Language of document : ECLI:EU:C:2025:716

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 18 septembre 2025 (1)

Affaire C447/24 [Höldermann] (i)

Staatsanwaltschaft Berlin

en présence de

SO

[demande de décision préjudicielle formée par le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision-cadre 2008/909/JAI – Reconnaissance mutuelle des jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté – Article 9, paragraphe 1, sous i) – Motifs de non-reconnaissance et de non-exécution – Personne n’ayant pas comparu en personne au procès ayant mené à la décision – Exceptions – Désignation d’un mandataire – Condition relative à la connaissance du procès prévu – Information sur la date et le lieu fixés pour le procès – Renonciation volontaire et non équivoque de la personne concernée à être présente à son procès – Marge d’appréciation de l’autorité compétente de l’État membre d’exécution – Obligation d’interprétation conforme »






I.      Introduction

1.        Le droit à un procès équitable constitue l’un des principes fondamentaux d’une société démocratique. Sur celui-ci repose le droit des suspects ou des personnes poursuivies d’assister à leur procès, qui devrait être garanti dans l’ensemble de l’Union européenne (2). Toutefois, ce droit ne revêt pas de caractère absolu. Sous certaines conditions, le suspect ou la personne poursuivie devrait pouvoir y renoncer de manière expresse ou tacite, mais sans équivoque (3).

2.        Dans ce contexte, la présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne (4), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299 (5).

3.        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure relative à l’exécution, en Allemagne, d’un jugement rendu en Pologne ayant condamné un ressortissant allemand à une peine privative de liberté. Après avoir lui-même sollicité devant les juridictions polonaises l’exécution de cette condamnation en Allemagne, ce ressortissant s’y oppose désormais devant la juridiction allemande compétente.

4.        La présente affaire invite, en particulier, la Cour à préciser ce qu’il convient d’entendre par l’expression « ayant eu connaissance du procès prévu » qui figure à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909, ainsi que la marge d’appréciation dont les autorités compétentes disposent lors de la mise en œuvre du motif de non-reconnaissance et de non-exécution mentionné à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre. Je souligne, à cet égard, que cette affaire s’inscrit dans un contexte factuel qui présente certaines différences par rapport à celui de l’affaire Khuzdar (C-95/24), dans laquelle je présente également des conclusions ce jour (6).

5.        Dans les présentes conclusions, je proposerai à la Cour d’interpréter cette disposition de manière cohérente avec ce que prévoit la directive 2016/343, telle qu’elle a été interprétée par la Cour. Cela me conduira à considérer notamment que la condition, prévue à ladite disposition, selon laquelle l’intéressé doit avoir eu connaissance du procès prévu requiert qu’il ait été informé de la date et du lieu fixés pour le procès, tout en précisant qu’il existe des situations dans lesquelles l’intéressé, en raison de son comportement, devrait être réputé avoir reçu une telle information.

6.        J’exposerai les raisons pour lesquelles cette interprétation est, selon moi, la mieux à même de faciliter la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires entre les États membres, en garantissant tant les objectifs visant à lutter contre l’impunité et à favoriser la réinsertion sociale des personnes condamnées que les droits de la défense de ces personnes.

II.    Le cadre juridique

A.      Le droit de l’Union

7.        L’article 9 de la décision-cadre 2008/909, intitulé « Motifs de non-reconnaissance et de non-exécution », prévoit, à son paragraphe 1, sous i) :

« L’autorité compétente de l’État d’exécution peut refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation si :

[...]

i)      selon le certificat prévu à l’article 4, l’intéressé n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision, sauf si le certificat indique que l’intéressé, conformément aux autres exigences procédurales définies dans la législation nationale de l’État d’émission :

i)      en temps utile,

–        soit a été cité à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour le procès qui a mené à la décision, soit a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu ;

et

–        a été informé qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution ;

ou

ii)      ayant eu connaissance du procès prévu, a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par l’intéressé soit par l’État, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès ;

ou

iii)      après s’être vu signifier la décision et avoir été expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale :

–        a indiqué expressément qu’il ne contestait pas la décision,

ou

–        n’a pas demandé une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel dans le délai imparti. »

B.      Le droit allemand

8.        L’article 84b du Gesetz über die internationale Rechtshilfe in Strafsachen (loi relative à l’entraide judiciaire internationale en matière pénale) (7), du 23 décembre 1982, dans sa version applicable au litige au principal (ci-après l’« IRG »), intitulé « Conditions complémentaires d’admission », dispose :

« (1)      L’exécution n’est pas admise si

[...]

2.      la personne condamnée n’a pas comparu en personne au procès qui a donné lieu à la décision,

[...]

(3)      Par dérogation au paragraphe 1, point 2, l’exécution est également admise si

1.      la personne condamnée a été, en temps utile,

a)      citée à personne au procès qui a mené à la décision ou

b)      a été avisée officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu du procès qui a mené à la décision, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque que l’intéressé a eu connaissance de l’audience fixée pour le procès, et

c)      a été avisée qu’un jugement pouvait également être rendu par défaut,

[...]

3.      la personne condamnée, ayant eu connaissance de l’audience fixée pour le procès, a mandaté un avocat pour la défendre à l’audience, et a été effectivement défendue par cet avocat à l’audience.

(4)      Nonobstant le paragraphe 1, point 2, l’exécution est aussi admise lorsque, après la signification de la décision, la personne condamnée

1.      a déclaré expressément ne pas contester la décision rendue, ou

2.      n’a pas sollicité la réouverture de la procédure ni interjeté appel dans les délais impartis.

La personne condamnée doit auparavant avoir été expressément avisée de son droit à une réouverture de la procédure ou à une procédure d’appel, à laquelle elle a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant également compte de nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale. »

III. Les faits du litige au principal et les questions préjudicielles

9.        Par un jugement rendu le 5 août 2019, le Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra, Pologne) a condamné SO à une peine privative de liberté d’un an pour association de malfaiteurs (8).

10.      Par un arrêt du 24 mars 2022, le Sąd Apelacyjny w Poznaniu (cour d’appel de Poznan, Pologne) a rejeté l’appel interjeté contre ce jugement par l’avocat de SO.

11.      Par décision du 30 janvier 2023, le Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra) a fait droit à la demande de SO visant à exécuter la peine privative de liberté en Allemagne, au motif qu’il est ressortissant allemand, que le centre de ses intérêts se situe à Berlin (Allemagne) et que sa famille vit également dans cet État membre.

12.      Par lettre du 2 février 2023, à laquelle étaient annexés à la fois cette décision, le certificat visé à l’article 4, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909, le jugement du 5 août 2019 et l’arrêt rendu en appel ainsi que la notification de la demande à SO en langues allemande et polonaise, cette juridiction a demandé au Staatsanwaltschaft Berlin (parquet de Berlin, Allemagne), en tant qu’autorité allemande compétente, de prendre en charge l’exécution de la condamnation.

13.      Ce dernier a alors demandé à la chambre d’exécution des peines du Landgericht Berlin (tribunal régional de Berlin, Allemagne) de déclarer admissible l’exécution de la peine privative de liberté infligée par le jugement du 5 août 2019.

14.      Devant cette chambre d’exécution des peines, SO s’est opposé à la demande du parquet de Berlin, en faisant valoir, notamment, qu’il n’avait comparu en personne qu’à 2 des 28 audiences de son procès en Pologne, lequel se serait déroulé en première instance, à ses dires, sur plus de quatre années et demie, et qu’il n’avait pas non plus comparu en personne à l’audience d’appel. SO dit ignorer s’il a été défendu en première instance pendant les 26 autres jours d’audience et en appel.

15.      Ladite chambre d’exécution des peines ayant demandé des informations complémentaires au Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra), ce dernier a indiqué, par lettre du 31 juillet 2023, que SO avait comparu en personne en première instance à trois audiences au cours des années 2012 et 2014, présenté des observations sur le fond et demandé que les autres audiences se déroulent par défaut en cas d’absence. SO aurait été informé de son droit de comparaître au procès et de l’obligation de communiquer tout changement d’adresse à laquelle il peut être cité et d’indiquer une adresse en Pologne à cette fin. SO n’aurait, en revanche, pas comparu en personne en appel, mais il aurait eu recours à l’assistance d’un défenseur qui aurait assisté aux audiences dans les deux instances. La présence du prévenu en degré d’appel, à l’instar de celle d’un défenseur, ne serait pas obligatoire en droit polonais. La citation à comparaître en appel aurait été signifiée à l’adresse polonaise désignée par SO pour recevoir les significations, à savoir le cabinet de son défenseur.

16.      Par lettre du 19 septembre 2023, le Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra), faisant suite à une nouvelle demande de la chambre d’exécution des peines du Landgericht Berlin (tribunal régional de Berlin), a fourni des informations supplémentaires concernant le procès en première instance.

17.      Par décision du 24 novembre 2023, cette chambre d’exécution des peines a rejeté la demande du parquet de Berlin visant à déclarer admissible l’exécution de la condamnation de SO en Allemagne, dès lors que, selon les informations fournies par le Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra), SO n’aurait pas été cité à certaines audiences du procès, étant précisé qu’il n’apparaît ni que des actes de procédure accomplis à ces audiences du procès en première instance aient uniquement intéressé des coprévenus, ni que SO ait eu connaissance de ces fixations d’une autre manière. Un défenseur n’y aurait pas non plus prêté son concours pour lui.

18.      Le parquet de Berlin a saisi le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne), qui est la juridiction de renvoi, d’un recours immédiat contre cette décision. À l’appui de ce recours, il fait valoir que la comparution en personne de SO à certaines audiences, au cours desquelles il s’est exprimé sur le fond et a demandé à être jugé même en son absence, est suffisante, car il relevait de sa décision autonome de ne pas prendre part aux débats d’autres jours. Par ailleurs, SO aurait lui-même demandé, par la voix de sa défenseuse près le Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra), que sa condamnation soit exécutée en Allemagne, renonçant de ce fait à la protection découlant de l’article 84b, paragraphe 1, point 2, de l’IRG.

19.      Selon une déclaration du conseil juridique de SO, ce dernier n’aurait pas eu connaissance du procès en appel. Il n’aurait pas été cité à l’adresse qu’il a en Allemagne. Par conséquent, il n’aurait pas non plus pu donner un mandat ad litem pour le représenter lors du procès en « connaissance de l’audience fixée pour le procès ».

20.      À la suite d’une demande de la juridiction de renvoi, l’avocat qui a défendu SO devant les juridictions polonaises a, par une déclaration du 28 février 2024, indiqué que ses pouvoirs s’étendaient tant à la procédure de première instance qu’à celle de deuxième instance, que SO avait indiqué l’adresse de son cabinet comme celle à laquelle les significations pouvaient se faire en Pologne et à laquelle des lettres pouvaient valablement lui être notifiées conformément au droit polonais et que, en appel, il s’est fait substituer par une consœur. Il serait probable qu’il n’a pas informé SO de la date de l’audience, puisque la présence de ce dernier à l’audience n’était pas obligatoire et que cet avocat était substitué par une consœur.

21.      En premier lieu, la juridiction de renvoi se demande si une citation à comparaître signifiée à un mandataire que la personne condamnée a désigné pour recevoir les significations répond aux conditions requises par l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), premier tiret, de la décision-cadre 2008/909.

22.      À cet égard, cette juridiction considère que la notion de « procès qui a mené à la décision », figurant à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre doit être comprise de la même manière que la notion figurant à l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584/JAI (9), que la Cour a déjà interprétée (10), dès lors que ces deux dispositions ont des termes identiques, qu’elles ont été modifiées par la même décision-cadre et qu’il n’y a aucune raison de traiter différemment les cas de remise en vue de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen et les cas de prise en charge d’un jugement de condamnation. Cette notion devrait donc viser uniquement, lorsqu’une procédure pénale comporte plusieurs instances, l’instance au cours de laquelle il a été définitivement statué, après un nouvel examen en fait et en droit, sur la culpabilité de l’intéressé et sur sa condamnation à une peine. En l’espèce, il s’agirait de l’audience d’appel du 24 mars 2022 devant le Sąd Apelacyjny w Poznaniu (cour d’appel de Poznan) et non pas du procès en première instance visé par la chambre d’exécution des peines du Landgericht Berlin (tribunal régional de Berlin).

23.      La juridiction de renvoi tend à considérer qu’une réponse négative à la question posée ressort des arrêts du 24 mai 2016, Dworzecki (11), et du 21 décembre 2023, Generalstaatsanwaltschaft Berlin (Condamnation par défaut) (12), concernant la disposition identique figurant à l’article 4 bis, paragraphe 1, sous a), i), de la décision-cadre 2002/584, dans lesquels la Cour a jugé qu’une citation remise à un adulte faisant partie du ménage de l’intéressé, qui s’est engagé à la remettre à l’intéressé, ne remplit les conditions énoncées à cette disposition que si le mandat d’arrêt européen permet de savoir si et, le cas échéant, quand cette personne l’a effectivement remise à l’intéressé. Une autorité judiciaire de l’État membre d’émission devrait donc indiquer dans le mandat d’arrêt européen les éléments qui lui ont permis d’établir que l’intéressé a effectivement reçu officiellement les informations relatives à la date et au lieu de son procès. Cette jurisprudence pourrait être transposable au certificat visé à l’article 4, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909, qui ne contient pas de telles informations en l’espèce.

24.      Cela étant, les faits de la présente espèce se distingueraient de ceux ayant donné lieu à ces arrêts. En effet, le défenseur qui a reçu la signification avait été expressément désigné par SO auprès des autorités judiciaires compétentes comme mandataire habilité à recevoir des significations en indiquant son adresse en tant qu’adresse à laquelle pouvaient être effectuées les significations. Il pourrait en être déduit que SO a souhaité que les significations effectuées au mandataire habilité à recevoir ces dernières soient assimilées à des significations ayant été faites à lui-même.

25.      En deuxième lieu, en cas de réponse négative à la première question, la juridiction de renvoi estime qu’il convient d’examiner si la personne condamnée a été représentée en appel d’une manière qui élimine le motif de refus d’exécution. Dès lors, elle souhaite savoir si les conditions d’application de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 sont respectées si la personne condamnée, au moment où elle confère un mandat à son défenseur pour la représenter, a eu connaissance non pas de la date du procès, mais uniquement du fait qu’un procès aura lieu.

26.      Cette juridiction indique que, aux termes de cette disposition, la fixation de l’audience du procès devrait précéder chronologiquement la délivrance du mandat à un défenseur. Toutefois, cela ne vaudrait pas nécessairement pour une procédure en appel. En effet, ladite juridiction relève que, en règle générale, une personne condamnée en première instance qui mandate son défenseur pour interjeter appel le mandatera également pour le défendre dans le procès en appel, même en cas d’absence, dans la mesure où le droit national le permet et où la présence de cette personne n’est pas requise lors du procès en appel. La même juridiction note que ladite personne a la certitude qu’un procès aura lieu en appel, puisqu’elle fait appel, mais elle n’a pas encore connaissance de la date précise à laquelle la juridiction d’appel fixera l’audience du procès.

27.      Selon la juridiction de renvoi, le seul fait de savoir qu’un procès en appel aura lieu est suffisant, étant donné que, dans la suite de la procédure, il ne tiendra qu’au prévenu qui a fait appel de prendre contact ou non avec la juridiction et son défenseur afin de pouvoir prendre connaissance de la date du procès.

28.      La juridiction de renvoi ajoute que, même dans les cas où le défenseur interjette appel à l’insu de son client, lorsqu’il n’a pas de contact avec ce dernier et entend respecter, à titre conservatoire, le délai d’appel, la procédure d’appel ne sera pas poursuivie sans en référer au client et sans recevoir confirmation de sa part. Dès lors, cette juridiction déduit de l’intervention du défenseur choisi et de l’avocate qui l’a substitué devant le Sąd Apelacyjny w Poznaniu (cour d’appel de Poznan) qu’il y a eu concertation avec SO et que celui-ci a donc certainement eu connaissance de l’imminence d’un procès en appel, même si la date de l’audience ne devait pas encore être fixée au moment de cette concertation.

29.      En troisième lieu, en cas de réponse négative à la première question et de réponse à la deuxième question en ce sens que la date du procès doit déjà avoir été fixée et l’intéressé doit en avoir connaissance au moment où le mandat à son défenseur est conféré, la juridiction de renvoi relève que la prise en charge de l’exécution de la condamnation ne serait pas admissible en vertu de l’article 84b, paragraphe 1, point 2, de l’IRG, dès lors que la dérogation prévue à l’article 84b, paragraphe 3, point 3, de l’IRG ne serait pas applicable.

30.      Cependant, cette juridiction observe que, alors que l’article 9, paragraphe 1, de la décision-cadre 2008/909 octroie un pouvoir d’appréciation à l’autorité compétente de l’État membre d’exécution, l’article 84b, paragraphe 1, point 2, de l’IRG prévoit un motif absolu de refus. Ladite juridiction estime qu’il ne lui est pas possible d’interpréter cette disposition contra legem, c’est-à-dire en ce sens qu’elle disposerait, dans l’examen du motif de refus, d’un pouvoir d’appréciation qui irait au-delà des exceptions prévues à l’article 84b, paragraphes 3 et 4, de l’IRG.

31.      La juridiction de renvoi indique que, si elle disposait d’un pouvoir d’appréciation, la prise en charge de l’exécution de la condamnation serait jugée admissible. En effet, malgré l’appel qu’il a interjeté, SO n’aurait pas maintenu un contact suffisant avec les autorités judiciaires polonaises et avec son défenseur, dont il avait indiqué l’adresse du cabinet comme adresse à laquelle toute signification pouvait être faite. De plus, c’est SO lui-même qui aurait sollicité la prise en charge de l’exécution de sa condamnation en Allemagne. Compte tenu de ces circonstances, cette juridiction ne décèle pas d’intérêt légitime de SO à ce que l’exécution de sa condamnation dans cet État membre soit refusée.

32.      Cela conduit ladite juridiction à interroger la Cour sur la compatibilité de la législation allemande avec le principe de primauté du droit de l’Union, quand bien même une réponse dans le sens d’une incompatibilité pourrait être déduite de l’arrêt du 21 décembre 2023, Generalstaatsanwaltschaft Berlin (Condamnation par défaut) (13), dans lequel la Cour a interprété l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584.

33.      En quatrième lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si la personne condamnée peut renoncer à la protection découlant de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 et, dans l’affirmative, si la demande adressée par cette personne à l’autorité compétente de l’État membre d’émission tendant à ce que la peine soit exécutée dans son État membre d’origine constitue une telle renonciation.

34.      L’attitude de SO serait contradictoire dès lors que, d’une part, il a demandé en Pologne, sans émettre de réserves ou d’objections à la condamnation, que la peine soit exécutée en Allemagne et, d’autre part, il émet à présent en Allemagne des objections à cet égard. La juridiction de renvoi estime que cette circonstance devrait être prise en compte dans le cadre de l’exercice du pouvoir d’appréciation dont elle devrait disposer, mais que le droit national ne lui reconnaît pas.

35.      Même si la décision-cadre 2008/909 ne contient aucun fondement légal dont elle pourrait déduire qu’il est loisible à la personne condamnée de renoncer à la protection découlant de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre, cette juridiction constate que cette disposition connaît également des cas de figure dans lesquels cette personne peut décider, par l’attitude qu’elle adopte dans la procédure, si elle souhaite se prévaloir de la protection contre l’exécution d’une décision rendue par défaut. En effet, le point iii) de ladite disposition prévoirait la possibilité pour ladite personne de renoncer à contester une décision rendue par défaut. Si le caractère exécutoire de cette décision pourrait, dans cette mesure, dépendre de la volonté de la personne condamnée, il serait concevable d’admettre également que la suite de l’exécution de ladite décision dépend de cette même volonté, laquelle aurait, en l’occurrence, été exprimée par SO lorsqu’il a demandé au Sąd Okręgowy w Zielonej Górze (tribunal régional de Zielona Góra) que la peine soit exécutée en Allemagne.

36.      Dans ces conditions, le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Une citation à comparaître signifiée à un mandataire que la personne condamnée a désigné dans le pays pour recevoir les significations répond‑elle aux conditions requises par l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), premier tiret, de la décision‑cadre [2008/909] ?

2)      L’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision‑cadre [2008/909] doit-il être compris en ce sens que, au moment où le mandat est conféré, la date du procès doit déjà avoir été fixée et l’intéressé doit en avoir connaissance ou suffit-il que l’intéressé confère ou confirme le mandat en sachant avec certitude qu’un procès aura lieu ?

3)      Le fait que, à l’article 84b, paragraphe 1, point 2, [de l’IRG], le législateur allemand a érigé la condamnation par défaut en cause d’inadmissibilité absolue [de la demande d’exécution] alors que l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre [2008/909] ne prévoit à cet égard qu’un motif facultatif de refus est-il compatible avec la primauté du droit de l’Union ?

4)      L’intéressé peut-il renoncer à la protection découlant de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre [2008/909], et permettre ainsi l’exécution d’une décision de justice rendue par défaut même lorsque les conditions visées à l’article 9, paragraphe 1, sous i), i) à iii), de [cette] décision-cadre ne sont pas réunies ? Le fait que l’intéressé demande à l’autorité compétente de l’État d’émission que la peine soit exécutée dans son pays d’origine constitue-t-il une telle renonciation ? »

37.      Le gouvernement polonais et la Commission européenne ont déposé des observations écrites et ont, ainsi que SO, participé à l’audience qui s’est tenue le 15 mai 2025, au cours de laquelle ils ont répondu aux questions pour réponse orale posées par la Cour.

IV.    Analyse

38.      À la différence de l’affaire Khuzdar (C-95/24), qui fait l’objet de conclusions séparées présentées ce jour, la présente affaire ne concerne pas le refus d’exécution d’un mandat d’arrêt européen en vertu de l’article 4, point 6, de la décision-cadre 2002/584. Cette affaire concerne une demande de reconnaissance d’un jugement et d’exécution d’une condamnation au titre de la décision-cadre 2008/909, indépendamment de l’exécution d’un tel mandat.

39.      Je rappelle que, à l’instar de la décision-cadre 2002/584, la décision-cadre 2008/909 concrétise, dans le domaine pénal, les principes de confiance mutuelle et de reconnaissance mutuelle. Cette décision-cadre renforce la coopération judiciaire en ce qui concerne la reconnaissance et l’exécution des jugements en matière pénale lorsque des personnes ont été condamnées à des peines ou à des mesures privatives de liberté dans un autre État membre, en vue de faciliter leur réinsertion sociale (14).

40.      L’article 4, paragraphe 1, sous a), de la décision-cadre 2008/909 prévoit ainsi la possibilité qu’un jugement accompagné du certificat dont le modèle figure à l’annexe I de cette décision-cadre soit transmis à l’État membre de la nationalité de la personne condamnée sur le territoire duquel elle vit. Conformément à l’article 6, paragraphe 2, sous a), de ladite décision-cadre, le consentement de la personne condamnée n’est pas requis dans cette hypothèse.

41.      Aux termes de son article 3, paragraphe 1, la décision-cadre 2008/909 vise à fixer les règles qui, en vue de faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée, permettent à un État membre de reconnaître un jugement et d’exécuter la condamnation prononcés par une juridiction d’un autre État membre.

42.      À cette fin, l’article 8 de cette décision-cadre prévoit que l’autorité compétente de l’État membre d’exécution est, en principe, tenue de faire droit à la demande, tendant à la reconnaissance d’un jugement et à l’exécution d’une condamnation à une peine ou à une mesure privatives de liberté prononcés dans un autre État membre, qui lui a été transmise conformément aux articles 4 et 5 de ladite décision-cadre. Elle ne peut, en principe, refuser de donner suite à une telle demande que pour les motifs de non-reconnaissance et de non-exécution limitativement énumérés à l’article 9 de la même décision-cadre (15).

43.      C’est sur le motif prévu à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 que porte la présente demande de décision préjudicielle.

44.      Aux fins de l’examen des questions préjudicielles, il convient de se focaliser sur la seule procédure d’appel dans l’affaire en cause au principal. En effet, la Cour a déjà jugé, s’agissant de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584, que la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de cette disposition, doit être comprise comme désignant la procédure qui a conduit à la décision judiciaire ayant définitivement condamné la personne dont la remise est sollicitée dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen (16). S’agissant, plus particulièrement, d’un cas de figure, tel que celui en cause au principal, où le procès s’est déroulé au cours de deux instances successives, à savoir une première instance suivie d’une procédure d’appel, la Cour a jugé que c’est l’instance ayant conduit à la décision rendue en appel qui est seule pertinente aux fins de l’application de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, pour autant que cette instance a abouti à la décision qui n’est plus susceptible d’un recours ordinaire et qui, partant, tranche définitivement l’affaire sur le fond (17).

45.      Dans la mesure où, d’une part, l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 et l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 ont tous deux été insérés dans ces deux décisions-cadres par la décision-cadre 2009/299 et où, d’autre part, le libellé et les finalités de ces deux dispositions se rejoignent, la même interprétation devrait être retenue dans le cadre de la présente affaire.

46.      Les questions posées par la juridiction de renvoi interviennent dans le cadre d’une procédure pénale visant à l’exécution en Allemagne d’une condamnation prononcée en Pologne à l’égard d’un ressortissant allemand qui, après avoir lui-même sollicité devant les juridictions polonaises l’exécution de cette condamnation en Allemagne, s’y oppose désormais devant la juridiction allemande compétente.

47.      Cette procédure concerne une situation où, conformément au droit polonais, non seulement cette personne condamnée n’a pas assisté elle-même à la plupart des audiences organisées en première instance, mais surtout, ayant interjeté appel de sa condamnation en première instance par l’intermédiaire de son avocat, elle n’a pas assisté en personne à l’unique audience organisée en appel dont elle n’a été personnellement informée ni de la date ni du lieu. Elle y a cependant été représentée par une avocate ayant remplacé le conseil juridique auquel elle avait donné mandat pour la défendre devant les juridictions polonaises de première instance et d’appel, et auquel avait été signifiée, à sa demande, la citation à comparaître en appel.

A.      Sur la première question préjudicielle

48.      Par cette question, la juridiction de renvoi demande à la Cour de dire pour droit si l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), premier tiret, de la décision-cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens qu’une citation à comparaître signifiée à un conseil juridique auquel la personne condamnée a donné mandat pour la défendre et qu’elle a désigné dans l’État membre de condamnation pour recevoir les significations répond aux conditions requises par cette disposition.

49.      Il ressort du libellé de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 que cette disposition énonce un motif facultatif de refus de reconnaissance d’un jugement transmis par un autre État membre et d’exécution de la peine ou de la mesure privatives de liberté infligées par celui-ci, si la personne condamnée n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision de condamnation. Cette faculté est toutefois assortie de trois exceptions, énumérées aux points i) à iii) de cette disposition, qui privent l’autorité compétente de l’État membre d’exécution de la possibilité de refuser la reconnaissance et l’exécution du jugement qui lui est transmis.

50.      En ce qui concerne plus particulièrement l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), de la décision-cadre 2008/909, l’autorité compétente de l’État membre d’exécution est privée de cette possibilité lorsque l’intéressé soit « a été cité à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour le procès qui a mené à la décision », soit « a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu », et qu’il a, au surplus, « été informé qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution ».

51.      La Cour a jugé, à propos de l’article 4 bis, paragraphe 1, sous a), i), de la décision-cadre 2002/584, que les expressions « cité à personne » ainsi que « informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu » constituent des notions autonomes du droit de l’Union et doivent trouver une interprétation uniforme dans toute l’Union (18). Cette jurisprudence est transposable à la disposition au libellé identique contenue dans la décision-cadre 2008/909, qui résulte également de la décision-cadre 2009/299.

52.      Dans son arrêt du 24 mai 2016, Dworzecki (19), la Cour a aussi jugé que l’article 4 bis, paragraphe 1, sous a), i), de la décision-cadre 2002/584 doit être interprété en ce sens que ne satisfait pas à elle seule aux conditions énoncées à cette disposition une citation qui a été notifiée non pas directement à l’intéressé, mais qui a été remise, à l’adresse de ce dernier, à une personne adulte appartenant à ce foyer qui s’est engagée à la lui remettre, sans que le mandat d’arrêt européen permette de s’assurer si et, le cas échéant, quand cette personne adulte a effectivement remis cette citation à l’intéressé (20).

53.      Le cas de figure relatif à une citation à comparaître signifiée à un conseil juridique auquel la personne condamnée a donné mandat pour la défendre et qu’elle a désigné dans l’État membre de condamnation pour recevoir les significations ne saurait, à mon avis, être assimilé à la situation qui a donné lieu à cet arrêt.

54.      Ce cas de figure relève plutôt, selon moi, de l’exception visée à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909. En décider autrement aboutirait à priver d’effet utile cette dernière disposition dont l’application dépend, à la différence de ce que prévoit l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), de cette décision-cadre, de la condition selon laquelle l’intéressé a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par lui soit par l’État, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès.

55.      Par conséquent, je suggère à la Cour de répondre à la première question préjudicielle que l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), de la décision-cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens qu’une citation à comparaître qui est signifiée à un mandataire que la personne condamnée a désigné pour recevoir les significations ne permet pas, en tant que telle, à l’autorité compétente de l’État membre d’exécution d’appliquer l’exception prévue à cette disposition, dans la mesure où ce cas de figure relève du point ii) de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre.

B.      Sur la deuxième question préjudicielle

56.      Par cette question, la juridiction de renvoi demande à la Cour de dire pour droit si l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision‑cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens que, au moment où le mandat à un conseil juridique est conféré, la date du procès doit déjà avoir été fixée et l’intéressé doit en avoir connaissance ou bien s’il suffit que l’intéressé confère ou confirme le mandat en sachant avec certitude qu’un procès aura lieu.

57.      Je rappelle que cette disposition vise la situation où l’intéressé, ayant eu connaissance du procès prévu, a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par lui-même soit par l’État, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès.

1.      La connaissance du procès prévu requiert une information de l’intéressé sur la date et le lieu fixés pour le procès

58.      Dans la plupart des versions linguistiques de la décision-cadre 2008/909, il ne ressort du libellé de l’article 9, paragraphe 1, sous i, ii), de cette décision-cadre aucune exigence expresse quant à la connaissance par l’intéressé de la date précise de l’audience au terme de laquelle il a été condamné, lorsqu’il a été représenté par un conseil juridique. La version en langue italienne de cette disposition se distingue, dans la mesure où elle utilise l’expression « essendo al corrente della data fissata » (étant au courant de la date fixée) (21).

59.      À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que la formulation utilisée dans l’une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition ou se voir attribuer un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques (22).

60.      Cela étant précisé, même si la plupart des versions linguistiques sont moins précises que la version italienne, il convient de souligner que l’expression « connaissance du procès prévu », qui figure notamment dans la version en langue française de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909, a, dans certaines versions linguistiques, pour équivalent l’expression « connaissance de l’audience fixée » (23) ou encore « connaissance de l’audience prévue » (24). Or, ces deux expressions pourraient être interprétées comme portant intrinsèquement en elles l’exigence de la connaissance de la date fixée pour l’audience, dans la mesure où elles semblent impliquer qu’une date a déjà été fixée pour l’audience et que c’est cet élément dont l’intéressé doit avoir connaissance. J’ajoute que les termes anglais « the scheduled trial », avec un article défini, laissent entendre qu’une date fait partie de la notion de « procès fixé » puisque « scheduled » présuppose une date et une heure précises.

61.      Je déduis de ces éléments que, s’il est vrai que l’exigence expresse quant à la connaissance par l’intéressé de la date précise de l’audience est isolée parmi les versions linguistiques de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909, un nombre non négligeable de ces versions laisse penser que cette exigence fait intrinsèquement partie de cette disposition.

62.      La note de recherche 25/003 établie par la direction « Recherche et documentation » de la Cour de justice de l’Union européenne permet, à mon avis, d’étayer ce constat, en examinant la manière dont ladite disposition et l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 ont été transposés au sein des ordres juridiques d’un échantillon d’États membres. Plusieurs éléments figurant dans cette note méritent d’être relevés en vue d’éclairer la façon dont l’expression « ayant eu connaissance du procès prévu » peut être comprise.

63.      En premier lieu, il y a lieu d’observer que le terme « procès » qui figure dans cette expression est susceptible de recouvrir, dans différentes langues officielles, deux significations différentes. En effet, ce terme peut se référer tant à la procédure dans sa globalité qu’à l’audience. Ainsi, dans les versions en langues bulgare, espagnole, croate, danoise, grecque, française, lituanienne, néerlandaise, roumaine et slovène de ces dispositions, le terme utilisé correspond à la traduction littérale du mot anglais « trial » (procès) et peut, d’un point de vue purement terminologique, désigner aussi bien l’audience que l’ensemble de la procédure (25). Il convient, cependant, de souligner que, dans le contexte spécifique des décisions-cadres 2002/584 et 2008/909, il est en principe interprété dans les ordres juridiques nationaux dans le sens d’« audience ».

64.      En particulier, les versions en langue italienne emploient, à l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 et à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909, le terme « processo », qui signifie littéralement « procédure », et non pas « audience », concept pour lequel la langue italienne dispose d’un terme spécifique (« udienza »). Toutefois, dans son interprétation, l’expression « connaissance de la date du procès » est en général considérée comme faisant référence à la « connaissance de la date de la première audience du procès » ou, plus généralement, à celle d’une audience à laquelle la comparution et la participation régulière au procès restent possibles.

65.      J’ajoute que les versions en langues tchèque, allemande, hongroise, polonaise et suédoise de l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 et de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 emploient, respectivement, les termes « jednání », « Verhandlung », « tárgyalás », « rozprawa » et « förhandling » qui signifient « audience » (26).

66.      Je déduis de ces éléments que l’expression « ayant eu connaissance du procès prévu » est majoritairement interprétée dans les ordres juridiques nationaux comme désignant l’audience prévue.

67.      En second lieu, s’agissant de la question de savoir si la « connaissance du procès prévu » implique que la personne concernée doit avoir eu connaissance de la date exacte du procès ou si le simple fait qu’elle ait été au courant qu’un procès a été fixé (sans en connaître spécifiquement la date) est suffisant, j’observe, au vu d’un examen des transpositions des dispositions concernées dans plusieurs droits nationaux, que trois catégories peuvent être identifiées au sein des ordres juridiques des États membres.

68.      Dans la première catégorie, les dispositions législatives transposant en droit national l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 et l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 ne prévoient aucune exigence particulière quant à la connaissance de l’audience (27). En effet, pour ces ordres juridiques, il suffit que la personne condamnée qui n’a pas assisté en personne à l’audience ayant abouti à sa condamnation ait été représentée par un avocat à cette audience pour que le mandat d’arrêt européen émis à son égard ou que le jugement rendu à l’issue de ladite audience puisse être exécuté dans l’État membre d’exécution. Ainsi, lesdits ordres juridiques se distinguent par l’absence explicite ou implicite, dans leur législation nationale, de toute exigence relative à la connaissance de l’audience par la personne condamnée (et a fortiori de la date de celle-ci).

69.      La deuxième catégorie regroupe la majorité des ordres juridiques nationaux (28). Dans ces ordres juridiques, les dispositions législatives transposant en droit national l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 et l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 prévoient que la personne condamnée doit avoir eu connaissance de l’audience prévue ou de la procédure prévue, sans faire expressément référence à l’exigence de la connaissance de la date de l’audience. Ainsi, dans lesdits ordres juridiques, il existe une concordance entre la formulation figurant, d’une part, dans l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 et dans l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 et, d’autre part, dans les dispositions de droit national.

70.      Cela étant, il importe de relever que, même si le terme « date » n’est pas explicitement mentionné dans les ordres juridiques figurant dans cette deuxième catégorie, l’utilisation de l’expression « connaissance de l’audience prévue » suggère, au moins pour certains d’entre eux, que la connaissance de l’audience ne peut se concevoir sans la connaissance d’une date précise pour son déroulement.

71.      Dès lors, l’absence d’exigence formelle relative à la connaissance de la date de l’audience doit être nuancée dans la mesure où, dans certains ordres juridiques, la date semble être implicitement contenue dans la notion de « prévu » qui est associée au terme « procès », de sorte que la nécessité pour la personne condamnée d’avoir eu connaissance de la date de l’audience ne saurait être écartée.

72.      Comme je l’ai indiqué précédemment, une telle conclusion peut, par exemple, découler de l’expression anglaise « the scheduled trial » (« le procès fixé ») (29).

73.      Dans la troisième catégorie, les dispositions législatives transposant en droit national l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 et l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 prévoient que la personne condamnée doit avoir eu spécifiquement connaissance de la date de l’audience (30).

74.      Il y a lieu de relever que la transposition de ces dispositions dans les ordres juridiques compris dans cette troisième catégorie est donc plus précise que ce que prévoient stricto sensu lesdites dispositions. Cependant, à l’instar de ce qui a été indiqué à propos des ordres juridiques compris dans la deuxième catégorie, cette conclusion doit être nuancée dans la mesure où la mention « connaissance de l’audience prévue », qui apparaît dans certaines des versions linguistiques concernées des dispositions en cause, pourrait porter en soi intrinsèquement la nécessité d’une information claire et effective de la personne condamnée quant à la date de l’audience.

75.      À mon avis, l’ensemble des indications résultant des différentes versions linguistiques de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 est de nature à étayer l’interprétation selon laquelle la personne concernée doit avoir eu connaissance de la date et du lieu fixés pour l’audience.

76.      Cette analyse me paraît être confortée par l’examen de l’économie et des objectifs de la décision-cadre 2008/909. Je rappelle, à cet égard, qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les dispositions du droit de l’Union doivent être interprétées et appliquées de manière uniforme à la lumière des versions établies dans toutes les langues de l’Union, et, en cas de divergence entre ces diverses versions, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (31).

77.      S’agissant de l’économie de cette décision-cadre, j’observe que l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), de celle-ci exclut que l’autorité compétente de l’État membre d’exécution puisse refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation lorsque, notamment, l’intéressé soit a été cité à personne et a donc été informé de la date et du lieu fixés pour le procès qui a mené à la décision, soit a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu. Ainsi rédigée, cette disposition laisse entendre qu’une connaissance du procès prévu requiert que l’intéressé a été informé de la date et du lieu fixés pour le procès. Il pourrait en être déduit que la mention identique à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 de la condition selon laquelle l’intéressé a eu connaissance du procès prévu devrait recevoir la même signification, à savoir qu’elle contient intrinsèquement la même exigence d’information précise sur la date et le lieu fixés pour le procès, quand bien même cette disposition ne répète pas ce qu’il y a lieu d’entendre par l’expression « ayant eu connaissance du procès prévu ».

78.      En revanche, je ne suis pas convaincu par l’argument selon lequel il y aurait lieu de considérer que l’absence d’une mention expresse relative à la connaissance par l’intéressé de la date et du lieu fixés pour le procès dans ladite disposition pourrait s’expliquer par le fait que la personne a donné mandat à un conseil juridique pour la défendre pendant le procès. En effet, la condition relative à l’octroi d’un tel mandat n’est, selon moi, pas de nature à se substituer au droit de la personne concernée de comparaître en personne à son procès. Dès lors, quand bien même cette personne ferait le choix de donner mandat à un conseil juridique pour la défendre au procès, ladite personne devrait disposer d’informations suffisamment précises sur la date et le lieu du procès afin de pouvoir y comparaître en personne si elle le souhaite, et ce jusqu’au moment où le procès se tiendra effectivement.

79.      Il s’ensuit que la renonciation volontaire et non équivoque au droit de comparaître en personne à son procès doit être établie dans le cadre de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 par la réunion de deux conditions, à savoir, d’une part, une information de la personne condamnée sur la date et le lieu du procès et, d’autre part, la défense effective pendant le procès par un conseil juridique à qui cette personne a donné mandat.

80.      Ainsi, la condition relative à la défense effective au procès par un conseil juridique à qui la personne condamnée a donné mandat, qui est mentionnée dans cette disposition, constitue le pendant de la condition figurant à l’article 9, paragraphe 1, sous i), i), second tiret, de cette décision-cadre, selon laquelle cette personne a été informée qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution. La condition relative à la connaissance de la date et du lieu fixés pour le procès est, quant à elle, commune aux points i) et ii) de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de ladite décision-cadre. Il convient, cependant, d’apporter la nuance selon laquelle, conformément à ce qu’indique le considérant 9 de la décision-cadre 2009/299, la date fixée pour un procès peut, pour des raisons pratiques, être initialement exprimée sous forme de plusieurs dates possibles, comprises dans un intervalle de temps rapproché.

81.      Je considère que l’interprétation selon laquelle une connaissance du procès prévu requiert une information de l’intéressé sur la date et le lieu fixés pour le procès correspond à la volonté du législateur de l’Union, qui est exprimée notamment au considérant 4 de la décision-cadre 2009/299, à savoir que cette décision-cadre vise à préciser la définition des motifs communs permettant à l’autorité compétente de l’État membre d’exécution d’exécuter la décision en dépit de l’absence de la personne au procès, tout en respectant pleinement ses droits de la défense. Ainsi, l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre 2008/909 vise à garantir un niveau de protection élevé et à permettre à l’autorité compétente de l’État membre d’exécution de procéder à la reconnaissance du jugement prononcé contre l’intéressé en dépit de son absence au procès qui a mené à sa condamnation, tout en respectant pleinement ses droits de la défense (32). Plus particulièrement, il ressort expressément de l’article 1er de la décision-cadre 2009/299, lu à la lumière des considérants 1 et 15 de celle-ci, que l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre 2008/909 a été modifié afin de protéger le droit de l’accusé de comparaître en personne au procès pénal diligenté contre lui tout en améliorant la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires entre les États membres (33). Il convient également d’insister sur le fait que le droit du prévenu à assister à son procès constitue un élément essentiel des droits de la défense et, de manière plus générale, revêt une importance capitale dans le respect du droit à un procès pénal équitable, consacré à l’article 47, deuxième et troisième alinéas, ainsi qu’à l’article 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (34).

82.      L’interprétation que je suggère me paraît être confortée par la prise en compte de la directive 2016/343.

2.      Une interprétation confortée par la prise en compte de la directive 2016/343

83.      La directive 2016/343 est venue compléter l’arsenal législatif mis en place notamment par la décision-cadre 2009/299. Il convient de rappeler que cette directive a été adoptée sur le fondement de l’article 82, paragraphe 2, sous b), TFUE. Il résulte de cette disposition que, pour faciliter la reconnaissance mutuelle ainsi que la coopération policière et judiciaire en matière pénale, le législateur de l’Union peut édicter des règles minimales portant, notamment, sur les droits des personnes dans la procédure pénale. Ladite directive vise ainsi, comme l’énoncent ses considérants 9 et 10, à renforcer le droit à un procès équitable dans le cadre des procédures pénales, de manière à renforcer la confiance des États membres dans le système de justice pénale des autres États membres et, par conséquent, à faciliter la reconnaissance mutuelle des décisions en matière pénale (35). Ainsi que le confirme expressément le considérant 33 de la même directive, le droit d’assister à son procès fait partie intégrante du droit fondamental à un procès équitable (36).

84.      Les États membres peuvent toutefois, conformément à l’article 8 de la directive 2016/343, prévoir, sous certaines conditions, la tenue d’un procès par défaut, étant entendu que, lorsqu’un tel procès est mené alors même que les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 2, de cette directive ne sont pas réunies, l’intéressé a, en vertu de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 9 de ladite directive, qui sont d’effet direct, droit « à un nouveau procès ou à une autre voie de droit, permettant une nouvelle appréciation du fond de l’affaire [...] et pouvant aboutir à une infirmation de la décision initiale » (37).

85.      Conformément à ce que prévoit l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343, les États membres peuvent prévoir qu’un procès pouvant donner lieu à une décision statuant sur la culpabilité ou l’innocence du suspect ou de la personne poursuivie peut se tenir en son absence, pour autant que soit le suspect ou la personne poursuivie ait été informé, en temps utile, de la tenue du procès et des conséquences d’un défaut de comparution [point a) de cette disposition], soit le suspect ou la personne poursuivie, ayant été informé de la tenue du procès, soit représenté par un avocat mandaté, qui a été désigné soit par le suspect ou la personne poursuivie, soit par l’État [point b) de ladite disposition].

86.      Ainsi qu’il ressort de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 9 de cette directive, le droit à un nouveau procès est réservé aux personnes dont le procès est mené par défaut alors même que les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 2, de ladite directive ne sont pas réunies (38). Autrement dit, une personne condamnée par défaut ne peut être privée du droit à un nouveau procès que si les conditions fixées à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343 sont remplies (39). Par conséquent, lorsque les conditions énoncées à cet article 8, paragraphe 2, sont réunies, le procès mené par défaut peut conduire à une décision qui, conformément à ce que prévoit le paragraphe 3 dudit article (40), est susceptible d’être exécutée, sans obligation pour l’État membre en cause de prévoir le droit à un nouveau procès (41).

87.      La Cour a eu l’occasion de préciser que les points a) et b) de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343 sont applicables alternativement et qu’ils énoncent, chacun, deux conditions cumulatives, dont la première exige que l’intéressé soit informé de la tenue de son procès (42). À cet égard, la Cour s’est appuyée sur le considérant 36 de cette directive, qui précise qu’informer le suspect ou la personne poursuivie de la tenue du procès devrait signifier que le suspect ou la personne poursuivie est cité en personne ou est informé officiellement, par d’autres moyens, de la date et du lieu fixés pour le procès, de manière à lui permettre d’avoir connaissance du procès (43). Dès lors, la Cour a jugé qu’il appartient à la juridiction nationale qui est amenée à examiner si les conditions énoncées à l’article 8, paragraphe 2, de ladite directive sont réunies de vérifier si un document officiel, mentionnant sans équivoque la date et le lieu fixés pour le procès et, en cas de défaut de représentation par un avocat mandaté, les conséquences d’un éventuel défaut de comparution, a été émis à l’attention de l’intéressé (44).

88.      La seconde condition exigée par l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343 pour que la personne condamnée par défaut puisse être privée du droit à un nouveau procès peut être satisfaite soit, conformément à l’article 8, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 4, de cette directive, si cette personne a été informée, en temps utile, des conséquences d’un défaut de comparution à son procès, soit, en application de l’article 8, paragraphe 2, sous b), et paragraphe 4, de ladite directive, si ladite personne a été représentée à son procès par un avocat mandaté, qui a été désigné par elle ou par l’État (45).

89.      Il s’ensuit que, si la seconde condition diffère selon que la situation en cause relève du point a) ou du point b) de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343, la première condition relative à l’information de l’intéressé sur la tenue de son procès est commune à ces deux dispositions (46).

90.      Il me paraît approprié de considérer que les points i) et ii) de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 sont bâtis selon la même architecture.

91.      En effet, il convient de considérer, par analogie avec ce que la Cour a jugé à propos de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, que, dans chacun des cas de figure visés à l’article 9, paragraphe 1, sous i), i) à iii), de la décision-cadre 2008/909, la reconnaissance du jugement et l’exécution de la condamnation ne portent pas atteinte aux droits de la défense de la personne concernée ni au droit à un recours effectif et à un procès équitable, tels qu’ils sont consacrés à l’article 47 et à l’article 48, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux (47).

92.      Ainsi, l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 énonce, à ses points i) à iii), les conditions dans lesquelles l’intéressé doit être réputé avoir renoncé volontairement et de manière non équivoque à être présent à son procès, de sorte que la reconnaissance du jugement et l’exécution de la peine qui a été infligée à la personne condamnée par défaut ne sauraient être subordonnées à la condition qu’elle puisse bénéficier d’une nouvelle procédure de jugement en sa présence dans l’État membre de condamnation (48).

93.      Dans la mesure où l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343 énonce également les conditions dans lesquelles une personne condamnée peut être considérée comme ayant renoncé volontairement et de manière non équivoque à assister en personne à son procès et peut donc être privée du droit à un nouveau procès (49), j’estime qu’il doit exister une cohérence dans l’interprétation, d’une part, de cette disposition et, d’autre part, de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 et de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909.

94.      Cette cohérence est justifiée par le fait que ces dispositions poursuivent le même objectif visant à renforcer le droit à un procès équitable dans le cadre des procédures pénales afin de faciliter la reconnaissance mutuelle des décisions en matière pénale et font partie d’un même système global de garanties (50). Lesdites dispositions s’inscrivent ainsi dans un ensemble normatif plus général, qui offre de façon cohérente des garanties aux personnes faisant l’objet d’une procédure pénale.

95.      Certes, il est vrai que, à l’instar de la décision-cadre 2002/584, la décision-cadre 2008/909 introduit un système de reconnaissance mutuelle fondé sur le principe de confiance mutuelle et que, comme il ressort du considérant 14 de la décision-cadre 2009/299, elle ne vise pas, ce faisant, à harmoniser les législations nationales (51).

96.      Il est également vrai que, lorsqu’elle a été amenée à préciser la relation qu’entretiennent la directive 2016/343 et la décision-cadre 2002/584, la Cour est partie du constat selon lequel cette décision-cadre contient une disposition spécifique, à savoir l’article 4 bis, qui vise, précisément, l’hypothèse d’un mandat d’arrêt européen délivré aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, concernant un intéressé qui n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision ayant infligé cette peine ou imposé cette mesure (52). Dans ce contexte, la Cour a précisé qu’une éventuelle non-conformité du droit national de l’État membre d’émission aux dispositions de la directive 2016/343 ne saurait constituer un motif pouvant conduire à un refus d’exécution du mandat d’arrêt européen (53). En effet, selon la Cour, invoquer les dispositions d’une directive pour faire obstacle à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen permettrait de contourner le système mis en place par la décision-cadre 2002/584 qui prévoit de manière exhaustive les motifs de non-exécution (54). À cet égard, la Cour a observé que la directive 2016/343 ne contient pas de dispositions applicables à l’émission et à l’exécution des mandats d’arrêt européens (55). Au vu de ces considérations, la Cour a jugé que l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584 doit être interprété en ce sens que l’autorité judiciaire d’exécution ne peut pas refuser l’exécution d’un mandat d’arrêt européen délivré aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, lorsque la personne concernée a fait obstacle à sa citation en personne et n’a pas comparu en personne au procès en raison de sa fuite vers l’État membre d’exécution, au seul motif qu’elle ne dispose pas de l’assurance que, en cas de remise à l’État membre d’émission, le droit à un nouveau procès, tel que défini aux articles 8 et 9 de la directive 2016/343, sera respecté (56).

97.      Cette position de la Cour me paraît refléter la volonté du législateur de l’Union exprimée au considérant 3 de la décision-cadre 2009/299 de ne plus faire dépendre l’exécution d’un mandat d’arrêt européen de la fourniture par l’autorité d’émission d’assurances, dont le caractère suffisant devait être apprécié par l’autorité d’exécution, pour garantir à la personne qui fait l’objet de ce mandat qu’elle aura la possibilité de demander une nouvelle procédure de jugement dans l’État membre d’émission. En vue de remédier aux difficultés de la reconnaissance mutuelle des décisions rendues en l’absence de la personne concernée à son procès résultant de l’existence, dans les États membres, de différences dans la protection des droits fondamentaux (57), le législateur de l’Union a fait le choix de prévoir des motifs de non-reconnaissance, précis et communs, des décisions rendues à l’issue d’un procès auquel la personne concernée n’a pas comparu en personne (58).

98.      Dans cette optique, la position de la Cour consistant à refuser de créer un motif de non-exécution d’un mandat d’arrêt européen en raison d’une éventuelle non-conformité du droit national de l’État membre d’émission aux dispositions de la directive 2016/343 (59) ne s’oppose pas, à mon avis, à ce que l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 et l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 soient interprétés de façon cohérente avec l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343.

99.      En effet, il importe de souligner que le parallélisme entre ces dispositions a conduit la Cour à mettre en exergue le lien fonctionnel entre les dispositions de cette directive et de la décision-cadre 2002/584 (60). Ce constat est, à mon sens, également valable pour les dispositions de la décision-cadre 2008/909.

100. Ce lien fonctionnel, qui assure la cohérence et la lisibilité du système de garanties procédurales dont bénéficient les personnes condamnées par défaut, me conduit à considérer, dans le contexte de la mise en œuvre de la décision-cadre 2008/909, que, afin de déterminer si une situation correspond à l’un des cas de figure mentionnés à l’article 9, paragraphe 1, sous i), i) ou ii), de cette décision-cadre et si, par conséquent, la reconnaissance d’un jugement et l’exécution d’une condamnation ne peuvent pas être refusées par l’autorité compétente de l’État membre d’exécution, il y a lieu de tenir compte des conditions qui sont prévues respectivement à l’article 8, paragraphe 2, sous a) et b), de la directive 2016/343, telles qu’elles ont été identifiées et précisées par la Cour.

101. En décider autrement pourrait conduire à obliger l’autorité compétente de l’État membre d’exécution à reconnaître un jugement et à exécuter une condamnation, alors même que les conditions figurant à l’article 8, paragraphe 2, sous a) ou b), de la directive 2016/343 ne sont pas remplies et que la personne condamnée par défaut ne peut donc pas être valablement privée de son droit à un nouveau procès. En particulier, admettre que la mise en œuvre de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 dépend de conditions plus souples que celles prévues à l’article 8, paragraphe 2, sous b), de la directive 2016/343, telles qu’une simple connaissance qu’un procès va se tenir, sans autres précisions, pourrait obliger cette autorité à reconnaître un jugement qui est pourtant susceptible d’être remis en cause au terme d’un nouveau procès, si celui-ci a lieu.

102. Or, je rappelle que, conformément à ce que prévoit l’article 8, paragraphe 3, de la directive 2016/343, c’est lorsqu’elle est prise conformément à l’article 8, paragraphe 2, de cette directive qu’une décision peut être exécutée à l’encontre de la personne concernée. Il me paraît ainsi logique de considérer que, lorsque les conditions prévues aux points a) ou b) de cette disposition sont remplies et que, par conséquent, la personne concernée peut être privée de son droit à un nouveau procès et la décision peut être exécutée, l’autorité compétente de l’État membre d’exécution ne saurait faire obstacle à une telle exécution en invoquant le motif de non-reconnaissance et de non-exécution prévu à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909.

103. Ces éléments confortent mon opinion selon laquelle, à l’instar de ce qui vaut pour les cas de figure visés à l’article 8, paragraphe 2, sous a) et b), de la directive 2016/343 (61), il convient de considérer que les points i) et ii) de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 sont applicables alternativement et qu’ils énoncent, chacun, deux conditions cumulatives, dont la première exige que l’intéressé ait eu connaissance du procès prévu, ce qui signifie qu’il doit avoir été informé de la date et du lieu fixés pour le procès.

104. La seconde condition exigée par l’article 9, paragraphe 1, sous i), i) et ii), de la décision-cadre 2008/909 pour que l’autorité compétente de l’État membre d’exécution ne puisse pas exercer sa faculté de refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation est soit que la personne condamnée a été informée qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution, soit que cette personne a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné par ladite personne ou par l’État, pour la défendre au procès, et a été effectivement défendue par ce conseil pendant le procès.

105. Cette dernière condition, cumulée avec celle relative à l’information de la personne concernée sur la date et le lieu fixés pour le procès, est de nature à démontrer que, conformément à ce qui est indiqué au considérant 10 de la décision-cadre 2009/299, cette personne a délibérément choisi d’être représentée par un conseil juridique au lieu de comparaître en personne au procès.

106. En revanche, contrairement à ce que le libellé de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 pourrait laisser entendre, je ne crois pas que cette disposition exige que l’information de l’intéressé sur la date et le lieu fixés pour le procès précède nécessairement le mandat qui est donné à son conseil juridique pour le défendre à ce procès. Ladite disposition devrait plutôt être interprétée comme énonçant deux conditions cumulatives, mais qui ne doivent pas obligatoirement être remplies dans un certain ordre. Adopter une interprétation différente conduirait à imposer des exigences formelles excessives, telles que la nécessité de confirmer ou de renouveler le mandat en vue du procès en appel, alors que ce mandat a été initialement conféré pour couvrir l’intégralité de la procédure. Si l’information de l’intéressé sur la date et le lieu fixés pour le procès a, comme je le pense, pour but de permettre à ce dernier d’assister à son procès, peu importe que cette information soit fournie avant qu’un mandat soit donné à conseil juridique ou après que ce mandat a été donné. Je note d’ailleurs que la Cour, lorsqu’elle a précisé les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 2, sous b), de la directive 2016/343, n’a pas mis en exergue la nécessité d’un ordre chronologique entre l’information de la personne concernée sur la tenue du procès et le mandat donné à un avocat. Je relève en outre que, lorsque l’intéressé donne mandat à un avocat de faire appel et de le représenter en appel, ce mandat précède nécessairement l’information sur la date et le lieu du procès en appel qui, par définition, ne sont pas connus à ce stade.

107. J’ajoute que, si le respect d’un tel ordre chronologique était imposé dans le cadre de l’exception prévue à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909, cela pourrait conduire à limiter fortement les cas d’application de cette exception, ce qui serait contraire à la règle selon laquelle les motifs de non-reconnaissance et de non-exécution doivent être interprétés de façon stricte. Je rappelle, à cet égard, que toute exception au principe de la reconnaissance mutuelle doit faire l’objet d’une interprétation stricte (62). Ainsi, en ce qui concerne l’article 9, paragraphe 1, sous d), de la décision‑cadre 2008/909, la Cour a jugé que la condition de la double incrimination constitue une exception à la règle de principe de reconnaissance du jugement et d’exécution de la condamnation. Partant, le champ d’application du motif de refus de reconnaissance du jugement et de l’exécution de la condamnation, tiré de l’absence de double incrimination, tel que visé à cette disposition, doit être interprété de manière stricte, afin de limiter les cas de non-reconnaissance et de non-exécution (63). Comme la Cour l’a déjà précisé, l’interprétation stricte de ladite disposition contribue à la réalisation de l’objectif visant à faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée, lequel est poursuivi par la décision-cadre 2008/909, comme l’indique l’article 3, paragraphe 1, de celle-ci (64). Ces enseignements devraient, à mon avis, être appliqués dans le cadre de la mise en œuvre du motif de non-reconnaissance et de non-exécution prévu à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909.

108. Je déduis de l’ensemble des éléments qui précèdent que l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision‑cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens que l’exception qui est prévue à cette disposition requiert le respect de deux conditions cumulatives, à savoir, d’une part, que l’intéressé ait été informé de la date et du lieu fixés pour le procès et, d’autre part, qu’il ait donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par lui-même, soit par l’État, pour le défendre au procès, en ayant été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès. Une telle information ne doit pas nécessairement précéder le mandat donné audit conseil.

109. Il convient, à présent, de préciser la manière dont l’autorité compétente de l’État membre d’exécution doit vérifier si ces conditions sont réunies.

3.      La vérification des conditions prévues à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909

a)      Sur la première condition : les cas dans lesquels l’intéressé est réputé avoir reçu une information suffisante

110. Afin de vérifier si la première condition posée par l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 est remplie, il me paraît là encore pertinent de tenir compte de la jurisprudence relative à la directive 2016/343. En effet, dans ce contexte, la Cour a identifié des situations dans lesquelles la personne concernée doit être réputée avoir été informée de la tenue de son procès.

111. Ainsi, en vue de vérifier si la première condition figurant à l’article 8, paragraphe 2, sous a) et b), de la directive 2016/343 est remplie, la Cour a indiqué que, comme il découle du considérant 38 de cette directive, il y a lieu d’accorder une attention particulière, d’une part, à la diligence dont ont fait preuve les autorités publiques pour informer la personne concernée de la tenue de ce procès et, d’autre part, à la diligence dont a fait preuve cette personne pour recevoir les informations qui y sont relatives. Par conséquent, selon la Cour, présentent une pertinence aux fins de l’appréciation de cette condition d’éventuels indices précis et objectifs que ladite personne, tout en ayant été informée officiellement qu’elle est accusée d’avoir commis une infraction pénale et, sachant ainsi qu’un procès allait être organisé contre elle, fait délibérément en sorte d’éviter de recevoir officiellement les informations relatives à la date et au lieu de ce procès. L’existence de tels indices précis et objectifs peut, par exemple, être constatée lorsque la même personne a communiqué délibérément une adresse erronée aux autorités compétentes ou ne se trouve plus à l’adresse qu’elle leur a communiquée (65). Ainsi, le fait que la personne concernée ait délibérément empêché l’État de l’informer constitue une circonstance pertinente afin de déterminer le caractère suffisant de l’information qui lui a été transmise.

112. Sur la base de ces éléments, je relève que, dans l’affaire en cause au principal, les autorités compétentes de l’État membre de condamnation ne semblent pas avoir manqué à leur devoir de diligence afin d’informer SO de la tenue du procès d’appel. En effet, il n’est pas contesté que ces autorités ont envoyé, en temps utile, un document officiel mentionnant la date et le lieu du procès à l’adresse que SO a communiquée à ces autorités, à savoir l’adresse du cabinet de son conseil juridique, et que ce document a effectivement été délivré à cette adresse. En indiquant ladite adresse, SO a émis le souhait que les significations envoyées au cabinet de son conseil juridique soient assimilées à des significations faites à lui-même.

113. En revanche, il peut être reproché à SO d’avoir manqué à son devoir de diligence. En effet, comme l’indique la juridiction de renvoi, malgré l’appel qu’il a interjeté, SO n’a maintenu un contact suffisant ni avec les autorités judiciaires polonaises ni avec son conseil juridique, dont il avait indiqué l’adresse du cabinet comme adresse à laquelle toutes les significations devaient être effectuées. À défaut d’avoir maintenu un tel contact, qui lui aurait permis de prendre connaissance de la date et du lieu de son procès, SO ne saurait à présent invoquer auprès de l’autorité compétente de l’État membre d’exécution le fait qu’il n’a pas disposé de ces informations. La circonstance que le conseil juridique n’aurait pas lui-même informé SO de la date et du lieu de l’audience d’appel ne me paraît pas pertinente dans ce contexte.

114. Dans ces conditions, je considère que l’envoi, en temps utile, par les autorités compétentes de l’État membre de condamnation, d’un document officiel mentionnant la date et le lieu du procès à l’adresse que la personne condamnée avait communiquée à ces autorités comme adresse à laquelle toutes les significations devaient être effectuées, à savoir l’adresse du cabinet de son conseil juridique, et la preuve apportée que ce document a effectivement été délivré à cette adresse valent information de cette personne concernant cette date et ce lieu.

115. Il s’ensuit que la personne condamnée doit être réputée avoir eu connaissance de la date et du lieu de son procès (66).

116. La première condition mentionnée à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 étant donc, à mon avis, remplie, il convient de vérifier si tel est également le cas de la seconde condition.

b)      Sur la seconde condition : le mandat à un conseil juridique qui a défendu l’intéressé pendant le procès

117. En ce qui concerne la représentation par un avocat mandaté, la Cour a précisé que l’existence d’un « mandat », au sens de l’article 8, paragraphe 2, sous b), de la directive 2016/343, requiert que l’intéressé a lui-même confié à un avocat, le cas échéant celui qui lui a été commis d’office, la mission de le représenter lors de son procès par défaut (67). Il s’ensuit que la seule circonstance qu’une personne condamnée par défaut a été défendue par un avocat commis d’office au cours de l’ensemble de la procédure judiciaire menée en son absence n’est pas suffisante pour satisfaire à la seconde condition énoncée à cette disposition (68).

118. Selon la Cour, la représentation par un avocat permet de démontrer que la personne jugée en son absence a renoncé volontairement et de manière non équivoque à son droit d’assister à son procès uniquement si cette personne a délibérément laissé le soin à cet avocat d’assurer sa défense devant la juridiction de jugement, ce qui suppose qu’elle l’ait désigné spécifiquement pour la représenter, en son absence, lors de son procès (69).

119. Sur la base de ces éléments, qui me paraissent devoir guider l’examen de la seconde condition prévue à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909, il me semble qu’il y a lieu de considérer, au vu du dossier dont la Cour dispose et sous réserve des vérifications qui doivent être effectuées par la juridiction de renvoi, que cette condition est remplie en l’espèce.

120. En effet, SO avait donné mandat au conseil juridique qu’il avait désigné pour le représenter tant durant la procédure de première instance que durant la procédure en appel. La circonstance que SO a été défendu pendant le procès d’appel par une avocate qui a remplacé ce conseil ne me paraît pas problématique s’agissant du point de savoir si SO a été représenté devant la juridiction d’appel par un conseil mandaté, dès lors que cette défense, dont le caractère effectif n’est pas contesté, s’inscrit dans la continuité du mandat qui a été octroyé audit conseil.

121. L’ensemble de ces éléments me conduisent à considérer que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, les conditions d’application de l’exception prévue à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 semblent remplies. Par conséquent, l’autorité compétente de l’État membre d’exécution ne peut pas refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation.

122. En tout état de cause, quand bien même la juridiction de renvoi devait aboutir au constat selon lequel ces conditions ne sont pas remplies, il importe de souligner qu’elle ne saurait être contrainte, en vertu de son droit national, de refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation. Elle dispose, en effet, d’une marge d’appréciation afin de décider si elle souhaite ou non appliquer le motif de non-reconnaissance du jugement et de non-exécution de la condamnation prévu à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909. La troisième question préjudicielle concerne cette problématique.

C.      Sur la troisième question préjudicielle

123. Par cette question, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour de dire pour droit si l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui oblige l’autorité compétente de l’État membre d’exécution à refuser de reconnaître un jugement et d’exécuter une condamnation lorsqu’aucune des exceptions prévues à cette disposition n’est applicable.

124. Pour les raisons que j’ai exposées dans mes conclusions dans l’affaire Khuzdar (C-95/24), présentées ce jour et auxquelles je renvoie, cette question devrait, selon moi, recevoir une réponse affirmative.

D.      Sur la quatrième question préjudicielle

125. Par cette question, la juridiction de renvoi demande à la Cour de dire pour droit si l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens que la personne condamnée peut renoncer à la protection découlant de cette disposition et permettre ainsi l’exécution d’un jugement de condamnation rendu par défaut même lorsque les conditions visées à ladite disposition ne sont pas réunies. En particulier, cette juridiction souhaite savoir si le fait que l’intéressé ait demandé à l’autorité compétente de l’État membre de condamnation que la peine soit exécutée dans l’État membre dont il est ressortissant constitue une telle renonciation.

126. Je précise d’emblée que la réponse à cette question ne présente d’utilité dans le cadre de la procédure au principal que dans la mesure où la juridiction de renvoi serait amenée à constater que les conditions prévues à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de cette décision-cadre ne sont pas remplies.

127. Je rappelle que l’article 9, paragraphe 1, sous i), de ladite décision-cadre énonce à ses points i) à iii) les conditions dans lesquelles l’intéressé doit être réputé avoir renoncé volontairement et de manière non équivoque à être présent à son procès, de sorte que la reconnaissance du jugement et l’exécution de la peine qui a été infligée à la personne condamnée par défaut ne sauraient être subordonnées à la condition qu’elle puisse bénéficier d’une nouvelle procédure de jugement en sa présence dans l’État membre de condamnation (70).

128. En particulier, il résulte de l’article 9, paragraphe 1, sous i), iii), de la décision-cadre 2008/909 que l’autorité compétente de l’État membre d’exécution ne saurait refuser de reconnaître le jugement et d’exécuter la condamnation si, après s’être vu signifier la décision et avoir été expressément informée de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle la personne condamnée a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale, cette personne a indiqué expressément qu’elle ne contestait pas la décision ou n’a pas demandé une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel dans le délai imparti.

129. À mon avis, le fait que l’intéressé ait demandé à l’autorité compétente de l’État membre de condamnation que la peine soit exécutée dans l’État membre dont il est ressortissant ne répond pas, en tant que tel, aux conditions énoncées par cette disposition.

130. Certes, en l’espèce, l’attitude de SO peut paraître contradictoire dans la mesure où, en demandant à ce que sa peine soit exécutée en Allemagne, il semble accepter cette peine. Toutefois, il importe de souligner que SO peut formuler une telle demande tout en se réservant le droit de solliciter la tenue d’un nouveau procès.

131. Cela étant précisé, il y a lieu de tenir compte, dans ce contexte, de la jurisprudence portant sur la disposition identique figurant dans la décision-cadre 2002/584. En effet, il ressort de cette jurisprudence que, dans la mesure où l’article 4 bis, paragraphe 1, de cette décision-cadre prévoit un cas de non-exécution facultative, une autorité judiciaire d’exécution peut, en tout état de cause, même après avoir constaté que les circonstances visées par les exceptions prévues notamment aux points a) à c) de cette disposition ne couvrent pas la situation en cause, prendre en compte d’autres circonstances lui permettant de s’assurer que la remise de l’intéressé n’implique pas une violation de ses droits de la défense, et notamment le comportement dont a fait preuve l’intéressé (71).

132. Au vu de cette jurisprudence qui me paraît applicable par analogie dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909, j’estime que la demande de la personne concernée visant à ce que sa condamnation soit exécutée dans l’État membre dont elle est ressortissante fait partie de ces circonstances. L’autorité compétente de l’État membre d’exécution peut ainsi assurer un équilibre entre les objectifs visant à lutter contre l’impunité, à faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée et à garantir les droits de la défense de cette dernière.

133. Par conséquent, je suggère à la Cour de répondre à la quatrième question préjudicielle que l’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision-cadre 2008/909 doit être interprété en ce sens qu’il énonce à ses points i) à iii) les conditions dans lesquelles la personne condamnée doit être réputée avoir renoncé volontairement et de manière non équivoque à être présente à son procès. Le fait que cette personne ait demandé à l’autorité compétente de l’État membre de condamnation que la peine soit exécutée dans l’État membre dont elle est ressortissante ne répond pas, en tant que tel, aux conditions énoncées par le point iii) de cette disposition. Cependant, une telle demande fait partie des circonstances que l’autorité compétente de l’État membre d’exécution peut prendre en compte, dans le cadre de l’exercice de son pouvoir d’appréciation, afin de décider si elle souhaite ou non se prévaloir du motif de non-reconnaissance et de non-exécution prévu à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre.

V.      Conclusion

134. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne) de la manière suivante :

1)      L’article 9, paragraphe 1, sous i), i), de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009,

doit être interprété en ce sens que :

une citation à comparaître qui est signifiée à un mandataire que la personne condamnée a désigné pour recevoir les significations ne permet pas, en tant que telle, à l’autorité compétente de l’État membre d’exécution d’appliquer l’exception prévue à cette disposition, dans la mesure où ce cas de figure relève du point ii) de l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre.

2)      L’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision‑cadre 2008/909, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299,

doit être interprété en ce sens que :

l’exception qui est prévue à cette disposition requiert le respect de deux conditions cumulatives, à savoir, d’une part, que l’intéressé ait été informé de la date et du lieu fixés pour le procès et, d’autre part, qu’il ait donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par l’intéressé, soit par l’État, pour le défendre au procès, en ayant été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès. Une telle information ne doit pas nécessairement précéder le mandat donné audit conseil.

L’envoi, en temps utile, par les autorités compétentes de l’État membre de condamnation, d’un document officiel mentionnant la date et le lieu du procès à l’adresse que la personne condamnée avait communiquée à ces autorités comme adresse à laquelle toutes les significations devaient être effectuées, à savoir l’adresse du cabinet de son conseil juridique, et la preuve apportée que ce document a effectivement été délivré à cette adresse valent information de cette personne concernant cette date et ce lieu. Ladite personne doit alors être réputée avoir eu connaissance de la date et du lieu fixés pour son procès, de sorte qu’il y a lieu de considérer que la première condition mentionnée à l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909, telle que modifiée, est remplie.

3)      L’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre 2008/909, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299,

doit être interprété en ce sens que :

il s’oppose à une réglementation nationale qui oblige l’autorité compétente de l’État membre d’exécution à refuser de reconnaître un jugement et d’exécuter une condamnation lorsqu’aucune des exceptions prévues à cette disposition n’est applicable.

Il incombe à la juridiction nationale, en prenant en considération l’ensemble de son droit interne et en faisant application des méthodes d’interprétation reconnues par celui-ci, d’interpréter sa réglementation nationale, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité de la décision-cadre 2008/909, telle que modifiée.

4)      L’article 9, paragraphe 1, sous i), de la décision‑cadre 2008/909, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299,

doit être interprété en ce sens que :

il énonce à ses points i) à iii) les conditions dans lesquelles la personne condamnée doit être réputée avoir renoncé volontairement et de manière non équivoque à être présente à son procès. Le fait que cette personne ait demandé à l’autorité compétente de l’État membre de condamnation que la peine soit exécutée dans l’État membre dont elle est ressortissante ne répond pas, en tant que tel, aux conditions énoncées par le point iii) de cette disposition. Cependant, une telle demande fait partie des circonstances que l’autorité compétente de l’État membre d’exécution peut prendre en compte, dans le cadre de l’exercice de son pouvoir d’appréciation, afin de décider si elle souhaite ou non se prévaloir du motif de non-reconnaissance et de non-exécution prévu à l’article 9, paragraphe 1, sous i), de cette décision-cadre.


1      Langue originale : le français.


i      Le nom de la présente affaire est un nom fictif. Il ne correspond au nom réel d’aucune partie à la procédure.


2      Voir considérant 33 de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales (JO 2016, L 65, p. 1). Voir, également, arrêt du 20 mai 2025, Kachev (C‑135/25 PPU, ci-après l’« arrêt Kachev », EU:C:2025:366, point 31 et jurisprudence citée).


3      Voir considérant 35 de la directive 2016/343. Voir, également, considérant 1 de la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009, portant modification des décisions-cadres 2002/584/JAI, 2005/214/JAI, 2006/783/JAI, 2008/909/JAI et 2008/947/JAI, renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès (JO 2009, L 81, p. 24).


4      JO 2008, L 327, p. 27.


5      Ci-après la « décision-cadre 2008/909 ».


6      Dans cette affaire, la personne concernée avait pris la fuite, sans élire domicile aux fins des significations, de sorte que la juridiction slovaque n’a été en mesure ni de la retrouver ni de lui signifier l’acte de citation à comparaître à l’audience.


7      BGBl. 1982 I, p. 2071.


8      Ci-après le « jugement du 5 août 2019 ».


9      Décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299 (ci-après la « décision-cadre 2002/584 »).


10      La juridiction de renvoi se réfère, à cet égard, aux arrêts du 10 août 2017, Tupikas (C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628), et du 21 décembre 2023, Generalstaatsanwaltschaft Berlin (Condamnation par défaut) (C‑397/22, EU:C:2023:1030).


11      C‑108/16 PPU, EU:C:2016:346.


12      C‑397/22, EU:C:2023:1030.


13      C‑396/22, EU:C:2023:1029.


14      Voir arrêts du 9 novembre 2023, Staatsanwaltschaft Aachen (C‑819/21, EU:C:2023:841, point 19), et du 4 septembre 2025, C.J. (Exécution d’une condamnation à la suite d’un MAE) (C‑305/22, EU:C:2025:665, point 45).


15      Voir arrêt du 9 novembre 2023, Staatsanwaltschaft Aachen (C‑819/21, EU:C:2023:841, point 20).


16      Voir, notamment, arrêt du 21 décembre 2023, Generalstaatsanwaltschaft Berlin (Condamnation par défaut) (C‑398/22, EU:C:2023:1031, point 29 et jurisprudence citée).


17      Voir, notamment, arrêt du 21 décembre 2023, Generalstaatsanwaltschaft Berlin (Condamnation par défaut) (C‑398/22, EU:C:2023:1031, point 32 et jurisprudence citée).


18      Voir arrêt du 24 mai 2016, Dworzecki (C‑108/16 PPU, EU:C:2016:346, point 32).


19      C‑108/16 PPU, EU:C:2016:346.


20      Voir arrêt du 24 mai 2016, Dworzecki (C‑108/16 PPU, EU:C:2016:346, point 54).


21      La version en langue italienne de l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584 est rédigée de manière identique.


22      Voir, notamment, arrêts du 25 mars 2010, Helmut Müller (C‑451/08, EU:C:2010:168, point 38), et du 3 juillet 2025, Smiliev (C‑263/24, EU:C:2025:525, point 67).


23      Voir, notamment, versions en langues allemande et hongroise.


24      Voir, notamment, versions en langues tchèque et polonaise. Voir, également, version en langue suédoise, qui fait référence à la « connaissance de l’audience planifiée ».


25      En langue bulgare : « protses » ; en langue espagnole : « juicio » ; en langue croate : « suđenje » ; en langue danoise : « retssag » ; en langue grecque : « díkis » ; en langue française : « procès » ; en langue lituanienne : « teisminis nagrinėjimas » ; en langue néerlandaise : « proces » ; en langue roumaine : « procesul », et en langue slovène : « sojenje ».


26      En revanche, les versions en langues slovaque et finnoise de ces dispositions font également référence au « procès » (respectivement, « konania » et « oikeudenkäynnistä »), mais ce terme est interprété dans le sens de « procédure » et non pas d’« audience ».


27      Cette catégorie regroupe notamment la République de Croatie, le Grand-Duché de Luxembourg et la République de Pologne.


28      Cette catégorie regroupe notamment le Royaume de Belgique (en prenant en compte la transposition en droit national des dispositions en cause en langues tant française que néerlandaise), la République de Bulgarie, la République tchèque, le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, l’Irlande, la République hellénique, la République de Chypre, la République de Lituanie, la Hongrie, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République slovaque, la République de Finlande (en prenant en compte la transposition en droit national des dispositions en cause en langues tant finnoise que suédoise) et le Royaume de Suède. Ladite catégorie comprend également la République italienne, mais uniquement en ce qui concerne la transposition de l’article 4 bis, paragraphe 1, sous b), de la décision-cadre 2002/584.


29      C’est également le cas de la législation chypriote, qui emploie l’expression grecque « tis programmatisménis díkis », qui est l’équivalent de l’expression anglaise « the scheduled trial ». En Bulgarie, l’emploi du mot « nasrochen » (prévu, organisé, fixé) concernant l’audience provient du mot « nasrochvam » qui signifie « définir le moment auquel une action aura lieu », ce qui sous-entend que la notion d’« audience prévue » en droit bulgare implique également la détermination d’une date spécifique. Au Danemark, les termes « den berammede retssag » sont utilisés, ce qui se traduit directement par l’« audience programmée ». Le fait qu’une audience ait été programmée signifie qu’une date et une heure ont été fixées pour l’audience dans l’affaire. En Hongrie, les termes utilisés sont « kitűzött tárgyalás », qui signifient littéralement « audience fixée », ce qui implique qu’une date a déjà été fixée pour l’audience. En République tchèque, l’emploi de l’adjectif « nařízeném », signifiant littéralement « fixée » ou « ordonnée », en lien avec le terme « jednání » (audience) laisse entendre qu’une date d’audience a déjà été fixée.


30      Cette catégorie comprend notamment le Royaume d’Espagne, la République française, la Roumanie, la République de Slovénie ainsi que la République italienne, mais uniquement, pour ce dernier État membre, en ce qui concerne la transposition de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909. Plus précisément, le Royaume d’Espagne utilise les termes « connaissance de la date et du lieu fixés pour l’audience », la République française, « connaissance de la date et du lieu du procès » (« procès » étant entendu au sens d’« audience »), la République italienne [pour la transposition de l’article 9, paragraphe 1, sous i), ii), de la décision-cadre 2008/909 uniquement], « connaissance de la date fixée pour l’audience », la Roumanie, « connaissance du jour, du mois, de l’année et du lieu de comparution » et la République de Slovénie, « connaissance du jour et du lieu de l’audience prévue ».


31      Voir, notamment, arrêts du 27 octobre 1977, Bouchereau (30/77, EU:C:1977:172, point 14), et du 13 février 2025, Verbraucherzentrale Berlin (Notion de durée d’engagement initiale) (C‑612/23, EU:C:2025:82, point 31 et jurisprudence citée).


32      Voir, notamment, par analogie, arrêts du 17 décembre 2020, Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (C‑416/20 PPU, ci-après l’« arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg », EU:C:2020:1042, point 39 et jurisprudence citée), ainsi que du 23 mars 2023, Minister for Justice and Equality (Levée du sursis) (C‑514/21 et C‑515/21, EU:C:2023:235, point 50 et jurisprudence citée).


33      Voir, notamment, par analogie, arrêt du 23 mars 2023, Minister for Justice and Equality (Levée du sursis) (C‑514/21 et C‑515/21, EU:C:2023:235, point 50).


34      Voir, notamment, arrêt du 23 mars 2023, Minister for Justice and Equality (Levée du sursis) (C‑514/21 et C‑515/21, EU:C:2023:235, point 60 et jurisprudence citée).


35      Voir, notamment, arrêt du 15 septembre 2022, HN (Procès d’un accusé éloigné du territoire) (C‑420/20, EU:C:2022:679, point 53 et jurisprudence citée).


36      Voir, notamment, arrêt Kachev (point 31 et jurisprudence citée).


37      Voir, notamment, arrêt Kachev (point 32 et jurisprudence citée). Ci-après le « droit à un nouveau procès ».


38      Voir arrêt du 19 mai 2022, Spetsializirana prokuratura (Procès d’un accusé en fuite) (C‑569/20, EU:C:2022:401, point 29).


39      Voir arrêts du 19 mai 2022, Spetsializirana prokuratura (Procès d’un accusé en fuite) (C‑569/20, EU:C:2022:401, point 31) ; du 16 janvier 2025, VB II (Information sur le droit à un nouveau procès) (C‑400/23, EU:C:2025:14, point 59) ; du 16 janvier 2025, Stangalov (C‑644/23, EU:C:2025:16, point 36), et Kachev (point 33).


40      Conformément à cette disposition, une décision prise conformément au paragraphe 2 peut être exécutée à l’encontre du suspect ou de la personne poursuivie concerné.


41      Voir arrêt du 19 mai 2022, Spetsializirana prokuratura (Procès d’un accusé en fuite) (C‑569/20, EU:C:2022:401, point 30).


42      Voir arrêt Kachev (point 34). La Cour a souligné que l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2016/343 accorde une importance particulière à l’information de la personne concernée, en tant qu’il subordonne expressément toute possibilité d’organiser un procès par défaut à la condition que cette personne ait été informée de la tenue du procès [voir arrêt du 15 septembre 2022, HN (Procès d’un accusé éloigné du territoire) (C‑420/20, EU:C:2022:679, point 51)].


43      Voir arrêt du 15 septembre 2022, HN (Procès d’un accusé éloigné du territoire) (C‑420/20, EU:C:2022:679, point 52).


44      Voir arrêt du 19 mai 2022, Spetsializirana prokuratura (Procès d’un accusé en fuite) (C‑569/20, EU:C:2022:401, point 41).


45      Voir arrêt Kachev (point 38).


46      Ainsi, selon la Cour, lorsque la personne concernée n’a pas été informée, en temps utile, de la tenue de son procès ou lorsque, tout en ayant été informée de la tenue de celui-ci ou tout en étant réputée avoir reçu une telle information, cette personne n’a pas été informée des conséquences d’un défaut de comparution et n’a pas non plus été dûment représentée par un avocat mandaté à ce procès, ladite personne bénéficie, en principe, à compter de sa prise de connaissance de la décision rendue par défaut, du droit à un nouveau procès [voir, notamment, arrêt Kachev (point 42 et jurisprudence citée)].


47      Voir, notamment, arrêt du 23 mars 2023, Minister for Justice and Equality (Levée du sursis) (C‑514/21 et C‑515/21, EU:C:2023:235, point 73 et jurisprudence citée).


48      Voir, par analogie, arrêt du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, point 52).


49      Voir arrêt du 19 mai 2022, Spetsializirana prokuratura (Procès d’un accusé en fuite) (C‑569/20, EU:C:2022:401), dans lequel la Cour a jugé que la faculté offerte par l’article 8, paragraphes 2 et 3, de la directive 2016/343 aux États membres de mener, lorsque les conditions prévues au paragraphe 2 de cet article 8 sont réunies, un procès par défaut et d’exécuter la décision sans prévoir le droit à un nouveau procès repose sur le postulat que, dans la situation visée à ce paragraphe 2, l’intéressé, dûment informé, a renoncé volontairement et de manière non équivoque à exercer le droit d’assister à son procès (point 34 de cet arrêt).


50      Dans le cadre du mandat d’arrêt européen, la Cour a ainsi relevé que « la décision-cadre 2002/584 s’insère dans un système global de garanties relatives à la protection juridictionnelle effective prévues par d’autres réglementations de l’Union » [arrêt du 28 janvier 2021, Spetsializirana prokuratura (Déclaration des droits) (C‑649/19, EU:C:2021:75, point 76)].


51      Voir ordonnance du 20 septembre 2024, Anacco (C‑504/24 PPU, ci-après l’« ordonnance Anacco », EU:C:2024:779, point 51).


52      Voir arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (point 45).


53      Voir arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (point 46).


54      Voir arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (point 47). Voir, également, ordonnance Anacco (point 55).


55      Voir arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (point 47).


56      Voir arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (point 56). Je souligne, en outre, que, dans son arrêt du 23 mars 2023, Minister for Justice and Equality (Levée du sursis) (C‑514/21 et C‑515/21, EU:C:2023:235), la Cour a jugé que l’engagement de l’État membre d’émission de reconnaître à la personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt européen le droit à un nouveau procès, lorsque celle-ci a été condamnée par défaut, en violation de ses droits de la défense, ne figure pas parmi les conditions énoncées à l’article 5 de la décision-cadre 2002/584. Il s’ensuit que le droit de l’Union s’oppose à ce que l’autorité judiciaire d’exécution puisse subordonner la remise de la personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt européen à une telle condition (point 80 de cet arrêt). La Cour a cependant précisé que cette autorité peut être amenée à solliciter, au moyen, le cas échéant, d’une demande d’informations complémentaires, au sens de l’article 15, paragraphe 2, de cette décision-cadre, l’assurance de l’État membre d’émission que la personne faisant l’objet du mandat d’arrêt européen sera avertie du fait que, en vertu du droit de l’État membre d’émission, elle obtiendra le droit à un nouveau procès auquel elle pourra participer et qui permettra de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve et d’infirmer la décision initiale, étant entendu que, si une telle assurance était fournie par l’État membre d’émission, l’autorité judiciaire d’exécution serait contrainte de remettre la personne concernée, conformément à l’article 4 bis, paragraphe 1, sous d), de ladite décision-cadre (point 82 dudit arrêt).


57      Voir arrêt du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, point 62), ainsi que ordonnance Anacco (point 58).


58      Voir considérant 4 de la décision-cadre 2009/299. À la suite des modifications introduites par cette décision-cadre, la décision-cadre 2002/584 procède désormais à une harmonisation des conditions d’exécution d’un mandat d’arrêt européen en cas de condamnation par défaut, qui reflète le consensus auquel sont parvenus les États membres dans leur ensemble au sujet de la portée qu’il convient de donner, au titre du droit de l’Union, aux droits procéduraux dont bénéficient les personnes condamnées par défaut qui font l’objet d’un mandat d’arrêt européen [voir, notamment, arrêt du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, point 62), ainsi que ordonnance Anacco (point 58)].


59      À cet égard, la Cour évoque l’impossibilité d’invoquer la directive 2016/343 pour faire obstacle à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen, en dehors des motifs de non-exécution prévus par la décision-cadre 2002/584 [voir arrêt Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (point 55)].


60      Voir arrêt du 16 janvier 2025, VB II (Information sur le droit à un nouveau procès) (C‑400/23, EU:C:2025:14, point 48). Voir, également, ordonnance Anacco (point 52).


61      Voir arrêt Kachev (point 34).


62      Voir, notamment, arrêts du 29 avril 2021, X (Mandat d’arrêt européen – Ne bis in idem) (C‑665/20 PPU, EU:C:2021:339, point 39) ; du 14 juillet 2022, Procureur général près la cour d’appel d’Angers (C‑168/21, EU:C:2022:558, point 40), et du 6 juin 2023, O. G. (Mandat d’arrêt européen à l’encontre d’un ressortissant d’un État tiers) (C‑700/21, EU:C:2023:444, point 33). Voir, également, ordonnance Anacco (points 41 et 42 ainsi que jurisprudence citée).


63      Voir arrêt du 11 janvier 2017, Grundza (C‑289/15, EU:C:2017:4, point 46).


64      Voir arrêt du 11 janvier 2017, Grundza (C‑289/15, EU:C:2017:4, points 50 et 51).


65      Voir, notamment, arrêt Kachev (point 35 et jurisprudence citée).


66      Voir, par analogie, concernant l’hypothèse de la fuite de la personne concernée, arrêt Kachev (point 37 et jurisprudence citée).


67      Voir, notamment, arrêt Kachev (point 41 et jurisprudence citée).


68      Voir arrêt Kachev (point 59).


69      Voir arrêt Kachev (point 61).


70      Voir, par analogie, arrêt du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, point 52).


71      Voir arrêt du 21 décembre 2023, Generalstaatsanwaltschaft Berlin (Condamnation par défaut) (C‑396/22, EU:C:2023:1029, points 41 et 42 ainsi que jurisprudence citée).