ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR
26 septembre 2024 (*)
« Pourvoi – Intervention – Article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne – Intérêt à la solution du litige – Admission »
Dans l’affaire C‑167/24 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 1er mars 2024,
Commission européenne, représentée par MM. J. Carpi Badía, M. Farley et L. Flynn, en qualité d’agents,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant :
Ryanair DAC, établie à Swords (Irlande),
Malta Air ltd., établie à Pietà (Malte),
représentées par Mes F.-C. Laprévote et E. Vahida, avocats, Mes D. Pérez de Lamo et S. Rating, abogados,
parties demanderesses en première instance,
République fédérale d’Allemagne,
République française, représentée par MM. B. Fodda, T. Lechevallier et T. Stéhelin, en qualité d’agents,
Royaume des Pays-Bas, représenté par Mme M. K. Bulterman, M. J. Langer et Mme C. S. Schillemans, en qualité d’agents,
Société Air France, établie à Tremblay-en-France (France),
Air France-KLM, établie à Paris (France),
représentées par Mes J. Derenne et D. Vallindas, avocats, ainsi que Me A. Álvarez Vidal, abogada,
parties intervenantes en première instance,
LE PRÉSIDENT DE LA COUR
vu la proposition de M. S. Rodin, juge rapporteur,
l’avocat général, M. M. Szpunar, entendu,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 20 décembre 2023, Ryanair et Malta Air/Commission (Air France-KLM et Air France ; COVID-19) (T‑494/21, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2023:831), par lequel celui-ci a annulé la décision C(2021) 2488 final de la Commission, du 5 avril 2021, relative à l’aide d’État SA.59913 – France – COVID-19 – Recapitalisation d’Air France et d’Air France‑KLM.
2 Par acte déposé au greffe de la Cour le 24 mai 2024, Koninklijke Luchtvaart Maatschappij NV (ci-après « KLM »), établie à Amstelveen (Pays-Bas), a, sur le fondement de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, demandé à intervenir au litige au soutien des conclusions de la Commission.
3 À la suite de la signification aux parties par le greffier de la Cour, conformément à l’article 131, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, de la demande d’intervention, le Royaume des Pays-Bas, Société Air France (ci-après « Air France ») et Air France-KLM (ci-après la « holding Air France-KLM ») ainsi que Ryanair DAC et Malta Air ltd. ont présenté leurs observations écrites sur cette demande dans le délai imparti, en indiquant qu’ils n’avaient pas d’objection à l’admission de la demande d’intervention de KLM.
Sur la demande d’intervention
4 À l’appui de sa demande d’intervention, KLM fait valoir qu’elle a un intérêt direct et actuel à l’issue du présent litige sur pourvoi.
5 En effet, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait, de manière erronée, qualifié KLM de bénéficiaire de l’aide d’État accordée à Air France et à la holding Air France-KLM (ci-après la « mesure en cause »). Cette qualification serait susceptible d’avoir des implications significatives pour KLM, qui seraient liées à l’issue du présent pourvoi. En particulier, un rejet du pourvoi, qui viendrait alors conférer un caractère définitif à l’arrêt attaqué, pourrait avoir des conséquences considérables pour elle, notamment de nature financière. En raison de son inclusion dans le champ des bénéficiaires de la mesure en cause, KLM pourrait être confrontée à des obligations de paiement ou à des réclamations. Il serait nécessaire que KLM soit admise à intervenir afin qu’elle puisse protéger ses intérêts et s’assurer que les implications de l’arrêt attaqué soient pleinement portées à la connaissance de la Cour.
6 En vertu de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, toute personne physique ou morale justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige soumis à la Cour, autre qu’un litige entre États membres, entre institutions de l’Union européenne ou entre ces États, d’une part, et ces institutions, d’autre part, est en droit d’intervenir à ce litige.
7 Selon une jurisprudence constante, la notion d’« intérêt à la solution du litige », au sens de cette disposition, doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme étant un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme un intérêt au regard des moyens ou des arguments soulevés en tant que tels. En effet, les termes « solution du litige » renvoient à la décision finale demandée, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de la décision mettant fin à l’instance. Il s’agit ainsi, plus précisément, d’un intérêt direct et actuel à ce qu’il soit fait droit aux conclusions de la partie que le demandeur en intervention se propose de soutenir (ordonnance du président de la Cour du 30 avril 2020, Commission/HSBC Holdings e.a., C‑806/19 P, EU:C:2020:364, point 7 ainsi que jurisprudence citée).
8 À cet égard, il convient notamment de vérifier si le demandeur en intervention est concerné directement par l’acte attaqué et si son intérêt à l’issue du litige est certain. En principe, un intérêt à la solution du litige d’un opérateur économique ne saurait être considéré comme étant suffisamment direct que dans la mesure où cette solution est de nature à modifier la position juridique de cet opérateur (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 30 avril 2020, Commission/HSBC Holdings e.a., C‑806/19 P, EU:C:2020:364, point 8 ainsi que jurisprudence citée).
9 En l’espèce, le pourvoi tend à l’annulation de l’arrêt attaqué par lequel le Tribunal a annulé la décision C(2021) 2488 final de la Commission, mentionnée au point 1 de la présente ordonnance, en jugeant que la Commission européenne avait commis une erreur manifeste d’appréciation en déterminant les bénéficiaires de la mesure en cause. Il a en effet estimé que la Commission avait considéré à tort qu’Air France et ses filiales ainsi que la holding Air France-KLM et des filiales de cette dernière devaient être regardées comme étant les bénéficiaires de cette mesure et que seules KLM et les filiales de cette dernière devaient être exclues du périmètre des bénéficiaires.
10 Or, la question de savoir si le Tribunal a, à bon droit, jugé que la Commission avait erronément exclue KLM du périmètre des bénéficiaires de la mesure en cause est de nature à modifier la position juridique de KLM. En effet, la possibilité de considérer cette dernière comme étant bénéficiaire de la mesure en cause est liée au sort réservé aux conclusions de la Commission tendant à l’annulation de l’arrêt attaqué, au soutien desquelles KLM demande à intervenir.
11 Il s’ensuit que KLM doit être considérée comme justifiant d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige, au sens de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.
12 Il résulte des considérations qui précèdent que KLM doit être admise à intervenir au litige au soutien des conclusions de la Commission.
Sur les droits procéduraux de l’intervenante
13 La demande d’intervention étant admise, KLM recevra communication, en application de l’article 131, paragraphe 3, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de ce règlement, de tous les actes de procédure signifiés aux parties, en l’absence de demande de ces dernières tendant à ce que certaines pièces ou documents soient exclus de cette communication.
14 Cette demande ayant été présentée dans le délai d’un mois prévu à l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, KLM pourra, conformément à l’article 132, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, présenter un mémoire en intervention dans un délai d’un mois suivant la communication visée au point précédent.
15 Enfin, KLM pourra présenter des observations orales si une audience de plaidoiries est organisée.
Sur les dépens
16 Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance.
17 En l’espèce, la demande d’intervention de KLM étant accueillie, il y a lieu de réserver les dépens liés à son intervention.
Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :
1) Koninklijke Luchtvaart Maatschappij NV est admise à intervenir dans l’affaire C‑167/24 P au soutien des conclusions de la Commission européenne.
2) Une copie de tous les actes de procédure est signifiée à Koninklijke Luchtvaart Maatschappij NV par les soins du greffier.
3) Koninklijke Luchtvaart Maatschappij NV dispose, à compter de la date de la signification visée au point 2 du présent dispositif, d’un délai d’un mois pour présenter un mémoire en intervention.
4) Les dépens liés à l’intervention de Koninklijke Luchtvaart Maatschappij NV sont réservés.
Signatures