Language of document : ECLI:EU:T:2019:291

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 mai 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne verbale vita – Motifs absolus de refus – Absence de caractère distinctif – Caractère descriptif – Notion de caractéristique – Nom de couleur – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑423/18,

Fissler GmbH, établie à Idar-Oberstein (Allemagne), représentée par Mes G. Hasselblatt et K. Middelhoff, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. W. Schramek et Mme D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 28 mars 2018 (affaire R 1326/2017‑5), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal vita comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. A. M. Collins, président, Mme M. Kancheva (rapporteur) et M. G. De Baere, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 juillet 2018,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 24 septembre 2018,

vu la réattribution de l’affaire à un nouveau juge rapporteur siégeant dans la huitième chambre,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 septembre 2016, la requérante, Fissler GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé, sous le numéro 15857188, est le signe verbal vita.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7, 11 et 21 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 7 : « Robots de cuisine électriques ; pièces de rechange et accessoires des produits précités » ;

–        classe 11 : « Casseroles à pression [autocuiseurs] électriques ; pièces de rechange et accessoires des produits précités » ;

–        classe 21 : « Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine ; batteries de cuisine ; marmites autoclaves non électriques ; pièces de rechange et accessoires des produits précités ».

4        Par décision du 28 avril 2017, l’examinateur a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés, aux motifs que celle-ci était descriptive et dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001].

5        Le 20 juin 2017, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 28 mars 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En premier lieu, s’agissant du public pertinent, elle a considéré que les produits visés s’adressaient avant tout au grand public, mais aussi en partie au public spécialisé, par exemple des cuisiniers, et que le niveau d’attention variait de moyen à élevé. Elle a ajouté que, la marque demandée étant un terme de la langue suédoise, il convenait de se fonder sur le public suédophone de l’Union européenne.

7        En deuxième lieu, s’agissant du caractère descriptif de la marque demandée, la chambre de recours a d’abord relevé que le signe vita est la forme déterminée et la forme plurielle du mot « vit », qui signifie « blanc » en suédois. Ensuite, elle a considéré que, pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il n’était pas déterminant de savoir si la couleur blanche était usuelle pour ces produits, mais il suffisait que ces produits pussent exister en blanc et que le signe pût être descriptif pour eux. Après avoir souligné que la couleur blanche, sans être la plus usuelle, était du moins assez habituelle pour les casseroles « électroniques et non électroniques » [à savoir : électriques et non électriques], ainsi que pour d’autres ustensiles de ménage, elle a estimé que cela montrait qu’un consommateur moyen associerait les produits visés avec la couleur blanche et considérerait donc la marque demandée comme étant descriptive. En outre, la chambre de recours a relevé que certains ustensiles de cuisine et appareils de ménage étaient souvent appelés « produits blancs » en anglais (« white goods ») et en suédois (« vitvaror »). Se fondant sur un extrait du site Internet qui était accessible depuis l’adresse Internet http ://www.vitvara.n.nu/vad-ar-vitvaror, elle en a déduit que certains des produits visés, tels que les robots de cuisine électriques ou les casseroles à pression électriques, pouvaient collectivement être désignées comme « produits blancs ». Elle a précisé que, même si cela n’était pas possible, parce que ce sont avant tout les grands appareils de ménage, comme les machines à laver et les lave-vaisselles, qui sont désignés comme « produits blancs », cela démontrait cependant clairement que la couleur blanche était associée de manière générale aux ustensiles de ménage. Enfin, elle en a conclu que la marque demandée revêtait un caractère purement descriptif.

8        En troisième lieu, s’agissant de l’absence de caractère distinctif de la marque demandée, la chambre de recours a considéré que la marque demandée était comprise par le public pertinent comme un simple message objectif au sens que les produits visés étaient des produits disponibles en couleur blanche. Elle en a conclu que ladite marque était purement descriptive et, par conséquent, ne possédait aucun caractère distinctif. Selon elle, tout fabricant de robots de cuisine et de batteries de cuisine pouvait fabriquer ses produits en blanc et cette marque n’était donc pas apte à distinguer les produits de la requérante de ceux d’autres entreprises. Par ailleurs, la chambre de recours a écarté l’invocation par la requérante d’autres marques enregistrées et composées uniquement de couleurs.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

10      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui du recours, la requérante soulève deux moyens, respectivement tirés d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement. En substance, elle soutient que la marque demandée ne revêt pas un caractère descriptif pour les produits visés et jouit du caractère distinctif requis pour ceux-ci.

 Observation liminaire sur la définition du public pertinent

12      À titre liminaire, il convient de définir le public pertinent pour l’appréciation de ces deux motifs absolus de refus.

13      D’une part, aux points 13 à 15 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le consommateur moyen des produits visés était en premier lieu le « consommateur général », à savoir le grand public, mais aussi en partie un public spécialisé, par exemple des cuisiniers, et que le niveau d’attention variait donc de moyen à élevé. Elle a toutefois ajouté qu’il ressortait de la jurisprudence en matière de motifs relatifs de refus que, si les produits et les services visaient aussi bien les consommateurs moyens qu’un public spécialisé, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé devait être pris en considération et que, en l’espèce, il convenait de se fonder sur le niveau d’attention du grand public. Elle a enfin précisé que, même si le signe visait un public spécialisé ayant un niveau d’attention accru, cela ne signifiait pas qu’il gagnerait en caractère distinctif, car un signe dont la signification descriptive n’est pas comprise par le consommateur moyen peut être compris immédiatement par un public spécialisé [voir, en ce sens, arrêt du 11 octobre 2011, Chestnut Medical Technologies/OHMI (PIPELINE), T‑87/10, non publié, EU:T:2011:582, points 27 et 28].

14      À cet égard, il ressort de la jurisprudence que le fait que le public pertinent est spécialisé ne saurait avoir une influence déterminante sur les critères juridiques utilisés pour l’appréciation du caractère distinctif d’un signe. S’il est vrai que le niveau d’attention du public pertinent spécialisé est, par définition, plus élevé que celui du consommateur moyen, il ne s’ensuit pas nécessairement qu’un caractère distinctif plus faible du signe soit suffisant lorsque le public pertinent est spécialisé. En effet, le principe découlant d’une jurisprudence constante, selon lequel, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit, pourrait être remis en cause si le seuil de distinctivité d’un signe dépendait, d’une manière générale, du degré de spécialisation du public pertinent (voir arrêt du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, EU:C:2012:460, points 48 à 50 et jurisprudence citée). Il en va de même pour l’appréciation du caractère descriptif d’un signe.

15      En l’espèce, c’est donc à bon droit que la chambre de recours s’est fondée sur la perception de la marque demandée par le grand public et n’a pas reconnu d’incidence particulière à sa perception par un public spécialisé, par exemple des cuisiniers.

16      D’autre part, au point 16 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, un signe est refusé à l’enregistrement même si le motif de refus n’existe que dans une partie de l’Union. Elle a estimé que, étant donné que la marque demandée est un terme issu de la langue suédoise, il convenait tout d’abord de fonder l’appréciation de son aptitude à être protégé sur le public suédophone de l’Union.

17      À cet égard, sans se prononcer à ce stade sur la question de savoir si la marque demandée est effectivement perçue comme un terme suédois, il suffit de relever que les motifs absolus de refus invoqués par l’examinateur et la chambre de recours sont relatifs à la langue suédoise, de sorte que le public pertinent pour leur appréciation est le public suédophone de l’Union, à savoir le consommateur suédois ou finlandais [voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2014, Pågen Trademark/OHMI (gifflar), T‑520/12, non publié, EU:T:2014:620, points 19 et 20].

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

18      Par le premier moyen, la requérante allègue, en premier lieu, que, lorsqu’elle est utilisée de manière isolée, la marque demandée ne présente aucun contenu explicitement descriptif et qu’il semble donc improbable que le mot « vita » soit effectivement compris par les consommateurs suédois au sens de « blanc ». Elle reproche à l’EUIPO de n’avoir pas pris suffisamment en compte le fait que la marque demandée concerne non pas l’adjectif « vit » (« blanc ») dans sa forme de base qui figure dans les dictionnaires, mais le terme « vita » considéré isolément. Or, en suédois, ce terme ne serait jamais utilisé de manière isolée, mais toujours lié au substantif postposé auquel il se rapporte. En ce qui concerne le mot « vita » utilisé de manière isolée, l’EUIPO n’aurait pas établi l’existence d’un contenu figurant au premier plan, relatif à certaines caractéristiques des produits en cause et n’aurait produit aucune preuve en ce sens. Utilisé de manière isolée, le mot « vita » ne serait donc pas reconnu d’emblée par le consommateur suédois et ne serait, par conséquent, pas associé directement à « blanc » ou à « blanche ». En outre, la requérante soutient que la signification de « vita » n’est pas claire et nécessite une interprétation, puisque ce mot peut se rapporter à différentes circonstances et avoir différentes significations dans plusieurs langues, notamment « vie » ou « mode de vie » en latin comme en italien.

19      En deuxième lieu, la requérante soutient que, même en se fondant sur le consommateur suédois et en partant du principe que le terme « vita » est associé à une indication de couleur, il est inexact que l’indication de la couleur « blanc » ait une signification purement descriptive pour les produits visés, car il n’existe, du point de vue du public pertinent, aucun rapport suffisamment direct et concret entre le terme « vita » et les produits visés. Cela vaudrait notamment pour les autocuiseurs et les casseroles, qui seraient presque exclusivement fabriqués en acier inoxydable argenté et pour lesquels la couleur « blanche » ne serait pas habituellement utilisée. En outre, les produits visés ne sauraient non plus être considérés comme étant des « produits blancs », expression par laquelle on entend des appareils ménagers tels que des réfrigérateurs, des congélateurs, des lave-vaisselles ou des sèche-linges, mais qui ne serait pas utilisée pour des autocuiseurs, des casseroles, des poêles ou des bols de cuisine, etc. Le public pertinent associerait donc ces derniers à des produits en acier inoxydable argenté, sans que les noms de couleur jouent aucun rôle. Étant donné que, dans le domaine des produits visés, les noms de couleur ne jouent aucun rôle et que le public pertinent n’associe pas de couleurs particulières aux appareils de cuisson, un nom de couleur, quel qu’il soit, ne serait pas non plus perçu comme une caractéristique de ces produits. Il serait donc sans pertinence que les produits visés puissent exister également dans la couleur blanche, car le critère déterminant serait plutôt de savoir si le signe peut être utilisé à cette fin et si, dans la perception du public pertinent, il peut être compris comme une indication descriptive d’une caractéristique de ces produits.

20      Ainsi, la requérante avance que le consommateur suédois moyen ne conclura pas, immédiatement et sans autre réflexion, que le terme « vita » concerne un ustensile de cuisine blanc. Au contraire, ce consommateur devrait procéder à une réflexion en plusieurs étapes pour parvenir, à partir de la dénomination de couleur en tant que telle, à une coloration du produit. De plus, il n’apparaîtrait pas clairement pour ledit consommateur à quel élément du produit doit se rapporter l’indication de couleur, étant donné que les casseroles, poêles, robots culinaires ou bols de cuisine sont habituellement composés de plusieurs éléments ou, à tout le moins, d’une partie intérieure et d’une partie extérieure. Ce consommateur ne déduirait donc pas sans autre réflexion, à partir d’une simple indication de couleur, si les produits visés comportent des éléments de couleur blanche, s’ils sont entièrement colorés en blanc ou si, par exemple, seule la partie intérieure est de couleur blanche.

21      En troisième lieu, la requérante fait valoir que le Tribunal et l’EUIPO ont itérativement constaté que le terme « vita » n’avait pas de signification descriptive pour les produits respectivement concernés et qu’il possédait donc un caractère distinctif moyen, en l’absence de lien ou de rapport direct avec ces produits et nonobstant le caractère allusif à la vitalité du mot « vita » [voir arrêt du 14 janvier 2016, The Cookware Company/OHMI – Fissler (VITA+VERDE), T‑535/14, non publié, EU:T:2016:2, point 40 et jurisprudence citée].

22      La requérante conclut que le terme « vita », utilisé de manière isolée, n’a, pour les consommateurs suédois, pas la signification de « blanc » et, en outre, ne comporte, en raison de ses multiples sens et de la nécessité de l’interpréter, aucun contenu descriptif figurant au premier plan, se rapportant à une caractéristique significative pour le public et afférente aux produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé. Elle ajoute que le simple fait que, de manière abstraite, un élément soit propre à constituer une indication d’une caractéristique ne saurait suffire à justifier un impératif de disponibilité au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

23      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante et regarde le premier moyen comme « inopérant ». Il avance que l’examen du signe doit être effectué concrètement, par rapport aux produits visés, et que les consommateurs sont confrontés à la marque de l’Union européenne en lien direct avec les produits sur lesquels elle est apposée, par exemple lors de l’achat ou dans la publicité. Selon l’EUIPO, l’allégation de la requérante selon laquelle plusieurs étapes de réflexion seraient nécessaires pour attribuer une signification sensée au signe demandé n’est pas convaincante et, dans la mesure où les produits sont blancs, son allégation selon laquelle les qualités des produits ne se reconnaîtraient pas facilement dans le signe pour les consommateurs suédophones est également non fondée.

24      L’EUIPO relève que le mot « vita », utilisé comme adjectif dans la langue suédoise, correspond au mot « weiße » en langue allemande ou à « blanche » en langue française et que le public suédophone n’a besoin d’aucune traduction. Il ajoute que le fait que le mot « vita » soit également utilisé dans d’autres langues ne change rien à la compréhension des locuteurs natifs du suédois. Même s’il concède que le mot « vita » n’est généralement pas utilisé isolément, l’EUIPO souligne que, dans un examen concret, lié aux produits, il n’est pas nécessaire que le signe soit l’expression « robots de cuisine électriques blancs » et que les produits sont perçus et ajoutés mentalement par le public pertinent. Il allègue que le public pertinent suédophone sait qu’une couleur peut signifier une caractéristique en relation avec les produits et percevoir un message informatif exprimant qu’il s’agit de produits blancs et non de produits d’une couleur différente, par exemple de couleur gris acier.

25      L’EUIPO considère qu’il n’est pas tenu de prouver que la marque demandée pourrait désigner une caractéristique des produits, car l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 ne concernerait pas l’utilisation actuelle du signe. S’il ne conteste pas qu’il existe beaucoup de casseroles et d’autres produits liés à la cuisine qui sont en acier, il avance toutefois que d’autres couleurs, dont le blanc, sont également utilisées pour les produits visés, de sorte qu’un autocuiseur blanc ne serait pas inhabituel ou frappant. L’EUIPO ajoute que, même si le blanc était rarement utilisé pour les appareils ménagers, cela ne contredirait pas le fait qu’il peut s’agir de la caractéristique principale de ces produits. Il soutient que la couleur peut être un critère d’achat au premier plan, voire qu’elle doit être considérée comme une caractéristique essentielle, et que rien ne s’oppose à ce que lesdits produits soient complètement ou principalement blancs.

26      L’EUIPO allègue qu’il n’est pas nécessaire que la caractéristique soit l’élément principal ou le critère d’achat et que, selon la jurisprudence, le motif de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 est opérant peu importe que le signe décrive une caractéristique essentielle ou accessoire, voire « n’importe quelle caractéristique », des produits désignés. Il ajoute qu’un signe doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits concernés. Or, selon l’EUIPO, tel est le cas en l’espèce, puisque la marque demandée n’a pas besoin d’être interprétée et ne déclenche pas de processus complexe de réflexion, étant donné que le mot « vita » est utilisé en tant qu’adjectif dans la langue suédoise comme une forme de « blanc ». L’EUIPO « ne parvient donc pas à comprendre » pourquoi un tel processus de réflexion se déclencherait à la perception dudit mot, dont le message est simple et reste informatif, sans être indéterminé ou vague. Enfin, les affaires concernant des enregistrements antérieurs ne seraient pas comparables et n’auraient pas d’effet contraignant en l’espèce.

27      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. Selon le paragraphe 2 du même article, le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union européenne.

28      Selon une jurisprudence constante, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description desdits produits ou services, ou d’une de leurs caractéristiques [arrêts du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 ; du 12 mai 2016, Chung-Yuan Chang/EUIPO – BSH Hausgeräte (AROMA), T‑749/14, non publié, EU:T:2016:286, point 23, et du 25 octobre 2018, Devin/EUIPO – Haskovo (DEVIN), T‑122/17, EU:T:2018:719, point 18].

29      Dès lors, le caractère descriptif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur de ces produits ou services [voir, en ce sens, arrêts du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, EU:T:2002:44, point 29 ; du 12 mai 2016, AROMA, T‑749/14, non publié, EU:T:2016:286, point 24, et du 17 janvier 2019, Ecolab USA/EUIPO (SOLIDPOWER), T‑40/18, non publié, EU:T:2019:18, point 25].

30      Par ailleurs, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou services concernés (arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32, et du 12 mai 2016, AROMA, T‑749/14, non publié, EU:T:2016:286, point 29).

31      Enfin, l’intérêt général sous-tendant l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 consiste à assurer que des signes descriptifs de l’une ou de plusieurs des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels un enregistrement en tant que marque est demandé puissent être librement utilisés par l’ensemble des opérateurs économiques offrant de tels produits ou services (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 37). Cette disposition empêche que ces signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 31) et qu’une entreprise monopolise l’usage d’un terme descriptif, au détriment des autres entreprises, y compris ses concurrents, dont l’étendue du vocabulaire disponible pour décrire leurs propres produits se trouverait ainsi réduite [arrêts du 16 octobre 2014, Larrañaga Otaño/OHMI (GRAPHENE), T‑458/13, EU:T:2014:891, point 18 ; du 7 décembre 2017, Colgate-Palmolive/EUIPO (360°), T‑332/16, non publié, EU:T:2017:876, point 17, et du 25 octobre 2018, DEVIN, T‑122/17, sous pourvoi, EU:T:2018:719, point 19].

32      C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu de se prononcer sur le premier moyen de la requérante, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. À cet effet, il convient d’examiner, tour à tour, la signification du terme « vita » en suédois et le lien entre cette signification et les produits visés.

 Sur la signification du terme « vita » en suédois

33      La requérante allègue que le terme « vita », utilisé de manière isolée, n’est pas reconnu d’emblée par le consommateur suédois et n’est, par conséquent, pas associé directement au sens de « blanc ». En outre, elle soutient que ledit terme peut avoir différentes significations dans plusieurs langues, notamment « vie » ou « mode de vie » en latin comme en italien.

34      Au point 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a regardé le terme « vita » comme étant la forme déterminée et la forme plurielle du mot suédois « vit », qui signifie « blanc ».

35      À cet égard, s’il est exact que le terme « vita » n’est pas identique à la forme indéterminée commune du mot « vit » qui figure dans les dictionnaires suédois, il y a lieu de considérer que ledit terme n’en demeure pas moins reconnaissable d’emblée par le consommateur suédophone au sens de l’adjectif « blanc » sous sa forme plurielle et sa forme déterminée au singulier, même lorsqu’il est utilisé de manière isolée. La simple absence d’un substantif aux côtés de ce terme ne saurait empêcher une telle reconnaissance par ledit consommateur, s’agissant d’un adjectif aussi courant que celui signifiant « blanc(s) ».

36      En outre, s’il est exact que le terme « vita » peut revêtir différentes significations dans plusieurs langues, notamment « vie » ou « mode de vie » en latin comme en italien, un tel fait n’en demeure pas moins inopérant en l’espèce, dès lors que la signification de « blanc(s) » en suédois constitue « au moins une de ses significations potentielles » conformément à la jurisprudence rappelée au point 30 ci-dessus.

37      Il convient donc d’écarter les arguments de la requérante visant à remettre en cause la signification du terme « vita » pour le public suédophone pertinent ainsi établie par la chambre de recours.

38      Par ailleurs, la jurisprudence sur l’absence de caractère descriptif du terme « vita » citée par la requérante (voir point 21 ci-dessus) est dénuée de pertinence en l’espèce, puisqu’elle concerne la perception dudit terme par le public italien, espagnol, français, allemand, portugais et roumain, alors que, en l’espèce, se pose la question de la signification que revêt ce terme pour le public suédois et finlandais.

 Sur le lien entre la signification du terme « vita » en suédois et les produits visés

39      La requérante soutient qu’il n’existe, du point de vue du public pertinent, aucun rapport suffisamment direct et concret entre le terme « vita » en suédois et les produits visés. Selon elle, la couleur blanche ne serait pas habituellement utilisée pour ces produits, qui seraient presque exclusivement fabriqués en acier inoxydable argenté. En outre, lesdits produits ne sauraient être considérés comme étant des « produits blancs », à savoir des appareils électroménagers.

40      Aux points 21 à 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a, en substance, fondé le caractère descriptif de la marque demandée sur deux motifs. En premier lieu, les produits visés seraient disponibles en couleur blanche, d’une façon assez habituelle sans être la plus usuelle. En second lieu, ces produits seraient souvent appelés « vitvaror » (« produits blancs ») en suédois.

41      En premier lieu, s’agissant de l’utilisation, plus ou moins habituelle, de la couleur blanche pour la fabrication des produits visés, il convient d’examiner, d’emblée, si une telle utilisation peut être qualifiée de « caractéristique » de ces produits au sens de la jurisprudence.

42      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, par l’emploi, à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, des termes « l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci », le législateur de l’Union a, d’une part, indiqué que ces termes devaient tous être considérés comme correspondant à des caractéristiques de produits ou de services et, d’autre part, précisé que cette liste n’était pas exhaustive, toute autre caractéristique de produits ou de services pouvant également être prise en compte (arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 49 ; du 10 juillet 2014, BSH/OHMI, C‑126/13 P, non publié, EU:C:2014:2065, point 20, et du 17 janvier 2019, SOLIDPOWER, T‑40/18, non publié, EU:T:2019:18, point 22).

43      Le choix, par le législateur de l’Union, du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de cette disposition que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques [voir arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 50 et jurisprudence citée, et du 10 juillet 2014, BSH/OHMI, C‑126/13 P, non publié, EU:C:2014:2065, points 21 et 22 et jurisprudence citée ; arrêts du 11 octobre 2018, M&T Emporia Ilektrikon-Ilektronikon Eidon/EUIPO (fluo.), T‑120/17, non publié, EU:T:2018:672, point 24 ; du 12 décembre 2018, Bischoff/EUIPO – Miroglio Fashion (CARACTÈRE), T‑743/17, non publié, EU:T:2018:911, point 25, et du 17 janvier 2019, SOLIDPOWER, T‑40/18, non publié, EU:T:2019:18, point 23].

44      De plus, s’il est indifférent qu’une telle caractéristique soit essentielle ou accessoire sur le plan commercial (arrêt du 16 octobre 2014, GRAPHENE, T‑458/13, EU:T:2014:891, point 20 ; voir également, par analogie, arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, point 102), une caractéristique, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, doit néanmoins être « objective et inhérente à la nature du produit » ou du service (arrêt du 6 septembre 2018, Bundesverband Souvenir – Geschenke – Ehrenpreise/EUIPO, C‑488/16 P, EU:C:2018:673, point 44) ainsi qu’ « intrinsèque et permanente » pour ce produit ou ce service [arrêts du 23 octobre 2015, Geilenkothen Fabrik für Schutzkleidung/OHMI (Cottonfeel), T‑822/14, non publié, EU:T:2015:797, point 32 ; du 5 juillet 2016, Bundesverband Souvenir – Geschenke – Ehrenpreise/EUIPO – Freistaat Bayern (NEUSCHWANSTEIN), T‑167/15, non publié, EU:T:2016:391, point 30, et du 11 octobre 2018, fluo., T‑120/17, non publié, EU:T:2018:672, point 40].

45      En l’espèce, force est de constater que la couleur blanche ne constitue pas une caractéristique « intrinsèque » et « inhérente à la nature » des produits visés (tels que les robots de cuisine, les casseroles électriques et les ustensiles de ménage), mais un aspect purement accidentel et contingent que peut revêtir seulement une fraction d’entre eux le cas échéant et, en tout état de cause, sans présenter aucun rapport direct et immédiat avec leur nature. En effet, de tels produits sont disponibles dans une multitude de couleurs, au rang desquelles figure, sans aucune prépondérance, la couleur blanche. La chambre de recours le reconnaît elle-même, puisque le site Internet qu’elle mentionne au point 23 de la décision attaquée indique que « de nos jours, les ustensiles [de ménage] existent dans toutes les couleurs ».

46      Le simple fait que les produits visés soient disponibles en couleur blanche, de façon plus ou moins habituelle et parmi d’autres couleurs, n’est pas contesté, mais s’avère inopérant, dès lors qu’il n’est pas « raisonnable », au sens de la jurisprudence rappelée au point 43 ci-dessus, d’envisager que, de ce simple fait, la couleur blanche sera effectivement reconnue par le public pertinent comme une description d’une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature de ces produits.

47      C’est donc à juste titre que la requérante soutient qu’il est sans pertinence que les produits visés puissent exister également dans la couleur blanche, puisque le critère déterminant est plutôt de savoir si, dans la perception du public pertinent, le signe peut être compris comme une indication descriptive d’une caractéristique de ces produits.

48      Or, tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque le terme « vita », perçu comme signifiant « blanc(s) », ne peut être compris, par le public pertinent suédophone, comme une indication descriptive d’une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature des produits visés.

49      Au surplus, le cas d’espèce doit être distingué de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 décembre 2008, Colgate-Palmolive/OHMI – CMS Hasche Sigle (VISIBLE WHITE) (T‑136/07, non publié, EU:T:2008:553, points 42 et 43), dans laquelle le Tribunal a jugé que les termes « visible » et « white » permettaient au public concerné de déceler immédiatement et sans autre réflexion la description d’une caractéristique fondamentale des produits concernés, à savoir des « dentifrices et bains de bouche », en ce sens que leur utilisation rend visible la couleur blanche des dents. Dans cette affaire, la « blancheur visible » décrivait une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature des produits concernés, à savoir le but de leur utilisation ou leur destination. Le cas d’espèce doit également être distingué de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE) (T‑208/10, non publié, EU:T:2011:340, point 23), dans laquelle le Tribunal a jugé que le terme « truewhite », dans sa globalité, pouvait être considéré comme faisant référence à une véritable blancheur et que, appliquée à des diodes électroluminescentes (LED), cette marque ne faisait que décrire une caractéristique essentielle desdits produits, à savoir leur capacité à reproduire une lumière d’une blancheur telle qu’elle pourrait être considérée comme étant analogue à la lumière naturelle. Dans cette affaire, la « blancheur véritable », c’est-à-dire comparable à celle de la lumière naturelle, décrivait également une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature des produits concernés, à savoir leur qualité.

50      En second lieu, s’agissant de la dénomination usuelle « vitvaror » en suédois, qui est alléguée par l’EUIPO pour désigner les produits visés, il convient de souligner, d’emblée, que le lien entre le terme « vita » (signifiant « blanc(s) ») et le terme « vitvaror » (signifiant « produits blancs ») n’est qu’indirect et requiert du public pertinent un effort d’interprétation et de réflexion.

51      En outre, force est de constater que la dénomination usuelle « vitvaror » en suédois s’applique exclusivement au « gros électroménager » (tels que les frigidaires, les cuisinières, les lave-vaisselles, les machines à laver, les séchoirs, etc.,) et non au « petit électroménager » (tels que les robots de cuisine, les casseroles électriques, les machines à café, les grille-pains, etc.), entre lesquels il existe une différence notoire quant à la taille et à la portabilité.

52      La chambre de recours elle-même admet ce constat et cette différence notoire lorsqu’elle reconnaît, au point 23 de la décision attaquée, que « ce sont avant tout les grands appareils de ménage, comme p[ar] ex[emple] les machines à laver et les lave‑vaisselles, qui sont désignés comme produits blancs ». C’est cependant à tort qu’elle ajoute que cela démontre que la couleur blanche est associée de manière générale aux ustensiles de ménage, car il ne saurait s’agir tout au plus que d’une association indirecte, et non d’un rapport direct et concret dans l’esprit du public pertinent.

53      Ainsi, la transition effectuée par la chambre de recours, premièrement, de l’adjectif « blanc(s) » aux « produits blancs » et, deuxièmement, du « gros électroménager » au « petit électroménager » ou aux ustensiles de cuisine n’établit qu’un lien doublement indirect, supposant une réflexion en plusieurs étapes, et non un rapport direct et immédiat dans l’esprit du public pertinent.

54      L’évocation des produits visés, ou d’une de leurs caractéristiques, que le terme « vita » pourrait comporter à l’attention du public pertinent par l’association, premièrement, au terme suédois « vitvaror » ou au « gros électroménager » puis, deuxièmement, au « petit électroménager » est tout au plus doublement indirecte et ne permet pas audit public de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits en cause ou d’une de leurs caractéristiques. Un tel rapport demeure « trop vague et indéterminé » (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2002, ELLOS, T‑219/00, EU:T:2002:44, points 43 et 44) pour rendre descriptif le signe « vita ».

55      Au surplus, le cas d’espèce doit être distingué de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 mars 2006, Telefon & Buch/OHMI – Herold Business Data (WEISSE SEITEN) (T‑322/03, EU:T:2006:87, points 95 à 99), dans laquelle le Tribunal a relevé que le syntagme « weiße Seiten » (signifiant « pages blanches ») était devenu synonyme, en langue allemande, d’ « annuaire téléphonique des particuliers » et pouvait dès lors être considéré comme étant descriptif pour les produits dont il recouvrait une dénomination usuelle, en sa qualité de synonyme d’un tel annuaire et non en raison de la couleur blanche des pages de cet annuaire. Dans cette affaire, la marque contestée constituait elle-même la dénomination usuelle, au contraire du terme « vita » pris pour celui de « vitvaror », et désignait directement les produits concernés, et non une autre catégorie de produits, comme le « petit électroménager » par rapport au « gros électroménager » en l’espèce.

56      Par conséquent, aucun des deux motifs invoqués par la chambre de recours (voir point 40 ci-dessus) ne suffit à établir l’existence d’un rapport suffisamment direct et concret, au sens de la jurisprudence rappelée au point 28 ci-dessus, entre le terme « vita » en suédois et les produits visés. La chambre de recours n’a pas démontré que le public pertinent, lorsqu’il serait confronté à la marque demandée, la percevrait, immédiatement et sans autre réflexion, comme une description desdits produits ou de l’une de leurs caractéristiques intrinsèques et inhérentes à leur nature.

57      Le terme « vita » n’est donc pas descriptif d’une caractéristique des produits en cause et, partant, ne tombe pas sous le coup du motif de refus édicté à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

58      Il s’ensuit que la chambre de recours a enfreint l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 lorsqu’elle a conclu, à tort, que la marque demandée présentait un rapport suffisamment direct et concret avec les produits visés pour revêtir un caractère descriptif à leur égard.

59      Le premier moyen doit donc être accueilli.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

60      Par le second moyen, la requérante soutient que, puisque le public pertinent ne percevra pas dans la marque demandée un contenu purement descriptif lié aux produits visés et que cette marque remplit pleinement sa fonction d’indication d’origine, il n’y pas lieu de lui dénier tout caractère distinctif ni de retenir le motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Elle relève, en particulier, qu’il n’est pas porté atteinte à l’objectif dudit article, consistant à protéger le public contre les monopolisations, car les autres opérateurs de marché ne sont pas tributaires de l’utilisation du terme « vita » sous la forme concrètement demandée.

61      La requérante ajoute que, en faveur du caractère distinctif d’indications de couleurs, pour autant que le terme « vita » soit perçu en ce sens, plaide, en outre, le grand nombre d’enregistrements de marques de l’Union revendiquant des noms de couleur. Cela montrerait qu’un nom de couleur peut, du point de vue des consommateurs pertinents, être perçu comme une indication d’origine, même lorsque le produit couvert par la marque présente une couleur correspondant audit nom de couleur (ainsi les marques de l’Union européenne no 3115136 BLUE pour des « rasoirs », no 3757663 WHITE pour des « machines à coudre », no 1078989 ORANGE pour des « appareils et ustensiles de cuisine ou à usage domestique » et no 12131314 PURPLE pour des « confiseries »).

62      La requérante en conclut que la marque demandée n’est pas non plus dépourvue du caractère distinctif requis, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, pour les produits visés.

63      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante et regarde le second moyen comme « inopérant ». Il allègue que la marque demandée désigne la couleur des produits et est considérée comme étant une référence informative à la couleur des produits en cause, de sorte qu’elle n’a pas de fonction d’origine et de caractère distinctif. Il ajoute que le fait que, dans des décisions qui ne concernaient clairement pas la langue suédoise et le public suédophone, un caractère distinctif ait été attribué à l’élément « vita » dans des mots composés, n’est pas pertinent en l’espèce.

64      À cet égard, il importe de rappeler que chacun des motifs absolus de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 est indépendant des autres et exige un examen séparé, même s’il existe un chevauchement évident de leurs champs d’application respectifs. En outre, il convient d’interpréter lesdits motifs de refus à la lumière de l’intérêt général qui sous-tend chacun d’entre eux (voir, par analogie, arrêts du 8 avril 2003, Linde e.a., C‑53/01 à C‑55/01, EU:C:2003:206, points 67 et 71 ; du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, points 68 et 69 ; voir également, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C‑329/02 P, EU:C:2004:532, point 25 et jurisprudence citée).

65      Il s’ensuit que le fait qu’une marque ne relève pas de l’un de ces motifs absolus de refus ne permet pas de conclure qu’elle ne peut pas relever d’un autre. Il ne saurait donc être conclu, en particulier, qu’une marque n’est pas dépourvue de caractère distinctif à l’égard de certains produits ou services au seul motif qu’elle ne les décrit pas (voir, par analogie, arrêts du 8 avril 2003, Linde e.a., C‑53/01 à C‑55/01, EU:C:2003:206, point 68, et du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, points 70 et 71).

66      En effet, l’intérêt général sous-jacent à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 concerne la protection du consommateur en permettant à celui-ci de distinguer sans confusion possible la provenance des produits ou des services désignés par la marque, conformément à sa fonction essentielle d’indication d’origine, alors que l’intérêt général sous-tendant la règle inscrite à l’article 7, paragraphe 1, sous c), se concentre sur la protection des concurrents contre tout risque de monopolisation par un seul opérateur d’indications descriptives de caractéristiques de tels produits ou services (voir point 31 ci-dessus).

67      Ainsi, une marque non descriptive, comme en l’espèce, n’est pas pour autant distinctive. Dans un tel cas, il faut encore examiner si, intrinsèquement, elle n’est pas dépourvue de caractère distinctif, c’est-à-dire vérifier si elle est capable de remplir la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer, sans confusion possible, ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance [voir, en ce sens, arrêts du 5 février 2015, nMetric/OHMI (SMARTER SCHEDULING), T‑499/13, non publié, EU:T:2015:74, point 22 et jurisprudence citée, et du 12 mai 2016, AROMA, T‑749/14, non publié, EU:T:2016:286, point 57].

68      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Selon une jurisprudence constante, les marques visées par cette disposition sont celles qui sont réputées incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service en cause afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [voir arrêt du 12 mai 2016, AROMA, T‑749/14, non publié, EU:T:2016:286, point 58 et jurisprudence citée ; arrêts du 14 décembre 2017, GeoClimaDesign/EUIPO – GEO (GEO), T‑280/16, non publié, EU:T:2017:913, point 56, et du 12 décembre 2018, CARACTÈRE, T‑743/17, non publié, EU:T:2018:911, point 49].

69      Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur de ces produits ou services (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 34 et jurisprudence citée ; arrêts du 12 mai 2016, AROMA, T‑749/14, non publié, EU:T:2016:286, point 59 ; du 14 décembre 2017, GEO, T‑280/16, non publié, EU:T:2017:913, point 57, et du 12 décembre 2018, CARACTÈRE, T‑743/17, non publié, EU:T:2018:911, point 50).

70      En l’espèce, au point 29 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque demandée était comprise par le public pertinent comme un simple message objectif au sens que les produits visés étaient des produits disponibles en couleur blanche. Elle en a conclu que ladite marque était purement descriptive et, par conséquent, ne possédait aucun caractère distinctif. Selon elle, tout fabricant de robots de cuisine et de batteries de cuisine pouvait fabriquer ses produits en blanc et cette marque n’était donc pas apte à distinguer les produits de la requérante de ceux d’autres entreprises.

71      Or, il a été constaté, dans le cadre de l’analyse du premier moyen, que la couleur blanche ne constitue pas une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature des produits visés et que le simple fait que les produits visés soient disponibles en couleur blanche, parmi d’autres couleurs, s’avère inopérant, dès lors qu’il n’est pas raisonnable d’envisager que, de ce simple fait, la couleur blanche sera effectivement reconnue par le public pertinent comme une description d’une caractéristique intrinsèque et inhérente à la nature de ces produits (voir points 45 à 47 ci-dessus).

72      Partant, dans la mesure où la chambre de recours a déduit l’absence de caractère distinctif de la marque demandée en tant que simple conséquence de son prétendu caractère « purement descriptif », lequel n’est pas établi, force est de constater que cette déduction repose sur une prémisse erronée et s’avère donc dénuée de fondement.

73      De plus, dans la mesure où la chambre de recours a inféré l’absence de caractère distinctif de la marque demandée de sa compréhension comme un simple message objectif selon lequel les produits visés sont disponibles en couleur blanche, il y a lieu de considérer que le public pertinent suédophone ne percevra pas dans la marque demandée une description d’une caractéristique intrinsèque des produits visés et ne pourra l’associer directement à ces produits. Au contraire, le terme « vita » requerra un certain effort d’interprétation de la part des consommateurs suédois et finlandais. Ceux-ci ne comprendront pas la marque demandée comme un simple message objectif selon lequel lesdits produits sont disponibles en couleur blanche, mais plutôt comme une indication de leur origine. Il en est d’autant plus ainsi que cette marque sera apposée sur des produits de n’importe quelle couleur, et non seulement de couleur blanche.

74      Le motif de refus invoqué en l’espèce ne saurait donc empêcher que la marque demandée soit, dans l’esprit du public pertinent, apte à identifier l’origine commerciale des produits en cause et à les distinguer de ceux d’autres entreprises.

75      Il s’ensuit que la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 lorsqu’elle a conclu, à tort, que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif à l’égard des produits visés sur le fondement du motif de refus invoqué en l’espèce.

76      Le second moyen doit donc également être accueilli.

77      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de faire droit au recours dans son intégralité et, partant, d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

78      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

79      L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 28 mars 2018 (affaire R 1326/20175) est annulée.

2)      L’EUIPO est condamné aux dépens.

Collins

Kancheva

De Baere

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 mai 2019.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Observation liminaire sur la définition du public pertinent

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

Sur la signification du terme « vita » en suédois

Sur le lien entre la signification du terme « vita » en suédois et les produits visés

Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.