ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 mai 2002 (1)

«Politique sociale - Fonds social européen - Recours en annulation - Réduction de concours financier - Motivation - Erreur manifeste d'appréciation»

Dans l'affaire T-80/00,

Associação Comercial de Aveiro, établie à Aveiro (Portugal), représentée par Mes J. Amaral e Almeida et B. Diniz de Ayala, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. H. Speyart et M. França, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision C (99) 3684 de la Commission, du 30 novembre 1999, portant réduction du concours du Fonds social européen octroyé dans le cadre du projet n° 890365/P1 à l'Associação Comercial de Aveiro,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme P. Lindh, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 11 décembre 2001,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    La décision 83/516/CEE du Conseil, du 17 octobre 1983, concernant les missions du Fonds social européen (JO L 289, p. 38), prévoit, à son article 1er, paragraphe 2, sous a), que le Fonds social européen (FSE) participe au financement d'actions de formation professionnelle.

2.
    Le règlement (CEE) n° 2950/83 du Conseil, du 17 octobre 1983, portant application de la décision 83/516 (JO L 289, p. 1), énumère, en son article 1er, les dépenses pouvant faire l'objet du concours du FSE, notamment celles relatives aux actions de formation professionnelle.

3.
    Selon l'article 5, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, l'agrément d'une demande de financement par le FSE entraîne le versement d'une avance de 50 % du concours octroyé à la date prévue pour le début de l'action de formation. Conformément au paragraphe 4 du même article, les demandes de paiement du solde contiennent un rapport détaillé sur le contenu, les résultats et les aspects financiers de l'action concernée. L'État membre certifie l'exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans les demandes de paiement.

4.
    Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, lorsque le concours du FSE n'est pas utilisé dans les conditions fixées par la décision d'agrément, la Commission peut suspendre, réduire ou supprimer ce concours, après avoir donné à l'État membre concerné l'occasion de présenter ses observations. Le paragraphe 2 du même article précise que les sommes versées qui n'ont pas été utilisées dans les conditions fixées par la décision d'agrément donnent lieu à répétition et que, dans la mesure où il verse à la Communauté les sommes à rembourser par les responsables financiers de l'action, l'État membre est subrogé dans les droits de la Communauté.

5.
    En application de l'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, tant la Commission que l'État membre concerné peuvent vérifier l'utilisation du concours.

6.
    La décision 83/673/CEE de la Commission, du 22 décembre 1983, concernant la gestion du FSE (JO L 377, p. 1), précise, en son article 7, que l'État membre, qui enquête sur l'utilisation d'un concours en raison d'une présomption d'irrégularité, doit avertir la Commission sans délai.

Faits à l'origine du litige

7.
    En 1988, le Departamento para os Assuntos do Fundo Social Europeu (département des affaires du FSE au sein du secrétariat d'État de l'emploi et de la formation professionnelle portugais, ci-après le «DAFSE») a transmis à la Commission une demande d'approbation d'un concours financier afin de permettre à l'Associação Comercial de Aveiro (ci-après l'«ACA») de mener une série d'actions de formation professionnelle, dont le financement global était de 204 082 248 escudos portugais (PTE), la contribution du FSE étant de 112 245 236 PTE et la contribution des pouvoirs publics portugais de 91 837 012 PTE.

8.
    Par décision C (89) 0570, du 22 mars 1989, la Commission a approuvé l'octroi à l'ACA d'un concours financier à son projet n° 890365/P1 impliquant un financement global de 157 397 822 PTE, dont 86 568 802 PTE versés par le FSE et 70 829 020 PTE versés par l'Orçamento da Segurança Social (budget de la sécurité sociale, ci-après l'«OSS»). Ces actions devaient être réalisées entre le 8 février et le 31 décembre 1989 et étaient destinées à la formation professionnelle de 249 jeunes.

9.
    Le 9 mai 1989, l'ACA a signé, en tant que bénéficiaire du concours du FSE, un acte d'acceptation de la décision de la Commission, par lequel elle s'engage à ce que «le(s) concours accordé(s) [soi(en)t] utilisé(s) en conformité avec les dispositions nationales et communautaires applicables».

10.
    Conformément à l'article 5, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, l'ACA a perçu une avance de 78 698 910 PTE, correspondant à environ 50 % du montant approuvé, dont 43 284 401 PTE au titre du concours du FSE et 35 414 509 PTE au titre de la contribution de l'OSS.

11.
    Au terme des actions de formation, la requérante a présenté, le 26 avril 1990, au DAFSE, une demande de paiement du solde portant sur un montant de 26 766 799 PTE, correspondant à un concours du FSE de 70 051 200 PTE et à un financement global de 127 365 818 PTE, le coût total des actions de formation s'avérant inférieur au montant initialement prévu. Le 30 octobre 1990, le DAFSE a présenté à la Commission cette demande et l'a informée que la certification des informations qu'elle contenait était subordonnée à une nouvelle analyse.

12.
    Par lettre du 13 février 1991, le DAFSE a fait savoir à la requérante que, bien que la demande de paiement du solde ait déjà été envoyée à la Commission, son paiement était subordonné à la réalisation d'un contrôle financier.

13.
    À plusieurs reprises, en mars et en octobre 1991 et en février 1992, la requérante a demandé au DAFSE d'effectuer ce contrôle le plus rapidement possible en indiquant que le retard dans le paiement du solde lui causait un grave préjudice financier.

14.
    Le 25 mars 1993, l'Inspecçao Geral de Finanças (inspection générale des finances, ci-après l'«IGF») a été chargée de procéder à un audit comptable et financier des dépenses effectuées dans le cadre des actions de formation professionnelle réalisées en 1989 par l'ACA, conformément à l'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83. L'IGF a rendu ses conclusions sur le contrôle demandé dans un rapport daté du 28 septembre 1995 (ci-après le «rapport 1995 de l'IGF»).

15.
    Le rapport 1995 de l'IGF proposait de considérer comme inéligibles certaines dépenses imputées par la requérante dans la demande de paiement du solde et soumettait également à l'appréciation du DAFSE l'éligibilité ou le caractère raisonnable d'autres dépenses qui y étaient imputées.

16.
    Par la suite, le DAFSE a analysé le caractère raisonnable des dépenses imputées et les corrections proposées par l'IGF. Il a rendu ses conclusions dans un rapport émis le 1er juillet 1997 sous le n° 1618 (ci-après le «rapport du DAFSE»), dans lequel il proposait une réduction de 8 495 366 PTE du montant à cofinancer compte tenu de l'inéligibilité de certaines dépenses. Le DAFSE suggérait de modifier le financement comme suit:

concours du FSE

65 378 749 PTE

intervention des pouvoirs publics portugais (OSS)

53 491 703 PTE

coût total de l'action

118 870 452 PTE.

17.
    Par lettre n° 6222 du 2 septembre 1997, le DAFSE a proposé à la Commission que le coût total de l'action soit réduit à 118 870 452 PTE (au lieu de 127 365 818 PTE), avec un concours du FSE réduit à 65 378 749 PTE (au lieu de 70 051 200 PTE), et a demandé le paiement du solde de 22 094 348 PTE, compte tenu de l'avance de 43 284 401 PTE déjà perçue par la requérante.

18.
    Par lettre n° 25694 du 5 décembre 1997 (ci-après le «projet de décision»), envoyée conformément à l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, la Commission a indiqué au DAFSE que le concours du FSE au projet n° 890365/P1 ne pourrait pas être supérieur à 65 378 749 PTE. Le projet de décision conclut également à l'inéligibilité du montant de 8 495 366 PTE tel que ventilé dans le rapport du DAFSE.

19.
    Par courrier du 19 décembre 1997, le DAFSE a adressé à la requérante une copie du projet de décision ainsi qu'une copie du rapport du DAFSE fondé sur le rapport 1995 de l'IGF en donnant à la requérante un délai expirant le 20 janvier 1998 pour présenter d'éventuelles observations.

20.
    Par lettre du 24 décembre 1997, la requérante a demandé au DAFSE de lui fournir une copie du rapport 1995 de l'IGF, de même que tous les avis, rapports et arrêtés relatifs au projet n° 890365/P1 intervenus depuis le 26 avril 1990.

21.
    Par lettre du 1er avril 1998, le délai accordé à la requérante pour faire part au DAFSE de ses observations sur le projet de décision étant arrivé à expiration sans qu'elle ait présenté d'observations, le DAFSE a informé la requérante qu'il avait, à cette même date, demandé à la Commission de prendre une décision définitive sur la demande de paiement du solde.

22.
    Le 30 novembre 1999, la Commission a pris la décision C (99) 3684 (ci-après la «décision attaquée»), portant réduction du montant du concours du FSE octroyé à l'ACA en application de la décision de la Commission C (89) 0570, du 22 mars 1989, prise dans le cadre du projet n° 890365/P1. En vertu de l'article 1er de la décision attaquée, le concours de 86 568 800 PTE initialement accordé par le FSE à l'ACA, qui avait déjà été réduit le 30 octobre 1990 à 70 051 200 PTE, était réduit à 65 378 749 PTE.

23.
    Par lettre du 26 janvier 2000, le DAFSE a notifié la décision attaquée à la requérante.

Procédure et conclusions des parties

24.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 avril 2000, la requérante a saisi le Tribunal du présent recours.

25.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale et, au titre des mesures d'organisation de la procédure prévues à l'article 64 du règlement de procédure, a demandé aux parties de produire certains documents. Par lettres du 28 novembre et du 6 décembre 2001, les parties ont déféré à ces demandes.

26.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 11 décembre 2001.

27.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision C (99) 3684 de la Commission, du 30 novembre 1999, approuvant la demande de paiement du solde relative au dossier n° 890365/P1, pour autant qu'elle impose une réduction au titre des rubriques 14.2.3, présélection et sélection des stagiaires, 14.2.5, copie de documents, 14.3.1.b, personnel technique non enseignant, et 14.3.9, frais de location et loyers;

-    condamner la Commission aux dépens.

28.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme non fondé;

-    condamner la requérante aux dépens.

Sur les conclusions en annulation

29.
    La requérante conteste la réduction opérée par la Commission en ce qui concerne les quatre rubriques suivantes de sa demande de paiement du solde:

-    la rubrique 14.2.3 - présélection et sélection des stagiaires -, au sujet de laquelle elle fait valoir l'existence d'un défaut de motivation et l'existence d'une erreur d'appréciation des faits;

-     la rubrique 14.2.5 - copie de documents -, au sujet de laquelle elle invoque l'existence d'un défaut de motivation et la violation du principe de proportionnalité;

-    la rubrique 14.3.1.b - personnel technique non enseignant -, au sujet de laquelle elle soutient qu'il existe des défauts de motivation et des erreurs d'appréciation des faits;

-     la rubrique 14.3.9 - frais de location et loyers -, au sujet de laquelle elle allègue l'existence d'une erreur d'appréciation des faits.

Observations liminaires sur les griefs tirés de la violation de l'obligation de motivation

Arguments des parties

30.
    La requérante rappelle que l'article 253 CE oblige la Commission à motiver ses décisions et souligne qu'il résulte d'une jurisprudence constante qu'une décision de la Commission portant réduction du concours initialement octroyé, qui entraîne de ce fait des conséquences graves pour les intéressés, doit faire clairement apparaître les raisons concrètes justifiant la réduction du concours par rapport au montant initialement agréé. Une telle décision, selon la requérante, doit également faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l'institution auteur de l'acte (arrêts du Tribunal du 7 novembre 1997, Cipeke/Commission, T-84/96, Rec. p. II-2081, point 46, et du 15 septembre 1998, Mediocurso/Commission, T-180/96 et T-181/96, Rec. p. II-3477, point 99).

31.
    En l'espèce, la décision attaquée serait entachée d'un défaut de motivation en ce qui concerne la réduction du montant des rubriques 14.2.3, présélection et sélection des stagiaires, 14.2.5, copie de documents, et 14.3.1.b, personnel technique non enseignant, et devrait par conséquent être annulée avec toutes les conséquences juridiques qui en découlent.

32.
    En réponse à l'argument de la Commission selon lequel la décision attaquée satisfait aux exigences énoncées par la jurisprudence citée aux points 73 à 75 de l'arrêt du Tribunal du 16 septembre 1999, Partex/Commission (T-182/96, Rec. p. II-2673), la requérante souligne que ni le libellé de la décision attaquée, ni le contexte dans lequel cette décision a été adoptée, ni l'ensemble des règles de droit régissant la matière ne fournissent d'indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est, éventuellement, entachée d'une erreur permettant d'en contester la validité en ce qui concerne la réduction du montant des trois rubriques en cause.

33.
    Plus particulièrement, en réponse à l'argument de la Commission selon lequel le cinquième considérant de la décision attaquée précise que «certaines dépenses présentées ne respectent pas les conditions fixées par la décision d'agrément, de sorte que la participation doit encore être réduite», la requérante relève qu'il est inexact que ladite décision d'agrément ait fixé de telles conditions.

34.
    La Commission souligne que la requérante a pu prendre connaissance des actes des autorités nationales auxquels la décision attaquée fait référence et que les informations que ces actes contiennent sont suffisantes pour lui permettre d'identifier et de comprendre les raisons des réductions pratiquées, compte tenu du contexte dans lequel la décision a été prise.

Appréciation du Tribunal

35.
    L'obligation de motiver une décision individuelle a pour but de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est, éventuellement, entachée d'un vice permettant d'en contester la validité et de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision. La portée de cette obligation dépend de la nature de l'acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (arrêts de la Cour du 7 avril 1987, Sisma/Commission, 32/86, Rec. p. 1645, point 8; du 4 juin 1992, Consorgan/Commission, C-181/90, Rec. p. I-3557, point 14, et Cipeke/Commission, C-189/90, Rec. p. I-3573, point 14; arrêts du Tribunal du 12 janvier 1995, Branco/Commission, T-85/94, Rec. p. II-45, point 32, et Partex/Commission, précité, point 73).

36.
    Une décision portant réduction du montant d'un concours du FSE initialement accordé entraînant, notamment, des conséquences graves pour le bénéficiaire du concours, celle-ci doit faire clairement apparaître les motifs qui justifient la réduction du concours par rapport au montant initialement agréé (arrêts Consorgan/Commission, précité, point 18, et Cipeke/Commission, précité, point 18; arrêts du Tribunal du 6 décembre 1994, Lisrestal e.a./Commission, T-450/93, Rec. p. II-1177, point 52; Branco/Commission, précité, point 33, et Partex/Commission, précité, point 74).

37.
    La question de savoir si la motivation d'une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte, ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt de la Cour du 15 mai 1997, Siemens/Commission, C-278/95 P, Rec. p. I-2507, point 17; arrêt Partex/Commission, précité, point 75).

38.
    Dans l'hypothèse où la Commission confirme purement et simplement la proposition d'un État membre de réduire un concours initialement accordé, une décision de la Commission peut être considérée comme dûment motivée, au sens de l'article 253 CE, soit lorsqu'elle fait elle-même clairement apparaître les motifs qui justifient la réduction du concours, soit, à défaut, lorsqu'elle se réfère clairement à un acte des autorités nationales compétentes de l'État membre concerné dans lequel celles-ci exposent clairement les motifs d'une telle réduction (arrêt Branco/Commission, précité, point 36, confirmé sur opposition par arrêt du Tribunal du 13 décembre 1995, Commission/Branco, T-85/94 OP, Rec. p. II-2993, point 27, et arrêt Partex/Commission, précité, point 76).

39.
    Dès lors, s'il ressort du dossier que la décision de la Commission ne s'écarte pas sur un point ou un autre des actes pris par les autorités nationales, il est permis de considérer que le contenu de ceux-ci est intégré à la motivation de la décision de la Commission, à tout le moins dans la mesure où le bénéficiaire du concours a pu en prendre connaissance (arrêts du Tribunal du 16 juillet 1998, Proderec/Commission, T-72/97, Rec. p. II-2847, point 105, et Partex/Commission, précité, point 77).

40.
    Il convient dès lors d'examiner si la requérante a pu prendre connaissance des actes auxquels il est fait référence dans la décision attaquée et si les informations qu'ils contiennent étaient suffisantes, eu égard au contexte dans lequel la décision attaquée a été prise, pour lui permettre d'identifier et de comprendre les raisons des réductions opérées (arrêt Partex/Commission, précité, point 78).

41.
    En l'espèce, la décision attaquée fait référence, dans son quatrième considérant, aux motifs exposés dans la lettre n° 6222 du DAFSE en date du 2 septembre 1997, laquelle comportait en annexe une copie du rapport du DAFSE, et, dans son cinquième considérant, aux «résultats du contrôle présentés dans les communications notifiées en temps utile à l'organisme concerné», c'est-à-dire le rapport 1995 de l'IGF et le rapport du DAFSE. Le cinquième considérant de cette décision renvoie également au projet de décision.

42.
    Il ressort donc du libellé de la décision attaquée que les divers éléments permettant de comprendre les raisons qui ont conduit la Commission à réduire le montant du concours octroyé par le FSE sont exposés dans les lettres et rapports qui y sont cités.

43.
    À cet égard, il y a lieu de noter que le rapport du DAFSE ainsi que le projet de décision ont été notifiés à la requérante par lettre du DAFSE en date du 19 décembre 1997, et que la requérante ne conteste pas avoir également reçu une copie du rapport 1995 de l'IGF.

44.
    Il ressort également du contexte dans lequel la décision attaquée a été prise, que la Commission n'a fait que confirmer la proposition de l'État membre concerné de réduire le concours initialement octroyé. Ainsi, le projet de décision relève qu'«après examen de la demande de paiement du solde et des pièces afférentes envoyées par l'État membre (DAFSE), les services du FSE, sur la base des résultats du rapport d'audit figurant dans la note n° 1618 [du DAFSE], ont conclu à l'inéligibilité du montant de 8 495 366 PTE».

45.
    Enfin, il y a lieu de relever que la décision attaquée fait référence, dans son cinquième considérant, au fait que «certaines dépenses présentées ne respectent pas les conditions fixées par la décision d'agrément» et que cette référence doit être comprise comme renvoyant à l'acte d'acceptation de la décision d'agrément signé par la requérante le 9 mai 1989, dans lequel l'ACA, en tant que bénéficiaire du concours du FSE, a explicitement déclaré:

«[L]e(s) concours accordé(s) sera(ont) utilisé(s) en conformité avec les dispositions nationales et communautaires applicables, ainsi que dans le respect de tous les éléments déterminants de la décision d'approbation du ‘dossier’ référencé ci-dessus.»

46.
    Ce sont donc ces dispositions que la requérante devait respecter dans le cadre de la mise en oeuvre du concours du FSE, et la Commission pouvait, en application de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, suspendre, réduire ou supprimer ce concours, en se référant à une règle nationale ou communautaire n'ayant pas été respectée lors de l'exécution de l'action en question (arrêt Mediocurso/Commission, précité, points 113 et 119).

47.
    Il s'ensuit qu'il convient d'examiner le contenu des documents communiqués à la requérante auxquels la décision attaquée fait référence ainsi que les dispositions nationales et communautaires applicables pour juger les griefs tirés de la violation de l'obligation de motivation au titre de la rubrique 14.2.3, présélection et sélection des stagiaires, de la rubrique 14.2.5, copie de documents, et de la rubrique 14.3.1.b, personnel technique non enseignant.

Sur la rubrique 14.2.3, présélection et sélection des stagiaires

Examen par la Commission

48.
    La requérante a imputé dans la demande de paiement du solde la somme de 4 297 500 PTE au titre de la rubrique ici en cause pour la présélection et la sélection de 249 stagiaires.

49.
    La Commission a réduit cette somme pour les raisons exposées dans le projet de décision, à savoir que le coût de 17 259 PTE imputé par la requérante pour chaque candidat sélectionné (4 297 500 PTE : 249 candidats sélectionnés) était excessif et qu'il convenait de retenir, comme «critères raisonnables», pour déterminer le montant éligible, un taux de sélection de 40 % des candidats présélectionnés (249 candidats sélectionnés : 40 x 100 = 623 candidats présélectionnés) et un coût de 6 000 PTE par candidat présélectionné, ce qui donne la somme de 3 738 000 PTE (623 x 6 000 PTE).

Sur les griefs tirés de la violation de l'obligation de motivation et de l'existence d'une erreur d'appréciation des faits

50.
    Il y a lieu d'observer que les griefs de la requérante concernent à la fois la motivation et le bien-fondé des critères utilisés par la Commission pour déterminer le montant des dépenses éligibles au titre de la rubrique en cause.

51.
    À titre liminaire, il convient de relever que, en vertu de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, lorsqu'un concours du FSE n'est pas utilisé conformément aux conditions fixées par la décision d'agrément, la Commission peut suspendre, réduire ou supprimer ce concours. L'application de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83 peut amener la Commission à procéder à une évaluation de situations factuelles et comptables complexes. Dans le contexte d'une telle évaluation, la Commission doit, dès lors, pouvoir disposer d'un large pouvoir d'appréciation. Par conséquent, le Tribunal doit limiter son contrôle à la vérification que la Commission n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des données en cause (arrêt Mediocurso/Commission, précité, points 118 et 120).

52.
    La requérante considère que ni le projet de décision ni le rapport du DAFSE ne révèlent les raisons concrètes pour lesquelles les coûts ont été jugés excessifs ou pour lesquelles la sélection de 40 % des candidats présélectionnés est considérée comme raisonnable, ce qui viole l'obligation de motivation édictée par l'article 253 CE.

53.
    En l'espèce, la requérante souligne que l'obligation de motivation est d'autant plus importante que le rapport 1995 de l'IGF ne remettait pas en cause le coût de 17 259 PTE par candidat sélectionné (soit 4 297 500 : 249). Il serait ainsi difficile de comprendre en quoi la Commission peut juger excessif un coût de 17 259 PTE par candidat sélectionné et considérer dans le même temps comme acceptable un coût de 15 012 PTE (soit 3 738 000 : 249), alors que la différence de coût n'est que de 2 247 PTE par candidat, soit seulement 13 % du total.

54.
    Le Tribunal constate néanmoins qu'il ressort du rapport 1995 de l'IGF que celle-ci a laissé au DAFSE le soin d'apprécier le caractère raisonnable et l'éligibilité des dépenses imputées par la requérante, compte tenu de ce qu'il ne lui a pas été possible de retrouver les coûts correspondant aux factures présentées par l'ACA dans les registres de l'entreprise sous-traitante utilisée et de ce que «le ‘poids’ des frais liés à la préparation des cours a dépassé le pourcentage normalement admis par le DAFSE (8 % du poste fonctionnement et gestion et 5 % du coût total des actions)».

55.
    Par la suite, le rapport du DAFSE a proposé la réduction du concours du FSE au titre de la rubrique ici en cause, en considérant que le coût par candidat sélectionné de 17 259 PTE est «très élevé» et que, «si on accepte comme raisonnable» un taux de sélection de 40 % des candidats présélectionnés et un coût de 6 000 PTE par candidat présélectionné, le montant éligible est de 3 738 000 PTE (soit 249 : 40 x 100 = 623; 623 x 6 000 = 3 738 000). Le projet de décision a repris ce raisonnement pour arriver au même résultat.

56.
    La requérante ne peut donc se prévaloir du rapport 1995 de l'IGF pour prétendre que le DAFSE et la Commission ne pouvaient pas apprécier le caractère éligible de la somme ici en cause.

57.
    La requérante conteste également l'argument de la Commission selon lequel le montant de 6 000 PTE par candidat doit être considéré comme raisonnable aux motifs qu'il s'agit, en application de l'arrêté n° 20/MTSS/87, du 19 juin 1987, du ministre du Travail et de la Sécurité sociale portugais (Diário da República, série II, n° 148, du 1er juillet 1987, p. 8141, ci-après l'«arrêté n° 20/MTSS/87»), du montant équivalant à la rémunération horaire d'un formateur titulaire d'une licence et qu'une heure suffit pour procéder à la présélection et à la sélection d'un candidat.

58.
    La requérante considère en effet que l'arrêté n° 20/MTSS/87 ne concerne que les limites de la rémunération des enseignants, et non la rémunération des recruteurs, et qu'il ne permet donc pas de justifier le caractère raisonnable d'un coût de 6 000 PTE seulement par heure pour un recruteur. Elle relève aussi que rien n'explique pourquoi une heure devait suffire pour procéder à la présélection et à la sélection d'un candidat. Dès lors, elle déclare ne pas comprendre en quoi les coûts imputés seraient «excessifs» et «déraisonnables».

59.
    Le Tribunal constate cependant que l'arrêté n° 20/MTSS/87 fixe les plafonds de rémunération du personnel enseignant pour les actions de formation professionnelle financées par le FSE et que la requérante est censée avoir connaissance de la législation portugaise relative à ce type d'actions (arrêt Partex/Commission, précité, points 85 et 86). La notion de formation professionnelle doit être interprétée en ce sens qu'elle intègre toutes les activités nécessaires pour la réalisation de la formation professionnelle, en ce inclues les activités préparatoires, telles celles de présélection et de sélection des candidats aux actions de formation professionnelle. En l'espèce, la Commission a retenu la rémunération horaire de 6 000 PTE, qui correspond à celle d'un formateur titulaire d'une licence. Le Tribunal considère qu'elle n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant ce critère raisonnable et adéquat, compte tenu de l'objet des cours devant être dispensés, qui ne justifiait pas une rémunération correspondant à un niveau de qualification supérieure, dès lors que ces cours concernaient les techniques d'édition électronique, le secrétariat avec appui informatique, l'analyse et la programmation de systèmes de bases de données, la tapisserie, la pâtisserie, les techniques de vente et les systèmes bureautiques.

60.
    Le Tribunal estime également que, en considérant que la durée raisonnable d'examen d'une candidature était d'une heure, la Commission n'a pas outrepassé le pouvoir d'appréciation dont elle disposait en l'espèce.

61.
    Par ailleurs, le Tribunal considère que la Commission ne peut se voir reprocher d'avoir estimé que le taux de sélection de 40 % des candidats présélectionnés était raisonnable. En effet, la Commission prend pour hypothèse que la requérante a présélectionné 623 candidats pour en sélectionner 249, c'est-à-dire 40 %, alors que dans la demande de paiement du solde, la requérante indique avoir présélectionné 573 candidats, de sorte que, si la Commission avait appliqué le chiffre de 6 000 PTE à 573 et non à 623 candidats présélectionnés, le résultat aurait été de 3 438 000 PTE, ce qui représente un montant inférieur à la somme de 3 738 000 PTE reconnue éligible par la Commission.

62.
    Il découle de ce qui précède, d'une part, que la motivation contenue dans le rapport du DAFSE et le projet de décision, auxquels la décision attaquée se réfère, lue à la lumière des dispositions nationales et communautaires applicables, fait apparaître les raisons pour lesquelles le concours du FSE a été réduit et satisfait aux exigences de l'article 253 CE et, d'autre part, que la Commission n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en réduisant le concours du FSE.

63.
    Partant, les griefs de la requérante tirés de la violation de l'obligation de motivation et de l'existence d'une erreur d'appréciation des faits doivent être rejetés.

Sur la rubrique 14.2.5, copie de documents

Examen par la Commission

64.
    La requérante a imputé, dans la demande de paiement du solde, le montant de 1 492 500 PTE sous la rubrique 14.2.5, copie de documents.

65.
    La Commission a réduit le montant éligible à 52 500 PTE pour les raisons exposées dans le projet de décision en ces termes:

«En ce qui concerne la reproduction de documents, le montant imputé a été rectifié, compte tenu du fait que le coût de la totalité des livres et manuels distribués a été intégralement admis. Considérant comme raisonnable la consommation de trois rames de papier (1 500 feuilles) par cours, les 7 cours de l'action et le montant de 5 [PTE] par photocopie, puisque l'ACA a imputé à la rubrique 14.3.14 - dépenses administratives générales - l'achat de papier et de toner pour la photocopieuse, on obtient un montant éligible de 52 500 [PTE] (7 cours x 1 500 feuilles x 5 [PTE]).»

Sur le grief tiré de la violation de l'obligation de motivation

66.
    La requérante soutient que la décision attaquée et ses actes préparatoires ne contiennent aucune indication des motifs sur deux points essentiels. D'une part, la Commission n'aurait pas expliqué pourquoi elle a estimé que la consommation de papier raisonnable était de trois rames de papier (soit 1 500 feuilles) par cours, alors qu'elle en a utilisé une quantité bien supérieure. D'autre part, la Commission n'aurait pas précisé pour quelle raison elle a fixé le prix d'une photocopie à 5 PTE, alors qu'un tel prix s'écarte sensiblement des tarifs du marché, aussi bien en 1989 qu'actuellement, et des prix pratiqués par le DAFSE.

67.
    Le Tribunal constate, tout d'abord, qu'il ressort du rapport 1995 de l'IGF que celle-ci a considéré que «[le montant de 1 492 500 PTE était] exagéré, compte tenu, d'une part, du nombre de photocopies qu'il représente par stagiaire et, d'autre part, de l'ensemble des manuels et livres qui ont été distribués, ce qui aurait dû en principe éviter le recours à un nombre aussi élevé de photocopies».

68.
    Le Tribunal relève également que le rapport du DAFSE a estimé que le coût de 1 492 500 PTE imputé par la requérante était exagéré, compte tenu de la série de manuels et de livres qui ont été distribués, dont le coût a été intégralement accepté, et en considérant qu'il était raisonnable d'utiliser trois rames de papier par cours (soit 1 500 feuilles), que l'action de formation professionnelle en cause était de sept cours, que l'ACA avait imputé sous la rubrique 14.3.14, dépenses administratives générales, les dépenses relatives à l'achat de rames de papier et de cartouches d'encre pour photocopieuse et qu'un coût de 5 PTE par photocopie était raisonnable. En conséquence, le DAFSE a estimé que le montant éligible était de 52 500 PTE (1 500 feuilles x 7 cours x 5 PTE). Ce raisonnement a été repris dans le projet de décision.

69.
    Force est donc de constater que les explications contenues dans les actes auxquels la décision attaquée se réfère font apparaître les raisons pour lesquelles le concours du FSE a été réduit et satisfont ainsi aux exigences de l'article 253 CE.

70.
    En conséquence, le grief de la requérante tiré de la violation de l'obligation de motivation doit être rejeté.

Sur le grief tiré de la violation du principe de proportionnalité

71.
    La requérante soutient que la Commission a violé le principe de proportionnalité en fondant sa décision sur des critères inadaptés, impropres à une évaluation rationnelle du coût de la reproduction de documents.

72.
    Le Tribunal considère que le grief de la requérante tiré de la violation du principe de proportionnalité porte en réalité sur la question de savoir si la Commission n'a pas commis une erreur d'appréciation en réduisant le concours du FSE.

73.
    Il y a lieu de rappeler que, selon le rapport du DAFSE et le projet de décision, quatre raisons ont motivé la réduction du concours du FSE: des livres et manuels ont été distribués aux stagiaires; chacun des sept cours a nécessité 1 500 photocopies; le prix d'une photocopie est de 5 PTE; les frais d'achat de papier et de cartouches d'encre pour photocopieuse sont imputés sous la rubrique 14.3.14, dépenses administratives générales.

74.
    La requérante ne conteste pas le bien-fondé du quatrième critère selon lequel la rubrique 14.2.5, copie de documents, ne devait pas prendre en considération les frais d'achat de 90 rames de papier et de cartouches d'encre pour photocopieuse, puisque ces frais étaient déjà imputés sous la rubrique 14.3.14, dépenses administratives générales. Le fait que de tels frais aient pu être imputés sous cette dernière rubrique comme d'ailleurs le fait que la Commission ait également accepté le montant d'autres frais d'achat de papier de format A3 et A4 et des dépenses de photocopie au titre de la rubrique 14.3.10, matériel et consommables, devaient être pris en considération par la Commission pour apprécier le montant des dépenses au titre de la rubrique 14.2.5, copie de documents, dès lors que cela signifiait qu'une partie des coûts liés à la réalisation des photocopies était imputée sous d'autres rubriques et que cette partie des coûts ne pouvait donc figurer dans la rubrique ici en cause.

75.
    En conséquence, il convient de vérifier si les trois autres critères pris en compte dans le rapport du DAFSE et le projet de décision ne caractérisent pas une erreur d'appréciation de la Commission en ce qui concerne la détermination des dépenses éligibles au titre du concours du FSE.

76.
    En premier lieu, la requérante souligne, quant à l'argument tiré de la distribution des livres et manuels, que cet argument ne peut être invoqué pour justifier la diminution du nombre de photocopies, puisque ces livres et manuels ont précisément été distribués sous forme de photocopies.

77.
    À cet égard, la requérante précise que le montant de 2 120 000 PTE imputé sous la rubrique 14.2.1, matériel pédagogique, représente le coût des droits d'auteur afférents à la photocopie des livres et manuels qui ont été reproduits et non celui de leur photocopie proprement dite, qui a été imputé sous la rubrique 14.2.5, copie de documents.

78.
    Le Tribunal relève que la demande de paiement du solde décomposait la somme de 2 120 000 PTE imputée au titre de la rubrique 14.2.1, matériel pédagogique, de la manière suivante:

«14.2.1 Matériel Pédagogique:

(1 Ens. Manuels d'Int. Informatique x 190 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de MSDOS x 265 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de Word IV x 390 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de Lotus 123 x 230 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de GEM Desk. Publ. x 75 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de Marketing x 300 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de Tech. de Vente x 350 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels d'Org. Met. A. Adm. x 180 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de Wordstar x 80 000 PTE

+ 1 Ens. Manuels de Tech. de Tapisserie x 60 000 PTE)

COUT 2 120 000 PTE.»

79.
    Lors de l'audience, la requérante a précisé que l'abréviation «Conj. Manuais» («Ens. Manuels») utilisée dans sa demande de paiement du solde pouvait, selon le cas, recouvrir un seul livre - même si le mot «Manuais» est un pluriel - ou deux ou trois livres, à savoir le manuel de théorie, le livre d'exercices et, éventuellement, un livre d'applications décrivant différentes hypothèses, et que le coût de chacun de ces ensembles ne couvrait que l'acquisition d'une unité et les droits d'auteur afférents à la photocopie des manuels.

80.
    Il convient néanmoins de relever que ces affirmations ne sont étayées par aucun élément de preuve et sont contredites par le fait que le mot «Manuais» («manuels») soit un pluriel.

81.
    En outre, l'importance des sommes imputées par la requérante pour chaque ensemble de manuels permet de penser que l'abréviation employée désigne bien le coût d'achat d'un ensemble de manuels et non celui des droits d'auteur afférents à leur photocopie. Ainsi, l'ensemble des manuels de marketing a coûté 300 000 PTE d'après la demande de paiement du solde. Or, selon la ventilation du nombre de photocopies distribuées par cours fournie par la requérante en annexe à son mémoire en réplique, 49 photocopies de ces manuels ont été faites. Si la requérante avait acheté 49 manuels de marketing pour 300 000 PTE, le prix par manuel aurait été de 6 122 PTE, ce qui représentait une somme non négligeable à l'époque des faits. Le rapport entre le prix des autres ensembles de manuels et le nombre de photocopies que la requérante affirme en avoir fait permet également d'obtenir un montant par unité susceptible de représenter le coût d'achat desdits manuels.

82.
    Il en découle que la Commission pouvait légitimement estimer que des livres et manuels avaient été achetés et distribués aux stagiaires, ce qui diminuait d'autant la nécessité de faire des photocopies.

83.
    En deuxième lieu, la requérante remarque, quant au nombre de photocopies, que la Commission a traité de la même manière des situations différentes en ne tenant pas compte des particularités des sept cours, dont l'objet, le nombre de stagiaires, la durée et, par conséquent, les frais de reprographie variaient d'un cours à l'autre. Ainsi, la Commission a considéré que le même nombre de photocopies était requis pour le cours de techniques d'édition électronique, qui comptait 17 stagiaires et s'est déroulé sur 120 jours (600 heures), le cours de secrétariat avec appui informatique, qui comptait 49 stagiaires et s'est déroulé sur 90 jours (1 350 heures), le cours d'analyse et de programmation de systèmes de bases de données, qui comptait 15 stagiaires et s'est déroulé sur 100 jours (500 heures), le cours de tapisserie, qui comptait 27 stagiaires et s'est déroulé sur 80 jours (400 heures), le cours de pâtisserie, qui comptait 11 stagiaires et s'est déroulé sur 120 jours (203 heures), le cours de techniques de vente, qui comptait 49 stagiaires et s'est déroulé sur 240 jours (1 200 heures), et le cours de systèmes bureautiques, qui comptait 61 stagiaires et s'est déroulé sur 400 jours (2 000 heures).

84.
    Or, la requérante fait observer que ce ne sont pas 10 500 (soit 1 500 x 7) photocopies qui ont été distribuées aux stagiaires mais 137 770 photocopies. Dans la réplique, la requérante fournit la ventilation du nombre de photocopies distribuées par cours et des frais de photocopie pour chaque cours et note qu'un tel document ne lui a jamais été demandé dans le cadre de la procédure administrative.

85.
    Le Tribunal estime toutefois que, pour déterminer le nombre de photocopies, il est nécessaire de prendre en considération le fait que, selon la ventilation fournie par la requérante en annexe de la réplique, l'essentiel des photocopies correspondrait aux photocopies des manuels dont le coût a été imputé sous la rubrique 14.2.1 (tels les manuels de MS DOS, de Word IV, de Lotus 123, de GEM Desk. Publ., de marketing, de techniques de vente, de Wordstar, de techniques de tapisserie, de techniques de secrétariat, ou d'introduction à l'informatique). Or, le Tribunal a jugé que la Commission pouvait légitimement estimer que des livres et manuels avaient été achetés et distribués aux stagiaires, ce qui diminuait d'autant la nécessité de faire des photocopies.

86.
    Partant, en l'absence de preuves suffisantes fournies en temps utile par la requérante à la Commission en ce qui concerne le nombre de photocopies qui auraient été réellement distribuées pour chaque cours, il ne peut être reproché à cette institution d'avoir jugé raisonnable le chiffre de 1 500 photocopies par cours. La requérante étant bénéficiaire du concours du FSE, il lui appartenait de transmettre en temps utile de telles preuves aux autorités compétentes, au vu du rapport du DAFSE et du projet de décision.

87.
    En troisième lieu, la requérante fait observer, quant au prix unitaire de la photocopie, que le prix de 10 PTE qu'elle a proposé est le même que celui qui est retenu par le DAFSE. Un tel prix ne pourrait donc être qualifié d'excessif. En outre, la requérante indique, à titre de comparaison, que le prix d'une page photocopiée est de 100 PTE selon le tarif des émoluments des notaires, approuvé par le décret-loi n° 397/83, du 2 novembre 1983 (modifié à plusieurs reprises).

88.
    Le Tribunal constate que la lettre du DAFSE invoquée par la requérante pour justifier le prix de 10 PTE date du 3 avril 1996. Cette lettre se rapporte donc à une période différente de celle au cours de laquelle les actions de formation professionnelle se sont déroulées, soit entre février et décembre 1989. En outre, il convient de relever que le prix mentionné dans cette lettre couvre non seulement le coût de la photocopie mais également le prix du service rendu par l'administration pour l'effectuer. Par ailleurs, les prix pratiqués en application du tarif des émoluments des notaires relèvent d'un régime particulier, qui n'est pas applicable en l'espèce.

89.
    Il s'ensuit que la requérante ne démontre pas que le prix utilisé par la Commission est déraisonnable.

90.
    Il résulte de ce qui précède que le grief de la requérante tiré de la violation du principe de proportionnalité doit être rejeté.

Sur la rubrique 14.3.1.b, personnel technique non enseignant

Examen par la Commission

91.
    Seuls sont en cause, dans le cadre de cette rubrique, les montants imputés au titre de la coordination pédagogique et de la coordination générale, le montant imputé par la requérante au titre de la coordination technique n'étant pas en litige.

92.
    La requérante a imputé, dans la demande de paiement du solde, les montants de 5 970 000 PTE (199 jours à 30 000 PTE) pour la coordination pédagogique et de 5 850 000 PTE (130 jours à 45 000 PTE) pour la coordination générale.

93.
    La Commission a réduit le montant éligible de la coordination pédagogique à 3 900 000 PTE et celui de la coordination générale à 5 460 000 PTE pour les raisons suivantes, exposées dans le projet de décision:

-    en ce qui concerne la coordination pédagogique, elle a estimé que «rien ne justifi[ait] que la coordination pédagogique ait duré 69 jours de plus que la coordination générale [et la coordination technique]» et qu'en conséquence le montant éligible au titre de la coordination pédagogique devait être réduit de 5 970 000 PTE (199 jours à 30 000 PTE) à 3 900 000 PTE (130 jours à 30 000 PTE);

-    en ce qui concerne la coordination générale, elle a souligné «qu'il n'est pas raisonnable qu'un coordinateur général soit payé selon un tarif horaire supérieur à celui d'un formateur titulaire d'une licence, et que les coordinateurs n'exerçaient, en tant que tels, aucune autre activité et consacraient 6 heures par jour à l'action». En conséquence, elle a considéré que le montant éligible au titre de la coordination générale devait être réduit de 5 850 000 PTE (130 jours à 45 000 PTE) à 5 460 000 PTE (130 jours à 42 000 PTE par jour, soit 6 heures à 7 000 PTE par heure), le chiffre de 7 000 PTE retenu comme éligible résultant des dispositions de l'arrêté n° 20/MTSS/87.

Sur les griefs tirés de la violation de l'obligation de motivation

94.
    La requérante considère que la décision attaquée est entachée de défauts de motivation, qui constituent autant de violations de l'article 253 CE.

95.
    En ce qui concerne la coordination pédagogique, la requérante note que la Commission n'a pas indiqué les raisons pour lesquelles elle estime que rien ne justifie que la coordination pédagogique ait duré 69 jours de plus que la coordination générale et la coordination technique, la seule différence entre les types de coordination ne pouvant à cet égard servir de justification.

96.
    En ce qui concerne la coordination générale, la requérante soutient que la Commission n'a pas fourni la raison pour laquelle il ne serait pas raisonnable qu'un coordinateur général titulaire d'une licence soit payé à un tarif horaire supérieur à celui d'un formateur titulaire d'une licence, alors que leurs fonctions sont différentes. La requérante remarque également que la Commission n'a fourni aucune des raisons pour lesquelles elle a considéré qu'un coordinateur n'avait travaillé que six heures par jour, alors que la durée quotidienne de travail au Portugal est de huit heures.

97.
    Le Tribunal constate qu'il ressort du rapport 1995 de l'IGF que celle-ci a considéré que les dépenses incluses dans cette rubrique représentaient environ 37 % des dépenses relatives au personnel enseignant, ce qui dépassait les paramètres normalement admis pour ce type de dépenses. Par conséquent, l'IGF a soumis à l'appréciation du DAFSE l'éligibilité et le caractère raisonnable des dépenses de fonctionnement et de gestion des cours, auxquelles appartiennent les dépenses imputées au titre de la rubrique 14.3.1.b, personnel technique non enseignant.

98.
    Pour ce qui est de la coordination pédagogique, le rapport du DAFSE comme le projet de décision ont proposé la réduction du concours du FSE au motif que rien ne justifiait le fait qu'elle ait duré 69 jours de plus que la coordination générale et la coordination technique. Le DAFSE et la Commission ont ainsi pris en considération 130 jours et non pas 199 jours pour calculer la somme éligible, soit 3 900 000 PTE (130 jours à 30 000 PTE) au lieu de 5 970 000 PTE (199 jours à 30 000 PTE).

99.
    Pour ce qui est de la coordination générale, le rapport du DAFSE comme le projet de décision ont proposé la réduction du concours du FSE aux motifs que les coordinateurs n'exerçaient aucune autre activité et étaient censés consacrer six heures par jour à l'action de formation et qu'il n'était pas raisonnable au regard notamment de l'arrêté n° 20/MTSS/87 qu'un coordinateur général soit payé selon un tarif horaire supérieur à celui d'un formateur titulaire d'une licence, soit 7 000 PTE par heure. Le DAFSE et la Commission ont ainsi considéré que la somme éligible n'était pas de 5 850 000 PTE (130 jours à 45 000 PTE), mais de 5 460 000 PTE (130 jours x 6 heures x 7 000 PTE).

100.
    Le Tribunal relève que les explications contenues dans les actes auxquels la décision attaquée se réfère font apparaître les raisons pour lesquelles le concours du FSE a été réduit en ce qui concerne tant la coordination pédagogique que la coordination générale. Ces explications ont également permis à l'intéressé d'en contester la validité et au Tribunal d'exercer son contrôle sur la légalité de l'acte attaqué. Il a donc été satisfait aux exigences de l'article 253 CE.

101.
    En conséquence, les griefs de la requérante tirés de la violation de l'obligation de motivation doivent être rejetés.

Sur les griefs tirés de l'existence d'une erreur d'appréciation des faits

102.
    S'agissant de la coordination pédagogique, la requérante fait d'abord valoir qu'il est inexact d'affirmer, comme le fait le rapport du DAFSE et le projet de décision, que «rien ne justifie que la coordination pédagogique ait duré 69 jours de plus que la coordination générale». En effet, la coordination générale, qui a duré 130 jours, a été assurée par une seule personne, alors que la coordination pédagogique, qui représente 199 jours, a été effectuée par deux personnes, l'une ayant travaillé pendant 109 jours (77 jours et 32 jours) et l'autre pendant 90 jours. La requérante précise que la différence entre le nombre de jours imputés à la coordination générale ou à la coordination technique (130 jours) et celui imputé à la coordination pédagogique (199 jours) s'explique simplement par le fait que la coordination pédagogique est plus prenante et exige plus de travail que les autres coordinations.

103.
    Le Tribunal estime cependant que la Commission n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en considérant que rien ne justifie que la coordination pédagogique ait duré 69 jours de plus que la coordination générale. En l'absence de justification pertinente de la part de la requérante, il est difficile en effet de comprendre comment la coordination pédagogique, qui a lieu tout au long des actions de formation, peut se voir imputer un nombre de jours supérieur à celui de la coordination générale, qui peut avoir lieu avant, pendant ou après les actions de formation. À cet égard, il convient de rappeler que la requérante étant bénéficiaire du concours du FSE, il lui appartenait de transmettre en temps utiles de telles justifications aux autorités compétentes, au vu du rapport du DAFSE et du projet de décision.

104.
    S'agissant de la coordination générale, la requérante soutient, en premier lieu, que l'allégation selon laquelle les coordinateurs n'ont consacré que six heures par jour à leur activité pendant le déroulement des cours est erronée, dès lors que la durée quotidienne de travail au Portugal est de huit heures et que rien ne permet d'affirmer que les coordinateurs, dont le coût a été pris en compte par la requérante, n'ont pas respecté cette durée.

105.
    Le Tribunal estime cependant que la requérante ne saurait se prévaloir du fait que la durée quotidienne de travail au Portugal est de huit heures pour remettre en cause l'appréciation de la Commission, en l'absence d'autres éléments de fait justifiant son allégation. En effet, cette durée de huit heures constitue un maximum et non un minimum et la Commission pouvait raisonnablement estimer que, en raison de l'existence de coordinateurs spécifiques pour les questions pédagogiques et techniques, l'attribution de six heures par jour au coordinateur général était suffisante.

106.
    En second lieu, la requérante réfute l'argument selon lequel le coordinateur général ne devait pas être payé selon un barème supérieur à celui applicable au formateur titulaire d'une licence.

107.
    Le Tribunal considère que la Commission ne peut se voir reprocher d'avoir estimé que l'application au coordinateur général de la rémunération correspondant à celle d'un formateur titulaire d'une licence était appropriée au type de cours faisant l'objet de l'action de formation professionnelle en cause. En effet, l'utilisation d'un barème supérieur, tel que celui applicable au formateur professeur d'université ou titulaire d'un doctorat, n'est pas raisonnable et adéquate au regard de l'objet des cours dispensés, qui ne justifiait pas que la coordination générale soit effectuée par une personne d'un tel niveau, dès lors que ces cours concernaient les techniques d'édition électronique, le secrétariat avec appui informatique, l'analyse et la programmation de systèmes de bases de données, la tapisserie, la pâtisserie, les techniques de vente et les systèmes bureautiques.

108.
    Il s'ensuit que les griefs de la requérante tirés de l'existence d'une erreur d'appréciation des faits doivent être rejetés.

Sur la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers

Examen par la Commission

109.
    La requérante a imputé, dans la demande de paiement, le montant de 17 219 511 PTE au titre de la rubrique ici en cause, qui concerne les prestations de location de biens mobiliers et immobiliers effectuées par l'entreprise sous-traitante SI - Sistemas de Informação, Lda (ci-après «SI»).

110.
    La Commission a réduit le montant éligible au titre de ces prestations à 13 803 000 PTE pour les raisons suivantes, exposées dans le projet de décision:

«Dans cette rubrique est imputé, au titre des frais de location et loyers, le montant de 17 308 697 [PTE], dont 17 219 511 [PTE] ont été facturés par l'entreprise [SI]. Au cours de la vérification effectuée par l'IGF auprès de cette entreprise, il est apparu que le montant des loyers et locations déclaré dans le modèle 22 de sa déclaration de revenus pour l'année 1989 a été de 14 842 000 [PTE]. D'autre part, même s'il n'a pas été possible de déterminer les frais réels supportés par SI dans la facture émise à l'intention de l'ACA, il est évident que, même si cela avait été possible, ces coûts seraient manifestement inférieurs à 14 842 000 [PTE], puisque plusieurs des coûts déclarés n'ont certainement rien à voir avec la formation.

[...]

En admettant comme raisonnable une marge bénéficiaire de 50 % sur les coûts réels de la facture émise par sa cliente, et attendu que le montant de 17 220 000 [PTE] représente 62 % du total facturé à l'ACA (17 220 000 [PTE] sur 27 842 000 [PTE] [ce montant est erroné; le montant exact est de 27 847 288 PTE, ce qui toutefois ne change pas la proportion de 62 % utilisée par la Commission]), on constate que l'application de ce pourcentage au coût déclaré par SI dans le modèle 22 donne le chiffre de 9 202 000 [PTE] (14 842 000 [PTE] x 62 %) qui, avec une marge bénéficiaire de 50 %, est porté à 13 803 000 [PTE] (9 202 000 [PTE x 1,5).»

Sur le grief tiré de l'existence d'une erreur d'appréciation des faits

- Arguments des parties

111.
    La requérante soutient que la décision attaquée est viciée en ce qui concerne la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers, dès lors qu'elle se fonde sur une prémisse erronée selon laquelle les coûts inscrits par SI au poste «loyers et locations» de sa déclaration de revenus pour l'année 1989, à savoir 14 842 000 PTE, doivent servir de point de départ pour le calcul des dépenses éligibles au titre de cette rubrique.

112.
    La Commission relève toutefois que le rapport 1995 de l'IGF soumettait à l'appréciation du DAFSE le caractère raisonnable et l'éligibilité des dépenses figurant sous cette rubrique; il affirmait en effet: «[L]e rapport du contrôle comptable de SI indique que le poste locations et loyers contient un montant de 14 842 000 PTE contre 27 847 000 PTE facturés, et inclut 4 323 000 PTE de location de bureaux à Aveiro et 4 300 000 PTE de location d'équipements, montant qui ne semble nullement crédible.» Le rapport rendu le 5 mars 1993 par l'IGF sur le contrôle comptable réalisé auprès de quatre entreprises sous-traitantes utilisées par l'ACA dans le cadre des actions de formation (ci-après le «rapport 1993 de l'IGF») confirmerait cette affirmation en ce qui concerne, en particulier, l'analyse des extraits de compte courant et des justificatifs de SI correspondants.

113.
    La Commission souligne également que l'IGF n'a pas pu identifier les coûts directs correspondant aux factures émises au nom de l'ACA dans les registres de SI. Elle note également que, même si l'IGF était parvenue à établir les seuls coûts directs au moyen des factures émises au nom de l'ACA, ces coûts auraient été inférieurs à 14 842 000 PTE, puisque certains frais déclarés par SI ne sont pas liés aux actions de formation menées par la requérante.

114.
    En conséquence, devant la nécessité d'apprécier le caractère raisonnable et nécessaire de certaines dépenses et des montants correspondants, et compte tenu des prix pratiqués sur le marché et du devoir qu'ont les entités bénéficiaires de deniers publics d'user de la diligence requise d'un bon gestionnaire dans l'administration de ses propres intérêts, la Commission estime qu'une marge de 50 % sur les coûts directs facturés au client est raisonnable pour une entreprise sous-traitante, même si celle-ci est «objectivement élevée» comme le remarque le rapport du DAFSE.

- Appréciation du Tribunal

115.
    À titre liminaire, il y a lieu de préciser que les arguments des parties ne concernent que les dépenses engagées par la requérante auprès de SI, une entreprise sous-traitante, qui lui a loué divers biens mobiliers et immobiliers pour un montant de 17 219 511 PTE au titre du projet n° 890365/P1.

116.
    La décision de la Commission de réduire le montant des dépenses éligibles au titre de la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers, repose sur l'idée que ces frais doivent être déterminés à partir des coûts réels de la facture émise par SI et résulte, selon le projet de décision, du rapport 1993 de l'IGF, qui a été réalisé à la demande du DAFSE.

117.
    Le rapport 1993 de l'IGF analyse tout d'abord les recettes de SI et relève qu'il ressort de sa déclaration de revenus pour l'année 1989 que le montant des ventes et prestations de services effectuées par cette entreprise s'élève à environ 144 187 010 PTE. Ce montant inclut le montant de 17 219 511 PTE facturé par SI à l'ACA pour la location de biens mobiliers et immobiliers, à propos duquel l'IGF note qu'il ressort de l'examen des factures présentées par l'ACA et de sa demande de paiement du solde que les prestations de services fournies par SI concernent la location d'équipement informatique (pour 15 211 000 PTE), l'entretien, l'assistance technique et le transport de l'équipement (pour 1 845 000 PTE) et des loyers (pour 164 000 PTE).

118.
    Ce rapport examine ensuite les coûts de SI, à propos desquels l'IGF limite son examen à l'analyse du poste «loyers et locations» de la déclaration de revenus de cette entreprise pour l'année 1989 et souligne: «Considérant que les factures émises par SI à l'intention de l'ACA portent globalement sur des sommes relatives à des services de location d'équipement informatique et de location de salles, l'analyse des dépenses effectuée s'est limitée au seul poste ‘locations et loyers’ figurant dans le compte de résultats de l'exercice 1989, dont le total atteint, au 31 décembre 1989, 14 842 000 [PTE].» Cette somme est ventilée de la manière suivante:

«Loyers                            

4 323 000

Automercantil                        

736 000

Sofinloc                            

1 788 000

Renault Gest                        

750 000

A.A. Castanheira Rent a Car                

200 000

Fiat                                

446 000

Regisconta                            

2 049 000

Sobran                            

1 300 000

Unital                                

3 000 000

RST                                

250 000

[Total]                     14 842 000.»

119.
    Le rapport 1993 de l'IGF relève également que le montant total porté à la rubrique «loyers», soit 4 323 000 PTE, comprend des sommes relatives à la location de locaux de bureaux dans l'immeuble Vera Cruz, à Aveiro; qu'en ce qui concerne les autres rubriques le montant de 1 300 000 PTE correspond à une facture émise par l'entreprise Sobran, qui a été déclarée en faillite, et que le montant de 3 000 000 PTE correspond à la mise à disposition d'un ordinateur NCR 8250 durant 30 jours, lequel était inscrit dans les immobilisations de la société Unital et a été acheté en 1985 pour 3 500 000 PTE.

120.
    Dans ce contexte, le rapport 1993 de l'IGF compare les recettes et les coûts de SI et conclut que l'examen de la conformité des factures émises, pour un montant total de 27 847 288 PTE (17 219 511 PTE pour le projet n° 890365/P1 et 10 627 777 PTE pour le projet n° 891038/P3), avec le poste des dépenses correspondantes fait ressortir que la somme portée dans la comptabilité de SI au poste «loyers et locations» est de 14 842 000 PTE, comprenant la location de locaux pour 4 323 000 PTE et la location d'équipements pour 4 300 000 PTE, tout en soulignant que ce montant ne «paraît pas crédible pour les raisons indiquées».

121.
    Le rapport 1993 de l'IGF n'examine pas si les autres frais de location et de loyers engagés par SI auprès d'Automercantil (736 000 PTE), de Sofinloc (1 788 000 PTE), de Renault Gest (750 000 PTE), d'A.A. Castanheira Rent a Car (200 000 PTE), de Fiat (446 000 PTE), de Regisconta (2 049 000 PTE) et de RST (250 000 PTE) ont une incidence sur le coût des prestations effectuées par SI pour l'ACA. La dénomination de ces entreprises ne permet toutefois pas d'affirmer que les locations contractées auprès d'elles par SI ont une relation directe avec les prestations effectuées pour l'ACA.

122.
    Le Tribunal constate que le raisonnement développé dans le rapport 1993 de l'IGF repose sur la prémisse erronée selon laquelle les coûts inscrits au poste «loyers et locations» de la déclaration de revenus de SI pour l'année 1989 doivent être utilisés pour déterminer les coûts des prestations facturées par cette entreprise à l'ACA.

123.
    Du détail des dépenses imputées dans la demande de paiement du solde au titre de la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers, il ressort en effet que la somme de 17 219 511 PTE, qui correspond aux dépenses de location d'équipements de l'ACA auprès de SI dans le cadre du projet n° 890365/P1, peut être décomposée comme suit:

-     15 211 018 PTE de location d'équipements;

-     163 800 PTE de location d'installations;

-     841 996 PTE d'entretien;

-     722 032 PTE de transport et d'installation d'équipements;

-     280 665 PTE d'assurances.

124.
    Or, la requérante précise, sans être contestée par la Commission, que les équipements loués par SI à l'ACA pour le projet en cause étaient pour partie la propriété de SI et pour partie loués par SI auprès de tiers. Les équipements appartenant à SI étaient donc comptabilisés au poste «immobilisations corporels» au titre de la provision pour amortissement, dont la déclaration de revenus de 1989 indique qu'il s'élève à 11 169 034 PTE, alors que les biens loués par SI étaient comptabilisés au poste «loyers et locations», qui s'élève à 14 842 000 PTE dans la déclaration de revenus de 1989.

125.
    De même, les coûts des prestations relatives à l'entretien, au transport et à l'installation des équipements et aux assurances étaient comptabilisés par SI sous d'autres postes que le poste «loyers et locations», à savoir les postes afférents aux frais de personnel, à la conservation et à la réparation, et aux assurances.

126.
    Ainsi, la recherche des coûts des prestations effectuées par SI dans la comptabilité de cette entreprise n'aurait pas dû se limiter au seul poste «loyers et locations», mais aurait dû prendre en considération l'ensemble des postes susceptibles de comprendre les coûts précités, dès lors que les prestations de SI ne recouvrent pas seulement la location d'équipements et d'installations loués par SI auprès de tiers, comme le sous-entend l'IGF, mais également la location par SI d'équipements ou d'installations dont elle est propriétaire ainsi que l'entretien, le transport, l'installation et l'assurance de ces équipements.

127.
    Force est donc de constater que le montant de 14 842 000 PTE figurant au poste «loyers et locations» de la déclaration de revenus de SI pour l'année 1989 ne peut servir de base à la détermination des dépenses éligibles au titre de la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers.

128.
    Le rapport 1995 de l'IGF, le rapport du DAFSE et le projet de décision ont reproduit la même erreur.

129.
    En effet, le rapport 1995 de l'IGF reprenait la conclusion du rapport 1993 de l'IGF et soumettait à l'appréciation du DAFSE le caractère raisonnable et l'éligibilité des dépenses figurant sous la rubrique ici en cause.

130.
    Par la suite, le rapport du DAFSE, après avoir rappelé les éléments de la comparaison faite par l'IGF entre le montant de la facture (soit 27 847 288 PTE, dont 17 219 511 PTE pour le projet n° 890365/P1) et la somme portée au poste «loyers et locations» de SI (soit 14 842 000 PTE), a proposé de calculer le montant éligible en utilisant la somme de 14 842 000 PTE comme point de départ.

131.
    Le projet de décision a repris ce raisonnement pour aboutir au même résultat.

132.
    Il s'ensuit que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant la prémisse erronée selon laquelle les coûts de 14 842 000 PTE inscrits au poste «loyers et locations» de la déclaration de revenus de SI pour l'année 1989 permettent de déterminer le montant des dépenses éligibles au titre de la rubrique en cause.

133.
    Il résulte de ce qui précède que le grief de la requérante tiré de l'existence d'une erreur d'appréciation des faits doit être accueilli.

134.
    En conséquence, la décision attaquée doit être annulée dans la mesure où elle réduit, sous la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers, le montant des dépenses imputées par la requérante au titre du paiement de prestations de location de biens mobiliers et immobiliers effectuées par l'entreprise sous-traitante SI.

Sur les dépens

135.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l'article 87, paragraphe 3, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.

136.
    En l'espèce, les conclusions en annulation de la requérante, qui a demandé la condamnation de la Commission à la prise en charge des dépens de la présente instance, ont été déclarées partiellement fondées. Le Tribunal estime qu'il est fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce, eu égard en particulier au long délai écoulé entre la demande de paiement du solde présentée le 26 avril 1990 et la décision attaquée, prise seulement le 30 novembre 1999, en décidant que la Commission doit supporter ses propres dépens et un tiers de ceux exposés par la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

déclare et arrête:

1.
    La décision C (99) 3684 de la Commission, du 30 novembre 1999, portant réduction du concours du Fonds social européen octroyé à l'Associacão Comercial de Aveiro dans le cadre du projet n° 890365/P1, est annulée dans la mesure où elle réduit, sous la rubrique 14.3.9, frais de location et loyers, le montant des prestations facturées par SI - Sistemas de Informação, Lda.

2.
    Le recours est rejeté pour le surplus.

3.
    La Commission supportera ses propres dépens et un tiers de ceux exposés par la requérante.

4.
    La requérante supportera deux tiers de ses propres dépens.

Cooke
García-Valdecasas
Lindh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 mai 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. D. Cooke


1: Langue de procédure: le portugais.