Language of document :

Demande de décision préjudicielle présentée par le Tribunal de Cuentas (Espagne) le 30 juillet 2024 – Sociedad Civil Catalana, Asociación Cívica y Cultural (SCC), Ministerio Fiscal/RAS, AAT, IGA, ARMG, ANMG, NMF, ARM, LBC, RFB, FHM, MMT, MOQ, MOP, ASD, JTN, JNB, TPR, OJV, RRR, DBC, JGV, EAC, EH, MKEK, SML, AVO, MAB, JMSI, LPG, CPO, CPC, ACO, AMC, ACJ, FGS

(Affaire C-523/24, Sociedad Civil Catalana)

Langue de procédure : l’espagnol

Juridiction de renvoi

Tribunal de Cuentas

Parties à la procédure au principal

Parties requérantes : Sociedad Civil Catalana, Asociación Cívica y Cultural (SCC), Ministerio Fiscal

Parties défenderesses : RAS, AAT, IGA, ARMG, ANMG, NMF, ARM, LBC, RFB, FHM, MMT, MOQ, MOP, ASD, JTN, JNB, TPR, OJV, RRR, DBC, JGV, EAC, EH, MKEK, SML, AVO, MAB, JMSI, LPG, CPO, CPC, ACO, AMC, ACJ et FGS

Questions préjudicielles

Le règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes 1 , l’article 325 TFUE (« principe de lutte efficace et dissuasive contre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union ») et l’article 4, paragraphe 3, TUE (principe de coopération loyale) doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’extinction de responsabilité en matière de deniers publics instaurée par l’article 1er, paragraphe 1, sous a), b) et c), l’article 1er, paragraphes 2, 3 et 4, et l’article 2, sous e), de la loi organique 1/2024, sur l’amnistie pour la normalisation institutionnelle, politique et sociale de la Catalogne, du 10 juin 2024 2 , dès lors que les responsabilités en matière de deniers publics recherchées dans le cadre de la présente procédure en comblement du découvert injustifié au titre de la responsabilité des personnes chargées de manier des deniers publics (dite de « reintegro por alcance ») n° B-180/21 impliquent une « atteinte aux intérêts financiers de l’Union », à la fois i) si la Cour retient une « interprétation restrictive » de la notion de « protection des intérêts financiers de l’Union » (qui ne couvrirait que les actes illégaux de gestion de fonds publics de l’Union) et ii) si la Cour retient une « interprétation large » de cette notion (qui couvrirait également les actes illégaux de gestion de fonds publics d’un État membre lorsque ces actes sont de nature à causer un dommage actuel ou potentiel au budget de l’Union) ?

Dans l’hypothèse où la Cour retient une « interprétation restrictive » de la notion de « protection des intérêts financiers de l’Union », les articles 2 et 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, et l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’article 10 de la loi organique 1/2024, dans la mesure où le délai impératif pour statuer de deux mois prévu par cette disposition est contraire au droit de toute personne à être jugée avec toutes les garanties requises dans un « délai raisonnable » et constitue une « pression extérieure » exercée sur la juridiction de céans s’il est nécessaire, avant de statuer sur l’application de cette loi organique 1/2024 dans la présente procédure n° B-180/21, de diligenter un quelconque type de mesure d’instruction finale afin d’établir l’origine (budget national ou de l’Union) ou la destination (promotion de l’indépendance de la Catalogue en dehors de l’Espagne au cours des exercices 2011 à 2017) des fonds publics utilisés pour engager les dépenses mentionnées dans les écrits des parties requérantes ?

L’article 325 TFUE et le règlement no 2988/95, combinés avec l’article 47 de la Charte et l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent aux dispositions de l’article 13, paragraphe 3, in fine, de la loi organique 1/2024, dès lors que celui-ci ne prévoit aucun mécanisme (procédure, incident, etc.) pour le cas où les parties qui ont intenté l’action en matière de deniers publics (à savoir, dans la présente procédure n° B-180/21, l’entité SCC et le ministère public) s’opposeraient à l’exonération de responsabilité en matière de deniers publics lors du procès en première instance et qu’il se borne au contraire à exiger que les entités du secteur public lésées [en l’occurrence, la Generalitat de Cataluña (organes de gouvernance de la communauté autonome de Catalogne, Espagne), qui n’a même pas comparu pour exercer l’action en matière de deniers publics et a, pour cette raison, été tenue pour écartée de la procédure] ne s’opposent pas à une telle exonération ?

Les principes de sécurité juridique et de confiance légitime, combinés à l’article 325 TFUE et au règlement no 2988/95, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent aux dispositions de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), b) et c), de la loi organique 1/2024, combinées aux dispositions des paragraphes 2, 3 et 4 du même article, dès lors que le manque de clarté et de précision dans la définition du champ d’application objectif, subjectif et temporel de cette loi pourrait conduire, dans la présente procédure n° B-180/21, à ce que la Cour de céans constate l’extinction de responsabilités en matière de deniers publics découlant d’actes portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, bien que ces actes ne soient pas réellement ceux prévus dans le champ d’application de cette loi ?

Les articles 20 et 21 de la Charte doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent aux dispositions de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), b) et c), de la loi organique 1/2024, combinées aux dispositions des paragraphes 2, 3 et 4 du même article et au préambule de cette loi, dès lors que ce manque de clarté et de précision dans la définition du champ d’application de cette loi, qui pourrait aboutir à une extinction injustifiée de responsabilités en matière de deniers publics, est également susceptible d’entraîner des discriminations et des inégalités par rapport aux personnes dont la responsabilité en matière de deniers publics a été constatée dans d’autres procédures en comblement du découvert injustifié au titre de la responsabilité des personnes chargées de manier des deniers publics (dites de « reintegro por alcance ») différentes, relatives à des faits survenus dans la même zone territoriale (Communauté autonome de Catalogne) au cours de la période couverte par le champ d’application temporel de cette loi ?

Les articles 2 et 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, et l’article 47 de la Charte doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent aux dispositions de l’article 8, paragraphe 3, de la loi organique 1/2024, qui prévoit la mainlevée impérative et à sens unique des mesures conservatoires sans laisser aucune marge d’appréciation à la juridiction saisie, à la différence de ce qui se produit dans les autres procédures en comblement du découvert injustifié au titre de la responsabilité des personnes chargées de manier des deniers publics (dites de « reintegro por alcance »), qui, en vertu d’un renvoi opéré par la loi 7/1988 sur le fonctionnement de la Cour des comptes, du 5 avril 1988 1 , sont soumises au régime général des mesures conservatoires prévu par la loi 1/2000 relative à la procédure civile, du 7 janvier 2000 2  ?

Les articles 2 et 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, l’article 47 de la Charte et l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’article 13, paragraphe 3, de la loi organique 1/2024 (exonération de la responsabilité en matière de deniers publics lors du procès en première instance), dans la mesure où cette disposition ne prévoit pas l’audition préalable de la partie qui exerce l’action d’intérêt général (bien qu’elle ait ex lege qualité pour agir dans le cadre de la procédure en matière de deniers publics) et ne laisse pas à la juridiction saisie la possibilité de juger les situations dans lesquelles une partie défenderesse fait valoir qu’elle n’a pas participé aux faits qui lui sont reprochés, étant entendu que, lors de la présente procédure n° B-180/21, une entité qui exerce l’action d’intérêt général a comparu en tant que co-requérante et certaines parties défenderesses ont soutenu ne pas avoir participé aux faits ?

Les articles 2 et 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE et l’article 47 de la Charte, en relation spécifique avec les dispositions de l’article 267 TFUE et de l’article 23, premier alinéa, du protocole (no 3) sur le statut de la Cour de justice, doivent-ils être interprétés en ce sens que l’effet suspensif du renvoi préjudiciel et l’efficacité de la décision finale de la Cour s’opposent aux articles 8, paragraphe 3, 10 et 13, paragraphe 3, de la loi organique 1/2024, combinés avec le préambule de celle-ci (section V, dixième et onzième alinéas), qui imposent l’efficacité absolue de cette loi en privant la réponse aux questions préjudicielles d’effet utile et, ce faisant, violent les principes de primauté et d’effet direct du droit de l’Union ?

____________

1     JO 1995, L 312, p. 1.

1     Ley Orgánica 1/2024, de 10 de junio, de amnistía para la normalización institucional, política y social en Cataluña.

1     Ley 7/1988, de 5 de abril, de Funcionamiento del Tribunal de Cuentas.

1     Ley 1/2000, de 7 de enero, de Enjuiciamiento Civil.