Language of document : ECLI:EU:C:2023:1014

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

21 décembre 2023 (*)

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Contrat de leasing relatif à un véhicule automobile sans obligation d’achat – Directive 2008/48/CE – Article 2, paragraphe 2, sous d) – Notion de contrat de crédit-bail sans obligation d’achat de l’objet du contrat – Directive 2002/65/CE – Article 1er, paragraphe 1, et article 2, sous b) – Notion de contrat de services financiers – Directive 2011/83/UE – Article 2, point 6, et article 3, paragraphe 1 – Notion de contrat de service – Article 2, point 7 – Notion de contrat à distance – Article 2, point 8 – Notion de contrat hors établissement – Article 16, sous l) – Exception au droit de rétractation au titre d’une prestation de services de location de voitures – Contrat de crédit destiné à l’achat d’un véhicule automobile – Directive 2008/48 – Article 10, paragraphe 2 – Exigences relatives aux informations devant être mentionnées dans le contrat – Présomption de respect de l’obligation d’information en cas de recours à un modèle réglementaire d’information – Absence d’effet direct horizontal d’une directive – Article 14, paragraphe 1 – Droit de rétractation – Début du délai de rétractation en cas d’informations incomplètes ou inexactes – Caractère abusif de l’exercice du droit de rétractation – Forclusion du droit de rétractation – Obligation de restitution préalable du véhicule en cas d’exercice du droit de rétractation à l’égard d’un contrat de crédit lié »

Dans les affaires jointes C‑38/21, C‑47/21 et C‑232/21,

ayant pour objet trois demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par le Landgericht Ravensburg (tribunal régional de Ravensburg, Allemagne), par décision du 30 décembre 2020, parvenue à la Cour le 22 janvier 2021 et complétée par une décision du 24 août 2021, parvenue à la Cour le 1er septembre 2021 (affaire C‑38/21), par décision du 8 janvier 2021, parvenue à la Cour le 28 janvier 2021 (affaire C‑47/21), et par décision du 19 mars 2021, parvenue à la Cour le 12 avril 2021 (affaire C‑232/21), dans les procédures

VK

contre

BMW Bank GmbH (C‑38/21),

et

F. F.

contre

C. Bank AG (C‑47/21),

et

CR,

AY,

ML,

BQ

contre

Volkswagen Bank GmbH,

Audi Bank (C‑232/21),

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, M. L. Bay Larsen, vice-président, Mme K. Jürimäe, MM. C. Lycourgos, E. Regan, F. Biltgen, N. Piçarra, Z. Csehi, présidents de chambre, MM. M. Safjan (rapporteur), S. Rodin, P. G. Xuereb, Mme I. Ziemele, MM. J. Passer, D. Gratsias et Mme M. L. Arastey Sahún, juges,

avocat général : M. A. M. Collins,

greffier : Mme M. Krausenböck, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 septembre 2022,

considérant les observations présentées :

–        pour CR, AY, ML et BQ par Mes M. Basun, D. Er et A. Esser, Rechtsanwälte,

–        pour BMW Bank GmbH, par Mes A. Ederle et R. Hall, Rechtsanwälte,

–        pour C. Bank AG, par Me T. Winter, Rechtsanwalt,

–        pour Volkswagen Bank GmbH et Audi Bank, par Mes I. Heigl, T. Winter et B. Zerelles, Rechtsanwälte,

–        pour le gouvernement allemand, par MM. J. Möller, U. Bartl, M. Hellmann et U. Kühne, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par Mme G. Goddin, M. B.‑R. Killmann et Mme I. Rubene, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 février 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de l’article 2, sous a) et b), de la directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 septembre 2002, concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE (JO 2002, L 271, p. 16), de l’article 3, sous c), de l’article 10, paragraphe 2, sous l), p), r) et t), ainsi que de l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66), de l’article 2, points 7, 9 et 12, ainsi que de l’article 16, sous l), de la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil (JO 2011, L 304, p. 64), ainsi que de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE.

2        Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant VK à BMW Bank GmbH (affaire C‑38/21), F. F. à C. Bank AG (affaire C‑47/21) ainsi que CR à Volkswagen Bank GmbH et AY, ML et BQ à Audi Bank (affaire C‑232/21), au sujet de l’exercice, par VK, F. F., CR, AY, ML et BQ, du droit de rétractation relatif à des contrats que ceux-ci ont conclus, en leur qualité de consommateurs, avec ces banques.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 2002/65

3        Les considérants 14, 15 et 19 de la directive 2002/65 sont libellés comme suit :

« (14)      La présente directive couvre tous les services financiers qui peuvent être fournis à distance. Certains services financiers sont cependant régis par des dispositions spécifiques de la législation communautaire, lesquelles continuent à s’appliquer à ces services financiers. Il convient, toutefois, d’établir des principes relatifs à la commercialisation à distance de tels services.

(15)      Les contrats négociés à distance impliquent l’utilisation de techniques de communication à distance qui sont utilisées dans le cadre d’un système de vente ou de prestation de services à distance sans qu’il y ait présence simultanée du fournisseur et du consommateur. L’évolution permanente de ces techniques impose de définir des principes valables même pour celles qui ne sont encore que peu utilisées. Les contrats à distance sont donc ceux dont l’offre, la négociation et la conclusion sont effectuées à distance.

[...]

(19)      Le fournisseur est la personne qui fournit des services à distance. La présente directive devrait, toutefois, également s’appliquer lorsqu’une des étapes de la commercialisation se déroule avec la participation d’un intermédiaire. Eu égard à la nature et au degré de cette participation, les dispositions pertinentes de la présente directive devraient s’appliquer à cet intermédiaire, indépendamment de son statut juridique. »

4        L’article 1er de la directive 2002/65, intitulé « Objet et champ d’application », dispose, à son paragraphe 1 :

« La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs. »

5        Aux termes de l’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions » :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)      “contrat à distance” : tout contrat concernant des services financiers conclu entre un fournisseur et un consommateur dans le cadre d’un système de vente ou de prestations de services à distance organisé par le fournisseur, qui, pour ce contrat, utilise exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à, et y compris, la conclusion du contrat ;

b)      “service financier” : tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l’assurance, aux retraites individuelles, aux investissements et aux paiements ;

[...] »

6        L’article 6 de ladite directive, intitulé « Droit de rétractation », prévoit :

« 1.      Les États membres veillent à ce que le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours calendrier pour se rétracter, sans pénalité et sans indication de motif. [...]

[...]

2.      Le droit de rétractation ne s’applique pas :

[...]

c)      aux contrats exécutés intégralement par les deux parties à la demande expresse du consommateur avant que ce dernier n’exerce son droit de rétractation.

[...] »

 La directive 2008/48

7        Les considérants 7 à 10, 31, 34 et 35 de la directive 2008/48 énoncent :

« (7)      Afin de faciliter l’émergence d’un marché intérieur performant en matière de crédit aux consommateurs, il est nécessaire de prévoir un cadre communautaire harmonisé dans un certain nombre de domaines clés. Compte tenu du développement constant du marché du crédit aux consommateurs et de la mobilité croissante des citoyens européens, une législation communautaire tournée vers l’avenir, capable de s’adapter aux futures formes du crédit et offrant aux États membres un degré de souplesse approprié dans la transposition de ses dispositions, devrait permettre d’établir un ensemble moderne de règles sur le crédit aux consommateurs.

(8)      Il importe, pour inspirer confiance aux consommateurs, que le marché puisse leur offrir un niveau suffisant de protection. Ainsi, il convient que la libre circulation des offres de crédits puisse s’effectuer dans des conditions optimales, tant pour les offrants que pour les demandeurs, dans le respect des situations spécifiques existant dans les différents États membres.

(9)      Une harmonisation complète est nécessaire pour assurer à tous les consommateurs de la Communauté un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts et pour créer un véritable marché intérieur. Par conséquent, les États membres ne devraient pas être autorisés à maintenir ou introduire des dispositions nationales autres que celles prévues par la présente directive. En l’absence de telles dispositions harmonisées, les États membres devraient cependant être libres de maintenir ou d’introduire des dispositions législatives nationales. Par conséquent, les États membres peuvent, par exemple, maintenir ou introduire des dispositions nationales sur la responsabilité solidaire du vendeur ou du prestataire de services et du prêteur. De même, les États membres pourraient, par exemple, maintenir ou introduire des dispositions nationales sur l’annulation d’un contrat de vente de biens ou de prestation de services lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation dans le cadre du contrat de crédit. [...]

(10)      Les définitions contenues dans la présente directive déterminent la portée de l’harmonisation. L’obligation qui incombe aux États membres de mettre en œuvre les dispositions de la présente directive devrait, dès lors, être limitée au champ d’application de la présente directive, tel qu’il résulte de ces définitions. Toutefois, la présente directive devrait être sans préjudice de l’application par les États membres, conformément au droit communautaire, des dispositions de la présente directive à des domaines qui ne relèvent pas de son champ d’application. Dès lors, un État membre pourrait maintenir ou introduire des dispositions nationales correspondant aux dispositions de la présente directive ou à certaines de ses dispositions pour les contrats de crédit n’entrant pas dans le champ d’application de la présente directive, par exemple les contrats de crédit dont le montant est inférieur à 200 [euros (EUR)] ou supérieur à 75 000 EUR. En outre, les États membres pourraient également appliquer les dispositions de la présente directive au crédit lié qui ne relève pas de la définition du contrat de crédit lié figurant dans la présente directive. Par conséquent, les dispositions sur le contrat de crédit lié pourraient être appliquées aux contrats de crédit qui ne servent qu’en partie à financer un contrat relatif à la fourniture de biens ou la prestation de services.

[...]

(31)      Afin que le consommateur soit en mesure de connaître ses droits et obligations au titre du contrat de crédit, celui-ci devrait contenir de façon claire et concise toutes les informations nécessaires.

[...]

(34)      Afin de rapprocher les modalités d’exercice du droit de rétractation dans des domaines similaires, il est nécessaire de prévoir un droit de rétractation sans pénalité et sans obligation de justification dans des conditions similaires à celles prévues par la directive 2002/65[...]

(35)      Lorsque le consommateur se rétracte dans le cadre d’un contrat de crédit en vertu duquel il a reçu des biens, en particulier dans le cas d’un achat payé par versements échelonnés ou d’un contrat de location ou de crédit-bail assorti d’une obligation d’achat, la présente directive devrait s’appliquer sans préjudice de toute disposition des États membres réglant les questions relatives à la restitution des biens ou toute autre question connexe.

[...] »

8        L’article 1er de la directive 2008/48, intitulé « Objet », dispose :

« La présente directive a pour objet d'harmoniser certains aspects des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de contrats de crédit aux consommateurs. »

9        L’article 2 de cette directive, intitulé « Champ d’application », prévoit :

« 1.      La présente directive s’applique aux contrats de crédit.

2.      La présente directive ne s’applique pas :

[...]

d)      aux contrats de location ou de crédit-bail dans le cadre desquels l’obligation d’acheter l’objet du contrat n’est prévue ni par le contrat lui-même ni par un contrat séparé ; une telle obligation est réputée exister si le prêteur en décide ainsi unilatéralement ;

[...] »

10      L’article 3 de ladite directive, intitulé « Définitions », dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

c)      “contrat de crédit” un contrat en vertu duquel un prêteur consent ou s’engage à consentir à un consommateur un crédit sous la forme d’un délai de paiement, d’un prêt ou de toute autre facilité de paiement similaire, à l’exception des contrats conclus en vue de la prestation continue de services ou de la livraison de biens de même nature, aux termes desquels le consommateur règle le coût desdits services ou biens, aussi longtemps qu’ils sont fournis, par des paiements échelonnés ;

[...]

i)      “taux annuel effectif global” : le coût total du crédit pour le consommateur, exprimé en pourcentage annuel du montant total du crédit, en tenant compte, le cas échéant, des frais visés à l’article 19, paragraphe 2 ;

[...]

n)      “contrat de crédit lié” : un contrat de crédit en vertu duquel :

i)      le crédit en question sert exclusivement à financer un contrat relatif à la fourniture de biens particuliers ou la prestation de services particuliers ; et

ii)      ces deux contrats constituent, d’un point de vue objectif, une unité commerciale ; une unité commerciale est réputée exister lorsque le fournisseur ou le prestataire de services finance lui-même le crédit au consommateur ou, en cas de financement par un tiers, lorsque le prêteur recourt aux services du fournisseur ou du prestataire pour la conclusion ou la préparation du contrat de crédit ou lorsque des biens particuliers ou la fourniture d’un service particulier sont mentionnés spécifiquement dans le contrat de crédit.

[...] »

11      L’article 10 de la directive 2008/48, intitulé « Information à mentionner dans les contrats de crédit », est libellé comme suit, à son paragraphe 2 :

« Le contrat de crédit mentionne, de façon claire et concise :

[...]

l)      le taux d’intérêt applicable en cas de retard de paiement applicable au moment de la conclusion du contrat de crédit et les modalités d’adaptation de ce taux, ainsi que, le cas échéant, les frais d’inexécution ;

[...]

p)      l’existence ou l’absence d’un droit de rétractation, la période durant laquelle ce droit peut être exercé et les autres conditions pour l’exercer, y compris des informations sur l’obligation incombant au consommateur de payer le capital prélevé (draw down) et les intérêts conformément à l’article 14, paragraphe 3, point b), et le montant de l’intérêt journalier ;

[...]

r)      le droit au remboursement anticipé, la procédure à suivre en cas de remboursement anticipé ainsi que, le cas échéant, des informations sur le droit du prêteur à une indemnité et le mode de calcul de cette indemnité ;

[...]

t)      l’existence ou non de procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours accessibles au consommateur et, si de telles procédures existent, les modalités d’accès à ces dernières ;

[...] »

12      L’article 14 de cette directive, intitulé « Droit de rétractation », prévoit :

« 1.      Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours calendaires pour se rétracter dans le cadre du contrat de crédit sans donner de motif.

Ce délai de rétractation commence à courir :

a)      le jour de la conclusion du contrat de crédit, ou

b)      le jour où le consommateur reçoit les clauses et conditions contractuelles ainsi que les informations prévues à l’article 10, si cette date est postérieure à celle visée au point a) du présent alinéa.

[...]

3.      Si le consommateur exerce son droit de rétractation :

a)      pour que sa rétractation soit effective avant l’expiration du délai visé au paragraphe 1, il la notifie au prêteur, en suivant les informations fournies par ce dernier conformément à l’article 10, paragraphe 2, point p), et de manière à ce que la preuve de cette notification puisse être administrée conformément à la législation nationale. Le délai est réputé respecté si la notification, à condition d’avoir été faite sur un support papier ou sur un autre support durable à la disposition du prêteur et auquel il a accès, a été envoyée avant l’expiration du délai ; et

b)      il paie au prêteur le capital et les intérêts cumulés sur ce capital depuis la date à laquelle le crédit a été prélevé jusqu’à la date à laquelle le capital est payé, sans retard indu et au plus tard trente jours calendaires après avoir envoyé la notification de la rétractation au prêteur. Les intérêts sont calculés sur la base du taux débiteur convenu. Le prêteur n’a droit à aucune autre indemnité versée par le consommateur en cas de rétractation, excepté une indemnité pour les frais non récupérables que le prêteur aurait payés à une administration publique.

4.      Si un service accessoire lié au contrat de crédit est fourni par le prêteur ou par un tiers sur la base d’un contrat entre le tiers et le prêteur, le consommateur n’est plus tenu par le contrat de service accessoire s’il exerce son droit de rétractation à l’égard du contrat de crédit conformément au présent article.

[...] »

13      L’article 22 de ladite directive, intitulé « Harmonisation et caractère impératif de la présente directive », dispose, à son paragraphe 1 :

« Dans la mesure où la présente directive contient des dispositions harmonisées, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive. »

 La directive 2011/83

14      Les considérants 20 à 22, 37 et 49 de la directive 2011/83 sont libellés comme suit :

« (20)      La définition du contrat à distance devrait couvrir tous les cas dans lesquels un contrat est conclu entre le professionnel et le consommateur dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de service à distance par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance (vente par correspondance, internet, téléphone ou fax), jusqu’au moment, et y compris au moment, où le contrat est conclu. Cette définition devrait également couvrir les situations où le consommateur visite l’établissement commercial uniquement afin de collecter des informations sur les biens ou les services, puis négocie et conclut le contrat à distance. En revanche, un contrat qui est négocié dans l’établissement commercial du professionnel et qui est finalement conclu en recourant à une technique de communication à distance ne devrait pas être considéré comme un contrat à distance. Un contrat qui est ébauché en recourant à une technique de communication à distance, mais qui est finalement conclu dans l’établissement commercial du professionnel, ne devrait pas non plus être considéré comme un contrat à distance. [...] La notion de système organisé de vente ou de prestation de service à distance devrait inclure les systèmes proposés par un tiers autre que le professionnel mais utilisés par ce dernier, par exemple une plateforme en ligne. Elle ne devrait pas couvrir, cependant, les cas où des sites internet offrent uniquement des informations sur le professionnel, ses biens et/ou ses services ainsi que ses coordonnées.

(21)      Un contrat hors établissement devrait être défini comme un contrat conclu en la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, ailleurs que dans l’établissement commercial du professionnel, par exemple au domicile du consommateur ou à son lieu de travail. Dans un contexte hors établissement, le consommateur peut être soumis à une pression psychologique éventuelle ou être confronté à un élément de surprise, qu’il ait ou non sollicité la visite du professionnel. La définition d’un contrat hors établissement devrait également viser des situations dans lesquelles le consommateur est sollicité personnellement et individuellement dans un contexte hors établissement, mais où le contrat est conclu immédiatement après, dans l’établissement commercial du professionnel ou par le recours à une technique de communication à distance. La définition du contrat hors établissement ne devrait pas couvrir les situations dans lesquelles le professionnel vient tout d’abord au domicile du consommateur, uniquement pour prendre des mesures ou donner une estimation sans engagement de la part du consommateur, le contrat n’étant conclu que plus tard, dans l’établissement commercial du professionnel ou au moyen de la communication à distance, sur la base de l’estimation du professionnel. Dans ces cas, le contrat n’est pas considéré comme ayant été conclu immédiatement après que le professionnel a sollicité le consommateur si le consommateur a eu le temps de réfléchir à l’estimation du professionnel avant de conclure le contrat. Les achats effectués lors d’une excursion organisée par le professionnel, au cours de laquelle les produits acquis sont promus et mis en vente, devraient être considérés comme des contrats hors établissement.

(22)      Il convient de considérer comme établissement commercial tout établissement, de quelque type que ce soit (qu’il s’agisse par exemple d’un magasin, d’un étal ou d’un camion), servant de siège d’activité permanent ou habituel au professionnel. [...] L’établissement commercial d’une personne agissant au nom ou pour le compte du professionnel, conformément à la définition de la présente directive, devrait être considéré comme un établissement professionnel au sens de la présente directive. 

[...]

(37)      [...] En ce qui concerne les contrats hors établissement, le consommateur devrait avoir un droit de rétractation, compte tenu de la pression psychologique et/ou de l’élément de surprise éventuels. [...]

[...]

(49)      Des exceptions au droit de rétractation devraient exister, tant pour les contrats à distance que pour les contrats hors établissement. [...] Le droit de rétractation ne devrait pas s’appliquer aux biens fabriqués sur demande précise du consommateur [...] L’octroi d’un droit de rétractation au consommateur pourrait également être inapproprié dans le cas de certains services pour lesquels la conclusion du contrat implique la réservation de capacités que le professionnel aura peut-être des difficultés à remplir en cas d’exercice du droit de rétractation. Tel pourrait être le cas par exemple pour les réservations d’hôtels et de résidences de vacances ou pour des événements culturels ou sportifs. »

15      L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

2)      “professionnel”, toute personne physique ou morale, qu’elle soit publique ou privée, qui agit, y compris par l’intermédiaire d’une autre personne agissant en son nom ou pour son compte, aux fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale en ce qui concerne des contrats relevant de la présente directive ;

[...]

5)      “contrat de vente”, tout contrat en vertu duquel le professionnel transfère ou s’engage à transférer la propriété des biens au consommateur et le consommateur paie ou s’engage à payer le prix de ceux-ci, y compris les contrats ayant à la fois pour objet des biens et des services ;

6)      “contrat de service”, tout contrat autre qu’un contrat de vente en vertu duquel le professionnel fournit ou s’engage à fournir un service au consommateur et le consommateur paie ou s’engage à payer le prix de celui-ci ;

7)      “contrat à distance”, tout contrat conclu entre le professionnel et le consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de service à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance, jusqu’au moment, et y compris au moment, où le contrat est conclu ;

8)      “contrat hors établissement”, tout contrat entre le professionnel et le consommateur :

a)      conclu en la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, dans un lieu qui n’est pas l’établissement commercial du professionnel ; ou

b)      ayant fait l’objet d’une offre du consommateur dans les mêmes circonstances, comme indiqué au point a) ; ou

c)      conclu dans l’établissement commercial du professionnel ou au moyen d’une technique de communication à distance immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu qui n’est pas l’établissement commercial du professionnel, en la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur ; ou

d)      conclu pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur ;

9)      “établissement commercial” :

a)      tout site commercial immeuble où le professionnel exerce son activité en permanence ; ou

b)      tout site commercial meuble où le professionnel exerce son activité de manière habituelle ;

[...]

12)      “service financier”, tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l’assurance, aux pensions individuelles, aux investissements ou aux paiements ;

[...] »

16      L’article 3 de ladite directive, intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.      La présente directive s’applique, dans les conditions et dans la mesure prévues par ses dispositions, à tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur. Elle s’applique également aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz, d’électricité ou de chauffage urbain, y compris par des fournisseurs publics, dans la mesure où ces biens sont fournis sur une base contractuelle.

[...]

3.      La présente directive ne s’applique pas aux contrats :

[...]

d)      portant sur les services financiers ;

[...] »

17      L’article 6 de la même directive, intitulé « Obligations d’information concernant les contrats à distance et les contrats hors établissement », est libellé comme suit, à son paragraphe 1 :

« 1.      Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat à distance ou hors établissement ou par une offre du même type, le professionnel lui fournit, sous une forme claire et compréhensible, les informations suivantes :

a)      les principales caractéristiques du bien ou du service, dans la mesure appropriée au support de communication utilisé et au bien ou service concerné ;

[...]

e)      le prix total des biens ou services toutes taxes comprises ou, lorsque le prix ne peut être raisonnablement calculé à l’avance du fait de la nature du bien ou du service, le mode de calcul du prix [...] ;

[...]

g)      les modalités de paiement, de livraison et d’exécution, la date à laquelle le professionnel s’engage à livrer les biens ou à exécuter les services et, le cas échéant, les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations ;

[...]

o)      la durée du contrat, s’il y a lieu, ou, s’il s’agit d’un contrat à durée indéterminée ou à reconduction automatique, les conditions de résiliation du contrat ;

[...] »

18      L’article 9 de la directive 2011/83, intitulé « Droit de rétractation », prévoit :

« 1.      En dehors des cas où les exceptions prévues à l’article 16 s’appliquent, le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour se rétracter d’un contrat à distance ou d’un contrat hors établissement sans avoir à motiver sa décision et sans encourir d’autres coûts que ceux prévus à l’article 13, paragraphe 2, et à l’article 14.

2.      Sans préjudice de l’article 10, le délai de rétractation visé au paragraphe 1 du présent article expire après une période de quatorze jours à compter :

a)      en ce qui concerne les contrats de service, du jour de la conclusion du contrat ;

[...] »

19      Aux termes de l’article 16 de cette directive, intitulé « Exceptions au droit de rétractation » :

« Les États membres ne prévoient pas le droit de rétractation énoncé aux articles 9 à 15 pour ce qui est des contrats à distance et des contrats hors établissement en ce qui concerne ce qui suit :

[...]

c)      la fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ;

[...]

l)      la prestation de services d’hébergement autres qu’à des fins résidentielles, de transport de biens, de location de voitures, de restauration ou de services liés à des activités de loisirs si le contrat prévoit une date ou une période d’exécution spécifique ;

[...] »

 Le droit allemand

 La loi fondamentale

20      L’article 25 du Grundgesetz für die Bundesrepublik Deutschland (loi fondamentale pour la République fédérale d’Allemagne) (ci-après la « loi fondamentale ») est libellé comme suit :

« Les règles générales du droit international public font partie du droit fédéral. Elles sont supérieures aux lois et créent directement des droits et des obligations pour les habitants du territoire fédéral. »

 Le code civil

21      L’article 242 du Bürgerliches Gesetzbuch (code civil) (ci-après le « BGB »), intitulé « Prestation de bonne foi », dispose :

« Le débiteur a l’obligation d’exécuter la prestation comme l’exige la bonne foi, eu égard aux usages. »

22      L’article 247 du BGB, intitulé « Taux de l’intérêt de base », prévoit :

« (1)      Le taux de l’intérêt de base s’élève à 3,62 %. Au 1er janvier et au 1er juillet de chaque année, il est modifié du pourcentage dont la valeur de référence a augmenté ou a diminué depuis la dernière modification qu’il a enregistrée. La valeur de référence correspond au taux d’intérêt fixé par la Banque centrale européenne pour l’opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre concerné.

(2)      La Deutsche Bundesbank [Banque fédérale d’Allemagne] publie le taux d’intérêt de base en vigueur dans le Bundesanzeiger [Journal officiel allemand] immédiatement après les dates indiquées à la deuxième phrase du premier paragraphe. »

23      L’article 273 du BGB, intitulé « Droit de rétention », dispose, à son paragraphe 1 :

« Si le débiteur a une créance exigible à l’égard du créancier découlant du même rapport juridique que celui sur lequel se fonde son obligation, il peut, sauf convention contraire, refuser la prestation due jusqu’à ce que la prestation qui lui est due soit fournie (droit de rétention). »

24      Aux termes de l’article 274 du BGB, intitulé « Effets du droit de rétention » :

« (1)      En ce qui concerne l’action du créancier, l’invocation du droit de rétention a pour seul effet que le débiteur doit être condamné à s’exécuter en contrepartie de la réception de la prestation qui lui est due (exécution simultanée).

(2)      Sur la base d’une telle condamnation, le créancier peut demander l’exécution forcée de sa créance, sans que la prestation qui lui incombe ne soit exécutée, si le débiteur se trouve en retard de réception. »

25      L’article 288 du BGB, intitulé « Intérêts de retard et autre indemnisation », est libellé comme suit, à son paragraphe 1 :

« Toute dette de somme d’argent produit intérêt pendant le retard. Le taux de l’intérêt de retard s’élève à cinq points de pourcentage par an au-dessus de l’intérêt de base. »

26      L’article 293 du BGB, intitulé « Retard de réception », prévoit :

« Le créancier se trouve en retard s’il n’accepte pas la prestation qui lui est offerte. »

27      L’article 294 du BGB, intitulé « Offre effective », dispose :

« La prestation doit être offerte de manière effective au créancier telle qu’elle doit être exécutée. »

28      Aux termes de l’article 295 du BGB, intitulé « Offre verbale » :

« Une offre verbale du débiteur est suffisante lorsque le créancier lui a déclaré qu’il n’acceptera pas l’exécution de la prestation, ou lorsqu’une action du créancier est nécessaire pour l’exécution de la prestation, notamment lorsque c’est à lui d’aller retirer la chose. Une offre d’exécution de la prestation équivaut à une demande adressée au créancier d’accomplir l’acte nécessaire. »

29      L’article 312b du BGB, intitulé « Contrats hors-établissement », est libellé comme suit :

« (1)      Les contrats hors-établissement sont des contrats

1.      conclus en présence physique simultanée du consommateur et du professionnel, à un endroit qui n’est pas un établissement commercial du professionnel,

2.      ayant fait l’objet d’une offre du consommateur dans les circonstances visées au point 1,

3.      conclus dans l’établissement commercial du professionnel ou au moyen d’une technique de communication à distance mais pour lesquels le consommateur a été, immédiatement avant, sollicité personnellement et individuellement à l’extérieur de l’établissement commercial du professionnel, en la présence physique simultanée du consommateur et du professionnel, ou

4.      conclus pendant une excursion organisée par le professionnel ou avec son aide afin de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur et afin de conclure les contrats correspondants avec lui.

Sont assimilées à un professionnel les personnes qui agissent en son nom ou pour son compte.

(2)      Les établissements commerciaux au sens du premier paragraphe sont des sites commerciaux immeubles où le professionnel exerce son activité en permanence et des sites commerciaux meubles où le professionnel exerce son activité de manière habituelle. Sont assimilés aux établissements du professionnel les sites commerciaux où la personne agissant au nom ou pour le compte du professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle. »

30      L’article 312c du BGB, intitulé « Contrats à distance », dispose :

« (1)      On entend par “contrats à distance” les contrats dans lesquels le professionnel, ou une personne agissant en son nom ou pour son compte, et le consommateur ont exclusivement recours à des techniques de communication à distance pour la négociation et la conclusion du contrat, sauf lorsque la conclusion du contrat n’intervient pas dans le cadre d’un système de vente ou de prestation de services organisé pour la vente à distance.

(2)      Les moyens de communication à distance au sens de la présente loi sont tous les moyens de communication qui peuvent être mis en œuvre pour la préparation ou la conclusion d’un contrat sans la présence physique simultanée des parties contractantes, tels que les lettres, catalogues, appels téléphoniques, télécopies, courriers électroniques, messages envoyés par l’intermédiaire d’un service de téléphonie mobile (SMS) ainsi que la radiodiffusion et les télémédias. »

31      L’article 312g du BGB, intitulé « Droit de rétractation », prévoit :

« (1)      En matière de contrats hors établissement ou de contrats à distance, le consommateur dispose d’un droit de rétractation conformément à l’article 355.

(2)      Sauf lorsque les parties en ont convenu autrement, il n’existe pas de droit de rétractation pour les contrats suivants :

1.      Les contrats de fourniture de biens non préfabriqués et réalisés sur la base d’un choix individuel ou de spécifications du consommateur ou qui sont clairement adaptés aux besoins personnels de celui–ci,

[...]

9.      Les contrats de prestation de services d’hébergement autres qu’à des fins résidentielles, de transport de biens, de location de voitures, de restauration ou de services liés à des activités de loisirs si le contrat prévoit une date ou une période d’exécution spécifique.

[...] »

32      L’article 322 du BGB, intitulé « Condamnation à l’exécution simultanée », est libellé comme suit, à son paragraphe 2 :

« Si la partie qui intente l’action doit préalablement exécuter la prestation, elle peut, si l’autre partie se trouve en retard de réception, demander l’exécution après réception de la contre-prestation. »

33      Aux termes de l’article 355 du BGB, intitulé « Droit de rétractation dans les contrats conclus avec les consommateurs » :

« (1)      Lorsque la loi confère au consommateur un droit de rétractation conformément à la présente disposition, le consommateur et le professionnel cessent d’être liés par leurs déclarations de volonté de conclure le contrat si le consommateur a rétracté sa déclaration en ce sens dans le délai imparti. [...]

(2)      Le délai de rétractation s’élève à 14 jours. Sauf dispositions contraires, il commence à courir au moment de la conclusion du contrat.

[...] »

34      L’article 356b du BGB, intitulé « Droit de rétractation dans les contrats de crédit à la consommation », prévoit, à son paragraphe 2 :

« Si, dans le cadre d’un contrat de crédit à la consommation général, l’acte remis à l’emprunteur en vertu du premier paragraphe ne contient pas les informations obligatoires prévues à l’article 492, paragraphe 2, le délai ne commence à courir que lorsqu’il est remédié à cette carence conformément à l’article 492, paragraphe 6. [...] »

35      L’article 357 du BGB, intitulé « Conséquences juridiques de la rétractation de contrats conclus en dehors des établissements commerciaux et à distance, à l’exception des contrats relatifs aux services financiers », dispose :

« (1)      Les prestations reçues doivent faire l’objet d’une restitution au plus tard après 14 jours. 

[...]

(4)      Lorsqu’il s’agit de biens de consommation, le professionnel peut refuser le remboursement jusqu’à ce qu’il ait récupéré les marchandises ou que le consommateur ait fourni la preuve qu’il les a expédiées. Cela ne s’applique pas lorsque le professionnel a proposé de venir chercher les marchandises. »

36      L’article 357 du BGB, dans sa version en vigueur au 31 janvier 2012, applicable à la situation de BQ dans l’affaire C‑232/21, était libellé comme suit :

« (1)      Sauf disposition contraire, les règles concernant la renonciation légale s’appliquent par analogie au droit de rétractation et de restitution.

[...] »

37      L’article 357a, paragraphe 1, du BGB, intitulé « Conséquences juridiques de la rétractation de contrats relatifs aux services financiers », prévoit :

« (1)      Les prestations reçues doivent faire l’objet d’une restitution au plus tard après 30 jours.

[...]

(3)      En cas de rétractation de contrats de prêts à la consommation, l’emprunteur doit payer l’intérêt débiteur convenu pour la période allant du versement au remboursement du crédit. [...] »

38      L’article 358 du BGB, intitulé « Contrat lié au contrat rétracté », dispose :

« [...]

(2)      Si le consommateur, sur le fondement de l’article 495, paragraphe 1, ou de l’article 514, paragraphe 2, première phrase, a valablement rétracté sa déclaration de volonté tendant à la conclusion d’un contrat de crédit à la consommation, il n’est plus lié non plus par la déclaration de volonté tendant à la conclusion d’un contrat, lié à ce contrat de crédit à la consommation, ayant pour objet la livraison d’une marchandise ou la fourniture d’une autre prestation.

(3)      Un contrat ayant pour objet la livraison d’une marchandise ou la fourniture d’une autre prestation et un contrat de crédit en vertu des paragraphes 1 et 2 sont liés si le crédit sert à financer en totalité ou en partie l’autre contrat et s’ils forment tous les deux une unité économique. Il y a lieu de considérer qu’il y a unité économique, en particulier, lorsque le professionnel finance lui-même la contre-prestation du consommateur ou, en cas de financement par un tiers, lorsque le prêteur fait participer le professionnel à la préparation ou à la conclusion du contrat de crédit. [...]

(4)      L’article 355, paragraphe 3, et, selon le type de contrat lié, les articles 357 à 357b, s’appliquent par analogie à la résolution du contrat lié, indépendamment du mode de commercialisation. [...] Le prêteur assume dans les rapports avec le consommateur les droits et obligations du professionnel résultant du contrat lié quant aux conséquences juridiques de la rétractation si, au moment où elle prend effet, le montant du prêt a déjà été versé au professionnel.

[...] »

39      L’article 358 du BGB, dans sa version en vigueur au 31 janvier 2012, applicable à la situation de BQ dans l’affaire C‑232/21, était libellé comme suit :

« [...]

(2)      Si le consommateur, sur le fondement de l’article 495, paragraphe 1, a valablement rétracté sa déclaration de volonté tendant à la conclusion d’un contrat de crédit à la consommation, il n’est plus lié non plus par la déclaration de volonté tendant à la conclusion d’un contrat lié à ce contrat de crédit à la consommation, ayant pour objet la livraison d’une marchandise ou la fourniture d’une autre prestation.

(3)      Un contrat ayant pour objet la livraison d’une marchandise ou la fourniture d’une autre prestation et un contrat de crédit en vertu des paragraphes 1 et 2 sont liés si le crédit sert à financer en totalité ou en partie l’autre contrat et s’ils forment tous les deux une unité économique. Il y a lieu de considérer qu’il y a unité économique, en particulier, lorsque le professionnel finance lui-même la contre-prestation du consommateur ou, en cas de financement par un tiers, lorsque le prêteur fait participer le professionnel à la préparation ou à la conclusion du contrat de crédit. [...]

(4)      L’article 357 s’applique par analogie au contrat lié. [...] Le prêteur assume dans les rapports avec le consommateur les droits et obligations du professionnel résultant du contrat lié quant aux conséquences juridiques de la rétractation ou de la restitution si, au moment où elle prend effet, le montant du prêt a déjà été versé au professionnel. »

40      L’article 492 du BGB, intitulé « Forme écrite, contenu du contrat », prévoit :

« [...]

(2)      Le contrat doit comporter les mentions prescrites pour tout contrat de prêt à la consommation, conformément à l’article 247, paragraphes 6 à 13, de l’Einführungsgesetz zum Bürgerlichen Gesetzbuch [(loi d’introduction au code civil), du 21 septembre 1994 (BGBl. 1994 I, p. 2494, et rectificatif BGBl. 1997 I, p. 1061, ci-après l’« EGBGB »)].

[...]

(6)      Si les mentions visées au paragraphe 2 ne figurent pas dans le contrat ou sont incomplètes, elles peuvent être ajoutées sur un support durable après la conclusion effective du contrat ou dans les cas visés à l’article 494, paragraphe 2, première phrase, une fois le contrat entré en vigueur.

[...] »

41      L’article 495 du BGB, intitulé « Droit de rétractation ; délai de réflexion », dispose, à son paragraphe 1 :

« Dans le cadre d’un contrat de crédit conclu avec un consommateur, l’emprunteur dispose d’un droit de rétractation conformément à l’article 355. »

42      L’article 495 du BGB, dans sa version en vigueur au 31 janvier 2012, applicable à la situation de BQ dans l’affaire C‑232/21, était libellé comme suit :

« (1)      Dans le cadre d’un contrat de crédit conclu avec un consommateur, l’emprunteur dispose d’un droit de rétractation conformément à l’article 355.

[...]

(2)      Les articles 355 à 359a s’appliquent à condition que :

1.      les informations obligatoires prévues à l’article 247, paragraphe 6, point 2, de l’EGBGB remplacent les informations sur la rétractation,

2.      le délai de rétractation ne commence, en outre, pas à courir

a)      avant la conclusion du contrat

b)      avant que l’emprunteur ait reçu les informations obligatoires visées à l’article 492, paragraphe 2, [...] »

43      L’article 506 du BGB, intitulé « Report de paiement, autre facilité de paiement », prévoit, à son paragraphe 1, que « [l]es dispositions des articles 358 à 360 et 491a à 502 ainsi que 505a à 505e régissant les contrats de crédit à la consommation généraux sont applicables par analogie, à l’exception de l’article 492, paragraphe 4, et sous réserve des paragraphes 3 et 4, aux contrats par lesquels un professionnel accorde à titre onéreux à un consommateur un report de paiement ou une autre facilité de paiement [...] ».

 La loi d’introduction au code civil

44      L’article 247 de l’EGBGB, intitulé « Exigences en matière d’information pour les contrats de prêt à la consommation, les aides financières rémunérées et les contrats d’intermédiation de crédit », dispose :

« [...]

§ 3      Contenu des informations précontractuelles dans le cas des contrats de crédits à la consommation généraux

(1)      Les informations fournies avant la conclusion du contrat doivent comprendre :

[...]

5.      le taux débiteur,

[...]

11.      le taux d’intérêt de retard et les modalités de l’éventuelle adaptation de celui–ci ainsi que, le cas échéant, les frais d’inexécution,

[...]

§ 6      Contenu du contrat

(1)      Les informations suivantes doivent figurer de manière claire et compréhensible dans le contrat de crédit à la consommation :

1.      les informations indiquées au paragraphe 3, premier alinéa, points 1 à 14, et au paragraphe 4.

[...]

(2)      S’il existe un droit de rétractation au sens de l’article 495 du BGB, le contrat doit mentionner les informations relatives au délai et aux autres circonstances de la déclaration de rétractation, ainsi que l’obligation incombant à l’emprunteur de rembourser le montant du prêt déjà versé, majoré d’intérêts. Le montant de l’intérêt journalier à payer doit être indiqué. Si le contrat de crédit à la consommation contient une clause mise en évidence et présentée clairement qui correspond au modèle de l’annexe 7 pour les crédits à la consommation généraux et de l’annexe 8 pour les crédits à la consommation immobiliers, celle–ci est réputée répondre aux exigences des première et deuxième phrases. [...] Le prêteur peut s’écarter du modèle en ce qui concerne le format et la taille des caractères, s’il respecte la troisième phrase.

§ 7      Autres informations devant figurer dans le contrat

(1)      Les informations suivantes doivent être formulées de manière claire et compréhensible dans le contrat de crédit à la consommation général, dans la mesure où elles revêtent une signification pour le contrat :

[...]

3.      la méthode de calcul de l’indemnité de remboursement anticipé, pour autant que le prêteur ait l’intention de faire valoir son droit à cette indemnité en cas de remboursement anticipé du prêt par l’emprunteur,

4.      l’accès de l’emprunteur à une procédure extrajudiciaire de réclamation et de recours et, le cas échéant, les conditions de cet accès.

[...]

§ 12      Contrats liés et facilités de paiement à titre onéreux

(1)      Les paragraphes 1 à 11 s’appliquent par analogie aux contrats visés à l’article 506, paragraphe 1, du BGB relatifs à des facilités de paiement à titre onéreux. S’agissant de ces contrats ou de contrats de prêts à la consommation qui sont liés à un autre contrat conformément à l’article 358 du BGB ou dans lesquels un bien ou un service est indiqué conformément à l’article 360, paragraphe 2, du BGB,

1.      les informations précontractuelles doivent contenir, même dans les cas de figure visés au paragraphe 5, l’objet et le prix au comptant,

2.      le contrat doit contenir

a)      l’objet et le prix au comptant, ainsi que

b)      des informations sur les droits découlant des articles 358 et 359 ou 360 du BGB, et les conditions d’exercice de ces droits.

Si le contrat de crédit à la consommation contient une clause mise en évidence et présentée clairement qui correspond au modèle de l’annexe 7 pour les crédits à la consommation généraux et de l’annexe 8 pour les crédits à la consommation immobiliers, en cas de contrats liés ou d’opérations visés à l’article 360, paragraphe 2, deuxième phrase, du BGB, celle–ci répondra aux exigences de la deuxième phrase, point 2, sous b).

[...] »

 Le code de procédure civile

45      L’article 348a de la Zivilprozessordnung (code de procédure civile) prévoit :

« (1)      Si la compétence initiale d’un juge unique conformément à l’article 348, paragraphe 1, n’est pas fondée, la chambre civile transfère l’affaire par ordonnance à l’un de ses membres afin qu’il statue, lorsque

1.      l’affaire ne présente pas de difficultés de fait ou de droit particulières,

2.      l’affaire n’a pas d’importance de principe et

3.      n’a pas encore été examinée au fond devant la chambre en audience principale, à moins qu’un jugement sous réserve, un jugement partiel ou un jugement intermédiaire ait été rendu entretemps.

(2)      Le juge unique renvoie le litige à la chambre civile afin que celle-ci s’en ressaisisse, lorsque

1.      des difficultés de fait ou de droit particulières de l’affaire ou l’importance de principe de l’affaire résultent d’une modification substantielle de la situation procédurale ou

2.      les parties le demandent à l’unanimité.

La chambre se ressaisit du litige lorsque les conditions prévues à la première phrase, point 1, sont réunies. Elle rend sa décision à cet égard par ordonnance, après avoir entendu les parties. Un nouveau transfert au juge unique est exclu.

(3)      Un recours ne peut pas être fondé sur un transfert, une soumission ou une prise en charge qui a eu lieu ou qui a été omis. »

 Les litiges au principal et les questions préjudicielles

 L’affaire C38/21

46      Intervenant en tant qu’intermédiaire de crédit pour BMW Bank, un employé d’un concessionnaire de la marque automobile BMW, dans les locaux duquel VK, le requérant au principal, s’est rendu, a proposé à ce dernier un véhicule automobile en leasing. Cet employé a procédé au calcul des différents éléments du leasing et a discuté avec VK de la durée de celui-ci ainsi que du montant du paiement initial et des mensualités qu’il conviendrait de verser en cas de conclusion du contrat de leasing. L’employé était habilité à fournir des renseignements sur le contrat envisagé, dont il connaissait les caractéristiques, et à répondre aux questions des clients potentiels. Il n’était en revanche pas habilité à conclure un contrat de leasing entre BMW Bank et les consommateurs s’adressant à lui. VK a soumis à ce concessionnaire une demande écrite de conclusion d’un contrat de leasing avec BMW Bank concernant un véhicule automobile affecté à un usage privé. Cette demande a ensuite été transmise à cette banque, laquelle l’a étudiée avant de l’accepter.

47      Ainsi, le 10 novembre 2018, VK a, au moyen d’une technique de communication à distance, conclu un contrat de leasing avec BMW Bank concernant un véhicule automobile affecté à un usage privé.

48      Il ressort du dossier dont dispose la Cour que BMW Bank a acquis le véhicule comportant les spécifications fournies par VK et qu’elle est demeurée propriétaire du véhicule pendant toute la durée du contrat.

49      Le contrat de leasing reposait sur l’octroi par BMW Bank d’un prêt soumis à un intérêt débiteur contractuel de 3,49 % par an pour toute la durée du contrat de leasing, le taux annuel effectif global s’élevant à 3,55 %. Compte tenu du fait que ce contrat était conclu pour une durée de 24 mois sans que VK ne soit tenu d’acheter le véhicule à l’échéance de celle-ci, il était stipulé que VK ne devait payer au total que la somme de 12 468,80 euros, correspondant à un paiement initial de 4 760 euros qui devait être versé au début de la période de leasing, au plus tard lors de la remise du véhicule, ainsi qu’à 24 mensualités de 321,95 euros. En outre, il a été convenu que VK devait respecter un forfait kilométrique annuel de 10 000 kilomètres et qu’il était tenu de payer, lors de la restitution du véhicule, la somme de 7,37 centimes par kilomètre supplémentaire parcouru, tandis qu’il lui serait remboursé la somme de 4,92 centimes par kilomètre non parcouru. Par ailleurs, VK était tenu de compenser la perte de valeur du véhicule s’il devait être constaté, lors de la restitution de celui-ci, que son état ne correspondait ni à son âge ni au kilométrage convenu. Enfin, ledit contrat stipulait qu’il incombait à VK de contracter une assurance tous risques pour ce véhicule, de faire valoir à l’égard des tiers les droits en matière de garantie des défauts et de supporter le risque de perte, de dommage et d’autres dépréciations.

50      VK a payé l’acompte et a pris possession du véhicule avant de verser les mensualités prévues par le contrat de leasing à partir de janvier 2019.

51      Par courrier du 25 juin 2020, VK a indiqué qu’il souhaitait se rétracter du contrat de leasing conformément aux dispositions du droit allemand.

52      Devant le Landgericht Ravensburg (tribunal régional de Ravensburg, Allemagne), la juridiction de renvoi, VK estime que, à cette dernière date, le délai de rétractation de quatorze jours prévu par ce droit n’avait pas encore commencé à courir, excipant notamment à cet égard du caractère insuffisant et illisible des informations obligatoires qui devaient lui être fournies en vertu dudit droit. En outre, VK considère que le contrat de leasing doit être qualifié de contrat à distance et/ou de contrat hors établissement, si bien qu’il bénéficie en tout état de cause du droit de rétractation prévu pour ce type de contrats en droit allemand. VK observe à ce sujet qu’il ne lui a pas été possible de demander des éclaircissements ni d’obtenir les informations obligatoires de la part de BMW Bank dès lors qu’aucun employé ou représentant de celle-ci n’était présent lors de la phase préparatoire à la conclusion du contrat, laquelle s’est déroulée dans les locaux du concessionnaire automobile.

53      Pour sa part, BMW Bank conteste notamment l’existence d’un droit de rétractation, au motif que les règles de rétractation relatives aux contrats de crédit à la consommation ne s’appliquent pas aux contrats de leasing tels que celui en cause au principal. En outre, elle aurait dûment communiqué à VK, dans le contrat de leasing la liant à celui-ci, l’ensemble des informations obligatoires prévues par le droit allemand. En particulier, l’information relative au droit de rétractation reprendrait très exactement le modèle réglementaire comportant les informations relatives au droit de rétractation (ci-après le « modèle légal »), de sorte que cette information devrait, conformément à ce droit, être présumée exacte. Par ailleurs, BMW Bank estime que le contrat ne peut pas être qualifié de contrat à distance, dans la mesure où VK a eu un contact personnel avec un intermédiaire de crédit qui a été en mesure de l’informer sur le service offert. Il ne s’agirait pas non plus d’un contrat hors établissement, l’intermédiaire de crédit devant être considéré comme agissant au nom ou pour le compte du professionnel.

54      La juridiction de renvoi observe, en premier lieu, que, jusqu’à une date récente, la jurisprudence allemande partait du principe que, en ce qui concerne des contrats de leasing tels que celui en cause au principal, il existait un droit de rétractation en application, par analogie, des dispositions nationales relatives aux contrats par lesquels un professionnel accorde à titre onéreux à un consommateur un report de paiement ou une autre facilité de paiement.

55      Cependant, par un arrêt du 24 février 2021, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) aurait considéré qu’une telle analogie ne pouvait être retenue en raison de la volonté du législateur allemand de ne pas reconnaître le droit de rétractation existant au titre des facilités de paiement pour les contrats de leasing tels que celui en cause au principal. Selon cette juridiction, une telle approche serait confortée par le droit de l’Union, puisque, en vertu de son article 2, paragraphe 2, sous d), la directive 2008/48 ne s’appliquerait pas aux contrats de location ou de crédit-bail (leasing) dans le cadre desquels il n’est pas prévu que le locataire ou le preneur achète l’objet du contrat, que ce soit dans le contrat lui-même ou dans un contrat séparé.

56      La juridiction de renvoi s’interroge néanmoins sur le point de savoir si un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, tel que celui en cause au principal, relève du champ d’application de la directive 2008/48 ou, le cas échéant, de celui des directives 2011/83 et 2002/65, en demandant notamment à la Cour, à ce dernier égard, si un tel contrat peut être qualifié de contrat portant sur « des services financiers » au sens de l’une de ces deux dernières directives.

57      En deuxième lieu, dans l’hypothèse où un tel contrat de leasing relèverait du champ d’application de la directive 2008/48, la juridiction de renvoi s’interroge, premièrement, sur la compatibilité, avec cette directive, d’une réglementation nationale établissant une présomption légale selon laquelle le professionnel respecte son obligation d’informer le consommateur de son droit de rétractation lorsqu’il renvoie, dans le contrat, à des dispositions nationales renvoyant elles-mêmes à un modèle légal. En outre, elle demande si, en cas de réponse négative à cette question, cette réglementation doit être laissée inappliquée.

58      Deuxièmement, dans l’hypothèse où une telle réglementation ne devrait pas être laissée inappliquée, la juridiction de renvoi s’interroge sur les informations que le professionnel est tenu de mentionner dans les contrats de crédit en vertu de l’article 10, paragraphe 2, sous p), l) et t), de la directive 2008/48 ainsi que sur le moment auquel le délai de rétractation en cas de mention incorrecte de telles informations obligatoires commence à courir.

59      S’agissant de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) estimerait que, dans la mesure où un contrat de leasing tel que celui en cause au principal stipule que, en cas de remboursement anticipé du crédit à la suite de l’exercice du droit de rétractation, un montant d’intérêt journalier de 0,00 euro doit être acquitté pour la période comprise entre la remise du véhicule et sa restitution, le consommateur serait suffisamment informé du fait que le prêteur renonce à son droit aux intérêts journaliers pour cette période. La juridiction de renvoi considère, pour sa part, que, dès lors que le contrat de leasing mentionne également un taux d’intérêt débiteur annuel de 3,49 %, la formulation ainsi retenue pourrait s’avérer contraire à l’exigence de clarté et de concision visée à cette disposition, d’autant plus que l’article 14, paragraphe 3, sous b), de cette directive prévoit que les intérêts sont calculés sur la base du taux débiteur convenu entre les parties.

60      Pour ce qui est de l’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive 2008/48, il serait suffisant, selon le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), qu’une clause telle que celle utilisée dans le contrat de leasing en cause au principal indique que le taux d’intérêt applicable en cas de retard de paiement est déterminé en fonction d’un certain pourcentage par rapport à un taux d’intérêt de référence mentionné dans une disposition légale à laquelle ce contrat renvoie. La juridiction de renvoi se demande cependant s’il ne conviendrait pas plutôt d’indiquer le taux applicable en valeur absolue, c’est-à-dire sous la forme d’un pourcentage concret.

61      En outre, s’agissant de l’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) serait d’avis qu’il n’est manifestement pas nécessaire, dans le cadre d’une clause telle que celle figurant dans le contrat de leasing en cause au principal, de mentionner dans ce contrat toutes les conditions de recevabilité d’une éventuelle réclamation du client, un renvoi au règlement régissant la procédure de médiation étant suffisant. La juridiction de renvoi estime, pour sa part, qu’il y aurait lieu d’indiquer toutes les conditions formelles d’accès à la procédure de médiation dans le contrat lui-même.

62      Par ailleurs, s’agissant du délai de rétractation, il conviendrait de déterminer si seule l’absence d’informations obligatoires dans un contrat de leasing tel que celui en cause au principal empêche ce délai de commencer à courir ou bien si la présence d’informations inexactes dans ce contrat peut également produire un tel effet.

63      Troisièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur la possibilité de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 ou de le soumettre à forclusion.

64      S’agissant, d’une part, de la question de la forclusion, la juridiction de renvoi indique que, selon elle, il est douteux que l’exercice du droit de rétractation par le consommateur puisse être susceptible de forclusion, d’autant plus qu’il n’existerait pas de base juridique en ce sens.

65      En particulier, il découlerait de l’article 14, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive 2008/48 que le droit de rétractation n’est pas limité dans le temps lorsque le consommateur ne reçoit pas les informations prévues à l’article 10 de la directive 2008/48, le professionnel ayant en effet la possibilité de faire courir le délai de rétractation à tout moment en communiquant ces informations. Par ailleurs, le droit de rétractation viserait non seulement la protection individuelle du consommateur, mais aussi des objectifs plus généraux tels que la prévention du surendettement et le renforcement de la stabilité des marchés financiers.

66      S’agissant, d’autre part, de la question de l’exercice abusif du droit de rétractation, la juridiction de renvoi indique que, selon la jurisprudence récente du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), il conviendrait, pour pouvoir conclure à un tel exercice abusif, de tenir compte, dans le cadre d’une appréciation globale, de certaines circonstances, à savoir notamment que le consommateur pouvait clairement constater que l’information erronée, non conforme au modèle légal, était pour lui sans pertinence, qu’il s’est prévalu pour la première fois au stade de l’instance de cassation de ce que les informations sur le droit de rétractation n’étaient pas conformes audit modèle ou encore qu’il a exercé son droit de rétractation en considérant n’être pas tenu de verser une indemnité compensatrice au professionnel après avoir utilisé le véhicule conformément à sa destination.

67      Pour les mêmes motifs, en substance, que ceux avancés à l’égard de la forclusion, la juridiction de renvoi est cependant d’avis que le droit de rétractation ne peut être limité au motif que ce droit aurait été exercé de manière abusive.

68      En troisième lieu, dans l’hypothèse où un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, tel que celui en cause au principal, constituerait un contrat de services financiers, au sens des directives 2002/65 et 2011/83, la juridiction de renvoi se demande, afin de déterminer si VK est susceptible de disposer d’un droit de rétractation, si, premièrement, un tel contrat doit être qualifié de contrat hors établissement, au sens de la directive 2011/83, dans la mesure où il a été conclu dans les locaux commerciaux d’une personne n’intervenant qu’au stade préparatoire à la conclusion du contrat, en l’occurrence le concessionnaire automobile, sans que cette personne dispose d’un pouvoir de représentation du prêteur aux fins de la conclusion de ce contrat.

69      À cet égard, la juridiction de renvoi observe que, si la directive 2011/83 n’est, certes, pas applicable aux services financiers en vertu de son article 3, paragraphe 3, sous d), l’interprétation de l’article 312b du BGB, qui concerne les contrats hors établissement, dépendrait néanmoins de celle de cette directive. En effet, dans la mesure où cette dernière a été transposée au-delà du cadre fixé par le droit de l’Union, il serait dans l’intérêt manifeste de l’Union européenne qu’elle fasse l’objet d’une interprétation uniforme. Il s’agirait ainsi de savoir si la contribution de personnes intervenant simplement au stade préparatoire à la conclusion du contrat en tant qu’intermédiaires peut être assimilée au fait d’agir au nom ou pour le compte du professionnel, au sens de l’article 2, point 2, de la directive 2011/83 et, par conséquent, de l’article 312b, paragraphe 1, deuxième phrase, du BGB.

70      Deuxièmement, dans l’hypothèse où un contrat de leasing tel que celui en cause au principal constituerait bien un contrat hors établissement, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si l’exception au droit de rétractation figurant à l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 au titre d’une prestation de services de location de voitures est applicable à ce contrat. Elle se réfère à cet égard à une décision d’une juridiction supérieure allemande selon laquelle la location de voitures ne comprend que la location de voitures de courte durée, et non les contrats de leasing de longue durée.

71      Troisièmement, la juridiction de renvoi se demande, toujours afin de déterminer l’existence d’un droit de rétractation en faveur de VK, si un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile tel que celui en cause au principal peut être qualifié de contrat à distance, au sens des directives 2002/65 et 2011/83, dans la mesure où le consommateur n’a eu de contacts personnels qu’avec une personne intervenant au seul stade préparatoire à la conclusion du contrat, en l’occurrence le concessionnaire automobile, sans que cette personne ne dispose d’un pouvoir de représentation aux fins de la conclusion de ce contrat et sans qu’elle soit, au demeurant, autorisée à conclure ce dernier.

72      À cet égard, la juridiction de renvoi indique que les personnes qui interviennent simplement à un tel stade préparatoire ne devraient pas pouvoir être considérées comme étant des représentants du professionnel proposant un tel contrat. Toutefois, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) aurait jugé que n’est pas remplie la condition du recours exclusif à des techniques de communication à distance, nécessaire pour qu’il y ait une vente à distance au sens des directives 2002/65 et 2011/83, lorsque le consommateur, lors de la phase préparatoire à la conclusion d’un contrat, a un contact personnel avec une personne qui lui fournit des informations sur le contrat pour le compte du professionnel.

73      Dans ces conditions, le Landgericht Ravensburg (tribunal régional de Ravensburg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Concernant la présomption de légalité découlant de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB :

a)      Les dispositions de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB, sont-elles incompatibles avec l’article 10, paragraphe 2, sous p), et l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48], dans la mesure où elles déclarent des clauses contractuelles contraires aux prescriptions de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 comme satisfaisant aux exigences posées à l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, première et deuxième phrases, et paragraphe 12, premier alinéa, deuxième phrase, point 2, sous b), de l’EGBGB ?

Dans l’affirmative :

b)      Découle-t-il du droit de l’Union, notamment de l’article 10, paragraphe 2, sous p), et de l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48, que les dispositions de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB sont inapplicables dans la mesure où elles déclarent des clauses contractuelles contraires aux prescriptions de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 comme satisfaisant aux exigences posées à l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, première et deuxième phrases, et paragraphe 12, premier alinéa, deuxième phrase, point 2, sous b), de l’EGBGB ?

Si la réponse à la première question, sous b), n’est pas affirmative :

2)      Concernant les indications obligatoires conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 :

a)      L’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 doit-il être interprété en ce sens que le montant de l’intérêt journalier à indiquer dans le contrat de crédit doit résulter arithmétiquement du taux débiteur contractuel indiqué dans le contrat ?

b)      L’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive 2008/48 doit-il être interprété en ce sens que le taux d’intérêt de retard applicable au moment de la conclusion du contrat de crédit ou, à tout le moins, le taux d’intérêt de référence (en l’espèce, le taux d’intérêt de base conformément à l’article 247 du BGB) dont résulte le taux d’intérêt de retard applicable par addition (en l’espèce, de 5 points de pourcentage conformément à l’article 288, paragraphe 1, deuxième phrase, du BGB) doit être mentionné sous forme de nombre absolu, et le consommateur doit-il être informé du taux d’intérêt de référence (taux d’intérêt de base) et de sa variabilité ?

c)      L’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48 doit-il être interprété en ce sens que les conditions de forme essentielles de l’accès à des procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours doivent être indiquées dans le texte du contrat de crédit ?

S’il est répondu par l’affirmative à l’une ou plusieurs des sous-questions a), b), ou c), de la deuxième question :

d)      L’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive 2008/48 doit-il être interprété en ce sens que le délai de rétractation commence à courir seulement quand les informations prévues à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 ont été fournies de manière complète et matériellement exacte ?

Dans la négative :

e)      Quels sont les critères pertinents pour que le délai de rétractation commence à courir bien que les indications soient incomplètes ou inexactes ?

S’il est répondu par l’affirmative à la première question, sous a), et/ou à l’une ou plusieurs des sous-questions a), b), ou c), de la deuxième question :

3)      Concernant la forclusion du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2008/48 :

a)      Le droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2008/48 est-il soumis à forclusion ?

Dans l’affirmative :

b)      La forclusion constitue-t-elle une limitation temporelle du droit de rétractation qui doit être régie par une loi adoptée par le Parlement ?

Dans la négative :

c)      L’exception de forclusion présuppose-t-elle, d’un point de vue subjectif, que le consommateur ait eu connaissance du maintien de son droit de rétractation ou, à tout le moins, qu’il soit responsable de son ignorance à cet égard en raison d’une négligence grave ?

Dans la négative :

d)      La possibilité dont dispose le prêteur de fournir a posteriori à l’emprunteur les informations visées à l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive 2008/48 et ainsi de commencer à faire courir le délai de rétractation s’oppose-t-elle à l’application de bonne foi des règles de forclusion ?

Dans la négative :

e)      Cela est-il compatible avec les principes établis qui lient le juge allemand en vertu de la loi fondamentale ?

Dans l’affirmative :

f)      Comment le praticien du droit allemand doit-il résoudre un conflit entre des prescriptions contraignantes du droit international et les prescriptions de la Cour ?

4)      Concernant le caractère abusif de l’exercice du droit de rétractation du consommateur prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2008/48 :

a)      L’exercice du droit de rétractation du consommateur prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2008/48 peut-il être qualifié d’abusif ?

Dans l’affirmative :

b)      Le fait de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation constitue-t-il une limitation du droit de rétractation qui doit être régie par une loi adoptée par le Parlement ?

Dans la négative :

c)      La possibilité de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation présuppose-t-elle, d’un point de vue subjectif, que le consommateur ait eu connaissance du maintien de son droit de rétractation ou, à tout le moins, qu’il soit responsable de son ignorance à cet égard en raison d’une négligence grave ?

Dans la négative :

d)       La possibilité dont dispose le prêteur de fournir a posteriori à l’emprunteur les informations visées à l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive 2008/48 et ainsi de commencer à faire courir le délai de rétractation s’oppose-t-elle à ce que l’exercice du droit de rétractation puisse être qualifié d’abusif sur la base de la bonne foi ?

Dans la négative :

e)      Cela est-il compatible avec les principes établis qui lient le juge allemand en vertu de la loi fondamentale ?

Dans l’affirmative :

f)      Comment le praticien du droit allemand doit-il résoudre un conflit entre des prescriptions contraignantes du droit international et les prescriptions de la Cour ?

5)      Les contrats de leasing de véhicules automobiles avec décompte kilométrique, d’une durée d’environ deux à trois ans, comportant une clause type d’exclusion du droit de résiliation ordinaire, qui prévoient qu’il incombe au consommateur de contracter une assurance tous risques pour le véhicule, qu’il lui appartient en outre de faire valoir à l’égard des tiers (en particulier à l’égard du concessionnaire et du constructeur du véhicule) les droits en matière de garantie des défauts et qu’il doit également supporter le risque de perte, de dommage et autres dépréciations, relèvent-ils du champ d’application de la directive [2011/83] et/ou de la directive 2008/48[...] et/ou de la directive [2002/65] ? S’agit-il de contrats de crédit au sens de l’article 3, sous c), de la directive 2008/48[...] et/ou de contrats de services financiers au sens de l’article 2, point 12, de la directive 2011/83[...] et de l’article 2, sous b), de la directive 2002/65[...] ?

6)      Si les contrats de leasing de véhicules automobiles avec décompte kilométrique – tels que décrits [dans la question 5)] – sont des contrats de services financiers :

a)      Convient-il de considérer également comme un établissement commercial immeuble au sens de l’article 2, point 9, de la directive 2011/83[...] l’établissement commercial d’une personne qui assure, pour le professionnel, la préparation de transactions conclues avec des consommateurs mais ne dispose elle–même d’aucun pouvoir de représentation aux fins de la conclusion des contrats en question ?

Dans l’affirmative :

b)      En va-t-il de même lorsque la personne qui intervient dans cette phase préparatoire à la conclusion du contrat est un professionnel d’un autre secteur d’activité et/ou n’est pas autorisée, en vertu des dispositions du droit prudentiel et/ou du droit civil, à conclure des contrats de services financiers ?

7)      En cas de réponse négative à l’une des questions 6) a) ou b) :

L’article 16, sous l), de la directive 2011/83[...] doit-il être interprété en ce sens que les contrats de leasing de véhicules automobiles avec décompte kilométrique (tels que décrits précédemment [dans la question 5]) relèvent de cette exception ?

8)      Si les contrats de leasing de véhicules automobiles avec décompte kilométrique – tels que décrits [dans la question 5] – sont des contrats de services financiers :

a)      La qualification de contrat à distance au sens de l’article 2, sous a), de la directive 2002/65[...] et de l’article 2, point 7, de la directive 2011/83[...] peut-elle également être retenue lorsque, au cours des négociations contractuelles, les seuls contacts personnels ont eu lieu avec une personne qui assure, pour le professionnel, la préparation de transactions conclues avec des consommateurs mais ne dispose elle–même d’aucun pouvoir de représentation aux fins de la conclusion des contrats en question ?

Dans l’affirmative :

b)      En va-t-il de même lorsque la personne qui intervient dans cette phase préparatoire à la conclusion du contrat est un professionnel d’un autre secteur d’activité et/ou n’est pas autorisée, en vertu des dispositions du droit prudentiel et/ou du droit civil, à conclure des contrats de services financiers ? »

 L’affaire C47/21

74      Le 12 avril 2017, F. F. a conclu avec C. Bank un contrat de prêt d’un montant net de 15 111,70 euros, qui était destiné à l’achat d’un véhicule de tourisme d’occasion destiné à un usage privé.

75      Lors de la préparation et de la conclusion du contrat de prêt, le concessionnaire automobile auprès duquel le véhicule a été acheté a agi en tant qu’intermédiaire de C. Bank et a utilisé les formulaires de contrat de prêt mis à sa disposition par celle-ci. D’après le contrat de prêt, le prix d’achat de ce véhicule était de 14 880,00 euros. Un acompte de 2 000,00 euros ayant été versé, le prix restant à payer était de 12 880,00 euros et devait être financé par le prêt en question.

76      Le contrat en cause prévoit le remboursement du prêt au moyen de 60 mensualités de même montant ainsi qu’un versement final d’un montant supérieur. Le véhicule acheté par F. F. a été cédé à C. Bank à titre de garantie. Après le versement du montant du prêt, F. F. a payé régulièrement les mensualités convenues.

77      Le 1er avril 2020, F. F. s’est rétracté du contrat de prêt.

78      F. F. estime que, en raison du manque de clarté des informations relatives au droit de rétractation figurant dans le contrat de prêt ainsi que du caractère erroné de plusieurs mentions obligatoires qui auraient dû être indiquées dans ce contrat en vertu du droit allemand, le délai de rétractation de quatorze jours prévu par ce droit n’a pas encore commencé à courir. Dans ces conditions, il demande notamment à ce que lui soient remboursées les mensualités qu’il a versées jusqu’à la date de rétractation ainsi que l’acompte qu’il a versé au concessionnaire, soit un total de 10 110,11 euros. Il demande également à ce qu’il soit constaté que C. Bank se trouve en retard de réception du véhicule, au sens de l’article 293 du BGB.

79      C. Bank conclut au rejet du recours, considérant, en particulier, qu’elle a dûment fourni à F. F. l’ensemble des informations obligatoires, notamment par l’intermédiaire du modèle légal.

80      La juridiction de renvoi s’interroge, premièrement, sur la compatibilité, avec la directive 2008/48, d’une réglementation nationale établissant une présomption légale selon laquelle le professionnel respecte son obligation d’informer le consommateur de son droit de rétractation lorsqu’il renvoie, dans un contrat, à des dispositions nationales renvoyant elles-mêmes à un modèle légal voire lorsqu’il insère, dans ce contrat, des informations tirées de ce modèle mais contraires aux prescriptions de cette directive. En outre, elle se demande si, en cas de constat d’incompatibilité avec ladite directive, une telle réglementation doit être laissée inappliquée.

81      À cet égard, la juridiction de renvoi indique que, même à supposer que C. Bank aurait utilisé le modèle légal de manière erronée, F. F. ne serait pas pour autant fondée à contester l’application de la présomption légale précitée, dès lors qu’une telle contestation serait constitutive d’un abus de droit selon les critères établis par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice).

82      Deuxièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur les informations que le professionnel est tenu de mentionner dans les contrats de crédit en vertu de l’article 10, paragraphe 2, sous l), p), r) et t), de la directive 2008/48, ainsi que sur le moment auquel le délai de rétractation commence à courir en cas de mention incorrecte de telles informations obligatoires.

83      Tout d’abord, en ce qui concerne l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48, portant sur les informations relatives au droit du prêteur à une indemnité et au mode de calcul de celle-ci, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) considérerait, confronté à une clause comme celle figurant dans un contrat tel que celui en cause au principal, que le prêteur peut se limiter à mentionner, dans les grandes lignes, les principaux paramètres de calcul de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du crédit. La juridiction de renvoi se demande cependant s’il ne serait pas plutôt nécessaire d’indiquer dans un contrat tel que celui en cause au principal une formule arithmétique précise et compréhensible pour le consommateur. Le cas échéant, il conviendrait également de déterminer si le caractère insuffisant des informations relatives au calcul de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du crédit figurant dans un tel contrat peut être sanctionné exclusivement par l’extinction du droit à indemnité ou si une telle situation doit être assimilée à une absence d’information, de sorte que le délai de rétractation ne commencerait pas à courir.

84      Ensuite, pour ce qui est de l’article 10, paragraphe 2, sous l), p) et t), de la directive 2008/48, la juridiction de renvoi expose les mêmes doutes que ceux mentionnés aux points 59 à 61 du présent arrêt, étant précisé que le contrat conclu par F. F. avec C. Bank le 12 avril 2017 contenait des clauses similaires à celles mentionnées à ces points.

85      Enfin, s’agissant du délai de rétractation, la juridiction de renvoi fait part des mêmes interrogations que celles exposées au point 62 du présent arrêt.

86      Troisièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si le droit de rétractation peut être limité dans le temps en cas de violation de la bonne foi. Elle se demande en particulier si et, le cas échéant, selon quelles modalités le droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 peut être soumis à forclusion et si l’exercice de ce droit peut être considéré comme étant abusif dans certaines circonstances. À cet égard, elle se fonde sur le même raisonnement que celui figurant aux points 63 à 67 du présent arrêt.

87      Quatrièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur la mise en œuvre du droit du consommateur à obtenir le remboursement des mensualités versées, lorsque le contrat de crédit dont il s’est rétracté est lié à un contrat de vente. En effet, il résulterait de la jurisprudence du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) que, lorsqu’un contrat de crédit est lié à un contrat de vente de véhicule de tourisme, le prêteur peut refuser de rembourser les mensualités et, le cas échéant, l’acompte versés, jusqu’à ce que ce véhicule lui ait été rendu ou que le consommateur ait fourni la preuve qu’il a expédié celui-ci ou qu’il a mis le prêteur en retard de réception, au sens de l’article 293 du BGB, à la suite d’une offre effective de réception envoyée au siège du professionnel.

88      Or, la juridiction de renvoi relève que ce remboursement peut être différé, en cas de contestation de la validité de la rétractation par le prêteur, jusqu’à l’issue définitive du litige judiciaire. Cela la conduit à douter de la compatibilité d’une telle obligation de restitution préalable ainsi que de ses conséquences procédurales avec l’effet utile du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48. En effet, le véhicule serait, dans la plupart des cas, nécessaire à l’exercice de la profession du consommateur et immobiliserait un capital important. Si ce dernier devait restituer le véhicule sans savoir si la rétractation est vraiment effective et dans quel délai, le cas échéant, il recevra les sommes dues par le prêteur, pour pouvoir ensuite acheter un bien de remplacement, il serait le plus souvent dissuadé de faire usage de son droit de rétractation.

89      Par ailleurs, la juridiction de renvoi demande, dans l’hypothèse où il conviendrait de conclure que l’obligation de restitution préalable du véhicule n’est pas compatible avec l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48, si cette disposition a un effet direct de sorte que les dispositions nationales pertinentes devraient être laissées inappliquées.

90      Cinquièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité d’une réglementation procédurale nationale encadrant l’exercice de la fonction de juge unique avec l’article 267 TFUE. Cette interrogation s’explique par le fait que l’affaire dont la juridiction de renvoi est saisie a été transférée à un juge unique par la formation de jugement collégiale en charge de cette affaire au sein de cette juridiction et que la demande de décision préjudicielle émane par conséquent de ce seul juge unique.

91      À cet égard, la juridiction de renvoi explique que la question de savoir si, en droit allemand, un juge unique est habilité à procéder à un renvoi préjudiciel est controversée. Plus particulièrement, il ressortirait de la jurisprudence du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) qu’un juge unique enfreint le principe du juge légal en procédant, de sa propre autorité, à un renvoi préjudiciel, du fait qu’il serait tenu de renvoyer le litige à la formation de jugement collégiale compétente afin qu’elle se ressaisisse de l’affaire.

92      Or, la juridiction de renvoi est d’avis que l’article 267, deuxième alinéa, TFUE s’oppose à une telle obligation de renvoi à la formation de jugement collégiale compétente. Bien que la Cour ait déjà jugé qu’un renvoi préjudiciel opéré par un juge unique est recevable du point de vue du droit de l’Union, indépendamment du respect ou non des règles procédurales nationales, elle aurait laissé en suspens la question de savoir si une disposition nationale qui limite la faculté pour un juge unique de procéder à un renvoi préjudiciel doit être laissée inappliquée.

93      Par ailleurs, la juridiction de renvoi souligne que cette question est pertinente pour résoudre l’affaire dont elle est saisie, dès lors que, dans des procédures parallèles dans lesquelles un juge unique a saisi la Cour à titre préjudiciel, les parties défenderesses auraient, en s’appuyant sur les considérations du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) précitées, contesté les ordonnances de renvoi ou demandé la récusation du juge de renvoi pour partialité, une telle situation pouvant se reproduire dans la présente affaire.

94      Dans ces conditions, le Landgericht Ravensburg (tribunal régional de Ravensburg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Concernant la présomption de légalité en vertu de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB :

a)      Les dispositions de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB, sont-elles incompatibles avec l’article 10, paragraphe 2, sous p), et l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48], dans la mesure où elles déclarent des clauses contractuelles contraires aux prescriptions de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive [2008/48] comme satisfaisant aux exigences posées à l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, première et deuxième phrases, et paragraphe 12, premier alinéa, deuxième phrase, point 2, sous b), de l’EGBGB ?

Dans l’affirmative :

b)      Découle-t-il du droit de l’Union, notamment de l’article 10, paragraphe 2, sous p), et de l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48], que les dispositions de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB sont inapplicables dans la mesure où elles déclarent des clauses contractuelles contraires aux prescriptions de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive [2008/48] comme satisfaisant aux exigences posées à l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, première et deuxième phrases, et paragraphe 12, premier alinéa, deuxième phrase, point 2, sous b), de l’EGBGB ?

Quelles que soient les réponses aux sous-questions a) à b) de la première question :

2)      Concernant les indications obligatoires conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la directive [2008/48] :

[la deuxième question, sous a), a été retirée]

b)      Concernant l’article 10, paragraphe 2, [sous] r), de la directive [2008/48] :

aa)      Cette disposition doit-elle être interprétée en ce sens que les informations figurant dans le contrat de crédit relatives à l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt doivent être suffisamment précises pour que le consommateur puisse calculer, au moins approximativement, le montant de l’indemnité due ?

(En cas de réponse affirmative à la question précédente)

bb)      L’article 10, paragraphe 2, sous r), et l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, de la directive [2008/48] s’opposent-ils à une réglementation nationale qui prévoit que, en cas d’informations incomplètes au sens de l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive [2008/48], le délai de rétractation commence néanmoins à courir à la conclusion du contrat et que seul s’éteint le droit du prêteur à une indemnité de remboursement anticipé du crédit ?

c)      L’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive [2008/48] doit-il être interprété en ce sens que le taux d’intérêt de retard applicable au moment de la conclusion du contrat de crédit ou, à tout le moins, le taux d’intérêt de référence (en l’espèce, le taux d’intérêt de base conformément à l’article 247 BGB) dont résulte le taux d’intérêt de retard applicable par addition (en l’espèce, de 5 points de pourcentage conformément à l’article 288, paragraphe 1, deuxième phrase, BGB) doit être mentionné sous forme de nombre absolu, et le consommateur doit-il être informé du taux d’intérêt de référence (taux d’intérêt de base) et de sa variabilité ?

d)      L’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive [2008/48] doit-il être interprété en ce sens que les conditions de forme essentielles de l’accès à des procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours doivent être indiquées dans le texte du contrat de crédit ?

En cas de réponse affirmative à l’une ou plusieurs des sous-questions a) à d) de la deuxième question :

e)      L’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive [2008/48] doit-il être interprété en ce sens que le délai de rétractation commence à courir seulement quand les informations prévues à l’article 10, paragraphe 2, de la directive [2008/48] ont été fournies de manière complète et matériellement exacte ?

Dans la négative :

f)      Quels sont les critères pertinents pour que le délai de rétractation soit déclenché bien que les informations soient incomplètes ou inexactes ?

En cas de réponse affirmative à la sous-question a) de la première question et/ou à l’une ou plusieurs des sous-questions a) à d) de la deuxième question :

3)      Concernant la forclusion du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] :

a)      Le droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] est-il soumis à forclusion ?

Dans l’affirmative :

b)      La forclusion constitue-t-elle une limitation temporelle du droit de rétractation qui doit être régie par une loi adoptée par le Parlement ?

Dans la négative :

c)      L’exception de forclusion présuppose-t-elle, d’un point de vue subjectif, que le consommateur ait eu connaissance du maintien de son droit de rétractation ou, à tout le moins, qu’il soit responsable de son ignorance à cet égard en raison d’une négligence grave ?

Dans la négative :

d)      La possibilité dont dispose le prêteur de fournir a posteriori à l’emprunteur les informations visées à l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive [2008/48] et ainsi de commencer à faire courir le délai de rétractation s’oppose-t-elle à l’application de bonne foi des règles de forclusion ?

Dans la négative :

e)      Cela est-il compatible avec les principes établis qui lient le juge allemand en vertu de la loi fondamentale ?

Dans l’affirmative :

f)      Comment le praticien du droit allemand doit-il résoudre un conflit entre des prescriptions contraignantes du droit international et les prescriptions de la Cour ?

4)      Concernant le caractère abusif de l’exercice du droit de rétractation du consommateur prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] :

a)       L’exercice du droit de rétractation du consommateur prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] peut-il être qualifié d’abusif ?

Dans l’affirmative :

b)      Le fait de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation constitue-t-il une limitation du droit de rétractation qui doit être régie par une loi adoptée par le Parlement ?

Dans la négative :

c)       La possibilité de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation présuppose-t-elle, d’un point de vue subjectif, que le consommateur ait eu connaissance du maintien de son droit de rétractation ou, à tout le moins, qu’il soit responsable de son ignorance à cet égard en raison d’une négligence grave ?

Dans la négative :

d)      La possibilité dont dispose le prêteur de fournir a posteriori à l’emprunteur les informations visées à l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive [2008/48] et ainsi de commencer à faire courir le délai de rétractation s’oppose-t-elle à ce que l’exercice du droit de rétractation puisse être qualifié d’abusif sur la base de la bonne foi ?

Dans la négative :

e)      Cela est-il compatible avec les principes établis qui lient le juge allemand en vertu de la loi fondamentale ?

Dans l’affirmative :

f)      Comment le praticien du droit allemand doit-il résoudre un conflit entre des prescriptions contraignantes du droit international et les prescriptions de la Cour ?

5)      Quelles que soient les réponses apportées aux première à quatrième questions précédentes :

a)      Est-il compatible avec le droit de l’Union, notamment avec le droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48], que, en vertu du droit national, lorsqu’un contrat de crédit est lié à un contrat de vente, après que le consommateur a effectivement exercé son droit de rétractation conformément à l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48],

aa)      le droit d’un consommateur au remboursement par le prêteur des versements effectués ne devienne exigible que lorsque ce consommateur a à son tour remis l’objet de la vente au prêteur ou a fourni la preuve qu’il le lui a expédié ?

bb)      une action du consommateur en remboursement des mensualités de remboursements versées après la remise de l’objet de l’achat doive être rejetée comme étant actuellement non fondée si le prêteur n’a pas manqué à son obligation d’accepter l’objet de la vente ?

Dans la négative :

b)      Résulte-t-il du droit de l’Union que les règles nationales décrites dans la sous-question a), sous aa) et/ou bb), sont inapplicables ?

Quelles que soient les réponses aux première à cinquième questions :

6)      L’article 348a, paragraphe 2, point 1, [du code de procédure civile], dans la mesure où cette disposition concerne l’adoption de décisions de renvoi au titre de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE, est-il incompatible avec le pouvoir de procéder à des renvois préjudiciels dont disposent les juridictions nationales en vertu de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE et, donc, inapplicable à l’adoption de décisions de renvoi ? »

 L’affaire C232/21

95      Conformément à leurs demandes en date, respectivement, du 30 juin 2017, du 28 mars 2017, du 26 janvier 2019 et du 31 janvier 2012, CR, d’une part, et AY, ML ainsi que BQ, d’autre part, ont conclu avec, respectivement, Volkswagen Bank et Audi Bank, dans les affaires dont la juridiction de renvoi est saisie, des contrats de prêt destinés à l’achat de véhicules de tourisme d’occasion pour un usage privé. Les montants nets des contrats de prêt s’élevaient, respectivement, à 21 418,66 euros, 28 671,25 euros, 18 972,74 euros et 30 208,10 euros.

96      Lors de la préparation et de la conclusion des contrats de prêt, les concessionnaires automobiles auprès desquels les véhicules ont été achetés ont agi en tant qu’intermédiaires de crédit de Volkswagen Bank et d’Audi Bank. Les contrats en cause prévoyaient le remboursement des prêts au moyen de mensualités, le montant des prêts concernés étant augmenté d’un montant relatif à une assurance couvrant les cas de décès, d’invalidité ou de chômage. Les contrats prévoyaient également un versement final d’un montant déterminé ainsi que, pour certains, le versement d’un acompte par le consommateur.

97      CR, AY, ML et BQ se sont rétractés, respectivement, le 31 mars 2019, le 13 juin 2019, le 16 septembre 2019 et le 20 septembre 2020 des contrats de prêt. Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, les trois premiers consommateurs ont proposé à Volkswagen Bank et à Audi Bank la restitution du véhicule, le cas échéant, à leur siège, en contrepartie du remboursement simultané des paiements effectués. S’agissant de BQ, à la date de sa rétractation, il avait déjà, à la différence des trois autres consommateurs, intégralement remboursé le prêt dont il avait bénéficié. Il a également demandé, à titre principal, le remboursement des mensualités versées, après le transfert de propriété et la remise du véhicule.

98      Ces quatre consommateurs estiment que leurs rétractations sont valables au motif que le délai de rétractation de quatorze jours prévu par le droit allemand n’aurait pas commencé à courir. En effet, les informations relatives au droit de rétractation ainsi que les autres informations obligatoires ne leur auraient pas été dûment transmises.

99      Volkswagen Bank et Audi Bank sont d’avis qu’elles ont dûment fourni toutes les informations nécessaires en utilisant le modèle légal. Dans deux des affaires dont la juridiction de renvoi est saisie, elles invoquent, à titre subsidiaire, l’exception de forclusion et celle d’exercice abusif d’un droit par les consommateurs concernés, en ce qu’elles se seraient légitimement fondées sur le fait que ceux-ci n’exerceraient plus leur droit de rétractation après avoir utilisé de manière effective le véhicule et payé régulièrement les mensualités dues en vertu des contrats de prêt. Dans les deux autres affaires dont la juridiction de renvoi est saisie, elles soutiennent ne pas se trouver en retard de réception du véhicule, au sens de l’article 293 du BGB, les consommateurs concernés ne leur ayant pas fait d’offre effective de réception au sens de l’article 294 du BGB.

100    Dans un contexte factuel et juridique très similaire à celui sous-tendant l’affaire C‑47/21, la juridiction de renvoi pose des questions quasiment identiques à celles posées dans cette affaire, en avançant une motivation en substance identique à celle résumée aux points 80 à 93 du présent arrêt.

101    S’agissant des questions relatives à l’exception tirée de la forclusion et à celle tirée de l’abus de droit, la juridiction de renvoi précise que, selon la jurisprudence du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), c’est avant tout pour des contrats ayant déjà été intégralement exécutés par les parties que l’application de ces exceptions devrait être envisagée.

102    Dans ces conditions, le Landgericht Ravensburg (tribunal régional de Ravensburg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Concernant la présomption de légalité en vertu de l’article 247, paragraphe 6, deuxième alinéa, troisième phrase, et de l’article 247, paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB :

a)      Les dispositions de l’article 247, paragraphe 6, deuxième alinéa, troisième phrase, et de l’article 247, paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB, sont-elles incompatibles avec l’article 10, paragraphe 2, sous p), et l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48], dans la mesure où elles déclarent des clauses contractuelles contraires aux prescriptions de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive [2008/48] comme satisfaisant aux exigences posées à l’article 247, paragraphe 6, deuxième alinéa, première et deuxième phrases, et à l’article 247, paragraphe 12, premier alinéa, deuxième phrase, point 2, sous b), de l’EGBGB ?

Dans l’affirmative :

b)      Découle-t-il du droit de l’Union, notamment de l’article 10, paragraphe 2, sous p), et de l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48], que les dispositions de l’article 247, paragraphe 6, deuxième alinéa, troisième phrase, et de l’article 247, paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB sont inapplicables dans la mesure où elles déclarent des clauses contractuelles contraires aux prescriptions de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive [2008/48] comme satisfaisant aux exigences posées à l’article 247, paragraphe 6, deuxième alinéa, première et deuxième phrases, et à l’article 247, paragraphe 12, premier alinéa, deuxième phrase, point 2, sous b), de l’EGBGB ?

Indépendamment de la réponse apportée à la première question, sous a) et b) :

2)      Concernant les indications obligatoires conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la directive [2008/48] :

a)      L’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive [2008/48] doit-il être interprété en ce sens que le montant de l’intérêt journalier à indiquer dans le contrat de crédit doit résulter arithmétiquement du taux débiteur contractuel indiqué dans le contrat ?

b)      Concernant l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive [2008/48] :

aa)      Cette disposition doit-elle être interprétée en ce sens que les informations figurant dans le contrat de crédit relatives à l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt doivent être suffisamment précises pour que le consommateur puisse calculer, au moins approximativement, le montant de l’indemnité due ?

[en cas de réponse affirmative à la question précédente aa)]

bb)      L’article 10, paragraphe 2, sous r), et l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, de la directive [2008/48] s’opposent-ils à une réglementation nationale qui prévoit que, en cas d’informations incomplètes au sens de l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive [2008/48], le délai de rétractation commence néanmoins à courir à la conclusion du contrat et que seul s’éteint le droit du prêteur à une indemnité de remboursement anticipé du crédit ?

Dans l’hypothèse où au moins l’une des sous-questions précédentes a) ou b) appelle une réponse affirmative :

c)      L’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive [2008/48] doit-il être interprété en ce sens que le délai de rétractation commence à courir seulement quand les informations prévues à l’article 10, paragraphe 2, de la directive [2008/48] ont été fournies de manière complète et matériellement exacte ?

Dans la négative :

d)      Quels sont les critères pertinents pour que le délai de rétractation soit déclenché bien que les informations soient incomplètes ou inexactes ?

Si la première question, sous a) et/ou l’une des sous-questions a) ou b) de la deuxième question appellent une réponse affirmative :

3)      Concernant la forclusion du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] :

a)      Le droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] est-il soumis à forclusion ?

Dans l’affirmative :

b)      La forclusion constitue-t-elle une limitation temporelle du droit de rétractation qui doit être régie par une loi adoptée par le Parlement ?

Dans la négative :

c)      L’exception de forclusion présuppose-t-elle, d’un point de vue subjectif, que le consommateur ait eu connaissance du maintien de son droit de rétractation ou, à tout le moins, qu’il soit responsable de son ignorance à cet égard en raison d’une négligence grave ? Cela vaut-il également pour les contrats ayant pris fin ?

Dans la négative :

d)      La possibilité dont dispose le prêteur de fournir a posteriori à l’emprunteur les informations visées à l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive [2008/48] et ainsi de déclencher le délai de rétractation s’oppose-t-elle à l’application de bonne foi des règles de forclusion ? Cela vaut-il également pour les contrats ayant pris fin ?

Dans la négative :

e)      Cela est-il compatible avec les principes établis qui lient le juge allemand en vertu de la loi fondamentale ?

Dans l’affirmative :

f)      Comment le praticien du droit allemand doit-il résoudre un conflit entre des prescriptions contraignantes du droit international et les prescriptions de la Cour ?

4)      Concernant le caractère abusif de l’exercice par le consommateur du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] :

a)      L’exercice du droit de rétractation du consommateur prévu à l’article 14, paragraphe 1, première phrase, de la directive [2008/48] peut-il être qualifié d’abusif ?

Dans l’affirmative :

b)      Le fait de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation constitue-t-il une limitation du droit de rétractation qui doit être régie par une loi adoptée par le Parlement ?

Dans la négative :

c)      La possibilité de qualifier d’abusif l’exercice du droit de rétractation présuppose-t-elle, d’un point de vue subjectif, que le consommateur ait eu connaissance du maintien de son droit de rétractation ou, à tout le moins, qu’il soit responsable de son ignorance à cet égard en raison d’une négligence grave ? Cela vaut-il également pour les contrats ayant pris fin ?

Dans la négative :

d)      La possibilité dont dispose le prêteur de fournir a posteriori à l’emprunteur les informations visées à l’article 14, paragraphe 1, deuxième phrase, sous b), de la directive [2008/48] et ainsi de déclencher le délai de rétractation s’oppose-t-elle à ce que l’exercice du droit de rétractation puisse être qualifié d’abusif sur la base de la bonne foi ? Cela vaut-il également pour les contrats ayant pris fin ?

Dans la négative :

e)      Cela est-il compatible avec les principes établis qui lient le juge allemand en vertu de la loi fondamentale ?

Dans l’affirmative : 

f)      Comment le praticien du droit allemand doit-il résoudre un conflit entre des prescriptions contraignantes du droit international et les prescriptions de la Cour ?

Indépendamment de la réponse apportée aux première à quatrième questions précédentes :

5)      a)      Est-il conforme au droit de l’Union que, en vertu du droit national, lorsqu’un contrat de crédit est lié à un contrat de vente, après que le consommateur a effectivement exercé son droit de rétractation conformément à l’article 14, paragraphe 1, de la directive [2008/48],

aa)      le droit d’un consommateur au remboursement par le prêteur des versements effectués ne devienne exigible que lorsque ce consommateur a, pour sa part, remis l’objet de la vente au prêteur ou a fourni la preuve qu’il le lui a expédié ?

bb)      une action du consommateur en remboursement des mensualités de remboursements versées après la remise de l’objet de l’achat doive être rejetée comme étant actuellement non fondée si le prêteur n’a pas manqué à son obligation d’accepter l’objet de la vente ?

Dans la négative :

b)      Résulte-t-il du droit de l’Union que les règles nationales décrites dans la sous-question a), sous aa) et/ou bb), sont inapplicables ?

Indépendamment de la réponse apportée aux première à cinquième questions précédentes :

6)      L’article 348a, paragraphe 2, point 1, [du code de procédure civile], dans la mesure où cette disposition concerne l’adoption de décisions de renvoi au titre de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE, est-il incompatible avec le pouvoir de procéder à des renvois préjudiciels dont disposent les juridictions nationales en vertu de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE et, donc, inapplicable à l’adoption de décisions de renvoi ? »

 La procédure devant la Cour

103    Par décision du président de la Cour du 22 avril 2021, les affaires C‑38/21 et C‑47/21 ont été jointes aux fins des phases écrite et orale de la procédure ainsi que de l’arrêt. Par décision du président de la Cour du 31 mai 2022, l’affaire C‑232/21 a été jointe auxdites affaires aux fins de la phase orale de la procédure ainsi que de l’arrêt.

104    Par courrier du 3 août 2021, la juridiction de renvoi a informé la Cour que, dans l’affaire C‑47/21, un règlement à l’amiable était intervenu dans l’une des deux affaires au principal et qu’elle retirait, de ce fait, la seconde question, sous a), dans l’affaire C‑47/21, tout en maintenant l’ensemble des autres questions dans cette affaire.

105    À la suite d’un complément à la demande de décision préjudicielle dans l’affaire C‑38/21 en date du 24 août 2021, la procédure écrite dans les affaires jointes C‑38/21 et C‑47/21 a été rouverte.

106    Conformément à l’article 16, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le gouvernement allemand a demandé à ce que les présentes affaires soient jugées en grande chambre, ce qui a été accepté par la Cour le 31 mai 2022.

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la recevabilité

107    BMW Bank, C. Bank, Volkswagen Bank et Audi Bank, le gouvernement allemand ainsi que la Commission européenne émettent des doutes sur la recevabilité de certaines questions préjudicielles posées dans les trois affaires.

 Sur les première à quatrième questions ainsi que sur la sixième question dans l’affaire C38/21

108    BMW Bank soutient que les première à quatrième questions dans l’affaire C‑38/21 sont irrecevables dans la mesure où il serait manifeste que les faits en cause au principal ne relèvent pas de la directive 2008/48 visée par ces questions. En effet, cette directive exclurait de son champ d’application les contrats de leasing qui ne comportent pas d’obligation d’achat du bien faisant l’objet du leasing. En outre, la sixième question dans l’affaire C‑38/21, qui est posée dans l’hypothèse dans laquelle un contrat de leasing tel que celui en cause au principal devrait être qualifié de contrat portant sur un service financier, au sens de la directive 2011/83, serait irrecevable en ce que les contrats portant sur les services financiers sont expressément exclus du champ d’application de cette directive.

109    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer [arrêt du 21 mars 2023, Mercedes-Benz Group (Responsabilité des constructeurs de véhicules munis de dispositifs d’invalidation), C‑100/21, EU:C:2023:229, point 52 et jurisprudence citée].

110    Il s’ensuit que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées [arrêt du 21 mars 2023, Mercedes-Benz Group (Responsabilité des constructeurs de véhicules munis de dispositifs d’invalidation), C‑100/21, EU:C:2023:229, point 53 et jurisprudence citée].

111    En l’occurrence, il y a lieu de souligner que la juridiction de renvoi a transmis à la Cour sa demande de décision préjudicielle en deux temps, à savoir, dans un premier temps, le 30 décembre 2020 en adressant à cette occasion les première à quatrième questions, puis, dans un second temps, le 24 août 2021, en communiquant quatre autres questions. Dans le cadre de ce complément à sa demande initiale de décision préjudicielle, cette juridiction a précisé qu’elle s’interrogeait sur le fait de savoir si, ainsi que cela découle de la cinquième question, la directive 2008/48 avait vocation à régir un contrat de leasing tel que celui en cause au principal. Elle a également indiqué dans quels cas de figure, en fonction de la réponse que la Cour allait apporter à ce sujet, elle considérait qu’il était encore pertinent de répondre aux première à quatrième questions adressées le 30 décembre 2020.

112    Par ailleurs, s’il est vrai que la juridiction de renvoi a subordonné la sixième question dans l’affaire C‑38/21 au fait qu’il soit constaté, dans le cadre de la réponse à la cinquième question dans cette affaire, qu’un contrat de leasing tel que celui en cause au principal puisse être qualifié de contrat portant sur un service financier, au sens de la directive 2011/83, il n’en reste pas moins que la pertinence ou le caractère non hypothétique et, partant, la recevabilité de cette sixième question ne peuvent être appréciés qu’au regard de la réponse que la Cour apportera à la cinquième question.

113    Dans ces conditions, les première à quatrième questions dans l’affaire C‑38/21, de même que la sixième question dans cette affaire, ne sauraient être considérées, à ce stade, comme étant hypothétiques, étant donné que la nécessité et l’utilité d’y répondre dépendent de la réponse qui sera apportée à la cinquième question dans ladite affaire.

114    En tout état de cause, il convient de rappeler que, lorsque, comme en l’occurrence, il n’apparaît pas de manière manifeste que l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, l’objection tirée de l’inapplicabilité de cette disposition à l’affaire au principal n’a pas trait à la recevabilité de la demande de décision préjudicielle, mais relève du fond des questions (arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 66 et jurisprudence citée).

 Sur la troisième question, sous e) et f), et la quatrième question, sous e) et f), posées dans les affaires C38/21, C47/21 et C232/21

115    Par la troisième question, sous e) et f), et la quatrième question, sous e) et f), dans les affaires C‑38/21, C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi s’interroge, en substance, sur la relation entre le droit de rétractation prévu à l’article 14 de la directive 2008/48 et les règles du droit international coutumier en matière de forclusion et d’abus de droit.

116    C. Bank, Volkswagen Bank et Audi Bank ainsi que le gouvernement allemand émettent des doutes quant à la recevabilité de ces questions.

117    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, pour permettre à la Cour de fournir une interprétation du droit de l’Union qui soit utile pour le juge national, l’article 94, sous c), du règlement de procédure de la Cour requiert que la demande de décision préjudicielle contienne l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal.

118    En l’occurrence, il est vrai que, conformément à une jurisprudence constante, l’Union est tenue d’exercer ses compétences dans le respect du droit international dans son ensemble, y compris non seulement les dispositions des conventions internationales qui la lient, mais également les règles et les principes du droit international général coutumier [arrêt du 6 octobre 2020, Commission/Hongrie (Enseignement supérieur), C‑66/18, EU:C:2020:792, point 87 et jurisprudence citée].

119    Toutefois, la juridiction de renvoi se limite à affirmer que, en vertu des principes généraux du droit international public, qui lient le juge allemand conformément à l’article 25, paragraphe 2, de la loi fondamentale et dont relèvent les principes de forclusion et de bonne foi, ce ne serait que lorsqu’un consommateur sait ou ignore en raison d’une négligence grave qu’il bénéficie d’un droit de rétractation que ce droit pourrait être considéré comme forclos ou que l’exercice dudit droit pourrait être considéré comme contraire à la bonne foi.

120    Or, ce faisant, la juridiction de renvoi n’établit pas, à suffisance, dans quelle mesure les règles du droit international coutumier en matière de forclusion et d’abus de droit pourraient entrer en conflit avec le droit de l’Union dans le contexte de litiges entre particuliers relatifs au droit de rétractation prévu à l’article 14 de la directive 2008/48.

121    Dans ces conditions, la troisième question, sous e) et f), et la quatrième question, sous e) et f), dans les affaires C‑38/21, C‑47/21 et C‑232/21 ne répondent pas aux exigences de l’article 94, sous c), du règlement de procédure et sont, partant, irrecevables.

 Sur la sixième question posée dans les affaires C47/21 et C232/21

122    Par la sixième question posée dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 267, deuxième alinéa, TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle un juge unique est tenu, notamment en raison de l’importance de principe d’une affaire dont il est saisi, de transmettre cette affaire à une chambre civile composée de trois juges et de renoncer à adresser lui-même une demande de décision préjudicielle à la Cour dans le cadre de ladite affaire.

123    C. Bank, Volkswagen Bank et Audi Bank, le gouvernement allemand ainsi que la Commission considèrent que ces questions sont irrecevables, au motif, pour l’essentiel, qu’une réponse à celles-ci n’est pas nécessaire aux fins de la solution des litiges au principal.

124    En l’occurrence, compte tenu de la jurisprudence rappelée aux points 109 et 110 du présent arrêt, il y a lieu de constater que la sixième question posée dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 porte sur l’interprétation de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE, mais que la juridiction de renvoi n’a pas expliqué les raisons pour lesquelles l’interprétation de cette disposition est nécessaire pour lui permettre de trancher les litiges dont elle est saisie. En effet, elle s’est contentée d’indiquer que la compétence du juge unique pour saisir la Cour de ses demandes de décision préjudicielle pourrait être contestée, en citant à cet égard des procédures dans des affaires autres que celles ayant donné lieu aux présents renvois préjudiciels, dans lesquelles soit des ordonnances de renvoi adoptées par un juge unique ont été contestées, soit la récusation du juge unique a été demandée pour partialité. En revanche, elle ne précise pas quelle serait l’incidence d’une telle contestation sur les décisions de renvoi ou, le cas échéant, sur les décisions mettant fin à l’instance. En particulier, il ne ressort pas des décisions de renvoi que celles-ci aient, à ce stade de la procédure, fait l’objet d’un recours dans le cadre duquel il serait allégué qu’elles sont entachées d’un éventuel vice du fait qu’elles ont été adoptées par un juge unique.

125    Dans ces conditions, la sixième question dans l’affaire C‑47/21 et dans l’affaire C‑232/21 est irrecevable en ce qu’elle est de nature hypothétique.

 Sur le fond

 Sur la cinquième question dans l’affaire C38/21

126    Par la cinquième question dans l’affaire C‑38/21, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi demande, en substance, si un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, qui prévoit que le consommateur n’a pas d’obligation d’acheter le véhicule à l’expiration du contrat, relève du champ d’application de la directive 2008/48, de celui de la directive 2002/65 ou de celui de la directive 2011/83.

127    À titre liminaire, il importe de rappeler que, s’il incombe à la seule juridiction de renvoi de se prononcer sur la qualification du contrat en cause dans le litige dont elle est saisie en fonction des circonstances propres à l’affaire au principal, il n’en demeure pas moins que la Cour peut dégager des dispositions desdites directives les critères que cette juridiction doit appliquer à cette fin (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2015, Banif Plus Bank, C‑312/14, EU:C:2015:794, point 51 et jurisprudence citée).

128    En outre, rien n’empêche qu’une juridiction nationale demande à la Cour de se prononcer sur une telle qualification, sous réserve toutefois que, au vu de l’ensemble des éléments du dossier dont cette juridiction nationale dispose, celle-ci procède à la constatation et à l’appréciation des faits nécessaires à cette qualification (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2015, Banif Plus Bank, C‑312/14, EU:C:2015:794, point 52).

129    En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que, ainsi qu’il a été exposé au point 49 du présent arrêt, le contrat en cause au principal prévoit qu’un prêt est accordé à VK pour que celui-ci puisse utiliser en location, pendant une durée de 24 mois et sous réserve d’un plafonnement du kilométrage qu’il est autorisé à parcourir, un véhicule automobile acquis par BMW Bank selon les spécifications fournies par VK, ce véhicule restant la propriété de cette banque. Pendant la durée du contrat, le consommateur supporte le risque de perte, de dommage et d’autres dépréciations du véhicule et doit pour cela contracter une assurance tous risques. Il appartient également au consommateur de faire valoir les droits en matière de garantie des défauts à l’égard des tiers, notamment à l’égard du concessionnaire et du constructeur. Ni le contrat lui-même ni aucun contrat séparé n’imposent une obligation d’achat du véhicule à ce consommateur. Par ailleurs, le consommateur n’assume aucune garantie de valeur résiduelle à l’expiration du contrat et n’est tenu de compenser la perte de valeur du véhicule que s’il est constaté, lors de sa restitution, que l’état de celui-ci ne correspond pas à son âge ou que le kilométrage maximal convenu a été dépassé.

130    S’agissant, en premier lieu, du champ d’application de la directive 2008/48, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, de cette directive, celle-ci s’applique aux contrats de crédit, sous réserve des exclusions prévues à son article 2, paragraphe 2.

131    Conformément à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive 2008/48, celle-ci ne s’applique pas aux contrats de location ou de crédit-bail dans le cadre desquels l’obligation d’acheter l’objet du contrat n’est prévue ni par le contrat lui-même ni par un contrat séparé, une telle obligation étant réputée exister si le prêteur en décide ainsi unilatéralement.

132    Dans ce cadre, il convient de déterminer si un contrat de leasing, tel que celui en cause au principal, relève de la notion de « contrat de crédit-bail » visée à cette disposition, étant précisé que ni celle-ci ni aucune autre disposition de la directive 2008/48 ne définissent cette notion ni ne renvoient au droit national.

133    Selon une jurisprudence constante de la Cour, il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit de l’Union qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée doivent normalement trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme qui doit être recherchée en tenant compte des termes de cette notion, à la lumière du contexte et de l’objectif poursuivi par la disposition dans laquelle cette notion est utilisée (arrêt du 18 juin 2020, Sparkasse Südholstein, C‑639/18, EU:C:2020:477, point 24 et jurisprudence citée).

134    Dans le langage juridique courant, la notion de « contrat de crédit-bail » recouvre un contrat par lequel l’une des parties accorde un crédit à l’autre partie pour financer l’utilisation locative d’un bien dont elle reste propriétaire et que l’autre partie peut, à la fin du contrat, restituer ou acheter, étant précisé que la majorité des avantages et des risques inhérents à la propriété légale sont transférés à cette autre partie pendant toute la durée du contrat (voir, par analogie, arrêt du 16 février 2012, Eon Aset Menidjmunt, C‑118/11, EU:C:2012:97, points 37 et 38).

135    En l’occurrence, il ressort des caractéristiques du contrat de leasing en cause au principal, rappelées au point 129 du présent arrêt, que BMW Bank a accordé à VK un crédit pour financer l’utilisation locative d’un véhicule acquis par cette banque selon les spécifications fournies par VK, ce dernier étant, à l’issue du contrat, tenu de restituer le véhicule du fait qu’il n’a pas l’obligation de l’acheter, tout en devant supporter la majorité des avantages et des risques inhérents à la propriété du véhicule pendant toute la durée du contrat. Si un tel contrat de leasing relève de la notion de « crédit-bail » au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive 2008/48, il est néanmoins exclu du champ d’application de cette directive dès lors qu’il n’est assorti d’aucune obligation, pour le consommateur, d’acheter l’objet du contrat au terme de celui-ci.

136    S’agissant, en deuxième lieu, du champ d’application de la directive 2002/65, il convient de rappeler que, conformément à l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive, celle-ci a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs. Le considérant 14 de ladite directive précise que celle-ci couvre tous les services financiers qui peuvent être fournis à distance sous réserve de l’application des dispositions de la législation de l’Union régissant spécifiquement certains services financiers.

137    Afin de relever du champ d’application de la directive 2002/65, un contrat doit non seulement être un « contrat à distance » au sens de l’article 2, sous a), de cette directive, mais également avoir pour objet de fournir un « service financier », au sens de l’article 2, sous b), de ladite directive, ces deux conditions étant cumulatives.

138    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la directive 2002/65 procède, en principe, à l’harmonisation complète des aspects qu’elle régit, si bien que son libellé doit recevoir une interprétation commune à tous les États membres (arrêt du 18 juin 2020, Sparkasse Südholstein, C‑639/18, EU:C:2020:477, point 23), conformément aux principes jurisprudentiels rappelés au point 133 du présent arrêt.

139    En ce qui concerne la notion de « service financier », l’article 2, sous b), de la directive 2002/65 la définit comme visant tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l’assurance, aux retraites individuelles, aux investissements et aux paiements. Il convient donc de vérifier si un contrat de leasing tel que celui en cause au principal a trait à l’un au moins des domaines visés à l’article 2, sous b), de la directive 2002/65.

140    Premièrement, il y a lieu de considérer, à l’instar de M. l’avocat général au point 95 de ses conclusions, que la notion de « service ayant trait à la banque », au sens de cette disposition, doit être comprise comme un service proposé dans le cadre d’une activité commerciale traditionnellement exercée par les banques.

141    À cet égard, il convient de relever, ainsi que le gouvernement allemand le soutient dans ses observations écrites, que l’offre d’un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile tel que celui en cause au principal se situe, en tout état de cause, en dehors de la gamme de prestations classique du secteur bancaire, un tel service particulier étant le plus souvent proposé par des banques liées à des constructeurs automobiles ou par des sociétés spécialisées dans le leasing automobile telles que des sociétés de location de véhicules.

142    Il s’ensuit qu’un tel contrat ne porte pas sur un « service ayant trait à la banque » au sens de l’article 2, sous b), de la directive 2002/65.

143    Deuxièmement, s’agissant de la notion de « service ayant trait [...] au crédit » au sens de l’article 2, sous b), de la directive 2002/65, il y a lieu de constater que cette directive ne contient pas de définition du terme « crédit ».

144    Toutefois, dans le langage juridique courant, ce terme désigne la mise à disposition d’une somme d’argent ou bien de délais ou facilités de paiement par le prêteur à l’emprunteur à des fins de financement ou de paiement différé, si bien qu’un contrat de crédit doit être regardé comme un contrat en vertu duquel un prêteur consent ou s’engage à consentir à un consommateur un crédit sous la forme d’un délai de paiement, d’un prêt ou de toute autre facilité de paiement similaire.

145    Il s’ensuit qu’un contrat de service financier ayant trait au crédit est, ainsi que cela ressort également en substance des points 97 et 100 des conclusions de M. l’avocat général, caractérisé par la circonstance qu’il s’inscrit dans une logique de financement ou de paiement différé, à l’aide de fonds ou bien de délais ou de facilités de paiement mis à la disposition du consommateur par le professionnel à cet effet.

146    En l’occurrence, ainsi qu’il a été exposé devant la Cour, un contrat de leasing d’un véhicule automobile sans obligation d’achat, tel que celui en cause au principal, comporte deux éléments, à savoir, d’une part, un élément de crédit caractérisé par la circonstance qu’une banque consent à un consommateur un crédit sous la forme de facilités de paiement et, d’autre part, un élément de location visant à permettre au consommateur d’utiliser pendant une période déterminée un véhicule de son choix appartenant à cette banque en contrepartie du versement d’un prix initial suivi de mensualités.

147    Dans ces conditions, pour déterminer si un tel contrat, du fait de son caractère hybride, a trait au crédit, au sens de l’article 2, sous b), de la directive 2002/65, il y a lieu de s’attacher, ainsi que M. l’avocat général l’a indiqué au point 97 de ses conclusions, à son objet principal de manière à vérifier si l’élément ayant trait au crédit l’emporte sur l’élément ayant trait à la location ou si c’est l’inverse.

148    À cet égard, il convient de constater, ainsi que M. l’avocat général l’a indiqué en substance au point 100 de ses conclusions, qu’un tel contrat ne se distingue pas, pour l’essentiel, d’un contrat de location de véhicule de longue durée dans le cadre duquel le consommateur doit verser un loyer en contrepartie du droit d’utiliser le véhicule, pour autant qu’il ne soit pas assorti d’une obligation d’achat du véhicule à la fin de la période de leasing, que le consommateur ne supporte pas l’amortissement complet des coûts encourus par le fournisseur du véhicule pour l’acquisition de celui-ci et qu’il ne supporte pas les risques liés à la valeur résiduelle du véhicule à l’expiration du contrat. L’obligation pour le consommateur de compenser la perte de valeur du véhicule s’il est constaté, lors de sa restitution, que l’état de celui-ci ne correspond pas à son âge ou que le kilométrage maximal convenu a été dépassé ne permet pas non plus de distinguer ces types de contrats.

149    Dès lors que l’objet principal d’un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile sans obligation d’achat, tel que celui en cause au principal, a trait à la location de ce véhicule, un tel contrat ne saurait donc être qualifié de contrat de service financier ayant trait au crédit, au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2002/65, lu en combinaison avec l’article 2, sous b), de celle-ci.

150    Troisièmement, un tel contrat ne portant manifestement pas non plus sur « un service ayant trait à l’assurance, aux retraites individuelles, aux investissements et aux paiements », au sens de l’article 2, sous b), de la directive 2002/65, il ne saurait être qualifié de contrat portant sur la commercialisation d’un « service financier », au sens de cette même disposition.

151    Dès lors que l’une des deux conditions cumulatives mentionnées au point 137 du présent arrêt n’est pas satisfaite, il convient de conclure qu’un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, caractérisé notamment par le fait que ni ce contrat ni un contrat séparé ne prévoient que le consommateur est tenu d’acheter le véhicule à l’expiration du contrat ainsi que par le fait que le consommateur ne supporte ni l’amortissement complet des coûts encourus par le fournisseur du véhicule pour l’acquisition de celui-ci ni les risques liés à la valeur résiduelle du véhicule à l’expiration du contrat, ne relève pas du champ d’application de la directive 2002/65.

152    S’agissant, en troisième lieu, du champ d’application de la directive 2011/83, il y a lieu de rappeler que, conformément à son article 3, paragraphe 1, cette directive s’applique, dans les conditions et dans la mesure prévues par ses dispositions, à tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, à l’exception des contrats visés au paragraphe 3 de cet article, tels que les contrats portant sur les services financiers, ces derniers étant définis à l’article 2, point 12, de cette directive, en substance, de la même manière qu’à l’article 2, sous b), de la directive 2002/65 mentionné au point 139 du présent arrêt.

153    Un contrat de leasing tel que celui en cause au principal ne peut pas être qualifié, par analogie avec les considérations exposées aux points 143 à 149 du présent arrêt, de contrat de « service financier » au sens de l’article 2, point 12, de cette directive 2011/83. Toutefois, il n’est pas exclu qu’un tel contrat de leasing puisse être qualifié de « contrat de service » au sens de l’article 2, point 6, de cette même directive.

154    À cet égard, la notion de « contrat de service », visée à cette dernière disposition, est définie de manière large comme correspondant à « tout contrat autre qu’un contrat de vente en vertu duquel le professionnel fournit ou s’engage à fournir un service au consommateur et le consommateur paie ou s’engage à payer le prix de celui-ci ». Il résulte du libellé de cette disposition que cette notion doit être comprise comme incluant tous les contrats qui ne relèvent pas de la notion de « contrat de vente » (arrêt du 12 mars 2020, Verbraucherzentrale Berlin, C‑583/18, EU:C:2020:199, point 22).

155    Un contrat de leasing tel que celui en cause au principal, par lequel un professionnel s’engage à mettre un véhicule à la disposition d’un consommateur en contrepartie de paiements échelonnés sans obligation d’achat dudit véhicule au terme du leasing, ne constitue pas un « contrat de vente », qui consisterait à transférer la propriété du véhicule au consommateur, au sens de l’article 2, point 5, de la directive 2011/83. Dès lors que ce contrat ne relève pas non plus de la liste des exclusions visées à l’article 3, paragraphe 3, de cette directive, il y a lieu de considérer qu’il relève du champ d’application de ladite directive en tant que « contrat de service », au sens de l’article 2, point 6, de cette dernière.

156    Eu égard aux motifs qui précèdent, il convient de répondre à la cinquième question dans l’affaire C‑38/21 que l’article 2, point 6 de la directive 2011/83, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, caractérisé par le fait que ni ce contrat ni un contrat séparé ne prévoient que le consommateur est tenu d’acheter le véhicule à l’expiration du contrat, relève du champ d’application de cette directive, en tant que « contrat de service », au sens de l’article 2, point 6, de celle-ci. En revanche, un tel contrat ne relève du champ d’application ni de la directive 2002/65 ni de la directive 2008/48.

 Sur les sixième à huitième questions dans l’affaire C38/21

157    Il convient d’observer que ces questions sont toutes posées dans l’hypothèse où la Cour conclurait qu’un contrat de leasing tel que celui en cause au principal doit être qualifié de contrat portant sur des services financiers au sens des directives 2002/65 et/ou 2011/83.

158    Or, il ressort des considérations exposées aux points 149, 151 et 156 du présent arrêt qu’un tel contrat ne porte pas sur des services financiers au sens de ces directives, mais qu’il doit être qualifié de « contrat de service » au sens de l’article 2, point 6, de la directive 2011/83, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, de celle-ci.

159    Ainsi, les sixième à huitième questions conservent leur pertinence dans la mesure où elles portent sur l’interprétation des dispositions de cette directive.

160    À cet égard, il importe de préciser que ces questions visent, en substance, à permettre à la juridiction de renvoi de déterminer si VK peut se prévaloir du droit de rétractation, prévu à l’article 9 de la directive 2011/83, pour les seuls contrats conclus à distance ou hors établissement commercial, ou si ce droit est exclu en vertu de l’article 16 de celle-ci.

161    Dans ces conditions, la Cour juge utile de répondre d’abord à la huitième question relative à la notion de « contrat à distance », puis à la sixième question relative à la notion de « contrat hors établissement » et, enfin, à la septième question relative à l’article 16 de la directive 2011/83.

–       Sur la huitième question dans l’affaire C38/21

162    Par la huitième question dans l’affaire C‑38/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, point 7, de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de service, au sens de l’article 2, point 6, de cette directive, conclu entre un consommateur et un professionnel en recourant à une technique de communication à distance, peut être qualifié de « contrat à distance », au sens de la première de ces dispositions, lorsque, au cours de la phase préparatoire à la conclusion du contrat, le consommateur s’est trouvé en la présence physique d’un intermédiaire habilité à répondre à ses questions et à préparer le contrat mais non à conclure celui-ci.

163    À cet égard, il convient de rappeler, d’une part, que l’article 2, point 7, de la directive 2011/83 définit la notion de « contrat à distance » comme tout contrat conclu entre le professionnel et le consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de service à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance, jusqu’au moment, et y compris au moment, où le contrat est conclu.

164    Il résulte ainsi du libellé de cette disposition, notamment de l’expression « jusqu’au moment, et y compris au moment », que, aux fins de la qualification d’un contrat comme « contrat à distance », l’exigence d’un recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance entre le professionnel et le consommateur sans la présence physique simultanée de ces personnes vaut non seulement pour la conclusion du contrat en tant que telle, mais également pour la phase préparatoire à celle-ci.

165    D’autre part, il découle de la définition de la notion de « professionnel », figurant à l’article 2, point 2, de la directive 2011/83, qu’un professionnel peut agir, en ce qui concerne des contrats relevant du champ d’application de cette directive, par l’intermédiaire d’une autre personne agissant en son nom ou pour son compte.

166    À cet égard, il y a lieu de relever qu’un intermédiaire qui, comme en l’occurrence, est habilité, par le professionnel, à procéder au calcul des différents éléments de l’objet du contrat, à discuter des modalités et des conditions du contrat avec le consommateur, à fournir des renseignements sur le contrat envisagé et à répondre aux questions de ce consommateur ainsi qu’à remplir, à réceptionner ou à transmettre la demande écrite dudit consommateur relative à la conclusion de ce contrat avec le professionnel agit nécessairement à la fois au nom et pour le compte du professionnel.

167    Il résulte des considérations exposées aux points 163 à 166 du présent arrêt que la présence physique simultanée du consommateur et d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel lors de la phase préparatoire à la conclusion du contrat s’oppose, en principe, à ce que ledit contrat puisse être considéré comme ayant été conclu par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance.

168    Néanmoins, ainsi qu’il ressort du considérant 20 de la directive 2011/83, la définition de la notion de « contrat à distance » couvre les situations dans lesquelles le consommateur se rend dans un établissement commercial uniquement afin de collecter des informations sur les biens ou les services, puis négocie et conclut le contrat à distance. En revanche, un contrat qui est négocié dans l’établissement commercial du professionnel et qui est finalement conclu en recourant à une technique de communication à distance n’est pas considéré comme un contrat à distance.

169    Les dispositions de la directive 2011/83 en matière de contrats à distance visent en ce sens à éviter que l’utilisation de techniques de communication à distance conduise à une diminution des informations fournies au consommateur, en particulier dans la mesure où les informations fournies avant la conclusion d’un contrat en vertu de l’article 6 de cette directive, lesquelles portent tant sur les conditions contractuelles et les conséquences de ladite conclusion, permettant à ce consommateur de décider s’il souhaite se lier contractuellement à un professionnel, que sur la bonne exécution du contrat, notamment sur l’exercice des droits dudit consommateur, sont, pour ce dernier, d’une importance fondamentale (voir, en ce sens, arrêts du 23 janvier 2019, Walbusch Walter Busch, C‑430/17, EU:C:2019:47, points 35 et 36 ainsi que jurisprudence citée, et du 5 mai 2022, Victorinox, C‑179/21, EU:C:2022:353, point 26 ainsi que jurisprudence citée).

170    Ainsi, il n’y a pas lieu de retenir la qualification de « contrat à distance », au sens de l’article 2, point 7, de la directive 2011/83, pour des contrats qui, certes, ont été conclus avec le professionnel en recourant à une technique de communication à distance, mais qui ont fait l’objet d’une négociation entre le consommateur et un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel, au cours de laquelle le consommateur, s’étant trouvé en présence physique de cet intermédiaire, a notamment reçu les informations visées à l’article 6 de la directive 2011/83 et a pu poser des questions à celui-ci sur le contrat envisagé ou l’offre proposée, afin de dissiper toute incertitude quant à la portée de son éventuel engagement contractuel avec le professionnel.

171    En revanche, un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel en recourant à une ou plusieurs techniques de communication à distance peut être qualifié de « contrat à distance », au sens de l’article 2, point 7, de la directive 2011/83, lorsque, lors de la phase préparatoire à la conclusion du contrat avec le professionnel, le consommateur s’est trouvé en présence physique d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel, cet intermédiaire s’étant cependant limité à permettre au consommateur de collecter des informations sur l’objet du contrat et, le cas échéant, à réceptionner et à transmettre au professionnel la demande du consommateur sans négocier avec ce dernier ni lui fournir les informations visées à l’article 6 de cette directive.

172    Il ressort des considérations exposées aux points 46 et 166 du présent arrêt qu’une phase de négociation a bien eu lieu entre VK et un intermédiaire habilité à agir au nom ou pour le compte de BMW Bank, en particulier dans la mesure où les éléments et la durée du leasing ainsi que le montant du paiement initial et des mensualités dus ont fait, en tant qu’informations visées à l’article 6, paragraphe 1, sous a), e), g) et o), de la directive 2011/83, l’objet d’une discussion entre ces deux personnes, l’intermédiaire ayant en outre répondu aux questions de VK portant sur le contrat envisagé. Sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi du fait que VK a reçu dans le cadre de cette phase préparatoire, sous une forme claire et compréhensible, toutes les informations visées à l’article 6 de cette directive, il y a dès lors lieu de considérer, conformément aux considérations exposées au point 170 du présent arrêt, que le contrat de leasing en cause au principal n’est pas un contrat à distance au sens de l’article 2, point 7, de la directive 2011/83.

173    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la huitième question dans l’affaire C‑38/21 que l’article 2, point 7, de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de service, au sens de l’article 2, point 6, de cette directive, conclu entre un consommateur et un professionnel en recourant à une technique de communication à distance, ne peut pas être qualifié de « contrat à distance », au sens de la première de ces dispositions, lorsque la conclusion du contrat a été précédée d’une phase de négociation qui s’est déroulée en la présence physique simultanée du consommateur et d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel et au cours de laquelle ce consommateur a reçu de la part de cet intermédiaire, aux fins de cette négociation, l’ensemble des informations visées à l’article 6 de ladite directive et a pu poser des questions audit intermédiaire sur le contrat envisagé ou l’offre proposée, afin de dissiper toute incertitude quant à la portée de son éventuel engagement contractuel avec le professionnel.

–       Sur la sixième question dans l’affaire C38/21

174    Par la sixième question dans l’affaire C‑38/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, point 8, sous a), de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de service, au sens de l’article 2, point 6, de cette directive, conclu entre un consommateur et un professionnel, peut être qualifié de « contrat hors établissement », au sens de la première de ces dispositions, lorsque, au cours de la phase préparatoire à la conclusion du contrat par le recours à une technique de communication à distance, le consommateur s’est rendu dans l’établissement commercial d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel aux fins de la négociation de ce contrat mais opérant dans un autre domaine d’activité que ce professionnel.

175    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 2, point 8, sous a), de la directive 2011/83, la notion de « contrat hors établissement » est notamment définie comme tout contrat entre le professionnel et le consommateur conclu en la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, dans un lieu qui n’est pas l’établissement commercial du professionnel. En vertu de l’article 2, point 9, de cette directive, la notion d’« établissement commercial » est définie comme visant tout site commercial immeuble où le professionnel exerce son activité en permanence ou bien tout site commercial meuble où le professionnel exerce son activité de manière habituelle.

176    L’article 2, point 2, de la directive 2011/83 prévoit que le « professionnel » peut agir par l’intermédiaire d’une autre personne agissant en son nom ou pour son compte. En outre, il ressort du considérant 22 de cette directive que l’établissement commercial d’un intermédiaire devrait être considéré comme un établissement professionnel au sens de cette directive, c’est-à-dire comme l’établissement commercial du professionnel, au sens de l’article 2, point 9, de ladite directive.

177    Partant, il ressort d’une lecture combinée de l’ensemble de ces dispositions à la lumière de ce considérant que, lorsqu’un consommateur se rend spontanément dans l’établissement commercial d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel et y négocie un contrat avant de conclure celui-ci avec le professionnel par le recours à une technique de communication à distance, ce contrat ne constitue pas un « contrat hors établissement », au sens de l’article 2, paragraphe 8, sous a), de la directive 2011/83, et cela même si le consommateur s’est uniquement rendu dans l’établissement commercial de l’intermédiaire.

178    Cette interprétation est confortée par l’objectif poursuivi par les dispositions de la directive 2011/83 relatives aux contrats hors établissement, lequel consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 21 et 37 de cette directive, à protéger le consommateur contre le risque d’être soumis à une pression psychologique ou d’être confronté à un élément de surprise lorsqu’il se trouve en dehors de l’établissement commercial du professionnel (voir, en ce sens, arrêt du 7 août 2018, Verbraucherzentrale Berlin, C‑485/17, EU:C:2018:642, point 33).

179    Dans ce contexte, la Cour a déjà jugé que, si le législateur de l’Union a en principe prévu un droit de rétractation en vue de protéger le consommateur, en ce qui concerne les contrats hors établissement, dans le cas où, au moment de la conclusion du contrat, le consommateur ne se trouve pas dans un établissement occupé d’une façon permanente ou habituelle par le professionnel, c’est parce qu’il a estimé que ledit consommateur ne peut s’attendre à être sollicité par le professionnel que lorsqu’il se rend spontanément dans un établissement occupé en permanence ou habituellement par ce professionnel, de sorte que, le cas échéant, il ne saurait valablement soutenir par la suite avoir été surpris par l’offre dudit professionnel (voir, en ce sens, arrêt du 7 août 2018, Verbraucherzentrale Berlin, C‑485/17, EU:C:2018:642, point 34).

180    Or, il ne saurait en aller différemment lorsqu’un tel consommateur se rend spontanément dans l’établissement commercial d’un intermédiaire agissant selon toute apparence au nom ou pour le compte d’un tel professionnel, et ce indépendamment du fait de savoir si cet intermédiaire est habilité à agir aux seules fins de la négociation du contrat et non de sa conclusion. Dans un tel cas, l’établissement commercial de l’intermédiaire doit être assimilé à l’établissement commercial du professionnel au sens de l’article 2, point 8, sous a), de la directive 2011/83, lu à la lumière du considérant 22 de celle-ci.

181    Cela étant, dans l’hypothèse où l’intermédiaire est lui-même un professionnel dont l’activité relève d’un autre secteur que celle du professionnel au nom ou pour le compte duquel il agit, il est déterminant de savoir, aux fins de pouvoir procéder à une telle assimilation, si un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé peut ou non s’attendre, en se rendant dans l’établissement commercial dudit intermédiaire, à faire l’objet d’une sollicitation commerciale de la part de ce dernier aux fins de la négociation puis de la conclusion à distance d’un contrat relevant de l’activité du professionnel au nom ou pour le compte duquel agit cet intermédiaire (voir, en ce sens, arrêt du 7 août 2018, Verbraucherzentrale Berlin, C‑485/17, EU:C:2018:642, points 43 et 44).

182    Dans ces conditions, il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier si, en se rendant dans l’établissement commercial du concessionnaire automobile, VK pouvait, du point de vue d’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, s’attendre à faire l’objet d’une sollicitation commerciale de la part de ce concessionnaire aux fins de la négociation et de la conclusion d’un contrat de leasing avec BMW Bank et, par ailleurs, aisément comprendre que ledit concessionnaire agissait au nom ou pour le compte du professionnel.

183    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la sixième question posée dans l’affaire C‑38/21 que l’article 2, point 8, sous a), de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de service, au sens de l’article 2, point 6, de cette directive, conclu entre un consommateur et un professionnel ne peut pas être qualifié de « contrat hors établissement », au sens de la première de ces dispositions, lorsque, au cours de la phase préparatoire à la conclusion du contrat par le recours à une technique de communication à distance, le consommateur s’est rendu dans l’établissement commercial d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel aux fins de la négociation de ce contrat mais opérant dans un autre domaine d’activité que ce professionnel, à condition que ce consommateur ait pu, en tant que consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, s’attendre, en se rendant dans l’établissement commercial de l’intermédiaire, à faire l’objet d’une sollicitation commerciale de la part de ce dernier aux fins de la négociation et de la conclusion d’un contrat de service avec le professionnel et qu’il ait en outre pu aisément comprendre que cet intermédiaire agissait au nom ou pour le compte dudit professionnel.

–       Sur la septième question dans l‘affaire C38/21

184    Par la septième question dans l’affaire C‑38/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens que l’exception au droit de rétractation prévue par cette disposition pour les contrats à distance ou hors établissement relevant du champ d’application de cette directive et portant sur des services de location de voitures assortis d’une date ou d’une période d’exécution spécifique est opposable à un consommateur qui a conclu avec un professionnel, pour une durée de 24 mois, un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile qualifié de contrat de service à distance ou hors établissement au sens de ladite directive.

185    À titre liminaire, il convient de préciser que la réponse de la Cour à cette question ne sera pertinente que dans l’hypothèse où la juridiction de renvoi viendrait à qualifier le contrat de leasing en cause au principal, au regard de la réponse apportée aux huitième et sixième questions dans l’affaire C‑38/21, de contrat à distance ou de contrat hors établissement, au sens de la directive 2011/83.

186    Sous le bénéfice de cette précision, il y a lieu de rappeler que les articles 9 à 15 de cette directive accordent au consommateur un droit de rétractation à la suite de la conclusion d’un contrat à distance ou d’un contrat hors établissement, au sens, respectivement, de l’article 2, points 7 et 8, de ladite directive, et établissent les conditions ainsi que les modalités de l’exercice de ce droit.

187    L’article 16 de la même directive établit cependant des exceptions à ce droit de rétractation, notamment dans l’hypothèse, visée au point l) de cet article, d’une prestation de services de location de voitures si le contrat prévoit une date ou une période d’exécution spécifique.

188    Il convient donc de déterminer si un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile conclu pour une durée de 24 mois, tel que celui en cause au principal, se rapporte à une « prestation de services [...] de location de voitures [pour] une date ou une période d’exécution spécifique », au sens de l’article 16, sous l), de la directive 2011/83. En l’absence d’un renvoi au droit des États membres, cette notion doit, conformément à la jurisprudence rappelée au point 133 du présent arrêt, recevoir une interprétation autonome et uniforme qui doit être recherchée en tenant compte des termes de ladite notion ainsi qu’à la lumière du contexte et de l’objectif poursuivi par cette disposition.

189    En outre, selon une jurisprudence constante de la Cour, lorsque les termes à interpréter figurent dans une disposition qui constitue une dérogation à un principe ou, plus spécifiquement, à des règles du droit de l’Union visant à protéger les consommateurs, ils doivent être interprétés de manière stricte [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2005, EasyCar, C‑336/03, EU:C:2005:150, point 21, et du 14 mai 2020, NK (Projet de maison individuelle), C‑208/19, EU:C:2020:382, point 40]. Toutefois, cela ne signifie pas que les termes utilisés pour définir le régime dérogatoire ainsi prévu doivent être interprétés d’une manière qui priverait celui-ci de ses effets. En effet, l’interprétation de ces termes doit être conforme aux objectifs poursuivis par ce régime (arrêt du 30 septembre 2021, Icade Promotion, C‑299/20, EU:C:2021:783, point 31 et jurisprudence citée).

190    S’agissant, en premier lieu, du libellé de l’article 16, sous l), de la directive 2011/83, il convient de considérer que les services de location de voitures visés à cette disposition se caractérisent par la mise à disposition du consommateur, à une date ou pendant une période spécifiques, d’une voiture, c’est-à-dire d’un véhicule automobile, en contrepartie du versement d’un prix de location ou de mensualités (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 10 mars 2005, EasyCar, C‑336/03, EU:C:2005:150, point 27).

191    Or, ainsi que cela a été relevé au point 148 du présent arrêt, l’objet principal d’un contrat de leasing tel que celui en cause au principal consiste à permettre au consommateur d’utiliser le véhicule pendant une période d’exécution spécifique, en l’occurrence 24 mois, en contrepartie du versement mensuel d’une somme d’argent pendant toute cette période. S’il est vrai qu’un tel contrat comporte également un élément de crédit, le libellé de l’article 16, sous l), de la directive 2011/83, en ce qu’il vise de manière générale la « prestation de services de location de voitures », ne permet pas de considérer, y compris en tenant compte de la jurisprudence visée au point 189 du présent arrêt, que le législateur de l’Union a souhaité exclure du champ d’application de cette disposition les contrats de leasing relatifs à un véhicule automobile.

192    En particulier, la circonstance que l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 impose comme condition que le contrat de location de voiture prévoie une date ou une période d’exécution « spécifique » ne permet pas de considérer que le législateur de l’Union n’aurait envisagé que des contrats de location de courte durée. En effet, le terme « spécifique » est également susceptible de couvrir des contrats de location d’une durée plus longue, telle qu’une durée de 24 mois, pour autant que cette dernière soit spécifiée de manière suffisamment précise dans le contrat.

193    En deuxième lieu, s’agissant du contexte dans lequel s’inscrit ladite disposition, il est vrai que les catégories de services autres que ceux de location de voiture qui y sont mentionnées, à savoir les services d’hébergement autres qu’à des fins résidentielles, les services de transport de biens, les services de restauration ainsi que les services liés à des activités de loisirs, sont, en règle générale, fournies de manière ponctuelle ou sur une durée relativement courte. Toutefois, l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 ne laisse apparaître l’existence d’aucune limitation concrète dans le temps permettant de considérer que seuls les contrats de location de voitures conclus pour une certaine durée maximale pourraient relever de l’exception au droit de rétractation que cette disposition instaure. Il doit d’autant moins en aller ainsi que les autres catégories de service peuvent elles aussi, dans certaines circonstances, faire l’objet de contrats de longue durée.

194    En troisième lieu, compte tenu des considérations exposées aux points 190 à 193 du présent arrêt et de la jurisprudence rappelée au point 189 de celui-ci, c’est au regard de l’objectif poursuivi par l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 qu’il convient de déterminer si la notion de « prestation de services [...] de location de voitures [pour] une date ou une période d’exécution spécifique », d’interprétation stricte, inclut les contrats de leasing relatifs à un véhicule automobile conclus pour une durée de 24 mois, tels que celui en cause au principal.

195    Cet objectif consiste, ainsi qu’il ressort du considérant 49 de cette directive, à protéger le professionnel contre le risque lié à la réservation de certaines capacités que ce dernier pourrait avoir des difficultés à remplir en cas d’exercice du droit de rétractation (arrêt du 31 mars 2022, CTS Eventim, C‑96/21, EU:C:2022:238, point 44).

196    Ainsi, l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 vise, notamment, à établir une protection des intérêts des fournisseurs de certains services, afin que ceux-ci ne subissent pas les inconvénients disproportionnés liés à l’annulation, sans frais ni motifs, d’un service ayant donné lieu à une réservation préalable, en conséquence d’une rétractation du consommateur peu de temps avant la date prévue pour la fourniture de ce service (arrêt du 31 mars 2022, CTS Eventim, C‑96/21, EU:C:2022:238, point 45 et jurisprudence citée).

197    En ce qui concerne plus particulièrement l’activité des entreprises de location de voitures, la Cour a jugé que la protection dont le législateur de l’Union a voulu faire bénéficier celle-ci grâce à ladite exception au droit de rétractation est liée au fait que ces entreprises doivent prendre des dispositions pour la réalisation, à la date fixée lors de la réservation, de la prestation convenue et subissent pour cette raison les mêmes inconvénients en cas d’annulation que les entreprises exerçant leur activité dans les autres secteurs énumérés à ladite disposition (voir, par analogie, arrêt du 10 mars 2005, EasyCar, C‑336/03, EU:C:2005:150, point 29).

198    En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que, dans le cadre d’un contrat de leasing tel que celui en cause au principal, le professionnel acquiert le véhicule concerné à la demande et en fonction des spécifications du consommateur. Le professionnel demeure propriétaire du véhicule pendant la durée du contrat, le consommateur étant tenu de lui restituer ce véhicule à l’échéance de celle-ci afin que le professionnel le destine à une nouvelle utilisation, telle qu’un nouveau leasing, une autre forme de location ou une vente.

199    Or, indépendamment de la durée pour laquelle un tel contrat est conclu, le professionnel pourrait, dans le cas où un droit de rétractation serait reconnu au consommateur, rencontrer des difficultés à réaffecter, sans subir à cet égard des inconvénients disproportionnés, le véhicule spécialement acquis à la demande du consommateur pour répondre aux spécifications de ce dernier. En effet, en fonction, notamment, de la marque, du modèle, du type de moteur, de la couleur de la carrosserie ou de l’intérieur du véhicule ou encore des options dont celui-ci est équipé, le professionnel pourrait ne pas réussir, dans un délai raisonnable suivant l’exercice du droit de rétractation, à affecter le véhicule à une autre utilisation équivalente pour la période correspondant à la durée du leasing originellement prévue, sans subir un dommage économique important.

200    Cette interprétation est cohérente avec l’exception au droit de rétractation prévue à l’article 16, sous c), de la directive 2011/83, concernant « la fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ». Certes, un contrat de leasing tel que celui en cause au principal dans l’affaire C-38/21 porte non pas sur la fourniture d’un bien, mais sur la fourniture d’un service. Il n’en demeure pas moins que cette autre exception témoigne de la volonté du législateur de l’Union d’exclure le droit de rétractation dans les cas où un bien a été fabriqué ou confectionné selon des spécifications précises du consommateur, ce qui est le cas lorsqu’un véhicule neuf est commandé selon les spécifications précises du consommateur en vue d’une utilisation dans le cadre d’un contrat de leasing.

201    Il ressort de l’interprétation littérale, contextuelle et téléologique de l’article 16, sous l), de la directive 2011/83, effectuée aux points 190 à 200 du présent arrêt, qu’un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile conclu pour une durée de 24 mois, tel que celui en cause au principal, se rapporte à une « prestation de services [...] de location de voitures [pour] une date ou une période d’exécution spécifique », au sens de l’article 16, sous l), de la directive 2011/83.

202    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la septième question posée dans l’affaire C‑38/21 que l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 doit être interprété en ce sens que relève de l’exception au droit de rétractation prévue à cette disposition pour les contrats à distance ou hors établissement relevant du champ d’application de cette directive et portant sur des services de location de voitures assortis d’une date ou d’une période d’exécution spécifique un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile conclu entre un professionnel et un consommateur et qualifié de contrat de service à distance ou hors établissement au sens de ladite directive, dès lors que l’objet principal de ce contrat consiste à permettre au consommateur d’utiliser un véhicule pendant la durée spécifique prévue par ledit contrat, en contrepartie du versement régulier de sommes d’argent.

 Sur les première à quatrième questions dans l’affaire C38/21

203    Les première à quatrième questions portant sur l’interprétation de dispositions de la directive 2008/48, il convient de constater, en premier lieu, que, puisqu’un contrat de leasing tel que celui en cause au principal ne relève pas, conformément à la réponse à la cinquième question dans l’affaire C‑38/21, du champ d’application de cette directive, il n’est plus nécessaire, en vertu de la jurisprudence rappelée au point 110 du présent arrêt, de répondre à ces première à quatrième questions au regard de ladite directive.

204    Cette constatation n’est pas remise en cause par le fait que la juridiction de renvoi expose que, selon elle, un tel contrat de leasing devrait être régi par analogie par les dispositions de droit national transposant la directive 2008/48.

205    Il est vrai que, en vertu de l’article 1er de la directive 2008/48, lu en combinaison avec le considérant 10 de celle-ci, les États membres ont, malgré l’harmonisation complète des aspects couverts par cette directive, la faculté de maintenir ou d’introduire des dispositions nationales correspondant aux dispositions de ladite directive ou à certaines de ses dispositions pour les contrats de crédit n’entrant pas dans le champ d’application de la même directive, tels que les « contrats de location ou de crédit-bail dans le cadre desquels l’obligation d’acheter l’objet du contrat n’est prévue ni par le contrat lui-même ni par un contrat séparé », visés à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive 2008/48.

206    Il est également vrai que la Cour s’est à maintes reprises déclarée compétente pour statuer sur des demandes préjudicielles portant sur des dispositions du droit de l’Union dans des situations dans lesquelles ces dispositions avaient été rendues applicables par le droit national, celui-ci s’étant conformé, pour les solutions apportées à des situations purement internes, à celles retenues par le droit de l’Union. Dans un tel cas, il existe en effet un intérêt de l’Union certain à ce que, pour éviter des divergences d’interprétation futures, les dispositions ou les notions reprises du droit de l’Union reçoivent une interprétation uniforme, quelles que soient les conditions dans lesquelles elles sont appelées à s’appliquer (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, I.G.I., C‑394/18, EU:C:2020:56, points 45 et 46 ainsi que jurisprudence citée).

207    Cela étant, il ressort de la jurisprudence de la Cour que les dispositions concernées du droit de l’Union doivent avoir été rendues applicables par le droit national de manière directe et inconditionnelle, afin d’assurer un traitement identique aux situations internes et aux situations régies par le droit de l’Union, et que les éléments concrets permettant d’établir une telle applicabilité directe et inconditionnelle doivent ressortir de la décision de renvoi. À cette fin, il incombe à la juridiction de renvoi d’indiquer, conformément à l’article 94 du règlement de procédure de la Cour, en quoi, en dépit de son caractère purement interne, le litige pendant devant elle présente avec les dispositions du droit de l’Union un élément de rattachement qui rend l’interprétation préjudicielle sollicitée nécessaire à la solution de ce litige (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, I.G.I., C‑394/18, EU:C:2020:56, points 46, 48 et 49 ainsi que jurisprudence citée).

208    En l’occurrence, la juridiction de renvoi expose, dans le complément à la demande de décision préjudicielle, que le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a jugé que les contrats de leasing relatifs à un véhicule automobile qui prévoient que le consommateur n’a pas d’obligation d’acheter le véhicule à l’expiration du contrat ne relèvent pas du champ d’application de l’article 506 du BGB, lequel renvoie à des dispositions du BGB ayant transposé la directive 2008/48. Dès lors et nonobstant le fait qu’elle éprouve des doutes quant à cette interprétation, la juridiction de renvoi indique dans sa demande de décision préjudicielle que, selon la jurisprudence du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), qui fait partie du droit allemand, les dispositions de la directive 2008/48 n’ont pas été rendues applicables de manière directe et inconditionnelle par ce droit aux contrats de leasing tels que celui en cause au principal.

209    En second lieu, il y a lieu d’observer que, dans son complément à la demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi expose que, même si le contrat en cause au principal ne devait pas relever du champ d’application de la directive 2008/48 en tant que contrat de crédit à la consommation, les troisième et quatrième questions dans l’affaire C‑38/21 resteraient pertinentes dans le cas où le droit de rétractation prévu pour les contrats hors établissement et pour les contrats à distance par les dispositions du droit allemand transposant les dispositions de la directive 2002/65 et de la directive 2011/83 pourrait être invoqué par le consommateur.

210    À cet égard, il ressort du point 156 du présent arrêt qu’un consommateur tel que VK ne dispose pas d’un droit de rétractation sur le fondement de la directive 2002/65 étant donné qu’un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, tel que celui en cause au principal, ne relève pas du champ d’application de cette directive. En outre, il ressort des points 156 et 202 du présent arrêt que, bien qu’un tel contrat relève du champ d’application de la directive 2011/83 et à supposer qu’il puisse être qualifié de contrat hors établissement ou de contrat à distance au sens de l’article 2, points 6 et 7 de cette directive, le consommateur qui l’a conclu avec un professionnel ne bénéficie pas du droit de rétractation prévu par cette directive, conformément à l’article 16, sous l), de celle-ci.

211    Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de répondre aux troisième et quatrième questions dans l’affaire C‑38/21 au regard des directives 2002/65 et 2011/83.

 Sur la première question dans les affaires C47/21 et C232/21

212    À titre liminaire et pour répondre à l’objection de C Bank, de Volkswagen Bank et d’Audi Bank selon laquelle cette question serait irrecevable, il y a lieu de rappeler que, s’il est vrai que la teneur littérale de ladite question invite la Cour à se prononcer sur la compatibilité de dispositions de droit interne avec le droit de l’Union, une telle formulation n’empêche pas la Cour de fournir à la juridiction de renvoi les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui lui permettront de statuer elle-même sur la compatibilité du droit interne avec le droit de l’Union (arrêt du 17 mars 2021, Consulmarketing, C‑652/19, EU:C:2021:208, point 33 et jurisprudence citée).

213    En l’occurrence, il ressort, tout d’abord, des demandes de décision préjudicielle dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 que les contrats en cause dans ces affaires prévoient que le délai dans lequel le consommateur peut se rétracter ne commence à courir qu’après la conclusion du contrat, sous réserve que l’emprunteur ait reçu l’ensemble des informations obligatoires prévues par le droit allemand et correspondant, en substance, aux mentions indiquées à l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48.

214    Ensuite, ces contrats comportent des clauses qui correspondent au modèle légal prévu par le droit allemand. Alors même que la juridiction de renvoi a établi que certaines de ces clauses n’étaient pas conformes à l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48, elle précise qu’il ressort de l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB que, si le contrat contient une clause mise en évidence et présentée clairement, qui correspond audit modèle, cette clause est réputée répondre aux exigences en matière d’information du consommateur quant à son droit de rétractation.

215    Enfin, il y a lieu d’observer que, si la première question dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 est posée au regard non seulement de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48, mais également de l’article 14, paragraphe 1, de cette directive, seule l’interprétation de la première de ces dispositions est nécessaire aux fins de la réponse à cette question.

216    Dans ces conditions, il convient de comprendre que, par sa première question dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale établissant une présomption légale selon laquelle le professionnel respecte son obligation d’informer le consommateur de son droit de rétractation, lorsque ce professionnel renvoie, dans un contrat, à des dispositions nationales qui renvoient elles-mêmes à un modèle d’information réglementaire à cet égard, tout en utilisant des clauses figurant dans ce modèle qui ne sont pas conformes aux prescriptions de cette disposition de la directive. Dans l’affirmative, la juridiction de renvoi demande également si cette réglementation nationale doit être laissée inappliquée dans un litige opposant exclusivement des particuliers.

217    À cet égard, il importe de souligner que les contrats de prêt en cause dans les litiges au principal dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 correspondent à la définition des contrats de crédit figurant à l’article 3, sous c), de la directive 2008/48. Ces contrats relèvent ainsi du champ d’application de cette directive, conformément à l’article 2, paragraphe 1, de celle-ci.

218    Cette précision étant faite, il convient de rappeler que l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 énumère les informations qui doivent être mentionnées de façon claire et concise dans les contrats de crédit qui relèvent du champ d’application de cette directive en vertu de l’article 2 de celle-ci. L’article 10, paragraphe 2, sous p), de ladite directive dispose en particulier que le contrat de crédit doit mentionner d’une telle façon l’existence ou l’absence d’un droit de rétractation, la période durant laquelle ce droit peut être exercé et les autres conditions pour l’exercer, y compris des informations sur l’obligation incombant au consommateur de payer le capital prélevé et les intérêts ainsi que le montant de l’intérêt journalier.

219    La Cour a déjà jugé que l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 s’oppose à ce qu’un contrat de crédit procède, s’agissant des informations visées à l’article 10 de cette directive, à un renvoi à une disposition nationale qui renvoie elle-même à d’autres dispositions du droit de l’État membre en cause. En effet, lorsqu’un contrat conclu par un consommateur renvoie à certaines dispositions de droit national s’agissant des informations dont la mention est requise en vertu de l’article 10 de la directive 2008/48, le consommateur n’est en mesure, sur la base du contrat, ni de déterminer l’étendue de son engagement contractuel, ni de contrôler si tous les éléments requis, conformément à ladite disposition, figurent dans le contrat qu’il a conclu, ni, a fortiori, de vérifier si le délai de rétractation dont il peut disposer a commencé à courir à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Kreissparkasse Saarlouis, C‑66/19, EU:C:2020:242, points 44 et 49).

220    Il s’ensuit que l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 s’oppose à l’insertion dans le contrat de crédit d’une clause qui renvoie à des dispositions nationales renvoyant elles-mêmes à un modèle d’information réglementaire, tel que le modèle légal. Il en va de même a fortiori lorsque des clauses figurant dans un tel modèle sont contraires à ladite disposition en raison de leur absence de clarté dans le contexte du contrat concerné. Dès lors, la même disposition s’oppose tout autant à une réglementation nationale attachant à l’utilisation de telles clauses une présomption légale selon laquelle le professionnel respecte son obligation d’informer le consommateur de son droit de rétractation.

221    S’agissant des conséquences que la juridiction de renvoi doit tirer de cette constatation, il importe de rappeler qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne adoptées aux fins de transposer les obligations prévues par une directive, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de cette directive pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci (arrêt du 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin, C‑261/20, EU:C:2022:33, point 27 et jurisprudence citée).

222    Cependant, le principe d’interprétation conforme du droit national connaît certaines limites. Ainsi, l’obligation pour le juge national de se référer au contenu d’une directive lorsqu’il interprète et applique les règles pertinentes du droit interne est limitée par les principes généraux du droit et elle ne peut pas servir de fondement à une interprétation contra legem du droit national (arrêt du 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin, C‑261/20, EU:C:2022:33, point 28 et jurisprudence citée).

223    En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que, selon le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), le libellé, la genèse et la finalité des dispositions nationales en cause au principal s’opposent à ce que celles-ci puissent faire l’objet d’une interprétation conforme à la directive 2008/48. La juridiction de renvoi évoque, quant à elle, l’existence d’une position doctrinale en faveur d’une telle interprétation, tout en envisageant d’écarter l’application de ces dispositions nationales.

224    Dans ces conditions, il incombe à cette juridiction de vérifier si les dispositions nationales en cause au principal se prêtent à une interprétation conforme à la directive 2008/48, étant précisé qu’elle ne saurait valablement considérer qu’elle se trouve dans l’impossibilité de procéder à une telle interprétation en raison du seul fait que ces dispositions ont été interprétées par d’autres juridictions de l’État membre dont elle relève, fût-ce une juridiction suprême, dans un sens qui n’est pas compatible avec ce droit (voir, en ce sens, arrêt du 22 avril 2021, Profi Credit Slovakia, C‑485/19, EU:C:2021:313, point 72 et jurisprudence citée).

225    Dans l’hypothèse où la juridiction de renvoi en viendrait à conclure à une telle impossibilité, il convient de rappeler que, à défaut de pouvoir procéder à une interprétation de la réglementation nationale conforme aux exigences du droit de l’Union, le principe de primauté de ce droit exige que le juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions dudit droit assure le plein effet de celles-ci en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute réglementation ou pratique nationale, même postérieure, qui est contraire à une disposition du droit de l’Union d’effet direct, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de cette réglementation ou pratique nationale par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel [arrêts du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct), C‑205/20, EU:C:2022:168, point 37 et jurisprudence citée, ainsi que du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 95].

226    Or, il est de jurisprudence constante qu’une directive ne peut pas, par elle-même, créer d’obligations à l’égard d’un particulier et ne peut donc être invoquée en tant que telle à l’encontre de celui-ci devant une juridiction nationale. Partant, même claire, précise et inconditionnelle, une disposition d’une directive ne permet pas au juge national d’écarter une disposition de son droit interne qui y est contraire, si, ce faisant, une obligation supplémentaire venait à être imposée à un particulier (voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin, C‑261/20, EU:C:2022:33, point 32 et jurisprudence citée).

227    En l’occurrence, il est constant, d’une part, que les litiges au principal opposent exclusivement des particuliers. D’autre part, si les dispositions nationales en cause étaient écartées en application de l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 dans les litiges au principal, les banques défenderesses dans ces litiges seraient privées du bénéfice de la présomption légale que ces dispositions établissent et, partant, seraient tenues de mentionner, de manière claire et compréhensible dans les contrats en cause au principal, les informations relatives au droit de rétractation énumérées dans cette disposition. Or, la jurisprudence rappelée au point précédent exclut qu’un tel effet puisse être reconnu à ladite disposition, sur le seul fondement du droit de l’Union.

228    Il s’ensuit que la juridiction de renvoi n’est pas tenue, sur le seul fondement du droit de l’Union, de laisser inappliqué l’article 247, paragraphe 6, second alinéa, troisième phrase, et paragraphe 12, premier alinéa, troisième phrase, de l’EGBGB, alors même que ces dispositions sont contraires à l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48, sans préjudice de la possibilité pour cette juridiction d’écarter lesdites dispositions sur le fondement de son droit interne (voir, par analogie, arrêt du 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin, C‑261/20, EU:C:2022:33, point 33).

229    Il importe néanmoins de préciser que la partie lésée par la non-conformité du droit national au droit de l’Union peut se prévaloir de la jurisprudence issue de l’arrêt du 19 novembre 1991, Francovich e.a., (C‑6/90 et C‑9/90, EU:C:1991:428), pour obtenir, le cas échéant, réparation du dommage subi (voir, en ce sens, arrêts du 7 mars 1996, El Corte Inglés, C‑192/94, EU:C:1996:88, point 22, ainsi que du 18 janvier 2022, Thelen Technopark Berlin, C‑261/20, EU:C:2022:33, point 41 et jurisprudence citée).

230    Eu égard aux motifs qui précédent, il y a lieu de répondre à la première question dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 que l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale établissant une présomption légale selon laquelle le professionnel respecte son obligation d’informer le consommateur de son droit de rétractation, lorsque ce professionnel renvoie, dans un contrat, à des dispositions nationales qui renvoient elles-mêmes à un modèle d’information réglementaire à cet égard, tout en utilisant des clauses figurant dans ce modèle qui ne sont pas conformes aux prescriptions de cette disposition de la directive. À défaut de pouvoir interpréter la réglementation nationale en cause de manière conforme à la directive 2008/48, une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, n’est pas tenue, sur le fondement du seul droit de l’Union, de laisser inappliquée une telle réglementation, sans préjudice de la possibilité pour cette juridiction de l’écarter sur le fondement de son droit interne et, à défaut, du droit pour la partie lésée par la non-conformité du droit national au droit de l’Union de demander réparation du préjudice qui en a résulté pour elle.

 Sur la deuxième question, sous a), dans l’affaire C232/21

231    Par la deuxième question, sous a), dans l’affaire C‑232/21, la juridiction de renvoi demande si l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que le montant de l’intérêt journalier qui doit être indiqué dans un contrat de crédit en vertu de cette disposition, applicable en cas d’exercice par le consommateur du droit de rétractation, doit résulter arithmétiquement du taux débiteur contractuel convenu dans ce contrat.

232    L’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48 dispose qu’un contrat de crédit doit mentionner, de façon claire et concise, des informations sur l’obligation incombant au consommateur, en cas d’exercice de son droit de rétractation, de payer le capital prélevé et les intérêts conformément à l’article 14, paragraphe 3, sous b), de cette directive ainsi que le montant de l’intérêt journalier.

233    Il ressort de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, lu à la lumière du considérant 31 de celle-ci, que l’exigence consistant à mentionner, dans un contrat de crédit établi sur un support papier ou sur un autre support durable, de façon claire et concise, les éléments visés par cette disposition est nécessaire afin que le consommateur soit en mesure de connaître ses droits et ses obligations (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 70 ainsi que jurisprudence citée).

234    La connaissance et une bonne compréhension, par le consommateur, des éléments que doit obligatoirement contenir un contrat de crédit, conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, sont nécessaires à la bonne exécution de ce contrat et, en particulier, à l’exercice des droits du consommateur, parmi lesquels figure son droit de rétractation (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 71 ainsi que jurisprudence citée).

235    Afin de permettre une bonne compréhension desdits éléments dans le respect de l’exigence de clarté posée par l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, l’information fournie dans un contrat de crédit doit donc être dénuée de toute contradiction objectivement susceptible d’induire en erreur un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, quant à la portée de ses droits et obligations en vertu dudit contrat.

236    Par ailleurs, l’article 14, paragraphe 3, sous b), de la directive 2008/48 prévoit notamment que, en cas d’exercice du droit de rétractation, les intérêts doivent être calculés sur la base du taux débiteur convenu. Il convient de considérer que la notion d’« intérêts » englobe également les intérêts journaliers visés à l’article 10, paragraphe 2, sous p), de cette directive, dès lors que l’article 14, paragraphe 3, sous b), de ladite directive vise l’ensemble des « intérêts cumulés sur [l]e capital depuis la date à laquelle le crédit a été prélevé jusqu’à la date à laquelle le capital est payé ».

237    Il ressort ainsi des dispositions combinées de l’article 10, paragraphe 2, sous p), et de l’article 14, paragraphe 3, sous b), de la directive 2008/48 que, s’agissant du montant de l’intérêt journalier dont le consommateur est tenu de s’acquitter en cas d’exercice de son droit de rétractation, cet intérêt ne peut en aucun cas être supérieur au montant résultant arithmétiquement du taux débiteur convenu dans le contrat de crédit.

238    Compte tenu de la jurisprudence rappelée aux points 233 à 235 du présent arrêt, l’information fournie dans le contrat en ce qui concerne le montant de l’intérêt journalier doit être indiquée de façon claire et concise de sorte, notamment, que, lue en combinaison avec d’autres informations, elle soit dénuée de toute contradiction objectivement susceptible d’induire en erreur un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé quant au montant d’intérêts journaliers qu’il devra payer au final. À défaut d’une information présentant ces caractéristiques, aucun montant d’intérêt journalier n’est dû.

239    Il incombera à la juridiction de renvoi de vérifier si, au regard des clauses contractuelles en cause dans l’affaire C‑232/21, un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, était en mesure d’identifier clairement le montant de l’intérêt journalier dû en cas d’exercice du droit de rétractation.

240    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question, sous a), dans l’affaire C‑232/21 que l’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48, lu en combinaison avec l’article 14, paragraphe 3, sous b), de cette directive, doit être interprété en ce sens que le montant de l’intérêt journalier qui doit être indiqué dans un contrat de crédit en vertu de cette disposition, applicable en cas d’exercice par le consommateur du droit de rétractation, ne peut en aucun cas être supérieur au montant résultant arithmétiquement du taux débiteur contractuel convenu dans ce contrat. L’information fournie dans le contrat en ce qui concerne le montant de l’intérêt journalier doit être indiquée de façon claire et concise de sorte, notamment, que, lue en combinaison avec d’autres informations, elle soit dénuée de toute contradiction objectivement susceptible d’induire en erreur un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé quant au montant d’intérêts journaliers qu’il devra payer au final. À défaut d’une information présentant ces caractéristiques, aucun montant d’intérêt journalier n’est dû.

 Sur la deuxième question, sous d), dans l’affaire C47/21

241    Par la deuxième question, sous d), dans l’affaire C‑47/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de crédit doit indiquer les conditions de forme essentielles auxquelles est soumise l’introduction d’une procédure extrajudiciaire de réclamation ou de recours ou s’il est suffisant que ce contrat renvoie à cet égard à un règlement de procédure disponible sur demande ou consultable sur Internet.

242    À cet égard, il importe de rappeler que, conformément à l’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48, un contrat de crédit doit mentionner, de façon claire et concise, l’existence ou non de procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours accessibles au consommateur et, lorsque de telles procédures existent, les modalités d’accès à ces dernières.

243    Dans ce contexte, la Cour a déjà jugé que, si l’information figurant dans le contrat de crédit ne doit pas nécessairement reproduire l’ensemble des règles procédurales relatives aux procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours accessibles au consommateur, l’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48 vise cependant à assurer, d’une part, que le consommateur puisse décider, en toute connaissance des faits, s’il est opportun pour lui de recourir à l’une de ces procédures et, d’autre part, qu’il soit effectivement en mesure d’intenter une telle procédure sur la base des informations figurant dans le contrat de crédit (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, points 132 et 135).

244    À cette fin, il est essentiel que le consommateur soit informé, premièrement, de toutes les procédures extrajudiciaires de réclamation ou de recours à sa disposition et, le cas échéant, du coût de chacune d’elles, deuxièmement, du fait que la réclamation ou le recours doit être présenté par courrier ou par voie électronique, troisièmement, de l’adresse physique ou électronique à laquelle cette réclamation ou ce recours doit être envoyé et, quatrièmement, des autres conditions formelles auxquelles cette réclamation ou ce recours est soumis (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 136).

245    La Cour a déjà jugé à cet égard qu’un simple renvoi, opéré dans le contrat de crédit, à un règlement de procédure consultable sur Internet ou à un autre acte ou document portant sur les modalités d’accès à des procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours n’est pas suffisant (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 137). Il doit en aller de même lorsque le contrat de crédit mentionne qu’un tel règlement est disponible sur demande.

246    Eu égard aux motifs qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question, sous d), dans l’affaire C‑47/21 que l’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de crédit doit mentionner les informations essentielles portant sur toutes les procédures extrajudiciaires de réclamation ou de recours à la disposition du consommateur et, le cas échéant, le coût de chacune d’elles, le fait que la réclamation ou le recours doit être présenté par courrier ou par voie électronique, l’adresse physique ou électronique à laquelle cette réclamation ou ce recours doit être envoyé et les autres conditions formelles auxquelles cette réclamation ou ce recours est soumis, étant entendu qu’un simple renvoi, opéré dans le contrat de crédit, à un règlement de procédure disponible sur demande ou consultable sur Internet ou à un autre acte ou document portant sur les modalités d’accès à des procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours n’est pas suffisant.

 Sur la deuxième question, sous b), aa), dans les affaires C47/21 et C232/21

247    Par la deuxième question, sous b), aa), dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de crédit doit, pour le calcul de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt, indiquer une formule arithmétique suffisamment concrète et compréhensible pour le consommateur de manière à ce que celui-ci puisse calculer, au moins approximativement, le montant dû dans un tel cas.

248    Aux termes de l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48, le contrat de crédit doit mentionner, de façon claire et concise, « le droit au remboursement anticipé, la procédure à suivre en cas de remboursement anticipé ainsi que, le cas échéant, des informations sur le droit du prêteur à une indemnité et le mode de calcul de cette indemnité ».

249    En l’occurrence, il ressort des décisions de renvoi que les contrats de crédit en cause dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 prévoient, en substance, que, en cas de remboursement anticipé du prêt par le consommateur, la banque peut réclamer une indemnité qui est calculée conformément au cadre arithmétique prescrit par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), lequel tient compte, notamment, du niveau du taux d’intérêt qui a varié entre-temps, des flux de trésorerie initialement convenus pour le prêt, du manque à gagner de la banque prêteuse, des frais administratifs liés au remboursement anticipé ainsi que des coûts du risque et des frais administratifs économisés grâce au remboursement anticipé. Ces contrats précisent également que l’indemnité de remboursement anticipé ainsi calculée est réduite au plus faible des deux montants suivants lorsqu’elle est plus élevée : soit un pour cent ou, lorsque le remboursement anticipé est effectué moins de sept ans avant la date de remboursement convenue, 0,5 pour cent du montant remboursé de manière anticipée, soit le montant des intérêts débiteurs que l’emprunteur aurait versé entre la date du remboursement anticipé et la date de remboursement convenue.

250    Dans un contexte similaire, la Cour a déjà jugé que, dans le cas où la directive 2008/48 prévoit une obligation, pour le professionnel, de porter à la connaissance du consommateur le contenu de l’engagement contractuel qui lui est proposé, dont certains éléments sont déterminés par les dispositions législatives ou réglementaires impératives d’un État membre, ce professionnel est tenu d’informer de façon claire et concise ce consommateur du contenu desdites dispositions afin que ce dernier soit en mesure de connaître ses droits et ses obligations (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 99 ainsi que jurisprudence citée).

251    S’il n’est pas nécessaire, à cette fin, s’agissant de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé visée à l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48, que le contrat de crédit précise la formule arithmétique au moyen de laquelle cette indemnité sera calculée, il doit néanmoins indiquer le mode de calcul de cette dernière d’une manière concrète et facilement compréhensible pour un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, de manière à ce que celui-ci puisse déterminer le montant de l’indemnisation due en cas de remboursement anticipé sur la base des renseignements fournis dans le contrat de crédit (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 100).

252    Ainsi, la Cour a jugé qu’un simple renvoi, aux fins du calcul de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt, au cadre arithmétique financier prescrit par une juridiction nationale ne répond pas à l’exigence, rappelée au point 250 du présent arrêt, de porter à la connaissance du consommateur le contenu de son engagement contractuel (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 101).

253    Cela étant, l’obligation, visée à l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48, d’informer le consommateur du mode de calcul de l’indemnité qu’il devra verser au prêteur en cas de remboursement anticipé du prêt vise à permettre au consommateur de déterminer le montant de cette indemnité sur la base des renseignements fournis dans le contrat de crédit. À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la fourniture d’une information incomplète ou erronée ne peut être assimilée à un défaut d’information qu’à la condition que le consommateur soit, de ce fait, induit en erreur sur ses droits et obligations (voir, en ce sens, arrêts du 10 avril 2008, Hamilton, C‑412/06, EU:C:2008:215, point 35, ainsi que du 19 décembre 2019, Rust Hackner e.a., C‑355/18 à C‑357/18 et C‑479/18, EU:C:2019:1123, point 78) et que, partant, il soit amené à conclure un contrat qu’il n’aurait éventuellement pas conclu s’il avait disposé de toutes les informations complètes et matériellement non erronées.

254    Or, il ne saurait être considéré qu’un consommateur a été induit en erreur, au sens de cette jurisprudence, lorsque, nonobstant la non-conformité d’un renvoi, aux fins du calcul de ladite indemnité, au cadre arithmétique financier prescrit par une juridiction nationale, le contrat contient d’autres éléments permettant à ce consommateur de déterminer aisément le montant de l’indemnité concernée, en particulier le montant maximal de celle-ci, dont il devra s’acquitter en cas de remboursement anticipé du prêt.

255    Il incombera donc à la juridiction de renvoi de vérifier si les contrats en cause dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 satisfont à cette condition en ce qu’ils prévoient que l’indemnité de remboursement anticipé calculée sur la base du cadre arithmétique financier jurisprudentiel est réduite au plus faible des deux montants mentionnés au point 249 du présent arrêt lorsqu’elle est plus élevée.

256    Eu égard aux motifs qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question, sous b), aa), dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 que l’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de crédit doit en principe, pour le calcul de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt, indiquer le mode de calcul de cette indemnité d’une manière concrète et facilement compréhensible pour un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé de manière à ce que celui-ci puisse déterminer le montant de l’indemnisation due en cas de remboursement anticipé sur la base des renseignements fournis dans ce contrat. Cela étant, même en l’absence d’une indication concrète et facilement compréhensible du mode de calcul, un tel contrat peut satisfaire à l’obligation énoncée à cette disposition pour autant qu’il contienne d’autres éléments permettant au consommateur de déterminer aisément le montant de l’indemnité concernée, en particulier le montant maximal de celle-ci, dont il devra s’acquitter en cas de remboursement anticipé du prêt.

 Sur la deuxième question, sous b), bb), sous e) et sous f), dans l’affaire C47/21 ainsi que sur la deuxième question, sous b), bb), sous c) et sous d), dans l’affaire C232/21

257    À titre liminaire, il y a lieu de considérer que la deuxième question, sous e) et sous f), dans l’affaire C‑47/21 ainsi que la deuxième question, sous c) et sous d), dans l’affaire C‑232/21 sont recevables, contrairement à ce que soutiennent respectivement C Bank ainsi que Volkswagen Bank et Audi Bank dans leurs observations écrites. Certes, la juridiction de renvoi pose lesdites questions en se référant de manière générale à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 et non pas spécifiquement à des points précis de cette disposition. Néanmoins, il découle d’une lecture d’ensemble des décisions de renvoi dans ces deux affaires que la Cour est en mesure de comprendre les aspects de cette disposition suscitant des doutes de la part de la juridiction de renvoi quant à son interprétation et de lui fournir une réponse utile à cet égard. Il s’ensuit que, conformément aux principes rappelés aux points 110 et 117 du présent arrêt, la juridiction de renvoi a identifié avec suffisamment de précision, dans le cadre desdites questions, une disposition du droit de l’Union qui a un rapport avec la réalité et l’objet des litiges au principal, permettant ainsi à la Cour de donner à cette juridiction une réponse utile.

258    Ainsi, par la deuxième question, sous b), bb), sous e) et sous f), dans l’affaire C‑47/21 ainsi que par la deuxième question, sous b), bb), sous c) et sous d), dans l’affaire C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que le délai de rétractation, prévu à cet article 14, paragraphe 1, premier alinéa, ne commence à courir qu’à la condition que les informations requises en vertu de l’article 10, paragraphe 2, de cette directive ont été fournies au consommateur de manière complète et qu’elles sont dépourvues d’erreur matérielle.

259    À cet égard, il convient de relever que, à l’instar d’autres directives de l’Union en matière de protection des consommateurs, le système de protection qu’établit la directive 2008/48 repose sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d’information, situation qui le conduit à adhérer aux conditions rédigées préalablement par le professionnel sans pouvoir exercer une influence sur le contenu de celles-ci (voir, en ce sens, arrêts du 4 juin 2015, Faber, C‑497/13, EU:C:2015:357, point 42 et jurisprudence citée, ainsi que du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C‑377/14, EU:C:2016:283, point 63 ainsi que jurisprudence citée).

260    Dans cette optique, les informations préalables et concomitantes à la conclusion d’un contrat, relatives aux conditions contractuelles et aux conséquences de ladite conclusion, sont pour un consommateur d’une importance fondamentale. C’est notamment sur la base de ces informations que ce dernier décide s’il souhaite se lier par les conditions préalablement rédigées par le professionnel (arrêt du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C‑377/14, EU:C:2016:283, point 64 ainsi que jurisprudence citée).

261    Il ressort ainsi de l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de la directive 2008/48 que le délai de rétractation de quatorze jours commence à courir uniquement le jour où, notamment, les informations prévues à l’article 10 de cette directive ont été reçues par le consommateur, si ce jour est postérieur à celui de la conclusion du contrat de crédit. Le paragraphe 2 dudit article 10 énumère les informations qui doivent être mentionnées, de façon claire et concise, dans le contrat de crédit.

262    À ce dernier égard, il importe de rappeler que l’obligation d’information, énoncée à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, contribue à la réalisation de l’objectif poursuivi par cette dernière, qui consiste, ainsi qu’il ressort de ses considérants 7 et 9, à prévoir, en matière de crédit aux consommateurs, une harmonisation complète et impérative dans un certain nombre de domaines clés, laquelle est considérée comme nécessaire pour assurer à tous les consommateurs de l’Union un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts et pour faciliter l’émergence d’un marché intérieur performant du crédit à la consommation (arrêt du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C‑377/14, EU:C:2016:283, point 61 ainsi que jurisprudence citée).

263    En effet, ainsi qu’il a déjà été indiqué aux points 233 et 234 du présent arrêt, il découle de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, lu à la lumière du considérant 31 de celle-ci, que l’exigence consistant à mentionner, dans un contrat de crédit établi sur un support papier ou sur un autre support durable, de façon claire et concise, les éléments visés par cette disposition est nécessaire afin que le consommateur soit en mesure de connaître ses droits et ses obligations. Plus particulièrement, la connaissance et une bonne compréhension, par le consommateur, des éléments que doit obligatoirement contenir le contrat de crédit sont nécessaires à la bonne exécution de ce contrat et, en particulier, à l’exercice des droits du consommateur (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, points 70 et 71 ainsi que jurisprudence citée).

264    Cependant, ainsi qu’il a été rappelé au point 253 du présent arrêt, la fourniture d’une information incomplète ou erronée ne peut être assimilée à un défaut d’information qu’à la condition que le consommateur soit, de ce fait, induit en erreur sur ses droits et obligations, et que, partant, il soit amené à conclure un contrat qu’il n’aurait éventuellement pas conclu s’il avait disposé de toutes les informations complètes et matériellement non erronées.

265    Partant, il convient de considérer que, lorsqu’une information fournie par le prêteur au consommateur au titre de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 s’avère incomplète ou erronée, le délai de rétractation ne commence à courir que si le caractère incomplet ou erroné de cette information n’est pas susceptible d’affecter la capacité du consommateur d’apprécier l’étendue de ses droits et obligations au titre de cette directive ni sa décision de conclure le contrat et de le priver, le cas échéant, de la possibilité d’exercer ses droits, en substance, dans les mêmes conditions que celles qui auraient prévalu si cette information avait été fournie de manière complète et exacte (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 9 novembre 2016, Home Credit Slovakia, C‑42/15, EU:C:2016:842, point 72, ainsi que du 19 décembre 2019, Rust-Hackner e.a., C‑355/18 à C‑357/18 et C‑479/18, EU:C:2019:1123, point 81). Il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier ce point.

266    Il importe encore de préciser que l’éventuelle existence, en droit national, de mesures visant à sanctionner le caractère incomplet ou erroné des informations fournies au consommateur d’une autre manière que celle qui vient d’être exposée n’a pas d’incidence sur les modalités de déclenchement du délai de rétractation. En effet, ainsi que l’a constaté M. l’avocat général, en substance, au point 146 de ses conclusions, le fait que, en vertu de l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de la directive 2008/48, le délai de rétractation ne commence à courir qu’à partir du jour où les informations prévues à l’article 10 de cette directive ont été reçues par le consommateur constitue la conséquence directe du non-respect de l’obligation incombant au prêteur de fournir à celui-ci, dans le contrat de crédit, les informations obligatoires visées à cet article 10. Or, conformément à l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48, il serait incompatible avec les effets qu’emporte l’harmonisation complète et impérative opérée par cette directive dans le domaine du droit de rétractation de permettre aux États membres de déroger à la conséquence qu’attache l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de ladite directive au non-respect de l’obligation d’information prévue notamment à l’article 10, paragraphe 2, de la même directive.

267    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question, sous b), bb), sous e) et sous f), dans l’affaire C‑47/21 ainsi qu’à la deuxième question, sous b), bb), sous c) et sous d), dans l’affaire C‑232/21 que l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une information fournie par le prêteur au consommateur au titre de l’article 10, paragraphe 2, de cette directive s’avère incomplète ou erronée, le délai de rétractation ne commence à courir que si le caractère incomplet ou erroné de cette information n’est pas susceptible d’affecter la capacité du consommateur d’apprécier l’étendue de ses droits et obligations au titre de ladite directive ni sa décision de conclure le contrat et de le priver, le cas échéant, de la possibilité d’exercer ses droits, en substance, dans les mêmes conditions que celles qui auraient prévalu si cette information avait été fournie de manière complète et exacte.

 Sur la deuxième question, sous c), dans l’affaire C47/21

268    Par sa deuxième question, sous c), dans l’affaire C‑47/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de crédit doit mentionner, sous forme de pourcentage concret, le taux d’intérêt de retard applicable au moment de la conclusion du contrat et, lorsque ce taux est déterminé en fonction d’un taux d’intérêt de référence variable, ce dernier taux ainsi que le mécanisme en vertu duquel il peut varier dans le temps.

269    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive 2008/48, un contrat de crédit doit notamment mentionner, de façon claire et concise, le taux d’intérêt applicable, en cas de retard de paiement, au moment de la conclusion du contrat et les modalités d’adaptation de ce taux.

270    Compte tenu de la jurisprudence rappelée aux points 233 à 235 du présent arrêt, la Cour a déjà jugé qu’un contrat de crédit doit mentionner, sous forme de pourcentage concret, le taux d’intérêt de retard applicable au moment de la conclusion de ce contrat et doit décrire de manière concrète le mécanisme d’adaptation du taux d’intérêt de retard (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, points 92 et 95).

271    Il convient de souligner que, lorsque, comme cela est le cas du contrat en cause au principal, ce taux est déterminé en fonction d’un taux d’intérêt de référence variable, ce dernier doit, pour les mêmes raisons, être mentionné sous forme de pourcentage concret, applicable à la date de conclusion du contrat. Le mode de calcul du taux d’intérêt de retard en fonction du taux d’intérêt de référence doit être présenté dans le contrat de manière facilement compréhensible pour un consommateur moyen ne disposant pas de connaissances spécialisées dans le domaine financier de sorte que celui-ci puisse calculer le taux d’intérêt de retard sur la base des renseignements fournis dans le même contrat. Par ailleurs, le contrat de crédit doit présenter la fréquence de la modification de ce taux d’intérêt de référence, et ce même si celle-ci est déterminée par les dispositions nationales (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 94).

272    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question, sous c), dans l’affaire C‑47/21 que l’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’un contrat de crédit doit mentionner, sous forme de pourcentage concret, le taux d’intérêt de retard applicable au moment de la conclusion du contrat et doit décrire de manière concrète le mécanisme d’adaptation de ce taux. Lorsque ledit taux est déterminé en fonction d’un taux d’intérêt de référence variable dans le temps, le contrat de crédit doit mentionner le taux d’intérêt de référence applicable à la date de conclusion du contrat, étant précisé que le mode de calcul du taux d’intérêt de retard en fonction du taux d’intérêt de référence doit être présenté dans le contrat de manière facilement compréhensible pour un consommateur moyen ne disposant pas de connaissances spécialisées dans le domaine financier de sorte que celui-ci puisse calculer le taux d’intérêt de retard sur la base des renseignements fournis dans le même contrat. Par ailleurs, le contrat de crédit doit présenter la fréquence de la modification de ce taux d’intérêt de référence, et ce même si celle-ci est déterminée par les dispositions nationales.

 Sur la quatrième question, sous a) à d), dans les affaires C47/21 et C232/21

273    Par la quatrième question, sous a) à d), dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que, lorsque l’une au moins des mentions obligatoires visées à l’article 10, paragraphe 2, de cette directive ne figure pas dans un contrat de crédit ou y figure de manière incomplète ou erronée sans avoir été dûment communiquée ultérieurement, il s’oppose à ce que le prêteur puisse valablement exciper de ce que le consommateur a exercé de manière abusive son droit de rétractation.

274    Afin de répondre à cette question et compte tenu du fait que, dans l’une des affaires au principal ayant donné lieu à l’affaire C‑232/21, le droit de rétractation a été exercé alors que le contrat de crédit avait été intégralement exécuté, il importe, en premier lieu, de vérifier dans quelle mesure une telle exécution intégrale a, en l’absence de dispositions spécifiques dans la directive 2008/48 à ce sujet, une incidence sur le maintien du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, de celle-ci.

275    À cet égard, il convient de relever que, conformément à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48, le consommateur dispose d’un droit de rétractation dans le cadre du contrat de crédit, l’exercice de ce droit ayant pour effet d’éteindre l’obligation des parties d’exécuter le contrat de crédit dans les conditions et les délais visés à l’article 14, paragraphe 3, sous b), de cette directive.

276    Par ailleurs, il ressort du considérant 34 de la directive 2008/48 que cette dernière prévoit un droit de rétractation dans des conditions similaires à celles prévues par la directive 2002/65. Or, en disposant, à son article 6, paragraphe 2, sous c), que le droit de rétractation ne s’applique pas aux contrats exécutés intégralement par les deux parties à la demande expresse du consommateur, la directive 2002/65 donne expression au principe selon lequel le droit de rétractation ne saurait, en toutes circonstances, être invoqué en cas d’exécution intégrale du contrat, lequel principe doit également valoir pour la directive 2008/48.

277    En outre, en cas d’exécution intégrale du contrat de crédit, l’obligation de fournir des informations prévues à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 n’est plus, en principe, susceptible d’atteindre l’objectif poursuivi par cette disposition, lequel consiste, ainsi qu’il a été relevé aux points 233 et 234 du présent arrêt, à permettre au consommateur d’obtenir toutes les informations nécessaires à la bonne exécution du contrat et, en particulier, à l’exercice de ses droits, parmi lesquels figure son droit de rétractation, de manière à le mettre en mesure de connaître l’étendue de ses droits et de ses obligations. Il en résulte que ces obligations ne présentent plus le même degré d’utilité une fois que le contrat a été intégralement exécuté.

278    Enfin, il y a lieu de rappeler que, se prononçant sur le droit de révocation prévu par la directive 85/577/CEE du Conseil, du 20 décembre 1985, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux (JO 1985, L 372, p. 31), la Cour a déjà jugé que, conformément aux principes généraux du droit civil, ce droit ne peut être exercé lorsqu’il n’existe plus aucun engagement découlant de ce contrat (voir, en ce sens, arrêt du 10 avril 2008, Hamilton, C‑412/06, EU:C:2008:215, point 42).

279    Dans ces conditions, dès lors que l’exécution d’un contrat constitue le mécanisme naturel d’extinction des obligations contractuelles, il convient de considérer que, en l’absence de dispositions spécifiques à cet égard, un consommateur ne peut plus se prévaloir du droit de rétractation que lui reconnaît l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 une fois que le contrat de crédit a été intégralement exécuté par les parties et que les obligations mutuelles découlant de ce contrat ont, de ce fait, pris fin.

280    En second lieu, s’agissant de la question de savoir si le prêteur peut exciper de l’exercice abusif, par le consommateur, du droit de rétractation visé à l’article 14 de la directive 2008/48, il convient, premièrement, de rappeler que cette directive ne contient pas de dispositions régissant la question de l’abus, par le consommateur, des droits que cette directive lui accorde (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 120).

281    Néanmoins, conformément à une jurisprudence constante, il existe, dans le droit de l’Union, un principe général de droit selon lequel les justiciables ne sauraient frauduleusement ou abusivement se prévaloir des normes du droit de l’Union (arrêt du 26 février 2019, T Danmark et Y Denmark, C‑116/16 et C‑117/16, EU:C:2019:135, point 70 ainsi que jurisprudence citée).

282    Le respect de ce principe général de droit s’impose aux justiciables. En effet, l’application de la réglementation de l’Union ne saurait être étendue jusqu’à couvrir les opérations qui sont réalisées dans le but de bénéficier frauduleusement ou abusivement des avantages prévus par le droit de l’Union (arrêt du 26 février 2019, T Danmark et Y Denmark, C‑116/16 et C‑117/16, EU:C:2019:135, point 71 ainsi que jurisprudence citée).

283    Il découle ainsi de ce principe qu’un État membre doit refuser, même en l’absence de dispositions du droit national prévoyant un tel refus, le bénéfice des dispositions du droit de l’Union lorsque celles-ci sont invoquées par une personne non pas en vue de réaliser les objectifs de ces dispositions, mais dans le but de bénéficier d’un avantage accordé á cette personne par le droit de l’Union alors que les conditions objectives requises aux fins de l’obtention de l’avantage recherché, prévues par le droit de l’Union, ne sont que formellement remplies (voir, en ce sens, arrêts du 22 novembre 2017, Cussens e.a., C‑251/16, EU:C:2017:881, points 32 et 33, ainsi que du 26 février 2019, T Danmark et Y Denmark, C‑116/16 et C‑117/16, EU:C:2019:135, points 72 et 91).

284    Ainsi, le fait que le principe du droit de l’Union relatif à l’interdiction de l’abus de droit soit consacré ou non dans des dispositions de droit national et que, le cas échéant, ces dispositions aient été adoptées par le parlement de l’État membre concerné ou non est sans incidence.

285    Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, la preuve d’une pratique abusive nécessite, d’une part, un ensemble de circonstances objectives dont il résulte que, malgré un respect formel des conditions prévues par la réglementation de l’Union, l’objectif poursuivi par cette réglementation n’a pas été atteint et, d’autre part, un élément subjectif consistant en la volonté d’obtenir un avantage résultant de la réglementation de l’Union en créant artificiellement les conditions requises pour son obtention (arrêts du 26 février 2019, T Danmark et Y Denmark, C‑116/16 et C‑117/16, EU:C:2019:135, point 97 et jurisprudence citée, ainsi que du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 122).

286    La vérification de l’existence d’une pratique abusive exige de la juridiction de renvoi qu’elle prenne en compte tous les faits et les circonstances de l’espèce, y compris ceux postérieurs à l’opération dont le caractère abusif est allégué (voir, en ce sens, arrêt du 14 avril 2016, Cervati et Malvi, C‑131/14, EU:C:2016:255, point 35 ainsi que jurisprudence citée).

287    Il appartient donc à la juridiction de renvoi de vérifier, conformément aux règles de preuve du droit national, pour autant qu’il n’est pas porté atteinte à l’efficacité du droit de l’Union, si les éléments constitutifs d’une pratique abusive, tels qu’ils sont rappelés au point 285 du présent arrêt, sont réunis dans les litiges au principal, autres que celui visé au point 274 du présent arrêt dans lequel le contrat a été exécuté intégralement. Toutefois, la Cour, statuant sur renvoi préjudiciel, peut, le cas échéant, apporter des précisions visant à guider cette juridiction dans son interprétation (arrêts du 28 juillet 2016, Kratzer, C‑423/15, EU:C:2016:604, point 42 et jurisprudence citée, ainsi que du 22 novembre 2017, Cussens e.a., C‑251/16, EU:C:2017:881, point 59 ainsi que jurisprudence citée).

288    À cet égard, s’agissant, deuxièmement, de l’existence d’un élément objectif révélant une pratique abusive, visé au point 285 du présent arrêt, la Cour a déjà constaté, d’une part, que l’objectif de l’article 14 de la directive 2008/48 consiste à permettre au consommateur de choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins et donc de renoncer aux effets d’un contrat qui, après sa conclusion, se révèle, dans le délai de réflexion prévu pour l’exercice du droit de rétractation, comme ne convenant pas aux besoins de ce consommateur. D’autre part, l’objectif de l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de cette directive est d’assurer que le consommateur reçoive toutes les informations nécessaires pour apprécier l’étendue de son engagement contractuel et de pénaliser le prêteur qui ne lui transmet pas les informations prévues à l’article 10 de cette directive (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, points 123 et 124 ainsi que jurisprudence citée).

289    Afin que le prêteur soit dissuadé d’enfreindre les obligations qui lui incombent, conformément à la directive 2008/48, à l’égard du consommateur, la Cour a jugé, au point 126 de l’arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a.(C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736), que, lorsque le prêteur n’a pas transmis au consommateur les informations visées à l’article 10 de cette directive et que ce dernier décide de se rétracter du contrat de crédit au-delà du délai de quatorze jours suivant la conclusion de celui-ci, ce professionnel ne saurait reprocher audit consommateur d’avoir exercé abusivement son droit de rétractation, même si le temps qui s’est écoulé entre la conclusion de ce contrat et la rétractation par le consommateur est considérable.

290    La Cour en a conclu que la directive 2008/48 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce que le prêteur puisse valablement considérer que, en raison d’un laps de temps considérable compris entre la conclusion du contrat et l’exercice du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, de cette directive, le consommateur a abusé de ce droit, lorsque l’une des mentions obligatoires visées à l’article 10, paragraphe 2, de ladite directive ne figurait pas dans le contrat de crédit et n’a pas non plus été dûment communiquée ultérieurement, indépendamment du point de savoir si ce consommateur ignorait l’existence de son droit de rétractation (arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, point 127).

291    Il y a néanmoins lieu de préciser à cet égard que, conformément à la réponse apportée par la Cour au point 267 du présent arrêt, un prêteur ne saurait exciper du caractère abusif de l’exercice du droit de rétractation lorsque, en cas d’information incomplète ou erronée figurant dans le contrat, le délai de rétractation n’a pas commencé à courir du fait qu’il est établi que le caractère incomplet ou erroné de cette information a affecté la capacité du consommateur à apprécier l’étendue de ses droits et obligations au titre de la directive 2008/48 ainsi que sa décision de conclure le contrat.

292    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la quatrième question, sous a) à d), dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 que l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens que l’exécution intégrale du contrat de crédit entraîne l’extinction du droit de rétractation. En outre, le prêteur ne peut valablement exciper de ce que le consommateur a, en raison du comportement de ce dernier intervenu entre la conclusion du contrat et l’exercice du droit de rétractation voire postérieurement à cet exercice, exercé ce droit de manière abusive lorsque, en raison d’une information incomplète ou erronée dans le contrat de crédit, en méconnaissance de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, le délai de rétractation n’a pas commencé à courir du fait qu’il est établi que ce caractère incomplet ou erroné a affecté la capacité du consommateur à apprécier l’étendue de ses droits et obligations au titre de la directive 2008/48 ainsi que sa décision de conclure le contrat.

 Sur la troisième question, sous a) à d), dans les affaires C47/21 et C232/21

293    Par la troisième question, sous a) à d), dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 2008/48 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce que le prêteur puisse, lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation conformément à l’article 14, paragraphe 1, de cette directive, exciper de la forclusion de ce droit en vertu des règles de droit nationales, et ce y compris lorsque le consommateur n’avait pas connaissance du maintien dudit droit et/ou que l’une au moins des mentions obligatoires visées à l’article 10, paragraphe 2, de ladite directive ne figurait pas dans le contrat de crédit ou y figurait de manière incomplète ou erronée sans avoir été dûment communiquée ultérieurement.

294    Afin de répondre à cette question, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de la directive 2008/48, le délai de rétractation de quatorze jours calendaires commence à courir uniquement lorsque les informations prévues à l’article 10 de cette directive ont été transmises au consommateur, si cette transmission est postérieure au jour de la conclusion du contrat de crédit. Ledit article 10 énumère les informations devant être mentionnées de façon claire et concise dans les contrats de crédit.

295    Il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48, interprété à la lumière des considérants 9 et 10 de celle-ci, que, en ce qui concerne les contrats de crédit qui relèvent du champ d’application de cette directive, celle-ci prévoit une harmonisation complète et, ainsi qu’il résulte de l’intitulé dudit article 22, revêt un caractère impératif. Il s’ensuit que, dans les matières spécifiquement visées par cette harmonisation, les États membres ne sont pas autorisés à maintenir ou à introduire des dispositions nationales autres que celles qui sont prévues par la même directive (arrêt du 9 mars 2023, Sogefinancement, C‑50/22, EU:C:2023:177, point 27 et jurisprudence citée).

296    Or, la Cour a déjà jugé que les conditions temporelles relatives à l’exercice, par le consommateur, de son droit de rétractation relèvent de l’harmonisation à laquelle procède l’article 14 de la directive 2008/48 et que, par conséquent, dès lors que cette directive ne prévoit aucune limitation dans le temps à l’exercice, par le consommateur, de son droit de rétractation dans le cas où les informations prévues à l’article 10 de ladite directive ne lui ont pas été transmises ou lui ont été transmises de manière incomplète ou erronée et où, conformément à la réponse apportée au point 267 du présent arrêt, le délai de rétractation n’a pas commencé à courir, une telle limitation, comme celle qui résulterait de la forclusion, ne saurait être imposée, au sein d’un État membre, par la réglementation nationale (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2021, Volkswagen Bank e.a., C‑33/20, C‑155/20 et C‑187/20, EU:C:2021:736, points 116 et 117).

297    Dans ces conditions et pour répondre aux interrogations de la juridiction de renvoi, il importe peu de savoir si les règles de droit nationales en question procèdent d’une loi votée par le parlement de l’État membre concerné, si le consommateur avait ou non connaissance du maintien de son droit de rétractation et si le prêteur avait la possibilité de faire courir le délai de rétractation en communiquant les informations manquantes, incomplètes ou erronées.

298    Il en va de même de la circonstance avancée par le gouvernement allemand dans ses observations écrites, selon laquelle, en droit allemand, la forclusion requiert non seulement l’écoulement d’un certain laps de temps, mais également des circonstances factuelles faisant apparaître que l’exercice du droit concerné revêt un caractère abusif. En effet, il découle de la réponse apportée au point 293 du présent arrêt qu’un tel caractère abusif est exclu dans une situation telle que celle décrite au point 297 dudit arrêt.

299    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la troisième question, sous a) à d), dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 que la directive 2008/48 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce que le prêteur puisse, lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation conformément à l’article 14, paragraphe 1, de cette directive, exciper de la forclusion de ce droit en vertu des règles de droit nationales, dès lors que l’une au moins des mentions obligatoires visées à l’article 10, paragraphe 2, de cette directive ne figurait pas dans le contrat de crédit ou y figurait de manière incomplète ou erronée sans avoir été dûment communiquée ultérieurement et que, pour ce motif, le délai de rétractation prévu à ce même article 14, paragraphe 1, n’a pas commencé à courir.

 Sur la cinquième question dans les affaires C47/21 et C232/21

300    Par la cinquième question dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que, lorsque le consommateur se rétracte d’un contrat de crédit lié, au sens de l’article 3, sous n), de cette directive, il doit restituer au prêteur le bien financé par le crédit ou avoir mis celui-ci en demeure de récupérer ce bien avant de pouvoir demander et obtenir le remboursement des mensualités versées au titre du contrat de crédit, ce remboursement pouvant être différé, en cas de contestation de la validité de la rétractation par le prêteur, jusqu’à l’issue définitive du litige judiciaire.

301    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 3, sous n) de la directive 2008/48, un « contrat de crédit lié » est défini comme un contrat de crédit en vertu duquel le crédit en question sert exclusivement à financer un contrat relatif, notamment, à la fourniture de biens, tels que, en l’occurrence, un véhicule automobile, à condition que ces deux contrats constituent, d’un point de vue objectif, une unité commerciale.

302    La directive 2008/48 ne contient cependant pas de dispositions régissant les conséquences de la rétractation, par le consommateur, d’un contrat de crédit lié sur le contrat de fourniture de biens. D’ailleurs, le considérant 35 de cette directive énonce que celle-ci devrait s’appliquer sans préjudice de toute disposition des États membres réglant les questions relatives à la restitution du bien financé par le crédit ou toute autre question connexe.

303    Or, en l’absence de réglementation spécifique de l’Union en la matière, les modalités de mise en œuvre de la protection des consommateurs prévue par la directive 2008/48 relèvent de l’ordre juridique interne des États membres en vertu du principe de l’autonomie procédurale de ces derniers. Cependant, ces modalités ne doivent pas être moins favorables que celles régissant des situations similaires de nature interne (principe d’équivalence), ni être aménagées de manière à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (principe d’effectivité) (voir, par analogie, arrêt du 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance, C‑776/19 à C‑782/19, EU:C:2021:470, point 27 et jurisprudence citée).

304    En ce qui concerne le principe d’effectivité, seul pertinent dans les présentes affaires, il résulte de la jurisprudence de la Cour que chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale rend impossible ou excessivement difficile l’application du droit de l’Union doit être analysé en tenant compte de la place de cette disposition dans l’ensemble de la procédure ainsi que du déroulement et des particularités de cette dernière devant les diverses instances nationales. Dans cette perspective, il y a lieu de prendre en considération, le cas échéant, les principes qui sont à la base du système juridictionnel national, tels que la protection des droits de la défense, le principe de sécurité juridique et le bon déroulement de la procédure (voir, en ce sens, arrêts du 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance, C‑776/19 à C‑782/19, EU:C:2021:470, point 28 et jurisprudence citée, ainsi que du 17 mai 2022, Unicaja Banco, C‑869/19, EU:C:2022:397, point 28 et jurisprudence citée).

305    En l’occurrence, il ressort des décisions de renvoi que, en vertu du droit allemand, le consommateur, lorsqu’il se rétracte d’un contrat de crédit, est toujours tenu de restituer au prêteur le bien financé par ce contrat ou bien de mettre en demeure le prêteur de récupérer ce bien afin de pouvoir demander et obtenir le remboursement des mensualités versées au titre dudit contrat, y compris lorsque le prêteur conteste la validité de la rétractation et que le consommateur doit alors introduire, par la voie judiciaire, une action en remboursement et attendre l’issue de cette action pour obtenir, en cas de succès, le remboursement des mensualités.

306    Or, sous réserve des vérifications qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’effectuer, il y a lieu de considérer que de telles règles procédurales régissant les effets juridiques attachés à l’exercice du droit de rétractation prévu à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48 sont de nature à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice de ce droit dès lors que le consommateur doit restituer le bien financé par le crédit ou mettre en demeure le prêteur de récupérer ce bien sans que celui-ci soit obligé, au même moment, de rembourser les mensualités du crédit déjà versées par le consommateur.

307    Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la cinquième question dans les affaires C‑47/21 et C‑232/21 que l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48, lu en combinaison avec le principe d’effectivité, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que, lorsque le consommateur se rétracte d’un contrat de crédit lié, au sens de l’article 3, sous n), de cette directive, il doit restituer au prêteur le bien financé par le crédit ou avoir mis celui-ci en demeure de récupérer ce bien sans que ce prêteur soit obligé, au même moment, de rembourser les mensualités du crédit déjà versées par le consommateur.

 Sur les dépens

308    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit :

1)      L’article 2, point 6, de la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2011/83,

doit être interprété en ce sens que :

un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile, caractérisé par le fait que ni ce contrat ni un contrat séparé ne prévoient que le consommateur est tenu d’acheter le véhicule à l’expiration du contrat, relève du champ d’application de la directive 2011/83, en tant que « contrat de service », au sens de l’article 2, point 6, de celle-ci. En revanche, un tel contrat ne relève du champ d’application ni de la directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 septembre 2002, concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE, ni de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil.

2)      L’article 2, point 7, de la directive 2011/83

doit être interprété en ce sens que :

un contrat de service, au sens de l’article 2, point 6, de cette directive, conclu entre un consommateur et un professionnel en recourant à une technique de communication à distance, ne peut pas être qualifié de « contrat à distance », au sens de la première de ces dispositions, lorsque la conclusion du contrat a été précédée d’une phase de négociation qui s’est déroulée en la présence physique simultanée du consommateur et d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel et au cours de laquelle ce consommateur a reçu de la part de cet intermédiaire, aux fins de cette négociation, l’ensemble des informations visées à l’article 6 de ladite directive et a pu poser des questions audit intermédiaire sur le contrat envisagé ou l’offre proposée, afin de dissiper toute incertitude quant à la portée de son éventuel engagement contractuel avec le professionnel.

3)      L’article 2, point 8, sous a), de la directive 2011/83

doit être interprété en ce sens que :

un contrat de service, au sens de l’article 2, point 6, de cette directive, conclu entre un consommateur et un professionnel ne peut pas être qualifié de « contrat hors établissement », au sens de la première de ces dispositions, lorsque, au cours de la phase préparatoire à la conclusion du contrat par le recours à une technique de communication à distance, le consommateur s’est rendu dans l’établissement commercial d’un intermédiaire agissant au nom ou pour le compte du professionnel aux fins de la négociation de ce contrat mais opérant dans un autre domaine d’activité que ce professionnel, à condition que ce consommateur ait pu, en tant que consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, s’attendre, en se rendant dans l’établissement commercial de l’intermédiaire, à faire l’objet d’une sollicitation commerciale de la part de ce dernier aux fins de la négociation et de la conclusion d’un contrat de service avec le professionnel et qu’il ait en outre pu aisément comprendre que cet intermédiaire agissait au nom et pour le compte dudit professionnel.

4)      L’article 16, sous l), de la directive 2011/83

doit être interprété en ce sens que :

relève de l’exception au droit de rétractation prévue à cette disposition pour les contrats à distance ou hors établissement relevant du champ d’application de cette directive et portant sur des services de location de voitures assortis d’une date ou d’une période d’exécution spécifique un contrat de leasing relatif à un véhicule automobile conclu entre un professionnel et un consommateur et qualifié de contrat de service à distance ou hors établissement au sens de ladite directive, dès lors que l’objet principal de ce contrat consiste à permettre au consommateur d’utiliser un véhicule pendant la durée spécifique prévue par ledit contrat, en contrepartie du versement régulier de sommes d’argent.

5)      L’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48

doit être interprété en ce sens que :

il s’oppose à une réglementation nationale établissant une présomption légale selon laquelle le professionnel respecte son obligation d’informer le consommateur de son droit de rétractation, lorsque ce professionnel renvoie, dans un contrat, à des dispositions nationales qui renvoient elles-mêmes à un modèle d’information réglementaire à cet égard, tout en utilisant des clauses figurant dans ce modèle qui ne sont pas conformes aux prescriptions de cette disposition de la directive. À défaut de pouvoir interpréter la réglementation nationale en cause de manière conforme à la directive 2008/48, une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, n’est pas tenue, sur le fondement du seul droit de l’Union, de laisser inappliquée une telle réglementation, sans préjudice de la possibilité pour cette juridiction de l’écarter sur le fondement de son droit interne et, à défaut, du droit pour la partie lésée par la non-conformité du droit national au droit de l’Union de demander réparation du préjudice qui en a résulté pour elle.

6)      L’article 10, paragraphe 2, sous p), de la directive 2008/48, lu en combinaison avec l’article 14, paragraphe 3, sous b), de cette directive,

doit être interprété en ce sens que :

le montant de l’intérêt journalier qui doit être indiqué dans un contrat de crédit en vertu de cette disposition, applicable en cas d’exercice par le consommateur du droit de rétractation, ne peut en aucun cas être supérieur au montant résultant arithmétiquement du taux débiteur contractuel convenu dans ce contrat. L’information fournie dans le contrat en ce qui concerne le montant de l’intérêt journalier doit être indiquée de façon claire et concise de sorte, notamment, que, lue en combinaison avec d’autres informations, elle soit dénuée de toute contradiction objectivement susceptible d’induire en erreur un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé quant au montant d’intérêts journaliers qu’il devra payer au final. À défaut d’une information présentant ces caractéristiques, aucun montant d’intérêt journalier n’est dû.

7)      L’article 10, paragraphe 2, sous t), de la directive 2008/48

doit être interprété en ce sens que :

un contrat de crédit doit mentionner les informations essentielles portant sur toutes les procédures extrajudiciaires de réclamation ou de recours à la disposition du consommateur et, le cas échéant, le coût de chacune d’elles, le fait que la réclamation ou le recours doit être présenté par courrier ou par voie électronique, l’adresse physique ou électronique à laquelle cette réclamation ou ce recours doit être envoyé et les autres conditions formelles auxquelles cette réclamation ou ce recours est soumis, étant entendu qu’un simple renvoi, opéré dans le contrat de crédit, à un règlement de procédure disponible sur demande ou consultable sur Internet ou à un autre acte ou document portant sur les modalités d’accès à des procédures extrajudiciaires de réclamation et de recours n’est pas suffisant.

8)      L’article 10, paragraphe 2, sous r), de la directive 2008/48

doit être interprété en ce sens que :

un contrat de crédit doit en principe, pour le calcul de l’indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt, indiquer le mode de calcul de cette indemnité d’une manière concrète et facilement compréhensible pour un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé de manière à ce que celui-ci puisse déterminer le montant de l’indemnisation due en cas de remboursement anticipé sur la base des renseignements fournis dans ce contrat. Cela étant, même en l’absence d’une indication concrète et facilement compréhensible du mode de calcul, un tel contrat peut satisfaire à l’obligation énoncée à cette disposition pour autant qu’il contienne d’autres éléments permettant au consommateur de déterminer aisément le montant de l’indemnité concernée, en particulier le montant maximal de celle-ci dont il devra s’acquitter en cas de remboursement anticipé du prêt.

9)      L’article 14, paragraphe 1, second alinéa, sous b), de la directive 2008/48

doit être interprété en ce sens que :

lorsqu’une information fournie par le prêteur au consommateur au titre de l’article 10, paragraphe 2, de cette directive s’avère incomplète ou erronée, le délai de rétractation ne commence à courir que si le caractère incomplet ou erroné de cette information n’est pas susceptible d’affecter la capacité du consommateur d’apprécier l’étendue de ses droits et obligations au titre de ladite directive ni sa décision de conclure le contrat et de le priver, le cas échéant, de la possibilité d’exercer ses droits, en substance, dans les mêmes conditions que celles qui auraient prévalu si cette information avait été fournie de manière complète et exacte.

10)    L’article 10, paragraphe 2, sous l), de la directive 2008/48

doit être interprété en ce sens que :

un contrat de crédit doit mentionner, sous forme de pourcentage concret, le taux d’intérêt de retard applicable au moment de la conclusion du contrat et doit décrire de manière concrète le mécanisme d’adaptation de ce taux. Lorsque ledit taux est déterminé en fonction d’un taux d’intérêt de référence variable dans le temps, le contrat de crédit doit mentionner le taux d’intérêt de référence applicable à la date de conclusion du contrat, étant précisé que le mode de calcul du taux d’intérêt de retard en fonction du taux d’intérêt de référence doit être présenté dans le contrat de manière facilement compréhensible pour un consommateur moyen ne disposant pas de connaissances spécialisées dans le domaine financier de sorte que celui-ci puisse calculer le taux d’intérêt de retard sur la base des renseignements fournis dans le même contrat. Par ailleurs, le contrat de crédit doit présenter la fréquence de la modification de ce taux d’intérêt de référence, et ce même si celle-ci est déterminée par les dispositions nationales.

11)    L’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48

doit être interprété en ce sens que :

l’exécution intégrale du contrat de crédit entraîne l’extinction du droit de rétractation. En outre, le prêteur ne peut valablement exciper de ce que le consommateur a, en raison du comportement de ce dernier intervenu entre la conclusion du contrat et l’exercice du droit de rétractation voire postérieurement à cet exercice, exercé ce droit de manière abusive lorsque, en raison d’une information incomplète ou erronée dans le contrat de crédit, en méconnaissance de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48, le délai de rétractation n’a pas commencé à courir du fait qu’il est établi que ce caractère incomplet ou erroné a affecté la capacité du consommateur à apprécier l’étendue de ses droits et obligations au titre de la directive 2008/48 ainsi que sa décision de conclure le contrat.

12)    La directive 2008/48

doit être interprétée en sens que :

elle s’oppose à ce que le prêteur puisse, lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation conformément à l’article 14, paragraphe 1, de cette directive, exciper de la forclusion de ce droit en vertu des règles de droit nationales, dès lors que l’une au moins des mentions obligatoires visées à l’article 10, paragraphe 2, de cette directive ne figurait pas dans le contrat de crédit ou y figurait de manière incomplète ou erronée sans avoir été dûment communiquée ultérieurement et que, pour ce motif, le délai de rétractation prévu à ce même article 14, paragraphe 1, n’a pas commencé à courir.

13)    L’article 14, paragraphe 1, de la directive 2008/48, lu en combinaison avec le principe d’effectivité,

doit être interprété en sens que :

il s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que, lorsque le consommateur se rétracte d’un contrat de crédit lié, au sens de l’article 3, sous n), de cette directive, il doit restituer au prêteur le bien financé par le crédit ou avoir mis celui-ci en demeure de récupérer ce bien sans que ce prêteur soit obligé, au même moment, de rembourser les mensualités du crédit déjà versées par le consommateur.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.