DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

23 mars 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale DELTATIC – Marque de l’Union européenne verbale antérieure DELTA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Usage sérieux de la marque antérieure – Article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), et article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif »

Dans l’affaire T‑146/21,

Vetpharma Animal Health, SL, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Me M. Escudero Pérez, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Deltavit, établie à Janzé (France), représentée par Me G. Barbaut, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 21 décembre 2020 (affaire R 776/2020-5), relative à une procédure d’opposition entre Deltavit et Vetpharma Animal Health,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva et M. P. Zilgalvis (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 15 mars 2021,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 31 mai 2021,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 14 juin 2021,

vu la réattribution de l’affaire à un nouveau juge rapporteur à la suite du décès de M. le juge B. Berke, survenu le 1er août 2021,

vu la désignation d’un autre juge pour compléter la chambre à la suite de l’empêchement de l’un de ses membres,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        Le 13 février 2018, la requérante, Vetpharma Animal Health, SL, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal DELTATIC.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits vétérinaires à base de deltaméthrine ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 71/2018, du 16 avril 2018.

5        Le 16 juillet 2018, l’intervenante, Deltavit, a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure DELTA, déposée le 27 juillet 2007 et enregistrée le 30 mars 2011 sous le numéro 6143961, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant, notamment, à la description suivante : « Produits vétérinaires et hygiéniques ; substances diététiques destinées aux animaux ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        À la suite de la demande formulée par la requérante conformément à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, l’EUIPO a invité l’intervenante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition.

9        Le 26 juin 2019, l’intervenante a produit devant la division d’opposition, à titre d’éléments de preuve de l’usage de la marque antérieure, 44 pièces consistant en des factures adressées à des clients en France, en République tchèque, en Espagne, au Portugal, en Lettonie, en Lituanie, en Allemagne et en Italie sur une période allant du 14 février 2013 au 20 septembre 2018 (pièces nos 1 à 6), des articles (pièces nos 16, 29 à 31, 40 et 43), des dépliants, brochures, informations, publicités, listes de prix, photographies et étiquettes portant sur les différents produits contenant l’élément verbal « delta » (pièces nos 7 à 15, 17 à 28, 32 à 39, 41 et 42) et des captures d’écran du site Internet de l’intervenante (pièce no 44).

10      Une partie des éléments de preuve soumis par l’intervenante contenaient l’élément figuratif suivant (ci-après le « signe figuratif Delta ») :

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11      Le 3 janvier 2020, l’intervenante a déposé six photographies non datées de différents produits portant également le signe figuratif Delta.

12      Le 13 mars 2020, la division d’opposition a fait droit à l’opposition dans son entièreté.

13      Le 28 avril 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

14      Par décision du 21 décembre 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

15      Dans un premier temps, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve produits par l’intervenante établissaient l’usage sérieux de la marque antérieure pour les substances diététiques destinées aux animaux, relevant de la classe 5. En particulier, s’agissant de la nature de l’usage de la marque antérieure, ladite chambre est parvenue à la conclusion que les éléments de preuve, appréciés dans leur ensemble, démontraient l’usage du signe constituant la marque antérieure tel qu’il avait été enregistré. À cet égard, elle a estimé, d’une part, qu’une grande majorité des documents produits par l’intervenante présentaient le signe figuratif Delta sans que cette présentation altérât le caractère distinctif de la marque antérieure. D’autre part, s’agissant des éléments verbaux utilisés avec l’élément verbal « delta », la chambre de recours a ajouté que certains de ces ajouts, tels que « calcium », « glycol », « tonic » ou « control », seraient immédiatement considérés comme descriptifs des substances diététiques en cause. Par conséquent, elle a estimé que ces éléments descriptifs n’étaient pas de nature à modifier ou à altérer le caractère distinctif de la marque antérieure.

16      Dans un second temps, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion, la chambre de recours a d’abord considéré, en ce qui concerne le public pertinent et la comparaison des produits en cause, que ceux-ci s’adressaient tant aux professionnels qu’au grand public manifestant un degré d’attention supérieur à la moyenne et qu’ils étaient similaires à un degré moyen. Ensuite, en ce qui concerne la comparaison des signes, elle a estimé qu’ils présentaient un degré élevé de similitude visuelle et phonétique, et un degré moyen de similitude conceptuelle, à tout le moins pour une partie du public pertinent. Enfin, en considérant que la marque antérieure présentait un caractère distinctif normal, ladite chambre a conclu à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

II.    Conclusions des parties

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

18      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés par lui.

19      L’intervenante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours.

III. En droit

A.      Sur la recevabilité de certaines annexes de la requête

20      L’EUIPO et l’intervenante soutiennent que les annexes A.6 et A.7 de la requête sont produites pour la première fois devant le Tribunal et, par conséquent, sont irrecevables.

21      À cet égard, il convient de relever que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des éléments présentés pour la première fois devant lui [voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, La Mafia Franchises/EUIPO – Italie (La Mafia SE SIENTA A LA MESA), T‑1/17, EU:T:2018:146, point 16 et jurisprudence citée].

22      En l’espèce, il convient de relever que la requérante a produit l’annexe A.6 de la requête, consistant en des autorisations de mise sur le marché du produit Deltatic délivrées par plusieurs États membres, et, l’annexe A.7 de la requête, consistant en des notices pour les médicaments vétérinaires Deltanil et Deltavex. Or, ces documents n’ont pas été soumis à l’EUIPO pendant la procédure administrative. Partant, ils doivent être écartés comme étant irrecevables conformément à la jurisprudence citée au point 21 ci-dessus.

B.      Sur le fond

23      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), dudit règlement, et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

1.      Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du même règlement

24      La requérante conteste l’appréciation des éléments de preuve de l’usage de la marque antérieure effectuée par la chambre de recours. Premièrement, elle soutient que c’est à tort que la chambre de recours a pris en compte des documents supplémentaires présentés par l’intervenante après l’expiration du délai fixé à cet égard. Deuxièmement, elle estime que, contrairement aux appréciations de la chambre de recours, la marque ombrelle de l’intervenante est Deltavit, et non pas Delta, cette dernière étant presque imperceptible sur la plupart de ses produits. Un tel usage du terme « delta » ne serait donc pas conforme aux exigences de l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

25      Troisièmement, la requérante fait valoir que la marque antérieure est utilisée dans au moins 37 variantes, dont la plupart altéreraient le caractère distinctif de la marque antérieure, en violation de l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001. Par conséquent, l’usage prouvé serait non pas celui de la marque antérieure, mais celui d’un grand nombre de ses variations. Quatrièmement, la requérante, en se référant aux considérations de l’EUIPO, avance que la preuve de l’usage de la marque antérieure apportée par l’intervenante n’est pas très exhaustive.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

27      Aux termes de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque de l’Union européenne antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de dépôt ou la date de priorité de la demande de marque de l’Union européenne, la marque de l’Union européenne antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant que, à cette date, la marque antérieure soit enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque de l’Union européenne antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou des services.

28      Aux fins de l’interprétation de la notion d’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque de l’Union européenne consiste à limiter des conflits entre deux marques, pour autant qu’il n’existe pas un juste motif économique découlant d’une fonction effective de la marque sur le marché. En revanche, ladite disposition ne vise ni à évaluer la réussite commerciale ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 38 et jurisprudence citée].

29      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, points 37 et 43).

30      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43).

31      En ce qui concerne les critères d’appréciation de l’usage sérieux, en vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite à la production de pièces justificatives, comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001.

32      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement  (voir arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42 et jurisprudence citée).

33      Le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque antérieure ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être en rapport avec d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque antérieure soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux [arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42]. Un usage, même minime, peut donc être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou les services protégés par la marque. Ainsi, il n’est pas possible de fixer a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devrait être retenu pour déterminer si l’usage avait ou non un caractère sérieux, de sorte qu’une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis, ne saurait être fixée (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 72 et jurisprudence citée).

34      Un faisceau d’éléments de preuve peut permettre d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits [voir arrêt du 13 février 2015, Husky CZ/OHMI – Husky of Tostock (HUSKY), T‑287/13, EU:T:2015:99, point 66 et jurisprudence citée].

35      L’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du 12 décembre 2002, Kabushiki Kaisha Fernandes/OHMI – Harrison (HIWATT), T‑39/01, EU:T:2002:316, point 47, et du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 28].

36      En outre, il convient de préciser que, en vertu des dispositions combinées de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), et de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, la preuve de l’usage sérieux d’une marque de l’Union européenne antérieure qui fonde une opposition à l’encontre d’une demande de marque de l’Union européenne, comprend également la preuve de l’utilisation de la marque antérieure sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de cette marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée [voir arrêt du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, EU:T:2005:438, point 30 et jurisprudence citée].

37      Par ailleurs, pour apprécier l’existence d’un usage sérieux dans l’Union, au sens de l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, il convient de faire abstraction des frontières du territoire des États membres (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 44).

38      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le présent moyen.

39      À titre liminaire, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante relatif à la prétendue prise en compte par la chambre de recours des éléments de preuve supplémentaires (tels que visés au point 11 ci-dessus), prétendument présentés après la date limite fixée à cette fin par la division d’opposition. À cet égard, il suffit de relever que, ainsi qu’il ressort clairement de la lecture de la décision attaquée, notamment des points 27 à 40 de celle-ci, ladite chambre, bien qu’elle ait mentionné lesdits éléments supplémentaires au point 8 de la décision attaquée, ne s’est pas fondée sur ceux-ci pour considérer que l’usage sérieux de la marque antérieure avait été démontré, de sorte que l’argument de la requérante est, en tout état de cause, inopérant.

40      En l’espèce, ainsi que la chambre de recours l’a correctement relevé au point 25 de la décision attaquée, la demande d’enregistrement de la marque demandée a été déposée le 13 février 2018. Par conséquent, la période de cinq ans visée à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, pour laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure devait être établi, s’étend du 13 février 2013 au 12 février 2018.

41      De même, il convient de préciser que, dès lors que la division d’opposition avait admis l’usage sérieux de la marque antérieure uniquement en ce qui concerne les substances diététiques destinées aux animaux et que l’intervenante n’avait pas contesté cette appréciation, la chambre de recours a examiné l’usage sérieux de la marque antérieure uniquement au regard de ces produits.

a)      Sur le lieu et la durée de l’usage

42      En l’espèce, la chambre de recours a estimé que le lieu et la durée de l’usage ont été correctement établis. En particulier, elle a considéré, au point 27 de la décision attaquée, que tous les documents datés, à l’exception de certaines factures datant de 2018, relevaient de la période pertinente. Quant au lieu de l’usage, ladite chambre a relevé que les factures présentées établissaient des ventes dans plusieurs États membres. À cet égard, elle a ajouté que le matériel promotionnel et les articles de presse en français s’adressaient au public francophone de l’Union et le matériel promotionnel en anglais aux consommateurs anglophones, y compris les consommateurs professionnels utilisant l’anglais comme langue pour faire des affaires.

43      Ces considérations, au demeurant non remises en cause par les parties, doivent être approuvées.

b)      Sur la nature de l’usage

44      Ainsi qu’il découle directement des termes de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, l’usage de la marque sous une forme qui diffère de la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée, que la marque soit ou non aussi enregistrée sous la forme utilisée au nom du titulaire, est considéré comme un usage au sens du premier alinéa de cet article pour autant que le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée ne soit pas altéré [voir arrêt du 25 juin 2020, Dermavita/EUIPO – Allergan Holdings France (JUVÉDERM), T‑104/19, non publié, EU:T:2020:283, point 37 et jurisprudence citée].

45      Le caractère distinctif d’une marque au sens du règlement 2017/1001 signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises [voir arrêt du 13 septembre 2016, hyphen/EUIPO – Skylotec (Représentation d’un polygone), T‑146/15, EU:T:2016:469, point 26 et jurisprudence citée].

46      Il y a lieu de préciser que l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001 vise l’hypothèse où une marque enregistrée, nationale ou de l’Union européenne, est utilisée dans le commerce sous une forme légèrement différente par rapport à la forme sous laquelle l’enregistrement a été effectué. L’objet de cette disposition, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être considéré comme limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner les produits ou les services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque la forme du signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce (arrêt du 13 septembre 2016, Représentation d’un polygone, T‑146/15, EU:T:2016:469, point 27 ; voir également, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, Specsavers International Healthcare e.a., C‑252/12, EU:C:2013:497, point 29, et, par analogie, arrêt du 25 octobre 2012, Rintisch, C‑553/11, EU:C:2012:671, points 21 et 22).

47      Ainsi, le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque (voir arrêt du 13 septembre 2016, Représentation d’un polygone, T‑146/15, EU:T:2016:469, point 28 et jurisprudence citée).

48      De plus, il convient de rappeler que, pour que soit appliqué l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, il est nécessaire que les ajouts à la marque enregistrée n’altèrent pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée, notamment en raison de leur position accessoire dans le signe ou de leur faible caractère distinctif (voir arrêt du 13 septembre 2016, Représentation d’un polygone, T‑146/15, EU:T:2016:469, point 31 et jurisprudence citée).

49      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’apprécier s’il ressort des éléments de preuve produits par l’intervenante que la marque antérieure a été utilisée sous une forme qui altère le caractère distinctif de cette dernière.

1)      Sur l’éventuelle altération du caractère distinctif de la marque antérieure par son usage sous la forme du signe figuratif Delta

50      En l’espèce, la requérante allègue que la considération de la chambre de recours selon laquelle l’usage de la marque antérieure est admissible dès lors que les éléments comme « deltamigo », « deltatys » ou « deltabolus » sont accompagnés du terme « delta » quelque part sur l’étiquette, est erronée étant donné que le signe figuratif Delta ne serait pas perceptible sur les produits. De même, contrairement aux appréciations de la chambre de recours, la marque ombrelle de l’intervenante serait Deltavit, et non pas Delta, cette dernière étant presque imperceptible sur la plupart des produits.

51      L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

52      À cet égard, la chambre de recours, en se référant aux pièces nos 8 à 10, 14, 15, 17, 28, 33, 35 et 37, a notamment relevé, au point 33 de la décision attaquée, que le signe figuratif Delta était toujours visible en tant que marque ombrelle sur les produits eux-mêmes et dans les dépliants et brochures qui les accompagnaient. De surcroît, elle a considéré, au point 34 de la décision attaquée, que, dans différents documents produits, ledit signe figuratif était positionné de manière indépendante à côté des signes Deltamigo, Deltatys ou Deltabolus. S’agissant, en particulier, du signe Deltatys, la chambre de recours a considéré que le signe figuratif Delta, placé à proximité de l’élément « deltatys », remplissait sa propre fonction d’indication d’origine dans l’esprit du consommateur.

53      Premièrement, il ressort du dossier que le signe figuratif Delta apparaît sur le matériel promotionnel en lien avec les produits Deltamigo (pièces nos 8 et 10), Delt’AD 3E (pièce no 9), Patoral® Piglet (pièce no 11), Oligopass (pièce no 34), Delta ph Control (pièce no 34), Stimflash et Deltacarnitol (pièce no 36), Deltalitol (pièces nos 36 et 38), Hydralac (pièce no 38), sur les étiquettes des produits Deltabov (pièce no 14), Axion® Baca (pièce no 15), Deltatys (pièce no 17), ainsi que sur les emballages des produits Delta Viv’, Deltamine et Deltatys (pièce no 28).

54      Toutefois, contrairement aux affirmations de la chambre de recours, le signe figuratif Delta n’est pas perceptible sur les pièces nos 33, 35 et 37. En effet, les éléments de preuve sur lesquels apparaît ledit signe sont compris dans les pièces nos 34, 36 et 38, de sorte que la chambre de recours s’est trompée lors de l’indication des références aux pièces du dossier. De même, force est de constater que, sur les emballages produits en tant que pièce no 28, le signe figuratif Delta n’est pas non plus clairement perceptible. Il n’en demeure pas moins que les autres éléments de preuve, tels que cités au point 53 ci-dessus, comportent le signe figuratif Delta clairement perceptible, de sorte que l’erreur commise par la chambre de recours n’altère ni le raisonnement suivi, ni les conclusions qu’elle en a tirées.

55      Deuxièmement, s’agissant de la question de savoir si l’utilisation de la marque antérieure sous la forme du signe figuratif Delta altère son caractère distinctif, il convient de relever que, dans ledit signe, l’élément verbal « delta », écrit en lettres blanches dans une police de caractères légèrement stylisée et auquel est ajouté le symbole « ® » dans une taille réduite, est apposé sur un fond vert clair, constitué par un rectangle aux coins arrondis. Les éléments graphiques, à savoir le fond vert ainsi que la stylisation de l’élément verbal « delta », ne sont pas de nature à altérer le caractère distinctif de ce dernier élément. Par conséquent, l’usage de ce signe pouvait être valablement considéré comme étant celui de la marque antérieure.

56      À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’une marque verbale est une marque constituée exclusivement de lettres, de mots ou de groupes de mots, sans élément figuratif spécifique. La protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte ainsi sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement, et non sur les aspects figuratifs ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir. Par conséquent, il n’y a pas lieu de prendre en compte la typographie que le signe verbal serait susceptible de présenter. Il en résulte qu’une marque verbale peut être utilisée sous quelque forme que ce soit, quelles que soient la couleur ou la police de caractères [voir arrêt du 28 juin 2017, Josel/EUIPO – Nationale-Nederlanden Nederland (NN), T‑333/15, non publié, EU:T:2017:444, points 37 et 38 et jurisprudence citée].

57      De même, il ressort de la jurisprudence que la représentation concrète d’une marque verbale n’est généralement pas de nature à modifier le caractère distinctif de ladite marque telle qu’enregistrée [voir arrêt du 3 octobre 2019, 6Minutes Media/EUIPO – ad pepper media International (ADPepper), T‑668/18, non publié, EU:T:2019:719, point 54 et jurisprudence citée].

58      Troisièmement, il y a lieu de rappeler que la condition d’usage sérieux d’une marque peut être remplie lorsqu’une marque est utilisée conjointement avec une autre marque, pour autant que la première marque continue d’être perçue comme une indication de l’origine du produit en cause [voir arrêt du 23 septembre 2020, CEDC International/EUIPO – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑796/16, EU:T:2020:439, point 142 et jurisprudence citée].

59      Or, en l’espèce, il convient de constater que le signe figuratif Delta, qui est apposé de manière isolée sur les étiquettes et le matériel promotionnel, est perceptible en tant que marque indépendante, de sorte que son usage accompagné des autres signes n’altère pas son caractère distinctif.

60      À cet égard, il est également sans pertinence que le signe Deltavit, qui, d’après la requérante, constituerait la marque ombrelle de l’intervenante, est présent sur ces mêmes éléments de preuve, parfois en taille beaucoup plus importante que le signe figuratif Delta, tant que sa présence n’altère pas le caractère distinctif de la marque antérieure. Or, en l’espèce, les deux signes étant apposés séparément et chacun d’eux étant perceptible, il ne saurait être considéré que le caractère distinctif de la marque antérieure soit altéré par un tel usage.

61      Au vu des éléments qui précèdent, force est de constater que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant que l’usage de la marque verbale antérieure pouvait être démontré par celui du signe figuratif Delta.

2)      Sur l’éventuelle altération du caractère distinctif de la marque antérieure par l’ajout d’éléments verbaux

62      Selon la requérante, la plupart des éléments verbaux ajoutés à la marque antérieure seraient distinctifs, de sorte que les variantes sous lesquelles la marque antérieure a été utilisée mériteraient une protection spécifique, ce qui aurait été le cas pour certaines de ces variantes ayant été enregistrées comme des marques indépendantes. Elle se réfère notamment au signe DELTAMIGO NF IBERSAN pour illustrer que la forme sous laquelle la marque antérieure a été utilisée différerait de la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée et altérerait son caractère distinctif. En outre, la requérante souligne que, conformément à l’article 18 du règlement 2017/1001, il y a lieu de tenir compte de la taille et du caractère distinctif des termes ajoutés. Or, en l’espèce, l’élément « delta » ne serait pas plus grand que les éléments ajoutés, mais aurait la même taille, la même police de caractères, les mêmes couleurs et le même design. De même, les éléments ajoutés altéreraient le caractère distinctif du terme « delta ». La requérante estime que le fait que l’usage de la marque antérieure puisse être prouvé par l’usage de 37 variantes constitue un usage abusif de la marque antérieure, pouvant être vu comme un moyen pour sa titulaire de faire des économies.

63      Dès lors, la requérante soutient que l’intervenante a prouvé non pas l’usage sérieux de la marque antérieure, mais celui d’un grand nombre de variations de celle-ci. En considérant que lesdites variations constituent un usage de la marque antérieure, l’EUIPO accorderait une protection excessive à cette marque.

64      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

65      À cet égard, il y a lieu de relever tout d’abord que, au point 35 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé, en se référant à l’argumentation de l’intervenante, que de nombreux ajouts au composant « delta » seraient immédiatement considérés comme descriptifs des substances diététiques en cause, ladite chambre mentionnant les termes « calcium », « glycol », « tonic » ou « control ». Elle en a déduit que ces éléments n’étaient pas de nature à modifier ou à altérer le caractère distinctif de la marque antérieure.

66      En revanche, selon la chambre de recours, il était permis de douter que les termes « deltamigo », « deltatys », « deltaviv » ou « deltabolus » constituaient l’usage de la marque antérieure (voir point 32 de la décision attaquée). De même, s’agissant du produit commercialisé sous le nom « deltatys », la chambre de recours a considéré, au point 34 de la décision attaquée, que celui-ci pourrait ne pas être décomposé en un préfixe « delta » et un suffixe « tys », de sorte que ladite chambre a implicitement mais nécessairement considéré que l’ajout du suffixe « tys » altérait le caractère distinctif de la marque antérieure.

67      Il s’ensuit que la requérante n’est pas fondée à soutenir que la chambre de recours a considéré que l’usage de la marque antérieure pouvait être prouvé par celui des 37 variantes de celle-ci présentant des ajouts qui altéreraient le caractère distinctif de ladite marque, à l’exception des quatre variantes comportant les ajouts mentionnés au point 35 de la décision attaquée et repris au point 65 ci-dessus. Au contraire, ainsi qu’il a été constaté au point 66 ci-dessus, ladite chambre a expressément considéré que les quatre ajouts à la marque antérieure qui formaient ainsi les signes deltamigo, deltatys, deltaviv et deltabolus, parmi ceux mentionnés par la requérante, altéraient le caractère distinctif de ladite marque. Partant, la chambre de recours a estimé que l’usage de la marque antérieure ne pouvait pas être démontré par celui des signes précités, dont les ajouts par rapport à la marque antérieure altéraient le caractère distinctif de cette dernière.

68      S’agissant des autres variantes, il suffit de relever que la chambre de recours ne s’est prononcée ni sur la question de savoir si leurs éléments additionnels altéraient le caractère distinctif de la marque antérieure, ni sur la pertinence desdites variantes pour prouver l’usage sérieux de la marque antérieure. En tout état de cause, elle ne s’est pas fondée sur d’autres variantes que le signe figuratif Delta ou celles comportant l’ajout d’un des quatre éléments verbaux mentionnés au point 65 ci-dessus pour considérer que l’usage sérieux de la marque antérieure avait été démontré. Par conséquent, l’argument de la requérante ne saurait prospérer.

69      Ensuite, s’agissant des quatre variantes contenant les éléments ajoutés « calcium », « glycol », « tonic » et « control », les considérations de la chambre de recours contenues au point 35 de la décision attaquée et reprises au point 65 ci-dessus, au demeurant non spécifiquement remises en cause par la requérante, sont exemptes d’erreur.

70      En effet, lesdits éléments se réfèrent aux composants ou aux propriétés des substances diététiques en cause, de sorte que leur caractère distinctif pour ces produits est limité en raison de leur caractère descriptif. Par conséquent, ces éléments, utilisés avec la marque antérieure, ne sont pas de nature à altérer le caractère distinctif de cette dernière.

71      De même, ainsi qu’il ressort du dossier (pièces nos 19 et 34) et comme le fait également valoir l’EUIPO, l’élément verbal « delta » est utilisé dans une couleur différente des autres éléments dans les signes Deltacalcium et Delta ph Control, de sorte qu’il pourra facilement être distingué dans ces signes.

72      Enfin, quant à la circonstance que certaines variantes d’utilisation de la marque antérieure, telles que DELTACALCIUM, DELTASENOL, DELTAGLYCOL, DELTAESTEATOL, DELTACARNITOL ou DELTAVIT, sont ou ont été enregistrées en tant que marques indépendantes pour le compte de l’intervenante, dans l’hypothèse où ces variantes auraient été prises en compte par la chambre de recours, ladite circonstance serait, en tout état de cause, dénuée de toute pertinence. En effet, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001 énonce expressément qu’est considéré comme un usage sérieux d’une marque de l’Union européenne notamment l’usage de celle-ci sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée, que la marque soit ou non aussi enregistrée sous la forme utilisée au nom du titulaire.

73      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que l’utilisation de la marque antérieure avec des ajouts descriptifs, à savoir « calcium », « glycol », « tonic » et « control », pouvait être prise en compte aux fins de l’établissement de l’usage sérieux de cette marque.

c)      Sur l’importance de l’usage

74      S’agissant de l’importance de l’usage qui a été fait de la marque antérieure, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part (arrêts du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 35, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 41).

75      La chambre de recours a relevé, au point 39 de la décision attaquée, que l’intervenante avait produit des factures englobant l’ensemble de la période pertinente de cinq ans et que les montants y indiqués variaient d’environ 60 euros à plusieurs milliers d’euros par produit. Elle en a conclu, au point 40 de la décision attaquée, que, dès lors que ces factures n’étaient que des exemples, qu’elles couvraient l’ensemble de ladite période de cinq ans, qu’elles étaient adressées à des clients dans plusieurs États membres et que les montants y indiqués étaient substantiels sur le plan commercial, l’usage démontré de la marque antérieure était sérieux et non symbolique.

76      À cet égard, la requérante avance que la preuve de l’usage présentée par l’intervenante n’était pas particulièrement exhaustive, ainsi que l’aurait reconnu l’EUIPO, et qu’elle consistait en un mélange de factures avec différentes marques relatives à différents territoires.

77      Tout d’abord, il convient de constater que c’est non pas la chambre de recours qui a estimé que la preuve de l’usage de la marque antérieure n’était pas « particulièrement exhaustive », mais la division d’opposition. Quant à ladite chambre, elle a, au contraire, fait valoir que les montants indiqués dans les factures produites étaient substantiels (point 40 de la décision attaquée).

78      Ensuite, ainsi qu’il a été rappelé au point 28 ci-dessus, l’obligation de rapporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes. De même, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus, un usage même minime peut être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou les services protégés par la marque. Il s’ensuit qu’il ne saurait être exigé de l’intervenante que la preuve de l’usage de la marque antérieure soit exhaustive.

79      Enfin, force est de relever que l’intervenante a présenté un échantillon de factures de vente représentatif, s’agissant de factures envoyées à des clients établis dans plusieurs États membres, à savoir la France, la République tchèque, l’Espagne, le Portugal, la Lettonie, la Lituanie et l’Allemagne. De même, il en ressort, en ce qui concerne les produits mentionnés au point 53 ci-dessus, pour lesquels le signe figuratif Delta a été utilisé, que les ventes ont été suffisamment conséquentes pour établir l’usage sérieux de la marque antérieure pour ces produits. Par ailleurs, la chambre de recours a notamment relevé que, selon les listes de prix, le tarif unitaire des produits vendus variait de 7,85 euros pour un sac de cinq litres du produit Deltalitol à 2 759 euros pour 1 100 kg du produit Deltaglycol. Il en découle que le tarif unitaire des produits mentionnés au point 53 ci-dessus se situait entre ces deux montants. De même, en s’appuyant sur l’échantillon de factures produit par l’intervenante, il peut être constaté, à titre d’exemple, que, pendant la période allant du 14 février 2013 au 30 novembre 2016, 214 sacs de 20 kg du produit Deltamine ont été vendus pour un montant de 12 791,18 euros, tandis que, pendant la période allant du 14 février 2013 au 27 avril 2017, l’intervenante a vendu 210 sacs de 25 kg du produit Deltatys pour un montant de 7 007,54 euros.

80      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que l’usage de la marque antérieure tel que démontré était sérieux et non symbolique.

81      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que l’usage sérieux de la marque antérieure avait été démontré en ce qui concerne les substances diététiques destinées aux animaux. Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

2.      Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

82      La requérante soutient qu’il n’existe pas de risque de confusion en l’espèce étant donné que les signes en cause ne sont pas similaires.

83      L’EUIPO conclut au rejet du second moyen et soutient que la conclusion de la chambre de recours relative à l’existence d’un risque de confusion n’est entachée d’aucune erreur qui nécessiterait l’annulation de la décision attaquée.

84      L’intervenante estime, en substance, que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

85      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec cette marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

86      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

87      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

88      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le bien-fondé du présent moyen.

a)      Sur le public pertinent

89      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

90      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 46 de la décision attaquée, que les produits en cause s’adressaient aux professionnels tels que les vétérinaires, les agriculteurs ou les éleveurs ainsi qu’au grand public. S’agissant du niveau d’attention de ce public pertinent, elle a considéré qu’il était supérieur à la moyenne étant donné que les produits en cause avaient un effet sur la santé et le bien-être des animaux. En outre, il ressort des considérations de la chambre de recours contenues au point 64 de la décision attaquée que le territoire pertinent est celui de l’Union.

91      Ces appréciations, au demeurant non remises en cause par les parties, doivent être approuvées.

b)      Sur la comparaison des produits

92      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

93      S’agissant des produits en cause, la chambre de recours les a décrits au point 50 de la décision attaquée. Elle a indiqué, d’une part, que ceux couverts par la marque antérieure et pour lesquels l’usage sérieux de ladite marque avait été démontré étaient la nourriture ou les aliments pour des animaux spécifiques, destinés, par exemple, à améliorer la production de lait chez les vaches ou l’hygiène urinaire chez les porcs. D’autre part, elle a constaté que les produits visés par la marque demandée étaient des préparations à base de deltaméthrine destinées à un usage externe pour des animaux dans l’objectif de les protéger des parasites externes.

94      Au point 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que ces produits pouvaient coïncider en ce qui concerne les clients ciblés ainsi que par leur nature et leur destination, en ce qu’ils visaient des animaux. Ainsi, selon ladite chambre, il est très probable qu’il existe un chevauchement au niveau de leurs canaux de distribution et de leurs producteurs et qu’ils puissent avoir la même destination et être complémentaires. Elle en a conclu que les produits en cause étaient similaires à un degré moyen.

95      Ces appréciations, au demeurant non remises en cause par les parties, doivent être approuvées.

c)      Sur la comparaison des signes

96      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

97      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (voir arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43 et jurisprudence citée).

98      En l’espèce, il y a lieu de comparer, d’une part, la marque verbale antérieure DELTA et, d’autre part, la marque verbale demandée DELTATIC.

99      La requérante avance que les signes en cause comportent plusieurs éléments qui les différencient, à savoir, les terminaisons différentes (respectivement « ta » et « tic »), la longueur des signes et le nombre différent de syllabes, et que la suite de lettres « tic » dans la marque demandée correspond à un son percutant, attirant fortement l’attention des consommateurs. La coïncidence au niveau des premières lettres ne pourrait pas constituer un motif empêchant l’enregistrement de la marque demandée. S’agissant, en particulier, de la comparaison des signes sur le plan conceptuel, la requérante fait valoir que le terme « delta », correspondant à la quatrième lettre de l’alphabet grec, est utilisé dans de nombreux domaines, tels que la chimie, la physique, les mathématiques et les sciences appliquées ou encore la musique contemporaine. Il en découlerait que cet élément a un faible caractère distinctif et que l’intervenante ne peut pas avoir un monopole sur ce terme.

100    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

101    À titre liminaire, s’agissant du caractère distinctif de l’élément « delta », commun aux signes en conflit, il convient de relever que ni les significations potentielles de celui-ci, telles que retenues par la chambre de recours (voir point 109 ci-après), ni le fait, invoqué par la requérante, que le terme « delta » serait fréquemment utilisé dans de nombreux domaines ne sauraient établir que cet élément présente un faible caractère distinctif pour les produits en cause.

102    S’agissant, premièrement, de la comparaison des signes sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré, au point 62 de la décision attaquée, que les signes en cause étaient très similaires dans la mesure où la partie initiale composée des cinq premières lettres de la marque demandée reproduisait entièrement la marque antérieure. Elle a néanmoins relevé que la marque demandée comportait trois lettres supplémentaires, « t », « i » et « c », dans sa partie finale.

103    Ces considérations de la chambre de recours sont exemptes d’erreur. En effet, la marque antérieure est entièrement comprise dans la marque demandée, à laquelle les lettres « t », « i » et « c » sont ajoutées, de sorte que leur degré de similitude visuelle est élevé.

104    À cet égard, il convient de relever que l’argument de la requérante selon lequel les signes en cause auraient des terminaisons différentes, à savoir « ta » et « tic », fait abstraction du fait que les lettres « t » « a » qui constituent la terminaison de l’élément « delta » sont également présentes dans la marque demandée.

105    Par ailleurs, selon la jurisprudence, la circonstance que la marque antérieure soit entièrement contenue dans la marque demandée constitue une indication de la similitude entre ces deux marques sur le plan visuel [voir arrêt du 13 juin 2012, Seikoh Giken/OHMI – Seiko Holdings (SG SEIKOH GIKEN), T‑519/10, non publié, EU:T:2012:291, point 27 et jurisprudence citée].

106    De surcroît, il ressort de la jurisprudence que le consommateur est réputé prêter généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin, la partie initiale d’une marque ayant normalement, tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique, un impact plus fort que la partie finale de celle-ci [voir arrêt du 9 septembre 2019, SLL Service/EUIPO – Elfa International (LUMIN8), T‑680/18, non publié, EU:T:2019:565, point 35 et jurisprudence citée].

107    S’agissant, deuxièmement, de la comparaison des signes sur le plan phonétique, la chambre de recours a estimé, au point 63 de la décision attaquée, qu’ils étaient très similaires, étant donné que, indépendamment des langues parlées, les parties initiales des deux signes seraient prononcées de la même manière, tandis que la marque demandée se différenciait par la terminaison « tic ».

108    Force est de constater, à l’instar de la chambre de recours, que, indépendamment de la prononciation de la terminaison de la marque demandée, à savoir « tic », l’élément « delta » sera prononcé de la même manière dans les deux signes. Par conséquent, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la présence de l’élément additionnel de la marque demandée aura un impact considérable sur la perception des deux signes sur le plan phonétique. De même, le fait que la marque demandée est constituée de trois syllabes tandis que la marque antérieure n’en comporte que deux ne saurait les rendre différentes. Compte tenu du fait que l’élément commun « delta », correspondant à la marque antérieure, est placé au début de la marque demandée, le degré de similitude des deux signes est élevé, ainsi que l’a considéré la chambre de recours.

109    S’agissant, troisièmement, de la comparaison des signes sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré, au point 64 de la décision attaquée, que les signes étaient similaires au moins pour une partie du public pertinent. Au point 72 de ladite décision, elle a précisé que le degré de similitude conceptuelle était moyen. Ce public percevrait l’élément commun « delta » dans les signes en cause et le comprendrait comme une référence à la lettre grecque ou à une zone triangulaire dans laquelle un grand fleuve se divise en plusieurs sections plus petites.

110    À cet égard, il suffit de relever que, dans la mesure où les signes en cause coïncident par la présence de l’élément « delta », qui sera compris par au moins une partie du public pertinent, et que l’élément additionnel de la marque demandée, « tic », n’a pas de signification directe pour ce public, l’existence d’un degré moyen de similitude conceptuelle ne saurait être niée en l’espèce.

d)      Sur le risque de confusion

111    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

112    La requérante estime que, en raison de l’absence de similitude des signes en cause, les conditions énoncées à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 ne sont pas remplies. Elle ajoute que, dans le cas où les produits seront prescrits par des vétérinaires, le risque de confusion est considérablement plus faible. En outre, pour démontrer le caractère distinctif faible de la marque antérieure, la requérante invoque l’existence de marques de l’Union européenne contenant le terme « delta » et couvrant les « produits vétérinaires », relevant de la classe 5.

113    L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

114    S’agissant, tout d’abord, du caractère distinctif de la marque antérieure, la chambre de recours a considéré, au point 66 de la décision attaquée, qu’il n’était pas établi que le terme « delta » revêtait une signification allusive, voire descriptive, dans le contexte des produits désignés par la marque antérieure. Par conséquent, elle a estimé que le caractère distinctif intrinsèque de ladite marque était normal. Elle a ajouté qu’il ne saurait être déduit de l’existence d’autres marques inscrites au registre des marques de l’Union européenne que le public pertinent est habitué à ce que le terme « delta » soit utilisé sur le marché concerné par de nombreux concurrents.

115    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la requérante n’a pas démontré que l’élément verbal « delta », constituant également la marque antérieure, avait un caractère distinctif faible pour les substances diététiques destinées aux animaux (voir point 101 ci-dessus). Dans ces conditions, le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure est normal, ainsi que l’avait considéré, à juste titre, la chambre de recours.

116    Quant à l’affaiblissement du caractère distinctif de la marque demandée du fait de l’existence alléguée de nombreuses marques contenant l’élément verbal « delta », il convient de rappeler que la simple présence de marques contenant un certain terme dans le registre des marques de l’Union européenne sans aucune référence à leur utilisation sur le marché et à l’éventuelle contestation de ces marques en raison de l’existence d’un risque de confusion ne permet pas de conclure à un affaiblissement du caractère distinctif de ce terme par rapport aux produits et aux services pour lesquels ces marques sont enregistrées [voir arrêt du 6 juillet 2016, Mozzetti/EUIPO – di Lelio (Alfredo alla Scrofa), T‑96/15, non publié, EU:T:2016:394, point 39 et jurisprudence citée].

117    Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours s’est fondée sur le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, qui, ainsi qu’il a été constaté au point 115 ci-dessus, est normal en l’espèce.

118    En outre, quand bien même le caractère distinctif de la marque antérieure aurait été faible, il convient de rappeler que, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée].

119    Ensuite, la chambre de recours a pris en considération, au point 72 de la décision attaquée, le fait que les produits en cause étaient similaires, que les signes présentaient un degré élevé de similitude sur les plans visuel et phonétique et qu’ils étaient moyennement similaires sur le plan conceptuel, et, en conséquence, au point 73 de la décision attaquée, a estimé, à l’instar de la division d’opposition, que, malgré le niveau d’attention accru accordé aux substances et aux préparations diététiques destinées aux animaux, il existait un risque de confusion.

120    Ces appréciations de la chambre de recours doivent être approuvées. En effet, au vu des similitudes des produits en cause (point 95 ci-dessus), du degré élevé de similitude des signes sur les plans visuel et phonétique et de l’existence d’une similitude moyenne sur le plan conceptuel (voir points 103, 108 et 110 ci-dessus) ainsi que du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure, l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 ne saurait être exclue en l’espèce, malgré un degré d’attention élevé du public pertinent.

121    Enfin, il convient d’ajouter que le fait que le public pertinent sera plus attentif à l’identité du producteur ou du fournisseur du produit ou du service qu’il souhaite se procurer ne signifie pas, en revanche, qu’il examinera dans le moindre détail la marque à laquelle il sera confronté ou qu’il la comparera minutieusement à une autre marque. En effet, même pour un public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, il n’en demeure pas moins que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite qu’il en a gardée en mémoire [voir arrêt du 22 novembre 2018, Endoceutics/EUIPO – Merck (FEMIVIA), T‑59/18, non publié, EU:T:2018:821, point 65 et jurisprudence citée]. En conséquence, l’argument de la requérante relatif au fait que les produits seraient prescrits par des vétérinaires ne saurait prospérer.

122    Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le second moyen ainsi que, dès lors, le recours dans son ensemble.

IV.    Sur les dépens

123    En application de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

124    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’EUIPO, conformément aux conclusions de celui-ci. L’intervenante, qui n’a pas conclu sur les dépens, supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Vetpharma Animal Health, SL, supportera ses propres dépens ainsi que les dépens de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).

3)      Deltavit supportera ses propres dépens.

Costeira

Kancheva

Zilgalvis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 mars 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.