DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

3 octobre 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Meatlove – Marque de l’Union européenne verbale antérieure carnilove – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑491/18,

Vafo Praha s.r.o., établie à Chrášt’any (République tchèque), représentée par Me M. Vojáček, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Bonne et M. H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Susanne Rutzinger-Kurpas, demeurant à Spiegelau (Allemagne), représentée par Me F. Lichtnecker, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 12 juin 2018 (affaire R 264/2018‑4), relative à une procédure d’opposition entre Vafo Praha et Mme Rutzinger-Kurpas,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, V. Kreuschitz (rapporteur) et Mme N. Półtorak, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 août 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 31 octobre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 25 octobre 2018,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 juin 2016, l’intervenante, Mme Susanne Rutzinger-Kurpas, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Meatlove.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 31 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, notamment à la description suivante :  

–        classe 31 : « Aliments et fourrages pour animaux » ;

–        classe 35 : « Service de vente au détail concernant les fourrages pour animaux ; services de vente au détail concernant les compléments alimentaires ; services de vente en gros concernant les compléments alimentaires ; services de vente en gros concernant les fourrages pour animaux ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 130/2016, du 14 juillet 2016.

5        Le 11 octobre 2016, la requérante, Vafo Praha s.r.o., a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure carnilove, désignant notamment les produits relevant des classes 5 et 31 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Compléments vitaminés et minéraux pour animaux domestiques » ;

–        classe 31 : « Aliments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestiques ; friandises pour animaux de compagnie ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Le 20 décembre 2017, la division d’opposition a accueilli l’opposition dès lors qu’elle a notamment considéré que les signes en conflit étaient similaires à un degré moyen sur les plans visuel et phonétique, alors qu’ils étaient identiques sur le plan conceptuel.

9        Le 6 février 2018, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 12 juin 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition et rejeté l’opposition dans son intégralité. En particulier, elle a considéré que, premièrement, les produits et les services en cause étaient principalement destinés au grand public, en l’espèce les propriétaires d’animaux, mais également à ceux dont l’activité commerciale reposait sur l’élevage d’animaux, alors que les services de vente en gros étaient destinés au public professionnel constitué de commerçants, deuxièmement, le niveau d’attention de ce public variait de moyen à élevé, troisièmement, le public pertinent était celui de l’Union européenne (point 11 de la décision attaquée), quatrièmement, les produits en cause étaient identiques (point 15 de la décision attaquée), cinquièmement, les services compris dans la classe 35 et visés par la marque demandée étaient similaires à un degré moyen aux produits visés par la marque antérieure (points 16 et 17 de la décision attaquée), sixièmement, les signes en conflit ne présentaient qu’un faible degré de similitude sur les plans visuel et phonétique, alors qu’il n’était pas possible de les comparer sur le plan conceptuel (points 22 à 24 de la décision attaquée) et, septièmement et partant, dans l’ensemble, eu égard notamment à l’absence de caractère distinctif de l’élément verbal commun « love », il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en conflit (points 29 et 30 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante à ses dépens.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        maintenir la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens (y compris les siens) et, à titre subsidiaire, au cas où le Tribunal annulerait la décision attaquée, condamner l’EUIPO aux dépens (y compris les siens).

 En droit

14      Au soutien de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré, en substance, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Elle considère que l’appréciation de la similitude des signes en conflit par la chambre de recours est entachée d’erreurs et que, par suite, c’est à tort que la chambre de recours a nié l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

15      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante. Ils considèrent que la chambre de recours a correctement apprécié la similitude des signes en conflit et qu’elle a donc correctement conclu à l’absence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

19      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et des services en cause sur ce territoire. Toutefois, à l’instar de la requérante, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

20      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

21      La chambre de recours a considéré, au point 11 de la décision attaquée, que les produits compris dans la classe 31 et les services de vente au détail correspondants compris dans la classe 35, qui sont désignés par la marque demandée, étaient principalement destinés au grand public, en l’espèce les propriétaires d’animaux, en particulier d’animaux de compagnie. Les produits compris dans la classe 31 seraient également destinés à ceux dont l’activité commerciale repose sur l’élevage d’animaux. Les services de vente en gros compris dans la classe 35, également désignés par la marque demandée, seraient, quant à eux, destinés à un public professionnel constitué de commerçants. Selon la chambre de recours, le niveau d’attention de ce public pertinent variait de moyen à élevé. Enfin, la marque antérieure étant une marque de l’Union européenne, la chambre de recours a considéré que le territoire pertinent était l’Union.

22      À la différence de la requérante et de l’EUIPO, qui ne contestent pas cette appréciation, l’intervenante avance que les produits désignés par la marque antérieure seraient destinés à un public spécialisé composé de professionnels vétérinaires ou de propriétaires d’animaux ayant principalement des besoins spécifiques, alors que les produits et services désignés par la marque demandée seraient destinés au consommateur moyen, en l’espèce le propriétaire d’animal ou les entreprises telles que les détaillants dans ce domaine d’activité. Ainsi, selon l’intervenante, le public pertinent accorde un niveau d’attention différent aux marques en conflit.

23      En l’espèce, s’il est bien vrai que la marque antérieure est enregistrée pour les « [c]ompléments vitaminés […] pour animaux domestiques », compris dans la classe 5, force est de constater que les « [a]liments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestiques [et les] friandises pour animaux de compagnie », compris dans la classe 31, pour lesquels la marque antérieure est également enregistrée, englobent les « [a]liments complets […] secs, semi-humides et humides pour animaux domestiques » et, ainsi, des produits alimentaires pour animaux ne répondant pas à des besoins nutritionnels spécifiques d’animaux. Comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre, ces produits sont destinés principalement au grand public, en l’espèce les propriétaires d’animaux, ainsi qu’à ceux dont l’activité commerciale repose sur l’élevage d’animaux. L’argument indifférencié de l’intervenante alléguant que l’ensemble des produits désignés par la marque antérieure sont destinés à un public spécialisé dès lors qu’ils répondent à des besoins nutritionnels spécifiques d’animaux manque donc en fait.

24      Dans l’ensemble, c’était donc à juste titre que la chambre de recours a constaté que le niveau d’attention du public pertinent variait de moyen à élevé.

25      C’est également à bon droit que la chambre de recours a considéré que le public pertinent était celui de l’ensemble de l’Union, dès lors que la marque antérieure est une marque de l’Union européenne. Ainsi, il ne saurait être affirmé, comme le fait pourtant l’intervenante, que les marques en conflit ne visent pas des consommateurs italo- ou hispanophones, mais seulement un public comprenant l’anglais.

 Sur la comparaison des produits et des services

26      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés  [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

27      Les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Par définition, des produits ou des services adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée).

28      En premier lieu, au point 15 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les « [a]liments et fourrages pour animaux », compris dans la classe 31, pour lesquels l’enregistrement de la marque demandée avait été sollicité, étaient identiques aux « [a]liments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestique [et aux] friandises pour animaux de compagnie », compris également dans la classe 31, pour lesquels la marque antérieure était enregistrée, dès lors que ces derniers relevaient de la catégorie générale des « [a]liments et fourrages pour animaux ».

29      Alors que la requérante et l’EUIPO ne contestent pas cette appréciation de la chambre de recours, l’intervenante avance que les produits désignés par la marque antérieure dans la classe 31 ne constituent qu’une petite fraction des produits pour lesquels elle a sollicité l’enregistrement de la marque demandée. Cependant, comme l’a correctement rappelé la chambre de recours au point 15 de la décision attaquée, il ressort de la jurisprudence que des produits ou des services peuvent être considérés comme identiques lorsque les produits ou les services que désigne la marque antérieure sont inclus dans une catégorie plus générale visée par la marque demandée [voir arrêt du 19 janvier 2017, Morgan & Morgan/EUIPO – Grupo Morgan & Morgan (Morgan & Morgan), T‑399/15, non publié, EU:T:2017:17, point 39 et jurisprudence citée]. Les « [a]liments et fourrages pour animaux », compris dans la classe 31, englobant les « [a]liments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestique [et les] friandises pour animaux de compagnie », compris dans cette même classe, la chambre de recours a correctement constaté leur identité.

30      En deuxième lieu, c’est à juste titre que la chambre de recours a rappelé, en substance, au point 16 de la décision attaquée, qu’il ressortait de la jurisprudence que, si des produits spécifiques sont différents par leur nature et leur destination des services de vente au détail ou en gros pour ces mêmes produits, ces produits et ces services de vente n’en présentent pas moins une similitude incontestable du fait qu’ils partagent les mêmes canaux de distribution et qu’ils sont complémentaires. En particulier, s’agissant de la question de la complémentarité, il a été constaté, d’une part, que ces produits sont indispensables ou, à tout le moins, importants pour le déploiement desdits services de vente, qui sont précisément fournis à l’occasion de la vente desdits produits. D’autre part, il a été constaté que ces services de vente revêtent, du point de vue du client, un rôle important lorsqu’il procédera à l’achat des produits dont ces services visent à réaliser la vente [voir, en ce sens, arrêts du 24 septembre 2008, Oakley/OHMI – Venticinque (O STORE), T‑116/06, EU:T:2008:399, points 47 à 59 ; du 16 octobre 2013, El Corte Inglés/OHMI – Sohawon (fRee YOUR STYLe.), T‑282/12, non publié, EU:T:2013:533, point 37, et du 9 juillet 2015, Nanu-Nana Joachim Hoepp/OHMI – Vincci Hoteles (NANU), T‑89/11, non publié, EU:T:2015:479, point 43].

31      Par suite, d’une part, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté, au point 16 de la décision attaquée, que les « [s]ervices de vente au détail concernant les fourrages pour animaux [et les] services de vente en gros concernant les fourrages pour animaux », compris dans la classe 35, pour lesquels l’enregistrement de la marque demandée a été sollicité par l’intervenante, étaient semblables à un degré moyen aux « [a]liments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestiques » et aux « friandises pour animaux de compagnie », compris dans la classe 31, pour lesquels la marque antérieure est enregistrée.

32      Dans ce contexte, l’intervenante avance que ces produits étaient très spécifiques, alors que ces services de vente au détail et en gros constituaient une catégorie plus générale. Comme cela a été exposé au point 29 ci-dessus, les « [a]liments et fourrages pour animaux », auxquels se rapportent notamment les services de vente au détail et en gros en cause ici, sont identiques aux « [a]liments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestique [et aux] friandises pour animaux de compagnie ». Les « [s]ervices de vente au détail concernant les fourrages pour animaux [et les] services de vente en gros concernant les fourrages pour animaux » se rapportent donc à des produits qui sont identiques aux « [a]liments complets et compléments alimentaires secs, semi-humides et humides pour animaux domestique [et aux] friandises pour animaux de compagnie ». Dans ces circonstances, la remarque formulée par la requérante n’est pas de nature à contredire leur similitude telle que la constate la chambre de recours.

33      D’autre part, la chambre de recours a également constaté à juste titre, au point 17 de la décision attaquée, que, pour les mêmes raisons, les « [s]ervices de vente au détail concernant les compléments alimentaires [et les] services de vente en gros concernant les compléments alimentaires », compris dans la classe 35, pour lesquels l’enregistrement de la marque demandée a été sollicité, étaient semblables à un degré moyen aux « [c]ompléments vitaminés et minéraux pour animaux domestiques », compris dans la classe 31, pour lesquels la marque antérieure est enregistrée. À cet égard, elle a correctement considéré que ces derniers faisaient partie des compléments alimentaires auxquels se rapportent les services de vente au détail et en gros.

34      En troisième lieu, s’agissant de la remarque de l’intervenante selon laquelle l’« [a]dministration de [la] gestion des entreprises commerciales », comprise dans la classe 35, ne serait pas semblable aux produits désignés par la marque antérieure, il suffit de rappeler qu’il ressort de l’acte d’opposition que la requérante ne s’est pas opposée à l’enregistrement de la marque demandée pour ces services.

 Sur la comparaison des signes

35      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

36      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

37      À titre liminaire, il y a lieu de relever que la chambre de recours a considéré, au point 18 de la décision attaquée, sans être contredite à cet égard par les parties, que les deux signes en conflit étaient composés d’un mot et qu’aucun ne présentait un élément plus dominant qu’un autre. Dans ces circonstances, conformément à la jurisprudence rappelée au point 36 ci-dessus, la chambre de recours devait fonder l’appréciation de la similitude des signes sur les signes en conflit dans leur ensemble, tout comme elle l’a fait en l’espèce.

38      Il y a également lieu de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que, lorsque les éléments de similitude entre deux signes tiennent au fait qu’ils partagent un composant présentant un caractère distinctif faible, l’impact de tels éléments de similitude sur l’appréciation globale du risque de confusion est lui-même faible (voir arrêt du 30 mai 2018, L’Oréal/EUIPO, C‑519/17 P et C‑522/17 P à C‑525/17 P, non publié, EU:C:2018:348, point 73 et jurisprudence citée).

 Sur la similitude visuelle

39      S’agissant de la similitude des signes sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré, au point 22 de la décision attaquée, que les signes en conflit différaient par leur début, à savoir « meat » dans un cas et « carni » dans l’autre. Le chevauchement au niveau de l’élément final « love » ne rendrait pas les signes en conflit semblables à un degré moyen sur le plan visuel. À la différence du signe demandé qui serait scindé en « meat » et « love », le signe antérieur ne serait pas perçu comme la combinaison des deux mots « carni » et « love ». Même pour les consommateurs qui comprendraient l’élément verbal « love » comme un élément distinct, celui-ci n’aurait en tout état de cause qu’un caractère distinctif moindre par rapport à l’élément verbal « carni », eu égard à sa connotation laudative. Ainsi, selon la chambre de recours, les signes en conflit ne seraient semblables sur le plan visuel qu’à un faible degré.

40      La requérante critique cette appréciation de la chambre de recours. Selon elle, le fait que les signes en conflit comportent chacun l’élément verbal « love » associé à des préfixes ayant la même signification conduit à une similitude visuelle, et ce d’autant plus que les signes auraient une longueur et une structure presque identiques.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      En l’espèce, force est de constater que les signes en conflit sont des signes verbaux qui, sur le plan visuel, ne correspondent que par l’élément verbal « love » à la fin. En outre, comme le fait valoir à juste titre la requérante, les signes ont une longueur semblable, à savoir huit lettres pour le signe demandé et neuf lettres pour le signe antérieur.

43      En revanche, comme le soulève à juste titre l’EUIPO, à l’instar de la chambre de recours, sur le plan visuel, les signes en conflit diffèrent en leur début, qui est « meat » pour le signe demandé et « carni » pour le signe antérieur. Ces deux éléments verbaux ne présentent aucune similitude sur le plan visuel, si ce n’est une longueur globalement similaire. Or, en l’absence d’autres éléments de similitude visuelle, cet aspect ne saurait suffire pour rendre lesdits éléments verbaux semblables sur le plan visuel.

44      Dans la mesure où la requérante fait valoir que la similitude visuelle consiste pour l’essentiel en l’association de préfixes ayant la même signification à l’élément verbal commun « love », il suffit de constater qu’une telle similitude conceptuelle d’éléments verbaux de signes en conflit, même à la supposer avérée, n’a aucune incidence sur l’appréciation de la similitude visuelle desdits éléments verbaux, voire des signes en conflit dans leur intégralité. Cet argument de la requérante n’est donc pas pertinent aux fins de la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel.

45      En outre, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 38 ci-dessus, il y a lieu d’analyser l’impact d’éléments de similitude entre deux signes tenant au fait qu’ils partagent un composant présentant un caractère distinctif faible seulement lors de l’appréciation globale du risque de confusion.

46      Par suite, à supposer que l’élément verbal « love » ne possède effectivement qu’un caractère distinctif faible, la chambre de recours n’était pas fondée à minimiser l’impact de la similitude visuelle découlant de cet élément verbal commun aux signes en conflit en raison d’un tel caractère distinctif faible, comme elle l’a toutefois fait au point 22 de la décision attaquée.

47      Cependant, dans l’ensemble, étant donné que les signes en conflit se distinguent nettement par leur début, à savoir les éléments verbaux « meat » pour le signe demandé et « carni » pour le signe antérieur et eu égard au fait que le public pertinent attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [voir, en ce sens, arrêts du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, EU:T:2004:79, point 81, et du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, EU:T:2005:102, points 64 et 65], la similitude visuelle des signes en conflit découlant de l’élément verbal commun « love » et de leur longueur semblable ne saurait être qualifiée que de faible, ce qu’a constaté en définitive la chambre de recours.

 Sur la similitude phonétique

48      S’agissant de la similitude des signes en conflit sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré, au point 23 de la décision attaquée, que, en dépit de la syllabe finale commune « love », les signes en conflit différaient en ce que le signe antérieur comportait trois syllabes alors que le signe demandé en comportait deux et en ce qu’ils présentaient des débuts différents. Les signes en conflit ne seraient donc semblables qu’à un faible degré sur le plan phonétique.

49      La requérante fait valoir que les signes en conflit comportent chacun l’élément verbal « love » associé à des préfixes ayant la même signification, ce qui conduirait à une similitude phonétique eu égard à la longueur et à la structure presque identiques des signes en conflit.

50      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

51      Pour les raisons indiquées au point 44 ci-dessus, l’argument de la requérante tiré de ce que la similitude phonétique résulte notamment de l’association de préfixes ayant la même signification à l’élément verbal commun « love » n’a aucune incidence sur l’appréciation de la similitude phonétique desdits éléments verbaux, voire des signes en conflit dans leur intégralité. Cet argument de la requérante n’est donc pas non plus pertinent aux fins de la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique.

52      En outre, c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé que les signes en conflit différaient en leur début. Les éléments verbaux « meat » pour le signe demandé et « carni » pour le signe antérieur sont différents sur le plan phonétique, non seulement en raison d’une prononciation totalement différente, mais également en raison du fait que le premier ne comporte qu’une syllabe alors que le second en comporte deux. C’est donc à tort que la requérante fait valoir que les signes en conflit ont une structure semblable.

53      Dans l’ensemble, c’était donc à juste titre que la chambre de recours n’a reconnu qu’un faible degré de similitude entre les signes sur le plan phonétique.

 Sur la similitude conceptuelle

54      S’agissant de la similitude des signes sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré, au point 24 de la décision attaquée, qu’il n’était pas possible de les comparer, dans la mesure où la marque antérieure était dépourvue de signification dans son ensemble. Même si le public pertinent reconnaîtrait dans les signes en conflit l’élément verbal « love », il percevrait les signes comme conceptuellement différents, puisque carnilove renvoie à « amour des carni(vores) » et que Meatlove renvoie à « amour de la viande ».

55      La requérante critique l’appréciation de la chambre de recours et fait valoir que les signes en conflit sont identiques sur le plan conceptuel. Selon elle, tout comme l’élément verbal « meat » au début du signe demandé, l’élément verbal « carni » contenu dans le signe antérieur évoque de la « viande », du moins pour les publics italophone, hispanophone et anglophone de l’Union. Ces publics comprendraient clairement et sans aucun doute la signification du mot « meat » en tant que mot anglais de base ainsi que la signification du mot « carni » en raison de sa relation avec « carnivore » ou « carne ». Dans la mesure où la chambre de recours aurait reconnu, au point 24 de la décision attaquée, que le signe antérieur pourrait être compris comme signifiant « love of carni(vores) » et étant donné que « carnivore » signifie « mangeur de viande », force serait de constater que « l’amour du mangeur de viande » est semblable sur le plan conceptuel à « l’amour de la viande » que désigne le signe demandé.

56      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

57      Il est bien vrai qu’il résulte de la jurisprudence que, nonobstant le fait qu’il convient normalement d’apprécier la similitude des signes en conflit sur la base de l’impression d’ensemble produite par ceux-ci sans se livrer à un examen de leurs différents détails (voir point 35 ci-dessus), le public pertinent décomposera un signe verbal en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît (voir arrêt du 13 février 2007, RESPICUR, T‑256/04, EU:T:2007:46, point 57 et jurisprudence citée).

58      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a constaté, au point 20 de la décision attaquée, que le signe demandé serait immédiatement compris par le public pertinent anglophone comme une combinaison des mots « meat » et « love » et qu’il serait décomposé en ces deux éléments.

59      Cependant, c’est à tort que la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, qu’une telle dissection ne serait pas opérée pour le signe antérieur, dès lors que le public pertinent anglophone ne comprendrait pas le mot « carni ». En effet, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre au point 20 de la décision attaquée, le mot « love » est un terme anglais tellement élémentaire qu’il sera compris à travers l’Union en son sens de « sentiment intense de profonde affection » ou « grand intérêt et goût prononcé » pour quelque chose [voir, en ce sens, arrêt du 25 janvier 2017, Sun System Kereskedelmi és Szolgáltató/EUIPO – Hollandimpex Kereskedelmi és Szolgáltató (Choco Love), T‑325/15, non publié, EU:T:2017:29, point 57]. Dans de telles circonstances, il ne saurait être déduit de la jurisprudence rappelée au point 57 ci-dessus que, en présence d’un élément verbal élémentaire aisément compris partout dans l’Union, un signe verbal ne sera décomposé en différents éléments verbaux que dans l’hypothèse où l’élément verbal constitué par le reste dudit signe suggère lui-même une signification concrète ou ressemble à des mots que le public pertinent connaît. Au contraire, en présence d’un tel élément verbal élémentaire aisément compris à travers l’Union, le public pertinent décomposera bien le signe verbal en cause en deux parties, l’une correspondant à ce qu’il comprend en tant que partie de la langue courante et l’autre constituée par le reste du signe en cause.

60      Par suite, comme le fait valoir en substance la requérante, le public pertinent décomposera bien le signe antérieur en deux éléments verbaux, « carni » et « love ». Il s’ensuit que la chambre de recours n’était pas fondée à insister, au point 24 de la décision attaquée, à titre principal sur ce que le signe antérieur était dépourvu de signification dans son ensemble.

61      Or, audit point de la décision attaquée, la chambre de recours a également considéré que, même si le public pertinent reconnaissait dans les deux signes en conflit l’élément verbal « love », il les percevrait toujours comme conceptuellement différents, dès lors que carnilove renverrait à l’« amour des carni(vores) » alors que Meatlove renverrait à l’« amour de la viande ». Ainsi, la chambre de recours a bien examiné l’une des significations de l’élément verbal « carni » proposées par la requérante, à savoir un renvoi au concept de « carnivore ». S’il est bien vrai que les notions d’« amour des carnivores/mangeurs de viande » et d’« amour de la viande » ne sont pas identiques, il n’en demeure pas moins qu’elles renvoient toutes les deux à un sentiment d’affection ou à un goût prononcé pour quelque chose dans le contexte de la viande. Dans cette mesure, comme l’avance également la requérante, il existe donc bien une certaine similitude conceptuelle entre les signes en conflit, au moins pour le public pertinent anglophone, qui ne saurait toutefois être qualifiée que de faible.

62      En revanche, la chambre de recours n’a pas examiné les autres significations de l’élément verbal « carni » proposées par la requérante. En effet, dans ses observations sur le recours formé par l’intervenante, celle-ci a insisté sur ce que le mot « carne » ou bien « carni » signifiait « viande » dans un certain nombre de langues romanes. Devant le Tribunal, elle fait valoir à juste titre que, d’une part, cet élément verbal correspond au mot pluriel « viandes » en italien et que, d’autre part, il ressemble beaucoup au mot « carne », signifiant « viande » en espagnol.

63      Sans pour autant contester cette compréhension de l’élément verbal « carni » par un public italo- ou hispanophone, l’EUIPO fait valoir que, à la différence du mot « love », le mot « meat » n’est pas un mot anglais élémentaire compris dans toutes les langues de l’Union.

64      Or, en s’abstenant d’analyser cette signification de l’élément verbal « carni » dans l’esprit d’un public italo- ou hispanophone, alors même qu’elle a considéré correctement, au point 11 de la décision attaquée, que le public pertinent en l’espèce était celui de l’ensemble de l’Union et que ce n’était donc pas seulement un public anglophone, mais également un public italo- ou hispanophone dont il convenait de tenir compte en l’espèce (voir point 25 ci-dessus), la chambre de recours a ignoré un facteur de similitude conceptuelle potentiellement pertinent. Il lui aurait plutôt incombé d’analyser cette similitude conceptuelle alléguée par la requérante dans l’esprit d’un public italo- ou hispanophone. Dans ce contexte, la chambre de recours aurait également dû examiner si ce public italo- ou hispanophone comprenait bien la signification de l’élément verbal « meat » comme mot anglais signifiant « viande », le cas échéant en tant que terme faisant partie du vocabulaire élémentaire de la langue anglaise et étant donc largement connu des consommateurs de l’ensemble de l’Union [voir arrêt du 16 février 2017, Jaguar Land Rover/EUIPO – Nissan Jidosha (Land Glider), T‑71/15, non publié, EU:T:2017:82, point 43 et jurisprudence citée], comme l’avance la requérante.

65      Si tel était le cas, force serait de constater que les signes en conflit présentent un haut degré de similitude conceptuelle.

 Sur le risque de confusion

66      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

67      Ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement no 207/2009 (devenu considérant 11 du règlement 2017/1001), l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

68      En revanche, la reconnaissance d’un caractère faiblement distinctif de la marque antérieure n’empêche pas de constater l’existence d’un risque de confusion en l’espèce. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée].

69      En outre, comme cela a déjà été rappelé au point 38 ci-dessus, il ressort de la jurisprudence que, lorsque les éléments de similitude entre deux signes tiennent au fait qu’ils partagent un composant présentant un caractère distinctif faible, l’impact de tels éléments de similitude sur l’appréciation globale du risque de confusion est lui-même faible.

70      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 28 à 30 de la décision attaquée, que le signe antérieur était dépourvu de signification et que son caractère distinctif était donc moyen. Même si ce signe était perçu comme contenant le mot anglais « love », la signification dégagée serait purement laudative, c’est-à-dire que les produits et les services sont fabriqués ou rendus avec amour ou qu’ils sont grandement appréciés par les consommateurs cibles, et ne serait pas considérée comme une indication de la provenance commerciale. Un chevauchement entre les signes en conflit s’agissant d’un tel élément non distinctif ne saurait se traduire par un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, qui se concentrerait sur les éléments distinctifs des signes en cause, à savoir le mot combiné « meatlove » dans son ensemble et le terme « carnilove » dans lequel, s’il est décomposé, l’élément « carni », dépourvu de signification, serait l’élément plus distinctif. Par conséquent, la chambre de recours a estimé que les différences au niveau du début des signes en conflit neutralisaient le chevauchement au niveau des lettres finales « l », « o », « v » et « e », lesquelles ne constitueraient pas un élément distinctif per se de l’un ou l’autre signe. Compte tenu de la faible similitude visuelle et phonétique qu’elle avait constatée ainsi que du caractère distinctif moyen du signe antérieur, il n’existerait pas de risque de confusion entre les marques en conflit, et ce même pour les produits identiques.

71      Dans la mesure où, d’une part, la chambre de recours a erronément considéré que le signe antérieur ne serait pas décomposé par le public pertinent (voir points 59 et 60 ci-dessus) et qu’il n’existait pas de similitude entre les signes en conflit sur le plan conceptuel dans l’esprit d’un public anglophone (voir point 61 ci-dessus) et, d’autre part, elle a omis d’apprécier la similitude conceptuelle dans l’esprit d’un public italo- ou hispanophone (voir point 64 ci-dessus), cette appréciation est nécessairement entachée d’erreurs.

72      Si la chambre de recours avait correctement examiné la similitude conceptuelle des signes en conflit, notamment dans l’esprit d’un public italo- ou hispanophone, il ne saurait être exclu qu’elle aurait dû constater l’existence d’un risque de confusion en l’espèce.

73      Le moyen unique tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 étant, par suite, fondé, il y a lieu d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

74      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

75      En l’espèce, l’EUIPO et l’intervenante ont succombé. La requérante n’ayant conclu qu’à la condamnation du seul EUIPO aux dépens, il y a lieu de condamner ce dernier à supporter, outre ses propres dépens, ceux de la requérante.

76      Dans la mesure où l’intervenante demande, à titre subsidiaire, au cas où le Tribunal annulerait la décision attaquée, de condamner l’EUIPO aux dépens (y compris les siens), il suffit de constater qu’il n’existe aucune base légale dans le règlement de procédure pour condamner une partie ayant succombé à supporter les dépens d’une autre partie qui a également succombé.

77      Il convient donc de condamner l’intervenante à supporter ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 12 juin 2018 (affaire R 264/20184) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Vafo Praha s.r.o.

3)      Mme Susanne Rutzinger-Kurpas supportera ses propres dépens.

Frimodt Nielsen

Kreuschitz

Półtorak

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 octobre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.