Language of document : ECLI:EU:C:2022:960

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

5 décembre 2022 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑594/22 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 14 septembre 2022,

Gugler France, établie à Les Auxons (France), représentée par Me S. Guerlain, avocat,

partie requérante,

Les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Alexander Gugler, demeurant à Maxdorf (Allemagne),

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, MM. M. Safjan et N. Jääskinen, juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. A. Rantos, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Gugler France demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 13 juillet 2022, Gugler France/EUIPO – Gugler (GUGLER), (T‑147/21, non publié, EU:T:2022:444), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO, du 9 décembre 2020 (affaire R 893/2020-5), confirmant l’enregistrement de la marque figurative GUGLER.


 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonnée à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que la question portant sur l’appréciation de l’absence de la mauvaise foi du demandeur au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque, soulevée par le moyen unique de son pourvoi, tiré d’une violation de l’article 51, paragraphe l, sous b), du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1995, L 11, p. 1), est importante et que le Tribunal aurait méconnu à cet égard la jurisprudence de la Cour selon laquelle l’existence de la mauvaise foi du demandeur devrait être appréciée globalement, en tenant compte de l’ensemble des circonstances factuelles pertinentes du cas d’espèce telles qu’elles existaient au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque, ainsi que de l’intention de celui-ci à ce moment en faisant référence aux circonstances objectives du cas d’espèce (voir arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, points 37, 41 et 42).

7        En outre, la requérante soutient que l’article 51, paragraphe l, sous b), du règlement no 40/94 ne définit pas la notion de « mauvaise foi » dont la portée serait très importante, puisqu’elle répondrait à un objectif d’intérêt général de prévention des enregistrements de marques abusifs ou contraires aux usages honnêtes en matière industrielle et commerciale, le droit de l’Union ne pouvant couvrir de telles pratiques. Il appartiendrait à la Cour d’en préciser les contours sur la base de sa jurisprudence méconnue par le Tribunal.

8        À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20, et du 20 octobre 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO, C‑446/22 P, non publiée, EU:C:2022:827, point 11).

9        En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 20 octobre 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO, C‑446/22 P, non publiée, EU:C:2022:827, point 12 et jurisprudence citée).

10      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoqué résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22, et du 20 octobre 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO, C‑446/22 P, non publiée, EU:C:2022:827, point 13).

11      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (voir ordonnance du 20 octobre 2022, Fidelity National Information Services/EUIPO, C‑446/22 P, non publiée, EU:C:2022:827, point 141 et jurisprudence citée).

12      En l’occurrence, s’agissant de l’argumentation résumée aux points 6 et 7 de la présente ordonnance, relative à la violation de l’article 51, paragraphe l, sous b), du règlement no 40/94, et notamment aux erreurs prétendument commises par le Tribunal lors de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi du demandeur au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque, il importe de relever, d’une part, que la requérante n’explique pas à suffisance ni, en tout état de cause, ne démontre en quoi de telles erreurs de droit, à les supposer établies, soulèveraient une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union qui justifierait l’admission du pourvoi. En effet, la requérante se limite à énoncer les erreurs prétendument commises par le Tribunal et à présenter des arguments d’ordre général, au soutien de l’importance que présente la question soulevée par le pourvoi. Or, la démonstration de l’importance de cette question au regard de l’unité, de la cohérence ou du développement du droit de l’Union implique elle-même d’établir tant l’existence que l’importance d’une telle question, au moyen d’éléments concrets et propres au cas d’espèce, et non pas simplement d’arguments d’ordre général (voir, en ce sens, ordonnance du 8 novembre 2022, Mandelay/EUIPO, C‑405/22 P, non publiée, EU:C:2022:860, points 16 et 17).

13      D’autre part, dans la mesure où la requérante reproche au Tribunal d’avoir méconnu la jurisprudence de la Cour, il y a lieu de rappeler qu’une allégation générale selon laquelle le Tribunal aurait appliqué sa propre jurisprudence ou celle de la Cour de manière erronée n’est pas, en soi, suffisante pour établir, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, que ce pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, le demandeur devant respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 13 de la présente ordonnance (voir, par analogie, ordonnance du 6 avril 2022, Sanford/EUIPO, C‑19/22 P, non publiée, EU:C:2022:262, point 18 et jurisprudence citée).

14      Or, force est de constater que, en l’espèce, la requérante se borne à présenter des arguments d’ordre général, sans toutefois exposer de façon claire et précise les raisons pour lesquelles la prétendue contradiction entre les appréciations du Tribunal et la jurisprudence de la Cour invoquée soulèverait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

15      Il s’ensuit que la requérante n’a pas respecté l’ensemble des exigences énoncées au point 10 de la présente ordonnance.

16      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

17      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

18      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

19      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Gugler France supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.