DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

10 novembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative ACM 1899 AC MILAN – Marques nationales verbales antérieures Milan – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure – Article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009 (devenu article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001) – Absence d’altération du caractère distinctif »

Dans l’affaire T‑353/20,

Associazione Calcio Milan SpA (AC Milan), établie à Milan (Italie), représentée par Mes A. Perani et G. Ghisletti, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Söder, MM V. Ruzek et D. Hanf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

InterES Handels- und Dienstleistungs Gesellschaft mbH & Co. KG, établie à Nuremberg (Allemagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 14 février 2020 (affaire R 161/2019‑2), relative à une procédure d’opposition entre InterES Handels- und Dienstleistungs Gesellschaft et AC Milan,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. J. Schwarcz et C. Iliopoulos (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 3 juin 2020,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 25 août 2020,

vu la demande d’audience présentée par l’EUIPO, enregistrée au greffe du Tribunal le 5 octobre 2020,

vu la lettre de l’EUIPO, déposée au greffe du Tribunal le 3 juin 2021, par laquelle il a renoncé à sa demande d’être entendu lors d’une audience de plaidoiries, et les observations de la requérante sur cette lettre, déposées au greffe du Tribunal le 7 juin 2021, par lesquelles elle indiquait qu’il n’était pas nécessaire qu’elle soit entendue lors d’une audience de plaidoiries, et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

vu la demande de remboursement des frais de déplacement déposée par la requérante au greffe du Tribunal le 29 juin 2021 et les observations de l’EUIPO déposées au greffe du Tribunal le 22 juillet 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 2 février 2017, la requérante, Associazione Calcio Milan SpA (AC Milan), a présenté une demande d’enregistrement international désignant l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 16 au sens de l’arrangement de Nice, concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, s’agissant des produits relevant de cette classe, à la description suivante : « Papier ; carton ; couvertures de livres ; colle pour la papeterie ou le ménage ; articles de papeterie ; papier à copier [articles de papeterie] ; papier à lettres ; [articles de papeterie] ; marqueurs ; agrafes de bureau ; fournitures pour le dessin ; fournitures pour l’écriture ; fournitures scolaires ; gommes à effacer ; encres ; correcteurs liquides ; gabarits [articles de papeterie] ; crayons ; crayons fusains ; crayons d’ardoise ; mines de crayon ; stylos [articles de bureau] ; plumes d’acier ; porte-crayons ; porte-mines ; porte-plume ; billes pour stylos à bille ; instruments d’écriture ; instruments de dessin ; carnets ; tampons encreurs ; taille-crayons ; tire-lignes ».

4        Dans la demande d’enregistrement, la requérante a revendiqué les couleurs suivantes : le rouge, le noir et le blanc.

5        La demande d’enregistrement a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/023, du 3 février 2017.

6        Le 6 avril 2017, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, InterES Handels- und Dienstleistungs Gesellschaft mbH & Co. KG, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

7        L’opposition était fondée notamment sur la marque allemande verbale Milan, déposée le 1er avril 1984 et enregistrée le 23 mai 1988 sous le numéro 1122392, désignant notamment les produits relevant de la classe 16 correspondant à la description suivante : « Papier, cartonnages, cartons, tous les articles précités, en particulier pour l’écriture et l’emballage ; articles de papeterie, matériel de bureau (à l’exception des meubles), matériel d’apprentissage (à l’exception des appareils) ».

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

9        À la demande de la requérante, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours a été invitée par l’EUIPO à apporter la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures invoquées à l’appui de son opposition, conformément à l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001. Cette dernière a déféré à ladite demande dans le délai imparti à cette fin par l’EUIPO.

10      Par décision du 30 novembre 2018, la division d’opposition a fait droit à l’opposition dans son intégralité.

11      Le 22 janvier 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 14 février 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En premier lieu, à l’instar de la division d’opposition, elle a considéré que, pour des raisons d’économie de procédure, il convenait d’examiner l’opposition au regard de la marque allemande antérieure no 1122392 (ci-après la « marque antérieure »). En deuxième lieu, après avoir déterminé que la période au cours de laquelle l’usage sérieux de cette marque devait être démontré s’étendait du 24 décembre 2010 au 23 décembre 2015 (ci-après la « période pertinente »), elle a considéré qu’un tel usage avait été démontré pour les produits désignés par la marque antérieure relevant de la classe 16 hormis le « matériel d’apprentissage (à l’exception des appareils) », mais non pour ceux relevant des autres classes pour lesquelles ladite marque avait été enregistrée. En troisième lieu, la chambre de recours a, d’abord, constaté que le public pertinent était composé du grand public allemand dont le niveau d’attention variait de faible à moyen. Elle a, ensuite, approuvé l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle les produits en cause étaient partiellement identiques et partiellement similaires à un degré élevé. S’agissant, par ailleurs, de la comparaison des signes en conflit, la chambre de recours a estimé, premièrement, qu’ils présentaient une similitude visuelle moyenne, en raison de la présence de l’élément « milan », deuxièmement, qu’ils étaient très similaires sur le plan phonétique et, troisièmement, que, sur le plan conceptuel, d’une part, ils étaient moyennement similaires pour la partie du public pertinent qui attribuerait une signification au mot commun « milan » et, d’autre part, que leur comparaison était dépourvue de pertinence pour la partie de ce public qui percevrait le terme « milan » comme fantaisiste. Enfin, elle a estimé que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure était normal.

13      La chambre de recours a conclu de l’ensemble de ces considérations qu’il existait un risque de confusion.

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

15      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), et de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

17      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, compte tenu de la date de priorité l’enregistrement international en cause, à savoir le 24 décembre 2015, qui, conformément à l’article 29, paragraphe 1, et à l’article 31 du règlement no 207/2009 (devenus article 34, paragraphe 1, et article 36 du règlement 2017/1001), doit être regardée comme la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, laquelle est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée). Par ailleurs,il convientde constater, à l’instar de l’EUIPO, que l’article 10 du règlement délégué 2018/625 s’applique en l’espèce, conformément à l’article 82, paragraphe 2, sous d), du même règlement, eu égard au fait que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure a été déposée le 6 décembre 2017.

18      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par la requérante dans l’argumentation soulevée à l’article 8, paragraphe 1, sous b), à l’article 18, paragraphe 1, sous a), et à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), l’article 15, paragraphe 1, sous a), et l’article 42, paragraphe 2, d’une teneur identique, du règlement no 207/2009, tel que modifié.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué 2018/625 et de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009

19      Le premier moyen s’articule en deux branches, relatives, la première, à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure et, la seconde, à l’existence d’un usage qui altérait le caractère distinctif de ladite marque, telle qu’enregistrée.

 Sur la première branche du premier moyen, relative à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure

20      La requérante fait valoir que la chambre de recours a considéré à tort que l’autre partie à la procédure devant ladite chambre avait satisfait à son obligation de démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits compris dans la classe 16. D’une part, elle conteste l’appréciation de la chambre de recours figurant au point 27 de la décision attaquée, selon laquelle le lieu de l’usage de la marque antérieure a été suffisamment démontré. D’autre part, elle fait, en substance, grief à la chambre de recours d’avoir retenu que les éléments de preuve soumis par l’autre partie à la procédure devant ladite chambre constituaient un faisceau d’indices suffisamment concrets et précis pour établir l’usage sérieux de la marque antérieure, alors que cette chambre avait elle-même constaté que, premièrement, certains des documents ne relevaient pas de la période pertinente (point 30 de la décision attaquée), deuxièmement, les catalogues n’indiquaient pas les prix ou la quantité de produits effectivement vendus (point 35 de la décision attaquée) et, troisièmement, d’une part, les produits concernés ne figuraient pas sur les factures et, d’autre part, l’origine des tableaux de chiffres d’affaires et de chiffres de vente n’avait pas été établie (point 42 de la décision attaquée).

21      L’EUIPO s’oppose à ces arguments. Il soutient que la requérante conteste uniquement l’appréciation de la chambre de recours sur le lieu de l’usage de la marque antérieure.

22      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, en vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2018/625, la preuve de l’usage d’une marque antérieure doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui en a été fait et se limite, en principe, à la production de pièces justificatives comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 78, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009 [devenu article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001].

23      Dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [arrêts du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 38, et du 2 février 2016, Benelli Q. J./OHMI – Demharter (MOTOBI B PESARO), T‑171/13, EU:T:2016:54, point 68]. Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, afin de créer ou de conserver un débouché pour ces produits ou ces services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir arrêt du 8 juin 2017, W. F. Gözze Frottierweberei et Gözze, C‑689/15, EU:C:2017:434, point 37 et jurisprudence citée).

24      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque, et inversement. En outre, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque antérieure ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être en rapport avec d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné (voir arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42 et jurisprudence citée).

25      Par ailleurs, l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêts du 16 juin 2015, Polytetra/OHMI – EI du Pont de Nemours (POLYTETRAFLON), T‑660/11, EU:T:2015:387, point 47 et jurisprudence citée, et du 9 septembre 2015, Inditex/OHMI – Ansell (ZARA), T‑584/14, non publié, EU:T:2015:604, point 19 et jurisprudence citée].

26      L’usage sérieux de la marque suppose que celle-ci soit utilisée publiquement et vers l’extérieur, et pas seulement au sein de l’entreprise concernée (voir, en ce sens, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 37). Cependant, l’usage extérieur d’une marque n’équivaut pas nécessairement à un usage orienté vers les consommateurs finaux. L’usage effectif de la marque se rapporte au marché sur lequel le titulaire de celle-ci exerce ses activités commerciales et sur lequel il espère exploiter sa marque. Ainsi, considérer que l’usage extérieur d’une marque, au sens de la jurisprudence, consiste nécessairement à un usage orienté vers les consommateurs finaux reviendrait à exclure les marques utilisées dans les seuls rapports entre sociétés de la protection du règlement no 207/2009. En effet, le public pertinent auquel les marques ont vocation à s’adresser ne comprend pas uniquement les consommateurs finaux, mais également les spécialistes, des clients industriels et d’autres utilisateurs professionnels [voir arrêt du 7 juillet 2016, Fruit of the Loom/EUIPO – Takko (FRUIT), T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 49 et jurisprudence citée].

27      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner la première branche du premier moyen.

28      Il y a lieu de relever d’emblée, à l’instar de la chambre de recours, que, compte tenu de la date de priorité de la marque demandée, à savoir le 24 décembre 2015, il découle de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 que la période pertinente s’étend du 24 décembre 2010 au 23 décembre 2015, ce que la requérante ne conteste pas.

29      En l’espèce, ainsi qu’il ressort du dossier de la procédure devant l’EUIPO ainsi que des points 7 et 36 de la décision attaquée, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours a produit, devant la division d’opposition, les éléments suivants pour prouver l’usage sérieux de la marque antérieure :

–        une déclaration sous serment de son directeur général, non datée, certifiant les chiffres d’affaires annuels pour la période de 2010 à 2016 ;

–        du matériel publicitaire en allemand (de nombreux exemplaires de catalogues et de prospectus) datant des années 2009 à 2014, pour des produits portant la marque antérieure ;

–        une copie de 43 factures émises durant la période comprise entre l’année 2008 et l’année 2014, adressées à différents clients en Allemagne ;

–        des documents concernant le chiffre d’affaires et les chiffres de vente, datant des années 2008 à 2016 ;

–        des barèmes de prix datant des années 2008 à 2014 et mentionnant les fournisseurs des produits de l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours.

30      En premier lieu, s’agissant du lieu de l’usage, la chambre de recours a relevé, au point 27 de la décision attaquée, qu’il ressortait clairement des adresses mentionnées sur les factures produites par l’autre partie à la procédure devant ladite chambre que le lieu de l’usage de la marque antérieure était l’Allemagne. Elle a précisé que les adresses inscrites sur lesdites factures corroboraient les indications résultant du matériel publicitaire, rédigé en allemand, et des barèmes de prix, exprimés en euros.

31      Selon la requérante, les prospectus et les catalogues produits par l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours sont dénués de toute indication quant à leur lieu de distribution. Le fait que ces documents étaient rédigés en allemand ne prouverait pas que les produits ont été distribués en Allemagne, étant donné que l’allemand est également une langue officielle en Autriche et en Suisse. Elle ajoute que ce même constat s’impose également s’agissant des prix indiqués en euros. En outre, le fait que l’établissement des détaillants destinataires des factures produites se situait en Allemagne ne prouverait pas que le lieu de distribution était l’Allemagne, étant donné que les produits ont pu être distribués en dehors de ce pays.

32      À cet égard, premièrement, il est constant que les factures produites à titre d’éléments de preuve de l’usage de la marque antérieure devant la division d’opposition étaient destinées à différents clients détaillants établis en Allemagne. Contrairement à ce que fait valoir la requérante, le caractère sérieux de l’usage de la marque antérieure en Allemagne ne pouvait pas être exclu du seul fait que les factures s’adressaient non pas aux consommateurs finaux, mais aux détaillants. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, l’usage extérieur d’une marque n’équivaut pas nécessairement à un usage orienté vers les consommateurs finaux.

33      Deuxièmement, ces éléments de preuve sont corroborés, comme l’a souligné la chambre de recours, par l’existence de prospectus et de catalogues, rédigés en allemand, et de barèmes de prix, indiqués en euros. Ces derniers suggèrent une diffusion dans toute l’Allemagne, d’autant plus que, comme le relève l’EUIPO, la mention légale d’un des catalogues fait apparaître clairement le nom et l’adresse en Allemagne de l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours et précise que le lieu d’exécution du contrat est celui où se situe son siège, en l’occurrence établi en Allemagne.

34      Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 27 de la décision attaquée, que les éléments de preuve portaient sur un usage de la marque antérieure en Allemagne.

35      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante relatif aux éléments de preuve ne datant pas de la période pertinente, il y a en effet lieu de relever, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée elle-même, que certains documents sur lesquels la chambre de recours a fondé son appréciation selon laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure avait été prouvé ne relèvent pas de la période pertinente. Il s’agit des catalogues, des factures et des chiffres de vente qui datent des années 2009 et 2016 ou ne portant aucune date et ne sont donc pas susceptibles, à eux seuls, de servir comme preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pendant la période pertinente, comprise entre le 24 décembre 2010 et le 23 décembre 2015 inclus.

36      Toutefois, il convient de considérer que, la durée de vie commerciale d’un produit s’étendant généralement sur une période donnée et la continuité de l’usage faisant partie des indications à prendre en compte pour établir que l’usage était objectivement destiné à créer ou à conserver une part de marché, les pièces ne relevant pas de la période pertinente, loin d’être dépourvues d’intérêt, doivent être prises en compte et évaluées conjointement avec les autres éléments, car elles peuvent apporter la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque (voir arrêt du 16 juin 2015, POLYTETRAFLON, T‑660/11, EU:T:2015:387, point 54 et jurisprudence citée).

37      Il s’ensuit que, dans la mesure où la chambre de recours n’a pas fondé son appréciation de l’usage sérieux de la marque antérieure sur les seuls documents mentionnés au point 35 ci-dessus, mais a pris ces éléments en considération conjointement avec d’autres éléments afin de constater que l’usage sérieux de ladite marque avait été prouvé, elle n’a pas commis d’erreur en ce qui concerne les éléments pris en compte dans le cadre de cette appréciation.

38      En troisième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel certains éléments de preuve, dépourvus de caractère concret ou objectif, n’auraient pas dû être pris en considération par la chambre de recours et ne pourraient pas établir l’usage sérieux de la marque antérieure, il convient de relever, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 24 ci-dessus, que, pour examiner le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il faut procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les éléments pertinents du cas d’espèce.

39      En outre, il est de jurisprudence constante qu’il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits (arrêt du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, non publié, EU:C:2008:234, point 36 ; voir, également, arrêt du 16 juin 2015, POLYTETRAFLON, T‑660/11, EU:T:2015:387, point 94 et jurisprudence citée).

40      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve pris dans leur ensemble démontraient que l’autre partie à la procédure devant elle avait déployé des efforts sérieux pour conquérir une position commerciale sur le marché pertinent. Elle s’est notamment appuyée sur le matériel publicitaire, sur les factures couvrant toute la période pertinente et comportant l’inscription de la marque antérieure ainsi que sur la déclaration sous serment du directeur général de ladite partie.

41      Il convient certes d’observer, ainsi que l’a relevé à juste titre la requérante et que cela a été pris en compte par la chambre de recours au point 42 de la décision attaquée, que les catalogues ne fournissent pas d’informations sur les prix ou sur la quantité de produits effectivement vendus et que les noms de produit ne figurent pas sur les factures. Toutefois, force est de constater qu’un grand nombre de produits de papeterie désignés par la marque antérieure étaient proposés dans lesdits catalogues pendant la période pertinente. De plus, la déclaration sous serment contient les chiffres de vente des produits désignés par ladite marque entre l’année 2010 et l’année 2016 et les chiffres de vente annuels de papier et de carton entre l’année 2008 et l’année 2014, qui sont corroborés par les données ressortant des autres éléments de preuve. En particulier, les chiffres des ventes totaux, contenus dans la déclaration sous serment, sont corroborés par les documents concernant les chiffres des ventes pour les années 2008 à 2015 (pièces jointes nos 24, 26, 28, 30, 32, 34, 36 et 38).

42      Dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours s’est fondée sur des éléments de preuve crédibles et concrets permettant d’établir l’usage sérieux de la marque antérieure.

43      Il découle de l’ensemble de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant, dans son appréciation globale des éléments de preuve produits par l’autre partie à la procédure devant elle, que la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure avait été rapportée en l’espèce.

44      Partant, la première branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

 Sur la seconde branche du premier moyen, relative à l’altération du caractère distinctif de la marque antérieure

45      Au point 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué, d’une part, que la marque antérieure, telle qu’enregistrée, figurait sur les factures et les barèmes de prix et, d’autre part, qu’une partie des éléments de preuve montrait un usage de la marque antérieure, sous sa forme enregistrée, accompagnée d’un élément figuratif supplémentaire, à savoir la tête d’un oiseau semblable à un rapace, tel qu’un aigle.

46      Au point 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque antérieure telle qu’utilisée sur le marché et cette marque telle qu’enregistrée pouvaient être considérées comme globalement équivalentes.

47      La requérante conteste cette appréciation. Elle soutient, premièrement, que l’élément figuratif ajouté est l’élément le plus distinctif et visuellement accrocheur de la marque antérieure telle qu’utilisée sur le marché en raison de la position de cet élément au début du signe, de sa taille et du fait qu’il surplombait partiellement la première lettre de l’élément verbal « milan ». Elle ajoute que l’élément figuratif occupait la partie initiale de ladite marque antérieure, à laquelle le consommateur prêtait plus d’attention, et que, partant, cet élément produisait une impression globale différente. Deuxièmement, la requérante fait valoir, en substance, que le terme « milan » est compris comme désignant la ville italienne de Milan ou un prénom anglais, et non une espèce spécifique d’oiseau, et que, à tout le moins, ce terme possède trois significations possibles. Par conséquent, selon la requérante, étant donné que la signification du mot « milan » de la marque antérieure renverrait à la ville italienne de Milan, l’élément figuratif en forme de tête d’oiseau ne renforçait pas la signification de ce mot, mais présentait un caractère distinctif compte tenu des produits concernés. Troisièmement, elle allègue l’existence d’une contradiction dans le raisonnement de la chambre de recours, en ce que celle-ci, d’une part, au point 49 de la décision attaquée, a indiqué que le mot « milan » était compris par le public pertinent comme désignant une espèce de rapace et, d’autre part, au point 76 de ladite décision, a considéré que ce mot pouvait être associé, tout d’abord, au nom de la ville italienne de Milan, ensuite, à un prénom anglais et, enfin, à une espèce de rapace. Quatrièmement, la requérante fait grief à la chambre de recours, en substance, d’avoir constaté l’usage sérieux de la marque antérieure au cours de la période pertinente en s’appuyant sur des preuves représentant la marque antérieure dans une forme altérant son caractère distinctif.

48      L’EUIPO réfute les arguments de la requérante.

49      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu des dispositions combinées de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009 [devenus article 18, paragraphe 1, sous a), et article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001], la preuve de l’usage sérieux d’une marque antérieure, nationale ou de l’Union européenne, qui fonde une opposition à l’encontre d’une demande de marque de l’Union européenne, comprend également la preuve de l’utilisation de la marque antérieure sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de cette marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée [voir arrêt du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, EU:T:2005:438, point 30 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, Specsavers International Healthcare e.a., C‑252/12, EU:C:2013:497, point 21].

50      L’objet de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement no 207/2009 est d’éviter d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, et de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en modifier le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [voir, en ce sens, arrêt du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, EU:T:2006:65, point 50 ; voir également, en ce sens, arrêt du 20 juillet 2017, Cafés Pont/EUIPO – Giordano Vini (Art’s Cafè), T‑309/16, non publié, EU:T:2017:535, point 15 et jurisprudence citée].

51      Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque [voir arrêt du 10 juin 2010, Atlas Transport/OHMI – Hartmann (ATLAS TRANSPORT), T‑482/08, non publié, EU:T:2010:229, point 31 et jurisprudence citée].

52      En l’espèce, en premier lieu, il convient de constater que la marque antérieure, dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée, est une marque verbale constituée du mot « milan ». Ainsi qu’il ressort du point 47 de la décision attaquée et du dossier de la procédure devant l’EUIPO, une partie des éléments de preuve sur lesquels s’est fondée la chambre de recours pour apprécier l’usage sérieux de la marque antérieure, à savoir les factures et les barèmes de prix, fait apparaître ladite marque telle qu’enregistrée.

53      En second lieu, il ressort des autres éléments de preuve que la marque antérieure telle qu’utilisée sur le marché comportait un élément figuratif représentant la tête d’un oiseau, semblable à un rapace, à la droite duquel figurait l’élément verbal « milan », écrit en caractères gras et de couleur bleue, ladite marque se présentant telle que reproduite ci-dessous :

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54      Il apparaît ainsi que les éléments qui différenciaient la forme utilisée de la marque antérieure et celle sous laquelle cette marque a été enregistrée étaient, premièrement, l’ajout de l’élément figuratif et, deuxièmement, la stylisation de l’élément verbal « milan ».

55      Premièrement, s’agissant de l’ajout à la forme enregistrée de la marque antérieure d’un élément figuratif, il convient de rappeler que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen ferait plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du 12 mars 2014, Borrajo Canelo/OHMI – Tecnoazúcar (PALMA MULATA), T‑381/12, non publié, EU:T:2014:119, point 38 et jurisprudence citée].

56      Il ressort également de la jurisprudence que le fait qu’un élément ne soit pas négligeable ne signifie pas qu’il soit dominant, de même que le fait qu’un élément ne soit pas dominant n’implique nullement qu’il soit négligeable [voir arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 48 et jurisprudence citée].

57      En l’espèce, s’il est vrai que l’élément figuratif additionnel de la marque antérieure telle qu’utilisée sur le marché n’est pas négligeable compte tenu de sa taille et de sa position, ledit élément ne saurait pour autant, contrairement à ce que prétend la requérante, être considéré comme dominant. En effet, la taille de l’élément figuratif est sensiblement inférieure à celle de l’élément verbal, « milan », qui occupe plus de la moitié du signe. Le fait que l’élément figuratif de ladite marque antérieure surplombe légèrement la première lettre de son élément verbal ne saurait détourner l’attention du public pertinent de cet élément verbal. En effet, l’élément verbal « milan » reste clairement identifiable en raison de l’utilisation d’une police de caractères facilement lisible.

58      Le constat qui précède s’impose avec d’autant plus de force lorsque le public pertinent associe l’élément figuratif représentant la tête d’un oiseau à l’élément verbal « milan ». Ainsi qu’il a été relevé au point 49 de la décision attaquée, l’élément verbal de la marque antérieure peut être compris par une partie dudit public comme désignant une espèce de rapace. Pour cette partie de ce public, l’élément figuratif renforce donc l’élément verbal « milan » par la représentation d’une tête de rapace.

59      En outre, contrairement à ce que prétend la requérante, il n’y a aucune contradiction entre, d’une part, le point 49 de la décision attaquée, dans lequel la chambre de recours, pour apprécier l’usage de la marque antérieure, a pris en compte la perception de la partie du public pertinent qui comprend le mot « milan » comme se référant à une espèce de rapace, et, d’autre part, le point 76 de cette décision, dans lequel il a été considéré que le mot « milan » pourrait être associé, tout d’abord, au nom de la ville italienne de Milan, ensuite, à un prénom anglais et, enfin, à une espèce de rapace. En effet, le fait que ne soit évoquée au point 49 de la décision attaquée qu’une des significations potentielles du terme « milan » s’explique par la circonstance que ce point porte précisément sur la perception dudit mot par une partie seulement du public pertinent.

60      Partant, c’est sans commettre d’erreur que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, bien que l’élément figuratif présent dans la marque antérieure telle qu’utilisée sur le marché ne fût pas négligeable, son ajout n’était pas susceptible d’altérer le caractère distinctif de l’élément verbal constituant la marque antérieure telle qu’enregistrée.

61      Deuxièmement, s’agissant de la stylisation de l’élément verbal « milan », il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la représentation concrète d’une marque verbale n’est généralement pas de nature à modifier le caractère distinctif de ladite marque telle qu’enregistrée [voir arrêt du 23 septembre 2015, L’Oréal/OHMI – Cosmética Cabinas (AINHOA), T‑426/13, non publié, EU:T:2015:669, point 28 et jurisprudence citée]. En l’espèce, la marque antérieure, telle qu’enregistrée, étant une marque verbale, elle peut être utilisée avec un graphisme différent. Par ailleurs, ainsi qu’il résulte du point 57 ci-dessus, l’élément verbal, seul composant de ladite marque, reste toujours clairement lisible dans la forme de cette marque telle qu’utilisée sur le marché.

62      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté, aux points 51 et 52 de la décision attaquée, que la légère stylisation des lettres composant l’élément verbal et la présence de la couleur bleue n’affectaient pas non plus le caractère distinctif de la marque antérieure, telle qu’enregistrée, et ne modifiaient pas l’impression d’ensemble produite par celle-ci.

63      Les autres arguments de la requérante ne sauraient, non plus, démontrer l’existence, dans la forme de la marque antérieure telle qu’utilisée sur le marché, d’une altération du caractère distinctif de la marque antérieure telle qu’enregistrée.

64      En premier lieu, ne saurait prospérer l’argument de la requérante selon lequel l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours était elle-même consciente que la marque antérieure, telle qu’enregistrée, n’était pas identique à ses marques figuratives, puisqu’elle n’a pas fondé son opposition sur les marques figuratives nos 1093378 et 303405120. En effet, s’il est vrai que l’opposition aurait pu être fondée sur lesdites marques figuratives, il n’en reste pas moins que, compte tenu de ce qui précède, l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré et que cette dernière marque pouvait donc servir de fondement à l’opposition, et ce bien qu’elle ait été parfois utilisée sous une forme légèrement différente.

65      En second lieu, s’agissant de la référence faite par la requérante aux décisions de la chambre de recours dans les affaires R 2262/2018‑4, R 440/2019-1 et R 1037/2018-5, dans lesquelles il avait été considéré que les éléments additionnels utilisés dans la vie des affaires altéraient le caractère distinctif des marques concernées telle qu’enregistrées, il suffit de rappeler que la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement no 207/2009, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de celles-ci [voir, en ce sens, arrêts du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, EU:T:2005:102, point 68 et jurisprudence citée, et du 13 juin 2014, Grupo Flexi de León/OHMI (FLEXI), T‑352/12, non publié, EU:T:2014:519, point 32 et jurisprudence citée]. À titre surabondant, il convient de relever que, si des motifs de fait ou de droit figurant dans une décision antérieure peuvent, certes, constituer des arguments à l’appui d’un moyen tiré de la violation d’une disposition du règlement no 207/2009, force est de constater que, dans les décisions antérieures invoquées par la requérante, l’impact des éléments verbaux ou figuratifs ajoutés sur le caractère distinctif des marques concernées n’est pas comparable à celui de l’élément figuratif ajouté à la marque antérieure dans la présente espèce.

66      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que les différences entre la marque antérieure, sous sa forme enregistrée, et le signe sous la forme duquel elle avait été utilisée sur le marché n’altéraient pas le caractère distinctif de cette marque.

67      Il s’ensuit que la seconde branche du premier moyen doit également être rejetée comme étant non fondée.

68      Il résulte de tout ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

69      La requérante soutient que la chambre de recours a constaté à tort l’existence d’un risque de confusion au sens l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. En particulier, elle reproche à la chambre de recours, premièrement, de ne pas avoir tenu compte de la grande renommée de la marque demandée, deuxièmement, d’avoir incorrectement apprécié les éléments dominants et distinctifs de ladite marque, troisièmement, d’avoir commis une erreur d’appréciation dans la comparaison des signes en conflit et, quatrièmement, d’avoir commis une erreur dans l’appréciation globale du risque de confusion.

70      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

71      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement no 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures notamment les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

72      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

73      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en cause et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

74      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si la chambre de recours a estimé à juste titre qu’il existait en l’espèce un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

75      La chambre de recours a indiqué que, la marque antérieure étant une marque allemande, il y avait lieu de prendre en compte le public allemand (point 65 de la décision attaquée). Elle a également considéré que les produits en cause étaient destinés au grand public, dont le niveau d’attention variait de faible à moyen (point 67 de la décision attaquée). Par ailleurs, la chambre de recours a fait sienne l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle les produits en cause étaient pour partie identiques et pour partie similaires à un degré élevé (points 7 et 68 de la décision attaquée). La requérante ne conteste pas ces appréciations de la chambre de recours. Au demeurant, aucun élément du dossier ne permet de les remettre en cause.

 Sur la comparaison des signes

76      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale de ce risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

77      À titre liminaire, il convient de rappeler que les signes à comparer sont ceux constituant, d’une part, la marque figurative demandée, ACM 1899 AC MILAN, et, d’autre part, la marque verbale antérieure, Milan.

78      La marque demandée comporte un élément figuratif représentant un écusson comportant un cercle à l’intérieur duquel figurent deux drapeaux différents, l’un présentant une alternance de bandes noires et rouges et l’autre présentant une croix rouge sur un fond blanc. Les éléments verbaux « acm », écrit en caractères majuscules, et « 1899 » sont situés respectivement au-dessus et au-dessous dudit cercle. L’ensemble de ces éléments verbaux et figuratifs est entouré d’un ovale noir, lui-même entouré d’un ovale rouge foncé. Dans la partie inférieure de la marque demandée, sous cet élément figuratif, se trouve l’élément verbal « ac milan », écrit en caractères majuscules stylisés de couleur noire et de grande taille.

79      La marque antérieure est constituée, quant à elle, de l’élément verbal « milan ».

–       Sur les éléments distinctifs et dominants du signe demandé

80      Dans la décision attaquée, premièrement, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « milan » serait associé, pour une partie du public pertinent, à la ville italienne de Milan et, en conséquence, au lieu d’origine des produits en cause ou au lieu du siège social de l’entreprise fournissant lesdits produits. Tout en se référant à l’arrêt du 19 juin 2019, Marriott Worldwide/EUIPO – AC Milan (AC MILAN) (T‑28/18, non publié, EU:T:2019:436, point 38), elle a estimé que, pour autant que cet élément verbal serait perçu comme une référence à la ville italienne de Milan, il détenait un caractère distinctif tout au plus faible. La chambre de recours a toutefois relevé que, pour une autre partie du public pertinent, le mot « milan » renverrait à un prénom masculin à consonance étrangère ou à une espèce de rapace spécifique. Selon elle, aucune de ces trois significations ne se rapporte aux produits en cause. Deuxièmement, la chambre de recours a constaté, en substance, que, dans l’hypothèse où l’élément verbal « ac » serait perçu par le public pertinent comme l’acronyme de « associazione calcio » (association de football), celui-ci serait doté d’un caractère distinctif compte tenu, notamment, de la nature des produits en cause. Troisièmement, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « ac milan » était dominant dans la marque demandée. Quatrièmement, elle a estimé que, bien que l’élément figuratif de cette marque ne soit pas négligeable en raison de sa taille et de sa position, il sera perçu par une grande majorité du public essentiellement comme un élément décoratif, et non comme un élément indiquant l’origine commerciale des produits.

81      Selon la requérante, la chambre de recours a commis une erreur dans son analyse en ce qu’elle aurait appliqué de manière erronée le principe selon lequel, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds. Elle fait valoir, en substance, que l’élément figuratif représentant un écusson est l’élément le plus « accrocheur » et constitue l’élément dominant de ladite marque, compte tenu de sa position centrale et supérieure, de sa taille par rapport à l’élément « ac milan », de ses couleurs et de sa réputation en Allemagne. À l’appui de son argument, elle invoque l’arrêt du 19 juin 2019, AC MILAN (T‑28/18, non publié, EU:T:2019:436, points 37 et 38).

82      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

83      À titre liminaire, il convient de considérer que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 55 ci-dessus, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom de la marque qu’en décrivant l’élément figuratif de celle-ci.

84      En premier lieu, en ce qui concerne les éléments dominants du signe constituant la marque demandée, il convient de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que l’élément figuratif ne sera pas ignoré par le public pertinent, notamment eu égard à sa taille et à sa position, et, partant, qu’il n’est pas négligeable dans l’impression d’ensemble produite par ce signe. Si l’élément figuratif ne passe pas inaperçu, l’attention du public pertinent ne convergera toutefois pas vers cet élément. En effet, l’attention du public pertinent sera attirée par l’élément verbal composé des lettres « ac » et du mot « milan », du fait que ces derniers sont reproduits en caractères majuscules et dans une police de caractères stylisée, et que l’élément qu’ils forment dépasse considérablement en longueur l’élément figuratif. Or, selon la jurisprudence, lorsque l’élément verbal d’une marque est sensiblement plus long que l’élément figuratif de ladite marque, il attire davantage l’attention du consommateur moyen en raison de sa taille plus importante [voir arrêt du 8 juillet 2020, Scorify/EUIPO – Scor (SCORIFY), T‑328/19, non publié, EU:T:2020:311, point 60 et jurisprudence citée].

85      Par ailleurs, la référence faite par la requérante à l’arrêt du 19 juin 2019, AC MILAN (T‑28/18, non publié, EU:T:2019:436, points 37 et 38), dans lequel le Tribunal a estimé que, en raison de sa taille, de sa position et de ses couleurs, l’élément figuratif du signe constituant la marque demandée dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu audit arrêt, représentant un objet de forme ronde avec des rayures rouges et noires, constituait l’élément visuellement dominant, n’est pas pertinente en l’espèce. En effet, dans cet arrêt, trois éléments composant ledit signe se différenciaient des éléments de la marque demandée dans la présente affaire. Premièrement, l’élément verbal « ac » était négligeable ou illisible pour une partie du public pertinent, en raison de sa très petite taille et de sa position en retrait dans le signe demandé. Deuxièmement, l’élément verbal « ac milan » ne dépassait pas sensiblement en longueur l’élément figuratif. Troisièmement, l’élément figuratif était d’une dimension proportionnellement beaucoup plus importante que celle de l’élément figuratif de la marque demandée en l’espèce.

86      En second lieu, en ce qui concerne le caractère distinctif des éléments composant la marque demandée, il convient tout d’abord d’observer que son élément figuratif n’a aucun rapport avec les produits en cause et ne saurait être considéré comme descriptif de ces produits. Il s’ensuit que, comme la chambre de recours l’a constaté, cet élément figuratif est doté d’un caractère distinctif.

87      Ensuite, s’agissant de l’élément verbal « ac », ainsi que l’a souligné à juste titre la chambre de recours, celui-ci sera considéré par le public pertinent comme une combinaison de lettres dépourvue de signification et présente de ce fait un caractère distinctif. En tout état de cause, même dans l’hypothèse où cet élément serait perçu par une partie du public pertinent comme l’acronyme de « associazione calcio » (association de football), il serait doté d’un caractère distinctif compte tenu de la nature des produits en cause.

88      Enfin, s’agissant de l’élément verbal « milan », celui-ci sera perçu comme une référence soit à la ville italienne de Milan, soit au prénom masculin Milan, soit à une espèce de rapace. Ainsi que l’a souligné à juste titre la chambre de recours, pour la partie du public pertinent qui percevra cet élément comme une référence à la ville italienne de Milan et qui, partant, pourrait l’associer au lieu d’origine des produits en cause ou au lieu du siège social de l’entreprise fournissant lesdits produits, il détient un caractère distinctif tout au plus faible.

89      Cela étant, le faible caractère distinctif de l’élément verbal « milan » pour une partie du public pertinent ne remet pas en cause le fait qu’il est le composant essentiel de l’élément dominant du signe constituant la marque demandée. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, le faible caractère distinctif d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [voir arrêt du 12 juin 2018, Cotécnica/EUIPO – Mignini & Petrini (cotecnica MAXIMA), T‑136/17, non publié, EU:T:2018:339, point 52 et jurisprudence citée].

90      Compte tenu des constatations opérées au point 84 ci-dessus, force est de constater que, malgré le caractère faiblement distinctif de l’élément « milan », l’élément « ac milan » constitue l’élément dominant de la marque demandée.

91      Il découle de tout ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 83 de la décision attaquée, que l’élément verbal « ac milan » était l’élément dominant du signe demandé.

–       Sur la comparaison visuelle

92      La chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude visuelle, en raison de la présence de l’élément verbal commun « milan ».

93      La requérante conteste cette appréciation de la chambre de recours. Elle fait valoir que les signes en conflit ne sont pas visuellement similaires compte tenu de la présence, dans la marque demandée, de l’élément figuratif représentant un écusson.

94      À cet égard, il y a lieu de relever que la circonstance que le terme « milan », d’une part, est l’élément unique de la marque antérieure et, d’autre part, est, par ses dimensions, l’élément le plus important de l’élément verbal « ac milan » qui domine l’impression d’ensemble produite par la marque demandée constitue un facteur de similitude particulièrement important. Dans la mesure où les signes en conflit se différencient par la présence de l’élément figuratif et des éléments verbaux supplémentaires « ac », « acm » et « 1899 » dans le signe constituant la marque demandée, c’est, à juste titre, que la chambre de recours a retenu l’existence d’une similitude visuelle moyenne.

–       Sur la comparaison phonétique

95      La chambre de recours a considéré que, en raison de la présence commune du mot « milan », les signes en conflit étaient très similaires sur le plan phonétique. Elle a ajouté qu’il ne saurait être totalement exclu que, par simple économie de langage, mais aussi eu égard à leur position secondaire et à la taille de leurs lettres, plus petites que celles utilisées pour l’élément « milan », une partie du public pertinent omette de prononcer les éléments « acm » et « 1899 » du signe constituant la marque demandée.

96      La requérante se borne à alléguer que les signes en conflit présentent un très faible degré de similitude phonétique.

97      À titre liminaire, il convient de rappeler que les éléments figuratifs du signe demandé n’ont aucune incidence sur la comparaison phonétique entre les signes en conflit [voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2014, Aroa Bodegas/OHMI – Bodegas Muga (aroa), T‑536/12, non publié, EU:T:2014:770, point 45 et jurisprudence citée].

98      En premier lieu, il y a lieu de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que les éléments verbaux « acm » et « 1899 » sont peu susceptibles d’être prononcés par le public pertinent dans la mesure où ils occupent une place secondaire par rapport à l’élément verbal « ac milan » et ils sont écrits en lettres de petite taille. En l’espèce, doivent dès lors être comparés l’élément verbal « milan » de la marque antérieure et l’élément verbal « ac milan » de la marque demandée.

99      En second lieu, force est de constater que les signes en conflit coïncident par le terme « milan » et ne diffèrent que par la présence de l’élément verbal supplémentaire « ac » dans la marque demandée.

100    Il y a donc lieu de conclure que le degré de similitude phonétique est élevé et que, partant, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation à cet égard.

–       Sur la comparaison conceptuelle

101    La chambre de recours a constaté que, pour la partie du public pertinent attribuant une signification au terme « milan », les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude conceptuelle, puisqu’ils ne se distinguaient que par la présence de l’élément figuratif dans la marque demandée. En revanche, la chambre de recours a considéré que cette comparaison n’était pas pertinente pour la partie du public pour laquelle le mot « milan » sera perçu comme fantaisiste.

102    La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont similaires sur le plan conceptuel. Selon elle, ces signes sont différents sur ce plan. En particulier, elle avance que, eu égard aux documents qu’elle a produits, il ne fait aucun doute que le public pertinent associera la marque demandée au célèbre club de football italien ou, à tout le moins, à la ville italienne de Milan où se situe ce club, et non à un prénom ou à une espèce spécifique d’oiseau.

103    S’agissant de la comparaison conceptuelle, il y a lieu de rappeler que l’élément verbal « milan », commun aux signes en conflit, peut revêtir différentes significations. Ce terme peut ainsi être associé, pour une partie du public pertinent, à la ville italienne de Milan et, pour une autre partie du public pertinent, au prénom masculin Milan. Au demeurant, il ne saurait être exclu que, au moins pour une partie du public pertinent ayant des connaissances spécifiques, le terme « milan » renvoie à une espèce de rapace, étant donné que, ainsi que la chambre de recours l’a constaté à juste titre, ledit mot est également usité dans la langue allemande.

104    En l’espèce, l’élément verbal « milan » étant présent tant dans la marque demandée que dans la marque antérieure, il y a lieu de considérer que les signes en conflit sont moyennement similaires sur le plan conceptuel pour la partie du public pertinent pour laquelle ce mot a une signification.

105    En toute état de cause, même à supposer que, comme le fait valoir la requérante, une partie du public pertinent perçoive l’élément verbal « ac milan » de la marque demandée comme une référence à ce club de football de la ville de Milan, les signes en conflit renverraient tous les deux à la ville italienne de Milan. La conclusion tirée au point 104 ci-dessus s’imposerait donc également.

106    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours relative, d’une part, au degré moyen de similitude conceptuelle entre les signes en conflit pour la partie du public pertinent attribuant un sens au terme « milan » et, d’autre part, à l’absence de pertinence de la comparaison conceptuelle pour la partie du public pertinent pour laquelle le terme « milan » était dépourvu de signification.

 Sur le risque de confusion

107    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

108    En l’espèce, la chambre de recours a, d’abord, relevé que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif intrinsèque normal, ce qui n’est pas contesté par la requérante. Ensuite, elle a relevé que les produits en cause étaient identiques ou similaires à un degré élevé et que les signes en conflit étaient, dans leur ensemble, similaires. Elle a ajouté que les différences visuelles qui existaient entre les signes en conflit du fait, principalement, de l’élément figuratif de la marque demandée ne suffisaient pas à neutraliser les similitudes existant sur le plan phonétique et, au moins pour une partie du public pertinent, sur le plan conceptuel. Enfin, elle a indiqué que l’identité ou la similitude élevée des produits en cause étaient de nature à compenser les différences perceptibles entre les signes en conflit. Sur la base de ces éléments, la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion. Par souci d’exhaustivité, elle a précisé qu’un tel risque existerait même à supposer que le caractère distinctif de la marque antérieure soit faible.

109    La requérante considère, au contraire, qu’il n’existe aucun risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. En particulier, elle soutient, en se fondant sur l’arrêt du 8 février 2019, Serendipity e.a./EUIPO – CKL Holdings (CHIARA FERRAGNI) (T‑647/17, non publié, EU:T:2019:73, point 85), que la chambre de recours a méconnu le fait que, en l’espèce, l’aspect visuel revêtirait une importance particulière dans l’appréciation globale du risque de confusion, étant donné que le choix d’un article de papeterie se ferait, généralement, de manière visuelle. En outre, elle reproche à la chambre de recours d’avoir omis de prendre en considération, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, la grande renommée du signe constituant la marque demandée et du club de football AC Milan.

110    En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas accordé suffisamment d’importance à l’aspect visuel des signes en conflit, premièrement, il convient de relever que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, phonétique et conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids et qu’il importe alors d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché. L’importance des éléments de similitude ou de différence entre les signes en conflit peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux-ci ou des conditions de commercialisation des produits ou des services que ceux-ci désignent. Si les produits désignés par les marques en cause sont normalement vendus dans des magasins de libre-service où le consommateur choisit lui-même le produit et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ce produit, ce qui est le cas des produits en cause, relevant de la classe 16, une similitude visuelle des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance [arrêt du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, EU:T:2004:293, point 49].

111    Toutefois, les conditions de commercialisation des produits en cause et, en conséquence, l’importance d’une similitude visuelle entre les signes en conflit liée à la nature de ces produits ne sont qu’un des éléments à prendre en considération lors de l’appréciation globale du risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. En l’espèce, même dans l’hypothèse où la chambre de recours aurait dû estimer que, eu égard aux conditions de commercialisation des produits en cause, il convenait d’attacher une importance particulière à la similitude visuelle des signes en conflit, il y a lieu de rappeler que, comme il a été constaté au point 94 ci-dessus, la similitude sur ce plan est moyenne et de relever que cette similitude est confortée par les similitudes constatées entre les marques en cause sur les deux autres plans de comparaison, de sorte que les similitudes de ces marques sont, dans leur ensemble, d’un degré suffisant pour conclure à l’existence d’un risque de confusion.

112    Deuxièmement, le raisonnement tenu dans l’arrêt du 8 février 2019, CHIARA FERRAGNI (T‑647/17, non publié, EU:T:2019:73), invoqué par la requérante, n’est pas transposable au cas d’espèce dès lors que, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, les signes en conflit étaient faiblement similaires sur le plan visuel et moyennement similaires sur le plan phonétique. Il convient également d’observer que, à la différence de la présente espèce, ladite affaire concernait l’existence d’un risque de confusion s’agissant de deux marques qui visaient des produits du secteur de l’habillement. Or, la requérante n’expose aucunement les raisons devant conduire à la transposition de cette jurisprudence aux produits de papeterie relevant de la classe 16.

113    En second lieu, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de la renommée de la marque demandée en Allemagne, il convient de relever, ainsi que l’a souligné à juste titre l’EUIPO, que seule la renommée de la marque antérieure, et non celle de la marque demandée, doit être prise en compte pour apprécier si la similitude des produits désignés par deux marques est suffisante pour donner lieu à un risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:503, point 84 et jurisprudence citée). Cette jurisprudence est conforme à l’objectif de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, qui est de fournir une protection adéquate aux titulaires de droits antérieurs contre des demandes postérieures de marques de l’Union européenne identiques ou similaires [arrêt du 29 janvier 2019, The GB Foods/EUIPO – Yatecomeré (YATEKOMO), T‑336/17, non publié, EU:T:2019:840, point 49].

114    Ainsi, l’argumentation de la requérante tirée de la prétendue renommée de la marque demandée est dépourvue de toute pertinence.

115    Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant, dans le cadre d’une appréciation globale, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

116    Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le second moyen comme étant non fondé et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

117    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes de l’article 135, paragraphe 2, du même règlement, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, partiellement ou totalement aux dépens, si cela apparaît justifié en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance, en particulier si elle a fait exposer à l’autre partie des frais que le Tribunal reconnaît comme frustratoires ou vexatoires.

118    En l’espèce, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO. Néanmoins, le Tribunal considère que, par son comportement, l’EUIPO a conduit la requérante à exposer des frais de déplacement qui auraient pu être évités. En effet, ainsi qu’il ressort de la demande de la requérante visant à condamner l’EUIPO aux frais de déplacement même en cas de rejet de son recours, celle-ci avait engagé des frais pour le déplacement de ses avocats en vue de l’audience de plaidoiries initialement fixée au 11 juin 2021 et annulée à la suite du retrait de la demande d’audience opéré par l’EUIPO le 3 juin 2021.

119    Dans ces conditions, quand bien même la requérante a succombé en ses conclusions, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en décidant que l’EUIPO supportera les frais de déplacement exposés par la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Associazione Calcio Milan SpA (AC Milan) est condamnée aux dépens, à l’exception des frais de déplacement supportés par celle-ci.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera les frais de déplacement exposés par AC Milan.

Marcoulli

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 novembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.