Language of document : ECLI:EU:C:2002:506

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

19 septembre 2002 (1)

«Pourvoi - Marque communautaire - Règlement (CE) n° 40/94 - Vocable ‘Companyline’ - Motif absolu de refus - Caractère distinctif»

Dans l'affaire C-104/00 P,

DKV Deutsche Krankenversicherung AG, représentée par Me S. von Petersdorff-Campen, Rechtsanwalt, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (quatrième chambre) du 12 janvier 2000, DKV/OHMI (COMPANYLINE) (T-19/99, Rec. p. II-1), et tendant à l'annulation de cet arrêt,

l'autre partie à la procédure étant:

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles), représenté par MM. A. von Mühlendahl et D. Schennen, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de MM. P. Jann (rapporteur), président de chambre, S. von Bahr, M. Wathelet, C. W. A. Timmermans et A. Rosas, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,


greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 21 mars 2002,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 14 mai 2002,

rend le présent

Arrêt

1.
    Par requête déposée au greffe de la Cour le 20 mars 2000, DKV Deutsche Krankenversicherung AG (ci-après «DKV») a, en vertu de l'article 49 du statut CE de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 12 janvier 2000, DKV/OHMI (COMPANYLINE) (T-19/99, Rec. p. II-1, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision de la première chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (ci-après l'«OHMI»), du 18 novembre 1998 (affaire R 72/1998-1), rejetant le recours formé par DKV contre le refus d'enregistrement comme marque communautaire du vocable «Companyline» pour les services relatifs aux assurances et aux affaires financières.

Le cadre juridique

2.
    Aux termes de l'article 7 du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1):

«1.    Sont refusés à l'enregistrement:

[...]

b)    les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif;

c)    les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l'époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d'autres caractéristiques de ceux-ci;

[...]

2.    Le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n'existent que dans une partie de la Communauté.

[...]»

3.
    Sous le titre «Limitation des effets de la marque communautaire», l'article 12 du règlement n° 40/94 dispose:

«Le droit conféré par la marque communautaire ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage, dans la vie des affaires:

[...]

b)    d'indications relatives à l'espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l'époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d'autres caractéristiques de ceux-ci;

[...]

pour autant que cet usage soit fait conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale.»

    

Les faits à l'origine du litige

4.
    DKV a demandé à l'OHMI, par lettre du 23 juillet 1996, l'enregistrement comme marque communautaire du vocable «Companyline» pour les services relatifs aux assurances et aux affaires financières (classe 36).

5.
    L'examinateur de l'OHMI a rejeté cette demande par décision du 17 avril 1998 pour absence de caractère distinctif, au sens de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, dudit vocable. Par décision du 18 novembre 1998 (ci-après la «décision attaquée»), la première chambre de recours de l'OHMI a rejeté le recours que DKV avait formé contre la décision du 17 avril 1998 pour les mêmes motifs que ceux retenus par l'examinateur.

L'arrêt attaqué

6.
    Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 21 janvier 1999, la requérante a introduit un recours tendant à l'annulation de la décision attaquée.

7.
    En premier lieu, au point 26 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que le signe dont l'enregistrement a été refusé est composé exclusivement des termes «company» et «line», tous deux usuels dans les pays anglophones. Le terme «company» permettrait de comprendre que l'on est en présence d'un produit ou d'un service qui est destiné aux sociétés ou aux firmes. Le mot «line» aurait plusieurs significations. Dans le domaine des services d'assurance et de finance, il signifierait, notamment, une branche des assurances, une gamme ou un groupe de produits. Ainsi, ce seraient deux mots génériques qui ne feraient que désigner une gamme de produits ou de services destinés aux entreprises. Le fait de les accoler, sans aucune modification graphique ou sémantique, ne présenterait aucune caractéristique additionnelle susceptible de rendre le signe dans son ensemble apte à distinguer les services de la requérante de ceux d'autres entreprises. Le signe «Companyline» serait donc dépourvu de caractère distinctif.

8.
    En deuxième lieu, le Tribunal a examiné l'argumentation de la requérante selon laquelle l'OHMI aurait méconnu l'obligation d'harmonisation du droit communautaire des marques, en appréciant le caractère distinctif du signe en cause seulement par rapport à la zone linguistique anglophone. À cet égard, au point 28 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que, pour l'application des motifs de refus d'enregistrement prévus à l'article 7 du règlement n° 40/94, le paragraphe 2 du même article prévoit que leur existence dans une seule partie de la Communauté suffit à justifier un tel refus.

9.
    En troisième lieu, aux points 30 et 31 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a considéré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur le moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, dans la mesure où il suffit que l'un des motifs absolus de refus énumérés à l'article 7, paragraphe 1, s'applique - en l'espèce le paragraphe 1, sous b) - pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire.

10.
    En quatrième lieu, au point 33 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le moyen tiré d'un détournement de pouvoir de l'OHMI, en relevant qu'il n'existe aucun indice objectif et précis faisant apparaître que la décision attaquée aurait été prise dans le but exclusif, ou, à tout le moins, déterminant, d'atteindre des fins autres que celles sur lesquelles cette décision est fondée.

Le pourvoi

11.
    Dans son pourvoi, DKV conclut implicitement à l'annulation de l'arrêt attaqué ainsi qu'à l'annulation de la décision attaquée et de celle émanant de l'examinateur; elle sollicite également la condamnation de l'OHMI aux dépens.

12.
    L'OHMI conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de DKV aux dépens.

Sur le premier moyen

13.
    Par son premier moyen, DKV reproche au Tribunal d'avoir violé l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Par la première branche de ce moyen, elle soutient que le Tribunal n'aurait pas défini les critères selon lesquels le motif de refus d'enregistrement des marques «dépourvues de caractère distinctif», visé à cette disposition, doit être déterminé et délimité par rapport à l'existence d'un «caractère distinctif minimal».

14.
    Selon DKV, le Tribunal s'est livré à une appréciation extrêmement stricte des conditions d'enregistrement d'une marque. En réalité, le motif de refus d'enregistrement des marques «dépourvues de caractère distinctif» ne devrait se concevoir qu'avec des critères minimaux, ce qui découlerait tant de l'économie de l'article 7, paragraphe 1, que de la mission d'harmonisation qui incombe à l'OHMI.

15.
    Par la seconde branche du premier moyen, DKV fait valoir que le Tribunal aurait méconnu le fait que, pour apprécier le caractère distinctif d'un signe composé, seule serait déterminante l'impression d'ensemble que celui-ci produit. Le caractère distinctif d'un signe ne saurait donc lui être dénié au motif que des éléments particuliers de celui-ci, considérés en eux-mêmes, ne présentent pas un tel caractère.

16.
    Le signe «Companyline» aurait en effet un caractère distinctif suffisant. La combinaison du suffixe «line» avec l'indication matérielle «company» procéderait de l'abréviation d'indications descriptives directes et nettes, dont le contenu serait occulté par l'abréviation. Dans les États membres et même dans la pratique de l'OHMI, de tels signes seraient normalement enregistrés comme marques ayant un caractère distinctif. Le Tribunal n'aurait cependant pas vu la multitude de significations possibles suggérées par association.

17.
    Quant à ce moyen, l'OHMI fait valoir, à titre principal, que les arguments invoqués par DKV constituent, pour l'essentiel, des constatations de fait qui ne sont pas soumises à l'appréciation de la Cour dans le cadre d'une procédure de pourvoi. Le moyen devrait donc être rejeté comme irrecevable.

18.
    À titre subsidiaire, l'OHMI souligne, en ce qui concerne la première branche du premier moyen, que le Tribunal - comme d'ailleurs l'OHMI lui-même dans les deux instances devant lui - est parvenu à la conclusion selon laquelle le signe en cause est entièrement dépourvu de caractère distinctif. Dans cette logique, la question de savoir quel degré de caractère distinctif se révèle nécessaire pour dépasser le seuil du «minimum de caractère distinctif» ne se poserait plus.

19.
    Quant à la seconde branche du moyen, l'OHMI fait valoir que le Tribunal n'a violé aucune règle de droit. En l'espèce, il s'agirait d'une marque verbale composée de deux termes descriptifs, sans que la combinaison des deux expressions renferme d'élément de fantaisie dépassant le contenu descriptif de l'expression. La signification descriptive serait sans équivoque et s'imposerait immédiatement, sans nécessiter aucun effort d'analyse.

20.
    À cet égard, en ce qui concerne la première branche du premier moyen, il suffit de constater que le litige soumis au Tribunal portait sur le refus d'enregistrement du signe «Companyline» au motif que celui-ci ne revêtait pas de caractère distinctif. Le Tribunal a donc pu à bon droit se limiter à l'examen de cette question et n'était pas tenu de se prononcer sur la délimitation éventuelle de la notion d'absence de caractère distinctif par rapport à la notion de caractère distinctif minimal.

21.
    En ce qui concerne la seconde branche du premier moyen, il convient de constater, en premier lieu, que, en vérifiant si la combinaison de deux termes génériques présente une caractéristique additionnelle susceptible de conférer au signe dans son ensemble un caractère distinctif, le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit dans son interprétation de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

22.
    En second lieu, il convient de relever que l'application concrète de ce critère au cas d'espèce par le Tribunal, telle qu'elle est contestée par DKV, comporte des appréciations de nature factuelle. Or, ainsi que M. l'avocat général l'a mis en exergue aux points 58 et suivants de ses conclusions, le Tribunal est seul compétent, d'une part, pour constater les faits, sauf dans les cas où l'inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d'autre part, pour apprécier ces faits. L'appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments qui lui ont été soumis, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d'un pourvoi (voir, notamment, arrêt du 21 juin 2001, Moccia Irme e.a./Commission, C-280/99 P à C-282/99 P, Rec. p. I-4717, point 78, et ordonnance du 25 avril 2002, DSG/Commission, C-323/00 P, non encore publiée au Recueil, point 34).

23.
    Les constatations du Tribunal ne révèlent aucun élément qui laisserait présumer une dénaturation des éléments qui lui ont été soumis. En particulier, au point 26 de l'arrêt attaqué, il a relevé que le fait d'accoler les termes «company» et «line», tous deux usuels dans les pays anglophones, sans aucune modification graphique ou sémantique, ne présente aucune caractéristique additionnelle susceptible de rendre le signe dans son ensemble apte à distinguer les services de DKV de ceux d'autres entreprises. Ce raisonnement ne contient aucun indice qui laisserait présumer une dénaturation des éléments soumis au Tribunal.

24.
    En ce qui concerne le grief selon lequel le Tribunal se serait abstenu d'examiner l'impression d'ensemble que produit un signe composé (voir, en ce qui concerne l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, arrêt du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C-383/99 P, Rec. p. I-6251, point 40), celui-ci n'est pas fondé. En effet, ainsi qu'il a été exposé au point précédent, le Tribunal a consacré une partie importante de son raisonnement à examiner, s'agissant d'un signe composé de mots, le caractère distinctif de l'ensemble du signe.

25.
    Le premier moyen doit donc être rejeté dans son ensemble.

Sur le deuxième moyen

26.
    Par son deuxième moyen, DKV fait grief au Tribunal d'avoir refusé d'apprécier le signe «Companyline» au titre de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

27.
    Selon elle, la nécessité de maintenir disponibles certains signes ou certaines indications pour pouvoir être utilisés par tous les opérateurs («Freihaltebedürfnis»), prévue à l'article 7, paragraphe 1, sous c), doit exister concrètement et non pas seulement de manière abstraite. Cette disposition devrait être interprétée de façon étroite, restrictive et favorable à la protection. Selon DKV, il ressort déjà de la pratique de l'OHMI que des marques dont le contenu sémantique ne se trouve à l'égard des produits et des services désignés dans la demande d'enregistrement que dans un certain rapport, qui ne peut pas être précisé plus avant ou qui est crypté, et des marques qui ne font allusion qu'à leurs caractéristiques ou qui ne font à la rigueur que suggérer celles-ci, ne doivent pas être considérées comme étant descriptives. L'OHMI n'aurait donc pas dû constater en l'espèce que le signe «Companyline» revêt un caractère descriptif.

28.
    À cet égard, il convient de rappeler que la décision de l'examinateur de l'OHMI, du 17 avril 1998, se fonde uniquement sur l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 pour motiver le refus d'enregistrement du signe «Companyline» comme marque communautaire. Par conséquent, le Tribunal a pu se limiter, dans l'arrêt attaqué, à l'examen du litige au regard de cette seule disposition, en considérant, aux points 30 et 31 de son arrêt, qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur un moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous c), dans la mesure où il suffit que l'un des motifs énumérés à l'article 7, paragraphe 1, s'applique pour refuser l'enregistrement.

29.
    Cette motivation n'est à l'évidence entachée d'aucune erreur de droit. En effet, il ressort très clairement du libellé de l'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 qu'il suffit que l'un des motifs absolus de refus énumérés à cette disposition s'applique pour que le signe en cause ne puisse être enregistré comme marque communautaire.

30.
    Le deuxième moyen n'est donc pas fondé et doit également être rejeté.

    

Sur le troisième moyen

31.
    Par son troisième moyen, DKV fait grief au Tribunal de ne pas avoir pris en compte l'article 12, sous b), du règlement n° 40/94. En effet, selon elle, cette disposition constituerait un correctif à l'interprétation restrictive de l'article 7, paragraphe 1, sous b) et c), de ce règlement.

32.
    L'article 12, sous b), du règlement permettrait, en cas de doute, de ne pas faire obstacle à l'enregistrement d'un signe tel que «Companyline». Dans la mesure où cette disposition assurerait que le signe en cause n'empêche pas le public de décrire concrètement des services du secteur de l'assurance et de la finance pour des entreprises employant les éléments «company» et «line», l'objection sur laquelle repose le refus d'enregistrement du signe serait sans fondement.

33.
    Sur ce point, il importe de constater qu'il ressort du dossier que l'argument tiré de l'article 12, sous b), du règlement n° 40/94 n'a été invoqué devant le Tribunal qu'en liaison avec l'article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, disposition qui, selon DKV, devrait être «interprétée à la lumière de l'article 12, sous b)».

34.
    Dans la mesure où le Tribunal est parvenu à la conclusion que le refus d'inscription avait légalement pu être fondé sur l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et qu'il n'y avait donc pas lieu de statuer sur le moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous c), il n'était par conséquent pas obligé de se prononcer sur les relations entre cette dernière disposition et l'article 12, sous b), du règlement. Le moyen tiré d'une absence de prise de position à cet égard de la part du Tribunal est donc inopérant.

35.
    Pour autant que DKV entendrait invoquer, au stade du pourvoi, l'argument selon lequel l'article 12, sous b), du règlement n° 40/94 constitue également un correctif à l'interprétation de l'article 7, paragraphe 1, sous b), cette argumentation constitue un moyen nouveau présenté pour la première fois dans le cadre du pourvoi devant la Cour, moyen qui, de ce fait, doit être considéré comme irrecevable (voir, notamment, ordonnance du 13 septembre 2001, Comité du personnel de la BCE e.a./BCE, C-467/00 P, Rec. p. I-6041, point 22).

36.
    Le troisième moyen doit donc être rejeté.

Sur le quatrième moyen

37.
    Par la première branche de son quatrième moyen, DKV reproche au Tribunal d'avoir appliqué l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 au signe «Companyline» sans prendre en considération l'attitude adoptée par les administrations nationales lors d'enregistrements similaires dans l'ensemble des États membres. La requérante aurait produit, lors de la procédure devant le Tribunal, d'abondantes pièces établissant cette attitude, en particulier celle de l'Office britannique des marques. La preuve aurait été rapportée qu'il existe un grand nombre de marques, dans le domaine de la classe 36, comportant le suffixe «line». Le Tribunal aurait à tort ignoré ces preuves.

38.
    Par la seconde branche dudit moyen, DKV soutient que le Tribunal aurait dû prendre en considération le fait que le public est familier de la langue anglaise dans une bonne partie de la Communauté et que les offices nationaux des marques reconnaissent à la langue anglaise la même diffusion que celle dans la zone linguistique anglophone de la Communauté.

39.
    À cet égard, en ce qui concerne la première branche du quatrième moyen, il suffit de constater, ainsi que M. l'avocat général l'a relevé au point 91 de ses conclusions, qu'il n'y a aucune disposition du règlement n° 40/94 qui obligerait l'OHMI à parvenir à des résultats identiques à ceux atteints par des administrations nationales dans une situation similaire. Il ne saurait donc être reproché au Tribunal d'avoir commis une erreur de droit à cet égard.

40.
    En ce qui concerne la seconde branche du quatrième moyen, l'OHMI a souligné à juste titre qu'il résulte du libellé de l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 que l'enregistrement d'un signe doit être refusé lorsqu'il a un caractère descriptif ou qu'il ne présente pas un caractère distinctif dans la langue d'un État membre, bien qu'il soit susceptible d'enregistrement dans un autre État membre. Puisque le Tribunal a constaté que le signe en cause ne revêtait pas un caractère distinctif dans la zone linguistique anglophone, il n'était à l'évidence pas nécessaire qu'il s'interroge sur la nature de l'impression que le signe pouvait produire sur les locuteurs d'autres langues communautaires.

41.
    Il s'ensuit que les deux branches du quatrième moyen sont dénuées de fondement et que celui-ci doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le cinquième moyen

42.
    Par son cinquième moyen, DKV fait valoir que l'OHMI a commis un détournement de pouvoir, dans la mesure où il a, dans des cas analogues à la présente espèce, enregistré d'autres signes avec le suffixe «line», tels que «Moneyline», «Cashline», «Immoline» et «Combiline». Ainsi, l'OHMI aurait méconnu, en refusant l'enregistrement du signe «Companyline», ses propres principes d'enregistrement et ses propres directives d'examen. Selon elle, les raisons pour lesquelles l'OHMI a agi de cette manière résident probablement dans le fait que celui-ci souhaitait empêcher un cumul de marques comportant le suffixe «line» entre les mains de la requérante, ce qui constituerait un détournement de pouvoir.

43.
    L'OHMI rétorque qu'il s'agit de pures conjectures factuelles, qui ont déjà été présentées de manière identique devant le Tribunal. Celui-ci aurait constaté à bon droit qu'il n'existe aucun indice objectif et précis faisant apparaître que la décision attaquée aurait été prise dans le but exclusif ou, à tout le moins, déterminant d'atteindre des fins autres que celles sur lesquelles cette décision est fondée.

44.
    À cet égard, il suffit de constater que DKV se borne à réitérer devant la Cour les mêmes allégations factuelles que celles invoquées devant le Tribunal, sans formuler de grief concret à l'encontre de l'arrêt attaqué. Or, un tel moyen constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui, aux termes de l'article 49 du statut CE de la Cour de justice, échappe à la compétence de celle-ci (voir, notamment, ordonnance DSG/Commission, précitée, point 54).

45.
    Le cinquième moyen est donc irrecevable et doit être rejeté pour ce motif.

46.
    Il résulte des considérations qui précèdent que les moyens présentés par DKV au soutien de son pourvoi sont irrecevables ou non fondés. Dès lors, le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

47.
    Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. L'OHMI ayant conclu à la condamnation de DKV et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1)    Le pourvoi est rejeté.

2)    DKV Deutsche Krankenversicherung AG est condamnée aux dépens.

Jann

von Bahr
Wathelet

Timmermans                

Rosas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 2002.

Le greffier

Le président de la cinquième chambre

R. Grass

P. Jann


1: Langue de procédure: l'allemand.