Édition provisoire
CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE
MME JULIANE KOKOTT
présentées le 17 mai 2023 (1)
Affaire C‑84/22
Right to Know CLG
contre
An Taoiseach
[demande de décision préjudicielle formée par la High Court [Haute Cour, Irlande])
« Renvoi préjudiciel – Accès du public à l’information en matière d’environnement – Dérogations – Communications internes – Délibérations des autorités publiques – Comptes rendus des débats du conseil des ministres d’un gouvernement – Rattachement des comptes rendus à une dérogation établi par un jugement antérieur – Non‑application du principe de l’autorité de la chose jugée »
I. Introduction
1. En mettant en œuvre la convention d’Aarhus (2), la directive 2003/4/CE (3) institue un droit d’accès à l’information en matière d’environnement. En parallèle, tant cette convention que cette directive prévoient des dérogations à ce droit, qui permettent notamment de protéger les communications internes et les délibérations des autorités publiques.
2. La présente demande de décision préjudicielle vise à déterminer si les comptes rendus des débats du conseil des ministres d’un gouvernement relèvent de la dérogation relative aux communications internes ou de celle relative aux délibérations des autorités publiques. Il convient en outre d’examiner si cette question peut être réexaminée lorsqu’elle a déjà été tranchée par un jugement antérieur qui est revêtu de l’autorité de la chose jugée et qui concerne la même demande d’accès.
II. Le cadre juridique
A. La convention d’Aarhus
3. Le droit d’accès à l’information sur l’environnement est inscrit à l’article 4 de la convention d’Aarhus.
4. L’article 4, paragraphe 3, sous c), de la convention d’Aarhus prévoit une exception pour les communications internes :
« Une demande d’informations sur l’environnement peut être refusée si :
[...]
c) la demande porte sur des documents qui sont en cours d’élaboration ou concerne des communications internes des autorités publiques à condition que cette exception soit prévue par le droit interne ou la coutume, compte tenu de l’intérêt que la divulgation des informations demandées présenterait pour le public. »
5. Le secret des délibérations des autorités publiques peut être protégé au titre de l’article 4, paragraphe 4, sous a), de la convention d’Aarhus :
« Une demande d’informations sur l’environnement peut être rejetée au cas où la divulgation de ces informations aurait des incidences défavorables sur :
a) le secret des délibérations des autorités publiques, lorsque ce secret est prévu par le droit interne ;
[...]
Les motifs de rejet susmentionnés devront être interprétés de manière restrictive compte tenu de l’intérêt que la divulgation des informations demandées présenterait pour le public et selon que ces informations ont trait ou non aux émissions dans l’environnement. »
B. La directive 2003/4
6. Le droit d’accès aux informations environnementales est inscrit à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2003/4 :
« Les États membres veillent à ce que les autorités publiques soient tenues, conformément à la présente directive, de mettre à la disposition de tout demandeur, et sans que celui-ci soit obligé de faire valoir un intérêt, les informations environnementales qu’elles détiennent ou qui sont détenues pour leur compte. »
7. L’article 4 de la directive 2003/4 prévoit différentes dérogations à ce droit.
8. La dérogation relative aux communications internes figure à l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4 :
« Les États membres peuvent prévoir qu’une demande d’information environnementale peut être rejetée dans les cas où :
[...]
e) la demande concerne des communications internes, en tenant compte de l’intérêt que la divulgation des informations demandées présenterait pour le public. »
9. En outre, l’article 4, paragraphe 2, sous a), de la directive 2003/4 prévoit une dérogation pour les délibérations des autorités publiques :
« Les États membres peuvent prévoir qu’une demande d’informations environnementales peut être rejetée lorsque la divulgation des informations porterait atteinte :
a) à la confidentialité des délibérations des autorités publiques, lorsque cette confidentialité est prévue en droit ;
[...]
Les motifs de refus visés aux paragraphes 1 et 2 sont interprétés de manière restrictive, en tenant compte dans le cas d’espèce de l’intérêt que présenterait pour le public la divulgation de l’information. Dans chaque cas particulier, l’intérêt public servi par la divulgation est mis en balance avec l’intérêt servi par le refus de divulguer. Les États membres ne peuvent, en vertu du paragraphe 2, [sous] a), d), f), g) et h), prévoir qu’une demande soit rejetée lorsqu’elle concerne des informations relatives à des émissions dans l’environnement. »
C. Le droit irlandais
10. L’article 28, paragraphe 4, point 3, de la Constitution irlandaise consacre la confidentialité des débats et réunions du gouvernement irlandais. Des exceptions ne sont prévues que pour les instructions judiciaires ou les enquêtes menées par des organes similaires.
11. L’Irlande a transposé la directive 2003/4 en adoptant les European Communities (Access to Information on the Environment) Regulations 2007 (S.I. no 133/2007) [règlement de 2007 – Communautés européennes (accès à l’information sur l’environnement)] (28 mars 2007).
III. Les faits à l’origine du litige et la demande de décision préjudicielle
12. L’organisation à but non lucratif de droit irlandais Right to Know CLG (ci-après « Right to Know ») a introduit le 8 mars 2016, auprès du Taoiseach (Premier ministre, Irlande, ci-après le « Premier ministre irlandais »), une demande d’accès à tous les documents montrant les débats du conseil des ministres sur les émissions de gaz à effet de serre de l’Irlande de 2002 à 2016. Au terme d’une procédure de réexamen interne, le Premier ministre irlandais a rejeté cette demande en juin 2016. Right to Know a par la suite engagé une procédure devant la High Court (Haute Cour, Irlande) afin d’obtenir un contrôle juridictionnel de cette décision.
13. Par jugement du 1er juin 2018, Right to Know CLG/An Taoiseach ([2018] IEHC 372), la High Court (Haute Cour) a renvoyé la décision au Premier ministre irlandais pour réexamen. Elle a constaté, en se fondant notamment sur un précédent judiciaire (4) débattu par les parties, que les réunions du gouvernement irlandais devaient être assimilées à des « communications internes » d’une autorité publique, de sorte que l’obligation de divulguer des comptes rendus sur les émissions dans l’environnement (article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, troisième phrase, de la directive 2003/4) ne trouvait pas à s’appliquer. Selon la High Court (Haute Cour), le Premier ministre irlandais avait omis de mettre en balance l’intérêt public servi par la divulgation et l’intérêt servi par la confidentialité (article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, deuxième phrase).
14. Par décision du 16 août 2018, le Premier ministre irlandais a accordé un accès partiel aux documents demandés. Right to Know a par la suite introduit une nouvelle demande de contrôle juridictionnel, portant sur cette seconde décision, devant la High Court (Haute Cour). Le juge qui avait rendu le jugement du 1er juin 2018 n’est désormais plus compétent dans le cadre de cette seconde procédure de contrôle juridictionnel. Le nouveau juge adresse les questions suivantes à la Cour :
1) Les comptes rendus de réunions formelles du pouvoir exécutif d’un État membre, au cours desquelles les membres du gouvernement sont tenus de se réunir et d’agir en tant qu’autorité collective, doivent-ils être qualifiés, aux fins d’une demande d’accès à des informations environnementales qu’ils contiennent, comme des « communications internes » ou bien comme des « délibérations » d’une autorité publique au sens de ces termes tels qu’ils figurent respectivement à l’article 4, paragraphe 1, [premier alinéa], sous e), et à l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la [directive 2003/4] ?
2) Le principe de l’autorité de la chose jugée (tel qu’examiné dans l’arrêt du 30 septembre 2003, Köbler, C‑224/01, EU:C:2003:513, et la jurisprudence ultérieure) s’étend-il au-delà du dispositif du jugement antérieur et inclut-il, en outre, les constatations de fait et de droit figurant dans ledit jugement ? En d’autres termes, le principe de l’autorité de la chose jugée se limite-t-il au « cause of action estoppel » [fin de non‑recevoir tirée d’une identité de cause] ou bien s’étend-il à l’« issue estoppel » [fin de non‑recevoir relative à une question déjà tranchée] ?
3) Dans le cadre d’une procédure en cours entre des parties concernant le non‑respect allégué de la [directive 2003/4] s’agissant d’une demande spécifique d’informations environnementales, le droit de l’Union et, en particulier, le principe d’effectivité, s’opposent-ils, lorsqu’un requérant/demandeur a obtenu l’annulation d’une décision, certains griefs tirés du droit de l’Union étant accueillis et d’autres rejetés, à une règle nationale d’autorité de la chose jugée fondée sur l’« issue estoppel », qui exige qu’une juridiction nationale, dans le cadre d’une nouvelle procédure concernant une autre décision relative à la même demande, empêche un tel requérant/demandeur de contester ladite autre décision pour des motifs fondés sur le droit de l’Union qui avaient été précédemment rejetés mais qui, dans ces circonstances, n’avaient pas fait l’objet d’un recours ?
4) Le fait i) que la Cour n’avait pas été saisie à titre préjudiciel et ii) qu’aucune des parties n’avait porté à l’attention de la juridiction nationale la jurisprudence pertinente de la Cour a-t-il une incidence sur la réponse à la troisième question ?
15. Right to Know, l’Irlande et la Commission européenne ont déposé des observations écrites. La Cour a décidé, sur le fondement de l’article 76, paragraphe 2, de son règlement de procédure, de ne pas tenir d’audience de plaidoiries, car elle estime être suffisamment informée pour statuer.
IV. Analyse en droit
16. En adoptant la directive 2003/4, le législateur de l’Union a entendu assurer la compatibilité du droit de l’Union avec la convention d’Aarhus, en prévoyant un régime général. Celui-ci tend à garantir que tout demandeur ait un droit d’accès aux informations environnementales détenues par les autorités publiques ou pour le compte de celles-ci sans qu’il soit obligé de faire valoir un intérêt (5).
17. Le législateur de l’Union a prévu, à l’article 4 de la directive 2003/4, que les États membres peuvent instaurer des dérogations à ce droit. Dans la mesure où de telles dérogations ont été effectivement transposées dans le droit national, il est loisible aux autorités publiques de les invoquer afin de s’opposer aux demandes d’information qui leur parviennent (6).
18. La demande de décision préjudicielle porte, d’une part, sur le point de savoir si les informations litigieuses relèvent de la dérogation relative aux communications internes ou de celle relative à la protection de la confidentialité des délibérations des autorités publiques (section A). D’autre part, elle porte sur le point de savoir si, et dans quelle mesure, la question de l’applicabilité de ces dérogations dans l’affaire au principal a déjà été définitivement tranchée par le jugement du 1er juin 2018, lequel est revêtu de l’autorité de la chose jugée (section B).
A. Interprétation des motifs de dérogation débattus (première question préjudicielle)
19. En vertu de l’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, troisième phrase, de la directive 2003/4, certaines dérogations au droit d’accès aux informations environnementales ne justifient pas le fait de refuser l’accès à des informations relatives à des émissions dans l’environnement. L’une de ces dérogations est prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de cette directive. Elle permet de protéger la confidentialité des délibérations des autorités publiques. Étant donné que les comptes rendus des débats du conseil des ministres sur les émissions de gaz à effet de serre peuvent être assimilées à des informations relatives à des émissions dans l’environnement, il n’est pas certain que cette dérogation soit susceptible de justifier le refus d’accès.
20. Si la dérogation relative aux communications internes prévue à l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4 est en revanche applicable, il faudra certes tenir compte des émissions dans l’environnement, en tant que composante de l’intérêt public servi par la divulgation, dans le cadre de la mise en balance mentionnée à l’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, deuxième phrase, de cette directive, mais des intérêts plaidant en sens contraire pourront également jouer un rôle.
21. Il s’ensuit que la première question vise à déterminer laquelle de ces deux dérogations est applicable. Elle repose toutefois sur le postulat que ces deux dérogations ne peuvent pas s’appliquer concomitamment. Nous démontrons ci-après que ce postulat est erroné.
1. Les communications internes
22. La notion de « communications internes » vise les informations qui circulent au sein d’une autorité publique et qui, à la date de la demande d’accès, n’ont pas quitté la sphère interne de celle-ci, notamment du fait de leur divulgation à un tiers ou de leur mise à la disposition du public (7). Cette dérogation vise à répondre au besoin des autorités publiques de disposer d’un espace protégé afin de poursuivre des réflexions et de mener des débats internes (8).
23. L’article 2, point 2, sous a), de la directive 2003/4 définit le gouvernement comme une autorité publique au sens de cette directive. Il ressort de la demande de décision préjudicielle que des documents montrant les débats du conseil des ministres du gouvernement irlandais demeurent dans la sphère interne dudit gouvernement. Ces documents ne sont pas censés être mis à la disposition de tiers ni à celle du public. Cela s’inscrit dans la logique de l’article 28, paragraphe 4, point 3, de la Constitution irlandaise, qui prévoit que les débats et réunions du gouvernement irlandais sont confidentiels.
24. Il s’ensuit que les documents demandés sont des communications internes. L’accès à ces documents peut être refusé s’il n’existe aucun intérêt public supérieur à leur divulgation.
25. Par conséquent, les comptes rendus des réunions formelles du pouvoir exécutif d’Irlande doivent être qualifiés de communications internes d’une autorité publique, au sens de l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4, aux fins d’une demande d’accès à des informations environnementales qu’ils contiennent.
2. Les délibérations des autorités publiques
26. Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 2003/4, les États membres peuvent en outre prévoir qu’une demande d’informations environnementales peut être rejetée lorsque la divulgation des informations porterait atteinte à la confidentialité des délibérations des autorités publiques, lorsque cette confidentialité est prévue en droit.
27. Si l’on ne tient compte que de la version en langue allemande de cette disposition, les débats du conseil des ministres du gouvernement irlandais apparaissent de toute évidence constituer des délibérations d’une autorité publique au sens de ladite disposition.
28. C’est la raison pour laquelle il est surprenant, de prime abord, que la High Court (Haute Cour) ait considéré que l’application de cette dérogation était artificielle et exagérée (« artificial and strained ») (9). Cette position pourrait résulter de la version en langue anglaise de la directive 2003/4. Dans ladite version, comme dans de nombreuses autres versions linguistiques, ne figure aucune notion qui devrait être traduite impérativement par « délibérations ». Cette même version emploie au contraire le terme « proceedings » (10), qui évoque la protection de la confidentialité des procédures. La notion employée dans la version en langue allemande (« Beratungen ») de la directive 2003/4 ne trouve un équivalent que dans les versions en langues française (11) et italienne (12) de cette directive, les autres versions linguistiques se référant aux activités des autorités publiques (13), notamment au traitement des dossiers ou des affaires (14).
29. Ces divergences figurent également dans les versions linguistiques faisant foi de l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous a), de la convention d’Aarhus, mis en œuvre par l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 2003/4. À cet égard, les versions en langues anglaise et française de cette convention sont identiques aux versions linguistiques concernées de cette directive. La version en langue russe de ladite convention, qui fait également foi, mentionne la confidentialité des travaux des autorités publiques (15).
30. Les diverses versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union, en l’espèce d’une disposition de la directive 2003/4, doivent être interprétées de manière uniforme (16), étant entendu qu’aucune de ces versions linguistiques ne se voit attribuer un caractère prioritaire (17). Partant, il convient d’examiner l’économie générale et la finalité de la règlementation (18).
31. Il y a lieu, à cet effet, de prendre pour point de départ la circonstance qu’en vertu de l’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2003/4 et de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la convention d’Aarhus, les dérogations au droit d’accès doivent être interprétées de manière restrictive (19). Afin de donner une fonction propre à la dérogation relative aux « délibérations », par rapport à celle relative aux « communications internes », il convient de limiter cette première dérogation au processus délibératif – à proprement parler – qui s’inscrit dans le cadre des procédures décisionnelles, sans tenir compte du fondement factuel de la prise de décision (20). C’est la raison pour laquelle la Cour a jugé que l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 2003/4 et l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous a), de la convention d’Aarhus renvoient aux étapes finales des processus décisionnels des autorités publiques (21), c’est-à-dire qu’ils protègent le secret des délibérations (finales) des autorités publiques et non pas l’ensemble de la procédure administrative à l’issue de laquelle ces autorités délibèrent (22).
32. Pour autant qu’ils relèvent d’une étape finale d’une procédure, ce qu’il incombe au juge national d’apprécier, les débats du gouvernement irlandais sont des délibérations d’une autorité publique au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 2003/4.
3. L’application conjointe de plusieurs dérogations
33. Par sa première question, la juridiction de renvoi souhaite toutefois savoir si les comptes rendus des réunions formelles du pouvoir exécutif d’un État membre au cours desquelles les membres du gouvernement sont tenus de se réunir et d’agir en tant qu’autorité collective doivent être qualifiés de « délibérations » ou de « communications ». Il s’ensuivrait que les deux dérogations prévues à l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4 et à l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de cette directive devraient être distinguées l’une de l’autre, au rebours des considérations qui précèdent. Cependant, cette prémisse est erronée. Il est plus exact de considérer que ces deux dérogations se chevauchent (23).
34. Elles reposent en effet sur le même besoin des autorités publiques de disposer d’un espace protégé afin de poursuivre des réflexions et de mener des débats internes.
35. L’exception au droit d’accès aux documents des institutions prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1049/2001 (24) met tout particulièrement en évidence cet élément. Aux termes de cette disposition, notamment, l’accès à un document établi par une institution pour son usage interne peut être refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution.
36. Au surplus, pour ce qui relève du champ d’application de la réglementation de l’Union relative à l’accès aux documents, le refus d’accès à certaines informations est souvent fondé simultanément sur plusieurs motifs de dérogation, sans que la Cour le remette en cause (25).
37. Par conséquent, il y a lieu de répondre à la première question que les comptes rendus des réunions formelles du pouvoir exécutif d’un État membre au cours desquelles les membres du gouvernement sont tenus de se réunir et d’agir en tant qu’autorité collective doivent être qualifiés, aux fins d’une demande d’accès à des informations environnementales qu’ils contiennent, de « communications internes » au sens de l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4. Si ces réunions doivent être rattachées à l’étape finale de la procédure, lesdits comptes rendus sont des « délibérations » d’une autorité publique au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de cette directive.
B. L’autorité de la chose jugée
1. La non‑pertinence des questions relatives à l’autorité de la chose jugée
38. Par ses autres questions, la High Court (Haute Cour) souhaite savoir si le principe de l’autorité de la chose jugée l’empêche de remettre en cause, sur le fondement de la présente demande de décision préjudicielle, les constatations figurant dans son jugement du 1er juin 2018. Dans le premier jugement du 1er juin 2018, qui est revêtu de l’autorité de la chose jugée, elle avait en effet considéré que les informations litigieuses relevaient de la dérogation relative aux communications internes, au sens de l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4 (26), et non de la dérogation relative à la protection des délibérations des autorités publiques, au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de cette directive (27).
39. La juridiction de renvoi envisage désormais de statuer en sens contraire, c’est-à-dire de rattacher les informations litigieuses non pas à la dérogation relative aux communications internes, mais à celle relative aux délibérations. La dérogation relative à la protection des délibérations pourrait néanmoins ne pas trouver à s’appliquer, car, en vertu de l’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, troisième phrase, de la directive 2003/4, elle ne permet pas de retenir des informations relatives à des émissions dans l’environnement. Cette restriction ne vaut pas, en revanche, pour la protection des communications internes.
40. Il ressort cependant de la réponse que nous avons apportée à la première question que les conditions sous-tendant les deux dérogations peuvent être remplies concomitamment et que, en tout état de cause, à la lumière des éléments dont nous disposons au regard des informations litigieuses, celles-ci sont des communications internes. Partant, la dérogation relative à la protection des communications internes est susceptible d’être opposée à la divulgation d’informations, et ce même si ces informations ont pour objet des émissions dans l’environnement et portent sur des délibérations d’autorités publiques.
41. C’est la raison pour laquelle l’autorité de la chose jugée attachée à la constatation selon laquelle les informations demandées sont des communications internes, et non des délibérations d’autorités publiques, ne revêt plus aucune importance en réalité. Les considérations exposées ci‑après valent donc, à titre subsidiaire, pour le cas où la Cour souhaiterait néanmoins se prononcer sur ces questions.
2. À titre subsidiaire, réponse aux questions relatives à l’autorité de la chose jugée
42. En l’absence de réglementation de l’Union à ce sujet, la question de l’autorité de la chose jugée des décisions judiciaires nationales relève de l’autonomie procédurale des États membres. Elle est toutefois soumise aux principes d’équivalence et d’effectivité (28).
a) La portée de l’autorité de la chose jugée (deuxième question préjudicielle)
43. La deuxième question préjudicielle vise à ce que soit précisé si la circonstance que l’autorité de la chose jugée ne soit pas limitée au dispositif d’un jugement, mais s’étende également aux motifs de celui‑ci, est conforme au principe d’effectivité.
44. En tout état de cause, le principe d’effectivité ne subit aucune atteinte lorsque la portée de l’autorité de la chose jugée est, en vertu du droit interne, conforme aux principes appliqués à cet égard en droit de l’Union. Celui-ci prévoit que l’autorité de la chose jugée s’étend aux motifs qui constituent le soutien nécessaire du dispositif et qui sont, de ce fait, indissociables de ce dernier (29). En droit de l’Union, l’autorité de la chose jugée ne s’étend pas, en revanche, aux motifs qui ne constituent pas le soutien nécessaire du dispositif (30).
45. Si cette délimitation de l’autorité de la chose jugée était transposée à l’affaire au principal, la qualification des informations litigieuses au titre de la dérogation relative à la protection des communications internes, qualification qui constitue un motif soutenant nécessairement le jugement du 1er juin 2018, serait revêtue d’une telle autorité. Cette qualification était nécessaire pour annuler le rejet de la demande d’accès puis renvoyer celle-ci à l’administration pour réexamen.
46. Le point de savoir si la non‑application de la dérogation relative à la protection de la confidentialité des délibérations est également indissociable du dispositif se révèle, en revanche, moins évident. Selon la High Court (Haute Cour), cette non‑application était intrinsèquement liée à l’application de la dérogation relative aux communications internes, car elle estimait que dans chaque cas concerné, une seule dérogation ne pouvait trouver à s’appliquer à la fois. Il ressort cependant de nos considérations relatives à la première question que les deux dérogations sont susceptibles de s’appliquer concomitamment.
47. Cela dit, le caractère indissociable ne revêt en définitive aucune importance. En effet, le principe d’effectivité n’impose pas aux États membres d’aligner la portée de l’autorité de la chose jugée, telle que prévue par le droit interne, sur les critères du droit de l’Union afférents à cette autorité. Il permet également aux États membres de retenir une portée plus étendue de ladite autorité, aussi longtemps que cette portée ne rend pas en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union.
48. Sous réserve des considérations exposées ci-après, notamment de celles qui concernent la possibilité d’une voie de recours (31), il n’apparaît pas que l’extension de l’autorité de la chose jugée aux motifs ne constituant pas le soutien nécessaire d’une décision judiciaire rende excessivement difficile l’exercice de tels droits.
49. Par conséquent, il y a lieu de répondre à la deuxième question en ce sens que le principe d’effectivité n’exige pas que l’autorité de la chose jugée qui s’attache à un jugement soit limitée aux motifs constituant le soutien nécessaire de celui-ci.
b) La non prise en compte des constatations revêtues de l’autorité de la chose jugée (troisième et quatrième questions préjudicielles)
50. Par ses troisième et quatrième questions, la juridiction de renvoi souhaite savoir s’il est conforme au principe d’effectivité que les constatations revêtues de l’autorité de la chose jugée qui figurent dans son jugement du 1er juin 2018 et qui concernent la même demande d’accès s’opposent, en l’espèce, au réexamen de la qualification des informations litigieuses au titre de la dérogation relative aux communications internes et de celle relative aux délibérations des autorités publiques. Elle souhaite plus particulièrement savoir si le fait que, au cours de la première procédure, aucune demande de décision préjudicielle n’a été adressée à la Cour et qu’aucune des parties n’avait porté à l’attention de la juridiction nationale la jurisprudence pertinente de la Cour est important, dans le cadre d’une deuxième procédure juridictionnelle, pour la compatibilité à ce principe de l’autorité de la chose jugée qui s’attache aux constatations figurant dans un premier jugement.
51. Il s’ensuit que la juridiction de renvoi souhaite savoir si le droit de l’Union exige d’écarter des constatations revêtues de l’autorité de la chose jugée lorsqu’elles sont susceptibles d’enfreindre ce droit.
52. Il est certes de jurisprudence constante que le droit de l’Union n’impose pas au juge national d’écarter l’application des règles de procédure internes relatives à l’autorité de la chose jugée. Cela vaut également si cette non‑application permettrait de remédier à une violation d’une disposition de droit de l’Union, quelle qu’en soit la nature (32).
53. Il en va toutefois différemment lorsque les règles de procédure internes applicables donnent au juge national, sous certaines conditions, la possibilité de revenir sur une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée en vue de rendre la situation issue de cette décision compatible avec le droit national. Dans ce cas, le juge national doit également faire prévaloir cette possibilité, conformément aux principes d’équivalence et d’effectivité, afin de restaurer la conformité de cette situation avec la réglementation de l’Union (33).
54. S’il est vrai que la demande de décision préjudicielle proprement dite ne contient aucun élément sur les dispositions du droit national qui prévoient de telles règles de procédure, des éléments en ce sens figurent dans un jugement joint en annexe de cette demande (34), par lequel la juridiction de renvoi avait décidé d’adresser la demande de décision préjudicielle à la Cour. Aux termes de ce jugement, les juridictions irlandaises ont le pouvoir discrétionnaire, dans des circonstances particulières, de permettre à une partie de soulever une question dans une procédure ultérieure, même si la question a été tranchée en sa défaveur dans une procédure antérieure. Dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire, la juridiction doit mettre en balance, d’une part, le droit constitutionnel d’accès à la justice et, d’autre part, l’intérêt public et le bien commun. Il est dans l’intérêt public que les litiges soient (en principe) définitivement tranchés et que les personnes ne soient pas soumises à des litiges répétés ou redondants concernant des questions qui ont déjà été tranchées.
55. Dans l’exercice de ce pouvoir, tant le principe d’équivalence que le principe d’effectivité peuvent amener la juridiction de renvoi à devoir écarter toute constatation revêtue de l’autorité de la chose jugée figurant dans le jugement du 1er juin 2018.
56. Le principe d’équivalence impose à la juridiction de renvoi d’exercer son pouvoir discrétionnaire au regard des questions de droit de l’Union d’une manière analogue à celle qu’elle met en œuvre pour les affaires strictement nationales. Certes, la juridiction de renvoi n’a fourni aucune précision quant à la pratique irlandaise. Toutefois, dans le système juridique de la common law anglaise, dans lequel l’état du droit semble similaire à celui qui prévaut en Irlande, il importe tout particulièrement de savoir si la partie qui se voit opposer une constatation revêtue de l’autorité de la chose jugée figurant dans un jugement antérieur a eu la possibilité de remettre en cause cette constatation par l’intermédiaire d’une voie de recours (35).
57. Puisque Right to Know, l’Irlande et le jugement susmentionné du 23 avril 2021 abordent la question de savoir si cette première était en mesure d’introduire un recours contre le jugement du 1er juin 2018, cet aspect joue vraisemblablement un rôle similaire dans la pratique irlandaise. Par ailleurs, à la lumière des considérations exposées précédemment, il est permis de douter qu’un tel recours ait été possible.
58. Si l’Irlande soutient que Right to Know aurait pu demander l’annulation du jugement du 1er juin 2018 en introduisant un recours, le jugement du 23 avril 2021 et les arguments avancés par Right to Know mettent en doute cette position. Étant donné que le jugement du 1er juin 2018 a permis à Right to Know d’obtenir l’annulation du rejet contesté de sa demande d’accès, le risque serait qu’un recours introduit contre certains motifs de l’arrêt eût été rejeté comme étant prématuré (36).
59. Cela correspondrait en définitive à l’état du droit qui prévaut devant les juridictions de l’Union. Aux termes de l’article 56, deuxième alinéa, première phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, un pourvoi peut être formé (seulement) par une partie ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions. En revanche, les pourvois qui ne remettent en cause que les motifs d’un arrêt qui est, en définitive, favorable à l’égard du requérant sont irrecevables (37). De surcroît, même dans le cadre de pourvois en principe recevables, certaines objections visant uniquement les motifs d’une décision sur le fond sont, à défaut d’intérêt à agir, irrecevables lorsque la partie concernée ne remet pas concomitamment en cause cette décision sur le fond (38).
60. Si Right to Know n’était en réalité pas en mesure de contester les constatations figurant dans le jugement du 1er juin 2018, cela serait important non seulement pour l’application du principe d’équivalence, mais également pour celle du principe d’effectivité.
61. Certes, à première vue, l’absence de voie de recours ne semble pas constituer une entrave particulièrement grave à l’exercice des droits. En effet, le principe de protection juridictionnelle effective, qui recoupe dans une large mesure le principe d’effectivité (39), ouvre au particulier, en vertu du droit de l’Union, uniquement un droit d’accès à un tribunal, et non un droit d’accès à plusieurs degrés de juridiction (40). Dans la présente affaire, il ressort du jugement du 1er juin 2018 qu’il existait, en ce sens, un accès à un tribunal.
62. Toutefois, en l’espèce, l’absence de voie de recours impliquerait une atteinte au principe d’égalité des armes. En effet, il y a lieu de considérer que la partie adverse, à savoir le Premier ministre irlandais, en tant que partie ayant succombé, avait bel et bien la possibilité de contester le jugement du 1er juin 2018.
63. Le principe d’égalité des armes fait partie intégrante du principe de la protection juridictionnelle effective des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, consacré à l’article 47 de la Charte (41). Il est un corollaire de la notion même de procès équitable et implique l’obligation d’offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris ses preuves, dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (42).
64. Or, il y a un net désavantage lorsqu’une partie est liée par une constatation qui se révèle par la suite désavantageuse, alors que la partie adverse, qui tire un avantage de cette constatation, pouvait choisir entre la contester ou l’accepter.
65. Il est vrai que les deux aspects mentionnés par la juridiction de renvoi dans sa quatrième question, à savoir que le juge ayant rendu le jugement revêtu de l’autorité de la chose jugée s’est abstenu d’adresser une demande de décision préjudicielle et que les arguments des parties étaient lacunaires, présentent également un intérêt, mais ils ne sont pas déterminants à eux seuls.
66. Ainsi, la circonstance qu’aucune demande de décision préjudicielle n’a été adressée à la Cour au cours de la procédure ayant donné lieu au jugement du 1er juin 2018 plaiderait plutôt en faveur du réexamen d’une question de droit qui a déjà été définitivement tranchée. Néanmoins, en l’absence d’obligation de renvoi préjudiciel, cette circonstance n’aurait qu’une importance relativement faible dans le cadre de la mise en balance (43).
67. La circonstance que les parties, notamment Right to Know, n’ont pas porté à l’attention de la juridiction nationale, au cours de la procédure ayant donné lieu au jugement du 1er juin 2018, la jurisprudence pertinente déjà rendue par la Cour plaiderait, en revanche, plutôt en faveur de la thèse selon laquelle ces parties seraient liées par les constatations figurant dans ledit jugement. En effet, elles n’auraient alors pas déployé tous les efforts raisonnables permettant d’aboutir à une décision qui serait rendue à bon droit et qui leur serait favorable. Il en va a fortiori ainsi lorsque le droit procédural concerné consacre un principe dispositif particulièrement marqué, qui impose aux parties de présenter les précédents judiciaires pertinents. Néanmoins, cet élément n’a, lui aussi, qu’une importance limitée, car l’absence de précédents judiciaires aurait dû, dès la première procédure, commander fortement à la High Court (Haute Cour) de réfléchir sur la présentation d’une demande de décision préjudicielle. En outre, s’agissant de l’interprétation de la notion de « communications internes », l’arrêt central (44) n’a été rendu qu’après le jugement du 1er juin 2018.
68. Par conséquent, il y a lieu de répondre aux troisième et quatrième questions qu’une juridiction nationale est tenue, en vertu des principes d’équivalence et d’effectivité, d’écarter les constatations revêtues de l’autorité de la chose jugée afin de restaurer la conformité de la situation en cause avec le droit de l’Union, dans le cas où les règles de procédure internes applicables comportent cette possibilité pour les affaires strictement nationales. Si la juridiction dispose d’un pouvoir discrétionnaire, elle doit notamment prendre en considération le point de savoir si la partie désavantagée par la constatation revêtue de l’autorité de la chose jugée avait la possibilité de remettre en cause cette constatation en introduisant un recours et s’il y avait égalité des armes entre les parties à cet égard. Le point de savoir si une demande de décision préjudicielle a été adressée à la Cour antérieurement à la constatation revêtue de l’autorité de la chose jugée ou si, antérieurement à cette constatation, les parties ont présenté à la juridiction nationale la jurisprudence pertinente de la Cour revêt, en revanche, une importance moindre pour l’exercice dudit pouvoir discrétionnaire.
V. Conclusion
69. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de se prononcer en ces termes :
1) Les comptes rendus des réunions formelles du pouvoir exécutif d’un État membre au cours desquelles les membres du gouvernement sont tenus de se réunir et d’agir en tant qu’autorité collective doivent être qualifiés, aux fins d’une demande d’accès à des informations environnementales qu’ils contiennent, de « communications internes » au sens de l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, sous e), de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2003, concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement et abrogeant la directive 90/313/CEE du Conseil. Si ces réunions doivent être rattachées à l’étape finale de la procédure, lesdits comptes rendus sont des « délibérations » d’une autorité publique au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 2003/4.
2) L’autorité de la chose jugée qui s’attache aux décisions judiciaires nationales relève de l’autonomie procédurale des États membres. Elle est toutefois soumise aux principes d’équivalence et d’effectivité.
a) Le principe d’effectivité n’exige pas que l’autorité de la chose jugée qui s’attache à un jugement soit limitée aux motifs constituant le soutien nécessaire de celui-ci.
b) Une juridiction nationale est tenue, en vertu des principes d’équivalence et d’effectivité, d’écarter les constatations revêtues de l’autorité de la chose jugée afin de restaurer la conformité de la situation en cause avec le droit de l’Union, dans le cas où les règles de procédure internes applicables comportent cette possibilité pour les affaires strictement nationales. Si la juridiction dispose d’un pouvoir discrétionnaire, elle doit notamment prendre en considération le point de savoir si la partie désavantagée par la constatation revêtue de l’autorité de la chose jugée avait la possibilité de remettre en cause cette constatation en introduisant un recours et s’il y avait égalité des armes entre les parties à cet égard. Le point de savoir si une demande de décision préjudicielle a été adressée à la Cour antérieurement à la constatation revêtue de l’autorité de la chose jugée ou si, antérieurement à cette constatation, les parties ont présenté à la juridiction nationale la jurisprudence pertinente de la Cour revêt, en revanche, une importance moindre pour l’exercice dudit pouvoir discrétionnaire.