DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

3 octobre 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque figurative ad pepper – Usage sérieux de la marque – Article 18, paragraphe 1, sous a), et article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif  »

Dans l’affaire T‑666/18,

6Minutes Media GmbH, établie à Berlin (Allemagne), représentée par Mes P. Koch et T. Hilser, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. E. Markakis, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

ad pepper media International NV, établie à Nuremberg (Allemagne), représentée par Me S. Lux, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 20 juin 2018 (affaire R 839/2017-1), relative à une procédure de déchéance entre 6Minutes Media et ad pepper media International,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et R. da Silva Passos (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 novembre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 8 février 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 février 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 13 septembre 1999, l’intervenante, ad pepper media International NV, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 35, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        Classe 35 : « Services d’agences de publicité » ;

–        Classe 38 : « Services en ligne, à savoir compilation, mise à disposition et transmission d’informations, de textes, de dessins et d’images, mise à disposition d’informations sur Internet, prestation de services en rapport avec les services en ligne, à savoir transmission d’informations en tout genre, préparation/mise à disposition/location de possibilités d’accès à des réseaux numériques » ;

–        Classe 42 : « Préparation/mise à disposition/location de temps d’accès à des réseaux numériques, création de pages Web sur Internet pour le compte de tiers (hébergement), création de pages de réseaux (pages d’accueil), création de sites sur la toile mondiale pour le compte de tiers ».

4        Le 7 août 2000, la demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 62/2000. Le 26 janvier 2001, le signe reproduit au point 2 ci-dessus a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne, sous le numéro 1307966.

5        Le 3 décembre 2015, la requérante, 6Minutes Media GmbH, a présenté une demande de déchéance de cette marque en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001] auprès de l’EUIPO. Dans cette demande, la requérante a soutenu que la marque contestée n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pendant une période ininterrompue de cinq ans pour tous les services pour lesquels elle avait été enregistrée.

6        Par décision du 27 février 2017, la division d’annulation a déclaré l’intervenante déchue de l’intégralité de ses droits pour défaut d’usage sérieux, avec effet au 3 décembre 2015.

7        Le 26 avril 2017, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 20 juin 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a accueilli le recours introduit par l’intervenante dans son intégralité et, ainsi, a annulé la décision de la division d’annulation, rejeté la demande de déchéance de la marque contestée et condamné la requérante aux dépens afférents à la procédure devant l’EUIPO.

9        En premier lieu, la chambre de recours a considéré que l’intervenante devait apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée pour la période allant du 3 décembre 2010 au 2 décembre 2015 (ci-après la « période pertinente »).

10      En deuxième lieu, après avoir énoncé que la plupart des éléments de preuve de l’usage produits par l’intervenante relevaient de la période pertinente, ou portaient sur celle-ci, la chambre de recours a considéré qu’ils démontraient, examinés dans leur ensemble, un usage du signe qui différait de la forme sous laquelle la marque contestée avait été enregistrée, par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de celle-ci.

11      En troisième lieu, en ce qui concerne le lieu de l’usage, la chambre de recours a relevé que la marque contestée avait essentiellement fait l’objet d’un usage en Allemagne.

12      En quatrième lieu, s’agissant de la nature de l’usage, la chambre de recours a énoncé, d’une part, qu’un nom commercial pouvait également exercer, simultanément, une fonction de marque et, d’autre part, que l’usage de marques secondaires pour certains domaines d’activité ne faisait pas obstacle à l’usage simultané d’une marque ombrelle. À cet égard, la chambre de recours a exposé que la marque contestée n’était pas une dénomination commerciale, mais une marque ombrelle dont l’usage était étroitement lié aux services des marques secondaires pour les domaines d’activité concernés.

13      En cinquième lieu, la chambre de recours a considéré que, s’agissant de l’importance de l’usage, l’analyse globale des pièces produites par l’intervenante révélait que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage en lien avec des services du domaine du marketing en ligne, propre à assurer le maintien des droits pour tous les services litigieux relevant des classes 35, 38 et 42 mentionnés au point 3 ci‑dessus.

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens exposés par la requérante.

15      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré, en substance, de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 18, paragraphe 1, sous a), du même règlement. Le moyen unique s’articule en deux branches, tirées, respectivement, de l’altération du caractère distinctif de la marque contestée et de l’absence de preuve de l’usage sérieux de la marque contestée.

 Sur l’éventuelle altération du caractère distinctif de la marque contestée

 Observations liminaires

17      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il résulte du considérant 24 du règlement 2017/1001 que le législateur a considéré que la protection d’une marque antérieure n’était justifiée que dans la mesure où cette marque est effectivement utilisée. En conformité avec ce considérant, l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 dispose que le titulaire d’une marque de l’Union est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu’il n’existe pas de juste motif pour son non-usage.

18      Aux termes de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, la preuve de l’usage sérieux d’une marque comprend également la preuve de l’utilisation de celle-ci sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de cette marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée.

19      L’objet de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les modifications qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner des produits ou des services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [voir arrêts du 10 juin 2010, Atlas transport/OHMI – Hartmann (ATLAS TRANSPORT), T‑482/08, non publié, EU:T:2010:229, point 30 et jurisprudence citée, et du 12 mars 2014, Borrajo Canelo/OHMI – Tecnoazúcar (PALMA MULATA), T‑381/12, non publié, EU:T:2014:119, point 26 et jurisprudence citée].

20      En outre, le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert l’examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque (arrêt du 12 mars 2014, PALMA MULATA, T‑381/12, non publié, EU:T:2014:119, point 30).

21      À cet égard, il est de jurisprudence constante qu’aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises [arrêt du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI), T‑512/15, EU:T:2016:527, point 59 et jurisprudence citée ; voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2007, Neumann/OHMI (Forme d’une tête de microphone) T‑358/04, EU:T:2007:263, point 32].

22      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner la première branche du moyen unique, tirée d’un éventuel usage de la marque contestée dans une forme qui diffère par des éléments altérant son caractère distinctif. La requérante invoque, en substance, deux griefs, tirés de l’appréciation erronée par la chambre de recours, d’une part, des éléments verbaux de la marque contestée et, d’autre part, des ajouts et des modifications apportés à la marque contestée dans les signes utilisés.

 Sur les éléments verbaux de la marque contestée

23      En substance, la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir considéré que la présence, dans les signes utilisés par l’intervenante, des éléments verbaux « ad » et « pepper » de la marque contestée était suffisante pour écarter toute altération du caractère distinctif de cette dernière. La requérante ajoute que, en tout état de cause, ces éléments sont dotés d’un faible caractère distinctif et ne sont donc pas réellement déterminants dans l’impression d’ensemble produite par la marque contestée. Ce faible caractère distinctif proviendrait, d’une part, du caractère anodin du jeu de mots produit par les termes « ad pepper » et, d’autre part, du nombre important de marques comprenant l’élément verbal « pepper » dans le registre de l’EUIPO.

24      À cet égard, il convient de relever que, dans un premier temps, la chambre de recours a constaté que tant les signes utilisés par l’intervenante que la marque contestée telle qu’enregistrée se composaient de trois éléments fondamentaux qui concordaient largement, à savoir les éléments verbaux « ad » et « pepper » et l’élément figuratif constitué de trois piments rouges incurvés. Dans un second temps, la chambre de recours a examiné les éléments de différence dans les signes utilisés et a considéré que ces éléments n’étaient pas de nature à altérer le caractère distinctif de la marque contestée. La chambre de recours a ainsi conclu que les signes utilisés par l’intervenante et la marque contestée telle qu’enregistrée étaient globalement équivalents.

25      Dès lors, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la chambre de recours n’a, à aucun moment, considéré que la seule présence des éléments verbaux de la marque contestée, dans les signes utilisés par l’intervenante, était, à elle seule, de nature à établir un usage propre à assurer le maintien des droits de cette marque.

26      S’agissant du grief tiré du faible caractère distinctif des éléments verbaux « ad » et « pepper » de la marque contestée, qui résulterait d’un jeu de mots anodin produit par la lecture combinée de ces éléments, force est de constater qu’un tel grief repose sur une simple affirmation qui n’est pas étayée. Au surplus, un jeu de mots n’est, en principe, pas anodin, mais est susceptible de conférer un caractère original au signe considéré. Ainsi, à supposer que la combinaison des éléments « ad » et « pepper » constitue un jeu de mots, ce dernier serait de nature à renforcer le caractère distinctif de chacun d’entre eux.

27      Par ailleurs, s’agissant du caractère distinctif de l’élément verbal « pepper », mis en cause par la requérante, cette dernière se limite à soutenir qu’un tel caractère distinctif est affaibli par le fait qu’il existe plus de 245 enregistrements auprès de l’EUIPO concernant des marques qui comportent ce terme.

28      Or, selon la jurisprudence, le simple fait qu’il existe de tels enregistrements ne suffit pas pour affaiblir le caractère distinctif intrinsèque d’un élément, dès lors que ces enregistrements, à eux seuls, ne permettent pas d’établir dans quelle mesure le public pertinent est véritablement exposé à des marques contenant cet élément [voir arrêt du 14 septembre 2017, Aldi Einkauf/EUIPO – Weetabix (Alpenschmaus), T‑103/16, non publié, EU:T:2017:605, point 57 et jurisprudence citée]. En outre, comme le relève l’intervenante à juste titre, en faisant référence à de nombreuses autres marques enregistrées, la requérante ne tient pas compte du fait que, dans la grande majorité, celles-ci ne désignent pas les services en cause. Partant, le grand nombre d’enregistrements du terme « pepper » dans le registre de l’EUIPO ne s’oppose nullement au constat de son caractère distinctif au regard des services en cause.

29      En outre, d’une part, le terme anglais « pepper », qui peut se traduire par « piment » ou « poivre », ne présente aucun lien avec les services pour lesquels la marque contestée est enregistrée, qui relèvent du domaine du marketing en ligne. D’autre part, l’élément verbal « pepper » présente un caractère non usuel dans le domaine de ces services et revêt, en raison de son originalité, un caractère distinctif certain auprès du public pertinent, constitué de professionnels du secteur publicitaire, au sens de la jurisprudence rappelée au point 21 ci-dessus.

30      Au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, la requérante n’est pas parvenue à démontrer que la chambre de recours aurait commis une erreur dans son appréciation des éléments verbaux de la marque contestée. Le premier grief de la première branche du moyen unique doit donc être rejeté.

 Sur les ajouts et les modifications apportés à la marque contestée dans les signes utilisés

31      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que l’intervenante avait établi un usage de la marque contestée sous une forme qui ne différait pas par des éléments altérant son caractère distinctif.

32      La requérante conteste cette appréciation et fait valoir que l’usage des signes suivants altère le caractère distinctif de la marque contestée :

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33      À cet égard, la requérante prend appui, premièrement, sur l’ajout d’éléments verbaux et, deuxièmement, sur la forme modifiée des éléments verbaux et de l’élément figuratif constituant la marque contestée.

–       Sur l’éventuelle altération du caractère distinctif de la marque contestée par l’ajout d’éléments verbaux

34      Selon la requérante, le caractère distinctif de la marque contestée est « sensiblement altéré et affecté », dans les signes utilisés, en raison de l’ajout des éléments verbaux « germany », « digital pioneers since 1999 » et « the e-advertising network ». S’agissant plus particulièrement de ce dernier élément, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en examinant les termes « the advertising network » et non les termes « the e‑advertising network » (« le réseau de e-publicité »). Or, l’élément ajouté « the e‑advertising network » ne serait pas purement descriptif et générique, mais fantaisiste et distinctif.

35      Tout d’abord, s’agissant de l’ajout de l’élément verbal « germany », il convient de rappeler qu’une dénomination géographique est descriptive si elle est connue en tant que désignation d’un lieu, si elle présente actuellement, aux yeux des milieux intéressés, un lien avec la catégorie de produits ou de services concernés ou s’il est raisonnable d’envisager qu’un tel nom puisse, aux yeux de ce public, désigner la provenance géographique de ladite catégorie de produits ou de services [voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2016, Niagara Bottling/EUIPO (NIAGARA), T‑89/15, non publié, EU:T:2016:244, point 19 et jurisprudence citée].

36      En l’espèce, l’élément verbal « germany » renvoie au pays du même nom. Cet élément est perçu immédiatement et sans autre réflexion comme une description de l’origine géographique des services en cause ou du lieu d’établissement de la société qui fournit ces derniers. Ainsi, cet élément doit être considéré comme purement descriptif et, dès lors, dépourvu de caractère distinctif.

37      Ensuite, en ce qui concerne l’ajout de l’élément verbal additionnel « the e‑advertising network » (« le réseau de e-publicité »), il convient de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que cet élément est descriptif, à la fois de l’entreprise et des services publicitaires en ligne couverts par la marque contestée, et donc dépourvu de caractère distinctif. La même constatation vaut pour l’élément verbal « digital pioneers since 1999 » (« pionniers du numérique depuis 1999 »). En effet, lors de l’appréciation du caractère distinctif d’une marque ou d’un élément composant une marque, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de la marque ou de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celle-ci ou celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [arrêt du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 35 ; voir également, en ce sens, arrêt du 3 avril 2019, NSC Holding/EUIPO – Ibercondor (CONDOR SERVICE, NSC), T‑468/18, non publié, EU:T:2019:214, point 42 et jurisprudence citée].

38      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a erronément pris en compte la mention « the advertising network » à la place des termes « the e‑advertising network », force est de constater qu’il ne s’agit ici que d’une erreur de plume sans incidence sur la validité de raisonnement suivi par la chambre de recours. En tout état de cause, la lettre « e » ajoutée demeure, en l’espèce, descriptive des services en ce que cette lettre désigne plus précisément le domaine des services en ligne, de sorte que son éventuelle absence de prise en considération ne serait pas de nature à infirmer les conclusions de la chambre de recours et ne saurait avoir de conséquence sur la légalité de la décision attaquée.

39      Enfin, en application de la jurisprudence rappelée au point 20 ci-dessus, il importe de relever, à l’instar de la chambre de recours, que les éléments verbaux ajoutés occupent tous une position accessoire dans la configuration d’ensemble des signes utilisés par l’intervenante. En effet, d’une part, ces éléments apparaissent en dessous des éléments verbaux « ad » et « pepper » de la marque contestée et de l’élément figuratif de cette dernière constitué de trois piments rouges incurvés. D’autre part, les éléments verbaux ajoutés sont d’une taille beaucoup plus petite que celle des trois éléments constituant la marque contestée telle qu’enregistrée.

40      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que l’insertion de ces éléments verbaux descriptifs et accessoires a pour conséquence que les signes utilisés par l’intervenante dans le commerce diffèrent de la forme sous laquelle la marque contestée a été enregistrée uniquement par des éléments négligeables. Ces derniers ne sont dès lors pas de nature à altérer le caractère distinctif de la marque contestée, conformément à la jurisprudence rappelée au point 19 ci-dessus.

41      Une telle conclusion est corroborée par le caractère uniquement ponctuel et non systématique de l’ajout de ces éléments verbaux au sein des éléments de preuve produits. En effet, le fait qu’une marque enregistrée soit utilisée parfois avec et parfois sans éléments supplémentaires peut constituer un des critères permettant de déduire que le caractère distinctif n’est pas altéré (voir, en ce sens, arrêt du 10 juin 2010, ATLAS TRANSPORT, T‑482/08, non publié, EU:T:2010:229, point 36 et jurisprudence citée).

–       Sur l’éventuelle altération du caractère distinctif de la marque contestée par la modification graphique de ses éléments verbaux et de son élément figuratif

42      Selon la requérante, les différences entre la marque contestée et les signes utilisés, en ce qui concerne la disposition des lignes de texte, la police de caractères et le formatage des éléments verbaux, la représentation de l’élément figuratif et les couleurs utilisées sont des variations importantes qui, considérées individuellement ou prises dans leur ensemble, excluent un usage de la marque enregistrée propre à assurer le maintien des droits de l’intervenante.

43      Tout d’abord, s’agissant des modifications dans les lignes de texte, dans la police de caractères et dans le formatage des éléments verbaux, la requérante relève que l’analyse des signes utilisés par l’intervenante fait apparaître, principalement, les changements suivants : (i) un déplacement de l’élément « pepper » sur la première ligne aux côtés des deux autres éléments ; (ii) l’absence de traits inclinés ; (iii) une orientation plus verticale ; (iv) une épaisseur moindre des caractères ; et (v) des surfaces intérieures de caractères plus verticales et moins rondes.

44      À cet égard, il convient, à l’instar de la chambre de recours, de considérer que de telles modifications des polices d’écriture choisies pour les éléments verbaux « ad » et « pepper » ne diffèrent que de façon négligeable de celles de la marque enregistrée. En effet, l’impression d’ensemble n’étant pas modifiée par ces changements stylistiques et visuels mineurs, il y a lieu de considérer que le public pertinent reste susceptible d’appréhender les éléments verbaux des signes utilisés par l’intervenante comme identiques à ceux de la marque contestée telle qu’enregistrée. En outre, le déplacement de l’élément verbal « pepper » n’a pas pour conséquence de modifier l’ordre de lecture des éléments « ad » et « pepper » par rapport à la marque contestée telle qu’enregistrée.

45      Ensuite, la requérante tire argument du remplacement des couleurs grise et noire des éléments « ad » et « pepper » et de la couleur rouge de l’élément figuratif constitué de trois piments, lesdits éléments apparaissant soit en gris, soit en rouge, soit en blanc.

46      Toutefois, l’utilisation de ces couleurs basiques n’est pas particulièrement originale, en sorte que ces dernières ne sont ni distinctives ni dominantes et ne permettent pas de considérer que la marque telle qu’enregistrée a été, de ce fait, altérée [voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2016, hyphen/EUIPO – Skylotec (Représentation d’un polygone), T‑146/15, EU:T:2016:469, point 54 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, il convient de relever la constance de la couleur rouge au sein de chacun des signes utilisés par l’intervenante ainsi que dans la marque contestée.

47      Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de la modification de l’élément figuratif, entouré d’un cercle dans les signes utilisés par l’intervenante, il convient de constater que la forme ajoutée, à savoir le cercle, constitue l’une des formes les plus simples et les plus courantes et relève des figures géométriques de base et, pour cette raison, est dénuée de caractère distinctif (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2016, Représentation d’un polygone, T‑146/15, EU:T:2016:469, point 45). Cette conclusion n’est d’ailleurs pas remise en cause par la position de cette forme dans les signes utilisés par l’intervenante. Il s’ensuit que l’ajout d’un cercle présente un caractère purement ornemental, qui n’altère pas le caractère distinctif de la marque contestée. Cette conclusion est confortée par le fait que, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, la forme des piments concorde dans les signes utilisés par l’intervenante et dans la marque contestée telle qu’enregistrée.

48      Partant, toutes les modifications apportées aux éléments constituant la marque contestée sont négligeables.

49      Au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que, en dépit des ajouts et des modifications apportés à la marque contestée, les signes utilisés par l’intervenante pouvaient être considérés comme globalement équivalents à cette marque, si bien que les preuves de l’usage correspondantes constituaient des preuves de l’usage de ladite marque. Le second grief de la première branche du moyen unique doit donc être rejeté.

50      Aucun des griefs avancés à l’appui de la première branche du moyen unique n’ayant prospéré, cette dernière doit également être rejetée.

 Sur la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée pour les services pertinents

51      Par la seconde branche de son moyen unique, la requérante soutient que la chambre de recours a méconnu l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 lorsque cette dernière a considéré que les pièces versées au dossier par l’intervenante permettaient de prouver l’usage sérieux de la marque contestée pour les services pertinents.

 Observations liminaires

52      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’en vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), applicable aux procédures de déchéance en vertu de l’article 19, paragraphe 1, du même règlement, la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite, en principe, à la production de pièces justificatives, comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001 [voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 37, et du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 27].

53      Dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 32 et jurisprudence citée, et du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER), T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 53 et jurisprudence citée].

54      Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits et des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir arrêt du 27 septembre 2007, LA MER, T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 54 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 39 ; voir, également, arrêt du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 26 et jurisprudence citée].

55      Plus précisément, pour examiner, dans un cas concret, le caractère sérieux de l’usage de la marque en cause, il convient de réaliser une appréciation globale des éléments versés au dossier, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Une telle appréciation doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits et des services visés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [voir arrêts du 10 septembre 2008, CAPIO, T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 30 et jurisprudence citée, et du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, point 27 et jurisprudence citée]. Ainsi, un faible volume de produits ou de services commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement (voir arrêt du 15 septembre 2011, CENTROTHERM, T‑427/09, EU:T:2011:480, point 28 et jurisprudence citée). En outre, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque antérieure ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être par rapport à d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, la Cour a précisé qu’il n’était pas nécessaire que l’usage de la marque antérieure soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux. Un usage même minime peut donc être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou services protégés par la marque (arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 39, et ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 21).

56      En outre, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêts du 23 septembre 2009, Cohausz/OHMI – Izquierdo Faces (acopat), T‑409/07, non publié, EU:T:2009:354, point 36 et jurisprudence citée ; du 16 juin 2015, Polytetra/OHMI – EI du Pont de Nemours (POLYTETRAFLON), T‑660/11, EU:T:2015:387, point 47 et jurisprudence citée, et du 9 septembre 2015, Inditex/OHMI – Ansell (ZARA), T‑584/14, non publié, EU:T:2015:604, point 19 et jurisprudence citée]. Dès lors, il convient de procéder à une appréciation globale qui tient compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et qui implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [arrêts du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 18 janvier 2011, Advance Magazine Publishers/OHMI – Capela & Irmãos (VOGUE), T‑382/08, non publié, EU:T:2011:9, point 30].

57      Par ailleurs, l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 n’exige pas un usage continu et ininterrompu de la marque contestée pendant la période pertinente, mais uniquement un usage sérieux au cours de celle-ci [voir arrêt du 5 octobre 2017, Versace 19.69 Abbigliamento Sportivo/EUIPO – Gianni Versace (VERSACCINO), T‑337/16, non publié, EU:T:2017:692, point 51 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, points 40 et 41].

58      C’est à l’aune de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, dans la décision attaquée, que les documents produits par l’intervenante dans le cadre de la procédure de déchéance démontraient, s’agissant des services en cause, un usage sérieux de la marque contestée propre à assurer le maintien des droits durant la période pertinente.

59      Aux fins d’examiner le caractère sérieux de l’usage de la marque contestée, la chambre de recours a mentionné les éléments de preuve suivants produits par l’intervenante, tels qu’ils sont décrits au point 4 de la décision attaquée :

–        aperçu de la modification du signe « ad pepper », utilisé par l’intervenante, au cours de la période allant de 2002 à 2014 (élément de preuve no 1) ;

–        copies de deux enregistrements du registre allemand des marques, avec extraits de contenus Internet d’entreprises concurrentes du domaine du marketing en ligne (éléments de preuve nos 2 et 3) ;

–        mémoire de l’intervenante du 12 septembre 2016 dans la procédure de nullité devant le Landgericht Nuremberg‑Fürth (tribunal régional de Nuremberg Fürth, Allemagne) (élément de preuve no 4) ;

–        extrait du site Internet de l’intervenante « www.adpepper.com », daté selon la décision attaquée et selon la requérante de 2016 (ci-après l’« extrait du site Internet “www.adpepper.com” de 2016 ») (élément de preuve no 5) ;

–        déclaration sous serment de Mme H., PDG de l’intervenante, d’après laquelle la marque a été utilisée pour tous les services, datée du 24 mars 2016 (élément de preuve no 6) ;

–        copie d’un prospectus publicitaire de l’intervenante, non datée (élément de preuve no 7) ;

–        extraits de présentations de l’intervenante, datant des années 2014/2015 et 2012 (éléments de preuve nos 8 et 9) ;

–        rapports d’activité du groupe d’entreprises « ad pepper media group », des années 2013 et 2014 (éléments de preuve nos 10 et 11) ;

–        photographies d’un stand à l’exposition Dmexco de 2012 (élément de preuve no 12) ;

–        copie d’une image de l’exposition sur le marketing en ligne, non datée (élément de preuve no 13) ;

–        captures d’écran de pages du site Internet du groupe d’entreprises : « www.adpeppergroup.com » ainsi que « www.adpepper.de », datées selon la décision attaquée et selon la requérante du 15 mars 2016 (ci-après les « captures d’écran du 15 mars 2016 ») (élément de preuve no 14) ;

–        carte de Noël de 2014 ainsi que cartes de visite non datées (élément de preuve no 15) ;

–        copies de huit factures adressées à différents clients en Allemagne, de 2012 à 2015 (élément de preuve no 16) ;

–        déclaration sous serment de M. P., « Director Controlling & Human Ressources » de l’intervenante, du 27 septembre 2016 (élément de preuve no 17) ;

–        confirmation de commande de l’intervenante du 7 juillet 2016, concernant différents services (élément de preuve no 18).

60      À l’appui de la seconde branche de son moyen unique, la requérante invoque, en substance, la faible valeur probante des éléments de preuve eu égard, premièrement, à la période pertinente, deuxièmement, à la nature de l’usage de la marque contestée et, troisièmement, à l’importance dudit usage.

 Sur les éléments de preuve de l’usage de la marque contestée pris en compte par la chambre de recours

61      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la période pertinente, durant laquelle l’intervenante devait établir que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sérieux, s’étend du 3 décembre 2010 au 2 décembre 2015.

62      La requérante fait valoir que la chambre de recours a méconnu l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, en fondant sa décision sur des preuves d’usage produites par l’intervenante qui ne se rapportaient pas à la période pertinente ou qui ne permettaient pas de déterminer le moment de l’usage.

63      En premier lieu, s’agissant de la prise en compte d’éléments de preuve de l’usage postérieurs à la période pertinente, la requérante soutient que les actes d’usage de l’intervenante, considérés comme établis ou non contestés, mais intervenus postérieurement au 2 décembre 2015, n’auraient pas dû être pris en considération par la chambre de recours. Plus particulièrement, la requérante vise les éléments de preuve suivants : un extrait du site Internet « www.adpepper.com » de 2016 (élément de preuve no 5), des captures d’écran du 15 mars 2016 (élément de preuve no 14) et des documents relatifs à une commande du 7 juillet 2016 (élément de preuve no 18).

64      En second lieu, s’agissant de la prise en compte d’éléments de preuve de l’usage non datés, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû écarter certains éléments produits par l’intervenante dont la date ne peut être établie avec certitude. Sur ce point, la requérante vise un prospectus publicitaire (élément de preuve no 7), un extrait d’une présentation de l’intervenante (élément de preuve no 8) et des cartes de visite (élément de preuve no 15).

65      Premièrement, il est vrai que les éléments de preuve contestés, énoncés au point 63 ci-dessus, portent une date située en dehors de la période pertinente, plus précisément l’année 2016. Il n’est toutefois pas exclu, selon la jurisprudence, que l’appréciation du caractère sérieux de l’usage d’une marque au cours de la période pertinente puisse, le cas échéant, tenir compte d’éventuels éléments postérieurs à cette période, qui peuvent permettre de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’utilisation de ladite marque au cours de la période pertinente [voir arrêt du 28 février 2019, Lotte/EUIPO – Générale Biscuit-Glico France (PEPERO original), T‑459/18, non publié, EU:T:2019:119, point 63 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, ordonnances du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 31, et du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, point 41].

66      À cet égard, d’une part, la chambre de recours a constaté à juste titre que, en l’espèce, la majorité des éléments de preuve relevaient de la période pertinente et se référaient à celle-ci. Cela ressort des éléments de preuve qu’elle a énumérés au point 4 de la décision attaquée et, notamment, d’un extrait d’une présentation de l’intervenante de 2012 (élément de preuve no 9), des rapports d’activité du groupe d’entreprises « ad pepper media group » de 2013 et 2014 (éléments de preuve nos 10 et 11), d’une carte de Noël de 2014 (élément de preuve no 15) et des copies de huit factures adressées à différents clients en Allemagne en 2012 et 2015 (élément de preuve no 16).

67      D’autre part, l’extrait du site Internet « www.adpepper.com » de 2016, les captures d’écran du 15 mars 2016 et les documents relatifs à la commande du 7 juillet 2016 permettent d’appuyer les éléments de preuve non contestés par la requérante mentionnés au point 66 ci‑dessus, en particulier les éléments de preuve non contestés nos 9, 15 et 16. Ces documents, même s’ils sont datés de 2016, apportent des précisions sur l’identité des clients et la nature des services publicitaires offerts, susceptibles d’être, respectivement, les destinataires et l’objet des autres documents fournis par l’intervenante relevant de la période pertinente, en particulier les éléments de preuve non contestés nos 9, 15 et 16. Dans ces conditions, il y a lieu de constater la pertinence des éléments de preuve contestés visés au point 63 ci‑dessus, aux fins d’apprécier l’usage sérieux de la marque contestée au regard des éléments de preuve qu’ils corroborent relevant de la période pertinente et, en particulier, au regard des copies de huit factures adressées à différents clients en Allemagne (élément de preuve no 16).

68      Deuxièmement, s’agissant des autres éléments de preuve mentionnés au point 64 ci-dessus et dont la date serait incertaine, il ressort de la jurisprudence que, dans le cadre de l’appréciation de la preuve de l’usage sérieux d’une marque, l’article 10 du règlement délégué 2018/625 n’indique pas que chaque élément de preuve doit nécessairement contenir des informations sur chacun des quatre éléments sur lesquels doit porter la preuve de l’usage sérieux, à savoir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage [arrêt du 16 novembre 2011, Buffalo Milke Automotive Polishing Products/OHMI – Werner & Mertz (BUFFALO MILKE Automotive Polishing Products), T‑308/06, EU:T:2011:675, point 61].

69      En effet, un faisceau d’éléments de preuve peut permettre d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits (arrêt du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, non publié, EU:C:2008:234, point 36 ; voir, également, arrêt du 16 juin 2015, POLYTETRAFLON, T‑660/11, EU:T:2015:387, point 94 et jurisprudence citée). Ainsi, bien que la valeur probante d’un élément de preuve soit limitée dans la mesure où, pris isolément, il ne démontre pas avec certitude si, et comment, les produits ou les services concernés ont été placés sur le marché, et bien que cet élément ne soit, dès lors, pas décisif à lui seul, il peut néanmoins être pris en compte, dans l’appréciation du caractère sérieux de l’usage. Il en va ainsi, par exemple, lorsque cet élément corrobore les autres facteurs pertinents du cas d’espèce [voir, en ce sens, arrêts du 6 mars 2014, Anapurna/OHMI – Annapurna (ANNAPURNA), T‑71/13, non publié, EU:T:2014:105, point 45, et du 23 septembre 2015, L’Oréal/OHMI – Cosmética Cabinas (AINHOA), T‑426/13, non publié, EU:T:2015:669, point 53].

70      En l’espèce, la copie du prospectus publicitaire (élément de preuve no 7) apporte des précisions quant aux différents services facturés, lesquels se retrouvent au sein des extraits de présentations de l’intervenante (élément de preuve no 9) et au sein des factures établies au cours de la période pertinente (élément de preuve no 16). Dès lors, bien que la copie du prospectus ne soit pas datée, elle permet de corroborer d’autres éléments de preuve relevant de la période pertinente.

71      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel un modèle de présentation (élément de preuve no 8) n’est pas daté et doit être écarté comme tel, celui-ci manque en fait. En effet, la date de ce modèle de présentation, à savoir l’année 2014, figure de manière effective sur la page 20 dudit document. Ainsi, le document porte une date certaine qui est comprise dans la période pertinente.

72      Quant aux cartes de visite (élément de preuve no 15), il convient de relever qu’elles ne sont pas explicitement mentionnées dans les motifs de la décision attaquée et qu’il ne ressort pas clairement de ladite décision qu’elles aient été prises en compte par la chambre de recours pour fonder son appréciation de l’usage de la marque contestée. En tout état de cause, cet élément de preuve, généralement non daté, montre un usage externe à destination de la clientèle de l’intervenante, et représente la marque contestée dans une configuration graphique sensiblement identique à celle présente sur de nombreuses factures qui n’ont pas été contestées par la requérante et qui relèvent de la période pertinente (élément de preuve no 16).

73      Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en compte les éléments de preuve visés aux points 63 et 64 ci-dessus. Le grief exposé au point 62 ci-dessus n’est donc pas fondé et doit être rejeté.

74      C’est donc au regard des éléments datés de la période pertinente et des éléments de preuve non datés ou postérieurs à la période pertinente, et explicitement mentionnés dans la décision attaquée, qu’il convient d’examiner, tout en tenant compte de leur valeur probante respective, l’argumentation de la requérante tendant à mettre en cause l’appréciation de la chambre de recours relative à la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée.

 Sur la nature de l’usage

75      La requérante estime que l’intervenante n’a pas démontré que la marque contestée avait été utilisée dans la vie des affaires pour les services visés au point 3 ci-dessus et, ainsi, fait l’objet d’un usage propre à assurer le maintien des droits, de sorte que les éléments de preuve soumis par l’intervenante ne rempliraient pas les exigences relatives à « la nature de l’usage » au sens de l’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué 2018/625.

76      La requérante fait valoir que le signe « ad pepper » est utilisé uniquement en sa seule qualité de dénomination commerciale et ne peut remplir, simultanément, une fonction de marque, contrairement à ce qu’affirme la chambre de recours. Toujours selon la requérante, l’utilisation simultanée de plusieurs marques, en tant que marque ombrelle et marque secondaire, n’est propre à assurer le maintien des droits attachés à ces marques que si chaque marque est utilisée comme telle et désigne l’origine commerciale des services. En outre, l’utilisation d’une dénomination commerciale en tant que marque exige que le public établisse un lien entre la dénomination commerciale et les services fournis. Or, selon la requérante, tel ne serait pas le cas en l’espèce. En effet, l’utilisation apparente des marques enregistrées iLead, iSense, iClick et mailpepper, additionnelle à celle de la dénomination commerciale « ad pepper », démontrerait au contraire que le signe « ad pepper » est utilisé uniquement en tant que dénomination commerciale.

77      La requérante estime encore que la seule circonstance que, dans huit factures fournies par l’intervenante (élément de preuve no 16), une variante de la marque contestée soit représentée à côté du nom de l’entreprise n’implique pas que le public établisse un lien entre la dénomination commerciale et les services en cause. Plus particulièrement, compte tenu de la désignation, dans ces factures, des services au moyen des marques iSense et iLead, l’usage du signe « ad pepper » ne saurait constituer, pour le public pertinent, une indication supplémentaire des services proposés.

78      S’agissant de l’usage d’un signe à la fois comme une dénomination commerciale et en tant que marque, la Cour a jugé qu’une dénomination sociale, un nom commercial ou une enseigne n’a pas, en soi, pour finalité de distinguer des produits ou des services. En effet, une dénomination sociale a pour objet d’identifier une société, tandis qu’un nom commercial ou une enseigne a pour objet de signaler un fonds de commerce. Dès lors, lorsque l’usage d’une dénomination sociale, d’un nom commercial ou d’une enseigne se limite à identifier une société ou à signaler un fonds de commerce, il ne saurait être considéré comme étant fait « pour des produits ou des services » [voir arrêts du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, EU:C:2007:497, point 21 et jurisprudence citée, et du 8 mai 2017, Les Éclaires/EUIPO – L’éclaireur International (L’ECLAIREUR), T‑680/15, non publié, EU:T:2017:320, point 34 et jurisprudence citée].

79      En revanche, il y a usage « pour des produits » lorsque le titulaire de la marque appose le signe constituant sa dénomination sociale, son nom commercial ou son enseigne sur les produits qu’il commercialise. En outre, même en l’absence d’apposition, il y a usage « pour des produits ou des services » lorsque le signe est utilisé de telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne et les produits commercialisés ou les services fournis (voir arrêt du 8 mai 2017, L’ECLAIREUR, T‑680/15, non publié, EU:T:2017:320, point 35 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, EU:C:2007:497, points 22 et 23). Dans la mesure où cette condition est remplie, le fait qu’un élément verbal soit utilisé en tant que nom commercial de l’entreprise n’exclut pas qu’il puisse être utilisé en tant que marque pour désigner des produits ou des services [voir arrêt du 30 novembre 2009, Esber/OHMI – Coloris Global Coloring Concept (COLORIS), T‑353/07, non publié, EU:T:2009:475, point 38 et jurisprudence citée ; arrêt du 18 juillet 2017, Savant Systems/EUIPO – Savant Group (SAVANT), T‑110/16, non publié, EU:T:2017:521, point 26].

80      Par ailleurs, l’usage effectif d’une marque se rapporte au marché sur lequel le titulaire de la marque de l’Union européenne exerce ses activités commerciales et sur lequel il espère exploiter sa marque. Ainsi, aux fins de l’appréciation de l’usage vers l’extérieur d’une marque, le public pertinent auquel les marques ont vocation à s’adresser ne comprend pas uniquement les consommateurs finaux, mais également des spécialistes, des clients industriels et d’autres utilisateurs professionnels [voir, en ce sens, arrêt du 7 juillet 2016, Fruit of the Loom/EUIPO – Takko (FRUIT), T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 49 et jurisprudence citée].

81      En l’espèce, tout d’abord, l’analyse des huit factures produites par l’intervenante révèle que le public pertinent était une clientèle constituée de professionnels du secteur publicitaire, c’est-à-dire un public éclairé plus facilement à même d’établir un lien entre les signes utilisés et les services fournis par l’intervenante. De plus, le détail des différents services commercialisés était largement diffusé auprès de ce public pertinent, ce qui ressort notamment du prospectus publicitaire (élément de preuve no 7), des présentations de l’entreprise par la titulaire de la marque, datant des années 2014/2015 et 2012 (éléments de preuve nos 8 et 9), des rapports d’activité du groupe d’entreprises « ad pepper media group », des années 2013 et 2014 (éléments de preuve nos 10 et 11) et, enfin, de la confirmation de commande du 7 juillet 2016 (élément de preuve no 18). De surcroît, il convient de relever que chaque facture produite contient la marque contestée ainsi que l’adresse du site Internet et l’adresse électronique de contact dans lesquelles apparaît également la marque contestée.

82      Ensuite, ainsi que l’a constaté la chambre de recours et comme le fait valoir l’EUIPO, la configuration visuelle des factures souligne la mise en valeur de la marque contestée, par son apposition systématique en en-tête, comme premier élément au-dessus de la mention de la dénomination sociale « ad pepper media GmbH ». Les marques secondaires, notamment iSense, ilead ou iClick, ou le détail des services commercialisés figurent, quant à eux, en face du prix facturé. Comme l’a relevé en substance la chambre de recours, une telle configuration confirme que l’utilisation qui est faite du signe « ad pepper » va au-delà de la seule identification de la société et indique en sus, en tant que marque, l’origine commerciale des services fournis. La configuration des factures est donc de nature à permettre l’établissement d’un lien étroit entre le signe « ad pepper » et les services facturés.

83      Ainsi, la chambre de recours a retenu à juste titre qu’une telle utilisation du signe précité, dans les circonstances de l’espèce, créait un lien additionnel entre la marque contestée et les services en cause, conformément à la jurisprudence rappelée au point 79 ci-dessus.

84      Il s’ensuit que l’utilisation simultanée de plusieurs marques reste en l’espèce propre à assurer le maintien des droits de ces marques. À cet égard, il convient de relever que la marque contestée est une marque désignant une gamme de services relevant des classes 35, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice et visés au point 3 ci-dessus. La présence des marques iSense, mailpepper, iClick et iLead, qui ne désignent, quant à elles, qu’un champ plus restreint de services, n’est en aucune manière de nature à empêcher ou à altérer l’identification, par le public pertinent, de la gamme de services rattachée à la marque contestée, laquelle n’occupe une place ni accessoire, ni négligeable dans les éléments de preuve produits.

85      Enfin, pour des raisons analogues à celles exposées aux points 65 à 67 ci-dessus, il convient d’écarter, comme non fondé, l’argument de la requérante selon lequel la facture du 10 décembre 2015, incluse dans l’élément de preuve no 16, ne pouvait être prise en compte au stade de l’analyse de la nature de l’usage, en raison de sa date postérieure à la période pertinente. À cet égard, la facture du 10 décembre 2015 corrobore les autres factures constitutives de l’élément de preuve no 16 relevant de la période pertinente.

86      Dans ces conditions, c’est à bon droit que la chambre de recours a, en ce qui concerne la nature de l’usage, considéré que le signe « ad pepper » avait été utilisé en tant que marque en lien avec les services visés au point 3 ci‑dessus. Il résulte de ce qui précède que le grief exposé au point 75 ci-dessus n’est pas fondé et doit donc être rejeté.

 Sur l’importance de l’usage

87      La requérante émet des doutes quant à la pertinence et à la valeur probante de deux déclarations sous serment que la chambre de recours a prises en compte au titre de l’analyse de l’importance de l’usage de la marque contestée, du 24 mars 2016 et du 27 septembre 2016, écrites respectivement par la gérante et par le contrôleur de gestion et directeur des ressources humaines de l’intervenante (éléments de preuve nos 6 et 17). Ces déclarations n’émaneraient pas de tiers indépendants et ne seraient pas corroborées par des éléments de preuve démontrant un usage relevant de la période pertinente et des services en cause.

88      Premièrement, en ce qui concerne la valeur probante des déclarations, une déclaration sous serment constitue un élément de preuve recevable au sens de l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001. Selon une jurisprudence constante, il convient, pour apprécier la valeur probante d’un document, de vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui y est contenue. Il faut tenir compte, notamment de l’origine du document, des circonstances de son élaboration et de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir arrêt du 8 mai 2017, L’ECLAIREUR, T‑680/15, non publié, EU:T:2017:320, point 72 et jurisprudence citée).

89      Il s’ensuit que, en l’espèce, les déclarations en cause tenant lieu de serment ne sauraient être considérées comme dénuées de valeur probante pour la seule raison qu’elles n’émanent pas de tiers, mais de personnes ayant des liens étroits avec l’intervenante, ou en raison du fait que, datant de 2016, elles sont postérieures à la période pertinente.

90      Deuxièmement, si les deux déclarations ne sauraient à elles seules constituer une preuve suffisante de l’usage sérieux de la marque contestée qu’elles mentionnent, il n’en demeure pas moins qu’elles constituent des indices d’usage corroborés par d’autres éléments probants, sans que ni l’impartialité ni la crédibilité de celles-ci ne doivent être mises en cause.

91      En effet, la première déclaration fait état de 20 000 campagnes publicitaires dans l’ensemble des États membres de l’Union, des chiffres d’affaires annuels pour la période de 2002 à 2014 et, de manière complémentaire à la seconde déclaration, de la nature des services fournis par l’intervenante sous la marque contestée dans le domaine du marketing en ligne, à savoir la génération de prospects, bannières publicitaires et marketing par courriel électronique. D’une part, ces informations sont confirmées par les extraits des rapports d’activité de l’intervenante pour les années 2013 et 2014 (éléments de preuve nos 10 et 11), les copies de huit factures adressées à différents clients en Allemagne (élément de preuve no 16), les captures d’écran du 15 mars 2016 (élément de preuve no 14), l’extrait du site Internet « www.adpepper.com » de 2016 (élément de preuve no 5) et la confirmation de commande du 7 juillet 2016 (élément de preuve no 18).

92      D’autre part, les copies de huit factures (élément de preuve no 16) font état de services commercialisés de 2012 à 2015 pour des montants allant de 79,22 euros à 58 540,86 euros, auprès de cinq clients différents, ce qui montre que l’usage de la marque contestée s’est fait publiquement et vers l’extérieur. Partant, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours, ces factures rendent crédibles les informations contenues dans ces déclarations sous serment et relatives à la nature et à l’étendue de l’usage sérieux de la marque contestée.

93      Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé que les deux déclarations en cause pouvaient être prises en compte au titre de l’analyse globale des pièces produites, en tant qu’éléments de preuve utiles à la démonstration de l’usage sérieux de la marque contestée.

94      Troisièmement, pour les raisons exposées aux points 65 à 67 ci‑dessus, il convient d’écarter, comme non fondé, l’argument de la requérante selon lequel la date de certains éléments de preuve démontre un usage en dehors de la période pertinente.

95      Quatrièmement, en ce qui concerne le champ matériel des déclarations et l’étendue de l’usage, la requérante fait valoir que les éléments de preuve produits par l’intervenante ne permettent pas d’apporter la preuve d’un lien spécifique entre l’usage de la marque contestée et les services relevant des classes 35, 38 et 42.

96      À ce sujet, la chambre de recours a relevé, à partir les éléments de preuve nos 6, 10, 11 et 17, à savoir les deux déclarations sous serment et les rapports d’activité du groupe d’entreprises des années 2013 et 2014, que l’intervenante proposait, sous la marque contestée, les services, en rapport avec le marketing en ligne, de prestations d’affichage publicitaire classique, de « génération de prospects » sous la dénomination « iLead », de ciblage sémantique sous la dénomination « iSense », de bannières publicitaires sous la dénomination « iClick » et de marketing par courriels sous les dénominations « mailpepper » et « newsletter ».

97      Par ailleurs, la chambre de recours a noté de manière détaillée que les copies des huit factures produites par l’intervenante (élément de preuve no 16) confirmaient la commercialisation de ces services sous les termes « ciblage IP », « format publicitaire standard combiné », « ciblage DE », « génération de demandes de devis » et « iClick ». La chambre de recours a également remarqué que l’extrait du site Internet « www.adpepper.com » de 2016 (élément de preuve no 5) et la confirmation de commande du 7 juillet 2016 (élément de preuve no 18) donnaient pareillement des informations détaillées sur les services fournis.

98      En outre, il ressort des éléments de preuve fournis par l’intervenante, et notamment des copies de factures des 22 mai et 23 juillet 2012 et du 15 juillet 2015 (élément de preuve no 16), de la copie d’un prospectus publicitaire (élément de preuve no 7), et d’une présentation de l’intervenante de l’année 2014 (élément de preuve no 8), que l’intervenante commercialise des prestations de conception et de structuration de base de sites Internet et d’installation de pages d’accueil, sous les termes « landing page » et « display marketing » et les dénominations « iSense » et « mailpepper ».

99      Dans ce contexte et au vu de ces constatations, tout d’abord, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’ensemble des éléments produits par l’intervenante démontrait un usage de la marque contestée en lien avec des services du domaine du marketing en ligne, lesquels incluent le « service d’agence de publicité » compris dans la classe 35 et les prestations de ciblage qui s’y rattachent. Ensuite, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la chambre de recours a valablement relevé que la préparation et la transmission de messages publicitaires sur Internet, par courriers électroniques ou bannières publicitaires, en lien avec des campagnes publicitaires autres que téléphoniques ou par radio relevaient des « services en ligne » de la classe 38. Enfin, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que les services de création de sites Internet et de configuration de pages de réseaux, proposés sous la marque contestée, relevaient de la classe 42.

100    Par conséquent, il n’y a pas lieu de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle les documents portant sur l’usage de la marque contestée couvrent l’ensemble des services pertinents que cette marque désigne et selon laquelle l’analyse globale de ces pièces démontre que la marque contestée a fait l’objet d’un usage propre à assurer le maintien des droits pour tous les services litigieux. Il s’ensuit que le grief exposé au point 87 ci-dessus n’est pas fondé et doit être écarté.

101    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que les arguments avancés par la requérante dans la seconde branche de son moyen unique et relatifs à l’usage de la marque contestée doivent être rejetés.

102    Dès lors, le moyen unique soulevé par la requérante doit être écarté et, partant, le recours rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

103    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      6Minutes Media GmbH est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Madise

da Silva Passos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 octobre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.