DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

14 juillet 2021(*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne figurative CUCINA – Motifs absolus de refus – Absence de caractère distinctif – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑527/20,

Aldi GmbH & Co. KG, établie à Mülheim an der Ruhr (Allemagne), représentée par Mes N. Lützenrath, C. Fürsen et M. Minkner, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Bosse et Mme A. Söder, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 19 juin 2020 (affaire R 463/2020‑2), concernant une demande d’enregistrement du signe figuratif CUCINA comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, V. Kreuschitz (rapporteur) et G. De Baere, juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 août 2020,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 27 octobre 2020,

à la suite de l’audience du 8 juin 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 10 octobre 2019, la requérante, Aldi GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 29 et 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Viandes, poissons, volailles et gibiers ; extraits de viande ; fruits et légumes conservés, congelés, séchés et cuisinés ; gelées comestibles, confitures, compotes ; œufs ; lait, fromages, beurre, yaourts et autres produits laitiers, huiles et graisses à usage alimentaire ; desserts à base de produits laitiers ; desserts lactés réfrigérés ; huile d’olive ; bâtonnets de mozzarella frits ; fromage râpé ; fruits de mer préparés ; fruits de mer cuisinés ; fruits de mer congelés ; fruits de mer séchés ; charcuterie ; mortadelle ; salami ; jambons ; jambon sec à l’italienne ; foie ; saucisses à griller [bratwurst] ; mascarpone ; chips ; salades d’antipasti ; oignons [légumes] conservés ; oignons marinés dans le vinaigre ; olives conservées ; légumes en saumure ; olives transformées ; olives préparées ; tomates conservées ; tomates transformées ; concentré de tomates ; potages et bouillons ; produits laitiers à tartiner ; mélanges contenant de la graisse pour tartines ; fruits confits » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao et succédanés du café ; riz, pâtes et nouilles ; tapioca et sagou ; farines et préparations faites de céréales ; pain, pâtisserie et confiserie ; chocolat ; crèmes glacées, sorbets et autres types de glaces alimentaires, sucre, miel, sirop de mélasse ; levure, poudre à lever ; sel ; assaisonnements, épices, herbes conservées ; vinaigre, sauces et autres assaisonnements ; glace à rafraîchir [eau congelée] ; desserts préparés [confiserie] ; desserts préparés [pâtisseries] ; soufflés (desserts) ; poudings ; pâtes fraîches et sèches, nouilles et raviolis ; lasagnes ; feuilles de lasagne ; spaghetti ; tortellini ; gnocchi ; cannelloni ; risotto ; biscottis ; sauces [condiments] ; pesto [sauce] ; sauce tomate ; sauce spaghettis ; sauces pour pâtes alimentaires ; plats de pâtes ; plats cuisinés essentiellement à base de pâtes ; repas préparés à base de nouilles ; pâte à pizza ; pizzas ; vermicelles ; poudres pour sauces ; sauce déshydratée en poudre ; épices sous forme de poudres ; sandwiches ; pain fourré ; gressins ; pain plat ; baguettes ; baguettes fourrées ; petits pains ; petits pains fourrés ; crackers ; pâtisseries salées ; câpres ; ail haché fin ; cornets pour crème glacée ; chocolats ; croquant ; nougat ».

4        Par décision du 3 janvier 2020, l’examinateur a refusé l’enregistrement de la marque demandée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 2, du règlement 2017/1001, pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 27 février 2020, la requérante a formé un recours contre la décision de l’examinateur auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001.

6        Par décision du 19 juin 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours formé par la requérante.

7        À l’appui de sa conclusion relative au caractère descriptif du signe demandé, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, la chambre de recours a considéré, en particulier, ce qui suit (points 12 à 25 de la décision attaquée) :

–        les produits demandés s’adressent principalement au grand public et constituent des produits de consommation de masse de première nécessité plutôt bon marché, de sorte que le niveau d’attention des consommateurs lors de leur achat est tout au plus moyen (point 12 de la décision attaquée) ;

–        dès lors que le signe demandé comporte l’élément verbal italien « cucina », il doit être attribué à l’espace italianophone (point 13 de la décision attaquée) ;

–        le mot « cucina » fait partie du vocabulaire de base de la langue italienne, est écrit en lettres simples et encadré par un élément figuratif en forme d’étiquette simple et modeste représentant une grande casserole. Ainsi, du point de vue du public pertinent, ce mot se réfère à la pièce de la maison dans laquelle il est habituel de cuisiner, de faire de la pâtisserie ou de préparer des plats à base de produits alimentaires comestibles, à savoir une « cuisine », perception qui est renforcée par ledit élément figuratif (points 14, 15, 19 et 21 de la décision attaquée) ;

–        les produits demandés étant des produits alimentaires, le public pertinent comprendra le signe demandé comme indiquant que ces produits sont régulièrement utilisés ou préparés dans la cuisine (point 16 de la décision attaquée) ;

–        il en est de même des « chips » relevant de la classe 29 et des produits désignés « chocolat ; crème glacée, sorbets et autres types de glaces alimentaires ; chocolats, croquant ; nougat » relevant de la classe 30, qui sont utilisés dans la cuisine, notamment, en tant qu’hors-d’œuvre ou ingrédient de plats ou de desserts (point 17 de la décision attaquée) ;

–        il est notoire que le mot allemand « Küche » (cuisine) n’indique pas uniquement la pièce d’une maison, mais également « l’art de la table, de la préparation des plats », notamment, dans le sens de « französische Küche » (cuisine française) ou de « gutbürgerliche Küche » (cuisine bourgeoise). Il en va de même de la signification du mot italien « cucina » (point 18 de la décision attaquée).

8        La chambre de recours a également conclu à l’absence de caractère distinctif du signe demandé en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, en raison de sa signification claire en rapport avec les produits demandés, telle que renforcée par ses éléments figuratifs, ainsi que de l’absence d’éléments inhabituels ou surprenants (points 27 à 29 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

10      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      Au soutien du recours, la requérante invoque deux moyens, le premier étant tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et le second d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiréd’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sousc), du règlement 2017/1001

12      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir procédé à une appréciation contradictoire en ce qu’elle a estimé, notamment, que le mot « cucina » renvoyait à la pièce de la maison dans laquelle il était habituel de cuisiner, de faire de la pâtisserie ou de préparer des plats. Les produits demandés étant destinés à être consommés, le signe demandé se bornerait à indiquer qu’il s’agit de produits alimentaires comestibles. Partant, le fait que lesdits produits soient habituellement préparés ou consommés dans la cuisine serait dépourvu de pertinence. La chambre de recours ne préciserait pas les raisons pour lesquelles le public pertinent devrait déduire de l’apposition du signe demandé sur des produits alimentaires que ceux-ci sont comestibles. En effet, selon la requérante, lors de l’achat d’une denrée alimentaire, le consommateur perçoit immédiatement qu’il s’agit d’un produit comestible, de sorte que le signe demandé n’apporte à cet égard aucune indication descriptive supplémentaire. Cela serait d’autant plus vrai que le terme « küche » (cuisine) en tant que tel ne préjuge pas du caractère comestible des produits demandés, en tant que « caractéristique » ou « propriété », que le signe demandé serait susceptible de décrire, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. Il en irait de même de l’acception, concomitante ou pouvant lui être substituée, du terme « cucina » en tant que destination des produits « à être utilisés et/ou préparés dans la cuisine », ce qui relèverait de l’évidence même pour le consommateur. Ainsi, le mot « cucina » ne ferait pas partie de la catégorie de signes dont d’autres entreprises pourraient avoir besoin pour décrire les propriétés des produits demandés, au sens de l’objectif visé par cette disposition.

13      La requérante soutient que, en tout état de cause, tous les produits demandés ne sont pas préparés ou utilisés dans la cuisine et qu’il en va ainsi des glaces, des chips ou des chocolats, habituellement consommés dans la salle de séjour ou ailleurs. Dans la mesure où ces produits seraient néanmoins susceptibles de faire l’objet d’une préparation ou d’une utilisation dans la cuisine, il ne s’agirait pas d’un contenu que le consommateur déduirait du mot « cucina », au sens d’un rapport concret entre la marque demandée et les propriétés du produit en cause. Le fait qu’un paquet de chips puisse être ouvert dans la cuisine ne constituerait pas une propriété de ce produit qui, en rapport avec le mot « cucina », serait perçue comme pertinente pour le consommateur.

14      En outre, la requérante conteste que la prétendue signification du signe demandé au sens d’« art de la table, de la préparation des plats » vienne à l’esprit du consommateur moyen. L’apposition dudit signe sur les produits demandés n’induirait pas ce consommateur à formuler une conclusion sur leur mode de préparation, qui n’y est pas indiqué. Pour ce faire, il aurait fallu ajouter un élément faisant référence à une certaine cuisine, comme par exemple « cucina italiana ». Le signe demandé se révélerait donc être dénué de contenu pour les produits demandés et, partant, de caractère descriptif de leurs propriétés concrètes. En effet, le mot « cucina » en soi, sans autre élément destiné à désigner une denrée alimentaire, ne possèderait pas de contenu sémantique.

15      Par ailleurs, selon la requérante, la chambre de recours n’a pas dûment tenu compte du rapport entre la signification de l’élément figuratif du signe demandé et de son élément verbal « cucina ». La qualification de cet élément figuratif de représentation d’une casserole ne s’imposerait pas et il pourrait également être perçu comme un bonnet, une couronne stylisée, une pièce de puzzle ou un poids pour une ancienne balance. En situation d’achat de produits alimentaires, le consommateur ne ferait pas un tel effort d’interprétation dudit élément, mais se limiterait à percevoir une forme fantaisiste comportant un mot ou à le considérer comme un encadrement de l’élément verbal dans le style d’un panneau ou d’un blason, ce qui serait notamment renforcé par l’agencement des couleurs, sur lequel la chambre de recours ne se serait pas prononcée. En effet, cet élément figuratif serait de couleur rouge et entouré d’une bordure dorée, avec l’élément verbal « cucina » au milieu. Les consommateurs seraient habitués à ce que des symboles ainsi agencés, à savoir des mots « encadrés » et rehaussés par la couleur, apposés sur des emballages, renvoient à l’origine commerciale du produit en cause, et non à certaines de ses propriétés, tandis que d’autres indications relatives à la destination dudit produit apparaissent plutôt dans une écriture simple sur un fond basique. Selon la requérante, même à considérer cet élément figuratif comme une casserole, celui-ci est fortement stylisé, agencé de manière tout à fait caractéristique et présente un certain degré d’originalité, de prégnance et de spécificité, de sorte que le consommateur le percevra dans son ensemble comme un blason ou un panneau qui, en rapport avec des denrées alimentaires, est adapté d’une casserole. Or, le consommateur n’assimilerait pas de tels panneaux ou blasons à une description, même si ceux-ci lui rappellent un objet précis. En tout état de cause, une telle perception en tant que casserole ne lui permettrait pas d’établir, sans autre réflexion, un rapport direct et concret entre le signe demandé et les caractéristiques des produits demandés.

16      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante et conclut au rejet du présent moyen.

17      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de services ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En outre, le paragraphe 2 du même article énonce que le paragraphe 1 est applicable même si les motifs du refus n’existent que dans une partie de l’Union.

18      L’intérêt général sous-tendant l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 consiste à garantir que des signes descriptifs de l’une ou de plusieurs des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels un enregistrement en tant que marque est demandé puissent être librement utilisés par l’ensemble des opérateurs économiques offrant de tels produits ou services (voir arrêt du 10 juillet 2014, BSH/OHMI, C‑126/13 P, non publié, EU:C:2014:2065, point 19 et jurisprudence citée).

19      Des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service en cause, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience se révèle positive ou de faire un autre choix si elle se révèle négative. Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits ou des services en cause ou de l’une de leurs caractéristiques [voir arrêt du 17 octobre 2018, Weber-Stephen Products/EUIPO (iGrill), T‑822/17, non publié, EU:T:2018:693, points 18 et 19 et jurisprudence citée ; arrêt du 23 mai 2019, Arçelik/EUIPO (MicroGarden), T‑364/18, non publié, EU:T:2019:355, point 17].

20      En outre, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés (voir arrêt du 17 octobre 2018, iGrill, T‑822/17, non publié, EU:T:2018:693, point 21 et jurisprudence citée ; arrêt du 23 mai 2019, MicroGarden, T‑364/18, non publié, EU:T:2019:355, point 20).

21      C’est au regard de ces principes qu’il convient d’examiner les griefs soulevés par la requérante.

22      En premier lieu, il est constant que, en l’espèce, le public pertinent est constitué par le grand public ayant recours à des produits de grande consommation, à savoir des denrées alimentaires, dont le niveau d’attention est tout au plus moyen. En outre, il s’agit de consommateurs comprenant le terme « cucina », qui fait partie du vocabulaire de base de la langue italienne, et, partant, notamment de ceux résidant dans l’espace italianophone de l’Union européenne, ce qui, en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, suffit à appliquer le motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement (points 12 à 14 de la décision attaquée).

23      En deuxième lieu, force est de constater que la requérante n’a pas été en mesure d’établir que le mot « cucina », qui signifie « cuisine », est dépourvu de caractère descriptif des produits demandés, qui relèvent tous de la catégorie des denrées alimentaires de grande consommation. En effet, contrairement à ce que la requérante soutient, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que, du point de vue du public pertinent, l’élément verbal « cucina » faisait directement référence à la pièce de la maison dans laquelle il est habituel de cuisiner, de faire de la pâtisserie ou de préparer des plats à base de produits alimentaires comestibles, soit une « cuisine ». De plus, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que ladite chambre a estimé que cette perception était renforcée par l’élément figuratif du signe demandé, que ledit public associera immédiatement, grâce à son rapport direct avec le mot « cucina » qu’il encadre, à une casserole, c’est-à-dire un outil typiquement utilisé afin de cuisiner (points 14, 15, 19 et 21 de la décision attaquée).

24      En troisième lieu, c’est en vain que la requérante conteste que cette perception s’applique aux caractéristiques de l’ensemble des produits demandés relevant des classes 29 et 30. Eu égard à la signification très claire, rappelée au point précédent, de l’élément verbal « cucina », qui est renforcée par l’élément figuratif du signe demandé, c’est à bon droit que la chambre de recours a relevé que ledit signe était, du point de vue du public pertinent, descriptif d’une ou de plusieurs caractéristiques desdits produits, ainsi que de la destination de ceux-ci, au sens de la jurisprudence visée aux points 18 et 19 ci-dessus, en ce qu’il s’agit de denrées alimentaires qui sont toutes susceptibles d’une utilisation ou d’une préparation dans la cuisine, sous quelque forme que ce soit (voir points 16, 19 et 23 de la décision attaquée). À cet égard, la requérante n’est pas fondée à arguer que le mot « cucina » ne comporte pas en soi d’information relative au caractère comestible des produits demandés, dès lors qu’il suffit que le signe demandé, dans son ensemble, désigne clairement une destination, voire une caractéristique commune desdits produits, à savoir le fait qu’ils puissent faire l’objet d’une utilisation ou d’une préparation dans la cuisine, notamment, dans le cadre de la préparation d’un ou de plusieurs plats ou en lien avec celle-ci. Pour cette raison, elle ne saurait non plus valablement avancer que cette appréciation ne s’applique pas aux glaces, aux chips ou aux chocolats, soit des denrées alimentaires qui peuvent toutes être préparées et servies comme hors-d’œuvre, entrée ou dessert et sont donc directement liées aux activités effectuées dans la cuisine (voir point 17 de la décision attaquée).

25      En quatrième lieu, la requérante n’est pas fondée à faire valoir que le public pertinent n’associera pas immédiatement l’élément figuratif du signe demandé à une casserole, d’autant plus que cette perception s’impose à plus forte raison au regard de l’élément verbal « cucina » qu’il encadre. Il s’ensuit que l’hypothèse émise par la requérante selon laquelle le consommateur moyen achetant des denrées alimentaires contenues dans des emballages, sur lesquels le signe demandé est apposé, serait amené à percevoir un bonnet, une couronne stylisée, une pièce de puzzle ou un poids pour une ancienne balance est particulièrement peu plausible et doit être rejetée (voir points 22 et 23 de la décision attaquée). En outre, contrairement à ce qu’elle relève, cette association du signe demandé à une casserole n’est pas affectée par les éléments figuratifs simples le caractérisant, à savoir, notamment, la couleur rouge et la bordure dorée, dont il ne peut être prétendu qu’ils présentent un certain degré d’originalité, de prégnance ou de spécificité (voir point 14 de la décision attaquée). De même, ainsi que l’avance l’EUIPO, l’argument vague de la requérante selon lequel ces éléments conféreraient au signe demandé une forme fantaisiste ou induiraient le public pertinent à l’associer à une espèce de panneau ou de blason ne saurait non plus prospérer. Ainsi qu’il a déjà été exposé ci-dessus, le consommateur moyen normalement attentif distinguera clairement une casserole de par la seule forme du signe demandé et cette perception ne sera que confortée par la présence de l’élément verbal « cucina ».

26      Ces éléments suffisent à confirmer le bien-fondé de l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le signé demandé est descriptif des produits demandés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sans qu’il soit besoin d’apprécier le grief visant le constat superfétatoire de la chambre de recours selon lequel le signe demandé est également susceptible d’être compris par le consommateur moyen dans le sens d’« art de la table, de la préparation des plats », à l’instar de la cuisine française (point 18 de la décision attaquée).

27      Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

28      Au soutien du second moyen, la requérante avance, en substance, que, grâce à la conception spécifique de la marque demandée avec ses éléments verbal et figuratif et l’agencement des couleurs de ce dernier, en particulier la bordure dorée, le public pertinent la percevra comme une espèce de panneau ou de blason, qui est susceptible de faire fonction d’indication d’origine. À cet égard, il faudrait prendre en considération l’ensemble des modes d’usage potentiels ou probables de ladite marque, de même que les habitudes du secteur économique concerné en matière d’étiquetage, parmi lesquelles figure l’endroit où est habituellement apposée une marque en tant qu’indication d’origine. En effet, le consommateur serait habitué à trouver une marque dans la partie supérieure de l’emballage de produits alimentaires, généralement au milieu de cette partie, ce qui correspondrait à un mode d’usage courant et significatif, sinon le plus probable, dans l’industrie alimentaire.

29      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante et conclut au rejet du présent moyen.

30      Selon une jurisprudence constante, il suffit qu’un des motifs absolus de refus au sens de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 s’applique pour que le signe demandé ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne. En outre, un signe qui est descriptif des caractéristiques de produits au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 est, de ce fait, en principe, nécessairement dépourvu de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement (voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 33 et 46 et jurisprudence citée, et du 23 mai 2019, MicroGarden, T‑364/18, non publié, EU:T:2019:355, point 32 et jurisprudence citée).

31      Il résulte de ce qui précède que le second moyen ne saurait, en tout état de cause, être accueilli et que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

32      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Aldi GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.

Collins

Kreuschitz

De Baere

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.