DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

9 décembre 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale Promed – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑30/20,

Promed GmbH kosmetische Erzeugnisse, établie à Farchant (Allemagne), représentée par Mes B. Sorg, B. Reinisch et C. Raßmann, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. H. O’Neill, V. Ruzek et S. Hanne, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Centrumelektroniki sp.j., établie à Tarnowskie Góry (Pologne), représentée par Me M. Kondrat, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 7 novembre 2019 (affaire R 614/2019-5), relative à une procédure de nullité entre Centrumelektroniki et Promed kosmetische Erzeugnisse,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mme M. J. Costeira, présidente, M. D. Gratsias (rapporteur) et Mme M. Kancheva, juges,

greffier : Mme J. Pichon, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 20 janvier 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 27 mars 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 24 mars 2020,

à la suite de l’audience du 1er octobre 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 7 août 2007, la requérante, Promed GmbH kosmetische Erzeugnisse, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)], en invoquant un droit de priorité au 18 avril 2007 tiré de la marque enregistrée en Allemagne sous le numéro 30725306.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Promed.

3        Les produits pour lesquels la marque a été enregistrée relèvent notamment des classes 5, 9 et 10 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Bandelettes de test à usage médical » ;

–        classe 9 : « Appareils pour mesurer la température et les fonctions corporelles » ;

–        classe 10 : « Instruments et appareils chirurgicaux, médicaux, dentaires et vétérinaires, en particulier appareils thérapeutiques contre la douleur, électrodes pour appareils thérapeutiques électriques, articles orthopédiques, en particulier chaussures et semelles intérieures, bandages pour les articulations, bandages corporels ; bas orthopédiques ; stylos à insuline ; rouleaux de massage pour les pieds, appareils de massage ; appareils pour la radiothérapie, en particulier pour la thérapie par la chaleur et la luminothérapie ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 5/2008, du 4 février 2008, et la marque contestée a été enregistrée le 16 septembre 2008 sous le numéro 6206718 pour les produits mentionnés au point 3 ci-dessus.

5        Le 10 août 2017, l’intervenante, Centrumelektroniki sp.j., a présenté une demande en nullité de la marque contestée, sur le fondement de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du même règlement [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001].

6        Par décision du 22 février 2019, la division d’annulation a partiellement fait droit à la demande en nullité en déclarant nulle la marque contestée pour les produits des classes 5, 9 et 10 mentionnés au point 3 ci-dessus.

7        Le 19 mars 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation en ce qu’elle avait fait droit à la demande en nullité.

8        Par décision du 7 novembre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la chambre de recours a rejeté le recours. En particulier, premièrement, la chambre de recours a considéré que l’objet de la demande en nullité devait, s’agissant des produits visés, être apprécié non seulement à l’aune du formulaire rempli par le demandeur en nullité, mais aussi en tenant compte du mémoire exposant les motifs de nullité. Selon la chambre de recours, il s’ensuivait que la demande en nullité visait, notamment, tous les produits des classes 5, 9 et 10 visés par la marque contestée, pour lesquels la division d’annulation avait fait droit à cette demande.

9        Deuxièmement, eu égard à la nature des produits mentionnés au point 3 ci-dessus, la chambre de recours a défini le public pertinent comme composé des professionnels dans le secteur de la santé ainsi que des consommateurs finaux, anglophones, auxquels s’adressaient ces produits.

10      Troisièmement, la chambre de recours a souligné que, en anglais, le terme « pro » signifiait « professionnel » et était ainsi utilisé à des fins purement laudatives dans le cadre du marketing des produits ou des services pour mettre l’accent sur leur qualité. En outre, le terme abrévié « med » aurait été communément utilisé en anglais pour désigner la médecine ou bien un médicament. La propriétaire de la marque contestée n’aurait pas contesté ces faits notoires. Or, la juxtaposition de ces termes aurait été immédiatement comprise par le public pertinent comme une indication de la nature des produits en cause en tant que produits médicaux répondant aux plus hauts standards de qualité et de fiabilité. Il se serait donc agi d’un terme purement promotionnel encourageant le public pertinent à acheter les produits médicaux mentionnés au point 3 ci-dessus, sans révéler d’élément susceptible de constituer une indication de l’origine commerciale des produits. Pour ces motifs, la chambre de recours a conclu que la marque contestée était dénuée de caractère distinctif et qu’elle tombait, à ce titre, sous le coup de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et la décision de la division d’annulation ;

–        réformer la décision attaquée aux fins du remboursement de la taxe de recours ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens devant la division d’annulation et devant le Tribunal, y compris à ceux exposés par l’intervenante.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours en partie comme irrecevable et en partie comme non-fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens devant le Tribunal et devant la chambre de recours.

 En droit

14      À l’appui du recours, la requérante soulève deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 59, paragraphe 1, sous a), et l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement, et, le second, d’une violation de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

15      Compte tenu de la date de priorité de la marque contestée, à savoir le 18 avril 2007, qui, conformément à l’article 34, paragraphe 1, à l’article 36, à l’article 52 et à l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, doit être regardée comme la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, laquelle est déterminante pour l’identification du droit matériel applicable aux fins de l’examen d’une demande en nullité, la présente affaire est régie par les dispositions matérielles du règlement no 40/94 (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

16      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée ainsi que par les parties dans leurs écritures aux dispositions du règlement 2017/1001 comme visant les dispositions d’une teneur identique du règlement no 40/94.

17      Au demeurant, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), toute question procédurale est régie par le règlement 2017/1001, en vigueur au moment où la décision attaquée a été adoptée.

18      Dans ces circonstances, il y a lieu d’interpréter les moyens soulevés par la requérante à l’appui de son recours comme tirés, le premier, d’une violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 51, paragraphe 1, sous a), et l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, et, le second, d’une violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a) du règlement no 40/94, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce dernier règlement.

 Sur la recevabilité de certains chefs de conclusion

19      L’EUIPO conteste la recevabilité du recours, dans la mesure où, premièrement, la requérante demande à la fois l’annulation et la réformation de la décision attaquée, deuxièmement, elle demande l’annulation de la décision de la division d’annulation et, troisièmement, elle conclut à la condamnation de l’EUIPO aux dépens devant cette dernière division ainsi qu’aux dépens de l’intervenante devant le Tribunal.

20      À cet égard, tout d’abord, selon l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, « [l]e Tribunal a compétence aussi bien pour annuler que pour réformer la décision attaquée ». Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir l’EUIPO, une demande en réformation au sens de cette disposition peut être formulée de manière accessoire à une demande d’annulation d’une décision de la chambre de recours. De surcroît, et surtout, une demande de réformation de la décision attaquée aux fins du remboursement de la taxe de recours versée à l’EUIPO conformément à l’article 68, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 constitue en réalité une demande de condamnation de ce dernier à rembourser cette taxe au titre de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal. En effet, selon cette dernière disposition, « [l]es frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables ». Parmi les frais en question compte la taxe de recours, si bien que la demande de la requérante (voir point 9, deuxième tiret, ci-dessus) doit être comprise comme formulée au titre de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure.

21      En revanche, l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure ne prévoit pas que les frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’annulation sont récupérables, si bien que la demande de la requérante concernant ces frais (voir point 9, troisième tiret, ci-dessus) est irrecevable [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2019, Volvo Trademark/EUIPO – Paalupaikka (V V-WHEELS), T‑356/18, EU:T:2019:690, point 67].

22      Ensuite, la conclusion de la requérante tendant à ce que le Tribunal annule la décision de la division d’annulation du 22 février 2019 (voir point 9, premier tiret, ci-dessus) doit être comprise comme demandant, en substance, au Tribunal de prendre la décision que la chambre de recours aurait dû, selon lui, prendre lorsqu’elle avait été saisie du recours, à savoir annuler la décision de la division d’annulation en ce que celle-ci avait fait droit partiellement à la demande en nullité. À cet égard, selon l’article 71, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001, la chambre de recours peut annuler la décision attaquée devant elle et exercer les compétences de l’instance qui a pris la décision attaquée, en l’occurrence statuer sur la demande en nullité en cause et la rejeter. Cette mesure figure parmi celles pouvant être prises par le Tribunal au titre de son pouvoir de réformation, consacrée par l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 [voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2017, Kasztantowicz/EUIPO – Gbb Group (GEOTEK), T‑97/16, non publié, EU:T:2017:298, point 17 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir l’EUIPO, cette demande est recevable.

23      Enfin, la demande de la requérante de condamnation de l’EUIPO aux dépens de l’intervenante sera examinée au point 61 ci-après.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 51, paragraphe 1, sous a), et l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94

24      La requérante rappelle que, selon le formulaire introductif de la demande en nullité, rempli par l’intervenante, la demande en question a visé uniquement les produits des classes 9 et 10 mentionnés au point 3 ci-dessus, à l’exception des produits relevant de la classe 5, pour lesquels la marque contestée a également été déclarée nulle. Selon elle, l’exposé des motifs de la demande en nullité ne saurait élargir la liste des produits visés par celle-ci, même lorsque, comme en l’espèce, il contient une référence au numéro de la classe concernée sans mentionner les produits relevant de cette classe couverts par la marque dont la déclaration en nullité est demandée.

25      En outre, l’intervenante n’aurait pas invoqué, devant les instances de l’EUIPO, d’éléments de preuve susceptibles d’appuyer la demande en nullité. En effet, les éléments présentés soit ne concerneraient pas la date pertinente pour l’appréciation du caractère distinctif de la marque contestée, soit ne seraient pas rédigés dans la langue de procédure, soit ne seraient pas pertinents. La chambre de recours se serait par ailleurs écartée de la position qu’elle avait adoptée par le passé dans le cadre de la procédure d’enregistrement d’une marque quasi identique à la marque contestée. Par conséquent, en considérant que la demande en nullité en cause visait également les produits de la classe 5 couverts par la marque contestée et en déclarant cette marque nulle, la chambre de recours aurait enfreint l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, selon lequel, dans les procédures de nullité engagées en vertu de l’article 59 du même règlement, l’EUIPO limite son examen aux moyens et arguments soumis par les parties.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent le bien-fondé de ces allégations.

27      Il convient de rappeler que, afin de déterminer sur quels motifs est fondée une demande en nullité, il y a lieu d’examiner l’ensemble de la demande, en particulier au regard de l’exposé détaillé des motifs étayant celle‑ci [arrêt du 18 mars 2016, Karl-May-Verlag/OHMI – Constantin Film Produktion (WINNETOU), T‑501/13, EU:T:2016:161, point 26].

28      En l’espèce, certes, dans le formulaire introductif de la demande en nullité, l’intervenante a défini l’étendue de cette demande comme visant les produits couverts par la marque contestée relevant des classes 9 et 10. Toutefois, il ressort des conclusions que l’intervenante a formulées dans l’exposé des motifs de la demande en nullité que celle-ci a demandé que la marque contestée soit déclarée nulle également pour les produits relevant de la classe 5, au regard desquels la demande a été tout aussi accueillie. En outre, l’intervenante a expressément formulé des motifs de nullité au regard des produits couverts par la marque contestée et relevant de la classe 5 à plusieurs endroits dudit exposé.

29      Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la division d’annulation n’avait pas statué en dehors de la portée de la demande en nullité.

30      Au demeurant, s’agissant des autres arguments invoqués par la requérante au soutien du présent moyen (voir point 23 ci-dessus), il y a lieu de rappeler que la chambre de recours peut motiver ses décisions par référence à des faits notoires [voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2011, Smart Technologies/OHMI (WIR MACHEN DAS BESONDERE EINFACH), T‑523/09, non publié, EU:T:2011:175, point 41]. Constitue un tel fait la signification d’un terme qui est à la fois courant parmi les membres du public pertinent et qui apparaît dans des sources généralement accessibles [voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2011, Abbott Laboratories/OHMI (RESTORE), T‑363/10, non publié, EU:T:2011:662, point 31].

31      En l’espèce, force est de constater, premièrement, que, ainsi qu’il ressort tant du formulaire de demande en nullité que de l’exposé des motifs de cette demande introduite devant la division d’annulation, l’intervenante l’a fondée tant sur le caractère descriptif de la marque contestée au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 que sur l’absence de caractère distinctif de celle-ci au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement, règles matérielles qui sont identiques aux règles correspondantes du règlement no 40/94.

32      Deuxièmement, ainsi qu’il ressort des points 36 à 38 de la décision attaquée, la chambre de recours a fondé sa conclusion sur des considérations relatives à la signification des termes composant la marque contestée, éléments bien connus qui apparaissent d’ailleurs dans un dictionnaire de référence, qu’elle a, à juste titre, qualifiés de faits notoires. Dans ce contexte, la requérante ne saurait valablement remettre en cause la légalité de la décision attaquée en reprochant à la chambre de recours d’avoir tenu compte de cette signification afin de motiver sa conclusion sur l’absence de caractère distinctif de la marque contestée en dépit du fait que l’intervenante n’avait pas expressément invoqué la signification en question. Il s’ensuit également qu’est inopérant l’argument soulevé par la requérante, selon lequel l’intervenante n’aurait pas invoqué, devant les instances de l’EUIPO, d’éléments de preuve susceptibles d’appuyer la demande en nullité (voir point 23 ci-dessus).

33      En outre, ainsi que le fait valoir la requérante elle-même au point 34 de la requête, la question de savoir si la signification des termes composant la marque contestée dénue cette dernière de caractère distinctif doit être analysée dans le cadre du second moyen. Il en est de même de l’argument pris de la prétendue impossibilité de justifier la conclusion à laquelle est parvenue la décision attaquée sur le fondement des éléments soumis par la requérante devant la chambre de recours ainsi que de la prétendue contradiction entre la décision attaquée, d’une part, et une décision antérieure de la chambre de recours adoptée dans le cadre de la procédure d’enregistrement d’une marque quasi identique à la marque contestée, d’autre part.

34      Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a) du règlement no 40/94, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement

35      La requérante fait valoir, premièrement, que la chambre de recours n’a pas fondé sa conclusion sur une analyse d’ensemble de la marque contestée, mais uniquement sur une analyse de ses composants pris isolément. Une analyse globale aurait amené la chambre de recours à conclure que, surtout pour des produits non médicaux, la marque contestée était une combinaison fantaisiste du terme « pro » et de l’abréviation « med ». En outre, la décision attaquée ne ferait état d’aucun élément susceptible de démontrer que la signification promotionnelle de la marque contestée exclurait qu’elle fût pourvue de caractère distinctif.

36      Selon la requérante, certains produits couverts par la marque contestée, tels les produits de massage, les produits orthopédiques, les appareils de radiothérapie et les appareils pour mesurer la température et les fonctions corporelles ne seraient pas médicaux par nature, mais relèveraient du secteur de bien-être. Par conséquent, la chambre de recours aurait défini erronément le public pertinent, d’une part, et aurait entaché la décision attaquée d’une insuffisance de motivation, d’autre part.

37      Enfin, la chambre de recours n’aurait aucune raison d’adopter une approche différente par rapport à celle qu’elle avait adoptée en vertu de sa décision du 25 janvier 2017 dans l’affaire R 1634/2016-4, concernant l’enregistrement de la marque promed sous le numéro 12885489. Ainsi, la marque contestée, utilisée depuis de longues années, ne saurait être valablement considérée comme dépourvue de caractère distinctif.

38      L’EUIPO et l’intervenante contestent le bien-fondé de ce moyen.

39      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. L’article 7, paragraphe 2, du même règlement énonce que le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

40      Selon une jurisprudence constante, les marques visées par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 sont celles qui sont réputées incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service en cause afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative. Un minimum de caractère distinctif suffit toutefois pour que le motif absolu de refus figurant à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 ne soit pas applicable [voir arrêt du 25 avril 2013, Bayerische Motoren Werke/OHMI (ECO PRO), T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, points 15 et 16 et jurisprudence citée].

41      Le caractère distinctif d’un signe doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (voir arrêt du 25 avril 2013, ECO PRO, T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, point 17 et jurisprudence citée).

42      Dans ce contexte, s’il est vrai que les signes descriptifs visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94 sont, également, dépourvus de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, il n’en demeure pas moins qu’un signe peut être dépourvu de caractère distinctif au sens de cette dernière disposition, pour des raisons autres que son éventuel caractère descriptif (voir arrêt du 25 avril 2013, ECO PRO, T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, point 18 et jurisprudence citée).

43      Il existe donc un certain chevauchement entre le champ d’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 et celui de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement, la première de ces dispositions se distinguant toutefois de la seconde en ce qu’elle couvre l’ensemble des circonstances dans lesquelles un signe n’est pas de nature à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 25 avril 2013, ECO PRO, T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, point 19 et jurisprudence citée).

44      Lorsque, dans le domaine visé par la marque, le public pertinent perçoit un signe comme fournissant des informations sur la nature des produits qu’elle désigne et non comme indiquant l’origine des produits en cause, la marque ne satisfait pas aux conditions prévues par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 (voir arrêt du 25 avril 2013, ECO PRO, T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, point 20 et jurisprudence citée). À cet égard, une marque doit permettre au public pertinent de distinguer les produits qu’elle désigne de ceux d’autres entreprises sans que ce public doive faire preuve d’une attention particulière, de sorte que le niveau de caractère distinctif nécessaire à l’enregistrement d’une marque ne saurait dépendre du niveau d’attention dudit public [arrêt du 14 février 2019, Bayer Intellectual Property/EUIPO (Représentation d’un cœur), T‑123/18, EU:T:2019:95, point 17].

45      Il s’agit donc de vérifier si le lien établi par la chambre de recours entre, d’une part, le contenu sémantique du signe demandé et, d’autre part, les produits en cause est suffisamment concret et direct pour démontrer que ce signe permet, dans l’esprit du public pertinent, une identification immédiate de certaines caractéristiques de ces produits.

46      À cet égard, s’agissant d’un signe composé de deux éléments verbaux associés pour former un mot, un éventuel caractère distinctif peut être examiné, en partie, pour chacun de ses termes ou de ses éléments, pris séparément, mais doit, en tout état de cause, dépendre d’un examen de l’ensemble qu’ils composent. En effet, la seule circonstance que chacun de ces éléments, pris séparément, est dépourvu de caractère distinctif n’exclut pas que la combinaison qu’ils forment puisse présenter un caractère distinctif (voir arrêt du 25 avril 2013, ECO PRO, T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, point 24 et jurisprudence citée).

47      En l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 36 à 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a observé que la marque contestée était composée des termes « pro » et « med », qui sont utilisés par le public pertinent, composé de professionnels de la santé et de consommateurs moyens anglophones, pour se référer aux notions de « professionnel » et de « médical » respectivement. Selon la chambre de recours, la combinaison de ces termes, dans leur forme abréviée, est immédiatement comprise par une grande majorité du public pertinent comme désignant les caractéristiques médicales de qualité et fiabilité professionnelles des produits couverts par la marque contestée. Ce type de composition de mots étant très courant en anglais, la marque contestée, prise dans sa globalité, ne remplirait qu’une fonction purement promotionnelle mettant l’accent sur le caractère correct et responsable du choix des consommateurs sans indiquer l’origine commerciale des produits en cause.

48      Il s’ensuit que, comme il ressort par ailleurs des points 42, 43 et 45 de la décision attaquée, et contrairement à ce que fait valoir la requérante, la chambre de recours a examiné la marque contestée dans sa globalité et ne s’est pas limitée à un examen des éléments qui la composent, pris séparément.

49      Or, il convient de relever que, d’une part, l’élément verbal « pro » peut avoir un caractère laudatif de nature publicitaire, dont la fonction est de mettre en relief les qualités positives des produits ou des services pour la présentation desquels cet élément est utilisé, et, d’autre part, il est communément employé, dans le commerce, pour la présentation de toutes sortes de produits et de services. En effet, cet élément verbal est perçu par le public anglophone dans le sens de « professionnel » ou « favorable, positif ou propice » [voir, en ce sens, arrêts du 25 avril 2013, ECO PRO, T‑145/12, non publié, EU:T:2013:220, point 27 et jurisprudence citée, et du 16 mai 2017, Marsh/EUIPO (LegalPro), T‑472/16, non publié, EU:T:2017:341, point 27 et jurisprudence citée], sans que cette perception dépende de la position de l’élément en question au début ou à la fin de la marque. Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que le public pertinent lui attribuait la signification propre à un produit ou à un service d’une qualité et d’une fiabilité excellentes.

50      Ainsi, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la chambre de recours a exposé les motifs démontrant le caractère promotionnel du terme « pro ».

51      La chambre de recours n’a pas non plus commis d’erreur en considérant que, eu égard à sa signification, le terme « med » est immédiatement perçu comme désignant des produits de nature et de destination médicales.

52      Or, la combinaison d’un vocable désignant une caractéristique des produits en cause, tel le terme « med », avec un ou plusieurs termes laudatifs, tel le terme « pro », n’a pas pour conséquence que la marque demandée, considérée dans son ensemble, représente davantage que la somme des éléments dont elle est composée [voir, en ce sens, arrêt du 20 novembre 2002, Bosch/OHMI (Kit Pro et Kit Super Pro), T‑79/01 et T‑86/01, EU:T:2002:279, points 29 et 30].

53      Ainsi, contrairement à ce que fait valoir la requérante, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu, aux points 45 et 46 de la décision attaquée, au caractère exclusivement promotionnel de la marque contestée, prise dans sa globalité.

54      De surcroît, à l’opposé de ce que fait valoir la requérante, tous les produits couverts par la marque contestée, y compris les produits mentionnés au point 36 ci-dessus, sont par nature destinés à des utilisations médicales ou, à tout au moins, susceptibles de faire l’objet de telles utilisations, à savoir des utilisations ayant pour objet soit d’informer sur l’état de la santé, indépendamment d’un diagnostic préalable de maladie, soit de faire partie d’une thérapie.

55      Il s’ensuit que les allégations de la requérante prises de ce que la chambre de recours aurait erronément défini le public pertinent en raison du caractère non médical des produits couverts par la marque contestée et aurait entaché sa décision d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation à ce sujet doivent également être écartées.

56      S’agissant de la référence à la décision de la chambre de recours du 25 janvier 2017 dans l’affaire R 1634/2016-4, concernant l’enregistrement de la marque promed sous le numéro 12885489 pour des produits et services relevant des classes 5, 7, 8, 9, 10, 11, 14, 16, 24, 41 et 44, il y a lieu de relever que, en tout état de cause, les décisions que les chambres de recours de l’EUIPO sont amenées à prendre concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité de ces décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement sur la marque de l’Union européenne, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’EUIPO [arrêt du 31 janvier 2019, DeepMind Technologies/EUIPO (STREAMS), T‑97/18, non publié, EU:T:2019:43, point 53].

57      Par conséquent, le fait que la marque contestée soit quasi-identique à une marque dont l’EUIPO a déjà accepté l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne, même si ce dernier s’est référé à des produits ou à des services identiques ou semblables à ceux couverts par la marque contestée, ne suffit pas, à lui seul, pour que le Tribunal annule la décision attaquée [voir ordonnance du 12 décembre 2013, Getty Images (US)/OHMI, C‑70/13 P, non publiée, EU:C:2013:875, point 45 et jurisprudence citée].

58      Il résulte de ce qui précède que le public pertinent percevra le contenu sémantique de la marque contestée comme fournissant des informations sur certaines caractéristiques des produits concernés et non comme indiquant l’origine commerciale de ceux-ci. Partant, la marque contestée est nécessairement dépourvue de caractère distinctif pour ces produits, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94.

59      Quant à l’argument pris de l’usage de la marque contestée depuis de longues années, qui exclurait la possibilité de la considérer comme dépourvue de caractère distinctif (voir point 35 ci-dessus), la requérante a précisé lors de l’audience que, par cet argument, elle n’entendait pas faire valoir une violation de l’article 59, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. Il s’ensuit que cet argument n’a pas de portée autonome et qu’il ne saurait remettre en cause les appréciations exposées aux points 45 à 56 ci-dessus.

60      Il y a donc lieu de rejeter le second moyen, tout comme le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

61      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Il s’ensuit que, si le recours est rejeté et la partie intervenante conclut à la condamnation de la requérante aux dépens, il incombe à cette dernière et non à l’EUIPO de supporter les dépens de l’intervenante. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens afférents à la présente procédure, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante. Par ailleurs, s’agissant des dépens exposés par l’intervenante devant la chambre de recours, il suffit de relever que, étant donné que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaqué, c’est le dispositif de celle-ci qui continue à régler les dépens en cause [voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2019, Lotte/EUIPO – Générale Biscuit-Glico France (PEPERO original), T‑459/18, non publié, EU:T:2019:119, point 194].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Promed GmbH kosmetische Erzeugnisse est condamnée aux dépens.

Costeira

Gratsias

Kancheva

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 décembre 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.