 TFUE.

38      À titre surabondant, il convient de relever que, contrairement aux faits ressortant de la présente affaire, dans son ordonnance du 8 juin 2005, Nuova Agricast/Commission (T‑139/03, non publiée au Recueil), le Tribunal s’était effectivement livré à un contrôle du bien-fondé de la décision de l’institution défenderesse de refuser la demande d’accès aux documents dans le cadre d’un premier recours en annulation, ordonnance qui n’a pas fait l’objet d’un pourvoi. Dans son ordonnance du 12 mars 2008, Nuova Agricast/Commission (T‑443/07, non publiée au Recueil), le Tribunal a, ensuite, déclaré irrecevable le second recours introduit contre la décision ultérieure refusant l’accès à ces mêmes documents, confirmé sur pourvoi par la Cour dans l’ordonnance du 29 juin 2009, Nuova Agricast/Commission, précitée. À cet égard, une interprétation a contrario de la solution dégagée dans cette dernière ordonnance, qui vise à admettre la recevabilité du recours dans la mesure où la première décision n’a pas fait l’objet d’un contrôle par le juge de l’Union quant au bien-fondé du refus d’accès aux documents, comme tel est le cas en l’espèce, ne saurait être retenue. En effet, dès lors que seule une application stricte des règles de procédure fixant un délai de forclusion permet de répondre à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice (voir point 23 ci-dessus, et, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 22 septembre 2011, Bell & Ross/OHMI, C‑426/10 P, non encore publié au Recueil, points 43, 54 et 55), une interprétation a contrario est impossible (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 16 juillet 1956, Fédération charbonnière de Belgique/Haute Autorité, 8/55, Rec. p. 199, 305 et 306, et du 13 juin 1958, Meroni/Haute Autorité, 9/56, Rec. p. 9, 27). Ainsi qu’il ressort de l’ordonnance du 29 juin 2009, Nuova Agricast/Commission, précitée, point 59, les dispositions du règlement n° 1049/2001 ne permettent pas de conclure que ce règlement saurait, eu égard au droit d’accès très large qu’il consacre, justifier a priori dans son domaine l’éviction totale des règles sur les délais de recours résultant du principe de sécurité juridique.

39      En tout état de cause, dès lors que l’irrecevabilité du premier recours découle de circonstances dont la requérante avait la maîtrise, ainsi que le relève à juste titre le Conseil, l’irrecevabilité du présent recours n’a ni pour effet de soustraire l’action entreprise par le Conseil de tout contrôle juridictionnel ni de priver la requérante de son droit à un recours effectif devant un juge de l’Union ou d’en restreindre l’accès. En effet, eu égard aux observations faites au point 38 ci-dessus, le fait que le premier recours ait été déclaré irrecevable est sans pertinence par rapport à la jurisprudence relative aux actes confirmatifs.

40      Il ressort de tout ce qui précède que le recours est irrecevable.

41      Eu égard au fait que le présent recours est irrecevable, il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes en intervention.

 Sur les dépens

42      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes d’intervention du Royaume de Danemark, de la République de Finlande et du Royaume de Suède.

3)      ClientEarth est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 8 octobre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Kanninen


* Langue de procédure : l’anglais.