DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)
11 décembre 2024 (*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale CHIPSY KINGS – Enregistrement international de la marque verbale antérieure Curry King – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Examen d'office des faits – Article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »
Dans l’affaire T‑157/24,
Meica Ammerländische Fleischwarenfabrik Fritz Meinen GmbH & Co. KG, établie à Edewecht (Allemagne), représentée par Me S. Russlies, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été
András Lénárd, demeurant à Sâncrăieni (Roumanie),
LE TRIBUNAL (troisième chambre),
composé, lors des délibérations, de Mme P. Škvařilová‑Pelzl (rapporteure), faisant fonction de présidente, MM. I. Nõmm et D. Kukovec, juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Meica Ammerländische Fleischwarenfabrik Fritz Meinen GmbH & Co. KG, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 janvier 2024 (affaire R 376/2023-5) (ci-après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
2 Le 4 mars 2021, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, András Lénárd, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal CHIPSY KINGS.
3 La marque demandée désignait les produits et les services relevant, notamment, des classes 29, 30 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 29 : « Frites ; beignets aux pommes de terre ; chips à base de légumes ; bâtonnets de pomme de terre recouverts de sel [chips] ; cossettes de manioc ; chips de soja ; chips de patates douces violette ; chips de chou frisé ; en-cas à base de pommes de terre ; chips de légumes ; flocons de pommes de terre ; chips de pommes de terre sous forme d’en-cas ; pommes chips ; galettes de pommes de terre râpées ; frites gaufrettes ; pommes chips à faible teneur en matières grasses ; chips de yucca » ;
– classe 30 : « Chips à base de farine de blé complet ; frites à base de céréales ; en-cas à base de pain croustillant ; en-cas à base de blé extrudé ; chips de maïs aromatisées aux légumes ; chips tortillas ; chips de riz ; en-cas à base de maïs ; en-cas à base de farine de pommes de terre ; chips de won-ton ; frites à base de farine ; boules soufflées au fromage [en-cas au maïs] ; chips à base de céréales ; chips de maïs aromatisées aux algues marines ; tortillas de maïs pour tacos ; chips de maïs » ;
– classe 35 : « Services de vente au détail d’aliments ; services de vente au détail à travers des réseaux informatiques mondiaux concernant des produits alimentaires ; services de commande au détail par correspondance concernant des produits alimentaires ; présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail ; services de vente au détail par le biais de catalogues liés aux produits alimentaires ».
4 Le 1er juin 2021, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.
5 L’opposition était fondée sur l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque verbale Curry King, enregistrée le 1er décembre 2015 sous le n° 1285017 pour des produits relevant des classes 29 et 30 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 29 : « Produits à base de viande ; produits à base de saucisses ; produits à base de saucisses végétariennes ; plats préparés principalement à base de produits à base de viande et/ou produits à base de saucisses et/ou produits à base de succédanés de viande et/ou produits à base de saucisses végétariennes et/ou légumes et/ou champignons et/ou légumineuses et/ou produits à base de soja, en particulier tofu et/ou pommes de terre et/ou produits laitiers et/ou ovoproduits et/ou huiles comestibles » ;
– classe 30 : « Plats préparés, composés principalement de céréales et/ou de riz et/ou de maïs et/ou de pâtes et/ou de boulettes de pâte et raviolis et/ou de sauces et/ou d’épices ».
6 Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était, notamment, celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).
7 Par décision du 1er février 2023, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité.
8 Le 14 février 2023, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.
9 Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.
Conclusions des parties
10 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée.
11 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens en cas de convocation à une audience.
En droit
12 La requérante invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et, le second, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. Le Tribunal estime opportun d’examiner, d’abord, le second moyen, puis le premier moyen.
Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001
13 La requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir conclu à l’existence d’un risque de confusion. Premièrement, la chambre de recours aurait considéré à tort que les produits relevant de la classe 30 visés par les signes en conflit ne présentaient qu’un degré moyen de similitude. Deuxièmement, elle n’aurait pas tenu compte du fait que les éléments verbaux « chipsy » et « curry » partageaient les mêmes lettres initiales et finales, renforçant ainsi la similitude visuelle desdits signes. Troisièmement, elle aurait considéré à tort qu’une partie du public pertinent percevrait l’élément verbal « chipsy » comme un mot inventé, alors qu’il serait descriptif des produits et des services visés par la marque demandée.
14 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
15 Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), iv), du règlement 2017/1001, il convient d’entendre par marques antérieures les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans l’Union, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.
16 Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents de l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].
17 Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].
18 Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].
Sur le public pertinent et son niveau d’attention
19 Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].
20 Au point 16 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, au vu de la marque antérieure qui constitue un enregistrement international désignant l’Union, le public pertinent était constitué des consommateurs de l’Union. En outre, elle a relevé, aux points 17 à 19 de ladite décision, que les produits en cause, qui constituaient des produits alimentaires, ainsi que les services de vente au détail d’aliments s’adressaient principalement au grand public dont le niveau d’attention était moyen.
21 Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations, au demeurant non contestées par la requérante.
Sur la comparaison des produits et des services en cause
22 Au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les « frites ; beignets aux pommes de terre ; chips à base de légumes ; bâtonnets de pomme de terre recouverts de sel [chips] ; cossettes de manioc ; chips de soja ; chips de patates douces violettes ; chips de chou frisé ; en-cas à base de pommes de terre ; chips de légumes ; flocons de pommes de terre ; chips de pommes de terre sous forme d’en-cas ; pommes chips ; galettes de pommes de terre râpées ; frites gaufrettes ; pommes chips à faible teneur en matières grasses ; chips de yucca », relevant de la classe 29 et visés par la marque demandée, étaient identiques aux « plats préparés principalement à base de légumes et/ou de champignons et/ou de légumineuses et/ou de produits à base de soja, en particulier tofu, et/ou pommes de terre », relevant de la classe 29, couverts par la marque antérieure.
23 Par ailleurs, aux points 29 à 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les « services de vente au détail », relevant de la classe 35 et visés par la marque demandée, présentaient un « certain degré de similitude » avec les produits, relevant des classes 29 et 30, de la marque antérieure.
24 Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations, au demeurant non contestées par la requérante.
25 D’une part, aux points 26 et 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les produits relevant de la classe 30 visés par la marque demandée, qui constituaient des en-cas à base de farine de pommes de terre, présentaient un degré moyen de similitude avec les « plats préparés principalement à base de pommes de terre », relevant de la classe 29, couverts par la marque antérieure. En effet, la destination générale des produits en cause ne serait pas la même étant donné que les en-cas seraient normalement consommés entre les repas principaux. En outre, bien que les en-cas ne soient généralement pas un plat préparé, ils pourraient être utilisés en tant que partie d’un plat préparé. Par ailleurs, les ingrédients seraient identiques ou très similaires, tandis que les producteurs et les canaux de distribution pourraient être les mêmes.
26 D’autre part, ces considérations s’appliqueraient également pour les « chips à base de farine de blé complet ; frites à base de céréales ; en-cas à base de pain croustillant ; en-cas à base de blé extrudé ; chips de maïs aromatisées aux légumes ; chips tortillas ; chips de riz ; en-cas à base de maïs ; chips de won-ton ; frites à base de farine ; boules soufflées au fromage [en-cas au maïs] ; chips à base de céréales ; chips de maïs aromatisées aux algues marines ; tortillas de maïs pour tacos ; chips de maïs », relevant de la classe 30, visés par la marque demandée, lesquels présenteraient ainsi un degré moyen de similitude avec les « plats préparés principalement à base de légumes et/ou de champignons et/ou de légumineuses et/ou de produits à base de soja, en particulier tofu et/ou pommes de terre » relevant de la classe 29 et les « plats préparés, principalement à base de céréales et/ou de maïs », relevant de la classe 30, couverts par la marque antérieure.
27 À cet égard, la requérante soutient, en substance, que les produits relevant de la classe 30 visés par la marque demandée sont identiques aux « plats préparés » relevant des classes 29 et 30 couverts par la marque antérieure. En effet, il n’existerait pas de frontière tangible entre les en-cas et les plats préparés étant donné qu’il appartiendrait au consommateur de décider s’il considère comme un en-cas un plat plus ou moins petit.
28 L’argumentation de la requérante ne saurait toutefois prospérer, au regard de la destination différente des produits en cause, correctement relevée par la chambre de recours. En effet, des en-cas, tels que des chips, visés par la marque demandée, font l’objet d’une consommation rapide et facile entre les repas principaux et ne sont généralement pas destinés à se substituer aux plats, y compris les « plats préparés » couverts par la marque antérieure, qui sont consommés lors de ces repas. Dans ces conditions, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation en considérant que les produits relevant de la classe 30, visés par la marque demandée, étaient similaires à un degré moyen aux « plats préparés », relevant des classes 29 et 30, couverts par la marque antérieure.
Sur la comparaison des signes en conflit
29 Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 10 décembre 2008, MIP Metro/OHMI – Metronia (METRONIA), T‑290/07, non publié, EU:T:2008:562, point 41].
30 L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).
31 De plus, il doit être observé que le caractère distinctif plus ou moins élevé des éléments communs à une marque demandée et à une marque antérieure est un des éléments pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes [voir arrêt du 5 octobre 2020, Eugène Perma France/EUIPO – SPI Investments Group (NATURANOVE), T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 26 et jurisprudence citée].
32 Pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée (voir arrêt du 5 octobre 2020, NATURANOVE, T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 27 et jurisprudence citée).
33 Lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif au regard des produits et des services pour lesquels la marque est protégée ou des produits et des services désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible. Ce caractère distinctif ne pourra, le plus souvent, leur être reconnu qu’en raison de la combinaison qu’ils forment avec les autres éléments de la marque. Du fait de leur faible, voire très faible, caractère distinctif, les éléments descriptifs d’une marque ne seront généralement pas considérés par le public comme étant dominants dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, sauf lorsque, en raison notamment de leur position ou de leur dimension, ils apparaissent comme susceptibles de s’imposer à la perception du public et d’être gardés en mémoire par celui-ci. Cela ne signifie toutefois pas que les éléments descriptifs d’une marque sont nécessairement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. À cet égard, il convient, en particulier, de rechercher si d’autres éléments de la marque sont susceptibles de dominer, à eux seuls, l’image de celle-ci que le public pertinent garde en mémoire [voir arrêt du 18 janvier 2023, YAplus DBA Yoga Alliance/EUIPO – Vidyanand (YOGA ALLIANCE INDIA INTERNATIONAL), T‑443/21, non publié, EU:T:2023:7, point 69 et jurisprudence citée].
34 Par ailleurs, il y a lieu de relever que, même si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un signe verbal, il identifiera des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou ressemblent à des mots qu’il connaît (voir arrêt du 5 octobre 2020, NATURANOVE, T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 28 et jurisprudence citée).
35 En l’espèce, s’agissant de la marque antérieure, la chambre de recours a d’abord constaté en substance, aux points 43 et 44 de la décision attaquée, que l’élément verbal « curry » serait compris par l’ensemble des consommateurs de l’Union comme étant descriptif soit du type de denrées alimentaires produites ou servies soit de leur saveur, de sorte qu’il était dépourvu de caractère distinctif. En outre, au point 45 de ladite décision, elle a considéré que la majeure partie du public pertinent percevrait l’élément verbal « king » comme un terme faisant allusion à un produit présentant des caractéristiques supérieures. En effet, elle a relevé qu’il était notoire que le terme « king » était largement utilisé dans le marketing pour vanter les caractéristiques suprêmes des produits ou des services ou encore que l’expression « king-size » était devenue un synonyme internationalement connu d’un « produit de taille extra-large ». Elle a dès lors conclu que l’élément verbal « king » présentait un faible caractère distinctif pour les produits et les services en cause.
36 S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a retenu, au point 46 de la décision attaquée, que l’élément verbal « chipsy » était plus distinctif que l’élément verbal « kings ». En effet, ledit élément verbal serait un mot inventé, qui ferait allusion aux « chips ». Elle a néanmoins relevé que, d’une part, au moins une partie du public de l’Union ne comprendrait pas cette allusion ni, par conséquent, le mot « chipsy ». D’autre part, elle a relevé que les consommateurs qui percevraient l’élément verbal « chipsy » comme une allusion aux chips, le verraient en combinaison avec « kings » et supposeraient que « chipsy » est une caractéristique des rois. En outre, elle a considéré que l’élément verbal « chipsy », en raison de sa position au début de la marque demandée, laisserait une impression plus forte sur les consommateurs et influencerait la perception globale de la marque, d’autant plus qu’il n’était pas présent dans la marque antérieure et qu’il présentait un caractère distinctif moins faible que l’élément verbal « kings ».
37 La requérante fait valoir, à cet égard, que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en constatant que l’élément verbal « chipsy » possédait un caractère distinctif élevé pour la partie du public pertinent qui le percevrait comme un mot inventé. En effet, le terme « chipsy » existerait en polonais pour désigner des chips et serait donc descriptif des produits et des services visés par la marque demandée. Il en irait de même pour le public non polonophone de l’Union qui reconnaîtrait le terme anglais « chips » dans l’élément verbal « chipsy » étant donné que, selon une jurisprudence constante, les inexactitudes linguistiques n’empêchent pas le public de reconnaître la signification des mots.
38 En l’espèce, s’agissant de la marque antérieure, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que l’élément verbal « curry » sera compris par le public pertinent comme « un aliment, un plat ou une sauce dans une cuisine indienne assaisonnée d’un mélange d’épices piquantes » ou « un aliment ou un plat assaisonné avec de la poudre de curry », de sorte qu’il est descriptif soit du type de denrées alimentaires produites ou servies, soit de leur saveur. Or, lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif des produits pour lesquels la marque est enregistrée ou des produits désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible [voir, en ce sens, arrêts du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española), T‑363/04, EU:T:2007:264, point 92, et du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 52 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que l’élément verbal « curry » présente, tout au plus, un caractère distinctif faible.
39 En outre, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le terme « king » est utilisé dans le sens laudatif de « meilleur dans son domaine », de sorte qu’il peut notamment être compris comme un éloge de la qualité des produits en cause et qu’il revêt dès lors un faible caractère distinctif [voir, en ce sens, arrêt du 29 mai 2024, Chiquita Brands/EUIPO – Jara 2000 (CHIQUITA QUEEN), T‑79/23, non publié, EU:T:2024:327, point 53 et jurisprudence citée], ce que la chambre de recours a constaté à juste titre.
40 Il convient dès lors de constater qu’aucun des éléments verbaux figurant dans la marque antérieure n’est plus distinctif que l’autre pour l’ensemble du public pertinent.
41 S’agissant de la marque demandée, il convient d’observer, à l’instar de la requérante, que le terme « chipsy » existe effectivement en polonais pour désigner des chips. De même, comme l’a relevé en substance la chambre de recours, une partie du public pertinent pourrait reconnaître le terme anglais « chips » dans l’élément verbal « chipsy » et, partant, l’associer à celui-ci. Ainsi, compte tenu du fait que les produits visés par la marque demandée constituent essentiellement des chips et que les services de vente au détail visés par ladite marque peuvent concerner également de tels produits alimentaires, force est de constater que, pour une partie du public pertinent, l’élément verbal « chipsy » est descriptif desdits produits et services et, partant, ne présente qu’un faible caractère distinctif. Dans un tel cas, l’élément verbal « chipsy » n’est pas plus distinctif que l’élément verbal « kings ».
42 En revanche, comme l’a relevé la chambre de recours, il ne saurait être exclu qu’une autre partie du public pertinent ne comprenne pas le terme anglais « chips » et que, dès lors, il n’associera pas celui-ci à l’élément verbal « chipsy ». Il s’ensuit que, pour cette partie du public pertinent, l’élément verbal « chipsy » présente un caractère distinctif par rapport aux produits et aux services visés par la marque demandée. Dans un tel cas, l’élément verbal « chipsy » présente un caractère distinctif plus élevé que l’élément verbal « kings ».
– Sur la similitude visuelle
43 Au point 49 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré en substance que les signes en conflit ne présentaient qu’un faible degré de similitude visuelle dans la mesure où ils coïncidaient dans le mot « king », mais se distinguaient par la présence de l’élément verbal « chipsy » dans la marque demandée, qui constituait son élément le plus distinctif et qui était placé au début de celle-ci, de la lettre supplémentaire « s » située à la fin de ladite marque ainsi que de l’élément verbal « curry » dans la marque antérieure.
44 La requérante soutient que la chambre de recours aurait dû constater un degré moyen de similitude visuelle dans la mesure où, d’une part, les éléments verbaux « chipsy » et « curry » partagent la première lettre « c » et la dernière lettre « y » et, d’autre part, l’élément verbal « chipsy » de la marque demandée et l’élément verbal « curry » de la marque antérieure sont dépourvus de caractère distinctif, de sorte que l’élément verbal commun « king » est le plus distinctif et a donc un impact plus important lors de la comparaison visuelle des signes en conflit.
45 Premièrement, il convient de relever que, si les signes en conflit partagent certes l’élément verbal « king », ils se distinguent nettement par les éléments verbaux « chipsy » et « curry », présents respectivement dans la marque demandée et dans la marque antérieure. Par ailleurs, si les éléments verbaux « chipsy » et « curry » coïncident certes dans leur première et dernière lettre, il convient toutefois d’observer que leurs lettres du milieu sont complètement différentes, de sorte que cette coïncidence ne sera pas particulièrement remarquée par le public pertinent et n’aura dès lors pas d’incidence notable sur la similitude visuelle desdits signes.
46 Deuxièmement, la requérante ne saurait se prévaloir de la prémisse erronée selon laquelle l’élément commun « king » aurait un impact plus fort lors de la comparaison visuelle des signes en conflit. En effet, il a été établi aux points 38 à 41 ci-dessus, d’une part, que, pour une partie du public pertinent, aucun élément verbal des signes en conflit ne serait plus distinctif que l’autre. En revanche, pour l’autre partie du public pertinent, l’élément verbal « curry » de la marque antérieure ne serait pas plus distinctif que son élément verbal « king », tandis que l’élément verbal « chipsy » de la marque demandée serait plus distinctif que son élément verbal « kings ». Par conséquent, l’élément commun « king » ne serait en aucun cas plus distinctif que les éléments verbaux « curry » et « chipsy ».
47 Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en constatant que les signes en conflit étaient similaires à un faible degré sur le plan visuel.
– Sur la similitude phonétique
48 Au point 50 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit ne présentaient qu’un faible degré de similitude sur le plan phonétique dans la mesure où ils coïncidaient par la prononciation de l’élément « king », mais différaient par la prononciation de l’élément « chipsy » de la marque demandée, qui est notamment placé au début de celle-ci et qui est plus distinctif que l’élément « king », ainsi que par l’élément « curry » de la marque antérieure.
49 La requérante soutient que les signes en conflit sont similaires à un degré moyen sur le plan phonétique dans la mesure où l’élément verbal commun « king » serait l’élément le plus distinctif et aurait donc un impact plus fort lors de la comparaison phonétique desdits signes.
50 À cet égard, il convient d’observer, à l’instar de la chambre de recours, que si les signes en conflit coïncident certes par la prononciation de l’élément « king », ils se distinguent par la prononciation de la lettre finale « s » de l’élément verbal « kings » de la marque demandée, mais surtout par la prononciation de l’élément « chipsy » de cette même marque et par l’élément « curry » de la marque antérieure.
51 En outre, pour les raisons exposées au point 46 ci-dessus, la requérante ne saurait se prévaloir de la prémisse erronée selon laquelle l’élément commun « king » serait plus distinctif que les éléments « chipsy » et « curry » des signes en conflit.
52 Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en constatant que les signes en conflit étaient similaires à un faible degré sur le plan phonétique.
– Sur la similitude conceptuelle
53 Au point 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, en substance, que les signes en conflit étaient similaires à un faible degré sur le plan conceptuel. En effet, lesdits signes présenteraient une similitude conceptuelle en raison de leur élément commun « king », qui serait associé à un « roi » ou à plusieurs « rois », ou encore à des produits de qualité supérieure ou de grande taille. Toutefois, elle a relevé que le mot « chipsy » de la marque demandée pourrait être perçu soit comme un mot inventé faisant allusion à des « chips », soit comme un jeu de mots faisant référence au célèbre groupe de flamenco « Gipsy Kings », soit comme un terme fantaisiste dont la signification était inconnue. La marque demandée pourrait encore être perçue par le public anglophone de l’Union comme un jeu de mots, faisant référence à des « kings » (rois) qui sont « chipsy ». Or, de telles associations ne seraient pas présentes dans la marque antérieure, le terme « curry » entraînant des associations mentales différentes dans l’esprit du public pertinent.
54 La requérante se contente de faire valoir que la similitude conceptuelle des signes en conflit est moyenne dans la mesure où l’élément commun « king » serait l’élément le plus distinctif et aurait donc un impact plus fort lors de la comparaison conceptuelle des signes en conflit.
55 À cet égard, d’une part, il convient d’observer que la marque demandée est composée de l’élément verbal « chipsy », qui est susceptible d’être associé à des chips (voir point 41 ci-dessus), ainsi que de l’élément verbal « kings », lequel est susceptible d’être associé, notamment, à des rois ou à des produits de qualité supérieure (voir point 39 ci-dessus). Comme l’a constaté à juste titre la chambre de recours, la marque demandée, prise dans son ensemble, peut être perçue, en raison de sa structure, comme un jeu de mots faisant référence au célèbre groupe de flamenco « Gipsy Kings » ou encore à des rois qui sont « chipsy », pouvant ainsi faire référence aux caractéristiques des chips. En revanche, pour la partie du public pertinent qui ne comprendrait pas l’allusion aux chips dans l’élément verbal « chipsy » de la marque demandée, celle-ci n’aurait pas de signification globale particulière.
56 D’autre part, la marque antérieure est composée de l’élément verbal « curry », qui sera associé à une épice ou un plat d’origine indienne (voir point 38 ci-dessus), et de l’élément verbal « king », qui sera notamment associé à un roi ou à des produits de qualité supérieure. Par conséquent, la marque antérieure, prise dans son ensemble et compte tenu de sa structure, pourrait être comprise par le public pertinent comme le « roi du curry » ou comme faisant l’éloge d’un curry de qualité supérieure.
57 Ainsi, si les signes en conflit présentent une similitude conceptuelle en raison de leur élément commun « king », il convient néanmoins d’observer que, pris dans leur ensemble, ils produisent des associations mentales différentes dans l’esprit du public pertinent. Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en constatant que ces signes étaient similaires à un faible degré sur le plan conceptuel.
58 Par ailleurs, pour les raisons exposées au point 46 ci-dessus, la requérante ne saurait se prévaloir de la prémisse erronée selon laquelle l’élément commun « king » serait plus distinctif que les éléments « chipsy » et « curry » des signes en conflit.
Sur le caractère distinctif de la marque antérieure
59 Il découle des points 53 à 59 de la décision attaquée que la chambre de recours est partie du postulat que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif moyen, en dépit de son caractère distinctif intrinsèque très faible, aux fins de prendre en compte l’éventualité que ladite marque ait fait l’objet d’un usage intensif sur le marché allemand pour des saucisses et des produits à base de saucisses, susceptible de rehausser son niveau de distinctivité. Il n’y a pas lieu de remettre en cause la prise en compte d’un tel postulat par la chambre de recours, au demeurant non contesté par la requérante.
Sur l’appréciation globale du risque de confusion
60 Selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [voir arrêts du 5 mars 2020, Foundation for the Protection of the Traditional Cheese of Cyprus named Halloumi/EUIPO, C‑766/18 P, EU:C:2020:170, points 67 à 69 et jurisprudence citée, et du 15 octobre 2020, Laboratorios Ern/EUIPO – Bio-tec Biologische Naturverpackungen (BIOPLAST BIOPLASTICS FOR A BETTER LIFE), T‑2/20, non publié, EU:T:2020:493, point 69 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17].
61 Il est également de jurisprudence constante que le degré de caractère distinctif de la marque antérieure, qui détermine l’étendue de la protection conférée par celle-ci, figure parmi les facteurs pertinents du cas d’espèce. Lorsque le caractère distinctif de la marque antérieure est important, une telle circonstance est de nature à augmenter le risque de confusion. Cela étant, l’existence d’un risque de confusion n’est pas exclue lorsque le caractère distinctif de la marque antérieure est faible (voir arrêt du 5 mars 2020, Foundation for the Protection of the Traditional Cheese of Cyprus named Halloumi/EUIPO, C‑766/18 P, EU:C:2020:170, point 70 et jurisprudence citée).
62 Lorsque la marque antérieure et la marque demandée coïncident dans un élément de caractère faiblement distinctif au regard des produits en cause, l’appréciation globale du risque de confusion n’aboutit fréquemment pas au constat de l’existence de ce risque (arrêts du 12 juin 2019, Hansson, C‑705/17, EU:C:2019:481, point 55, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 53).
63 Aux points 63 à 68 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, en substance, qu’il n’existait aucun risque de confusion entre les signes en conflit. En effet, quand bien même les produits en cause seraient identiques et que la marque antérieure aurait un caractère distinctif moyen, ces signes ne présenteraient qu’une faible similitude visuelle, phonétique et conceptuelle et le public pertinent serait en mesure de percevoir les nettes différences qui caractériseraient lesdits signes.
64 À cet égard, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû conclure à l’existence d’un risque de confusion, compte tenu de la similitude à tout le moins moyenne des produits et des services en cause, de la similitude moyenne des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel ainsi que du niveau d’attention moyen du public pertinent. Par ailleurs, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir tenu compte du raisonnement suivi dans l’arrêt du 20 septembre 2011, Meica/OHMI – TofuTown.com (TOFUKING) (T‑99/10, non publié, EU:T:2011:497, point 38), et dans l’arrêt du 13 décembre 2011, Meica/OHMI – Bösinger Fleischwaren (Schinken King) (T‑61/09, non publié, EU:T:2011:733, points 58 et 59), arrêts qui s’appliqueraient pleinement au cas d’espèce.
65 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
66 Premièrement, il convient de rappeler que, lorsque les éléments de similitude existant entre deux signes tiennent au fait qu’ils partagent un composant présentant un faible caractère distinctif intrinsèque, l’impact de tels éléments de similitude sur l’appréciation globale du risque de confusion est lui-même faible [voir, en ce sens, arrêts du 22 février 2018, International Gaming Projects/EUIPO – Zitro IP (TRIPLE TURBO), T‑210/17, non publié, EU:T:2018:91, point 73 et jurisprudence citée ; du 15 octobre 2020, Decathlon/EUIPO – Athlon Custom Sportswear (athlon custom sportswear), T‑349/19, non publié, EU:T:2020:488, point 90, et du 20 janvier 2021, Foundation for the Protection of the Traditional Cheese of Cyprus named Halloumi/EUIPO – M. J. Dairies (BBQLOUMI), T‑328/17 RENV, non publié, EU:T:2021:16, point 64 et jurisprudence citée].
67 Tel est le cas, en l’espèce, de l’élément de similitude faiblement distinctif et non dominant « king », dont la présence commune au sein des deux signes en conflit n’est pas décisive et ne revêt qu’une faible incidence sur l’appréciation du risque de confusion.
68 En outre, il résulte des considérations qui précèdent que le niveau d’attention du public pertinent est moyen et que les signes en conflit ne présentent qu’un faible degré de similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Les similitudes qui existent entre ces signes ne sont pas particulièrement importantes en l’espèce. En effet, elles se limitent à la présence de l’élément « king », présentant un caractère distinctif faible, et sont contrebalancées dans une large mesure par la présence des éléments « chipsy » et « curry ». Par ailleurs, bien que l’élément « curry » présente un caractère distinctif faible pour les produits couverts par la marque antérieure et que l’élément « chipsy » puisse présenter également un caractère distinctif faible pour les produits et les services en cause de la marque demandée pour certaines parties du public pertinent, ces éléments introduisent une différence entre les signes en conflit, pris globalement. Les circonstances de l’espèce sont donc telles que le public pertinent distinguera clairement lesdits signes, même s’ils présentent un faible degré de similitude dû à la présence de l’élément commun « king » et quand bien même certains des produits et des services en cause seraient identiques et que la marque antérieure présenterait un caractère distinctif moyen.
69 Au vu de tout ce qui précède, il convient de relever que les différences existant entre les marques en conflit sont suffisantes pour empêcher que les ressemblances découlant du fait qu’elles ont en commun l’élément « king » entraînent le risque que le public pertinent puisse croire que les produits et les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.
70 C’est donc à juste titre que, en l’espèce, la chambre de recours a considéré qu’il n’existait pas de risque de confusion.
71 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel les arrêts du 20 septembre 2011, TOFUKING (T‑99/10, non publié, EU:T:2011:497), et du 13 décembre 2011, Schinken King (T‑61/09, non publié, EU:T:2011:733), dans lesquels le Tribunal aurait conclu à l’existence d’un risque de confusion, s’appliqueraient pleinement au cas d’espèce.
72 En effet, il suffit de relever que les circonstances ayant donné lieu aux arrêts du 20 septembre 2011, TOFUKING (T‑99/10, non publié, EU:T:2011:497), et du 13 décembre 2011, Schinken King (T‑61/09, non publié, EU:T:2011:733), se distinguent de celles du présent cas d’espèce. En particulier, si le Tribunal a considéré, notamment, dans l’arrêt du 13 décembre 2011, Schinken King (T‑61/09, non publié, EU:T:2011:733, point 58), qu’il était concevable que le public pertinent considère les produits désignés par les marques en conflit comme appartenant à des gammes de produits distinctes, mais provenant, toutefois, de la même entreprise, tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, le terme allemand « schinken » désigne une partie comestible d’un animal, tandis que le terme « tofu » désigne un produit alimentaire à base de soja, souvent considéré comme un succédané de viande. Ainsi, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 67 de la décision attaquée, alors que les consommateurs pourraient supposer, par exemple, que la marque TOFUKING fait référence à une version végétalienne des saucisses de curry commercialisées par la requérante sous la marque antérieure Curry King, un tel lien direct avec une variation de produit n’existe pas en ce qui concerne la marque demandée Chipsy Kings (voir points 55 à 57 ci-dessus), contrairement à ce que prétend la requérante.
73 Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le second moyen comme étant non fondé.
Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001
74 La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a violé l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 en limitant son analyse à l’anglais pour conclure que l’élément verbal « chipsy » de la marque demandée était un mot inventé et en ne tenant pas compte du fait que le terme « chipsy » existait en polonais pour désigner des chips et qu’il était donc dépourvu de caractère distinctif par rapport aux produits et aux services visés par ladite marque.
75 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
76 Selon l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, l’EUIPO procède, au cours de la procédure, à l’examen d’office des faits. Toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Il ressort de la jurisprudence que cet article est une expression du devoir de diligence, selon lequel l’institution compétente est tenue d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments de fait et de droit pertinents du cas d’espèce [voir arrêt du 21 février 2013, Laboratoire Bioderma/OHMI – Cabinet Continental (BIODERMA), T‑427/11, non publié, EU:T:2013:92, point 24 et jurisprudence citée].
77 En l’espèce, il suffit de relever que, si la chambre de recours n’a certes pas expressément soulevé le fait que le terme « chipsy » existait en polonais pour désigner des « chips », il n’en demeure pas moins qu’elle a tenu compte, aux points 46 et 64 de la décision attaquée, du fait qu’une partie du public pertinent serait susceptible de percevoir l’élément verbal « chipsy » comme faisant allusion aux chips et a conclu à juste titre que, même dans cette hypothèse, ces consommateurs seraient en mesure de percevoir les nettes différences visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les signes en conflit et de ne pas les confondre, même pour des produits identiques.
78 Dans ces conditions, il convient de rejeter le premier moyen comme inopérant et, partant, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
79 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
80 Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas de convocation à une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (troisième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Meica Ammerländische Fleischwarenfabrik Fritz Meinen GmbH & Co. KG et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront leurs propres dépens.
Škvařilová-Pelzl | Nõmm | Kukovec |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2024.
Signatures