Language of document : ECLI:EU:T:2025:946

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

8 octobre 2025 (*)

« Dessin ou modèle de l’Union européenne – Procédure de nullité – Dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré représentant des portes – Tardiveté du dépôt du mémoire exposant les motifs du recours devant la chambre de recours – Calcul des délais – Irrecevabilité du recours – Article 57 du règlement (CE) no 6/2002 et article 51, paragraphe 2, du règlement (CE) no 2245/2002 – Restitutio in integrum – Absence de paiement de la taxe – Article 67, paragraphe 3, du règlement no 6/2002 »

Dans l’affaire T‑586/24,

Doors Bulgaria EOOD, établie à Sofia (Bulgarie), représentée par Me M. Todorov, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. R. Raponi, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Top Ten EOOD, établie à Plovdiv (Bulgarie), représentée par Me S. Sirakov, avocat,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé, lors des délibérations, de Mme M. J. Costeira, présidente, MM. U. Öberg et P. Zilgalvis (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Doors Bulgaria EOOD, demande l’annulation et la réformation de la décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 16 septembre 2024 (affaire R 470/2024‑3) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 23 juin 2023, l’intervenante, Top Ten EOOD, a présenté à l’EUIPO une demande de nullité du dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré, à la suite d’une demande déposée le 10 mai 2016, sous le numéro 3119601-0010 et destiné à être appliqué aux portes relevant de la classe 25.02 au sens de l’arrangement de Locarno du 8 octobre 1968 instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, tel que modifié.

3        Les motifs invoqués à l’appui de la demande en nullité étaient ceux visés à l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles de l’Union européenne (JO 2002, L 3, p. 1), dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2024/2822 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2024 (JO L, 2024/2822), lu conjointement avec l’article 4, paragraphe 1, ainsi qu’avec l’article 5, paragraphe 1, sous b), et l’article 6, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

4        Le 4 janvier 2024, la division d’annulation a déclaré la nullité du dessin ou modèle contesté en raison de son absence de nouveauté.

5        Le 29 février 2024, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation, en indiquant que le mémoire exposant les motifs du recours serait présenté ultérieurement. Le 4 mars 2024, le greffe des chambres de recours a accusé réception de l’acte de recours et a rappelé à la requérante que, aux termes de l’article 57 du règlement no 6/2002, elle disposait d’un délai non prorogeable de quatre mois à compter de la date de notification de la décision de la division d’annulation pour déposer son mémoire exposant les motifs du recours.

6        Le 27 mai 2024, l’EUIPO a reçu le mémoire exposant les motifs du recours, dans lequel la requérante a demandé l’annulation de la décision de la division d’annulation et le rejet de la demande de nullité du dessin ou modèle contesté.

7        Le 30 mai 2024, le greffe des chambres de recours a adressé une notification d’irrégularité à la requérante, indiquant que le mémoire exposant les motifs du recours n’avait pas été présenté en temps utile et qu’il aurait dû être déposé dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification de la décision de la division d’annulation, soit le 10 mai 2024 au plus tard. La requérante a été invitée à présenter des observations sur l’éventuelle irrecevabilité du recours.

8        Le 25 juin 2024, la requérante a présenté ses observations en faisant valoir qu’elle était titulaire de nombreux dessins ou modèles industriels et que son avocat, qui assurait généralement sa correspondance en ce qui concernait la plupart de ses dessins ou modèles, n’était pas mentionné en tant que représentant en ce qui concernait le dessin ou modèle contesté, de sorte qu’elle n’avait jamais reçu la décision de la division d’annulation. Elle n’aurait eu connaissance de la procédure de nullité que le 29 février 2024, lorsqu’elle avait introduit le recours contre ladite décision, de sorte que le délai de quatre mois aurait dû commencer à courir à compter de cette date.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté  le recours comme irrecevable, en vertu de l’article 35, paragraphe 1, du règlement (CE) no 2245/2002 de la Commission, du 21 octobre 2002, portant modalités d’application du règlement no 6/2002 (JO 2002, L 341, p. 28), au motif que le mémoire exposant les motifs du recours n’avait pas été présenté dans le délai réglementaire de quatre mois à compter de la notification de la décision de la division d’annulation, prévu à l’article 57, dernière phrase, du règlement no 6/2002.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en tant qu’elle a déclaré irrecevable le recours contre la décision de la division d’annulation et constater que ce recours était recevable et fondé et, partant, annuler la décision de la division d’annulation ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée en tant qu’elle a déclaré irrecevable le recours contre la décision de la division d’annulation et ordonner à l’EUIPO de statuer sur le bien-fondé du recours contre ladite décision.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas d’une convocation à une audience.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de  rejeter le recours et de confirmer la décision attaquée.

 En droit

 Sur la compétence du Tribunal

13      L’EUIPO soutient que les allégations de la requérante formulées dans le second chef de conclusions tendant, en substance, à ce que le Tribunal ordonne à l’EUIPO de statuer sur le bien-fondé du recours contre la décision de la division d’annulation, sont irrecevables, étant donné que, en vertu de la jurisprudence, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’EUIPO, auquel il incombe de tirer des conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union.

14      S’agissant de la seconde partie du second chef de conclusions de la requérante, par laquelle elle demande au Tribunal d’ordonner à l’EUIPO de statuer sur le bien-fondé de la décision de la division d’annulation, il suffit de rappeler que, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 263 TFUE, le Tribunal n’a pas compétence pour prononcer des injonctions à l’encontre des institutions, des organes et des organismes de l’Union (voir ordonnance du 26 octobre 1995, Pevasa et Inpesca/Commission, C‑199/94 P et C‑200/94 P, EU:C:1995:360, point 24 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2018, Suède/Commission, T‑260/16, EU:T:2018:597, point 104 et jurisprudence citée). Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter la seconde partie du second chef de conclusions pour cause d’incompétence.

 Sur le fond

15      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 57 du règlement no 6/2002, le deuxième, de la violation de l’article 67 du même règlement et, le troisième, de l’appréciation erronée du bien-fondé du recours contre la décision de la division d’annulation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 57 du règlement no 6/2002

16      La requérante soutient que la décision de la chambre de recours de rejeter comme irrecevable le recours dirigé contre la décision de la division d’annulation était illégale en raison des irrégularités procédurales commises qui ont restreint ses droits fondamentaux, y compris son droit à un procès équitable et ses droits de la défense.

17      La requérante fait valoir notamment que le règlement no 6/2002 ne contient pas de règles de procédure, notamment en ce qui concerne les modalités de signification des actes et des notifications aux parties à la procédure. Pour considérer que la décision de la division d’annulation datant du 4 janvier 2024 devait être considérée comme ayant été notifiée à la requérante le 10 janvier 2024, la chambre de recours se serait appuyée sur une instruction de son directeur exécutif. Or, il s’agirait d’un acte interne à l’EUIPO ne pouvant pas être opposable aux parties et encore moins restreindre leurs droits de la défense.

18      La requérante fait valoir que, dans ses observations du 25 juin 2024, elle a exposé en détail ses explications et motifs justifiant le dépassement du délai prévu à l’article 57 du règlement no 6/2002, dont il ressort qu’elle a eu connaissance de la demande en nullité introduite par l’intervenante pour la première fois le 29 février 2024. Elle aurait également indiqué que l’absence d’une notification complémentaire à l’adresse électronique officielle pour la correspondance avec la société concernée devait être considérée comme un défaut de notification de la décision de la division d’annulation. Ainsi, selon la requérante, le délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours courait jusqu’au 29 juin 2024, de sorte que le mémoire déposé le 27 mai 2024 avait été déposé dans les délais.

19      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

20      En l’espèce, la chambre de recours a relevé, au point 11 de la décision attaquée, que, dans la mesure où la décision de la division d’annulation était réputée avoir été notifiée le 9 janvier 2024, le délai pour déposer le mémoire exposant les motifs de recours avait expiré le 10 mai 2024. Elle en a conclu, au point 12 de la décision attaquée, que le mémoire exposant les motifs du recours, reçu le 27 mai 2024, n’avait pas été déposé dans le délai imparti.

21      La chambre de recours a notamment rejeté l’argument de la requérante selon lequel son représentant ne figurait pas sur la liste pour le dessin ou modèle contesté et qu’elle n’avait eu connaissance de la décision de la division d’annulation que le 29 février 2024, le jour où elle avait déposé l’acte de recours. À cet égard, elle a notamment indiqué, au point 13 de la décision attaquée, que la décision de la division d’annulation incluait un avis concernant la possibilité d’engager une procédure de recours au titre des articles 56 et 57 du règlement no 6/2002 qui mentionnait clairement et sans ambiguïté le délai de quatre mois pour présenter un mémoire exposant les motifs du recours. De surcroît, dans l’accusé de réception de l’acte de recours du 4 mars 2024, le greffe des chambres de recours aurait rappelé expressément et sans équivoque que le mémoire exposant les motifs du recours devait être déposé dans un délai non prorogeable de quatre mois à compter de la date de notification de la décision attaquée.

22      En vertu de l’article 35, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002, si le recours ne remplit ni les conditions prévues aux articles 55, 56 et 57 du règlement no 6/2002 ni celles énoncées à l’article 34, paragraphe 1, sous c), et paragraphe 2, du règlement no 2245/2002, la chambre de recours le rejette comme irrecevable, à moins qu’il n’ait été remédié, avant l’expiration du délai correspondant, fixé à l’article 57 du règlement no 6/2002, à toutes les irrégularités constatées.

23      Selon l’article 57, du règlement no 6/2002, le recours doit être formé par écrit auprès de l’EUIPO dans un délai de deux mois à compter du jour de notification de la décision en cause. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours. Un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification de ladite décision.

24      À cet égard, l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 2245/2002 dispose que les modalités de notification par d’autres moyens techniques de communication sont arrêtées par le directeur exécutif de l’EUIPO.

25      La décision EX-23-13 du 15 décembre 2023, ayant été adoptée par le directeur exécutif de l’EUIPO et régissant la communication par voie électronique (ci-après la « décision EX-23-13 »), est, dès lors, applicable dans la présente affaire.

26      Aux termes de l’article 4, paragraphe 5, de la décision EX-23-13, une notification est réputée avoir eu lieu le cinquième jour civil suivant la date à laquelle l’EUIPO a placé le document dans la boîte de réception de l’utilisateur.

27      Il y a également lieu de rappeler que, selon l’article 58, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002, si un délai expire soit un jour où il n’est pas possible de déposer des documents auprès de l’EUIPO, soit un jour où le courrier ordinaire n’est pas distribué dans la localité du siège de l’EUIPO, pour des raisons autres que celles indiquées à l’article 58, paragraphe 2, dudit règlement, le délai est prorogé jusqu’au premier jour où les documents peuvent être déposés et où le courrier ordinaire est distribué.

28      Par ailleurs, en ce qui concerne la notification des décisions de l’EUIPO, la jurisprudence distingue entre, d’une part, la communication d’un acte à son destinataire, requise aux fins d’une notification régulière, et, d’autre part, la connaissance effective dudit acte, non nécessaire pour considérer que la notification a été régulière. Selon la jurisprudence, l’existence d’une notification valable au destinataire n’est nullement subordonnée à la prise de connaissance effective par la personne qui, selon les règles internes de l’entité destinataire, est compétente en la matière, une décision étant notifiée dans des conditions régulières dès lors qu’elle est communiquée à son destinataire et que celui-ci est mis en mesure d’en prendre connaissance. Seul est ainsi pris en compte, aux fins d’apprécier la régularité de la notification, son aspect externe, c’est-à-dire la transmission régulière à son destinataire, et non son aspect interne, qui a trait au fonctionnement interne de l’entité destinataire [voir arrêt du 13 juin 2019, Pet King Brands/EUIPO – Virbac (SUIMOX), T‑366/18, non publié, EU:T:2019:410, point 19 et jurisprudence citée].

29      En l’espèce, la décision de la division d’annulation avait été placée dans la boîte de réception de la requérante le 4 janvier 2024, de sorte que, conformément à l’article 4, paragraphe 5, de la décision EX-23-13, la notification est réputée avoir eu lieu le 9 janvier 2024, ainsi qu’il a été constaté au point 11 de la décision attaquée. 

30      Il s’ensuit que, la chambre de recours a considéré à juste titre que, en application de l’article 57, dernière phrase, du règlement no 6/2002, le délai pour déposer le mémoire exposant les motifs du recours avait expiré le 10 mai 2024, de sorte que le mémoire déposé par la requérante le 27 mai 2024 n’avait pas été déposé dans le délai imparti. Dans ces conditions, la chambre de recours a pu, à bon droit, considérer que le recours était devenu irrecevable, conformément à l’article 35, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002.

31      À cet égard, il convient d’ajouter, à l’instar de l’EUIPO, que l’erreur matérielle de la chambre de recours, ayant cité l’article 4, paragraphe 5, de la décision EX-20-9 du directeur exécutif de l’EUIPO, du 3 novembre 2020, relative à la communication par voie électronique, au lieu de l’article 4, paragraphe 5, de la décision EX-23-13, est sans conséquence en l’espèce, étant donné que les deux dispositions sont formulées de manière identique.

32      De même, il doit être considéré, à l’instar de la chambre de recours, que les circonstances invoquées par la requérante selon lesquelles elle aurait eu la connaissance de la décision de la division d’annulation pour la première fois le 29 février 2024 et que, dès lors, le délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours courait jusqu’au 29 juin 2024 ne sont pas de nature à remettre en cause la conclusion selon laquelle ledit mémoire n’avait pas été déposé dans le délai imparti. En effet, conformément à la jurisprudence citée au point 28 ci-dessus, aux fins d’apprécier la régularité de la notification d’un acte, seul est pris en compte son aspect externe, c’est-à-dire la transmission régulière à son destinataire, et non son aspect interne, qui a trait au fonctionnement interne de l’entité destinataire (voir arrêt du 13 juin 2019, SUIMOX, T‑366/18, non publié, EU:T:2019:410, point 19 et jurisprudence citée).

33      En outre, s’il est vrai que, comme le soutient la requérante, le règlement no 6/2002 ne contient pas de règles de procédure en ce qui concerne les modalités de signification des actes et des notifications aux parties à la procédure, l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 2245/2002 contient des précisions relatives à l’adoption de telles règles (voir point 24 ci-dessus). À cet égard, il importe de rappeler que le règlement no 2245/2002 porte sur des modalités d’application du règlement no 6/2002.

34      Pour autant que l’argumentation de la requérante devrait être considérée comme comportant une exception d’illégalité, il convient de rappeler que l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 2245/2002 prévoit que les modalités de la notification par d’autres moyens techniques de communication sont arrêtées par le directeur exécutif de l’EUIPO. Or, ainsi qu’il a été notamment constaté au point 26 ci-dessus, le directeur exécutif a fixé de telles modalités. En l’absence d’autres arguments, l’exception d’illégalité soulevée par la requérante ne peut qu’être rejetée.

35      Enfin, dans la mesure où la chambre de recours a considéré à juste titre que le mémoire exposant les motifs du recours avait été présenté hors délai et que, par conséquent, le recours porté contre la décision de la division d’annulation était irrecevable, ne sauraient non plus prospérer les allégations de la requérante, par ailleurs aucunement étayées, selon lesquelles ladite chambre aurait violé ses droits fondamentaux, et, en particulier, son droit à un procès équitable et ses droits de la défense. En tout état de cause, il y a lieu de relever que le greffe des chambres de recours avait invité la requérante à présenter des observations sur l’éventuelle irrecevabilité du recours (voir point 7 ci-dessus) et que cette dernière a soumis de telles observations (voir point 8 ci-dessus).

36      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 67 du règlement no 6/2002

37      La requérante fait valoir que la chambre de recours a admis, au point 14 de la décision attaquée, que les actes accomplis par elle devaient être considérés comme donnant lieu à une restitutio in integrum en vertu de l’article 67 du règlement no 6/2002. Toutefois, au lieu de donner des instructions pour le paiement de la taxe due à cet effet, ladite chambre aurait rejeté le recours comme irrecevable. Selon la requérante, il s’agirait d’un « motif autonome d’illégalité » de la décision attaquée.

38      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

39      En l’espèce, la chambre de recours a indiqué, au point 14 de la décision attaquée que, lorsque le titulaire du dessin ou modèle en cause, bien qu’ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances, n’a pas été en mesure de respecter un délai requis, ce qui a eu pour conséquence la perte de son droit, la voie de recours appropriée est une requête en restitutio in integrum. Toutefois, elle a ajouté que même s’il était admis que les arguments de la requérante dans ses communications auraient pu constituer une telle requête, cette dernière devait être déclarée comme réputée non présentée, en l’absence de paiement de la taxe correspondante, conformément à l’article 67, paragraphe 3, seconde phrase, du règlement no 6/2002.

40      Aux termes de l’article 67, paragraphe 3, seconde phrase, du règlement no 6/2002, la requête en restitutio in integrum n’est réputée présentée qu’après paiement de la taxe de restitutio in integrum.

41      Or, en l’espèce, il suffit de relever que la requérante ne s’est pas acquittée d’une telle taxe. Dans ces conditions, la chambre de recours a pu, à bon droit, considérer qu’aucune requête en restitutio in integrum n’avait été présentée en l’espèce.

42      Quant à l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours aurait dû lui adresser des instructions pour le paiement de la taxe de restitutio in integrum, elle ne saurait non plus prospérer. En effet, il ressort de la jurisprudence qu’aucune disposition ne fait obligation à l’EUIPO d’informer une partie des procédures qui sont à sa disposition au titre de l’article 67 du règlement no 6/2002. Il ne lui incombe pas non plus de conseiller à ladite partie de suivre une voie procédurale quelconque [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 6 octobre 2021, Dermavita Company/EUIPO – Allergan Holdings France (JUVÉDERM VYBRANCE), T‑635/20, non publié, EU:T:2021:656, point 36 et jurisprudence citée].

43      Il s’ensuit que le deuxième moyen ne peut qu’être rejeté.

 Sur le troisième moyen, relatif au bien-fondé du recours dirigé contre la décision de la division d’annulation

44      La requérante fait valoir que la division d’annulation a annulé le dessin ou modèle contesté au motif qu’un dessin ou modèle similaire, divulgué via un site Internet, existait avant la date de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle contesté. La preuve de la divulgation du dessin ou modèle antérieur aurait été apportée par le biais d’une capture d’écran de la Wayback machine. Or, selon la requérante, il ne s’agit pas d’une preuve de divulgation authentique et celle-ci est impropre à certifier la divulgation dudit dessin ou modèle à la date indiquée sur la capture d’écran, à savoir le 7 mai 2016. Dans la mesure où la seule preuve de divulgation de ce dessin ou modèle serait irrecevable, il conviendrait d’annuler la décision de la division d’annulation et de rejeter la demande de nullité du dessin ou modèle contesté.

45      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

46      Il convient de constater, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, que, par la décision attaquée, la chambre de recours s’est limitée à apprécier la recevabilité du recours formé devant elle par la requérante et n’a pas traité les questions de fond, et, en particulier, celle relative à la divulgation du dessin ou modèle antérieur.

47      Or, selon la jurisprudence, des moyens qui ne visent pas à contester les motifs pour lesquels la chambre de recours a rejeté le recours formé devant elle doivent être considérés comme inopérants [voir arrêt du 27 avril 2022, Group Nivelles/EUIPO – Easy Sanitary Solutions (Caniveau d’évacuation de douche), T‑327/20, EU:T:2022:263, point 101 et jurisprudence citée].

48      Partant, le présent moyen doit être écarté comme inopérant.

49      En conséquence, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

51      En l’espèce, même si la requérante a succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas de convocation des parties à une audience et l’intervenante n’a pas conclu à la condamnation de la requérante aux dépens. Une telle audience n’ayant pas été tenue en l’espèce, il convient donc de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Doors Bulgaria EOOD, l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et Top Ten EOOD supporteront chacun leurs propres dépens.

Costeira

Öberg

Zilgalvis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 octobre 2025.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.