DOCUMENT DE TRAVAIL
ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)
15 janvier 2015(*)
« Procédure – Taxation des dépens »
Dans l’affaire T‑520/11 DEP,
Genebre SA, établie à Hospitalet de Llobregat (Espagne), représentée par Me D. Pellisé Urquiza, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI),
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant
General Electric Company, établie à Schenectady, New York (États-Unis), représentée par Me E. Armijo Chávarri, avocat,
ayant pour objet une demande de taxation des dépens déposée par General Electric Company à la suite de l’arrêt du 28 février 2014, Genebre/OHMI – General Electric (GE) (T‑520/11, EU:T:2014:100),
LE TRIBUNAL (septième chambre),
composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur) et M. I. Ulloa Rubio, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend la présente
Ordonnance
Faits, procédure et conclusions des parties
1 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 septembre 2011, la requérante, Genebre SA, a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 26 juillet 2011 (affaire R 20/2009-4), relative à une procédure d’opposition entre General Electric Company et Genebre SA.
2 L’intervenante, General Electric Company, est intervenue dans le litige au soutien des conclusions de l’OHMI pour demander le rejet du recours et la condamnation de la requérante aux dépens.
3 Par arrêt du 28 février 2014, Genebre/OHMI – General Electric (GE) (T‑520/11, EU:T:2014:100), le Tribunal a rejeté le recours et condamné la requérante aux dépens sur le fondement de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.
4 Le 11 juin 2014, l’intervenante a demandé à la requérante le remboursement de 11 559,55 dollars des États-Unis (USD) au titre des dépens qu’elle avait encourus dans la procédure devant le Tribunal et lui a transmis les factures correspondantes.
5 Par courrier électronique du 26 juin 2014, la requérante a refusé de s’acquitter de ce montant.
6 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 août 2014, l’intervenante a formé, sur le fondement de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande de taxation des dépens, par laquelle elle a invité le Tribunal à fixer le montant des dépens récupérables dont le remboursement incombe à la requérante à 11 559,55 USD.
7 La requérante n’a pas présenté d’observations sur cette demande dans le délai imparti.
En droit
8 Aux termes de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, s’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, l’autre partie entendue dans ses observations.
9 Selon l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (voir ordonnance du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec, EU:T:2004:192, point 13 et jurisprudence citée).
10 À défaut de dispositions du droit de l’Union européenne de nature tarifaire applicables, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a présentés pour les parties (voir ordonnance Airtours/Commission, point 9 supra, EU:T:2004:192, point 18 et jurisprudence citée).
11 C’est à la lumière de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.
12 En premier lieu, il convient de relever que l’affaire au principal ne présentait, quant à son objet et sa nature, aucune complexité particulière. En effet, cette affaire concernait une opposition formée par l’intervenante à l’encontre de l’enregistrement de la marque communautaire demandée par la requérante et les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1). Il y a également lieu de considérer que cette affaire ne revêtait pas d’importance particulière au regard du droit de l’Union. Au demeurant, l’intervenante n’a pas fait valoir, dans sa demande de taxation, que cette affaire présentait une complexité ou une importance particulière.
13 En deuxième lieu, il convient d’observer que, si l’affaire au principal présentait évidemment un certain intérêt économique pour l’intervenante, cet intérêt économique ne saurait être considéré, en l’absence d’éléments concrets apportés par cette dernière, comme inhabituel ou significativement différent de celui qui sous-tend toute procédure d’opposition.
14 En troisième lieu, en ce qui concerne l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux conseils de l’intervenante, il y a lieu de relever que la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (voir ordonnance Airtours/Commission, point 9 supra, EU:T:2004:192, point 30 et jurisprudence citée).
15 En l’espèce, l’intervenante a produit, au soutien de sa demande, deux factures établies par son conseil, datées, respectivement, des 27 avril et 29 novembre 2012. La facture du 27 avril 2012 s’élève à 7 464,66 USD et se décompose de la manière suivante :
– 6 840 USD au titre des prestations suivantes :
– « contrôle de la décision du Tribunal d’examiner le recours formé par la [requérante] et notification au client ;
– préparation et envoi d’un mandat de représentation au client pour assurer la défense dans cette affaire ;
– contrôle du recours de la [requérante] et rédaction d’un e-mail au client à ce sujet ;
– rédaction d’une lettre le 2 avril 2012 visant à demander une prolongation du délai pour présenter le mémoire en réponse dans cette affaire ;
– entretien téléphonique avec l’assistant juridique du Tribunal et rédaction d’un courrier pour se désister de la demande visée dans le point précédent ;
– analyse et mise à jour de la jurisprudence pertinente ;
– rédaction d’un mémoire en réponse faisant suite à la requête […] et réalisation des démarches nécessaires pour qu’il parvienne au Tribunal le 23 avril 2012 ;
– rédaction et envoi au client d’un résumé en anglais du mémoire en réponse ;
– correspondance générale avec le client au sujet de cette affaire ;
– supervision continue et suivi du traitement du recours » ;
– 578,15 USD au titre de frais relatifs à des traductions ;
– 27,01 USD au titre de frais de messagerie ;
– 19,50 USD au titre d’autres frais.
16 La facture du 29 novembre 2012 s’élève à 4094,89 USD et se décompose de la manière suivante :
– 3 680 USD au titre des prestations suivantes :
– « contrôle de la décision de l’OHMI et notification au client ;
– contrôle du recours de la [requérante] ;
– rédaction d’une lettre demandant l’autorisation de présenter un mémoire en duplique et présentation de celle-ci au Tribunal ;
– analyse et mise à jour de la jurisprudence relative aux points débattus dans le mémoire [en réplique] de [la requérante] ;
– rédaction d’un mémoire en duplique et présentation au Tribunal ;
– rédaction et envoi au client d’un résumé en anglais du mémoire en duplique ;
– correspondance générale avec le client au sujet de cette affaire ;
– supervision continue et suivi du traitement du recours » ;
– 266,77 USD au titre de frais relatifs à des traductions ;
– 128,62 USD au titre de frais de messagerie ;
– 19,50 USD au titre d’autres frais.
17 S’agissant des honoraires des conseils de l’intervenante en ce qui concerne la procédure devant le Tribunal, il ressort de la demande de l’intervenante que celle-ci a eu recours aux services de deux avocats ayant, respectivement, consacré 18 heures et 30 minutes de travail, facturées 400 USD l’heure, et 11 heures et 35 minutes de travail, facturées 270 USD l’heure, soit un total de 30 heures et 5 minutes de travail, facturées 10 520 USD.
18 Il y a lieu de relever que, s’il était loisible à l’intervenante de confier la défense de ses intérêts à plusieurs conseils, il appartient cependant au juge de l’Union de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure contentieuse, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties [voir ordonnance du 21 mai 2014, Esge/OHMI – De’Longhi Benelux (KMIX), T‑444/10 DEP, EU:T:2014:356, point 20 et jurisprudence citée].
19 En l’espèce, la répartition du travail entre plusieurs conseils a donc nécessairement impliqué une certaine duplication des efforts entrepris, de sorte que le Tribunal ne saurait reconnaître la totalité des heures de travail réclamées comme objectivement indispensables.
20 Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la rétribution horaire dont l’application est demandée doit être prise en considération, dans la mesure où la prise en compte d’un taux horaire d’un niveau élevé n’apparaît appropriée que pour rémunérer les services de professionnels capables de travailler de façon efficace et rapide et doit, par voie de conséquence, avoir pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure contentieuse [voir ordonnance du 21 mai 2014, Atlas Transport/OHMI – Atlas Air (ATLAS), T‑145/08 DEP, Rec (Extraits), EU:T:2014:361, point 39 et jurisprudence citée].
21 En application de cette jurisprudence, les taux horaires élevés de 400 USD et 270 USD pratiqués par les conseils de l’intervenante ont pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal.
22 Il convient de relever que, dans l’affaire au principal, l’intervenante a produit un mémoire en réponse comportant 15 pages dont 10 pages d’argumentation et un mémoire en duplique comportant 8 pages dont 7 pages d’argumentation. Ces mémoires sont, en grande partie, consacrés à la réfutation des arguments de la requérante relatifs à des questions déjà débattues devant la chambre de recours, à savoir la définition du public pertinent, la comparaison des produits en cause et des signes en conflit et le risque de confusion. Le mémoire en réponse était accompagné de 16 pages d’annexes qui correspondent au mandat donné à l’avocat de l’intervenante pour la représenter, au document de légitimation de cet avocat, à la délégation de pouvoir donnée par l’intervenante à l’un de ses salariés et à la preuve de la personnalité juridique de l’intervenante. Il convient de considérer que la production de ces annexes n’a nécessité aucun travail intellectuel ou administratif important de la part des conseils de l’intervenante. Le mémoire en duplique n’était accompagné d’aucune annexe.
23 Vu la longueur des mémoires et compte tenu de l’absence de complexité des problèmes juridiques posés en l’espèce et des taux horaires élevés pratiqués par les conseils de l’intervenante, le Tribunal estime que la proposition de l’intervenante consistant à fixer le nombre d’heures de travail nécessaires aux fins de la procédure devant lui à 30 heures et 5 minutes de travail est excessive.
24 En outre, il convient de relever que certaines prestations mentionnées dans les factures produites par l’intervenante, telles que la préparation et l’envoi d’un mandat de représentation et la rédaction de certains courriers, relèvent de tâches de bureau qui ne sauraient être facturées au tarif horaire des honoraires d’avocat.
25 Par ailleurs, l’intervenante n’a pas démontré le caractère indispensable aux fins de la procédure devant le Tribunal, au sens de la jurisprudence rappelée au point 9 ci-dessus, des frais relatifs à la rédaction et à l’envoi de résumés en anglais des mémoires en réponse et en duplique produits par l’intervenante.
26 Il s’ensuit qu’il est approprié de diminuer le montant des honoraires des conseils de l’intervenante pouvant être considérés comme étant des dépens récupérables, et d’évaluer celui-ci à 8 000 USD.
27 S’agissant des frais de traduction et des frais désignés par le mot « autres », qui s’élèvent respectivement à 844,92 USD et à 39 USD, force est de constater que l’intervenante n’a apporté aucune précision au sujet de ces frais dans la demande de taxation, de sorte que leur caractère indispensable aux fins de la procédure devant le Tribunal, au sens de la jurisprudence rappelée au point 9 ci-dessus, n’est pas démontré. Ces sommes ne sauraient, par conséquent, être considérées comme étant des dépens récupérables.
28 S’agissant, enfin, des frais de messagerie, il convient de relever qu’ils s’élèvent à 27,01 USD dans la facture du 27 avril 2012 et à 128,62 USD dans la facture du 29 novembre 2012, et que la justification d’une telle différence ne ressort ni des factures ni de la demande de taxation des dépens. Il s’ensuit que la différence de 101,61 USD entre les deux factures ne saurait être considérée comme faisant partie des dépens récupérables.
29 Il résulte de ce qui précède qu’il sera fait une juste appréciation de l’ensemble des dépens récupérables par l’intervenante en fixant leur montant à 8 054,02 USD, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.
30 En tout dernier lieu, il convient de rappeler qu’il résulte l’article 93, paragraphe 2, du règlement de procédure que, lorsque les frais remboursables ont été exposés dans une monnaie autre que l’euro, le change des monnaies s’effectue suivant le cours de change de référence de la Banque centrale européenne au jour du paiement.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
ordonne :
Le montant total des dépens à rembourser par Genebre SA à General Electric Company est fixé à 8 054,02 USD.
Fait à Luxembourg, le 15 janvier 2015.
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