DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

22 mai 2019 (*)

« Recours en carence – Proposition de modification du règlement de procédure de la Cour – Incompétence du Parlement – Irrecevabilité manifeste – Demande d’injonction – Incompétence manifeste »

Dans l’affaire T‑754/18,

Hochmann Marketing GmbH, établie à Neu-Isenburg (Allemagne), représentée par Me J. Jennings, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 265 TFUE et tendant à faire constater que le Parlement s’est illégalement abstenu de proposer une modification du règlement de procédure de la Cour,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), président, V. Kreuschitz et Mme N. Półtorak, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits et procédure

1        Par ordonnance du 28 juin 2018, Hochmann Marketing/EUIPO (C‑118/18 P, non publiée, EU:C:2018:522), la Cour a rejeté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé le pourvoi introduit par la requérante, Hochmann Marketing GmbH, contre l’arrêt du 12 décembre 2017, Hochmann Marketing/EUIPO – BitTorrent (bittorrent) (T‑771/15, non publié, EU:T:2017:887), par lequel le Tribunal avait rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 31 août 2015 (affaire R 2275/2013–5), relative à une procédure de déchéance entre BitTorrent, Inc. et Bittorrent Marketing GmbH.

2        L’ordonnance du 28 juin 2018, Hochmann Marketing/EUIPO (C‑118/18 P, non publiée, EU:C:2018:522), a été adoptée sur le fondement de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, aux termes duquel, « [l]orsque le pourvoi, […] est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée ».

3        À la suite de la signature de l’ordonnance du 28 juin 2018, Hochmann Marketing/EUIPO (C‑118/18 P, non publiée, EU:C:2018:522), par télécopie du 28 août 2018, la requérante a communiqué au Parlement européen un mémoire de 78 pages accompagné d’annexes concernant une « invitation à agir conformément à l’article 265, deuxième alinéa, TFUE, relative à son omission de modifier le règlement de procédure de la Cour, en raison de son application incorrecte par la Cour dans l’affaire [précitée] ».

4        En réponse à cette demande, par lettre datée du 5 novembre 2018, le Parlement a accusé réception de cette invitation à agir et indiqué qu’elle avait été transmise à sa commission des pétitions, laquelle devant informer la requérante dès qu’une décision aura été prise à son propos.

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 décembre 2018, la requérante a introduit le présent recours.

 Conclusions de la requérante

6        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        enjoindre au Parlement d’examiner le mémoire qui lui a été présenté pour l’inviter à agir conformément à l’article 265, deuxième alinéa, TFUE et, en tout état de cause, de proposer à la Commission européenne, conformément à l’article 245 TFUE, des actes législatifs afin de remédier aux violations constatées des droits fondamentaux ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

 En droit

7        En vertu de l’article 126 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

8        En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sans poursuivre la procédure.

9        En premier lieu, il convient de rappeler que, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur les articles 263 et 265 TFUE, le juge de l’Union n’a pas compétence pour prononcer des injonctions à l’égard des institutions et organes de l’Union (voir ordonnance du 7 décembre 2017, Techniplan/Commission, T‑853/16, non publiée, EU:T:2017:928, point 40 et jurisprudence citée).

10      En effet, le Tribunal a uniquement la possibilité de constater l’existence d’une carence. Ensuite, il incombe, en application de l’article 266 TFUE, à l’institution concernée de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du Tribunal (voir ordonnance du 7 décembre 2017, Techniplan/Commission, T‑853/16, non publiée, EU:T:2017:928, point 41 et jurisprudence citée).

11      Dès lors, le Tribunal est manifestement incompétent pour prononcer une injonction de faire à l’égard du Parlement comme cela est demandé par la requérante dans son premier chef de conclusions.

12      En second lieu, à supposer que, par son premier chef de conclusions, la requérante entende obtenir du Tribunal qu’il constate la carence du Parlement, en ce que cette institution s’est abstenue, en substance, de proposer à la Commission une modification du règlement de procédure de la Cour, il y a lieu de relever que, conformément à l’article 253, sixième alinéa, TFUE, la Cour établit son règlement de procédure, lequel est soumis à l’approbation du Conseil. C’est en application de cette procédure que la Cour a arrêté, avec l’approbation du Conseil de l’Union européenne en date du 24 septembre 2012, son règlement de procédure, du 25 septembre 2012, qui comporte en son article 181 la disposition critiquée par la requérante après le rejet du pourvoi qu’elle avait introduit dans l’affaire C‑118/18 P.

13      Le Parlement n’étant donc pas compétent pour proposer une modification du règlement de procédure de la Cour et encore moins pour modifier lui-même ce règlement de procédure, le recours en carence formé par la requérante doit être rejeté comme manifestement irrecevable (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2004, Cantina sociale di Dolianova e.a./Commission, T‑166/98, EU:T:2004:337, point 81).

14      Enfin, pour autant qu’il faille comprendre la requête comme reprochant au Parlement ne pas avoir « examin[é] le mémoire présenté le 28 août 2018 par la requérante », il y a lieu de constater que le Parlement a accusé réception dudit courrier et transmis celui-ci à sa commission des pétitions, laquelle est chargée de l’examen des pétitions reçues.

15      Or, il convient de relever que les éléments avancés par la requérante, dans la requête, ne permettent pas d’établir qu’une ou plusieurs dispositions du droit de l’Union, primaire ou dérivé, obligeaient le Parlement à accorder un traitement différent audit courrier (voir, en ce sens, ordonnance du 17 novembre 2010, Victoria Sánchez/Parlement et Commission, T-61/10, non publiée, EU:T:2010:473, points 32 à 39).

16      Il résulte des considérations qui précèdent que le Tribunal est manifestement incompétent pour prononcer des injonctions à l’égard du Parlement et que, en tout état de cause, il y a également lieu de rejeter le recours comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier au Parlement.

 Sur les dépens

17      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête au Parlement et avant que celui-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 133 du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.


2)      Hochmann Marketing GmbH supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 22 mai 2019.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Frimodt Nielsen


*      Langue de procédure : l’allemand.